Nations Unies

CERD/C/EGY/CO/17-22

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

6 janvier 2016

Original : français

C omité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant les dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques de l’Égypte, présentés en un seul document *

1.Le Comité a examiné les dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques de l’Égypte, présentés en un seul document (CERD/C/EGY/17-22), à ses 2402e et 2403e séances (voir CERD/C/SR.2402 et 2403), les 30 novembre et 1er décembre 2015. À sa 2413e séance, le 8 décembre 2015, il a adopté les présentes observations finales.

A.Introduction

2.Le Comité se réjouit de renouer le dialogue avec l’État partie et accueille avec satisfaction les dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques, présentés en un seul document. Tout en ayant à l’esprit l’instabilité politique que le pays a traversée, le Comité regrette le retard enregistré dans la soumission des rapports périodiques qui l’a empêché de suivre la mise en œuvre de la Convention par l’État partie pendant plusieurs années.

3.Le Comité salue l’exposé oral présenté par la délégation ainsi que ses réponses détaillées fournies durant l’examen du rapport périodique. Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec l’État partie sur la mise en œuvre de la Convention.

B.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’État partie des instruments internationaux suivants :

a)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2008;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés, en 2007, et le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en 2002.

5.Le Comité salue d’autres mesures législatives et institutionnelles prises par l’État partie durant la période sous examen, notamment:

a)L’adoption d’une nouvelle Constitution en janvier 2014 dont l’article 53 consacre l’égalité des citoyens devant la loi et interdit la discrimination fondée sur quelque motif que ce soit;

b)Les mesures prises pour préserver le patrimoine culturel de l’Égypte, y compris la Nubie et les régions désertiques et côtières, à travers notamment la collecte de l’héritage culturel populaire de ces régions et l’organisation des activités sur le patrimoine culturel et l’originalité artistique desdites régions, conformément à l’article 236 de la Constitution.

6.Le Comité salue également les efforts déployés par l’État partie pour amender sa législation conformément à ses recommandations (voir A/56/18, par. 288 et 292), en particulier :

a)La loi no 94 de 2003 portant création du Conseil national des droits de l’homme en tant qu’institution nationale des droits de l’homme de l’État partie;

b)La loi no 154 de 2004 portant modification de la loi sur la nationalité, qui dispose que la femme égyptienne peut transmettre sa nationalité aux enfants nés d’un mariage avec un étranger. L’article 6 de la nouvelle Constitution dispose également que toute personne née d’une mère ou d’un père égyptien a droit à la nationalité égyptienne.

C.Sujets de préoccupation et recommandations

Données statistiques pertinentes

7.Tout en prenant note des données statistiques fournies par l’État partie, le Comité note qu’elles comportent des lacunesconcernant la composition ethnique de la population et sa répartition géographique. Le Comité regrette le manque d’indicateurs socioéconomiques ventilés par origine ethnique ou nationale et portant en particulier sur des groupes ethniques numériquement peu importants tels que les Bédouins/nomades, les Nubiens et les Berbères (art.1 et 5).

8.Conformément aux paragraphes 10 et 12 de ses directives révisées pour l’établissement de rapports au titre de la Convention (CERD/C/2007/1), le Comité demande à l’État partie de collecter et de publier des données statistiques complètes sur la composition ethnique de sa population, ainsi que sur la situation sociale et économique des différents groupes ethniques , minoritaires et ethnoreligieux, ventilées par régions et mettant en évidence le niveau de jouissance des droits économiques et sociaux de ces groupes . Le Comité demande à l’État partie de lui fournir ces données ventilées dans son prochain rapport périodique.

Définition de la discrimination raciale

9.Le Comité est préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de définition de la discrimination raciale dans la législation de l’État partie même si les dispositions de la Convention sont considérées comme faisant partie intégrante des lois du pays (art. 1).

10. Tenant compte du vaste chantier législatif engagé depuis l’adoption de la nouvelle Constitution, le Comité recommande à l’État partie d’introduire dans sa législation pénale, civile et administrative une définition complète de la discrimination raciale, couvrant la discrimination directe et indirecte.

Incrimination de l’incitation à la haine et à la discrimination raciale

11.Bien que le Code pénal en son article 176 ait été amendé pour ériger en infraction l’incitation à la discrimination raciale, le Comité regrette que cette infraction soit prévue dans un cadre limité à celui des médias et liée au fait de troubler l’ordre public. Le Comité réaffirme sa préoccupation selon laquelle la législation de l’État partie n’interdit pas la diffusion d’idées fondées sur la supériorité raciale ou la haine raciale, ni la constitution d’organisations racistes. Il regrette également que l’État partie n’ait pas expressément établi la motivation ethnique ou raciale comme circonstance aggravante des crimes (art. 4).

