CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/64/CO/8

10 mai 2004

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DELA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑quatrième session23 février‑12 mars 2004

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

SUÈDE

1. Le Comité a examiné les quinzième et seizième rapports périodiques de la Suède, qui auraient dû être présentés les 5 janvier 2001 et 2003 respectivement, soumis en un seul document (CERD/C/452/Add.4), à ses 1618e et 1619e séances (CERD/C/SR.1618 et 1619), tenues les 25 et 26 février 2004. À sa 1638e séance (CERD/C/SR.1638), tenue le 10 mars 2004, le Comité a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis en temps voulu par l’État partie et les renseignements supplémentaires que la délégation a fournis oralement et par écrit. Il prend note avec satisfaction des progrès signalés et de l’information selon laquelle les organisations non gouvernementales ont été consultées dans le cadre de la préparation du rapport. Il prend note également de la qualité du rapport, qui est conforme aux principes directeurs du Comité concernant la présentation des rapports, et se félicite des réponses constructives que la délégation a apportées aux questions posées lors de l’examen du rapport.

B. Aspects positifs

3. Le Comité se félicite de l’adoption, en février 2001, du Plan national d’action contre le racisme, la xénophobie, l’homophobie et la discrimination − instrument important pour la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban − et du Plan d’action national en faveur des droits de l’homme, en janvier 2002.

4. Le Comité note avec satisfaction l’adoption par l’État partie d’un ensemble de mesures législatives visant à combattre la discrimination raciale, parmi lesquelles:

a)La nouvelle loi sur l’interdiction de la discrimination, qui a pris effet le 1er juillet 2003. Le Comité constate avec satisfaction que cette nouvelle loi élargit la portée de la protection contre la discrimination ethnique, exige du plaignant uniquement un commencement de preuve de discrimination et étend le domaine de surveillance de l’ombudsman chargé de la lutte contre la discrimination ethnique;

b)La nouvelle loi sur les procédures collectives, en vigueur depuis le 1er janvier 2003, qui offre la possibilité, dans des cas précis, d’engager une action collective pour un acte présumé de discrimination;

c)Les amendements à la Loi fondamentale sur la liberté d’expression, qui ont pris effet en janvier 2003 et qui facilitent le recours à une procédure judiciaire en cas d’agitation raciale;

d)La nouvelle loi sur la citoyenneté, entrée en vigueur le 1er juillet 2001, qui accepte la double nationalité et facilite l’octroi de la citoyenneté suédoise aux enfants d’origine étrangère.

5.Le Comité note avec satisfaction la création, en 2003, sur des fonds publics, d’un «centre contre le racisme et l’intolérance connexe», qui regroupe plus d’une centaine d’organisations non gouvernementales œuvrant dans le domaine de la discrimination raciale.

6. Le Comité juge encourageantes les initiatives prises par l’État partie pour faire mieux connaître le peuple sami au sein de la population, notamment le lancement d’une campagne d’information.

C. Préoccupations et recommandations

7. Le Comité prend note de la position de l’État partie concernant la détermination de la composition ethnique de la population mais reste préoccupé par l’absence, dans le rapport, de données de ce type.

Compte tenu de l’absence de données statistiques sur la composition ethnique de la société suédoise, le Comité recommande à l’État partie d’en communiquer une estimation dans ses prochains rapports, conformément au paragraphe 8 des principes directeurs du Comité, et appelle l’attention de l’État partie sur la recommandation générale VIII concernant la manière dont s’identifient eux-mêmes les membres des groupes raciaux et ethniques particuliers.

8.Tout en relevant avec satisfaction les efforts de l’État partie pour combattre les crimes dictés par la haine, le Comité est préoccupé par des allégations selon lesquelles peu de crimes présumés de cette nature ont donné lieu à des poursuites judiciaires et les dispositions juridiques nationales sont rarement appliquées.

Le Comité recommande de veiller à ce que soit respectée l’instruction de 2002 du Procureur général invitant les procureurs publics à traiter en priorité les crimes de cette nature et à ce que soient mises en œuvre avec efficacité les dispositions applicables de droit pénal. Il recommande à l’État partie de fournir des données statistiques sur les poursuites engagées et les peines prononcées dans des cas où les infractions étaient liées à des crimes dictés par la haine et où les dispositions pertinentes de la législation nationale existante ont été appliquées.

9. Tout en accueillant avec satisfaction la nouvelle loi sur l’égalité de traitement des étudiants de l’enseignement supérieur entrée en vigueur le 1er mars 2002, qui contient des dispositions interdisant la discrimination directe et indirecte à l’encontre des étudiants et candidats à des études supérieures au motif de l’origine ethnique, le Comité prend note de ce que, selon diverses informations, cette loi ne serait pas observée dans certaines universités suédoises.

Le Comité invite l’État partie à lui communiquer une évaluation de la mise en œuvre de cette nouvelle loi.

10. Le Comité constate que l’État partie maintient son interprétation des dispositions de l’article 4 de la Convention, selon laquelle les faits délictuels commis par les membres d’une organisation raciste ou par leurs sympathisants peuvent être interdits ou punis par la loi, mais pas l’existence de ces organisations racistes ou le fait d’y participer.

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XV qui énonce que toutes les dispositions de l’article 4 de la Convention sont impératives, y compris l’obligation de déclarer illégale et d’interdire toute organisation poussant ou incitant à la discrimination ou encore d’ériger en infraction punissable par la loi la participation à ce type d’organisations. En conséquence, le Comité recommande à l’État partie de revoir sa position et d’adopter une législation qui soit pleinement conforme aux dispositions énoncées à l’alinéa  b de l’article 4 de la Convention.

11. Tout en saluant les initiatives prises par l’État partie pour améliorer la situation des Roms, telles que la création en 2002 d’un conseil pour les questions concernant les Roms à titre d’organe consultatif auprès du Gouvernement, le Comité reste préoccupé par les difficultés auxquelles continue d’être confrontée une grande partie de la population rom dans les domaines de l’emploi, du logement et de l’éducation, entre autres.

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur sa recommandation générale XXVII concernant la discrimination à l’égard des Roms et l’encourage à redoubler d’efforts pour mettre en œuvre des stratégies et des programmes nationaux dans ces domaines, y compris le programme stratégique biennal de l’ombudsman contre la discrimination ethnique, en vue d’améliorer la situation des Roms et de mieux les protéger contre la discrimination.

12. Tout en accueillant favorablement la création, en 2002, de la Commission des limites territoriales chargée de faire des propositions en vue de définir, avant la fin de 2004, les limites des zones de reproduction des rennes élevés par les Samis, ce qui constitue une étape importante vers la protection des droits des Samis, le Comité reste préoccupé par le fait que les problèmes relatifs aux droits fonciers des Samis ne soient toujours pas résolus.

Au vu de la recommandation générale XXIII concernant les droits des populations autochtones, le Comité encourage l’État partie à veiller à ce que la Commission des limites territoriales s’acquitte de sa tâche dans les délais prévus. En conséquence, il recommande également à l’État partie d’adopter les dispositions législatives appropriées, après avoir consulté le peuple sami au sujet des conclusions de ladite Commission, afin de dissiper les incertitudes juridiques relatives aux droits fonciers des Samis.

13. Le Comité note que l’État partie n’a jusqu’à présent pas été en mesure de ratifier la Convention no 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux. À cet égard, il prend note de l’observation faite par l’État partie selon laquelle la ratification ne sera possible qu’une fois que les limites extérieures des zones d’élevage du renne auront été définies plus clairement qu’elles ne l’ont été jusqu’à présent.

Le Comité invite l’État partie à accélérer tous les travaux préliminaires afin de procéder à la ratification de la Convention aussi rapidement que possible.

14. Le Comité note les allégations selon lesquelles, dans les affaires de différends fonciers opposant devant la justice des Samis et des non-Samis, les intérêts des non-Samis l’emportent fréquemment sur ceux des Samis, et que des moyens financiers ne sont pas fournis à ces derniers pour leur permettre de défendre leur droit à la terre devant les tribunaux.

Le Comité demande à l’État partie de donner des renseignements sur cette question, ainsi que sur l’issue des affaires liées à des revendications de ce type, et, s’il y a lieu, sur les indemnités octroyées.

15. Le Comité prend note de la loi spéciale sur la police des étrangers, qui permet au Gouvernement d’expulser un étranger − sans aucun recours possible − s’il estime que cela est nécessaire pour la sécurité de la Suède ou s’il a des raisons de penser que ledit étranger risque de commettre des crimes avec violence, menace ou contrainte à des fins politiques ou d’y participer.

Tout en déclarant comprendre les préoccupations de l’État partie en matière de sécurité intérieure, le Comité rappelle à ce dernier qu’il doit les concilier avec ses obligations relatives aux droits de l’homme. À cet égard, il appelle l’attention de l’ État partie sur sa déclaration relative au terrorisme et aux droits de l’homme en date du 8 mars 2002, dans laquelle il insiste sur l’obligation des États de «veiller à ce que les mesures prises pour lutter contre le terrorisme n’aient pas pour but ou pour effet d’entraîner une discrimination fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique». Le Comité invite l’État partie à réexaminer cette loi en ce qu’elle autorise l’expulsion sans droit de recours et à fournir un complément d’information à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

16. Tout en jugeant encourageant que l’État partie affirme être un pays d’immigration qui accorde la priorité aux politiques d’intégration visant à combattre l’exclusion sociale touchant certaines personnes nées à l’étranger, le Comité reste préoccupé par la persistance d’attitudes discriminatoires à l’égard des personnes d’origine immigrée dans certains domaines, comme le marché de l’emploi, le logement et l’accès aux services publics.

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses efforts dans ces domaines et à les intensifier, conformément aux alinéas  e et f de l’article 5 de la Convention.

17. Le Comité encourage l’État partie à continuer de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la lutte contre la discrimination lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique.

18. Le Comité recommande à l’État partie de diffuser largement les informations relatives aux recours internes disponibles contre les actes de discrimination raciale, aux moyens juridiques d’obtenir réparation en cas de discrimination et à la procédure des plaintes individuelles prévue à l’article 14 de la Convention que la Suède a acceptée.

19. Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de publier de la même manière les conclusions du Comité.

20. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses dix‑septième et dix‑huitième rapports périodiques en un seul document attendu le 5 janvier 2007, et de traiter dans ce document tous les points soulevés dans les présentes observations finales.

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