Nations Unies

CRPD/C/PHL/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

16 octobre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial des Philippines *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial des Philippines (CRPD/C/PHL/1 et Corr.1) à ses 419e et 420e séances (voir CRPD/C/SR.419 et 420), les 12 et 13 septembre 2018. Il a adopté les observations finales ci-après à sa 428e séance, le 19 septembre 2018.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial des Philippines, qui a été établi conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie des réponses écrites (CRPD/PHL/Q/1/Add.1) apportées à la liste de points établie par le Comité (CRPD/C/PHL/Q/1).

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie, qui était composée de représentants des ministères et départements concernés. Il remercie la délégation des réponses franches qu’elle a apportées aux questions posées par les membres du Comité.

II.Aspects positifs

4.Le Comité note que, selon la Constitution, la Convention a le statut de loi organique de l’État partie et qu’elle est donc applicable à toutes les autorités, et que ses dispositions sont invoquées devant les tribunaux. Il accueille avec satisfaction les mesures prises par l’État partie depuis la ratification de la Convention pour élaborer un cadre législatif et général régissant sa mise en œuvre, notamment :

a)L’adoption de la loi de la République no 10524 (2012), qui réserve 1 % des postes de la fonction publique aux personnes handicapées ;

b)L’adoption de la loi de la République no 10700 (2009), qui met en place des mécanismes institutionnels visant à mettre en œuvre au niveau local des programmes pour les personnes handicapées ;

c)La mise en place par les autorités locales de bureaux pour les personnes handicapées au niveau des municipalités, des villes et des provinces.

5.Le Comité félicite l’État partie de s’être associé aux autres pays de la région Asie‑Pacifique pour approuver la Décennie Asie-Pacifique pour les handicapés (2013‑2022) et d’être le premier pays de la région du Pacifique occidental à mener l’enquête modèle sur le handicap de l’Organisation mondiale de la Santé.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

6.Le Comité est préoccupé par :

a)Le fait que la législation et la politique générale de l’État partie relatives aux personnes handicapées privilégient les approches médicales et caritatives, qui accordent trop d’importance à l’incapacité, au traitement médical et à la prise en charge sociale, et qui contrastent nettement avec le modèle fondé sur les droits de l’homme préconisé dans la Convention ;

b)L’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières dégagées pour réformer et harmoniser les lois nationales sur le handicap et pour institutionnaliser des changements de politique générale aux fins de l’application de la Convention ;

c)Les lois qui perpétuent les stéréotypes à l’égard des personnes handicapées et qui institutionnalisent involontairement la stigmatisation et la discrimination fondée sur le handicap ;

d)L’absence de politique globale dans tous les secteurs et à tous les niveaux pour mettre en œuvre les obligations qui incombent à l’État partie au titre de la Convention, notamment celle de supprimer tous les obstacles à l’inclusion des personnes handicapées dans la société.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place un processus de révision de sa législation et de mettre celle-ci en conformité avec l’approche du handicap fondée sur les droits de l’homme préconisée dans la Convention. L’État partie devrait reconnaître toutes les personnes handicapées en tant que titulaires de droits et réaffirmer leur dignité et leur autonomie ;

b) D’éliminer les multiples niveaux d’évaluation du handicap et, en consultation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, de mettre en place une politique et une procédure d’évaluation conformes à l’approche du handicap fondée sur les droits de l’homme qui est consacrée par la Convention ;

c) De dégager des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour mettre à jour son cadre législatif et général ;

d) De mettre en place un processus participatif associant les organisations qui représentent les personnes handicapées et des organismes des secteurs public et privé, et visant à recenser les obstacles environnementaux et comportementaux qui empêchent les personnes handicapées de participer pleinement et effectivement à la société philippine, et à adopter des mesures pour lever ces obstacles à tous les niveaux ;

e) D’adopter un plan d’action national global pour la mise en œuvre des obligations énoncées dans la Convention. L’État partie devrait établir un calendrier et définir des indicateurs et des critères précis pour évaluer les progrès faits, et allouer les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ce plan d’action dans les zones rurales, les municipalités et les provinces.

8.Le Comité est préoccupé par le manque d’informations et par l’absence de consultations effectives et constructives. L’État partie devrait consulter les organisations qui représentent les personnes handicapées, en particulier les personnes qui vivent dans des zones rurales et reculées, et les associer aux processus de prise de décisions et aux affaires publiques qui ont trait à la mise en œuvre et au suivi de l’application de la Convention.

9. Le Comité, dans l’esprit de son observation générale n o 7 (2018) sur la participation des personnes handicapées, notamment des enfants, par l ’ intermédiaire des organisations qui les représentent, à l ’ application et au suivi de la Convention, recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter des mesures visant à promouvoir la création d’organisations de femmes handicapées, d’enfants handicapés et de personnes présentant un handicap intellectuel, et d’allouer à ces organisations les ressources financières nécessaires à leur fonctionnement ;

b) De fournir aux personnes handicapées des informations et des méthodes accessibles concernant les procédures de consultation, notamment des informations sur le langage facile à lire et à comprendre (FALC) destinées aux organisations de personnes présentant un handicap intellectuel, ainsi que des mécanismes adaptés à l’âge en vue d’améliorer la participation des enfants handicapés par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

B.Droits particuliers (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

10.Le Comité constate avec préoccupation que :

a)Les dispositions de la Charte des personnes handicapées de 1992 (loi de la République no 7277) et les modifications qui y ont été apportées ultérieurement en 2007 et 2016 traitent uniquement de la discrimination fondée sur le handicap dans l’emploi, les moyens de transport et l’utilisation des lieux et des services publics ;

b)Les informations et les mesures ayant trait à la lutte contre la discrimination multiple et croisée à l’égard des personnes handicapées autochtones ou musulmanes font défaut ;

c)La notion d’aménagement raisonnable n’est pas prise en compte dans plusieurs domaines et le refus d’aménagement raisonnable n’est pas reconnu comme une forme de discrimination fondée sur le handicap ;

d)Les voies de recours et les procédures de plainte disponibles en cas de discrimination fondée sur le handicap sont insuffisantes et les informations sur les réparations accordées, notamment les indemnisations, font défaut.

