Pacte international relatif aux droits civilset politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/C/MLI/2003/2

13 janvier 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Deuxième rapport périodique

MALI*

[3 janvier 2003]   

République du Mali

Un peuple − Un but − Une foi

__________

Deuxième rapport périodique sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Décembre 2002   

TABLE DES MATIÈRES

Page

I.INTRODUCTION6

Aperçu général sur le Mali6

Les régimes politiques depuis l’indépendance7

1.La première République7

2.Le régime du Comité militaire de libération nationale7

3.La deuxième République8

4.La transition démocratique8

5.La troisième République9

II.LES INSTITUTIONS DE LA RÉPUBLIQUE9

1.Le Président de la République9

2.Le Gouvernement10

3.L’Assemblée nationale10

4.La Cour suprême10

5.La Cour constitutionnelle11

6.La Haute Cour de justice12

7.Le Haut Conseil des collectivités territoriales12

8.Le Conseil économique, social et culturel (CESC)12

III.SYSTÈME JUDICIAIRE − ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT13

1.Les cours d’appel14

2.Les tribunaux de première instance14

3.Les justices de paix à compétence étendue15

4.Les tribunaux de commerce15

5.Les tribunaux de travail15

6.Les tribunaux administratifs15

7.Les tribunaux pour enfants15

8.Les tribunaux militaires16

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Page

9.Le Ministère de la justice16

10.L’Administration pénitentiaire17

11.Minorité pénale et juridictions pour mineurs17

a)Minorité pénale17

b)Juridictions pour mineurs18

IV.SIGNATURE ET MISE EN ŒUVRE DU PACTE NATIONAL19

V.DROITS DE LA PERSONNE 20

1.Droit à l’égalité20

a)Égalité devant les tribunaux et cours de justice20

b)L’assistance judiciaire21

2.Le droit à la non‑discrimination22

a)Condamnation de toute propagande raciale22

b)L’étranger établi au Mali23

3.Le droit à la vie et à la protection de la personne humaine23

4.La peine de mort25

5.Le droit au travail25

6.Les libertés25

a)La liberté de circulation26

b)La liberté de pensée, de conscience et de religion26

c)La liberté d’expression27

d)La liberté de presse27

e)Le droit de réunion28

f)Liberté d’association, droit syndical et droit de grève 28

7.La reconnaissance des langues nationales30

8.Droits de la famille31

TABLE DES MATIÈRES (suite)

Page

VI.LES DROITS POLITIQUES32

1.Formation des partis politiques33

2.L’égalité entre les partis politiques33

3.La transparence des procédures électorales34

a)La Commission électorale nationale indépendante34

b)La Délégation générale aux élections34

c)Le Ministère chargé de l’administration territoriale34

4.Les élections générales de 200235

VII.AUTRES MESURES D’APPLICATION36

1.Le Médiateur de la République36

2.Statut de l’opposition37

3.Comité national de l’égal accès aux médias d’État37

4.Conseil supérieur de la Communication37

VIII.CONCLUSION37

ANNEXE: RATIFICATION DES PRINCIPAUX ACCORDS INTERNATIONAUX 38

I. INTRODUCTION

Le mardi 7 avril 1981, à New York, a été présenté le rapport initial de la République du Mali sur la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Les questions qu’il avait suscitées après l’exposé ont porté sur le régime de la deuxième République, sa Constitution de 1974, son parti unique, le fonctionnement de la justice et les libertés fondamentales.

Le présent document a pour objet de présenter le deuxième rapport périodique du Mali.

Aperçu général sur le Mali

Pays continental situé dans l’hémisphère Nord du continent, entre les 10e et 20e degrés de latitude Nord, le Mali est l’un des plus grands pays d’Afrique de l’Ouest. Il couvre une superficie de 1 241 238 km2. Véritable espace de convergence ethnique, sa population évaluée à 9 810 912 habitants (recensement général de 1998) est composée de musulmans, chrétiens et animistes.

Le territoire malien a été le berceau de grands empires (Ghana, Mali, Songhoï) et d’illustres royaumes (Bambara, Sénoufo, Peuhl, Toucouleur) qui ont su forger l’identité et la culture du peuple malien, résultat d’un profond brassage.

Le «Sinankunya», ou alliance à plaisanterie, est à la fois l’un des traits saillants de la société malienne et le socle de l’unité nationale. Il permet à deux voire plusieurs ethnies, races ou communautés de se taquiner avec amabilité, toute chose qui permet de pacifier les rapports sociaux grâce à l’intercession, en cas de conflit notamment.

C’est fort d’une telle tradition que le Mali célèbre le 10 décembre de chaque année la Déclaration universelle des droits de l’homme à travers l’institutionnalisation de l’exercice de participation citoyenne que constitue l’Espace d’interpellation démocratique (EID).

La population malienne est inégalement répartie sur le territoire national. Les trois quarts de sa superficie (partie septentrionale) abritent moins de 10 % de la population totale. Les densités varient entre 0,4 habitant au km2 à Kidal, au nord, et 18,2 habitants au km2 à Sikasso, au sud. Le district de Bamako, la plus grande agglomération du pays, renferme un dixième de la population totale, avec une densité de 4 032,9 habitants au km2.

Au plan socioéconomique, le Mali, après plusieurs années d’efforts de réforme et d’ajustement macroéconomique, n’a toujours pas atteint le niveau de développement qui permet de répondre aux besoins essentiels de la majorité des Maliens.

En effet, le taux de croissance économique n’a été en moyenne que de 5 % sur la période 1994‑2000, pourtant caractérisée par des conditions particulièrement favorables.

Les taux de scolarisation primaire et d’alphabétisation observés en 2000 sont respectivement de 58 % et 35 %. Le taux d’alphabétisation de 35 % est faible comparé respectivement à la moyenne de l’Afrique au sud du Sahara, qui est de 57 %, et à la moyenne de l’ensemble des pays les moins avancés, qui se situe à 54 %.

L’accessibilité géographique aux services de santé (moins de 35 % dans un rayon de 5 km) et la disponibilité des médicaments essentiels demeurent faibles, et près de la moitié de la population n’a pas encore accès à l’eau potable.

Au total, la pauvreté touche aujourd’hui près de deux tiers (64 %) de nos concitoyens, avec une forte localisation dans le milieu rural.

Ces indicateurs prouvent à suffisance la persistance du sous-développement de notre pays.

Les régimes politiques depuis l’indépendance

Le Mali a connu les régimes politiques suivants:

1. La première République: 1960 ‑1968

La République du Mali vit le jour le 22 septembre 1960. Ce régime a tenté une expérience socialiste, marquée notamment par:

L’émergence d’un parti politique dominant, l’Union soudanaise−RDA;

Le retrait de la zone franche et la création du franc malien, gage de notre souveraineté monétaire;

La création de nombreuses sociétés et entreprises d’État pour assurer le ravitaillement des populations en produits de première nécessité, et l’intervention de l’État dans les activités de production, de transformation, de commercialisation et de distribution;

La réforme du système éducatif en vue de suppléer au manque de techniciens et de cadres.

2. Le régime du Comité militaire de libération nationale: 1968 ‑1979

Un coup d’État militaire intervint le 19 novembre 1968 et mit fin à la première République. Le pays est alors dirigé par un Comité militaire de libération nationale (CMLN).

Cette période est marquée par deux phases distinctes:

a)Première phase: 1968‑1974 − Régime militaire de fait

Ce régime a fonctionné en l’absence de toute constitution, celle du 22 septembre 1960 ayant été abrogée par le CMLN lors du coup d’État militaire.

Le CMLN, composé de 14 officiers, assurait les fonctions législatives.

b)Deuxième phase: 1974‑1979 − Processus de retour à une vie constitutionnelle normale

Le référendum constitutionnel organisé en 1974 a abouti à l’adoption de la Constitution du 2 juin 1974, qui consacre l’Union démocratique du peuple malien (UDPM) comme parti unique.

Mais les antagonismes au sein de l’équipe dirigeante sur la question du retour à une vie constitutionnelle normale aboutirent aux événements du 28 février 1978, marqués par l’arrestation de nombreuses personnes dont notamment certains membres influents du CMLN.

Dès lors, ce processus de retour à une vie constitutionnelle normale devenait réalité.

3. La deuxième République: 1979 ‑1991

La Constitution du 2 juin 1974 marque la naissance de la deuxième République. Toutefois, elle ne sera effective qu’avec la mise en place le 31 mars 1979 de l’UDPM, parti constitutionnel qui prône «l’édification d’une économie nationale indépendante et planifiée».

Dans ce cadre, le Gouvernement a entamé avec le FMI et la Banque mondiale un certain nombre de mesures économiques tendant au désengagement progressif de l’État des activités de production, de transformation, de commercialisation, de distribution, et à l’organisation du secteur privé afin de prendre le relais.

Les conséquences des programmes d’ajustement structurel, notamment la fermeture de nombreuses entreprises publiques, les licenciements massifs de travailleurs, la suppression de la bourse aux élèves de l’enseignement secondaire, l’institution du concours de recrutement à la fonction publique, et l’arrêt momentané des recrutements des agents de l’État ainsi que la baisse du pouvoir d’achat consécutive au retour au franc CFA en 1984, ont ouvert la voie à des revendications sociales puis politiques.

Pour y faire face, le Gouvernement entreprit de procéder à une certaine ouverture politique marquée par l’avènement de la liberté de la presse, la liberté d’association, ainsi que le droit de manifester.

Malgré cette ouverture, les manifestations sociales et politiques s’amplifièrent et aboutirent au soulèvement populaire de mars 1991.

4. La transition démocratique: 1991 ‑1992

Le 26 mars 1991, un groupe de militaires, en association avec la Coordination des associations et organisations démocratiques, crée le Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP), chargé du pouvoir législatif et dont le Président assumait les fonctions de chef de l’État.

Le pouvoir exécutif était exercé par un Gouvernement dirigé par un premier ministre.

Conformément à leur engagement de mener le pays vers une démocratie pluraliste, les Autorités de la transition organisèrent en juillet‑août 1991 une Conférence nationale souveraine qui adopta les textes fondamentaux devant régir la troisième République: la Constitution, la Charte des partis et la loi électorale.

Suite à la Conférence nationale, furent organisées en 1992 les consultations électorales suivantes:

Un référendum constitutionnel qui aboutit à l’approbation de la Constitution du 25 février 1992.

Des élections municipales, législatives et présidentielles.

C’est dans ce contexte qu’est intervenue la signature, le 11 avril 1992, du Pacte national entre le Gouvernement et le Bureau de coordination des mouvements rebelles du nord.

5. La troisième République: 1992 à nos jours

L’investiture du Président issu des élections multipartites intervint le 8 juin 1992 et marque ainsi le démarrage effectif des institutions de la troisième République.

