Nations Unies

CRC/C/TJK/CO/2

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

5 février 2010

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’enfant

Cinquante-troisième session11-29 janvier 2010

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 44 de la Convention

Observations finales: Tadjikistan

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Tadjikistan (CRC/C/TJK/2) à ses 1471e et 1473e séances (CRC/C/SR.1471 et 1473), tenues les 18 et 19 janvier 2010, et a adopté à sa 1501e séance, tenue le 29 janvier 2010, les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique, soumis par l’État partie, ainsi que les réponses écrites à la liste des points à traiter et se félicite du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec une délégation pluridisciplinaire de haut niveau.

B.Mesures de suivi adoptées et progrès accomplis par l’État partie

3.Le Comité se félicite de la ratification des instruments internationaux ci-après:

a)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, le 5 août 2002;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, le 5 août 2002;

c)La Convention no 182 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination, le 8 juin 2005;

d)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée, le Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, le 8 juillet 2002.

4.Le Comité salue les progrès réalisés dans le domaine des droits de l’homme, en particulier:

a)La création en 2001 de la Commission des droits de l’enfant, qui comprend des représentants de la société civile et de groupements de jeunes, et la création en 2003 de départements des droits de l’enfant au niveau des districts;

b)L’adoption de programmes nationaux et de stratégies ayant trait à la santé, notamment au VIH/sida, en 2000, et à l’éducation des enfants, en 2002;

c)L’adoption de la loi sur l’égalité entre hommes et femmes, en 2005, et du Programme national pour la période 2001-2010, en 2001;

d)Les modifications apportées en 2004 à l’article 130 (traite des personnes) et à l’article 167 (traite des mineurs) du Code pénal; la modification apportée en 2004 à l’article 89 du Code pénal, qui prévoit des peines plus légères pour les enfants qui commettent une infraction pour la première fois; et l’adoption en 2004 de la nouvelle loi contre la traite d’êtres humains.

C.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

5.Le Comité note que l’État partie a dû faire face ces dernières années aux conséquences de la guerre civile et à d’importantes difficultés économiques et sociales, notamment aux retombées de la crise économique mondiale, à la pauvreté et à la corruption généralisées, qui ont eu des incidences particulièrement graves sur les enfants.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

6.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour donner suite aux observations finales concernant son précédent rapport (CRC/C/15/Add.136), mais il regrette que certaines des préoccupations et recommandations formulées lors de l’examen du rapport n’aient pas été suffisamment prises en compte ou mises en œuvre.

7.Le Comité prie instamment l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite aux recommandations figurant dans les observations finales sur le rapport initial qui n’ont pas été mises en œuvre ou ne l’ont pas été suffisamment, en particulier celles concernant l’augmentation des crédits budgétaires, la collecte de données sur les personnes de moins de 18 ans, la prévention du placement des enfants en institution et de la violence contre les enfants, le renforcement des services de santé et de l’intégration scolaire, l’interdiction du travail des enfants et la mise en place d’un système de justice pour mineurs.

Législation

8.Le Comité relève que l’État partie a adopté des mesures législatives et administratives supplémentaires concernant les droits de l’enfant, mais il demeure préoccupé par le fait que la législation nationale ne prend pas suffisamment en compte toutes les dispositions de la Convention.

9. Le Comité recommande à l’État partie d’examiner avec soin les dispositions existantes, d’ordre législatif et autre, en vue de modifier la législation en vigueur ou d’adopter de nouvelles lois pour que toutes les dispositions de la Convention soient prises en considération .

Coordination

10.Le Comité accueille avec satisfaction les différentes mesures prises par l’État partie pour coordonner l’application de la Convention, notamment la création de la Commission des droits de l’enfant, mais il regrette l’absence de coordination administrative et de coopération entre les différents organismes publics chargés de la mise en œuvre de la Convention aux niveaux central et local, ainsi que le manque de ressources humaines, techniques et financières.

11. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer le mécanisme de coordination en organisant la coordination et l’évaluation des activités à tous les niveaux de l’administration, en particulier la coordination interrégional e et interministériel le . Le Comité recommande aussi à l’État partie de donner à la Commission des droits de l’enfant un rang et un mandat approprié s ainsi que des ressources humaines, financières et techniques suffisantes.

Suivi indépendant

12.Le Comité accueille avec satisfaction la création en 2009 de l’institution du Médiateur pour les droits de l’homme et relève que le Médiateur est habilité à enquêter sur les plaintes déposées par tous les citoyens, y compris les enfants, et à agir de sa propre initiative. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que les intérêts spécifiques des enfants puissent ne pas être suffisamment pris en compte par cette institution en raison du caractère général de son mandat.

13. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De veiller à ce que la structure et les fonctions de l’institution du Médiateur pour les droits de l’homme soient pleinement conformes aux P rincipes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l’homme (Principes de Paris, résolution 48/134 de l’Assemblée générale, annexe), en tenant compte de l’Observation générale n o  2 (2002) du Comité concernant le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant;

b) D’allouer à l’institution du Médiateur pour les droits de l’homme l es ressources financières, techniques, humaines et matérielles nécessaires à l’exécution de son mandat;

c) D’envisager de créer un poste haut placé de médiateur pour les droits de l’enfant pour surveiller l’application de la Convention aux niveaux national et local, en veillant en particulier à ce que ce mécanisme soit accessible aux enfants, soit habilité à recevoir et à examiner les plaintes concernant des violations des droits de l’enfant d’une manière respectueuse de la sensibilité des enfants, et dispose des ressources humaines, financières et techniques nécessaires pour traiter ces plaintes efficacement.

Plan d’action national

14.Le Comité accueille avec satisfaction le Plan d’action national pour l’enfance pour la période 2003-2010, adopté en 2003, et la Commission des droits de l’enfant, qui coordonne la mise en œuvre du Plan d’action, mais il regrette qu’il n’y ait pas de mécanisme chargé de suivre et d’évaluer l’exécution de ce plan, qui est par ailleurs entravée par un manque de ressources.

