Nations Unies

CCPR/C/103/D/1847/2008

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

8 décembre 2011

Français

Original: anglais

C omité des droits de l’homme

Communication no 1847/2008

Constatations adoptées par le Comité à sa 103e session,17 octobre-4 novembre 2011

Présentée par:

Miroslav Klain et Eva Klain (non représentés par un conseil)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

République tchèque

Date de la communication:

16 mars 2006 (date de la lettre initiale)

Références:

Décision prise par le Rapporteur spécial en application de l’article 97 du Règlement intérieur, communiquée à l’État partie le 19 décembre 2008 (non publiée sous forme de document)

Date de l’adoption des constatations:

1er novembre 2011

Objet:

Discrimination fondée sur la nationalité en ce qui concerne la restitution de biens

Questions de procédure:

Non-épuisement des recours internes et abus du droit de présenter une communication

Questions de fond:

Égalité devant la loi; égale protection de la loi

Article du Pacte:

26

Articles du Protocole facultatif:

3 et 5 (par. 2 b))

Le 1er novembre 2011, le Comité des droits de l’homme a adopté le texte ci-après en tant que constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif concernant la communication no 1847/2008.

[Annexe]

Annexe

Constatations du Comité des droits de l’homme au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (103e session)

concernant la

Communication no 1847/2008 **

Présentée par:

Miroslav Klain et Eva Klain (non représentéspar un conseil)

Au nom de:

Les auteurs

État partie:

République tchèque

Date de la communication:

16 mars 2006 (date de la lettre initiale)

Le Comité des droits de l’homme, institué en vertu de l’article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 1er novembre 2011,

Ayant achevé l’examen de la communication no 1847/2008 présentée par M. Miroslav Klain et Mme Eva Klain en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l’auteur de la communication et l’État partie,

Adopte ce qui suit:

Constatations au titre du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif

1.Les auteurs de la communication sont Miroslav Klain et Eva Klain, tous deux naturalisés américains et résidant aux États-Unis d’Amérique, nés le 25 août 1927 et le 24 février 1937, respectivement, en Tchécoslovaquie. Ils se déclarent victimes d’une violation par la République tchèque de l’article 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Ils ne sont pas représentés par un conseil.

Rappel des faits présentés par les auteurs

2.1Les auteurs et leurs deux enfants ont quitté la Tchécoslovaquie en novembre 1968 et se sont réfugiés aux États-Unis d’Amérique, dont ils ont obtenu la nationalité en 1978, perdant ainsi leur nationalité tchécoslovaque conformément au Traité relatif à la naturalisation de 1928. Comme les auteurs avaient quitté la Tchécoslovaquie sans autorisation, ils ont été condamnés par contumace, respectivement, à deux ans et demi et à un an d’emprisonnement et leurs biens ont été confisqués. Ils ont été entièrement réhabilités en 1990 mais n’ont pas pu récupérer leurs biens en raison de la loi no 87/1991 relative à la réparation. Les biens des auteurs comprennent des biens mobiliers ainsi que le logement familial no 11 et les parcelles nos 1872 et 1873/2, situées dans la zone cadastrale de Lhotka.

2.2Les auteurs n’ont pas pu demander la restitution de leurs biens en vertu de la loi tchèque no 87/1991 relative à la réparation par voie non judiciaire. Ils font valoir qu’ils ne se sont pas prévalus des voies de recours internes parce que, dans leur esprit, aucun tribunal n’ordonnerait la restitution de leurs biens tant qu’ils n’auraient pas recouvré leur nationalité tchèque. En conséquence de quoi, les auteurs ont demandé et finalement obtenu la citoyenneté tchèque vers la fin de l’année 2004. Ils affirment qu’aucun recours interne utile n’est disponible depuis la décision rendue par la Cour constitutionnelle en juin 1997.