11. Dans l’esprit de son observation générale n o 6 (2018) sur l ’ égalité et la non ‑ discrimination, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De reconnaître dans sa législation générale que le handicap constitue un motif de discrimination dans tous les domaines de la vie ;

b) D’adopter une stratégie globale visant à prévenir toutes les formes de discrimination à l’égard des personnes handicapées, notamment les formes croisées et multiples de discrimination fondée sur le sexe, l’âge, l’origine, la religion, l’appartenance ethnique, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, le handicap, le statut de migrant, de demandeur d’asile ou de réfugié ou la condition sociale ;

c) De mettre en place des voies de recours accessibles et utiles, notamment des procédures judiciaires et administratives, et de garantir aux victimes de discrimination fondée sur le handicap l’accès à la justice, dans des conditions d’égalité avec les autres. L’État partie devrait mettre à disposition des personnes handicapées des informations accessibles sur les procédures de plainte devant les tribunaux et sur l’aide juridictionnelle gratuite ;

d) De reconnaître dans sa législation la notion d’aménagement raisonnable, conformément au paragraphe 3 de l’article 5 de la Convention, et de considérer le refus d’aménagement raisonnable comme une forme de discrimination fondée sur le handicap ;

e) De tenir compte de l’article 5 de la Convention dans la mise en œuvre des cibles 10.2 et 10.3 des objectifs de développement durable, en particulier la discrimination multiple et croisée fondée sur le genre, l’âge, le handicap et la lèpre, au moyen de lois et de politiques antidiscrimination visant à combattre la stigmatisation des personnes handicapées.

Femmes handicapées (art. 6)

12.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque général d’informations sur la situation des femmes et des filles handicapées, en particulier leur accès à la protection sociale et à un niveau de vie suffisant, leur situation économique et leurs conditions de travail, ainsi que sur l’exercice des droits politiques par les femmes handicapées ;

b)Le fait que les femmes handicapées, en particulier les femmes et les filles présentant un handicap intellectuel ou psychosocial, ainsi que les femmes handicapées issues de peuples autochtones ou d’autres minorités ethniques et religieuses, soient généralement exclues des processus de prise de décisions concernant des questions qui les intéressent.

13. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir compte de son observation générale n o 3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées et :

a) D’améliorer la collecte et la publication des données relatives à la situation des femmes et des filles handicapées sur le plan des droits de la personne, en vue d’élaborer des politiques adaptées pour lutter contre la discrimination fondée sur le sexe et le genre ;

b) De veiller à ce que la législation générale relative à l’égalité des sexes et au handicap tienne systématiquement compte de la question des droits des femmes et des filles handicapées. L’État partie devrait renforcer l’application du recueil d’indicateurs relatifs au suivi et à l’évaluation de l’égalité des sexes et de l’autonomisation des femmes dans tous les processus liés à la réforme de la législation et des politiques publiques ;

c) De veiller à ce que la Commission philippine de la condition de la femme et la Commission philippine des droits de l’homme allouent les ressources humaines, techniques et budgétaires nécessaires à la promotion des droits des femmes et des filles handicapées, et de faciliter la pleine participation des organisations de femmes handicapées à leurs activités ;

d) D’engager des consultations avec les femmes et les filles handicapées, en vue de s’en inspirer pour procéder à une réforme législative et à des changements de politique générale, en accordant une attention particulière à la vie familiale, à l’éducation, aux services de santé, à l’emploi et à toutes les formes de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, ainsi qu’aux pratiques discriminatoires ;

e) De mettre en œuvre des mesures visant à atteindre les cibles 5.1, 5.2 et 5.5 des objectifs de développement durable en ayant à l’esprit les obligations découlant de la Convention.

14.Le Comité est préoccupé par le nombre élevé de cas de violence à l’égard des femmes et des filles handicapées fondée sur le genre, notamment des violences et sévices sexuels. Il est particulièrement préoccupé par les données issues de travaux d’organisations de personnes handicapées selon lesquelles le nombre de plaintes pour viol déposées par des femmes et des filles sourdes ou malentendantes est jusqu’à dix fois supérieur à celui des autres types de plaintes déposées par des femmes handicapées. Il est en outre préoccupé par la violence à l’égard des femmes et des filles qui présentent un handicap psychosocial, cette catégorie de population étant surreprésentée dans les affaires de violence sexiste portées devant la Cour suprême.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’établir un calendrier et une stratégie pour protéger les femmes et les filles handicapées contre toutes les formes de violence fondée sur le genre, et d’interdire toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles handicapées fondée sur le genre, notamment la violence au sein de la famille ;

b) De mettre à la disposition des femmes et des filles handicapées des informations et des mécanismes de signalement accessibles, afin de détecter, prévenir et combattre toutes les formes de violence, notamment les violences sexuelles, contre les femmes et les filles handicapées ;

c) D’adopter des mesures pour permettre aux femmes handicapées d’obtenir réparation en cas de violence, notamment sous forme de réadaptation et d’indemnisation.