La troisième République a fait de la défense et du respect des droits de l’homme son credo. En effet, la Constitution du 25 février 1992, dans son préambule, réaffirme notre attachement à la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948 et à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981.

Par ailleurs, les 24 premiers articles de la Constitution sont consacrés aux droits de l’homme. Ce dispositif constitutionnel est complété par une série de textes législatifs et réglementaires destinés à définir le contenu de ces droits et à réglementer leurs conditions d’exercice.

Soulignons également que l’Université du Mali et l’UNESCO ont signé le 13 juillet 2000 un accord portant création d’une chaire UNESCO pour la promotion de la culture de la paix et des droits de l’homme, et dont les objectifs sont, entre autres, la promotion d’un système intégré d’activités de recherche, de formation, d’information et de documentation en matière de culture de la paix et de droits de l’homme, ainsi que de démocratie et de tolérance.

Le présent rapport, présenté en application des dispositions de l’article 40 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, porte sur les institutions de la République, l’organisation et le fonctionnement du système judiciaire, ainsi que les modalités de mise en œuvre des droits civils et politiques au Mali.

II. LES INSTITUTIONS DE LA RÉPUBLIQUE

La Constitution du 25 février 1992 pose les fondements d’un État de droit, cadre d’expression des libertés caractérisé par l’ouverture démocratique, et institue un régime semi‑présidentiel dont les institutions sont citées en son article 25: le Président de la République; le Gouvernement; l’Assemblée nationale; la Cour suprême; la Cour constitutionnelle; la Haute Cour de justice; le Haut Conseil des collectivités territoriales; le Conseil économique, social et culturel. Toutes ces institutions ont été mises en place.

La Constitution pose sans ambiguïté le principe de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire.

1. Le Président de la République

Élu pour cinq ans et rééligible une seule fois au suffrage universel direct et au scrutin majoritaire à deux tours, le Président de la République incarne l’unité nationale et veille au fonctionnement régulier des pouvoirs publics. Il est le gardien de la Constitution et le garant de l’indépendance nationale, de l’intégrité du territoire, du respect des traités et des accords internationaux (art. 29 de la Constitution).

Il nomme le Premier Ministre et met fin à ses fonctions sur présentation par celui-ci de la démission du Gouvernement.

Sur proposition du Premier Ministre, il nomme les autres membres du Gouvernement et met fin à leurs fonctions (art. 38).

Il est le chef suprême des armées (art. 44) et le Président du Conseil supérieur de la magistrature (art. 45).

2. Le Gouvernement

Responsable devant l’Assemblée nationale, le Gouvernement (art. 53 à 58) détermine et conduit la politique de la nation. Il dispose de l’Administration et des forces armées. Il est dirigé par un premier ministre qui coordonne l’action des différents ministres.

3. L’Assemblée Nationale

Aux termes de l’article 26 de la Constitution, «la souveraineté appartient au peuple tout entier, qui l’exerce par ses représentants ou par voie de référendum».

L’Assemblée nationale représente le pouvoir législatif. Elle constitue l’unique chambre du Parlement malien et est aujourd’hui composée de 147 députés issus de partis politiques ou d’indépendants. Les députés sont élus pour cinq ans au suffrage universel direct.

Dans son travail quotidien, l’Assemblée nationale doit veiller au respect des droits de l’homme en émettant un avis sur les textes qui lui sont soumis pour adoption. Il est important de souligner que les parlementaires maliens, qui sont attentifs aux questions des droits de l’homme, ont depuis juillet 1998 mis en place une Commission des droits de l’homme.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale peut mettre en cause la responsabilité du Gouvernement par le vote d’une motion de censure (art. 78 de la Constitution). Et, aux termes de l’article 79: «lorsque l’Assemblée nationale adopte une motion de censure ou lorsqu’elle désapprouve le programme ou une déclaration de politique générale du Gouvernement, le Premier Ministre doit remettre au Président de la République la démission du Gouvernement».

4. La Cour suprême

Plus haute instance judiciaire du pays, la Cour suprême est chargée d’assurer l’unité du droit national par l’unité de la jurisprudence. Elle juge uniquement en droit. Elle se divise en trois sections qui sont: la Section judiciaire, la Section administrative et la Section des comptes.

a)La Section Judiciaire est l’arbitre suprême de toutes les décisions rendues en matière civile, sociale et criminelle par les juridictions de la République. Elle contrôle la légalité des décisions contre lesquelles il n’existe pas d’autres voies ordinaires de recours. En outre, elle se prononce notamment sur les demandes de renvoi d’une juridiction à une autre pour cause de suspicion légitime ou de sûreté publique, les règlements de juges et les demandes de prise à partie.

b)La Section Administrative est le juge d’appel de droit commun de toutes les décisions rendues en premier ressort par les tribunaux administratifs. Elle est compétente pour connaître en premier et dernier ressort des recours, entre autres:

Pour excès de pouvoir visant les décrets et les arrêtés ministériels ou interministériels;

Visant les décisions rendues par les organismes administratifs à caractère juridictionnel.

c)La Section des comptes juge les comptes des comptables publics, vérifie la gestion financière des agents chargés de l’exécution du budget national et des autres budgets qui les assujettissent aux même règles, contrôle les comptabilités matières, examine la gestion financière.

La Cour suprême en sections réunies statue en qualité de tribunal des conflits en cas de conflit de compétence d’attribution entre les juridictions judiciaires et administratives.

5. La Cour constitutionnelle

Selon l’article 85, alinéa 1, de la Constitution, «la Cour constitutionnelle est juge de la constitutionnalité des lois et elle garantit les droits fondamentaux de la personne humaine et les libertés publiques. Elle est l’organe régulateur du fonctionnement des institutions et de l’activité des pouvoirs publics».

Elle est composée de neuf membres, dont trois désignés par le Président de la République, trois par le Président de l’Assemblée nationale, et trois par le Conseil supérieur de la magistrature.

La Cour est obligatoirement saisie par le Premier Ministre pour les lois organiques avant leur promulgation. Le Président de la République, le Premier Ministre, le Président de l’Assemblée nationale ou un dixième des députés, le Président du Haut Conseil des collectivités territoriales ou un dixième des conseillers nationaux et le Président de la Cour suprême peuvent la saisir pour les autres catégories de lois avant leur promulgation.

La troisième attribution de la Cour concerne le contrôle de «la régularité des élections présidentielles, législatives, et des opérations de référendum dont elle proclame les résultats» (art. 86 de la Constitution).

En ces matières, elle est saisie par tout candidat, tout parti politique ou tout préfet. C’est ainsi qu’elle annula, suivant arrêt CCL 97-046 du 25 avril 1997, les élections législatives du 13 avril 1997, motif pris des anomalies ayant émaillé le déroulement du scrutin.

Par arrêts no 02‑137/CC‑EP du 23 mai 2002 et no 02‑144/CC‑EL du 9 août 2002, la Cour constitutionnelle, conformément à ses attributions, a proclamé respectivement les résultats définitifs de l’élection du Président de la République et les résultats définitifs des élections législatives. C’est ainsi que la Cour, conformément à la loi électorale, a eu à statuer sur 47 requêtes pour le deuxième tour de l’élection du Président de la République et 505 requêtes pour le deuxième tour des élections législatives.

6. La Haute Cour de justice

Instituée par l’article 95 de la Constitution, cette cour est compétente pour juger le  Président de la République et les ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée nationale pour haute trahison ou en raison des faits qualifiés de crimes ou délits commis dans l’exercice de leurs fonctions, ainsi que leurs complices en cas de complot contre la sûreté de l’État.

La Cour est liée par la définition des crimes et délits et par la détermination des peines résultant des lois pénales en vigueur à l’époque des faits compris dans la poursuite.

La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des deux tiers des députés composant l’Assemblée nationale.

7. Le Haut Conseil des collectivités territoriales

La Conférence nationale a opté pour une politique de décentralisation. Ainsi, la Constitution du 25 février 1992, dans ses dispositions (art. 97 et 98), a posé les premiers jalons de cette politique de décentralisation.

La loi 93‑008/AN‑RM du 11 février 1993 déterminant les conditions de la libre administration des collectivités territoriales a été en effet votée pour concrétiser cette politique de participation directe des citoyens dans les affaires publiques.

Cette politique de décentralisation fut couronnée par la mise en place en 2002 du Haut Conseil des collectivités territoriales, septième institution consacrée par la Constitution de 1992.

Ladite Constitution dispose, en son article 99, que le Haut Conseil des collectivités territoriales a pour mission d’étudier et de donner un avis motivé sur toute politique de développement local et régional. Il peut faire des propositions au Gouvernement pour toute question concernant la protection de l’environnement et l’amélioration de la qualité de la vie des citoyens à l’intérieur des collectivités.

Aussi, le Gouvernement est‑il tenu de saisir pour avis le Haut Conseil des collectivités territoriales pour toutes actions concernant les domaines ci‑dessus cités.

Les membres de cette institution portent le titre de conseillers nationaux et sont élus pour cinq ans au suffrage indirect. Comparables aux sénateurs dans le système bicaméral, ils assurent la représentation des collectivités territoriales de la République.

L’Assemblée nationale et le Haut Conseil des collectivités territoriales peuvent provoquer une session commune des députés et des conseillers nationaux.

8. Le Conseil économique, social et culturel (CESC)

La Constitution, aux termes de son article 107, confère au Conseil économique, social et culturel un rôle éminemment important dans la recherche de solutions aux problèmes de développement économique, social et culturel de la nation.

Il participe à toute commission d’intérêt national à caractère économique, social et culturel. Il collecte, rédige à l’attention du Président de la République, du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, le Recueil annuel des attentes, des besoins et des problèmes de la société civile avec des orientations et des propositions. Le Conseil économique, social et culturel est obligatoirement consulté sur tout projet de loi des finances, tout projet de plan ou de programme économique, social et culturel, ainsi que sur toutes les dispositions législatives à caractère fiscal, économique, social et culturel. Le Gouvernement et l’Assemblée nationale ont obligation, quand ils sont saisis, de donner une suite aux avis et rapports formulés par le Conseil, dans un délai de trois mois pour le Gouvernement, et avant la fin de la session en cours pour l’Assemblée nationale. Ainsi, la Constitution fait du Conseil économique, social et culturel:

Une assemblée constitutionnelle: ce qui garantit son indépendance vis-à-vis des pouvoirs législatif et exécutif;

Une assemblée consultative qui donne des avis aux pouvoirs publics en matière économique, sociale et culturelle;

Une assemblée représentative, principalement composée des membres désignés par les organisations socioprofessionnelles.

Au point de vue de sa composition, on peut noter qu’aux termes de la Constitution sont membres du Conseil économique, social et culturel: les représentants des syndicats, des associations, des groupements socioprofessionnels et les représentants des Maliens de l’extérieur.

