CCPR

Pacte international relatif aux droits civilset politiquesDistr.

RESTREINTE*

CCPR/C/68/D/891/1999

18 avril 2000

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME

Soixante-huitième session

13-31 mars 2000

DÉCISION

Communication No 891/1999

Présentée par :M. David Wayne Tamihere

Au nom de :L'auteur

État partie :Nouvelle-Zélande

Date de la communication :20 novembre 1997 (date de la lettre initiale)

Références :néant

Date de la présente décision :15 mars 2000

[ANNEXE]

ANNEXE*

DÉCISION DU COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME EN VERTU DU

PROTOCOLE FACULTATIF SE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL

RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

- Soixante-huitième session -

concernant la

Communication No 891/1999

Présentée par :M. David Wayne Tamihere

Au nom de :L'auteur

État partie :Nouvelle-Zélande

Date de la communication :20 novembre 1997

Le Comité des droits de l'homme, institué en application de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 15 mars 2000

Adopte la décision ci-après :

Décision concernant la recevabilité

1.L'auteur de la communication est M. David Wayne Tamihere, de nationalité néo‑zélandaise, né en 1953. Il se déclare victime d'une violation de la part de la Nouvelle‑Zélande des articles 2, 14 et 26 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Rappel des faits présentés par l'auteur

2.1En avril 1989, deux touristes suédois ont été assassinés en Nouvelle-Zélande et leurs biens ont été volés. L'affaire, qui a eu un grand retentissement dans l'opinion et les médias, a fait l'objet d'une enquête de police très poussée à l'issue de laquelle l'auteur est apparu comme le principal suspect. Il a avoué le vol de la voiture mais n'a cessé de se proclamer innocent du meurtre des victimes. Le procès s'est ouvert en octobre 1990 devant une juridiction avec jury; en décembre de la même année, le jury a déclaré l'auteur coupable de meurtre et de vol.

2.2L'auteur a fait appel du jugement. La date de l'audience en appel a été fixée au 21 août 1991 et l'auteur a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle pour se faire représenter, en appel, par un avocat principal et un avocat en second, qui l'avaient défendu en première instance. Peu avant l'audience, le conseil principal a demandé à l'auteur de signer une lettre par laquelle il reconnaissait qu'il n'y avait aucun moyen d'appel à avancer. L'auteur ayant refusé, le conseil principal lui a signifié qu'il comptait se retirer. Dans un premier temps, la cour d'appel a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par l'auteur pour s'assurer les services d'un nouveau conseil pour le défendre en appel, sans toutefois que la décision soit définitive, de sorte que l'auteur avait la possibilité de présenter des arguments à l'appui de sa demande. Avant que la cause ne soit entendue, de nouveaux éléments de preuve ont été découverts; la cour d'appel est revenue sur sa décision et a accordé l'aide juridictionnelle à l'auteur afin qu'il puisse s'assurer les services d'un avocat et d'un médecin légiste. Le nouvel avocat a plaidé devant la cour en mai 1992.

2.3En mai 1992, la cour d'appel a débouté l'auteur, estimant qu'il n'avait pas été victime d'une erreur judiciaire conformément à l'article 385 c) de la loi criminelle de 1961 (New Zealand Crimes Act). En 1994, l'auteur s'est vu refuser l'autorisation de faire appel auprès du Conseil privé.

2.4En 1996, il a été communiqué que l'un des trois détenus, qui servaient d'informateurs et qui avaient témoigné contre l'auteur, s'était rétracté. Devant cet élément nouveau et à la demande de l'auteur, un membre du Parlement a demandé l'ouverture d'une enquête ministérielle. L'affaire a été déférée au Bureau indépendant chargé d'enquêter sur les plaintes concernant la police, qui a mené une enquête. Après le début de l'enquête, l'informateur est revenu sur sa décision de se rétracter. Le bureau d'enquêtes n'en a pas moins mené une enquête approfondie et a conclu que la police n'avait pas commis d'irrégularité. En conséquence, le Ministre de la justice a refusé que l'affaire soit examinée plus avant. L'auteur a écrit à des membres de plusieurs partis politiques de son pays, mais il n'a suscité que très peu d'intérêt de leur part. Il affirme avoir épuisé toutes les voies de recours internes.

Teneur de la plainte

3.1L'auteur affirme que les droits consacrés aux articles 2, 14 et 26 du Pacte ont été violés. Plus précisément, il fait valoir ce qui suit :

a)Il y avait trois témoins "secrets" dont les témoignages étaient essentiels pour l'accusation. Selon ces témoins - anciens codétenus qui étaient des indicateurs de la police -, l'auteur aurait avoué le meurtre à plusieurs reprises;

b)Le droit à un procès équitable n'avait pas été respecté parce que, en août 1991, la cour d'appel lui a refusé le bénéfice de l'aide juridictionnelle qui lui aurait permis de s'assurer les services d'un nouvel avocat et de préparer sa défense en appel;

c)La procédure suivie par la police pour recueillir des preuves contre lui et la conduite des policiers lors de l'enquête étaient entachées d'irrégularités, notamment la fabrication d'éléments de preuve qui, de l'avis de l'auteur, étaient fallacieux et équivalaient à un parjure;

d)Les tribunaux ont autorisé l'accusation à présenter des éléments de preuve alors que certains étaient fallacieux ou d'une crédibilité douteuse. En conséquence, l'auteur estime que les tribunaux n'ont pas correctement interprété les faits de la cause, ce qui a abouti à sa condamnation injuste pour meurtre.

Délibérations du Comité

4.1Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

4.2En ce qui concerne l'allégation de l'auteur concernant les preuves apportées par des témoins "secrets", il ressort des éléments qu'il a présentés que l'identité de ces témoins lui a été révélée ainsi qu'à son conseil et au jury. Le seul élément "secret" en l'espèce était l'obligation de confidentialité concernant la divulgation de l'identité des témoins. Dans ces circonstances, le Comité estime que l'auteur n'a pas étayé ses allégations de violation de l'article 14, paragraphe 1.

4.3S'agissant du déni d'aide juridictionnelle en appel dont l'auteur se prétend victime, le Comité note que la décision initiale portant rejet de l'aide juridictionnelle aux fins de l'appel a été revue avant la date fixée pour l'audience, et que l'auteur a été représenté devant la cour d'appel par un conseil rémunéré au titre de l'aide juridictionnelle. Par conséquent, l'auteur n'a pas étayé l'allégation selon laquelle les droits consacrés par l'article 14, paragraphe 3 d), ont été violés.

4.4Le Comité note, au vu des documents présentés par l'auteur, que les tribunaux n'ont pas admis ses allégations faisant état d'irrégularités commises par la police et du manque de crédibilité des témoins à charge. Il renvoie à sa jurisprudence et affirme qu'il ne peut examiner les faits et les éléments de preuve appréciés par les tribunaux nationaux à moins qu'il n'apparaisse que l'appréciation en était arbitraire ou représentait un déni de justice. Les arguments invoqués par l'auteur et les éléments qu'il a présentés ne permettent pas de conclure que les décisions de la cour aient été entachées de telles irrégularités. Par conséquent, s'agissant des allégations de l'auteur faisant état d'irrégularités commises par la police quand elle a rassemblé les preuves et contestant la crédibilité des preuves produites, la communication est irrecevable au regard de l'article 2 du Protocole facultatif.

5.En conséquence, le Comité des droits de l'homme décide :

a)Que la communication est irrecevable;

b)Que la présente décision sera communiquée à l'auteur et portée à la connaissance de l'État partie.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français.]

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