Enfants handicapés (art. 7)

16.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence de renseignements sur les mesures prises pour garantir l’inclusion des enfants handicapés dans la société, d’autant plus que, selon les estimations, l’État partie compte 3,3 millions d’enfants handicapés, soit environ 8 % de sa population totale ;

b)L’absence de stratégie visant à promouvoir l’intérêt supérieur de l’enfant dans les décisions qui concernent les enfants handicapés ;

c)Le placement en institution des enfants handicapés et leur séparation de leur famille dans les zones rurales, alors qu’ils sont scolarisés ;

d)L’absence de mesures propres à garantir que le point de vue des enfants handicapés est pris en considération dans toutes les décisions qui les concernent.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter une stratégie globale et un plan d’action pour la promotion et la protection des droits des enfants handicapés et d’allouer, notamment aux mécanismes de surveillance, des ressources humaines, techniques et financières spécifiques pour en évaluer la mise en œuvre ;

b) De prendre des mesures pour inculquer et renforcer le respect des droits des enfants handicapés au sein du foyer et pour renforcer l’appui aux familles de ces enfants, notamment dans le cadre de programmes pour la petite enfance, conformément aux normes établies en vertu du droit international des droits de l’homme, en particulier la Convention relative aux droits de l’enfant. L’État partie devrait accorder une attention particulière aux enfants handicapés vivant dans les zones rurales et aux enfants issus de minorités ethniques et religieuses, ainsi qu’aux enfants migrants, réfugiés ou demandeurs d’asile ;

c) De prendre des mesures pour rendre l’école ordinaire accessible, afin que les enfants handicapés qui vivent en milieu rural puissent être scolarisés tout en vivant avec leur famille ;

d) De renforcer et d’assurer la couverture nationale des systèmes d’orientation, notamment la réadaptation à base communautaire des enfants handicapés dans l’ensemble du pays ;

e) De mettre en place des protocoles et des directives visant à consulter les enfants handicapés par la voie des organisations qui les représentent, et d’assurer à ces enfants un appui adapté à leur âge et à leur handicap sur les sujets qui les concernent.

Sensibilisation (art. 8)

18.Le Comité est préoccupé par :

a)L’accent mis par l’État partie sur la prévention du handicap plutôt que sur l’inclusion et l’exercice des droits, et par le fait que les ressources publiques sont allouées à des manifestations annuelles qui pérennisent l’approche médicale du handicap ;

b)L’absence de sensibilisation aux obstacles comportementaux et autres difficultés auxquels sont confrontées les femmes et les filles présentant un handicap intellectuel ou psychosocial ;

c)Le manque de renseignements sur les résultats des activités de « sensibilisation » et l’absence de déclaration de l’État partie face à l’apathie et aux attitudes négatives de la population à l’égard des personnes handicapées.

19. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les campagnes de sensibilisation, en coopération avec les organisations de personnes handicapées, pour promouvoir une image positive des personnes handicapées en tant que titulaires de droits de l’homme ;

b) De veiller à ce que les activités de sensibilisation tiennent compte du caractère intersectoriel de la Convention, et de faire de l’approche du handicap fondée sur les droits de l’homme sa stratégie centrale pour sensibiliser davantage la population au handicap ;

c) De renforcer les activités de formation et de renforcement des capacités des autorités publiques, en particulier à l’intention des fonctionnaires chargés de l’application de la Convention ;

d) De mettre en œuvre des instruments de suivi pour s’assurer que les campagnes de sensibilisation ont pour effet d’éliminer les perceptions négatives concernant les personnes handicapées dans la société.

Accessibilité (art. 9)

20.Le Comité est préoccupé par le fait que des textes tels que la loi Batas Pambansa no 344, également connue sous le nom de loi sur l’accessibilité, et la loi de la République no 7277 ne font pas mention du principe d’accessibilité au moyen de la conception universelle au sens des articles 2 et 9 de la Convention. Il est également préoccupé par l’absence de plan d’action national sur l’accessibilité, le fait que seuls les autobus municipaux sont tenus de respecter des normes d’accessibilité, et le fait que la loi actuelle sur l’accessibilité ne garantit pas l’accessibilité pour toutes les personnes handicapées. Il est en outre préoccupé par l’accès limité aux taxis collectifs modernes.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie de s ’ appuyer sur son observation générale n o 2 (2014) relative à l ’ accessibilité et, en collaboration avec les organisations de personnes handicapées :

a) De revoir sa législation et d’adopter un plan d’action visant à assurer l’accès de toutes les personnes handicapées à l’environnement physique, aux moyens de transport, à l’information et à la communication. L’État partie devrait respecter le principe de conception universelle énoncé à l’article 2 de la Convention, en veillant à ce que les infrastructures, les transports, les services et les technologies soient conçus pour tous et puissent être utilisés par tous, dans toute la mesure possible, sans nécessiter ni adaptation ni conception spéciale supplémentaire ;

b) D’élargir la portée des lois et des directives relatives à l’accessibilité afin de protéger toutes les personnes handicapées ;