Le nombre des membres du Conseil est de 58. Ils sont tous élus pour cinq ans. Il y a lieu de noter que le CESC comporte des membres associés. Ce sont des cadres supérieurs de l’État ayant une compétence établie en matière économique, sociale et culturelle. Ils sont nommés par décret pris en Conseil des ministres. Leur nombre est fixé à 10 au maximum.

Institution consultative à l’écoute du pays réel, le CESC joue à la fois le rôle de baromètre et de boussole à toute stratégie de développement. Il est un instrument privilégié par lequel les populations voient leur aspirations prises en compte.

III. SYSTÈME JUDICIAIRE − ORGANISATION ET FONCTIONNEMENT

Contrairement aux Constitutions de 1960 et 1974 qui ne reconnaissaient qu’une autorité judiciaire, la Constitution du 25 février 1992 consacre l’existence d’un pouvoir judiciaire.

En effet, soucieux de l’indépendance de la justice, gage de protection des droits des citoyens, le constituant reconnaît que «le pouvoir judiciaire est indépendant des pouvoirs exécutif et législatif».

Exercé par la Cour suprême et les autres cours et tribunaux, le pouvoir judiciaire est «le gardien des libertés… Il veille au respect des droits et des libertés… Il est chargé d’appliquer dans le domaine qui lui est propre les lois de la République» (art. 81 de la Constitution). En citant la Cour suprême parmi les institutions de la République, la Constitution accorde une place de choix au pouvoir judiciaire (art. 81 et 82) et à ladite cour (art. 25, 37, 83 et 84).

Corollaire de l’indépendance du pouvoir judiciaire, le principe de l’inamovibilité des magistrats du siège est consacré par l’article 82. En vertu de cette disposition constitutionnelle, l’ordonnance no 92‑043/P‑CTSP du 5 juin 1992 portant statut de la magistrature prévoit et organise les garanties et l’indépendance du pouvoir judiciaire. Le Conseil supérieur de la magistrature, institué par l’article 82 de la Constitution et présidé par le chef de l’État, est seul habilité à décider des nominations et des mutations des magistrats.

Sur le territoire malien, la justice est rendue par:

Une Cour suprême;

Trois cours d’appel;

Seize tribunaux de première instance;

Quarante‑deux justices de paix à compétence étendue;

Trois tribunaux de commerce;

Onze tribunaux de travail;

Trois tribunaux administratifs;

Huit tribunaux pour enfants;

Trois tribunaux militaires.

1. Les cours d’appel

Les cours d’appel connaissent des appels interjetés contre les décisions rendues en première instance. Chaque cour d’appel comprend au moins une chambre civile, une chambre commerciale, une chambre sociale, une chambre correctionnelle, une chambre d’accusation.

Elles jugent les affaires criminelles en formation de cour d’assises avec le concours d’assesseurs choisis au sein des populations.

Dans toutes les matières, la cour d’appel statue en présence du Procureur général ou son représentant, avec l’assistance d’un greffier.

2. Les tribunaux de première instance

Les tribunaux de première instance connaissent en premier et dernier ressort des actions civiles et coutumières portant sur des montants qui n’excèdent pas 100 000 francs CFA. Les affaires qui portent sur des montants plus élevés sont susceptibles d’appel.

Ils statuent également en matière correctionnelle. Dans les localités où il n’existe pas de tribunal de commerce, ces juridictions connaissent des matières attribuées au juge du commerce par la loi.

3. Les justices de paix à compétence étendue

Une particularité de l’organisation judiciaire malienne réside dans le fait qu’au sein de la justice de paix un seul juge cumule les fonctions de poursuite, d’instruction et de jugement, alors qu’un tribunal de première instance comprend au moins un président, un procureur et un juge d’instruction.

Les justices de paix à compétence étendue ont la même compétence matérielle que les tribunaux de première instance.

4. Les tribunaux de commerce

Les tribunaux de commerce connaissent des contestations relatives aux transactions entre commerçants, des contestations relatives aux actes de commerce, des faillites, liquidations et règlements judiciaires.

Les tribunaux de commerce sont composés d’un président et de quatre juges consulaires, dont deux titulaires et deux suppléants. Ces derniers sont élus par leurs pairs.

Le Mali a ratifié le 17 avril 1997 le traité relatif à l’Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA). Ceci a donné naissance à une nouvelle structure judiciaire commerciale: la Cour commune de justice et d’arbitrage, qui prend déjà en charge les attributions qui étaient dévolues à la Cour suprême en matière du droit des affaires.

5. Les tribunaux de travail

Les tribunaux de travail statuent sur les différends entre les travailleurs et leur employeur, ou les différends relatifs aux conventions collectives.

Les tribunaux de travail sont composés d’un président et de deux assesseurs, dont un représente les travailleurs et l’autre les employeurs.

6. Les tribunaux administratifs

Les tribunaux administratifs constituent des juridictions de première instance en matière administrative et s’occupent des litiges opposant les citoyens à l’État, exception faite de ceux qui relèvent de la section administrative de la Cour suprême. Ils statuent aussi sur les recours en annulation pour excès de pouvoir dirigés contre les décisions des autorités administratives régionales et locales, ainsi que sur les recours en interprétation et en appréciation des décisions émanant des mêmes autorités. Les décisions des juridictions administratives sont collégiales.

7. Les tribunaux pour enfants (art. 10, al. 2 et 3; art. 14, al. 4, du Pacte)

Les tribunaux pour enfants statuent sur les infractions commises par les mineurs, la majorité pénale étant fixée à 18 ans en République du Mali.

À ce niveau, l’accent est davantage accordé aux mesures de rééducation et de protection avec le concours d’éducateurs sociaux plutôt qu’aux sanctions de pure répression. Les mineurs condamnés purgent leur peine au sein d’un centre spécialisé (Bollé) dans la banlieue de la capitale.

8. Les tribunaux militaires

La loi no 95 042 du 20 avril 1995, portant Code de justice militaire en République du Mali, fixe le ressort territorial des juridictions militaires, à savoir les cours d’appel de Kayes, Bamako et Mopti.

Juridictions spéciales, les tribunaux militaires statuent sur les infractions dites militaires. Cette catégorie recouvre d’une part les infractions susceptibles d’être commises uniquement par des militaires (désertion par exemple), et d’autre part les infractions de droit commun imputables à des militaires dans un cadre lié à leurs fonctions (vol dans une caserne…).

Le Ministère chargé de la défense assure à l’endroit des juridictions militaires les mêmes missions que celles dévolues au Ministère de la justice en ce qui concerne les juridictions de droit commun.

Il n’existe plus de tribunaux d’exception au Mali.

En vertu des pouvoirs qui leur sont conférés, les cours et tribunaux veillent au respect des droits des citoyens. Il existe d’une part des juridictions de l’ordre administratif (tribunaux administratifs et Section administrative de la Cour suprême), qui connaissent des litiges opposant les citoyens à l’État ou à l’un de ses démembrements, et d’autre part des juridictions de l’ordre judiciaire (justice de paix à compétence étendue, tribunaux de première instance, cour d’appel, tribunaux du travail, de commerce et pour enfants, Section judiciaire de la Cour suprême).

Par leurs jugements et arrêts, les cours et tribunaux font la preuve que l’État est un sujet de droit.

9. Le Ministère de la justice

Sur le plan administratif, toutes les juridictions, à l’exception de la Cour suprême et des tribunaux militaires, sont coiffées par le Ministère de la justice, qui contrôle leur bon fonctionnement sans pouvoir donner d’instructions aux magistrats du siège, qui sont indépendants.

En marge de ces structures juridictionnelles et administratives existent des organismes professionnels, notamment:

Le Barreau malien;

La Chambre nationale des huissiers de justice;

La Chambre nationale des commissaires‑priseurs;

La Chambre nationale des notaires;

La Chambre nationale des experts judiciaires.

10. L’Administration pénitentiaire (art. 10 du Pacte)

Elle relève du Ministère de la justice, à travers la Direction nationale de l’Administration pénitentiaire et de l’éducation surveillée. Cette administration est chargée d’assurer l’exécution des peines et des mesures de liberté prononcées par les juridictions et de favoriser la réinsertion sociale des personnes détenues. Le nombre de prisons (35), y compris celui des prisons spécialisées pour femmes et enfants, l’effectif des détenus qui est de près de 3 500, et le nombre de pénitenciers agricoles (4) ont rendu nécessaires ces dernières années l’augmentation substantielle des crédits alloués à ce service et le recrutement d’agents ayant un certain niveau. De façon chronique, il existe une surpopulation carcérale.

Il convient d’ajouter que la loi portant régime pénitentiaire fait obligation au personnel pénitentiaire de traiter les personnes privées de liberté avec humanisme et dans le respect de leurs droits fondamentaux. C’est pourquoi le Centre de détention des détenus politiques de Taoudénit et le bagne de Kidal ont été définitivement fermés. Le Ministère de la justice a entrepris un vaste programme de refonte du système pénitentiaire se traduisant par l’humanisation des prisons.

Réinsertion et réhabilitation, tels sont les grands axes de la nouvelle politique pénitentiaire. Dans le cadre de la mise en œuvre de ladite politique, il a été créé un corps spécialisé de surveillants de prisons plus aptes à mettre en œuvre l’objectif d’humanisation des maisons d’arrêt.

Prévenus et condamnés sont séparés dans le système carcéral malien. Il en est de même pour les hommes, les femmes et les mineurs, étant entendu qu’un centre spécialisé de détention, de rééducation et de réinsertion a été construit pour les derniers. Il est à noter que cette bonne administration pénitentiaire est à la base de l’Accord de coopération conclu entre le Gouvernement du Mali et le Tribunal pénal international pour le Rwanda, accord aux termes duquel l’Administration pénitentiaire malienne doit recevoir des prisonniers rwandais. C’est ce qui explique la présence actuellement de cinq prisonniers rwandais à la Maison centrale d’arrêt de Bamako.

Le Code pénal sanctionne en son article 71 les agents de l’Administration pénitentiaire qui se rendraient coupables de détention arbitraire (six mois à deux ans d’emprisonnement et une amende de 20 000 à 240 000 francs CFA) et tous ceux qui, sans ordre des autorités publiques et exception faite des cas où la loi ordonne de saisir les prévenus, auront arrêté, détenu et séquestré une personne quelconque (art. 237).