15.Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le Plan d’action national pour l’enfance porte sur tous les domaines visés par la Convention et prenne en considération le document final intitulé «Un monde digne des enfants», adopté en 2002 à la session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies consacrée aux enfants, ainsi que la déclaration adoptée en 2007 sur les suites données à cette session extraordinaire . Le Comité recommande en outre d’allouer à la Commission des droits de l’enfant, chargée de coordonner la mise en œuvre du Plan d’action national pour l’enfance, l es ressources humaines et financières voulues pour qu’elle puisse s’acquitter de son mandat. Le Comité recommande également à l’État partie de mettre en place des mécanismes de suivi et d’évaluation pour mesurer les progrès accomplis et déceler les éventuelles lacunes.

Allocation de ressources

16.Le Comité se félicite des améliorations apportées au financement des secteurs de l’éducation et de la santé. Il relève toutefois que les investissements dans les domaines de la santé, de l’éducation et de la protection sociale restent très faibles et ne représentent qu’un très petit pourcentage du produit intérieur brut (PIB). Le Comité note que, en raison de la crise économique internationale, les envois de fonds des travailleurs migrants tadjiks, qui constituaient une part importante du PIB (30 %), ont considérablement diminué. Il relève en outre l’absence d’informations sur les programmes de subvention et les mécanismes de suivi s’y rapportant. Le Comité fait observer que l’État partie doit faire d’importants efforts pour assurer une gestion budgétaire transparente et efficace et évaluer les effets des investissements sur les enfants.

17. Le Comité recommande de mettre pleinement en œuvre l’article 4 de la Convention en s’attachant à:

a) Accroître considérablement les crédits budgétaires en faveur de l’éducation, de la santé et de la protection sociale des enfants et renforcer l’efficacité des systèmes existants;

b) Élaborer des programmes budgétaires stratégiques pour réduire les disparités et cibler les droits des groupes défavorisés, dont les enfants handicapés, les enfants vivant dans la pauvreté, les enfants des zones reculées, les enfants infectés par le VIH/sida, les orphelins et les filles;

c) Renforcer les capacités des agents de l’État qui s’occupent de la budgétisation, de la planification, du suivi et de l’évaluation des retombées des investissements aux niveaux central et local;

d) Créer des systèmes de suivi et d’évaluation pour les divers programmes de subvention existants;

e) Créer un système transparent en vue d’éradiquer la corruption et de garantir que les allocations destinées aux enfants bénéficient bien à leurs destinataires .

Collecte de données

18.Le Comité relève que des efforts ont été faits par l’État partie pour réformer le système national de statistique, mais il demeure préoccupé par l’absence de collecte et de ventilation systématiques de données concernant l’exercice par les mineurs de 18 ans des droits visés par la Convention aux fins de l’évaluation des progrès accomplis et de l’élaboration de politiques axées sur la mise en œuvre de la Convention.

19. Le Comité réitère les recommandations formulées précédemment tendant à ce que l’État partie recueille des données concernant toutes les personnes de moins de 18 ans. Il insiste sur le fait que ces données sont essentielles pour analyser la situation des enfants , afin de concevoir des politiques ciblées. Le Comité recommande que les données recueillies et produites par le Comité d’État de statistique soient ventilées, notamment par âge, sexe, zone géographique, origine ethnique et situation sociale et économique et soient effectivement utilisées pour informer les décideurs , et que des efforts soient faits pour renforcer les capacités des organismes publics en matière d’analyse des données. Il recommande à nouveau à l’État partie de solliciter à cet égard l’assistance technique du Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), entre autres.

Diffusion de la Convention et formation

20.Le Comité salue les efforts faits pour sensibiliser le public à la Convention, notamment l’introduction de l’enseignement des droits de l’homme dans les programmes du secondaire et l’instauration d’une Journée nationale des droits de l’homme, ainsi que la publication de brochures et d’affiches sur les droits de l’enfant et de journaux sur les droits de l’homme. Tout en relevant que de nombreuses activités de diffusion et de formation ont été organisées avec l’assistance de l’UNICEF, ou uniquement en collaboration avec des organisations non gouvernementales dans certaines régions, le Comité demeure préoccupé par l’absence à cet égard d’une stratégie systématique et durable.

21. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer un programme systématique et durable de diffusion d’informations sur la mise en œuvre de la Convention visant les enfants, les parents, la société civile, tous les secteurs et tous les niveaux des pouvoirs publics dans l’ensemble du pays. Il conviendrait notamment de concevoir des programmes de formation à l’intention de toutes les catégories de professionnels qui travaillent avec et pour les enfants. Le Comité encourage l’État partie à solliciter à cet égard l’assistance technique de l’UNICEF et d’autres organismes compétents, entre autres.

Coopération avec la société civile

22.Le Comité relève que l’État partie s’efforce d’associer la société civile à la mise en œuvre de la Convention, en l’autorisant à participer activement aux activités de sensibilisation et de formation. Il constate toutefois avec préoccupation que cette coopération est, la plupart du temps, fondée sur des projets et que l’État partie s’appuie fortement sur les ONG pour la mise en œuvre de certaines des dispositions de la Convention, sans leur fournir les ressources, les orientations et les directives nécessaires.

23. Le Comité réitère sa précédente recommandation tendant à ce que l’État partie envisage de faire participer systématiquement la société civile à tous les stades de la mise en œuvre de la Convention, notamment à celui de la prise de décisions. Le Comité encourage aussi l’État partie à soutenir les initiatives qui visent à renforcer le rôle des ONG. Il lui recommande en outre , eu égard aux recommandations qu’il a adoptées le 29 septembre 2002 lors de sa journée de débat général sur le thème: «Le secteur privé en tant que prestataire de service et son rôle dans la mise en œuvre des droits de l’enfant» (CRC/C/121, par. 630 à 653), d’assumer pleinement les responsabilités qui lui incombent au titre de la Convention.

2.Définition de l’enfant (art. 1er de la Convention)

Définition de l’enfant

24.Le Comité note avec préoccupation que l’âge légal minimum du mariage au Tadjikistan a été abaissé à 17 ans.

25. Le Comité prie instamment l’État partie de rétablir à 18 ans l’âge légal minimum du mariage pour les femmes et les hommes, comme l’avait recommandé en 2007 le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

3.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12 de la Convention)

Non-discrimination

26.Tout en prenant acte des modifications et des mesures législatives adoptées pour lutter contre la discrimination à l’égard des femmes et des filles, le Comité demeure préoccupé par le degré d’application limité de ces textes et par la persistance d’une discrimination de fait à l’égard des filles. Il s’inquiète particulièrement du taux élevé d’abandon scolaire des filles dans les zones rurales, dû aux mentalités traditionnelles et religieuses néfastes concernant le rôle des filles et des femmes dans la société. Le Comité est également préoccupé par les attitudes discriminatoires et par la discrimination dont sont victimes les enfants handicapés, les enfants placés en institution et les enfants qui vivent dans les zones rurales.

27. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour mettre en œuvre la législation existante et de veiller à ce que tous les enfants relevant de sa juridiction, en particulier les filles, les enfants handicapés, les enfants placés en institution, les enfants des zones rurales et les autres groupes vulnérables d’enfants jouissent, sans discrimination aucune, de tous les droits énoncés dans la Convention, conformément à son article 2. Le Comité recommande aussi à l’État partie d’accorder la priorité aux services sociaux destinés aux enfants qui appartiennent aux groupes les plus vulnérables. Il encourage l’État partie à lancer de vastes campagnes de sensibilisation pour prévenir et combattre les mentalités traditionnelles et religieuses néfastes, notamment la discrimination fondée sur le sexe.

28. Le Comité demande que dans le prochain rapport périodique figurent des informations précises sur les mesures et programmes en rapport avec la Convention mis en œuvre par l’État partie en vue de donner suite à la Déclaration et au Programme d’action de Durban adoptés en 2001 à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée et à la Conférence d’examen de Durban, tenue en avril 2009, compte tenu également de l’Observation générale n o 1 (2001) du Comité concernant les buts de l’éducation.

Intérêt supérieur de l’enfant

29.Le Comité relève que l’État partie a introduit le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant dans sa législation, en particulier dans le Code de la famille. Il s’inquiète toutefois de ce que ce principe ne soit pas encore suffisamment pris en compte dans la législation.

30. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour que, conformément à l’article 3 de la Convention, le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit dûment pris en considération dans toutes les dispositions législatives et soit appliqué concrètement dans les décisions judiciaires et administratives et dans les programmes, projets et services intéressant les enfants.

Respect des opinions de l’enfant

31.Tout en se félicitant de ce que le Code de la famille impose l’obligation de tenir compte de l’opinion de l’enfant, notamment en cas de divorce, le Comité constate avec préoccupation que le droit d’être entendu dans toutes les procédures judiciaires et administratives n’est pas suffisamment mis en œuvre et que le respect de l’opinion de l’enfant à l’école, dans les institutions et en particulier dans la famille reste limité en raison des attitudes traditionnelles de la société envers les enfants.

32. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et de renforcer les efforts visant à mettre en œuvre l’article 12 de la Convention et à promouvoir le respect des opinions de l’enfant en tous lieux, notamment en s’employant à:

a) Mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour renforcer l’application des mesures visant à garantir le droit de l’enfant d’être entendu dans toute procédure susceptible d’avoir des incidences sur ses droits, en particulier lorsque des mesures sont prises par les organismes de protection sociale, les tribunaux et les autorités administratives, y compris au niveau local;

b) S’efforcer d’élaborer une approche et une politique systématiques en consultation avec les responsables communautaires et religieux, les ONG, les professionnels qui travaillent avec les enfants, notamment les enseignants et les travailleurs sociaux, et les enfants eux-mêmes, pour sensibiliser le public au moyen de programmes spécifiques et ciblés, et encourager les familles, les écoles, la communauté et le public en général à adopter une attitude respectueuse des opinions de l’enfant;

c) Prendre en considération l’Observation générale n o 12 (2009) du Comité concernant le droit de l’enfant d’être entendu.

4.Droits et liberté civils (art. 7, 8, 13 à 17, 19 et 37 a) de la Convention)

Enregistrement des naissances

33.Le Comité note les efforts faits par l’État partie pour faciliter l’enregistrement rapide des naissances, notamment en formant le personnel des hôpitaux et des bureaux d’enregistrement des naissances, en lançant des campagnes de sensibilisation et en réduisant les frais d’enregistrement, mais il demeure préoccupé par le fait que, dans les zones rurales reculées, l’enregistrement des naissances n’est pas pleinement assuré. Il s’inquiète également de ce que certains ménages urbains ne fassent pas enregistrer leurs enfants en raison des taxes obligatoires.

34. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour lever tous les obstacles d’ordre administratif et financier qui découragent les parents de fa ire enregistrer leurs enfants, de garantir un enregistrement des naissances gratuit et rapide, notamment dans les zones rurales reculées et d’encourager la création de bureaux d’enregistrement mobiles et d’unités d’enregistrement dans les écoles et dans les établissements de soins. Il recommande aussi d’organiser des campagnes nationales de sensibilisation sur l’importance de l’enregistrement des naissances pour les enfants .

35.Le Comité relève avec inquiétude que l’accès aux informations sur la famille biologique est limité et que les possibilités pour les enfants nés de mère célibataire de retrouver leur père et les possibilités de faire établir la paternité sont limitées.

36. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour que les enfants aient accès aux information s sur leurs parents biologiques et en particulier pour qu’ils aient la possibilité de faire établir une paternité par t ous les moyens, notamment par des test s ADN.

Torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

37.Le Comité relève que les agents des forces de l’ordre ont suivi des formations dispensées par des organisations non gouvernementales, mais il regrette qu’il n’existe pas à leur intention de programme de formation obligatoire sur les droits de l'enfant. Il s’inquiète particulièrement des informations selon lesquelles des enfants placés dans des institutions pour enfants handicapés seraient maltraités et aucune enquête ne serait menée sur ces affaires.

38. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures appropriées pour lutter contre la torture et les traitements cruels, inhumains ou dégradants, et notamment de mettre en place de s programmes de formation systématique à l’échelon national et local, destinés à tous les professionnels travaillant avec et pour des enfants, traitant de la prévention et de la protection contre la torture et autres formes de mauvais traitement. Le Comité recommande en outre à l’État partie d’enquêter sur les allégation s de torture et de mauvais traitement s infligés à des enfants, en particulier à des enfants placés en institution, de veiller à ce que les cas signalés fassent systématiquement l’objet d’enquêtes et de poursuites et de prendre toutes les mesures nécessaires pour traduire les auteurs présumés en justice.