12. À la lumière de sa recommandation générale n o 35 (2013) sur la lutte contre le discours de haine raciale, le Comité recommande à l’État partie de modifier le Code pénal afin d’ incriminer le discours de haine raciale conform ément à l’ article  4 de la Convention. Cette interdiction devrait porter sur la diffusion d’idées fondées sur la supériorité raciale ou la haine, l’incitation à la discrimination raciale ou ethnique , ainsi que la constitution et le soutien aux organisations racistes. L’État partie devrait veiller à ce que la motivation ethnique ou raciale soit établie comme circonstance aggravante des crimes. Le Comité rappelle que les mesures visant à contrôler et à combattre les discours de haine raciale ne devraient pas servir de prétexte pour restreindre les manifestations de colère face à l’injustice ni les expressions de mécontentement social ou d’opposition.

Organes nationaux des droits de l’homme et société civile

13.Le Comité est préoccupé par le fait que la ré-accréditation du Conseil national des droits de l’homme par le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme a été ajournée depuis 2011. Il regrette l’absence d’informations sur les activités du Médiateur. Tout en notant la participation de la société civile à l’élaboration du rapport périodique, il regrette l’absence de représentants de la société civile et du Conseil national des droits de l’homme au dialogue avec le Comité (art. 2).

14. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en conformité le plus rapidement possible la loi sur le Conseil national des droits de l’homme avec les nouvelles dispositions constitutionnelles et les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme ( Principes de Paris) et de doter le Conseil d’allocations budgétaires qui lui permettr ont d’exécuter son mandat de manière indépendante et autonome. Le Comité invite l’État partie à lui fournir des informations détaillées sur le travail du Médiateur dans la lutte contre la discrimination raciale et ethnique , et à encourager la société civile à participer de façon plus active au dialogue sur la mise en œuvre de la Convention .

Absence d’actions en justice pour discrimination raciale

15.Le Comité est préoccupé par l’absence d’informations relatives aux plaintes enregistrées pendant la période considérée pour discrimination raciale ou ethnique, en particulier l’absence de jugements prononcés par l’ensemble des tribunaux, notamment de premier degré. Il regrette aussi le manque d’information sur les cas qui auraient été traités par le Conseil national des droits de l’homme à la suite de plaintes éventuelles de victimes de discrimination raciale ou ethnique (art. 6).

16. À la lumière de sa recommandation générale n o 31 (2005) sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité rappelle que l’absence de plaintes et d’actions en justice pour discrimination raciale peut révéler une absence de législation pertinente, une mauvaise connaissance des recours juridiques existants, un manque de confiance dans le système judiciaire, la peur de représailles ou une volonté insuffisante des autorités à poursuivre les auteurs de tels actes. Le Comité recommande à l’État partie de diffuser les dispositions légales actuelles et à venir concernant l’interdiction de la discrimination raciale et de faire en sorte que le public connaisse ses droits, en particulier les groupes exposés à la discrimination raciale. Le Comité pren d note des arrêts prononcés par la Haute Cour c onstitutionnelle et demande à l’État partie de fournir des informations sur les affaires judiciaires pertinentes au niveau des tribunaux de degré inférieur ainsi que sur les cas de discrimination raciale qui seront traités par le Conseil national des droits de l’homme conformément à l’ article  99 de la Constitution.

Situation des minorités

17.Le Comité rappelle et regrette l’absence de renseignements sur les résultats des études et enquêtes universitaires concernant les groupes ethniques minoritaires demandés lors du précédent dialogue. Il est également préoccupé par :

a)La situation des personnes appartenant aux groupes minoritaires dans l’État partie tels que les Bédouins/nomades, les Nubiens, les Berbères et d’autres, notamment la stigmatisation dont elles sont victimes;

b)Les difficultés que ces personnes rencontrent dans la pleine jouissance de leurs droits économiques, sociaux et culturels;

c)Les disparités régionales dans l’État partie affectant les zones frontalières et côtières, en particulier les régions de Haute-Égypte, du Sinaï et de Nubie. Le Comité est également préoccupé par le fait que la relocalisation des minorités, notamment des Bédouins, pour plusieurs raisons, y compris des raisons sécuritaires, n’aurait pas donné lieu à des indemnisations appropriées;

d)Les informations reçues de l’État partie concernant ses efforts visant à « sédentariser » les nomades ainsi que d’autres groupes vulnérables dans des villages modernes. En effet, le Comité regrette l’absence d’information sur la manière dont ces personnes sont consultées et leur opinion prise en compte; le Comité note avec préoccupation que ces mesures peuvent affecter de manière disproportionnée les personnes appartenant aux groupes minoritaires (art. 5).