Teneur de la plainte

3.Les auteurs affirment que la République tchèque a violé les droits consacrés à l’article 26 du Pacte en appliquant la loi no 87/1991, en vertu de laquelle il faut avoir la nationalité tchèque pour prétendre à la restitution de biens.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1En date du 3 juin 2009, l’État partie a fait parvenir ses observations sur la recevabilité et sur le fond. Il a également confirmé les faits tels qu’ils avaient été présentés par les auteurs, à savoir que ces derniers avaient perdu leur nationalité tchécoslovaque lorsqu’ils avaient pris la nationalité américaine, le 20 octobre 1978, et qu’ils avaient recouvré la nationalité tchèque par déclaration le 29 juin 2004.

4.2L’État partie affirme que la communication devrait être déclarée irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés, conformément à l’article 2 et au paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif. L’État partie rappelle que le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif a pour objet de donner aux États parties la possibilité de prévenir ou de corriger les violations du Pacte qui leur sont reprochées avant que ces griefs soient soumis à l’examen du Comité. L’État partie fait remarquer que les auteurs demandent la restitution de leurs biens confisqués plus de quarante ans après leur acquisition et que si les auteurs avaient saisi les tribunaux tchèques, ceux-ci auraient eu la possibilité d’examiner au fond leur plainte pour discrimination au regard de l’article 26 du Pacte. Il objecte que les auteurs n’ont pas fait usage des recours internes qui leur étaient ouverts, notamment en s’adressant aux différents échelons de l’appareil judiciaire jusqu’à la Cour constitutionnelle. Par conséquent, l’État partie estime que la communication devrait être déclarée irrecevable.

4.3L’État partie affirme en outre que la communication doit être déclarée irrecevable pour abus du droit de présenter une communication au titre de l’article 3 du Protocole facultatif. Il rappelle la jurisprudence du Comité selon laquelle le Protocole facultatif ne fixe pas de délai précis et un simple retard dans la présentation d’une communication ne constitue pas en soi un abus du droit de plainte, mais il objecte que les auteurs ont présenté leur communication le 16 mars 2006, soit, souligne-t-il, près de onze ans après l’expiration du délai prescrit par la loi relative à la réparation, qui, selon l’interprétation de la Cour constitutionnelle, est le 1er mai 1995. L’État partie fait valoir que ce retard n’est pas raisonnable car les auteurs n’ont apporté aucune explication valable. Il ajoute qu’il partage l’avis exprimé par un membre du Comité dans son opinion dissidente concernant des communications similaires mettant en cause la République tchèque, selon laquelle, en l’absence de définition explicite, dans le Protocole facultatif, de la notion d’abus du droit de présenter une communication, le Comité est appelé à définir lui-même les délais dans lesquels les communications doivent être soumises.

4.4Sur le fond, l’État partie rappelle la jurisprudence du Comité concernant l’article 26, selon laquelle une différence de traitement fondée sur des critères raisonnables et objectifs n’équivaut pas à une discrimination interdite au sens de l’article 26 du Pacte. Il affirme que l’auteur ne satisfaisait pas à la prescription légale relative à la nationalité, raison pour laquelle sa demande de restitution de biens n’était pas recevable conformément à la législation en vigueur. Enfin, l’État partie fait valoir que l’article 26 du Pacte n’entraîne pas une obligation pour l’État partie d’accorder réparation pour les injustices subies sous le régime précédent à une époque où le Pacte n’existait pas. Il objecte que son corps législatif devrait avoir une large marge de manœuvre pour décider quels éléments concrets des injustices passées doivent être réparés et quelles mesures doivent être prises à cette fin.

Commentaires des auteurs sur les observations de l’État partie

5.1En date du 16 juillet 2009, les auteurs ont présenté leurs commentaires à propos des observations de l’État partie sur la recevabilité et le fond. En ce qui concerne l’épuisement des recours internes, les auteurs affirment que du fait de la décision rendue par la Cour constitutionnelle, en juin 1997, le refus de restituer leurs biens aux personnes ayant perdu la nationalité tchèque est considéré comme légitime et donc aucune voie de recours utile n’est ouverte. Ils estiment en outre qu’ils auraient risqué de dépenser inutilement leur argent en frais d’avocat s’ils s’étaient pourvus en justice car, à leur connaissance, il n’est jamais arrivé qu’un tribunal ordonne la restitution de ses biens à un citoyen américain d’origine tchèque.