Châtiments corporels

39.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour sensibiliser le public à la violence contre les enfants, notamment du lancement de campagnes intitulées «Protéger les enfants contre la maltraitance» ainsi que de la création de centres de réadaptation pour les femmes et les enfants. Il regrette toutefois que ces activités soient limitées à certaines régions du pays et que les châtiments corporels ne soient pas expressément interdits par la législation nationale et soient largement utilisés comme mesure disciplinaire à la maison, à l’école et dans les établissements d’accueil pour enfants. Le Comité regrette le manque de données représentatives sur le recours aux châtiments corporels de la part des parents, des enseignants et du personnel des établissements d’accueil pour enfants.

40. Le Comité recommande à l’Ét at partie de prendre de toute urgence les mesures suivantes:

a ) Mener une étude sur la fréquenc e des châtiments corporels dans tous les contextes;

b) Adopte r une législation interdisant expressément toutes les formes de châtiment corporel en tous lieux;

c) Organiser des campagnes de sensibilisation portant sur les effets négatifs des châtiments corporels sur les enf ants et dispenser une formation aux enseignants, aux parents, aux dirigeants locaux et aux personnels des institutions pénitentiaires;

d) Mener des enquêtes sur les cas signalés de châtiment s corporel s et appliquer les sanctions adéquates.

41. Se référant à l’É tude des Nations Unies sur la violence à l’encontre des enfants menée à l’initiative du Secrétaire général, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour mettre en œuv re les recommandations figurant dans l’ É tude (A/61/299), en tenant compte des conclusions des C onsultations régionales pour l’Europe et l’Asie centrale (qui ont eu lieu en Slovénie du 5 au 7 juillet 2005). En particulier, le Comité recommande à l’État partie:

i) D’interdire toute violence à l’encontre des enfants;

ii) De renforcer l’engagement et les actions aux niveaux national et local;

iii) De promouvoir les valeurs non violentes et de sensibiliser;

iv) D’améliorer les aptitudes de tous ceux qui travaillent avec et pour les enfants;

v) D’établir l’ obligation de répondre de s es actes et de mettre fin à l’impunité;

vi) D’assurer des services de réadaptation et de réinsertion sociale;

vii) D’élaborer et d’appliquer des mécanismes systématiques de collecte de données et de recherche.

a) D’utiliser ces recommandations comme un moyen d’action, en parten ariat avec la société civile et en particulier avec la participation d’enfants, pour faire en sorte que chaque enfant soit protégé contre toutes les formes de violence physique, sexuelle et psychologique, et de donner l’impulsion nécessaire à des actions concrètes s’inscrivant dans un calendrier précis pour prévenir et combattre les violences et les sévices de ce type;

b) De faire figurer dans le prochain rapport périodique des informations sur la mise en œuvre par l’État partie des r ecommandations figurant dans l’É tude;

c) De solliciter à cet égard l’assistance technique du Représentant spécial du Secrétaire général sur la violence à l’encontre des enfants, du HCDH , de l’UNICEF et de l’OMS, et d’autres organismes compétents, notamment de l’ OIT, de l’ UNESCO, du HCR, de l’ONUDC ainsi que des ONG partenaires.

5.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 18 (par. 1 et 2), 9 à 11, 19 à 21, 25, 27 (par. 4) et 39 de la Convention)

Milieu familial et responsabilités parentales

42.Le Comité relève que, conformément au Code de la famille, les questions concernant l’éducation des enfants sont réglées par les parents d’un commun accord, dans l’intérêt supérieur de l’enfant et compte tenu de son opinion. Il constate toutefois avec préoccupation que de nombreux parents qui rencontrent des difficultés économiques préfèrent placer leurs enfants en institution et que la plupart des familles n’ont pas conscience des effets négatifs que ce placement peut avoir sur le développement de l’enfant.

43. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ apporter un soutien aux familles pour qu ’ elles puissent s ’ acquitter de leurs responsabilités parentales, notamment en renforçant la structure familiale et en créant un réseau social de protection de l ’ enfance au niveau communautaire;

b) De prévoir des programmes d ’ assistance économique et sociale pour les familles , en accordant une attention particulière aux plus vulnérables d’entre elles telles que les familles monoparentales, afin de prévenir le placement en institution;

c) De sensibiliser le public aux effets négatifs du placement en institution sur le développement de l ’ enfant;

d) D ’ appuyer la mise en place de services communautaires de garde d’enfants qui soient axés sur la famille.

Enfants privés de milieu familial

44.Tout en prenant note des efforts faits par l’État partie pour réduire le nombre de placements en institution, le Comité est préoccupé par le fait que le nombre d’enfants placés dans des institutions de l’État a augmenté de 38 % pendant la période à l’examen. Il est particulièrement préoccupé par la nouvelle tendance consistant à placer temporairement en institution les enfants dont les parents émigrent. Le Comité regrette que les enfants privés de protection familiale puissent rarement bénéficier d’une protection de remplacement autre qu’un placement en institution, alors que les conditions de vie dans les établissements d’accueil sont mauvaises et que l’État n’exerce aucun contrôle sur les conditions de prise en charge.

45. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De continuer à prendre des mesures visant à réduire le nombre de placements en institution dans tout le pays;

b) D ’ améliorer la qualité de la prise en charge des enfants placés dans des établissements d ’ accueil et de créer des mécanismes de contrôle des conditions de prise en charge;

c) D ’ établir des normes claires pour les institutions existantes et de procéder à un examen périodique du placement des enfants dans tous les districts de l ’ État partie, à la lumière de l ’ article 25 de la Convention et des Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants (A/RES/64/142).

Adoption

46.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie concernant l’adoption, telles que les restrictions imposées en matière d’adoption internationale compte tenu de l’insuffisance du contrôle dans ce domaine. Le Comité se félicite également de l’engagement pris par l’État partie au cours du dialogue de modifier sa législation relative à l’adoption pour y inclure le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant. Il demeure toutefois préoccupé par le fait que le système actuel d’adoption ne prévoit pas de procédure de sélection et de contrôle des parents candidats à l’adoption.

47. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ adhérer à la Convention de La Haye de 1993 sur la protection des enfants et la coopération en matière d ’ adoption internationale;

b) D ’ adopter une nouvelle législation sur l ’ adoption conforme à l ’ article 21 de la Convention et aux procédures prévues par la Convention de La Haye de 1993;

c) De c réer des mécanismes de sélection et de contrôle destinés à déterminer l ’ aptitude des candidats à devenir parents adoptifs et à garantir l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant à adopter;

d) D ’ établir une autorité centrale chargée des adoptions et de la doter d ’ un mandat clair et de ressources humaines et financières suffisantes;

e) De solliciter une assistance technique et une formation auprès de la Conférence de La Haye, entre autres.