c) De mettre en place des procédures de plainte et de contrôle du respect des normes d’accessibilité applicables dans les services et établissements publics et privés et les procédures de passation des marchés, et de veiller à ce que les organisations de personnes handicapées aient le droit d’apporter un soutien dans les procédures de plainte et de contrôler le respect des normes d’accessibilité, et à ce qu’elles disposent de ressources à ces fins ;

d) De se doter des ressources techniques et financières nécessaires pour garantir que les autobus publics soient équipés de davantage de sièges accessibles aux personnes handicapées ;

e) D’encourager toutes les personnes handicapées à utiliser davantage les taxis collectifs ;

f) De tenir compte des obligations qui lui incombent au titre de l’article 9 de la Convention et qui ont trait aux cibles 11.2 et 11.7 des objectifs de développement durable, afin d’assurer aux personnes handicapées un accès à des systèmes de transport adaptés, sûrs, accessibles, viables, à un coût abordable, en accordant une attention particulière à leurs besoins ;

g) D’adopter des indicateurs de suivi pour évaluer les progrès en matière d’accessibilité.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

22.Le Comité est préoccupé par le manque d’informations sur les mesures prises pour appliquer la loi de 2010 relative à la gestion et à la réduction des risques de catastrophe et sur les mécanismes de coordination mis en place par le Conseil national de réduction et de gestion des risques de catastrophe en ce qui concerne les personnes handicapées en situation de risque. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles, au cours de la bataille de Marawi (province de Lanao del Sur) survenue en 2017, de nombreuses femmes et des groupes à risque tels que les enfants et les personnes handicapées se sont retrouvés pris entre deux feux et en plein chaos, ce qui a provoqué des déplacements massifs.

23. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter un mécanisme efficace, conformément au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030), afin de disposer d’une stratégie de communication accessible (utilisant notamment des permanences téléphoniques, des alertes par SMS et des manuels en langue des signes et en braille) et d’une stratégie et de procédures d’urgence complètes pour les situations de risque  ;

b) De veiller à ce que les stratégies de réduction des risques de catastrophe prennent en compte les personnes handicapées et leur soient accessibles, et de se conformer aux engagements pris au titre de la Charte pour l’inclusion des personnes handicapées dans l’action humanitaire et lors du Sommet mondial sur l’action humanitaire de 2016 ;

c) De promulguer des lois et d’appliquer des mesures faisant obligation à tous les services publics d’élaborer des plans individuels et locaux concernant l’évacuation en toute sécurité des personnes handicapées dans les situations à risque, en étroite consultation avec ces personnes par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

24.Le Comité est préoccupé par ce qui suit :

a)La législation de l’État partie continue de refuser aux personnes handicapées la capacité juridique d’exprimer leur volonté et leurs préférences concernant tous les aspects de leur existence, de prévoir un régime de tutelle pour les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial et de restreindre la capacité de ces personnes à exercer leurs droits ;

b)Le fait que le débat en cours au Congrès sur la fourniture sélective d’un accompagnement à la prise de décisions et sur la désignation de « représentants légaux » qui prennent des décisions quasiment à la place des personnes handicapées se traduira par une inégalité devant la loi ;

c)Les personnes handicapées, en particulier celles qui présentent des troubles de l’audition, ont des difficultés à accéder à la justice en raison du manque de juristes capables de communiquer avec elles.

25. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De revoir les articles 37 à 39 de son Code civil (loi de la République n o 386), l’article III, section 11 de sa Constitution ainsi que la loi de la République n o 9406, et de promulguer une législation reconnaissant la pleine capacité juridique des personnes handicapées, conformément à l’observation générale n o 1 du Comité (2014) relative à la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité ;

b) De mettre en place, en concertation et en collaboration avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, aux niveaux national, régional et local, une formation sur la reconnaissance de la capacité juridique des personnes handicapées et sur les principes de la prise de décisions accompagnée, pour tous les acteurs concernés, y compris les agents de la fonction publique, les juges et les travailleurs sociaux ;

c) De mettre en place un système de prise de décision s accompagnée pour les personnes handicapées, en vertu de la liberté de choix qui leur est reconnue, qui prévoie notamment la possibilité de mettre fin à cet accompagnement.

Accès à la justice (art. 13)

26.Le Comité est préoccupé par les obstacles que les personnes handicapées rencontrent pour accéder à la justice, notamment les barrières comportementales et les préjugés du personnel des tribunaux, et pour s’assurer les services d’interprètes en langue des signes bien formés et à même de les aider tout au long de la procédure. Il est également préoccupé par l’absence de mise en œuvre du décret-loi no 709 portant création du Sous‑Comité chargé de faciliter l’accès à la justice et de lutter contre la discrimination.

27.Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures visant à proposer des aménagements en fonction de l ’ âge ou des aménagements procéduraux, y compris l ’ accès physique aux salles d ’ audience, une aide juridictionnelle accessible, le recours à des interprètes qualifiés en langue des signes et en langue tactile dans les salles d ’ audience et les postes de police, ainsi que des informations juridiques et de procédure en langage FALC . Il recommande également à l ’ État partie d ’ organiser à l ’ intention des juristes, des policiers et des gardiens de prison des programmes de renforcement des capacités qui portent sur les droits consacrés par la Convention.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

28.Le Comité relève avec préoccupation que l’article 101 du Code de procédure civile relatif à l’hospitalisation des personnes « aliénées » et les dispositions de la loi sur la santé mentale prévoient l’internement de personnes contre leur gré en raison de leur handicap.