11. Minorité pénale et juridictions pour mineurs (art. 10, al. 2 et 3; art. 14, al. 4, du Pacte)

a)Minorité pénale: La minorité pénale est régie par la loi no 01‑081 du 24 août 2001 portant sur la minorité pénale et l’institution de juridictions pour mineurs. Il en ressort que la majorité pénale est fixée à 18 ans. Lorsque le prévenu ou l’accusé aura moins de 13 ans, il sera relaxé ou acquitté comme ayant agi sans discernement. Lorsque le prévenu ou l’accusé aura plus de 13 ans et moins de 18 ans, il sera relaxé ou acquitté s’il est décidé qu’il a agi sans discernement. Dans ce cas, le mineur sera remis à ses parents ou à une institution d’éducation spécialisée publique ou privée pour le temps que le jugement déterminera, et qui toutefois ne pourra excéder la date de ses 18 ans. Lorsque seule l’année de naissance du mineur est connue, il est présumé né le 31 décembre de ladite année. Le mineur auquel est imputée une infraction qualifiée de crime ou délit ne sera pas déféré aux juridictions pénales de droit commun; il ne sera justiciable que des juridictions pour mineurs.

b)Juridictions pour mineurs:Les juridictions pour mineurs sont des juridictions spéciales compétentes pour juger les infractions dont la connaissance leur est attribuée par une disposition formelle de la loi en raison de la qualité personnelle de leur auteur. Les juridictions pour mineurs sont:

Le juge des enfants;

Le tribunal pour enfants;

La chambre spéciale des mineurs de la cour d’appel;

La cour d’assises des mineurs.

Le juge des enfants est nommé par décret du Président de la République après avis conforme du Conseil supérieur de la magistrature, compte tenu de ses aptitudes et de l’intérêt qu’il porte aux questions de l’enfance.

Le tribunal pour enfants est institué au siège de chaque tribunal de première instance et de chaque justice de paix à compétence étendue. Il connaît uniquement des délits et des contraventions concernant les mineurs et se compose:

D’un président nommé dans les mêmes conditions que le juge des enfants;

D’un ou plusieurs greffiers.

Les fonctions du ministère public sont exercées par le Procureur de la République près le tribunal de première instance ou l’un de ses substituts, et par le juge de paix à compétence étendue.

La Chambre spéciale des mineurs de la cour d’appel se compose d’un conseiller délégué à la protection de l’enfance (nommé par ordonnance du premier Président de la cour d’appel) assisté de deux conseillers de la cour d’appel ou de deux magistrats d’instance. Le greffier est choisi parmi le personnel du greffe de la cour d’appel.

La cour d’assises des mineurs se tient au siège de la cour d’appel, ou tout autre lieu du ressort de celle-ci. Elle se compose:

Du premier Président de la cour d’appel ou du conseiller délégué à la protection de l’enfance;

De deux conseillers désignés par ordonnance du premier Président;

De deux assesseurs pour mineurs tirés au sort sur une liste établie auprès de chaque cour d’appel.

IV. SIGNATURE ET MISE EN ŒUVRE DU PACTE NATIONAL

Le Mali a connu, entre 1960 et 1992, deux rébellions dans sa partie septentrionale. Celles‑ci ont conduit par moments à une remise en cause de l’unité nationale et s’expliquent par l’état de sous‑développement général du pays, aggravé au nord il est vrai par de longues années de sécheresse. Éminemment complexe, ce problème, qui touche au cœur de l’unité nationale et de l’intégrité territoriale, a souvent été mal compris et mal interprété.

Pour lui trouver une solution définitive, le Gouvernement a privilégié la voie du dialogue.

C’est ainsi que les négociations engagées avec le Bureau de coordination de l’ensemble des mouvements et fronts unifiés de l’Azawad ont abouti à la signature, le 11 avril 1992 à Bamako, du Pacte national.

Ledit pacte comporte sept titres portant entre autres sur:

Les principes directeurs (attachement à la Constitution du Mali notamment);

L’arrêt définitif des hostilités et le règlement des questions découlant de la situation de conflit armé (intégration des combattants et des populations du nord dans les corps en uniforme de l’État et des administrations publiques, rapatriement des 100 000 réfugiés...);

Le statut particulier du Nord‑Mali (décentralisation, création du Commissariat au nord chargé de la mise en œuvre du Pacte national…);

La concrétisation de la solidarité et de l’unité nationales notamment par l’élaboration d’un programme spécial pour le nord.

Le Pacte national, pour l’essentiel, a été exécuté à la satisfaction de toutes les parties prenantes à son élaboration et à sa mise en œuvre.

En témoigne, la cérémonie de la «Flamme de la paix» organisée dans la ville mythique de Tombouctou le 27 mars 1996. Au cours de ladite cérémonie consacrée à l’incinération des armes ayant servi à la rébellion, et devant un parterre de personnalités (entre autres John Jerry Rawlings, Président du Ghana et Président en exercice de la CEDEAO, Federico Mayor, Directeur général de l’UNESCO, etc.), les responsables des mouvements et fronts unifiés de l’Azawad et ceux du mouvement Ganda Khoy d’autodéfense des populations sédentaires, reconnaissant le caractère indivisible du Mali, ont proclamé la dissolution de leurs organisations et se sont engagés à œuvrer de concert pour la consolidation de l’unité nationale et le développement économique et social du pays.

Il s’en est suivi la création de l’Autorité pour le développement intégré du Nord‑Mali (ADIN) en lieu et place du Commissariat au nord.

Placé sous l’autorité du Premier Ministre, l’ADIN a pour objet le parachèvement de la mise en œuvre du Pacte national et l’appui aux collectivités locales dans la programmation et la coordination des actions de développement dans les régions du nord.

V. DROITS DE LA PERSONNE

1. Droit à l’égalité (art. 3 du Pacte)

Aux termes de l’article 2 de la Constitution «tous les Maliens naissent et demeurent libres et égaux en droits et en devoirs. Toute discrimination fondée sur l’origine sociale, la couleur, la langue, la race, le sexe, la religion et l’opinion politique est prohibée».

Cette disposition consacre une égalité formelle entre l’homme et la femme en République du Mali. Une politique volontariste peut être notée dans ce domaine avec l’existence d’un ministère spécifiquement chargé de la promotion de la femme, de l’enfant et de la famille.

En dépit de ces avancées, il existe encore des lacunes, notamment dans le droit successoral.

Des textes sont toutefois en cours d’élaboration dans un cadre participatif impliquant tous les acteurs concernés afin de disposer d’une législation consensuelle.

Ces textes tiendront compte des dispositions des différents instruments juridiques internationaux visant à consacrer l’égalité de droits entre l’homme et la femme.

Par ailleurs, le Mali s’est engagé dans un processus de relecture des textes d’ordre législatif, à savoir le texte régissant les associations, le Code pénal et de procédure pénale, la loi électorale et la loi portant sur la minorité pénale et institution de juridictions pour mineurs…

Toute personne qui s’estime lésée par une mesure prise au nom de l’État ou de l’un de ses démembrements peut contester celle-ci devant les tribunaux de l’ordre judiciaire ou de l’ordre administratif. En définitive, l’État ne bénéficie d’aucune immunité pour les cas d’atteinte aux droits de l’homme.

Toutes les personnes résidant dans le pays, qu’elles soient Maliennes ou étrangères, sont, sauf dispositions légales contraires, égales devant la loi, et ont droit, sans distinction aucune, à une égale protection de la loi. Le droit de saisir la justice leur est aussi garanti. Nul ne peut être privé du droit d’agir en justice si ce n’est conformément aux règles et procédures légales telles celles relatives, d’une part, à la manière dont sont reçues les dépositions du chef de l’État, du chef du Gouvernement et des représentants des puissances étrangères (art. 604 à 608 du Code de procédure pénale) et, d’autre part, aux poursuites contre les membres du Gouvernement, les magistrats, les parlementaires et certains fonctionnaires (art. 613 à 625 du même Code, et art. 75 du Code pénal).

Les quelques aménagements sous la forme de privilège de juridiction en faveur de ces catégories de responsables ne se justifient autrement que par la délicatesse de leurs charges respectives.

a) Égalité devant les tribunaux et cours de justice (art. 14 et 26 du Pacte):

L’égalité devant la justice est un droit constitutionnel, explicité par le Code de procédure pénale et le Code de procédure civile, commerciale et sociale. Les jugements rendus en matière pénale et civile sont publics, sauf si l’intérêt de mineurs exige qu’il en soit autrement (procédure devant les juridictions pour mineurs) ou si le procès porte sur des différends matrimoniaux ou sur la tutelle des enfants.

En vertu de l’article 9 de la Loi fondamentale «tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par la juridiction compétente. Le droit à la défense, y compris celui de se faire assister par l’avocat de son choix, est garanti depuis l’enquête préliminaire». Aussi, le prévenu est-il informé dans le plus court délai de la nature et des motifs de l’accusation portée contre lui. Il peut se voir attribuer d’office un défenseur sans frais s’il n’a pas les moyens de le rémunérer (loi no 01‑082 du 24 août 2001 portant sur l’assistance judiciaire). Il peut se faire assister gratuitement d’un interprète et est libre de plaider coupable ou non.

Toute personne déclarée coupable d’une infraction peut user des voies de recours pour attaquer la déclaration de culpabilité et de condamnation.

b) L’assistance judiciaire (art. 14, al. 3, du Pacte):

L’assistance judiciaire est régie en République du Mali par le décret no 99‑254/P‑RM du 15 septembre 1999 portant Code de procédure civile, commerciale et sociale, et par la loi no 01‑082/AN‑RM du 24 août 2001 portant sur l’assistance judiciaire.

Aux termes de l’article 38 du Code de procédure civile, commerciale et sociale, les parties choisissent librement leur conseil, soit pour se faire représenter soit pour se faire assister, suivant ce que la loi permet ou ordonne.

Le mandat de représentation en justice emporte pouvoir et devoir d’accomplir au nom du mandant les actes de procédure. La mission d’assistance en justice emporte pouvoir et devoir de conseiller la partie et de présenter sa défense sans l’obliger. Le mandat de représentation emporte mission d’assistance, sauf disposition ou convention contraire. Une partie n’est admise à se faire représenter que par une seule des personnes, physiques ou morales, habilitées par la loi. Le nom du représentant et sa qualité doivent être portés à la connaissance du juge par la déclaration au greffe de la juridiction. Quiconque entend représenter ou assister une partie doit justifier qu’il en a reçu le mandat ou la mission. L’avocat est toutefois dispensé d’en justifier.

D’autre part, l’article premier de la loi sur l’assistance judiciaire dispose que l’assistance judiciaire peut être accordée, en tout état de cause, à toutes personnes ainsi qu’aux associations privées ayant pour objet une œuvre d’assistance et jouissant de la personnalité civile lorsque, à raison de l’insuffisance de leurs ressources, ces personnes et associations se trouvent dans l’impossibilité d’exercer leur droit en justice, soit en demandant, soit en défendant.

Elle est applicable à tous les litiges à porter devant les juridictions de droit commun et d’ordre administratif. Elle s’étend de plein droit aux actes et procédures d’exécution à opérer en vertu des décisions en vue desquelles elle a été accordée.

Elle peut en outre être accordée pour tous actes et procédures d’exécution à opérer en vertu de décisions obtenues sans le bénéfice de cette assistance, ou de tous actes, même conventionnels, si les ressources de la partie qui poursuit l’exécution sont insuffisantes.