5.2En ce qui concerne la soumission tardive de la communication, les auteurs font valoir que, compte tenu du caractère définitif de la décision de la Cour constitutionnelle sur la question de la nationalité et de la restitution, ils étaient arrivés à la conclusion qu’ils ne pourraient obtenir réparation que s’ils recouvraient leur nationalité tchèque. C’est pourquoi ils ont demandé la citoyenneté tchèque, qu’ils ont obtenue vers la fin de l’année 2004. Les auteurs font remarquer que ce n’est qu’un an et quelques semaines après l’obtention de la nationalité tchèque qu’ils ont décidé de soumettre une communication au Comité. Ils contestent donc l’argument de l’État partie qui relève un retard de près de onze ans.

5.3En ce qui concerne le fond, les auteurs font valoir que leur droit à la pleine restitution de leurs biens a été violé du fait de l’application d’une loi qui constitue une discrimination fondée sur la nationalité. Ils estiment que la loi est illégale et anticonstitutionnelle.

Observations complémentaires de l’État partie

6.L’État partie affirme, sans donner de précisions, que le Comité devrait déclarer la communication irrecevable ratione temporis.

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

7.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

7.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément aux dispositions du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.3Le Comité a pris note de l’argument de l’État partie qui affirme que la communication doit être déclarée irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés. Le Comité note que l’État partie fait valoir que les auteurs ont décidé de ne pas se prévaloir des recours internes leur permettant de demander aux tribunaux d’examiner au fond leur plainte pour discrimination au regard de l’article 26 du Pacte. Toutefois, le Comité rappelle que seuls les recours qui sont à la fois disponibles et utiles dans un État partie doivent être épuisés. À ce sujet, le Comité réaffirme que, lorsque la jurisprudence de la plus haute juridiction d’un État sur la question objet du litige est telle que toute possibilité de succès d’un recours devant les juridictions internes est exclue, l’auteur n’est pas tenu d’épuiser les recours internes, qui sont de fait inutiles, aux fins du Protocole facultatif. Le Comité fait remarquer que, depuis que la Cour constitutionnelle de la République tchèque a rendu l’arrêt no 185/1997, la restitution des biens n’est possible que sur présentation d’une preuve de nationalité. La loi no 87/1991 relative à la réparation prescrivait une période pour le dépôt des demandes qui, telle qu’elle a été modifiée ultérieurement par la Cour constitutionnelle, a pris fin en 1995. Il en résulte que les auteurs ne disposaient pas de voie de recours après qu’ils eurent recouvré leur nationalité puisque, pour se prévaloir de la loi relative à la réparation, il aurait fallu qu’ils soient citoyens tchèques pendant une période précise, antérieure à 2004, date à laquelle ils ont obtenu la nationalité tchèque. Le Comité conclut par conséquent qu’aucun recours utile n’était ouvert aux auteurs.

7.4Le Comité a également pris note de l’argument de l’État partie qui fait valoir que la communication doit être déclarée irrecevable parce qu’elle constitue un abus du droit de présenter des communications en vertu de l’article 3 du Protocole facultatif. L’État partie relève que les auteurs ont attendu près de onze ans après la date limite fixée par l’interprétation de la Cour constitutionnelle de la loi relative à la réparation avant de soumettre leur communication au Comité. L’État partie estime par conséquent que, compte tenu du retard excessif avec lequel elle a été présentée au Comité et en l’absence d’explication valable, la communication devrait être déclarée irrecevable pour abus du droit de présenter une communication. Cependant, les auteurs expliquent le retard par le fait qu’ils ont engagé une procédure pour recouvrer la nationalité tchèque, qui est selon eux une condition de la restitution de leurs biens. Les auteurs font ainsi valoir qu’ils ont saisi le Comité un an et quelques semaines après avoir recouvré la citoyenneté tchèque en 2004, et non avec un retard de près de onze ans comme l’indique l’État partie. Le Comité note que l’État partie calcule le retard à partir de 1995, année qui correspond au délai imparti comme suite à la décision de la Cour constitutionnelle pour les citoyens tchèques souhaitant se prévaloir de la loi relative à la réparation pour obtenir la restitution de leurs biens.