29. Conformément à ses directives sur le droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’abroger l’article 101 du Code de procédure civile relatif à l’hospitalisation des personnes « aliénées », de réviser sa loi sur la santé mentale et d’abroger les dispositions qui autorisent l’internement en hôpital psychiatrique et dans d’autres types d’institutions ;

b) De renoncer à interner les personnes handicapées en raison d’une déficience réelle ou supposée.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

30.Le Comité est préoccupé par :

a)Le niveau élevé de violence contre les enfants handicapés dans le cadre familial ou scolaire, en particulier les cas signalés d’enfants confinés chez eux, et les informations concernant les cas de filles sourdes et de garçons handicapés victimes de violences sexuelles, notamment de viols et d’agressions sexuelles commis par des enseignants ou des directeurs d’écoles publiques ou privées, dans lesquels les auteurs ne seraient pas poursuivis au pénal ni condamnés, et les victimes n’auraient accès à aucun mécanisme de réparation ;

b)Les informations concernant les violences, notamment sexuelles, commises contre des personnes handicapées qui vivent dans la rue ;

c)Les informations sur les risques de traite auxquels sont exposées les femmes handicapées et sur les violences commises via Internet et dans d’autres environnements numériques.

31. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De redoubler d’efforts pour lutter contre la violence et la maltraitance familiales, notamment l’exploitation sexuelle des femmes et des enfants handicapés dans la sphère privée, et de faire en sorte que les personnes handicapées aient accès à des mécanismes de plainte indépendants, et que les victimes de mauvais traitements puissent obtenir une réparation et à une indemnisation suffisante, y compris à des moyens de réadaptation ;

b) De mettre en place des mécanismes pour contrôler tous les établissements et programmes destinés aux personnes handicapées, afin de prévenir les violences, en particulier les violences sexuelles, contre les personnes handicapées, notamment les enfants handicapés, conformément au paragraphe 3 de l’article 16 de la Convention ;

c) De faire en sorte que les stratégies de prévention de la traite prennent en compte et atténuent les risques particuliers d’être victimes de différentes formes de traite et d’exploitation auxquels sont exposées les femmes et les filles handicapées, et de veiller à ce que des activités d’information et de sensibilisation concernant la traite soient proposées sous une forme accessible et couvrent l’ensemble des zones urbaines et rurales du pays.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

32.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des actes de stérilisation forcée sont pratiqués sur des femmes présentant un handicap intellectuel.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour protéger les femmes présentant un handicap intellectuel contre la stérilisation forcée et de veiller à ce que cette pratique n ’ ait plus cours.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

34.Le Comité est préoccupé par :

a)La non-reconnaissance du droit à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société en tant que droit subjectif ;

b)L’absence de stratégie visant à assurer à toutes les personnes handicapées la transition entre une vie en institution et une vie pleinement autonome, y compris avec une aide personnelle ;

c)L’absence de services d’appui permettant aux personnes handicapées d’être incluses dans la société et de participer pleinement à la vie sociale, ce qui contribue à perpétuer leur placement en institution.

35. Le Comité recommande à l ’ État partie de tenir compte de son observation générale n o 5 (2017) sur l ’ autonomie de vie et l ’ inclusion dans la société, et :

a) D’adopter une législation visant à reconnaître le droit des personnes handicapées d ’ être incluses dans la société, de choisir leur lieu de résidence et où et avec qui elles vont vivre. L ’ État partie devrait veiller à ce que toutes les personnes handicapées aient la capacité juridique d ’ exercer leur liberté de choisir leur milieu et mode de vie ;

b) D’assurer la participation des personnes handicapées et des organisations qui les représentent à toutes les étapes de l’élaboration des stratégies et des plans favorisant l’autonomie de vie ;

c) D’adopter les mesures nécessaires pour que les personnes handicapées aient légalement droit à un budget personnel suffisant pour vivre en autonomie, compte tenu des coûts supplémentaires liés au handicap et, dans le même temps, de réaffecter aux services communautaires les ressources qui étaient consacrées au placement en institution, tout en améliorant l’accès aux services d’aide à la personne ;

d) De mettre en œuvre des services d’appui au niveau local, dotés de ressources humaines qualifiées et de crédits budgétaires suffisants, pour permettre aux personnes handicapées de décider en toute autonomie où elles souhaitent vivre et pour favoriser leur inclusion dans la société.

Mobilité personnelle (art. 20)

36.Le Comité relève avec préoccupation l’absence de cadre non discriminatoire et systématique doté de fonds publics suffisants et spécialement consacrés à l’acquisition par les personnes handicapées des aides à la mobilité et des technologies d’assistance qui sont essentielles pour une mobilité personnelle sans entrave.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie de se doter d ’ un cadre stratégique, notamment de ressources humaines, techniques et financières fixes et suffisantes, pour faire en sorte que les personnes handicapées puissent acquérir, à un coût abordable, les aides à la mobilité et les appareils et accessoires, technologies et services d ’ assistance de qualité dont elles ont besoin pour assurer leur mobilité personnelle. Il recommande également à l ’ État partie de fixer des objectifs pour garantir l ’ accès universel aux appareils orthopédiques, technologiques et autres dispositifs appropriés, ainsi qu ’ aux informations et formations appropriées sur la manière de le s utiliser.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

38.Le Comité est préoccupé par :

a)Le fait que l’identité culturelle et linguistique des personnes sourdes n’est pas reconnue et soutenue par des mesures visant à promouvoir la langue des signes philippine et la culture des sourds ;

b)Le manque de matériel en langage FALC destiné aux personnes présentant un handicap intellectuel ;

c)Le fait que le projet de loi sur la langue des signes philippine n’a pas encore été adopté.