Violence familiale

48.Le Comité se félicite de la création, au sein du Ministère du travail et de la protection sociale, du service de la protection sociale de la famille et de l’enfance, ainsi que de l’élaboration de programmes de formation à l’intention des travailleurs sociaux du service. Le Comité est toutefois profondément préoccupé par l’ampleur du phénomène de la violence familiale, qui touche en particulier les femmes et les filles. Il constate également avec préoccupation que cette violence généralisée est acceptée par la société et que les auteurs d’actes de violence jouissent de l’impunité en raison de l’absence de lois, de programmes sociaux et d’un plan national visant à prévenir, faire cesser et réprimer la violence contre les femmes et les filles.

49. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ adopter une l oi sur la protection sociale et juridique contre la violence familiale;

b) D ’ élaborer un plan national de prévention et d’élimination de la violence contre les femmes et les filles, compren ant notamment des mesures de sensibilisation et d’ éducation visant à faire comprendre que la violence familiale est inacceptable, le renforcement des capacités des forces de l ’ ordre et de l’appareil judiciaire , la protection et la réadaptation des victimes ainsi que l ’ application de sanctions aux coupables ;

c) De mettre en œuvre les recommandations formulées en 2007 par le Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes concernant la violence familiale.

6.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) de la Convention)

Enfants handicapés

50.Le Comité regrette que le placement des enfants handicapés en institution reste pratique courante au Tadjikistan. Il accueille avec satisfaction la création du groupe d’experts qui a réalisé une analyse de la situation des enfants handicapés, mais il regrette que les institutions de l’État qui accueillent des enfants handicapés ne leur assurent pas une éducation de qualité et des services de réadaptation et ne leur permettent pas d’acquérir les compétences voulues. Il prend également note des mauvaises conditions de vie qui règnent dans ces établissements, de la malnutrition et de l’insuffisance des politiques d’intégration en faveur des enfants handicapés.

51. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De prendre des mesures pour réduire le nombre de placements d ’ enfants handicapés en institution et pour apporter aux familles de ce s enfants un soutien approprié notamment en renforçant leurs compétences parentales et en leur fournissant l es ressources financières suffisantes et l ’ appui nécessaire pour que le placement puisse être évité ;

b) D e redoubler d’ efforts pour mener des campagnes de sensibilisation visant à informer le public des droits et des besoins spécifiques des enfants handicapés et d ’ encourager l ’ insertion de ces enfants dans le système éducatif et dans la société;

c) D ’ appuyer le développement de services d ’ intervention précoc e au niveau communautaire;

d) De faciliter l ’ accès des enfants hand icapés aux bâtiments publics, y  compris aux infrastructures de loisir s et aux écoles;

e) D ’ améliorer les conditions de vie dans les établissements qui accueillent des enfants handicapés, de créer des mécanismes indépendants chargés de contrôler les conditions d’accueil et le respect des droits de l ’ enfant dans ces institutions, et de mettre en place un système de formation d’éducateurs spécialisé s ;

f) D ’ envisager de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s ’ y rapportant;

g) De prendre en considération l ’ article 23 de la Convention et l ’ Observation générale n o 9 (2006) du Comité concernant les droits des enfants handicapés ainsi que les Règles des Nations Unies pour l ’ égalisation des chances des handicapés (résolution 48/96 de l ’ Assemblée générale).

Santé et services de santé

52.Le Comité accueille avec satisfaction les stratégies et les programmes nationaux concernant le droit à la santé, notamment les programmes de vaccination et les recherches sur la santé des enfants. Il se félicite également de la diminution du taux de mortalité infantile dans l’État partie pendant la période à l’examen. Il constate toutefois avec préoccupation qu’une part très faible du PIB est allouée au secteur des soins de santé et que l’accès à des services médicaux de qualité est limité dans les zones rurales reculées en raison de l’absence d’établissements médicaux dans ces régions et de la pénurie de personnel médical. Le Comité note avec préoccupation que le rapport de l’État partie ne donne pas d’informations sur la situation des enfants et des adolescents en matière de santé mentale et sur les services proposés aux enfants souffrant de problèmes de santé mentale. Il est également préoccupé par le taux élevé de malnutrition chez les enfants et par les difficultés d’accès aux systèmes d’assainissements et à une eau potable propre, fiable, d’un coût abordable et en quantité suffisante.

53. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D ’ augmenter sensiblement la part du PIB consacrée aux soins de santé et d ’ accorder la priorité aux services de santé pour les enfants et, en particulier, aux soins de santé primaire s ;

b) D ’ améliorer les infrastructures de santé, de recruter et de former davantage de professionnels de la santé afin de répondre aux besoins des enfants dans l’ensemble du pays, principalement en ce qui concerne le s soins de santé primaire s ;

c) De prendre de nouvelles mesures visant à réduire la mortalité infantile et juvénile, notamment en mettant l ’ accent sur les mesures de prévention et sur l’offre d’un traitement approprié ;

d) D ’ assurer la viabilité financière et la gestion efficace des programmes d ’ intervention visant à garantir la survie des enfants, tels que la vaccination, la prévention et le traitement de la malnutrition et l ’ accès à l ’ eau potable;

e) D’élaborer et de mettre en œuvre une politique globale relative à la santé mentale des enfants, qui comporte tous les éléments obligatoires, selon les recommandations de l’OMS, notamment en ce qui concerne la promotion de la santé mentale, la prévention des troubles mentaux dans le cadre des soins de santé primaires, la mise en place de services de santé mentale pour les patients externes ou hospitalisés, afin d’améliorer la santé mentale des enfants et de prévenir le placement en institution et la stigmatisation des enfants atteints de troubles mentaux;

f) De solliciter une coopération technique auprès de l’UNICEF et de l’OMS.

Santé des adolescents

54.Le Comité relève que l’État partie prévoit de développer les services de santé adaptés aux besoins des jeunes. Il prend aussi note de l’information donnée par la délégation pendant le dialogue, selon laquelle, en vertu de la législation en vigueur, les adolescents de moins de 16 ans ne peuvent bénéficier d’informations et de services confidentiels en matière de santé sexuelle et procréative. Le Comité regrette qu’aucune étude détaillée n’ait été menée sur les facteurs qui empêchent d’accéder aux informations relatives à la santé sexuelle et procréative. Il est en outre préoccupé par l’augmentation de la consommation d’alcool et de drogue chez les adolescents et par le peu d’efforts faits pour fournir à ces derniers une prise en charge et une réadaptation adéquates.

55. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) D’adopter une législation autorisant les adolescents à accéder à des informations et à des services en matière de santé sexuelle et procréative;

b) D’assurer le financement durable des services de santé adaptés aux besoins des jeunes et d’adopter une stratégie globale pour la mise en œuvre et le suivi de ces services;

c) De prendre des mesures appropriées pour remédier efficacement au problème de la consommation d’alcool et de drogue par les adolescents et pour offrir à ces derniers des services médicaux et psychologiques adéquats;

d) De solliciter la coopération de l’UNICEF et de l’OMS, entre autres.

VIH/sida

56.Le Comité accueille avec satisfaction le Programme national visant à prévenir et combattre le VIH/sida, mais il demeure préoccupé par le manque de données fiables sur le nombre de personnes vivant avec le VIH/sida qui, selon toutes les sources, est en augmentation, ainsi que par le fait que les jeunes, en particulier dans les zones rurales, sont très peu informés des modes de transmission du VIH/sida et de la manière de se protéger.

57. Le Comité prie instamment l’État partie, en tenant compte de l’Observation générale n o  3 (2003) du Comité sur le VIH/sida et les droits de l’enfant et des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme (E/CN.4/1997/37), de prendre des mesures pour réduire l’incidence du VIH/sida sur son territoire, en particulier parmi les adolescents, en s’employant notamment à:

a) Renforcer, poursuivre et élaborer des politiques et des programmes visant à apporter soins et soutien aux enfants infectés ou touchés par le VIH/sida, notamment des programmes et des politiques de nature à renforcer la capacité des familles et de la communauté de s’occuper de ces enfants;

b) Poursuivre ses efforts de sensibilisation afin de limiter l’incidence et la propagation du VIH/sida, en diffusant auprès du public des informations et de la documentation sur les méthodes de prévention et de protection, y compris sur les pratiques sexuelles sans risques;

c) Mener des activités visant à réduire la stigmatisation et la discrimination liées au VIH/sida et à sensibiliser la population aux droits de l’homme dans le contexte du VIH/sida;

d) Solliciter l’assistance technique du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida (ONUSIDA), de l’OMS et de l’UNICEF, entre autres.

Niveau de vie

58.Le Comité constate avec préoccupation que, malgré les aides sociales dont bénéficient, entre autres, les familles à faible revenu et les enfants sans parents, le taux de pauvreté des enfants est sensiblement plus élevé que le taux de pauvreté global, 66 % des enfants de moins de 18 ans sont pauvres, contre 61 % des adultes, et qu’il existe des disparités régionales en matière de niveau de vie. Le Comité est aussi préoccupé par l’absence d’informations sur la question de savoir si les stratégies de réduction de la pauvreté tiennent compte des besoins des enfants.

59. Conformément à l’article 27 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie:

a) De redoubler d’efforts pour faire reculer le taux de pauvreté des enfants, en particulier pour atténuer les effets de la crise économique sur les enfants;

b) D’accorder une attention particulière aux familles et aux enfants dans le cadre de l’élaboration de ses stratégies de réduction de la pauvreté, qui devraient comprendre des mesures ciblées visant à protéger les enfants des conséquences préjudiciables de la pauvreté sur leur développement, leur santé et leur éducation;

c) D’assurer l’accès à l’eau potable, à des systèmes d’assainissement adéquats, à la nourriture et à un hébergement dans toutes les régions et les communautés du pays, y compris pour les réfugiés;

d) De veiller à ce que les stratégies de réduction de la pauvreté prennent en compte les besoins des enfants et d’encourager la participation des parents et des enfants à l’élaboration de ces stratégies.

Pratiques traditionnelles néfastes

60.Le Comité est préoccupé par la pratique, en particulier dans les zones rurales, des mariages religieux non enregistrés (nikah) de très jeunes filles dans le cadre d’arrangements polygames. Le Comité note que la polygamie est interdite par le Code pénal, mais il constate avec préoccupation que cette pratique donne rarement lieu à des poursuites judiciaires. Il relève que les jeunes filles concernées deviennent souvent victimes de violence familiale.

61. Le Comité prie instamment l ’ État partie:

a) De faire appliquer les dispositions du Code pénal relatives aux mariages polygames en menant des enquêtes et en engageant des poursuites contre ceux qui se livrent à cette pratique;

b) D’associer la société civile et les chefs religieux aux actions visant à prévenir et combattre les mariages précoces et les mariages polygames;

c) Faire en sorte que les personnes qui célèbrent des mariages religieux de filles mineures voient leur responsabilité pénale engagée.

7.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28, 29 et 31 dela Convention)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

62.Le Comité se félicite des efforts faits par l’État partie pour recruter un nombre considérable d’enseignants en un temps très court afin de répondre aux besoins du système éducatif. Il prend note de l’adoption en 2002 du Cadre national de l’enseignement ainsi que du Programme pilote de réformes dans le domaine de l’enseignement, en particulier en faveur des enfants issus de familles à faible revenu. Il prend aussi note de la création du Centre pour une pédagogie axée sur l’égalité des sexes, chargé d’appuyer et de promouvoir l’égalité des garçons et des filles à tous les niveaux de l’éducation, dès la maternelle. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que l’éducation des enfants se heurte aux obstacles suivants:

a)La faible fréquentation scolaire, notamment le nombre croissant d’abandons scolaires, en particulier parmi les filles qui vivent en zone rurale, et les difficultés d’accès à l’éducation des enfants de familles à faible revenu et des filles;

b)Le manque de ressources, notamment l’insuffisance des infrastructures et de l’approvisionnement en énergie;

c)La médiocrité de la formation des enseignants;

d)La baisse de la qualité de l’enseignement, due notamment à la faiblesse des salaires des enseignants;

e)Le faible taux de scolarisation dans les structures d’éducation de la petite enfance et d’enseignement préscolaire;

f)La formation insuffisante des enseignants dans les langues minoritaires et le manque de manuels et de matériels scolaires dans les langues minoritaires.