18. Le Comité recommande à l’État partie de lui fournir les résultats des études et enquêtes universitaires concernant les groupes ethniques peu nombreux pour lui permettre d’évaluer la jouissance par ces groupes des droits protégés par la Convention.

À la lumière de sa recommandation générale n o 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention, le Comité recommande également à l’État partie :

a) De l utter contre toute forme de discrimination raciale contre les personnes appartenant à des groupes minoritaires, notamment contre les préjugés et la stigmatisation sociale à leur encontre ; l ’État partie devrait intensifier les campagnes de sensibilisation pour combattre l’intolérance et promouvoir la diversité culturelle;

b) De p rendre les mesures nécessaires pour promouvoir la jouissance par ces personnes de leurs droits à l’éducation, à l’emploi, à un logement convenable et à la préservation de leur culture;

c) De veiller à ce que les mesures spéciales prévues dans l’ article  236 de la Constitution pour le développement économique des régions défavorisées soient conçues et mises en œuvre après consultation des communautés concernées et avec leur participation active ; l ’État partie devrait également veiller à ce que les groupes minoritaires affectés par des projets de développement so ie nt dûment indemnisés;

d) D’é valuer toutes les mesures prises pour améliorer la qualité de la vie des populations et de veiller à ce qu’elles n’affectent pas de manière disproportionnée les minorités, notamment leur mode de vie traditionnel.

Situation de la communauté noire

19.Le Comité est préoccupé par les informations concernant la discrimination et la stigmatisation sociale dont seraient victimes les membres de la communauté noire d’Égypte, et qui affecteraient les Égyptiens ayant une peau plus foncée que d’autres mais aussi et surtout les non-ressortissants, en particulier ceux en provenance de l’Afrique subsaharienne (art. 5).

20.Conformément à sa recommandation générale n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes pour combattre toute discrimination, stigmatisation ou stéréotype basés sur la couleur de la peau et de lutter contre toute discrimination indirecte dont ces personnes pourraient être victimes.

Discrimination et violence contre les Coptes

21.Le Comité note les mesures prises par l’État partie pour combattre la discrimination et la violence contre les minorités ethnoreligieuses, en particulier la violence qui a occasionné la destruction de biens et d’églises des Coptes. Il reste toutefois préoccupé par l’ampleur de l’intolérance et de la violence contre eux, y compris des cas de prise d’otages et de kidnapping de femmes coptes. Il s’inquiète en outre des mesures limitées prises par l’État partie pour promouvoir la liberté de culte et la diversité religieuse des groupes ethniques minoritaires (art. 5 et 6).

22. Conformément à sa recommandation générale n o  26 (2000) concernant l’ article  6 de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures prises pour que les auteurs de discrimination et de violence contre les Coptes soient condamnés et que les victimes aient accès à la justice, à l’indemnisation et à la réparation. L’État partie devrait promouvoir la liberté de conscience, la liberté de culte et la diversité religieuse des groupes minoritaires ethnoreligieux en prenant l es mesures législatives et administratives nécessaires. Il devrait aussi impliquer les chefs religieux dans toute activité de sensibilisation de la population menée à cette fin.

Conflits entre ethnies

23.Le Comité est préoccupé par les informations relatives aux affrontements meurtriers entre une tribu arabe et une tribu nubienne à Assouan en 2014. Il note les mesures prises par l’État partie pour régler ces conflits mais regrette l’absence de mesures de prévention à cet égard et l’insuffisance des mesures de règlement de ces conflits (art. 5, 6 et 7).

24. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures de prévention et de renforcer ses stratégies de r èglement de s conflits en plus des mesures prises pour indemnis er les victimes et condamn er l es auteurs . Il lui recommande , en outre , d’organiser des campagnes de sensibilisation auprès des communautés concernées pour promouvoir la tolérance et la diversité, avec l’active participation des autorités ou des organisations les représentant.

Situation des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile

25.Le Comité est préoccupé par la situation des demandeurs d’asile, des réfugiés et des migrants, en particulier les étrangers en situation irrégulière, notamment :

a)Les cas de détention arbitraire et de détention administrative prolongée;

b)Les problèmes de sécurité et de protection, y compris les cas d’atteinte à la vie et de violence physique, sexuelle ou psychologique à leur encontre;

c)L’information concernant les difficultés que ces personnes rencontrent dans l’accès aux services publics de base tels que l’éducation, la santé et la justice;

d)La non-reconnaissance du mandat du Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) couvrant les réfugiés Palestiniens, en particulier ceux venant de la République arabe syrienne qui ne sont plus dans le secteur d’opération de l’Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient, empêche le HCR d’enregistrer ces réfugiés et de leur fournir une assistance matérielle de base;

e)La discrimination et le harcèlement auxquels font face les migrants, demandeurs d’asile et réfugiés venant de l’Afrique subsaharienne (art. 5 et 6).