L’admission à l’assistance judiciaire est prononcée par un bureau établi au siège du tribunal de première instance, ou de la justice de paix à compétence étendue et composée:

1)Du chef du service de l’enregistrement et des domaines ou, à défaut, son délégué ou le fonctionnaire ou l’agent chargé des affaires de l’enregistrement et des domaines;

2)Du préfet, du maire et de leurs délégués;

3)D’un membre du conseil de village du demandeur;

4)De trois membres titulaires et de trois membres suppléants désignés en chambre du conseil par le tribunal civil auprès duquel est établi le bureau, et choisis parmi les avocats et les notables domiciliés ou résidant au siège du bureau. Ces membres du bureau sont soumis au renouvellement au mois de janvier de chaque année et ils sont rééligibles.

La formation du bureau est constatée par ordonnance du Président du tribunal ou du juge de paix à compétence étendue.

Toute personne qui réclame assistance adresse, avec les pièces justificatives, sa demande écrite sur papier libre, ou la formule verbalement au parquet du lieu où siège le bureau d’assistance de son domicile. Le bureau, qui doit statuer dans le plus bref délai, constate l’indigence, accorde ou refuse l’assistance sollicitée.

L’assistance judiciaire est accordée d’office à toute personne accusée devant la cour d’assises et à tout mineur.

Toutefois, le taux de recours à cette assistance en matière civile est très faible du fait de la non‑vulgarisation des textes en la matière et de la non‑fonctionnalité des structures.

Les associations de défense des droits de l’homme ont ouvert des cliniques juridiques qui assurent gratuitement les services de conseil, d’orientation et d’assistance.

2. Le droit à la non-discrimination (art. 2 du Pacte)

Le Code pénal conforte l’article 2 de la Constitution en son article 58 ainsi libellé: «tout propos, tout acte de nature à établir ou à faire naître une discrimination raciale ou ethnique, tout propos, tout acte ayant pour but de provoquer ou d’entretenir une propagande régionaliste, toute propagation de nouvelles tendant à porter atteinte à l’unité de la nation et au crédit de l’État, toute manifestation contraire à la liberté de conscience et à la liberté de culte susceptible de dresser les citoyens les uns contre les autres,… sera puni d’un emprisonnement ou d’une interdiction de séjour».

a) Condamnation de toute propagande raciale ou d’organisations qui la pratiquent (art. 20 du Pacte):

Conformément aux dispositions des articles 1 et 2 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et à l’article 43 de la Charte des partis politiques, l’article 179 du Code pénal réprime les comportements racistes à l’occasion des manifestations culturelles et sportives.

Le Mali a ratifié, par ordonnance no 85‑13 du 12 février 1985, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. Depuis, des efforts ont été faits sur le plan normatif, mais dans la pratique des discriminations persistent (accès à la terre, droit à l’héritage, à l’emploi, droit à la propriété, etc.).

b) L’étranger établi au Mali (art. 13 du Pacte):

Selon la législation malienne, l’étranger est un sujet de droit, mais sa situation est différente de celle du national. Il bénéficie de tous les droits civils mais pas de droits politiques. Toutefois, les étrangers ont le droit de se regrouper en associations non politiques. Il existe de nos jours beaucoup d’associations et amicales d’étrangers au Mali. Enfin, les étrangers ne sont pas admis à la fonction publique.

Tout étranger se trouvant sur le territoire du Mali ne peut être expulsé qu’en exécution d’une décision prise conformément à la loi. Il bénéficie de la possibilité de faire valoir les raisons qui militent contre son expulsion et de faire examiner son cas.

Pour résumer, l’on retiendra que le Mali mène manifestement une politique souple, non discriminatoire, de large ouverture aux étrangers, et spécifiquement intégrationniste et panafricaniste.

3. Le droit à la vie et la protection de la personne humaine (art. 6, 7 et 8 du Pacte)

Aux termes de l’article premier du Titre premier de la Constitution relatif aux droits et devoirs de la personne humaine, «la personne humaine est sacrée et inviolable. Tout individu a droit à la vie, … et à l’intégrité de sa personne». Ce droit est protégé par la loi (loi no 01‑079 du 20 août 2001 portant Code pénal).

Aussi, les articles 2, 3, 4, 5, 9, 10 et 12 offrent‑ils des garanties contre les arrestations et détentions arbitraires, les actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. «Nul ne sera soumis à la torture, ni à des sévices ou traitements inhumains, cruels, dégradants ou humiliants» (art. 3, al. 1, de la Constitution); par ailleurs, «toute personne faisant l’objet d’une mesure privative de liberté a le droit de se faire examiner par un médecin de son choix (art. 10, al. 1, de la Constitution)».

Les dispositions constitutionnelles ci-dessus rappelées trouvent leur fondement dans la Déclaration universelle des droits de l’homme; la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples du 27 juin 1981 ratifiée par le Mali suivant l’ordonnance no 8 du 29 octobre 1981; la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ratifiée par le Mali en 1995.

Elles sont du reste reprises dans le Code pénal, qui définit la torture comme «toute acte par lequel une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales, sont intentionnellement infligées à une personne…» et la punit d’un emprisonnement de un à cinq ans, d’une peine de réclusion de cinq à dix ans (si les violences ont été suivies de mutilation, amputation…) ou de la peine de mort s’il en est résulté la mort (art. 209).

Il en résulte que toute personne arrêtée ou détenue doit être traitée de façon à préserver sa dignité et à garantir son intégrité physique et morale.

Quand au Code de procédure pénale, il dispose que la police judiciaire, chargée de constater les infractions à la loi pénale, d’en rassembler les preuves et d’en chercher les auteurs, est exercée sous la direction du Procureur de la République, la surveillance du Procureur général, et le contrôle de la Chambre d’accusation.

La police judiciaire est constituée par les officiers, fonctionnaires et agents habilités à cet effet (art. 31).

Pour les nécessités de l’enquête, le Code susvisé autorise en son article 76 l’officier de police judiciaire à garder à sa disposition toute personne, exception faite des mineurs, pendant 48 heures. Ce délai de garde à vue peut être prolongé de 24 heures sur autorisation écrite du Procureur de la République. En tout état de cause, toute personne suspectée, poursuivie ou inculpée est présumée innocente tant que sa culpabilité n’a pas été établie. Elle a le droit d’être informée des charges retenues contre elle et d’être assistée d’un conseil de son choix.

À cet effet, signalons que le Ministre de la justice/garde des sceaux a expressément instruit aux procureurs généraux, procureurs de la République et juges de paix «de procéder de façon systématique à un contrôle rigoureux des services de police, de gendarmerie et des prisons afin de mettre un terme sans délai à toutes les formes d’atteinte aux droits de l’homme».

Notons enfin que les dispositions du Code de procédure pénale relatives aux droits de la défense (art. 103 à 108, 110, 112, 128, 135 et 136) doivent être observées sous peine de nullité tant de l’acte lui-même que de la procédure ultérieure.

Il a été créé un organisme consultatif auprès du Premier Ministre par décret no 96‑149/P‑RM du 15 mai 1996. Cet organisme, dénommé Commission nationale consultative des droits de l’homme, a pour missions «de promouvoir et vulgariser les droits de l’homme en République du Mali». Cependant elle n’est pas encore fonctionnelle.

Tous les observateurs s’accordent à reconnaître que les ONG et associations comme l’Association malienne des droits de l’homme (AMDH) et la Coordination des associations et organisations féminines du Mali (CAFO) contribuent au processus actuel de démocratisation au Mali, non seulement de par leurs activités de promotion et de défense des droits de l’homme mais également à travers des propositions concrètes qu’elles font régulièrement aux pouvoirs publics dans le sens d’une plus grande prise en compte des droits de l’homme dans l’élaboration des textes de loi.

En matière correctionnelle ou criminelle, le juge d’instruction peut mettre l’inculpé en détention provisoire suivant ordonnance motivée ou le placer sous contrôle judiciaire.

Dans ce dernier cas, l’ordonnance n’a pas besoin d’être motivée et elle n’est pas susceptible d’appel (art. 122 à 147 du Code de procédure pénale).

En toute matière et à tout moment de la procédure, la mise en liberté assortie ou non de contrôle judiciaire peut être ordonnée par le juge d’instruction, soit sur demande de l’inculpé ou de son conseil, soit sur réquisition du ministère public, soit d’office (art. 148 à 158).

Toute personne a droit, dans une procédure judiciaire ou administrative, à ce que sa cause soit traitée équitablement et jugée dans un délai raisonnable. Et cette cause doit être portée devant un tribunal établi par la loi, compétent, indépendant et impartial.

4. La peine de mort (art. 6, al. 2 et 4, du Pacte)

La peine de mort fait partie de l’arsenal répressif au Mali, mais il faut cependant relever que depuis 1979 il n’a plus été procédé à aucune exécution capitale au Mali.

Le nouveau Code pénal adopté par l’Assemblée nationale, objet de la loi no 01‑079 du 20 août 2001, ne prévoit plus la peine de mort en matière d’atteinte aux biens publics, ce qui constitue une avancée notable.

Dans le même ordre d’idées, le nouveau Code de procédure pénale, objet de la loi no 0180/ du 20 août 2001, a profondément modifié la procédure de délibération devant la cour d’assises dans le souci de requérir une majorité qualifiée, avant tout prononcé de la peine de mort, innovation qui est salutaire vu le caractère irréversible de cette peine.

Par ailleurs, tout condamné à mort a le droit de solliciter la grâce ou la commutation de la peine. C’est ainsi que sous la troisième République les condamnations à mort ont été commuées en peines de réclusion à perpétuité ou à temps par le chef de l’État en vertu du droit de grâce qu’il tient de l’article 45 de la Constitution.

5. Le droit au travail (art. 8 du Pacte)

L’article 19 de la Constitution reconnaît le droit au travail et au repos. Il interdit par ailleurs le travail forcé ou obligatoire en ces termes: «nul ne peut être contraint à un travail déterminé que dans le cas de l’accomplissement d’un service exceptionnel d’intérêt général, égal pour tous dans les conditions déterminées par la loi».

Le travail forcé entendu dans le sens d’un service exigé d’un individu sous la menace d’une peine quelconque, et pour lequel ledit individu ne s’est pas offert de plein gré, n’existe pas dans notre pays.

Il ne pouvait en être autrement, le Mali ayant ratifié, au lendemain de son accession à la souveraineté internationale, les deux principales Conventions de l’OIT sur le travail forcé (Convention no 29) et l’abolition du travail forcé (Convention no 105). Ces dispositions sont complétées par le Code du travail ou les conventions collectives pour le secteur privé, le statut général des fonctionnaires, et divers statuts particuliers ou autonomes pour les agents du secteur public.