63. Le Comité recommande à l ’ État partie:

a) De prendre toutes les mesures qui s’imposent pour assurer la mise en œuvre effective du Programme stratégique en faveur de l’éducation pour tous;

b) De veiller à ce que le système d’enseignement public bénéficie de fonds suffisants en augmentant sensiblement le pourcentage du PIB alloué au secteur de l’éducation;

c) De procéder à une évaluation critique des programmes scolaires de manière à supprimer toutes les pratiques discriminatoires en matière d’éducation, notamment pour ce qui est de l’accès limité des filles à l’éducation et à la formation, en élaborant des stratégies destinées à faire reculer le taux élevé d’abandon scolaire chez les filles des zones rurales, et de prendre des mesures pour venir à bout des stéréotypes concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes;

d) D’élaborer une stratégie efficace de recrutement et de fidélisation des enseignants et d’améliorer la qualité de leur formation;

e) De prendre des mesures pour promouvoir la participation des parents et des communautés à l’administration des écoles afin d’améliorer le taux de scolarisation et de surveiller la qualité de l’enseignement;

f) D’améliorer l’accès à l’éducation préscolaire et de promouvoir cette forme d’éducation, en particulier auprès des ménages à faible revenu, en sensibilisant les parents à l’importance du développement et de l’éducation de la petite enfance; d’encourager à cet égard les programmes communautaires informels et d’élaborer un plan global de développement de la petite enfance;

g) De redoubler d’efforts pour former les enseignants aux langues minoritaires et d’augmenter le nombre de manuels dans les langues minoritaires;

h) De solliciter l’assistance de l’UNICEF et de l’UNESCO, entre autres.

8.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 38, 39, 40, 37 b) à d) et 32 à 36 de la Convention)

Enfants demandeurs d’asile et réfugiés

64.Le Comité se félicite des efforts faits en matière d’enregistrement des naissances des enfants réfugiés et note que la Constitution garantit aux enfants réfugiés le droit à l’éducation, à la santé et à des prestations sociales. Il accueille aussi avec satisfaction la création, au sein du Service des migrations, d’un groupe spécifiquement chargé de s’occuper des enfants réfugiés, ainsi que le travail des ONG qui ont effectué des études sur la situation des réfugiés afghans au Tadjikistan. Il demeure néanmoins préoccupé par le manque de formation du personnel du Ministère de l’intérieur chargé de la détermination du statut de réfugié concernant la protection de l’enfance.

65. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De continuer à prendre des mesures pour que les demandes d’asile présentées par d es enfants soient examinées dans le cadre d’une procédure d’établissement du statut de réfugié qui tienne compte de l’intérêt supérieur, des besoins et des droits spécifiques des enfants demandeurs d’asile, conformément au droit international relatif aux réfugiés et aux droits de l’homme, en renforçant la formation des personnels chargés de la détermination du statut de réfugié, compte tenu de l’Observation générale n o  6 (2005) du Comité concernant le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine;

b) De s’efforcer de poursuivre sa politique d’accueil généreux des réfugiés afghans;

c) De veiller à ce que les enfants réfugiés, notamment les enfants non accompagnés et séparés, reçoivent une protection appropriée et, à cet égard, de poursuivre la coopération avec les institutions spécialisées compétentes des Nations Unies, notamment le Haut- Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (H C R), le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et l’UNICEF, ainsi qu’avec les ONG;

d) De ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides.

Exploitation économique, dont le travail des enfants

66.Le Comité se félicite de la ratification de la Convention no 182 de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants (1999) et de l’adoption en 2006 du décret présidentiel interdisant le travail des enfants. Il constate toutefois avec préoccupation que la législation nationale n’interdit pas expressément ni ne réprime le travail des enfants et que certains enfants travaillent dès l’âge de 10 ans. En particulier, le Comité est profondément préoccupé par le fait qu’un grand nombre d’enfants continuent à être employés dans le secteur informel et à effectuer des travaux non qualifiés dans le secteur des services et de l’agriculture, principalement dans les champs de coton. Le Comité s’inquiète en outre de ce qu’un grand nombre de filles travaillent comme domestiques, ce qui a pour conséquence un accroissement du taux d’abandon scolaire des filles, notamment dans les zones rurales.

67. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De poursuivre et de renforcer les efforts entrepris pour éradiquer le travail des enfants, en particulier les pires formes de travail, en s’attaquant aux causes profondes de l’exploitation économique par l’éducation et la lutte contre la pauvreté ;

b) D’incorporer dans le droit interne une définition du travail des enfants et d’assurer la pleine application de la législation interdisant le travail des enfants ainsi que le travail servile , de mettre en œuvre les Conventions de l’OIT n os  138 et 182, d’enquêter activement sur les infractions à la législation et d’en poursuivre et sanctionner les auteurs;

c ) D’œuvrer activement à faire appliquer les normes relatives à l’âge minimum d’admission à l’emploi, notamment en imposant aux employeurs d’avoir, et de produire sur demande, la preuve de l’âge de tous les enfants em ployés dans leur établissement ;

d) De renforcer l’inspection du travail et d’apporter aux inspecteurs tout le soutien nécessaire, y compris d es connaissances spécialisées sur le travail des enfants, pour leur permettre de surveiller efficacement l’application, aux niveaux national et local, des normes juridiques pertinentes et de recevoir d es plaintes en cas de violation , d’enquêter sur ces plaintes et de leur donner suite ;

e) De poursuivre la collaboration avec les ONG, la société civile et le Programme international pour l’abolition du travail des enfants (IPEC) de l’OIT.

Vente, traite et enlèvement

68.Le Comité prend note des efforts importants déployés par l’État partie, qui a ratifié plusieurs instruments internationaux et adopté une nouvelle législation dans le domaine de la traite d’êtres humains, mais il est préoccupé par le fait que l’État partie ne poursuit pas et ne condamne pas comme il convient les complices de la traite, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, et n’assure pas la protection des victimes. Il constate avec préoccupation que l’État partie s’en remet excessivement à la communauté internationale pour mener des campagnes de sensibilisation à la question de la traite et offrir assistance et protection aux victimes.