7.5Le Comité fait observer que le Protocole facultatif ne fixe pas de délai pour la présentation des communications et que le simple fait d’avoir tardé à lui en adresser une ne constitue pas en soi, sauf circonstances exceptionnelles, un abus du droit de présenter une communication. Il est évident que s’agissant de la détermination de ce qui constitue un retard excessif, chaque affaire doit être examinée en fonction des faits qui lui sont propres. Dans le cas présent, les auteurs ont été privés de leur nationalité tchèque lorsqu’ils ont fui la Tchécoslovaquie pour les États-Unis d’Amérique en 1968. Entre la date d’entrée en vigueur des lois relatives à la réparation et l’année 2004, ils étaient donc citoyens américains. Les auteurs font valoir que s’ils ont tardé à soumettre la communication c’est en raison de ce qu’ils savaient et comprenaient de la situation − perception que ne semble pas contester l’État partie − c’est-à-dire qu’ils n’avaient aucun espoir d’obtenir réparation s’ils ne recouvraient pas leur nationalité tchèque, ce qu’ils ont fait en 2004.

7.6Le Comité fait observer qu’en vertu du nouvel article 96 c) de son règlement intérieur, qui s’applique à toutes les communications reçues après le 1er janvier 2012, il est tenu de s’assurer que la communication ne constitue pas un abus du droit de présenter une communication. En principe, un abus du droit de présenter une communication ne peut pas être invoqué pour fonder une décision d’irrecevabilité ratione temporis au motif de la présentation tardive de la plainte. Toutefois, il peut y avoir un abus du droit de plainte si la communication est soumise cinq ans après l’épuisement des recours internes par son auteur ou, selon le cas, trois ans après l’achèvement d’une autre procédure internationale d’enquête ou de règlement, sauf s’il existe des raisons justifiant le retard compte tenu de toutes les circonstances de l’affaire. Pour le moment, le Comité suit sa jurisprudence qui établit qu’une communication peut constituer un abus lorsqu’elle est présentée après un délai exceptionnellement long, sans raisons suffisantes pour justifier ce retard. En l’espèce, le Comité considère que le retard constaté, compte tenu des actions engagées par les auteurs pour recouvrer la nationalité tchèque de façon à pouvoir faire valoir leurs droits et bien que les auteurs n’aient engagé aucune procédure interne en tant que citoyens tchèques, ne constitue pas un abus du droit de présenter une communication en vertu de l’article 3 du Protocole facultatif.

7.7Le Comité note en outre que l’État partie conteste la recevabilité de la communication ratione temporis. Le Comité rappelle sa jurisprudence et considère que même si la confiscation s’est produite avant l’entrée en vigueur du Pacte et du Protocole facultatif pour la République tchèque, la loi qui exclut les demandes émanant de personnes qui n’ont pas la nationalité tchèque continue de produire des effets depuis l’entrée en vigueur du Protocole facultatif pour la République tchèque, ce qui pourrait entraîner une discrimination, en violation de l’article 26 du Pacte.

7.8En l’absence de toute autre objection à la recevabilité, le Comité déclare la communication recevable en ce qu’elle peut soulever des questions au regard de l’article 26 du Pacte, et il procède donc à son examen au fond.

Examen au fond

8.1Conformément au paragraphe 1 de l’article 5 du Protocole facultatif, le Comité des droits de l’homme a examiné la présente communication en tenant compte de toutes les informations qui lui ont été communiquées.

8.2Le Comité doit déterminer si l’application aux auteurs de la loi no 87/1991 relative à la réparation par voie non judiciaire a constitué une discrimination contraire à l’article 26 du Pacte. Il rappelle sa jurisprudence selon laquelle les différences de traitement ne sauraient toutes être réputées discriminatoires au regard de l’article 26. Un traitement différent qui est compatible avec les dispositions du Pacte et qui est fondé sur des motifs objectifs et raisonnables ne constitue pas une discrimination interdite au sens de cet article.

8.3Le Comité rappelle ses constatations dans l’affaire Des Fours Walderode, dans lesquelles il a conclu que l’établissement dans la loi d’un critère de nationalité en tant que condition nécessaire pour obtenir la restitution d’un bien confisqué par les autorités établissait une distinction arbitraire et par conséquent discriminatoire entre des individus qui étaient tous également victimes des confiscations antérieures, et constituait une violation de l’article 26 du Pacte. Le Comité estime que le précédent établi dans l’affaire précitée ainsi que dans de nombreuses autres s’applique également aux auteurs de la présente communication, et conclut que le fait d’exiger de ceux-ci qu’ils remplissent la condition de nationalité prévue par la loi no87/1991 constitue une violation des droits garantis à l’article 26 du Pacte.

9.Le Comité des droits de l’homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l’article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, constate que les faits dont il est saisi font apparaître une violation de l’article 26 du Pacte.

10.En vertu du paragraphe 3 a) de l’article 2 du Pacte, l’État partie est tenu d’assurer aux auteurs un recours utile, notamment sous la forme d’une indemnisation si les biens ne peuvent pas être restitués. Le Comité engage de nouveau l’État partie à revoir sa législation de façon à garantir que toutes les personnes bénéficient à la fois de l’égalité devant la loi et de l’égale protection de la loi.

11.Étant donné qu’en adhérant au Protocole facultatif l’État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s’il y a eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l’article 2 du Pacte, il s’est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu’une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l’État partie, dans un délai de cent quatre-vingts jours, des renseignements sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations. L’État partie est également prié de rendre publiques les présentes constatations, de les faire traduire dans les langues officielles et de les diffuser largement.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]

Appendice

Opinion individuelle (dissidente) de M. Krister Thelin

La majorité des membres du Comité a conclu que la communication était recevable. Je ne souscris pas à cette conclusion. À mon avis, la communication aurait dû être déclarée irrecevable et la décision du Comité à ce sujet aurait dû être formulée comme suit:

7.1Avant d’examiner toute plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l’homme doit, conformément à l’article 93 de son règlement intérieur, déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

7.2Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire en vertu du paragraphe 2 a) de l’article 5 du Protocole facultatif, que la même affaire n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

7.3Le Comité a pris note de l’argument de l’État partie qui affirme que la communication doit être déclarée irrecevable au motif que les recours internes n’ont pas été épuisés conformément à l’article 2 lu conjointement avec le paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif, étant donné que les auteurs n’ont pas saisi les autorités nationales de la question.

7.4Le Comité note que le seul argument avancé par les auteurs au sujet de l’épuisement des recours internes est que comme la décision rendue par la Cour constitutionnelle en juin 1997 tranche définitivement la question de la nationalité et de la restitution, il est vain d’épuiser les recours internes. Or, les auteurs eux-mêmes indiquent qu’ils ont obtenu la nationalité tchèque en 2004, manifestement pour faire valoir leurs revendications puisqu’ils ont affirmé n’avoir aucun espoir d’obtenir réparation s’ils ne recouvraient pas leur nationalité. Toutefois, au vu des informations disponibles, aucune plainte de cette nature n’a été déposée devant un quelconque tribunal tchèque ou une autre autorité nationale; il s’ensuit que les auteurs n’ont jamais soulevé, devant aucun tribunal national, la question de la discrimination dont ils auraient fait l’objet en ce qui concerne la restitution de leurs biens.

7.5Le Comité conclut par conséquent, pour les raisons énoncées au paragraphe précédent, que la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif pour non-épuisement des recours internes.

7.6Compte tenu de cette conclusion, le Comité n’estime pas nécessaire de reprendre les arguments de l’État partie relatifs à l’abus du droit de soumettre des communications de la part des auteurs et à l’irrecevabilité de la communication ratione temporis.

8.En conséquence, le Comité des droits de l’homme décide:

a) Que la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 b) de l’article 5 du Protocole facultatif;

b) Que la présente décision sera communiquée à l’État partie et aux auteurs de la communication.

(Signé) Krister Thelin

[Fait en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel du Comité à l’Assemblée générale.]