39. Le Comité recommande à l ’ Ét at partie de modifier l’article  22 de la loi de la République n o 7277 et d ’ adopter d ’ autres mesures connexes, de manière à permettre aux personnes malentendantes de consulter des bulletins d ’ informations sous-titrés.

Éducation (art. 24)

40.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que le modèle d’enseignement spécialisé est prédominant et que les mesures permettant de proposer aux personnes handicapées une éducation inclusive et intégrée font défaut ;

b)Que le nombre d’enfants handicapés inscrits dans les écoles primaires est faible (selon les données publiées par le Ministère de l’éducation pour les années 2013 et 2014, seuls 110 169 élèves handicapés étaient inscrits dans les écoles élémentaires publiques sur les quelque 5,49 millions d’enfants ayant des « besoins spéciaux », qui constituent 13 % de la population totale d’enfants) ;

c)Que, dans les établissements classiques, l’éducation des enfants, des jeunes et des adultes handicapés est entravée par les barrières à l’accessibilité, l’absence de conception universelle de l’apprentissage et le manque d’aménagements raisonnables dans tous les aspects académiques et sociaux de la vie d’étudiant ;

d)Que le régime prévu par la loi de 2001 relative à l’éducation de base n’est applicable qu’aux écoles élémentaires officielles ;

e)Que les données quantitatives sur l’accès à l’éducation et les résultats scolaires des personnes handicapées font généralement défaut, et que les données recueillies par différentes entités manquent de cohérence.

41. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter une loi qui reconnaisse le principe de l’éducation inclusive, conformément à l’observation générale n o 4 du Comité (2016) relative au droit à l’éducation inclusive, et d’adopter un calendrier pour parvenir à cette inclusion ;

b) De renforcer l’application du principe de la conception universelle, notamment d’améliorer l’accessibilité et l’aménagement ra isonnable dans le domaine de l’ apprentissage ;

c) D’établir et d’offrir des aménagements raisonnables dans tous les aspects académiques et sociaux de la vie d’étudiant, et de veiller à former le personnel enseignant à aider les étudiants handicapés dans les salles de classe ordinaires ;

d) D’adopter une législation particulière pour faciliter les aménagements raisonnables, l’apprentissage personnalisé et la mise en place de salles de classe inclusives dans tout l’État partie ;

e) De prendre des mesures législatives et administratives pour garantir la mise à disposition des personnes handicapées de supports pédagogiques accessibles dans l’enseignement technique et l’enseignement supérieur ;

f) D’atteindre les cibles 4.5 et 4.a des objectifs de développement durable en vue de garantir l’accès, dans des conditions d’égalité, à tous les niveaux d’éducation et de formation professionnelle et de construire des établissements d’enseignement sûrs et adaptés aux besoins des personnes handicapé e s ou de moderniser ceux qui existent.

Santé (art. 25)

42.Le Comité est préoccupé par le nombre limité de cours d’éducation à la santé sexuelle et procréative dispensés aux femmes et aux filles handicapées, ainsi que par le caractère limité des services et des droits garantis en la matière, situation qui s’explique par l’inefficacité de la mise en œuvre de la loi de 2012 relative à la parentalité responsable et à la santé procréative (loi sur la santé procréative). Il est également préoccupé par les préjugés et la discrimination entretenus par les familles, les prestataires de services et le grand public, qui empêchent les femmes et les filles d’accéder aux soins de santé.

43. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les femmes, les filles et les personnes présentant un handicap psychosocial et vivant dans des régions rurales et reculées aient un accès complet à des services de santé sexuelle et procréative et de réadaptation à base communautaire sans avoir à subir des préjugés ;

b) De renforcer la formation des professionnels de la santé pour qu’ils puissent dispenser aux femmes, aux filles et aux personnes présentant un handicap psychosocial des cours et des services en matière de santé sexuelle et procréative et saisir cette occasion pour les sensibiliser à ces questions, conformément à la Convention ;

c) De renforcer la formation de tous les agents sanitaires régionaux du pays en réactivant la loi de 2012 relative à la parentalité responsable et à la santé procréative (loi sur la santé procréative).

Adaptation et réadaptation (art. 26)

44.Le Comité est préoccupé par le fait que les informations communiquées par l’État partie sur la mise en œuvre des services d’adaptation et de réadaptation prévus par la grande Charte relative aux personnes handicapées et par la loi sur la réadaptation professionnelle ne sont pas étayées par des données. Il est également préoccupé par l’application inégale des mesures de réadaptation à base communautaire, qui s’explique par les différentes approches adoptées par des parties prenantes qui visent à promouvoir une stratégie axée sur la santé plutôt que sur le développement inclusif. Il est en outre préoccupé par les informations sur les procédures actuelles de passation des marchés, qui limitent l’offre, la qualité des services ou des produits, les prix et la gamme des appareils d’assistance proposés aux personnes handicapées.

45. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De redoubler d’efforts pour mettre en œuvre de nombreuses mesures d’adaptation et de réadaptation dans le cadre des politiques générales de soins de santé et de renforcer les mécanismes de surveillance de services de réadaptation ;

b) D’adopter des protocoles visant à garantir une réadaptation conforme aux principes d’égalité et de développement inclusifs ;

c) D’améliorer la gestion des règles de passation des marchés afin de ne pas limiter l’offre, la qualité, le prix et la gamme des dispositifs d’assistance proposés aux personnes handicapées.

Travail et emploi (art. 27)

46.Le Comité est préoccupé par :

a)Le fait que la législation, les politiques, les programmes et les activités connexes, tels que le décret présidentiel no 442 (ou Code du travail), le programme Kaunlaran d’aide au travail indépendant durable et le marché du Likhang des personnes handicapées (CRPD/C/PHL/1, voir par. 210), qui visaient à créer des emplois et à protéger tous les travailleurs contre toute forme de discrimination quel que soit leur handicap, n’ont pas été efficaces pour créer des possibilités d’emploi pour les personnes handicapées ;

b)L’insuffisance de la mise en œuvre du système de quotas pour l’emploi étant donné que ce système s’applique à différents groupes de personnes handicapées ;

c)La persistance de la stigmatisation des personnes handicapées sur le marché du travail, en particulier l’argument des employeurs, qui estiment que les personnes handicapées n’ont pas les connaissances, les qualifications ou les compétences nécessaires, et l’idée selon laquelle le recrutement des personnes handicapées ferait augmenter le coût de la main‑d’œuvre en raison des besoins de formation et de l’amélioration des installations.

47. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter des mesures visant à assurer l’application effective du décret présidentiel n o 442 et du système de quota d’emplois de 5 %, et de renforcer le programme structuré d’orientation des employeurs potentiels afin d’encourager l’emploi des personnes handicapées ;

b) D’adopter des mesures visant à fournir des aménagements raisonnables dans les processus de recrutement, de veiller à ce que ces processus prennent en compte les personnes handicapées et d’élaborer des directives sur la fourniture d’aménagements raisonnables et sur l’accessibilité du lieu de travail ;

c) De s’efforcer d’atteindre la cible 8.5 des objectifs de développement durable pour parvenir au plein-emploi productif et à un travail décent pour tous, y compris les personnes handicapées, et à un salaire égal pour un travail de valeur égale.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

48.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque d’information concernant la mise en œuvre d’initiatives telles que la loi de 2013 sur la sécurité alimentaire et le Fonds pour la réduction de la pauvreté, en vue d’assurer un niveau de vie décent aux personnes handicapées ;

b)Les possibilités limitées offertes aux personnes handicapées de bénéficier de programmes d’accès à l’eau, au logement et à la nourriture ;

c)Le manque d’allocations et de ressources pour couvrir les dépenses liées au handicap, et l’offre limitée de programmes de protection sociale pour les personnes handicapées, quelle que soit leur situation professionnelle.

49. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter des critères visant à garantir que les programmes de fourniture d’eau potable, d’alimentation et de logement tiennent systématiquement compte de toutes les personnes handicapées  ;

b) De recueillir des données ventilées par sexe, âge et appartenance ethnique, sur le nombre et le pourcentage de personnes handicapées, en particulier les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial, qui ont bénéficié d’un niveau minimum de protection sociale de la part du Gouvernement ;

c) D’adopter des mesures visant à mettre en place des régimes et des allocations de protection sociale qui tiennent compte des coûts supplémentaires liés au handicap, et de garantir l’accès à une pension d’invalidité à toutes les personnes handicapées qui vivent sur son territoire ;

d) D’atteindre la cible 10.2 des objectifs de développement durable, à savoir autonomiser toutes les personnes et favoriser leur intégration sociale, économique et politique, en ciblant plus particulièrement les personnes handicapées.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

50.Le Comité est préoccupé par le manque d’informations sur la participation des personnes handicapées à la conduite des affaires publiques aux niveaux local et national, et par le fait que les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial se heurtent à des obstacles pour exercer leur droit de vote.

51.Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ abolir les dispositions discriminatoires qui empêchent les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial d ’ exercer leur droit de voter et de se présenter aux élections. Il lui recommande également de prendre des mesures pour faciliter le vote électronique pour toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

52.Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas encore ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées.

53. Le Comité encourage l ’ État partie à prendre toutes les mesures voulues pour ratifier et appliquer le Traité de Marrakech dès que possible.

54.Le Comité est préoccupé par la politique consistant à n’accorder un financement national qu’aux athlètes des Jeux paralympiques et des Jeux olympiques spéciaux pour leur permettre de participer à des compétitions à l’étranger, à l’exclusion des personnes handicapées qui pratiquent d’autres sports. Il est également préoccupé par l’absence de mesures visant à promouvoir l’inclusion des personnes handicapées dans des activités culturelles et récréatives.

55. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’affecter des fonds publics aux initiatives visant à garantir l’accès de toutes les personnes handicapées au sport et à sa pratique sur la base de l’égalité avec les autres ;

b) D’adopter des mesures pour faire en sorte que toutes les personnes handicapées participent à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports ;

c) D’adopter une stratégie aux niveaux national et local visant à mettre en place des structures, des programmes et des activités inclusives à l’intention des personnes handicapées, dans des domaines tels que le théâtre, la danse et la musique, en partenariat et en étroite consultation avec les organisations de personnes handicapées, et d’allouer des ressources à cet effet.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

56.Le Comité est préoccupé par le fait que l’enquête d’évaluation des ménages réalisée de mars 2009 à mars 2010, à savoir le système national d’identification des ménages en vue de réduire la pauvreté, ne contient aucune donnée ventilée en fonction du type de handicap, du sexe, de l’âge, de l’emplacement géographique et d’autres variables appropriées concernant notamment les femmes, les enfants, les personnes handicapées, les personnes vivant dans la pauvreté et les peuples autochtones.

57. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De travailler en consultation avec les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, afin de créer un système de collecte de données appropriées, ventilées et à jour, conformément à la proposition du Groupe de Washington sur les statistiques des incapacités ;

b) De renforcer les capacités et les ressources du Conseil national pour les questions relatives aux personnes handicapées et de l’Institut philippin de statistique en matière de collecte, de gestion, d’analyse et de diffusion des statistiques et des données sur les personnes handicapées ;

c) De collecter des données sur les personnes handicapées, ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique, type d’incapacité, situation socioéconomique, situation en matière d’emploi et lieu de résidence, ainsi que des données sur les obstacles auxquels les personnes handicapées se heurtent dans la société et sur le niveau de pauvreté de ces personnes ;

d) De prêter attention aux liens entre l’article 31 de la Convention et la cible 17.18 des objectifs de développement durable afin d’accroître sensiblement le nombre de données de qualité, actualisées et fiables sur le handicap, ventilées par niveau de revenu, sexe, âge, appartenance ethnique, statut migratoire, emplacement géographique et selon d’autres caractéristiques propres au pays.

Coopération internationale (art. 32)

58.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence dans l’État partie de méthode systématique et institutionnalisée pour incorporer les dispositions de la Convention dans ses initiatives de coopération au service d’un développement incluant le handicap, y compris dans ses programmes nationaux d’application et de suivi du Programme de développement durable à l’horizon 2030, et par l’étendue de la collaboration de l’État partie avec des organismes internationaux ;

b)La mesure dans laquelle les personnes handicapées ont été prises en compte lors de l’élaboration, de la mise en œuvre et du suivi de projets concernant le handicap.

59. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ examiner les projets internationaux qu ’ il mène en partenariat avec des organismes d ’ aide internationale afin de s ’ assurer qu ’ ils respectent pleinement les principes de la Convention, en particulier pour garantir la participation effective et autonome des personnes handicapées et des organisations qui les représentent dans la conception, l ’ exécution et le suivi des projets de développement tenant compte du handicap ainsi que dans la réalisation des objectifs du développement durable, notamment l ’ objectif 1 sur la réduction de la pauvreté.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

60.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque d’informations sur l’existence d’un mécanisme de coordination et sur la désignation dans tous les secteurs de l’administration de coordonnateurs chargés de la question du handicap, qui collaborent avec le Conseil national pour les questions relatives aux personnes handicapées aux fins de la mise en œuvre de la Convention ;

b)L’absence de mécanismes particuliers au sein de la Commission philippine des droits de l’homme chargée d’associer les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, au suivi de la Convention aux niveaux national et local, et d’assurer leur participation à ce suivi.

61. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les compétences et les ressources du Conseil national pour les questions relatives aux personnes handicapées en ce qui concerne la mise en œuvre de la Convention, et de veiller à ce que tous les pouvoirs et tous les niveaux de l’État désignent des coordonnateurs chargés de la question du handicap et leur allouent des crédits budgétaires pour mettre en œuvre des programmes au titre de la Convention ;

b) De faire en sorte que les autorités publiques chargées d’appliquer la Convention veillent au respect de l’approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, évitent de cataloguer les enfants handicapés et assurent la protection des droits que leur reconnaît la Convention ;

c) De veiller à la mise en place d’un cadre de suivi indépendant conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et de prévoir un financement suffisant pour permettre à la Commission philippine des droits de l’homme de s’acquitter de son mandat de suivi de la Convention, de permettre aux organisations de personnes handicapées de participer à l’ensemble du processus de suivi et d’application de la Convention, conformément au paragraphe 3 de l’article 33 de la Convention et en tenant compte des lignes directrices sur les cadres indépendants de surveillance et leur participation aux travaux du Comité (voir CRPD/C/1/Rev.1 , annexe).

IV.Suivi

Diffusion d’information

62. Le Comité souligne l ’ importance de toutes les recommandations formulées dans les présentes recommandations finales et appelle l ’ attention de l ’ État partie sur la recommandation figurant aux paragraphes 29 et 31 concernant les obligations générales, domaine dans lequel il est urgent de prendre des mesures.

63. Le Comité demande à l ’ État partie de mettre en œuvre ses recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Congrès , aux responsables des différents ministères, au système judiciaire et aux membres des professions concernées, tels les professionnels de l ’ éducation, de la santé et du droit, ainsi qu ’ aux autorités locales et aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

64. Le Comité encourage vivement l ’ État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l ’ élaboration de ses rapports périodiques.

65. Le Comité prie l ’ État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations de personnes handicapées, ainsi qu ’ auprès des personnes handicapées elles-mêmes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment en langue des signes, et sous des formes accessibles, y compris en langage FALC . Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web public consacré aux droits de l ’ homme.

Prochain rapport périodique

66.Le Comité prie l ’ État partie de lui soumettre son rapport valant deuxième à quat rième rapports périodiques le 3  juin 2022 au plus tard, et d ’ y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Il invite également l ’ État partie à envisager de soumettre ce rapport selon la procédure simplifiée de présentation des rapports, dans le cadre de laquelle le Comité établit une liste de points au moins un an avant la date prévue pour la soumission du rapport. Les réponses de l ’ État partie à cette liste de points constituent son rapport périodique.