6. Les libertés (art. 9 du Pacte)

Aux termes de l’article premier de la Constitution cité plus haut, «toute personne a droit … à la liberté, … et à l’intégrité de sa personne». Ainsi, au Mali «… nul ne peut être poursuivi, arrêté ou inculpé qu’en vertu d’une loi promulguée antérieurement aux faits qui lui sont reprochés. Tout prévenu est présumé innocent jusqu’à ce que sa culpabilité soit établie par la juridiction compétente…». Le droit d’être assisté par un avocat de son choix dès le stade de l’enquête préliminaire découle de la Constitution. Le nouveau Code de procédure pénale consacre par ailleurs la présomption d’innocence en l’inscrivant au nombre des principes directeurs du procès pénal et inspire le législateur dans toute politique de réforme en matière pénale (art. 1 et 2 du Code sur les dispositions préliminaires).

Conformément aux dispositions du Code de procédure pénale, le délai légal de garde à vue est fixé à 48 heures, durée susceptible d’être prorogée à 72 heures sur autorisation écrite du Procureur de la République.

Contrairement à certains pays, au Mali il n’existe aucune dérogation susceptible d’allonger les délais précités, qui sont valables quelle que soit la gravité des faits.

En cas de détention illégale, il n’existe pas de mécanisme automatique d’indemnisation en dehors de la possibilité reconnue à la victime de porter plainte contre l’auteur des faits. Celui‑ci, en tout état de cause, peut être poursuivi directement par le ministère public, même en l’absence de plainte de la victime qui pourra alors se constituer partie civile.

a) La liberté de circulation (art. 12 du Pacte):

C’est un droit constitutionnel. L’article 5 de la Loi fondamentale stipule que l’État reconnaît et garantit, dans les conditions fixées par la loi, la liberté d’aller et venir, le libre choix de la résidence.

Au regard du Traité de l’Union économique et monétaire ouest‑africaine en son paragraphe 5 intitulé «De la libre circulation des personnes, des services et capitaux», ainsi que du Protocole de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest sur la «libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement», toute personne se trouvant légalement sur le territoire d’un État a le droit d’y circuler et d’y choisir librement sa résidence. Toute personne est libre de quitter le Mali. Mais ce droit peut être l’objet de restrictions nécessaires pour protéger la sécurité nationale, l’ordre public, la santé ou la moralité publique, ou les droits et libertés d’autrui.

b) La liberté de pensée, de conscience et de religion (art. 18 du Pacte):

Le Mali est une République laïque où plusieurs ethnies et religions coexistent pacifiquement. La religion musulmane est la plus répandue, suivie par le christianisme et l’animisme. Tous s’exercent librement et se manifestent à travers divers rites et cérémonies, enseignements et cultes.

Cette situation harmonieuse s’explique pour l’essentiel par le fait que les adeptes des différentes religions et croyances ont très tôt compris que les droits civiques ont pour base la citoyenneté et non la race ou la religion. C’est pourquoi aucune mention de la religion ou de la race n’est portée sur les actes de naissance, les documents d’identité et de voyage des ressortissants maliens.

Par ailleurs, le Code pénal réprime en son article 58 les actes constitutifs d’atteinte à la liberté de pensée, de conscience et de religion: «toute manifestation contraire à la liberté de conscience et à la liberté de culte susceptible de dresser les citoyens les uns contre les autres sera punie d’un emprisonnement de un à cinq ans et facultativement de cinq à dix ans d’interdiction de séjour».

L’éducation religieuse et morale des enfants est assurée conformément aux propres convictions des parents.

c) La liberté d’expression (art. 19 du Pacte):

La Constitution pose en son article 4 le principe de la liberté d’opinion et de la liberté d’expression. L’Espace d’interpellation démocratique (EID) est la meilleure illustration de l’exercice effectif de cette liberté.

En effet, le Mali est le seul pays de la sous‑région ouest‑africaine, voire du continent africain, à avoir imaginé, depuis 1994, un tel forum de communication démocratique. Depuis le 46e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, le Gouvernement, sur initiative propre, organise chaque année un forum au cours duquel un échantillon suffisamment représentatif de la société civile malienne peut, en direct sur les ondes de radio et de la télévision nationale, interpeller publiquement les pouvoirs publics sur tous les sujets intéressant la vie de la nation, en particulier les questions relatives aux droits de l’homme. L’EID a pour objectif, entre autres, d’informer en toute transparence l’opinion nationale et internationale sur la situation des droits humains au Mali, par rapport aux actions entreprises ou envisagées et aux griefs éventuels suscités par celles-ci. Il a été institutionnalisé suivant décret no 159/P‑RM du 31 mai 1996.

À l’issue de l’édition qui se tient le 10 décembre de chaque année, un jury d’honneur composé de personnalités nationales et étrangères fait des recommandations au Gouvernement dans la perspective d’une protection toujours plus grande des droits de l’homme. La mise en œuvre desdites recommandations fait l’objet d’une évaluation par le jury d’honneur avant la prochaine édition.

d) La liberté de presse (art. 19 du Pacte):

La place d’une presse libre dans une démocratie est essentielle. Au plan national, la Constitution malienne du 25 février 1992 fait sienne la volonté de protection de ces différentes libertés.

Règles juridiques régissant la liberté de la presse au Mali:

La Constitution du 25 février 1992 reconnaît et garantit la liberté de la presse en son article 7, qui stipule que «la liberté de presse est reconnue et garantie. Elle s’exerce dans les conditions fixées par la loi». Dans ce cadre, l’Assemblée nationale a adopté la loi no 92−037/AN‑RM du 24 décembre 1992 portant régime de la presse et délits de presse, abrogeant du coup celle de 1988.

Le paysage médiatique a connu un véritable essor avec la naissance de beaucoup d’organes de presse écrite et parlée.

L’État ne détient plus le monopole de la communication. Il partage le secteur de la presse et de l’audiovisuel avec des entrepreneurs privés. Aujourd’hui, on dénombre au Mali environ une trentaine de journaux écrits indépendants, une centaine de stations radios FM libres et deux chaînes privées de télévision de rediffusion (Klédu et Multicanal).

e) Le droit de réunion (art. 21 du Pacte):

Les droits à la liberté de réunion, de cortège et de manifestation sont également effectifs au Mali. Ils restent régis à titre principal par l’ordonnance no 36/PCG du 28 mars 1959 et, à titre secondaire, par la Charte des partis.

L’Ordonnance susvisée pose en son article 6, alinéas 1 et 2, le principe de la déclaration préalable à l’autorité administrative (maire, préfet et sous-préfet) par les organisateurs de la manifestation sur la voie publique (cortège, marche, rassemblement de personnes). Cette déclaration signée de trois organisateurs de la manifestations doit être faite 24 franches au moins et 8 jours au plus avant la date du rassemblement.

Les limites posées à la liberté de manifestation tiennent essentiellement à un souci de préservation de l’ordre public. En effet, le maire, les représentants de l’État (préfet, sous-préfet, haut commissaire) et en dernier ressort le Ministre chargé de l’administration territoriale peuvent interdire la manifestation lorsque celle-ci est de nature à troubler l’ordre public. Aussi, l’autorité administrative a-t-elle le pouvoir de mettre fin à tout cortège, défilé ou rassemblement sur la voie publique et dans les lieux publics si le maintien de l’ordre public l’exige. Elle peut, après sommation, intervenir pour disperser et interdire toute manifestation qui dégénère. Les sommations ne sont cependant pas requises «si des violences ou des voies de fait sont exercées contre les forces de l’ordre ou si ces dernières ne peuvent défendre valablement le terrain occupé par elles ou les postes dont elles sont chargées».

Il faut noter que, courant 1997, des dérapages ont été enregistrés à l’occasion de certaines manifestations qui se sont, du reste, soldées par des arrestations et des blessés tant parmi les manifestants que parmi les forces de l’ordre.

f) Liberté d’association, droit syndical et droit de grève (art. 22 du Pacte):

La liberté d’association est une réalité au Mali. L’obtention d’un récépissé n’est soumise qu’à deux conditions essentielles: la licéité des objectifs et le caractère non ethnique ou régionaliste de l’association. L’on dénombre aujourd’hui environ 12 000 associations déclarées au Ministère chargé de l’administration territoriale.

La liberté syndicale est garantie par la Constitution et les différents textes régissant les conditions de travail.

L’article 20 de la constitution dispose: «la liberté syndicale est garantie. Les syndicats exercent leurs activités sans contrainte et sans limite autres que celles prévues par la loi».

Conformément aux dispositions contenues dans la Convention no 87 de l’OIT sur la liberté syndicale, la création des syndicats n’est soumise à aucune autorisation administrative préalable.

Les fondateurs du syndicat sont tout au plus obligés de déposer les statuts et les noms de ceux qui, à un titre quelconque, sont chargés de son administration ou de sa direction. Ce dépôt a lieu au siège de la circonscription administrative où le syndicat est établi.

Cet environnement juridique favorable a permis, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, l’éclosion à côté de l’Union nationale des travailleurs du Mali, de nombreux autres syndicats qui exercent librement leurs activités.

L’on compte aujourd’hui 12 syndicats nationaux rattachés à l’Union nationale des travailleurs du Mali (UNTM) à côté de laquelle existent la Confédération syndicale des travailleurs du Mali (CSTM) et une multitude de syndicats autonomes tels ceux de la magistrature, de l’Éducation nationale ou de l’administration territoriale.

De nombreuses négociations autour des revendications posées par lesdits syndicats ont abouti à la conclusion de protocoles d’accord, améliorant sensiblement les conditions de vie et de travail des agents (adoption de nouveaux statuts particuliers, élaboration de nouvelles grilles de salaires, institution de primes et indemnités...).

Enfin, dans le cadre du dialogue social, les organisations syndicales d’employeurs et de travailleurs sont de plus en plus associées à la formulation et à la mise en œuvre des politiques économiques et sociales. Pour ce faire, diverses formes de concertations ont été instaurées, dont notamment le «Cadre de concertation État‑secteur privé» et le «Pacte de solidarité pour la croissance et le développement» signé le 14 août 2001.

Diverses dispositions du Code du travail tendent à protéger la liberté syndicale. À titre d’exemple, l’article 306 «interdit à tout employeur de prendre en considération l’appartenance à un syndicat ou l’activité syndicale pour arrêter ses décisions en ce qui concerne l’embauche, la conduite et la répartition du travail, la formation professionnelle, l’avancement, la rémunération et l’octroi d’avantages sociaux, les mesures de discipline et de congédiement».

Les mêmes garanties se retrouvent à l’article 21 en ce qui concerne le droit de grève.

Pour les services publics, l’exercice du droit de grève est régi par la loi no 87‑47/AN‑RM du 10 août 1987.

En ce qui concerne la situation de l’emploi, il convient de signaler que le taux brut d’activité (TBA), c’est-à-dire la proportion des personnes de 16 ans et plus ayant travaillé ou en quête d’un emploi dans la population totale, s’élève à 41,4 %. Ce taux est de 54,9 % chez les hommes contre 28,2 % chez les femmes.