69. Le Comité recommande à l’État partie:

a) D’appliquer pleinement la législation nationale relative à la lutte contre la traite d’êtres humains, notamment à des fins sexuelles;

b) De renforcer les mesures visant à protéger les enfants qui sont victimes de la traite, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, et de traduire en justice les auteurs de tels actes;

c) De former les agents de la force publique, les juges et les procureurs à la manière de recevoir, de suivre et d’instruire les plaintes pour traite et exploitation sexuelle tout en respectant la sensibilité des enfants et la confidentialité;

d) De veiller à ce que les enfants victimes de la traite aient accès à l’éducation et bénéficient d’une assistance et d’un soutien psychologique;

e) De négocier des accords bilatéraux et multilatéraux avec les pays concernés, notamment les pays voisins, afin d’empêcher la vente, la traite et l’enlèvement d’enfants, et d’élaborer des plans d’action communs avec et entre les pays concernés;

f) De mener des campagnes de sensibilisation visant à prévenir et à combattre la traite.

Permanences téléphoniques

70.Le Comité s’inquiète de ce qu’aucune permanence téléphonique gratuite n’ait été mise en place à l’intention des enfants victimes.

71. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place un service national d’assistance téléphonique accessible vingt-quatre heures sur vingt-quatre par un numéro à trois chiffres afin qu’il puisse toucher directement les groupes les plus marginalisés, y compris dans les régions les plus difficiles d’accès. Le Comité recommande qu’un suivi adéquat soit assuré aux appels émanant d’enfants victimes des infractions visées par la Convention.

Administration de la justice pour mineurs

72.Le Comité se félicite de la création, au sein de la Commission des droits de l’enfant, d’un groupe d’experts de la justice pour mineurs. Il accueille également avec satisfaction le projet organisé avec le Children’s Legal Centre (Royaume-Uni) pour améliorer le système de justice pour mineurs et mettre en place des solutions de remplacement à la détention avant jugement et à l’enquête préliminaire, qui a conduit à la nomination des premiers juges des mineurs. Le Comité est toutefois préoccupé par le fait que le système tadjik de justice pénale manque de tribunaux pour mineurs et de juges spécialisés dans la justice pour mineurs et ne prévoit pas de procédure pénale distincte pour les enfants en conflit avec la loi. Il constate aussi avec préoccupation que, bien que l’âge de la responsabilité pénale ait été fixé à 14 ans, il est fréquent que des enfants de moins de 14 ans soient arrêtés, mis en détention avant jugement et placés dans des établissements fermés. Le Comité s’inquiète en outre de ce que des enfants âgés de 16 ans ou plus soient détenus dans des établissements fermés pour des infractions mineures.

73. Le Comité recommande à l’État partie:

a) De mettre en place un système de justice pour mineurs qui soit pleinement conforme aux normes relatives à la justice pour mineurs, en particulier aux articles 37, 40 et 39 de la Convention et aux autres normes des Nations Unies en matière de jus tice pour mineurs, notamment l’Ensemble de r ègles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), les Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), les Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté et les Directives de Vienne relatives aux enfants dans le système de justice pénale, et compte tenu de la Journée de débat général du Comité consacrée à l’administration de la justice pour mineurs , qui a eu lieu en 1995 (CRC/C/46);

b) De veiller à ce que l’âge minimum de la responsabilité pénale soit respecté dans la pratique et à ce que les enfants de moins de 14 ans ne fassent pas l’objet de procédures pénales et reçoivent une protection en dehors du système de justice pénale;

c) De réexaminer toutes les affaires où des enfants ont été condamnés à une peine d’emprisonnement afin de veiller à ce que la privation de liberté ne soit qu’une mesure de dernier recours applicable pour la durée la plus courte possible;

d) De garantir à tous les enfants le droit à une aide juridictionnelle et à une défense appropriées en nommant suffisamment d’avocats ayant la formation et les compétences nécessaires et suffisamment d’agents de probation pour assister les tribunaux pour mineurs;

e) De veiller à ce que les enfants placés en détention soient toujours séparés des adultes;

f) De veiller à ce que les enfants restent en contact régulier avec leur famille tant qu’ils sont entre les mains de la justice pour mineurs;

g) De dispenser une formation spécialisée aux personnels du système de justice pour mineurs;

h) De solliciter, en matière de justice pour mineurs, l’assistance technique de l’UNICEF et du groupe interinstitutions des Nations Unies sur la justice pour mineurs.

Protection des témoins et des victimes d’infractions

74. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte, en adoptant les dispositions législatives et les règlements voulus, que tous les enfants victimes ou témoins d’actes criminels, tels que sévices, violence familiale, conflit armé, exploitation sexuelle et économique, enlèvement et traite, bénéficient de la protection exigée par la Convention, et de tenir pleinement compte des Lignes directrices des Nations Unies en matière de justice pour les affaires impliquant les enfants victimes et témoins d’actes criminels (annexées à la résolution 2005/20 adoptée le 22 juillet 2005 par le Conseil économique et social).

9.Ratification des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

75. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les principaux instruments des Nations Unies relatif s aux droits de l’homme et les p rotocoles s’y rapportant auxquels il n’est pas encore partie, en particulier la Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

10.Suivi et diffusion

Suivi

76. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner pleinement effet aux présentes recommandations, notamment en les communiquant aux institutions publiques, nationales et locales.

Diffusion

77. Le Comité recommande en outre que le deuxième rapport périodique et les réponses écrites de l’État partie ainsi que les recommandations (observations finales) qu’il a adoptées à leur propos soient largement diffusées auprès du public en général, des organisations de la société civile, des groupements de jeunesse et des enfants, de manière à susciter un débat et une prise de conscience au sujet de la Convention, de sa mise en œuvre et de son suivi.

11.Prochain rapport

78. Le Comité invite l'État partie à soumettre ses troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques avant le 24 novembre 2015. Ce rapport ne devrait pas excéder 120 pages (voir CRC/C/118).

79. Le Comité engage en outre l’État partie à soumettre sans plus attendre les rapports initiaux relatifs à la mise en œuvre des deux Protocoles facultatifs se rapportant à la Convention, qui étaient attendus en 2004.

80.Le Comité invite également l’État partie à soumettre un document de base mis à jour, conformément aux prescriptions applicables au document de base commun figurant dans les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports présentés en vertu des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, qui ont été approuvées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.5).