26. Rappelant ses recommandations générales n o  2 2 (1996) concernant l’ article  5 et les réfugiés et personnes déplacées et n o  3 0 (2004) concernant la discrimination contre les non-ressortissants, le Comité recommande à l’État partie :

a) De p rendre les mesures nécessaires pour mettre fin à la détention des demandeurs d’asile et des réfugiés et d’ accélér er l’application du régime de protection qui leur est alloué ; l ’État partie devrait utiliser la détention uniquement pour des cas très particuliers et spécifiques , et pour une période aussi courte que possible , e t permett re au HCR de rendre visite à ces personnes en vue d’identifier celles qui peuvent bénéficier d’une protection internationale;

b) De p rendre des mesures urgentes et exemplaires pour punir tous les cas d’atteinte à la vie et de violence physique , sexuelle ou psychologique ;

c) De p rendre des mesures en vue d’assurer l’accès aux services publics de base pour les non-ressortissants et d’améliorer leur accès à la justice, sans discrimination aucune;

d) D’a ccorder au HCR l’accès aux réfugiés p alestiniens vivant en Égypte qui ne sont pas dans le secteur d’opération de l’ Office de secours et de travaux des Nations Unies pour les réfugiés de Palestine dans le Proche-Orient pour leur fournir sa protection et l’appui dont ils ont besoin ;

e) De p romouvoir la tolérance et la diversité auprès des communautés locales et de les sensibiliser à l’interdiction de la discrimination raciale envers toute personne, y compris les réfugiés, les migrants et les demandeurs d’asile .

Représentation des minorités dans la vie politique

27.Tout en notant les nouvelles dispositions constitutionnelles prévoyant des quotas pour garantir la participation des jeunes, des femmes, des chrétiens et des personnes handicapées au sein des conseils locaux, le Comité regrette que des groupes minoritaires tels que les Nubiens et les Bédouinsaient été ignorés par cette mesure spéciale(art.5).

28. Le Comité recommande à l’État partie de considérer l’inclusion des minorités non couvert e s par le système de quotas, de façon à garantir la représentation des différentes composantes de la population égyptienne.

La loi antiterroriste

29.Le Comité est inquiet concernant la nouvelle loi antiterroriste qui peut être interprétée et appliquée de manière large pouvant entraver la liberté d’expression et de réunion, en particulier des groupes vulnérables protégés par la Convention dont certains seraient persécutés et stigmatisés comme terroristes potentiels et empêchés d’exercer leurs droits légitimes (art. 4 et 5).

30. À la lumière de sa recommandation générale n o 31 (2005) sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l’État partie de s’assure r que les mesures pour lutter contre le terrorisme sont prises de manière à protéger les droits fondamen t aux des droits de l’homme , y compris d es groupes minoritaires et d es non-ressortissants. L’État partie devrait veiller à l’application des garanties juridiques fondamentales afin de prévenir et de lutter contre le profilage racial par la police. Il devrait se conformer aux dispositions de la Convention dans l’interprétation et l’application de la loi antiterroriste.

Lutte contre la traite

31.Le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie est un pays d’origine, de transit et de destination de la traite des êtres humains. Cette situation affecte particulièrement les non-ressortissants. Le Comité est préoccupé par les informations concernant l’exploitation économique et sexuelle des travailleurs étrangers ainsi que les violences exercées contre eux, en particulier les employés de maison (art. 5).

32. Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts dans la lutte contre la traite de personnes, de poursuivre les auteurs de tels actes et de fournir aux victimes une protection légale et institutionnelle. L’État partie devrait veiller à ce que toute personne employée en Égypte, en particulier dans le secteur informel, soit protégée contre les abus, quelle que soit son origine nationale ou ethnique. Le Comité encourage l’État partie à adhérer à la Convention n o 189 de l’ Organisation internationale du Travail concernant le travail décent pour les travailleuses et travailleurs domestiques.

Discrimination multiple

33.Le Comité est préoccupé par la prévalence de la violence contre les femmes dans l’État partie, affectant encore plus les femmes réfugiées et migrantes ainsi que celles appartenant à des groupes minoritaires, victimes de multiples formes de discrimination (art. 5).