La population active se répartit entre actifs occupés et actifs inoccupés (chômeurs). En 1998, le Mali comptait 4 060 639 actifs dont 4 032 973 occupés et 27 666 chômeurs, d’où un taux d’occupation de 99,3 % et un taux de chômage de 0,7 %.

La création, entre autres, de l’Agence nationale pour l’emploi (ANPE), de l’Agence d’exécution des travaux d’intérêt public pour l’emploi, du Fonds d’appui à la formation professionnelle et à l’apprentissage (FAFPA) et des Unités de formation et d’appui aux entreprises (UFAE), participe de la volonté affirmée du Gouvernement de lutter efficacement contre le chômage en général, celui des jeunes en particulier.

Le chômage touche plus les hommes (0,8 %) que les femmes (0,5 %), lesquelles représentent 69,4 % des inactifs.

L’activité du pays est largement dominée par le secteur primaire (83,4 % de la population active). À côté d’un secteur secondaire naissant (4,1 %), apparaît un secteur tertiaire relativement important (12,5 %).

Les indépendants représentent la majorité de la population active occupée (47,8 %); viennent ensuite les aides familiales peu rémunérées (45,8 %). On relève que les femmes sont beaucoup plus utilisées comme aide familiales peu rémunérées (62,8 %). Les hommes sont par contre en majorité des indépendants (55,8 %). En outre, parmi les salariés, on trouve plus d’hommes que de femmes. En effet, les hommes salariés représentent 75,6 % de l’ensemble des salariés.

Identiques pour tous, le droit au travail, le droit syndical et le droit de grève s’exercent en dehors de toute discrimination raciale.

7. La reconnaissance des langues nationales (art. 27 du Pacte)

Aux termes de l’article 25, alinéa 9, de la Constitution, «la loi fixe les modalités de promotion et d’officialisation des langues nationales».

Ainsi, de l’indépendance à nos jours, le Mali a fait beaucoup d’efforts pour parvenir à écrire les langues nationales. Cela se traduit à travers les acquis suivants:

Treize langues nationales ont été instrumentées;

Onze langues nationales sont décrites sur les plans phonétique, phonologique, morphologique et morpho-syntaxique;

Onze langues nationales sont dotées de règles d’orthographe, de syllabaires, de lexique de base et disposent de divers textes (tradition orale, textes de vulgarisation des techniques agricoles, sanitaires et autres…).

Toutes les langues décrites sont utilisées comme médiums et matières dans les domaines du formel et du non‑formel.

À cet égard, les médias publics ou privés nationaux réservent des plages horaires quotidiennes à la diffusion des informations en langues nationales et à la vulgarisation du patrimoine culturel et artistique des différentes ethnies et régions du pays.

De même, un Institut des langues a été créé et intégré à l’Université du Mali. Il a pour missions:

La contribution à la définition de la politique linguistique dans les domaines éducatif, culturel, social et administratif;

L’identification et la promotion de l’ensemble des langues nationales attestées dans les différentes aires sociolinguistiques du pays;

La promotion de la coopération avec les autres pays africains, en particulier avec ceux qui partagent au moins une langue avec le Mali.

Dans le cadre de cette coopération, l’Académie africaine des langues, créée sur initiative du Gouvernement malien, a été retenue au nombre des institutions de l’Union africaine.

8. Droits de la famille (art. 23 et 24 du Pacte)

Le Mali souscrit, dans sa Constitution, à la Déclaration universelle des droits de l’homme et à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, deux instruments qui affirment la reconnaissance de la personnalité juridique de tout individu. La législation nationale, en application de ces instruments protège l’individu contre les immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance. Elle le protège aussi contre les atteintes illégales à son honneur et à sa réputation en prévoyant des peines y afférentes dans le Code pénal.

La Constitution proclame la détermination du peuple souverain du Mali à défendre les droits de la femme et de l’enfant.

La loio 62‑17/AN‑RM du 3 février 1962 portant Code du mariage et de la tutelle stipule, en son article 4, que l’homme avant 18 ans révolus, la femme avant 15 ans accomplis, ne peuvent contracter mariage. L’âge nubile pour prétendre au droit de se marier et de fonder une famille est de 18 ans pour l’homme et de 15 ans pour la femme. Toutefois, on dénote des atteintes à ces dispositions dans les cas de mariages non célébrés devant l’officier d’état civil.

Néanmoins, le Ministre de la justice pourra accorder, par décision non susceptible de recours, des dispenses d’âge.

L’article 10 du même texte dit qu’il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a pas de consentement.

Toutefois, l’autorité parentale joue un rôle primordial, compte tenu du poids de la tradition dans certains milieux.

Des mesures appropriées pour assurer l’égalité de droits et de responsabilités des époux au regard du mariage, durant le mariage et lors de sa dissolution ont été formalisées dans le Code susvisé.

Ce texte prévoit, en cas de dissolution, des dispositions pour assurer aux enfants la protection nécessaire.

La grande initiative allant dans le sens de la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques concerne les propositions de réforme du droit de la famille où la question de l’autorité parentale a constitué une préoccupation des autorités. Il est donc clair que le futur Code de la famille contiendra des dispositions spécifiques réglementant les rapports enfants/parents.

Le Mali a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant en 1990. Pour donner corps au principe exprimé par l’article 12 de la Convention, il a été institué un Parlement des enfants en 1996, dont l’âge des membres varie de 10 à 18 ans.

Un complexe intégré dénommé «La Cité des enfants» a été créé par l’ordonnance no 99‑035/P‑RM du 15 septembre 1999. Cette cité devrait répondre au besoin d’activités sociales, culturelles et scientifiques des enfants et leur offrir la possibilité de prendre conscience de leurs aptitudes et de développer leur personnalité, et de les préparer à devenir des citoyens actifs d’une société démocratique.

En ratifiant les textes internationaux sur les droits de l’enfant, le Mali s’est engagé à promouvoir lesdits droits et a, en conséquence, adapté sa législation nationale en vue de réprimer toutes les formes d’exploitation et d’abus à l’égard des enfants.

De grands chantiers de réforme du droit de la famille et de l’enfant sont en cours et aboutiront très prochainement à l’adoption du Code de la famille. D’ores et déjà, le Mali a adopté, par ordonnance no 02‑062/P‑RM du 5 juin 2002, un Code de protection de l’enfant.

Le travail des enfants se caractérise aussi par le trafic des enfants. Suite à l’interpellation du Gouvernement lors de l’Espace d’interpellation démocratique (EID), celui-ci a pris des mesures en constituant une commission de réflexion sur le phénomène du trafic d’enfants et de l’adoption internationale. Après les rencontres de Cotonou et de Libreville, le Gouvernement, avec l’appui de ses partenaires, a élaboré le Plan d’action nationale d’urgence de lutte contre le trafic transfrontalier d’enfants. Aujourd’hui, le nombre d’enfants rapatriés et interceptés s’élève à 522. En vue de mettre en synergie les différentes actions au niveau de la sous-région, le Mali a privilégié la collaboration avec les pays frontaliers, surtout par la signature d’un Protocole d’accord entre le Mali et la Côte d’Ivoire (septembre 2000) et le renforcement du partenariat entre certaines ONG maliennes avec les ONG de ces pays en matière de surveillance communautaire.

Selon la loi no 87‑27/AN‑RM du 19 janvier 1987 régissant l’état civil, les déclarations de naissance sont reçues dans les centres de déclaration d’état civil avec le patronyme et le nom de l’enfant et enregistrées au registre d’état civil. Cependant, il faut noter le faible niveau d’enregistrement des naissances.

Aux termes des dispositions de la loi no 62‑18/AN‑RM du 3 février 1962 portant Code de la nationalité, tout enfant né de parents maliens ou né sur le territoire malien acquiert la nationalité malienne en vertu des articles 8, 9, 10, 11 et 12. L’application des dispositions de ce code a ainsi permis d’éviter les cas d’apatridie à la naissance au Mali.

Il convient enfin de signaler que l’enseignement des droits humains a été intégré dans les programmes de l’enseignement fondamental.

VI. LES DROITS POLITIQUES (art. 25 du Pacte)

Les droits politiques sont reconnus et garantis par la Constitution et les autres textes de loi en vigueur.

République indépendante, souveraine, indivisible, démocratique, laïque et sociale, le Mali a pour principe le gouvernement du peuple par le peuple et pour le peuple.

Ainsi, l’article 26 de la Constitution dispose que «la souveraineté nationale appartient au peuple tout entier, qui l’exerce par ses représentants ou par voie de referendum. Aucune fraction du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice».

La garantie des droits politiques protège la libre formation de l’opinion et de l’expression de la volonté des citoyens.

L’article 27 consacre le caractère universel, égal et secret du suffrage, tandis que l’article 28 met l’accent sur le rôle des partis politiques qui «encourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans les conditions déterminées par la loi» et dans le respect «des principes de la souveraineté nationale, de la démocratie, de l’intégrité du territoire, de l’unité nationale et la laïcité de l’État».

Le Mali s’est doté d’une loi électorale adoptée de façon consensuelle par l’ensemble de la classe politique, majorité et opposition confondues. Les conditions requises pour être électeur tiennent essentiellement à la nationalité, à l’âge (18 ans révolus), à la jouissance des droits civiques et politiques et à la résidence. Pour être éligible à l’Assemblée nationale, à l’Assemblée régionale, au conseil de cercle ou au conseil communal, les mêmes conditions prévalent. Tout candidat à la présidence de la République, affilié à un parti politique ou indépendant, doit, en plus de la condition de résidence, être de nationalité malienne d’origine, avoir 35 ans révolus et verser une caution de 5 000 000 francs CFA au moment de faire acte de candidature. Il doit en outre jouir de ses droits civiques et politiques. Mais aucune condition de race, de couleur ou de religion n’est exigée pour prétendre à un poste électif ou à une fonction publique.

1. Formation des partis politiques

Les partis politiques se forment et exercent librement leurs activités dans le cadre défini par la Charte des partis.

Dans la pratique, l’exercice de cette liberté ne rencontre pas d’obstacles. Pour preuve, l’on dénombre à ce jour plus de 80 partis politiques légalement reconnus. Leur activité est régie par la Charte des partis politiques et la loi portant statut de l’opposition.

La loi no 00‑45 du 7 juillet 2000 portant Charte des partis détermine en son article 43 les limites à l’action politique des partis auxquels il est fait expressément interdiction de:

Porter atteinte à la sécurité, à l’ordre public, aux droits et aux libertés individuels et collectifs;

Mettre sur pied des organisations à caractère militaire ou paramilitaire;

Se constituer et s’organiser sur une base ethnique, religieuse, linguistique, régionaliste, sexiste ou professionnelle.

Le budget national contribue au financement des partis politiques dans les conditions prévues par les textes en vigueur.

2. L’égalité entre les partis politiques, les candidats dans les compétitions électorales

Les candidats, les partis politiques et les groupements de partis politiques peuvent utiliser pour leurs campagnes les médias d’État (radio, télévision et presse écrite), sous la supervision du comité national de l’égal accès aux médias d’État.

3. La transparence des procédures électorales

La loi électorale prévoit un certain nombre de dispositions dont la mise en œuvre permet d’assurer la transparence des procédures électorales. Il s’agit notamment de la création de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), de la Délégation générale aux élections (DGE), ainsi que de l’intervention du Ministère chargé de l’administration territoriale.

a) La Commission électorale nationale indépendante (CENI) :

Conformément à la loi électorale, il a été mis en place une Commission électorale nationale indépendante (CENI), à laquelle sont confiés la supervision et le suivi des opérations électorales référendaires, présidentielles, législatives et communales. Elle est chargée également de la gestion des observateurs nationaux et internationaux.

Elle est composée au niveau national de 15 membres, répartis comme suit:

Cinq membres représentant les partis politiques de la majorité;

Cinq membres représentant les partis politiques de l’opposition;

Un membre désigné par le conseil de l’ordre des avocats;

Un membre désigné par les associations de défense des droits de l’homme;

Un membre désigné par la Coordination des associations et organisations féminines (CAFO).

b) La Délégation générale aux élections (DGE):

Elle est chargée:

De l’élaboration et la gestion du fichier électoral;

De la confection et l’impression des cartes d’électeurs;

Du financement public des partis politiques.

Elle prête assistance à la CENI dans l’exercice de ses missions à la demande de celle-ci.

Elle est dirigée par un délégué général nommé par décret du Président de la République.

c) Le Ministère chargé de l’administration territoriale:

Sous réserve des attributions de la CENI et de la DGE, le Ministère chargé de l’administration territoriale à travers un comité interministériel assure la préparation technique et matérielle des élections, l’organisation matérielle, l’élaboration des procédures et actes y relatifs, la centralisation et la proclamation des résultats provisoires des référendums et des élections présidentielles et législatives, l’acheminement des procès‑verbaux des consultations référendaires, législatives et présidentielles à la Cour constitutionnelle.

Il est aussi prévu la révision annuelle des listes électorales par les commissions administratives, le contrôle des opérations de vote par les représentants des différents candidats et partis, des sanctions en cas de fraude, et des voies de recours en cas de contestation de la régularité des opérations.

Malgré ces garde-fous, les différentes consultations électorales de 1997 ont été émaillées d’incidents. Ont notamment été enregistrés de nombreux cas de fraudes dus à la mauvaise organisation et à l’imperfection des listes électorales, ce qui a amené la Cour constitutionnelle à annuler, dans un arrêt no CCL‑97‑046 du 25 avril 1997, les résultats du premier tour des élections législatives du 13 avril 1997 sur l’ensemble du territoire national.

Cette décision courageuse et unique dans l’histoire du Mali a été saluée par la classe politique et l’opinion nationale.

Suite à ce constat d’échec, les listes électorales ont été reprises. Mais, malgré cette révision, certains partis politiques de l’opposition regroupés au sein d’un collectif ont lancé un mot d’ordre de boycott à l’occasion des élections présidentielles et législatives.

Ce boycott a donné lieu à des manifestations politiques violentes ayant conduit, d’une part, à des morts d’hommes et, d’autre part, à l’arrestation et à la condamnation de nombreux militants de l’opposition, lesquels ont, au nom de l’apaisement du climat politique, bénéficié d’une mesure de grâce présidentielle.

C’est précisément à cause de ces scènes de violence que des leaders de partis d’opposition ont été arrêtés, inculpés et mis en liberté provisoire par des magistrats agissant en toute indépendance.

La plupart des partis politiques ont cependant pris part aux élections communales de 1998 et 1999.

4. Les élections générales de 2002

Si les élections de 1997 ont été vivement contestées, il n’en fut pas de même pour celles de 2002, qui se sont dans l’ensemble bien déroulées. Toutefois, le scrutin de 2002 a lui aussi connu des critiques dues essentiellement aux annulations de votes par la Cour constitutionnelle pour causes de fraude.

Par arrêts no 02‑137/CC‑EP en date du 23 mai 2002 et no 02‑144/CC‑EL du 9 août 2002, la Cour constitutionnelle, conformément à ses attributions, a proclamé les résultats définitifs de l’élection du Président de la République et ceux des élections législatives. De même, elle a statué sur 47 réclamations relatives au deuxième tour de l’élection présidentielle et 505 réclamations relatives au deuxième tour des élections législatives.

Indépendamment de ces requêtes, la Cour a pris en compte ses propres éléments d’appréciation que sont les documents électoraux (procès‑verbaux, feuilles de dépouillement), les rapports de ses délégués à travers tout le pays et les rapports de ses membres envoyés en mission dans les différentes circonscriptions électorales.

De l’analyse de ces arrêts, il ressort essentiellement que la Cour constitutionnelle a constaté le bien‑fondé de certaines réclamations et a procédé par conséquent aux annulations et rectifications conséquentes conformément à l’article 142 de la loi électorale qui dispose que «la Cour constitutionnelle procède au recensement général des votes, contrôle la régularité du scrutin et en proclame les résultats définitifs». La Cour constitutionnelle a procédé au recensement des votes, opéré diverses rectifications d’erreurs matérielles, et effectué les redressements nécessaires. C’est ainsi que les résultats de certains bureaux de vote furent partiellement ou totalement annulés et ceux de certaines circonscriptions purement annulés. Dans ces dernières, à savoir Tin-Essako et Sikasso, des élections législatives partielles furent organisées plus tard.

Des statistiques définitives pour les élections de 2002, il ressort que 5 746 202 électeurs, dont 506 631 à l’extérieur, ont été identifiés selon une information de la Délégation générale aux élections.

Les électeurs ont été répartis entre 12 004 bureaux de vote, dont 463 itinérants. La répartition des bureaux de vote ont été faite sur la base des propositions avancées par les préfets.

Au titre des élections présidentielles de 2002, 25 personnalités dont une femme ont fait acte de candidature. Seule une candidature a été rejetée, au motif que le postulant n’avait pas payé la caution de 5 000 000 francs CFA exigée.

À l’issue des élections législatives, huit partis politiques sont représentés à l’Assemblée nationale. Des députés indépendants y siègent à leur côté. L’Assemblée comprend 147 élus, dont 15 femmes.

VII. AUTRES MESURES D’APPLICATION (art. 2, al. 2 et 3 du Pacte)

Depuis la présentation du dernier rapport du Mali, en 1981, plusieurs mesures ont été prises dans la mise en œuvre des dispositions du Pacte. Nous pouvons retenir entre autres:

1. Le Médiateur de la République

La loi no 97‑002 du 10 mars 1997 instituant le Médiateur de la République précise qu’il est nommé pour sept ans par le Président de la République. Il peut être saisi par tout citoyen, toute association ou organisation contre le fonctionnement de l’administration dans ses rapports avec les administrés.

Toutefois, il ne peut être saisi en ce qui concerne les dossiers faisant l’objet d’une procédure judiciaire, hormis les cas d’inexécution de décision de justice.

Après examen des dossiers dont il est saisi, il fait des recommandations susceptibles d’en régler les difficultés.

Autorité indépendante, le Médiateur de la République reçoit les réclamations de toute personne physique ou morale concernant le fonctionnement des administrations de l’État, des collectivités territoriales, des établissements publics, et de tout organisme investi d’une mission de service public dans leurs relations avec les administrés.

Le Mali a connu jusqu’ici deux médiateurs, l’actuel étant une femme.

2. Statut de l’opposition

Le statut des partis politiques de l’opposition en République du Mali est régi par la loi no 00‑047 du 13 juillet 2000. Cette loi confère à l’opposition un statut juridique dans le cadre démocratique et pluraliste aux fins de contenir le débat politique dans les limites de la légalité et d’assurer l’alternance démocratique au pouvoir.

3. Comité national de l’égal accès aux médias d’État

Conformément à l’article 7 de la Constitution, le Comité national de l’égal accès aux médias d’État a été créé par la loi no 93‑001 du 6 janvier 1993.

Organe indépendant, il assure l’égal accès de tous aux médias d’État dans les conditions fixées par les lois et règlements en vigueur au Mali.

À ce titre, il veille:

À l’équilibre et au pluralisme de l’information, en tenant compte des différentes sensibilités politiques, économiques, sociales et culturelles du pays;

À une gestion équitable du temps d’antenne et de l’espace rédactionnel consacré aux candidats et aux formations politiques pendant les campagnes électorales.

4. Conseil supérieur de la Communication

Créé par la loi no 92‑038, cet organe peut émettre un avis sur toutes questions relatives aux conditions de production, de programmation, de diffusion et de publication en matière de communication écrite et audiovisuelle, ainsi que sur toutes celles portant sur la garantie de la liberté de communication.

Sans préjudice de la réglementation sur les conditions et procédures d’obtention, de suspension et de retrait de l’autorisation de création, de services privés de radiodiffusion et de télévision, le Conseil supérieur de la communication statue sur l’attribution et le retrait des fréquences aux stations de radiodiffusion et de télévision.

VIII . CONCLUSION

Le Gouvernement malien, qui considère que la mise en œuvre des dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques est un devoir permanent et une mission de longue haleine, investit avec le concours des partenaires (dont les ONG), de gros efforts dans le domaine des droits civils et politiques par l’harmonisation des textes législatifs et réglementaires nationaux avec le contenu dudit Pacte. Ces efforts ont permis au Mali de faire des progrès significatifs dans la voie de la démocratie, de la bonne gouvernance et de l’État de droit, donc du respect et de la protection des droits civils et politiques.

Décembre 2002 

ANNEXE

RATIFICATION DES PRINCIPAUX ACCORDS INTERNATIONAUX

Pacte international relatif aux droits civils et politiques: adhésion par ordonnance no 25‑CMLN du 3 juillet 1974.

Protocole facultatif no 1 se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques: ratifié par ordonnance no 00‑001/P‑RM du 9 févier 2000.

Convention sur les droits politiques de la femme: adhésion par ordonnance no 23‑CMLN du 3 juin 1974.

Conventions de Genève de 1949 relatives au droit international humanitaire.

Protocoles additionnels du 8 juin 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949 concernant le droit humanitaire: adhésion le 8 février 1989.

Convention no 138 concernant l’âge minimum d’adhésion à l’emploi: ratifiée par la loi no 061 du 3 juillet 2001.

Convention no 182 concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination: ratifiée par la loi no 00‑54/AN‑RM du 9 août 2000.

Protocoles additionnels à l’exécution des différentes étapesdu Protocole sur la libre circulation des personnes, le droit de résidence et d’établissement dans l’espace CEDEAO.

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