34. Rappelant sa recommandation générale n o 25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures fermes pour lutter plus efficacement contre les violences dont sont victimes les femmes, en particulier les femmes minoritaires, réfugiées et migrantes , de renforcer le cadre législatif, d’enquêter sur ces violences, de poursuivre et de sanctionner les auteurs , et de fournir aux victimes soutien, indemnisation et compensation.

Formation et sensibilisation aux droits de l’homme

35.Bien que l’État partie ait mené des activités de sensibilisation aux droits de l’homme auprès des juges et du personnel du Ministère de la justice, le Comité est préoccupé par la persistance de la stigmatisation sociale et de la discrimination raciale et ethnique dans l’État partie, et regrette l’absence d’information sur l’impact de ces formations sur l’amélioration de la situation des droits de l’homme en général (art. 7).

36. Le Comité recommande à l’État partie de prendre l es mesures nécessaires pour que l’éducation aux droits de l’homme, y compris à la Convention, soit étendue à un large public et que des mécanismes visant à évaluer l’efficacité et l’impact de ces mesures soient mis en place.

Situation des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes

37.Gardant à l’esprit le rôle important des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes dans la protection des droits de l’homme, y compris les droits protégés par la Convention, le Comité est préoccupé par les informations faisant état de cas d’intimidation et d’arrestation d’acteurs de la société civile. Il est aussi inquiet des restrictions imposées au fonctionnement et au travail des défenseurs des droits de l’homme, y compris les obstacles à l’obtention d’un financement étranger qui empêcherait les organisations de la société civile de fonctionner efficacement. De même, le Comité s’inquiète de la situation des journalistes et des blogueurs dont certains ont été emprisonnés (art. 2 et 5).

38. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’a dopter le projet de loi sur les organisations non gouvernementales en vue de faciliter le travail des défenseurs des droits de l’homme ; l ’État partie devra it protéger les défenseurs des droits de l’homme et les journalistes contre tout acte d’intimidation ou de représailles , et contre toute entrave à leurs activités ; il devrait également lever les restrictions qui empêchent les organisations non gouvernementales d’ obtenir un financement étranger;

b) D’a ccélérer le traitement des dossiers des militants et des journalistes détenus et de les libérer conformément aux engagements internationaux pris par l’Égypte.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

39. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement aux communautés susceptibles de faire l’objet de discrimination raciale, tels que la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d’apatridie.

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

40.À la lumière de sa recommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à ce dernier de donner pleinement effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte d u Document final de la Conférence d’examen de Durban , tenue à Genève en avril 2009, quan d il applique la Convention. Il le prie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

41. À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine (2015-2024) et de la résolution 69/16 de l’Assemblée générale sur le programme d’activités relatives à la Décennie internationale, le Comité recommande à l’État partie de préparer et de mettre en œuvre un programme approprié de mesures et de politiques. Le Comité demande également à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des informations précises sur les mesures concrètes qu’il aura prises dans ce cadre, en tenant compte de la recommandation générale du Comité n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

Déclaration prévue à l’article 14

42. Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative prévue à l’ article  14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles.

Amendements à l’article 8 de la Convention

43. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier les amendements du paragraphe 6 de l’ article  8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Dialogue avec la société civile

44. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration de son prochain rapport périodique et de la mise en œuvre des présentes observations finales .

Diffusion

45. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que ses rapports périodiques soient rendus publics et soient facilement accessibles au moment de leur soumission et que les observations finales du Comité s’y rapportant soient diffusées , en temps opportun, dans l a langue officielle de l’État partie et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il convient.

Document de base commun

46. Le Comité encourage l’État partie à mettre à jour le document de base , soumis en 199 2 (HRI/CORE/1/Add.19) , conformément aux directives harmonisées concernant l’établissement de s rapports destinés aux organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, telles qu’ adoptées par la cinquième r éunion intercomités des organes cré é s en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I) . À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité prie instamment l’État partie de respecter la limite de 42 400 mots fixée pour les documents de base communs .

Suite donnée aux observations finales

47. Conformément au paragraphe 1 de l’ article  9 de la Convention et à l’ article  65 de son règlement intérieur modifié , le Comité demande à l’État partie de l’informer, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 1 8 , 2 2, 24 et 4 3 ci-dessus.

Recommandations d’importance particulière

48. Le Comité souhaite aussi attirer l’attention de l’État partie sur l’importance particulière d es recommandations figurant aux paragraphes 10, 12, 3 0 et 3 8 et demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite .

Élaboration du prochain rapport périodique

49. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses vingt-troisième à vingt-cinquième rapports périodiques en un seul document d’ici au 4 janvier 2018 , en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques .