Nations Unies

CRPD/C/POL/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

29 octobre 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations concernant le rapport initial de la Pologne *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial de la Pologne à ses 409e et 410e séances, les 4 et 5 septembre 2018 (voir CRPD/C/SR.409 et CRPD/C/SR.410). Il a adopté les observations finales ci-après à sa 425e séance, le 18 septembre 2018.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de la Pologne, qui a été établi conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie des réponses écrites (CRPD/C/POL/Q/1/Add.1) apportées à la liste de points établie par le Comité (CRPD/C/POL/Q/1).

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec l’importante délégation de haut niveau, composée de représentants de divers ministères, entités et institutions, qui a apporté des précisions en réponse à ses questions orales.

II.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction les progrès accomplis par l’État partie dans la mise en œuvre de la Convention. Il salue en particulier l’adoption des mesures législatives et de politique générale suivantes :

a)Le programme « Pologne conviviale − Accessibilité Plus » pour 2008‑2018 ;

b)La loi électorale de 2011, qui permet aux personnes handicapées de voter et qui facilite les procédures de vote ;

c)Les modifications apportées à la loi de 2018 relative à l’enseignement supérieur, qui prévoient un accompagnement des personnes handicapées dans le cycle de l’enseignement supérieur ;

d)Les campagnes de sensibilisation sur les droits des personnes handicapées, qui ont été lancées dans les médias avec la participation active des personnes handicapées.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

5.Le Comité est préoccupé par :

a)Le fait que la mise en œuvre de la Convention ne fasse pas l’objet d’une stratégie détaillée et d’un plan d’action et que les dispositions de la Convention ne soient pas incorporées dans les politiques nationales, régionales, locales et sectorielles, ce qui montre que l’approche fondée sur la charité et la protection sociale perdure et que les personnes handicapées continuent d’être considérées comme des bénéficiaires de l’aide sociale, plutôt que comme des titulaires des droits de l’homme ;

b)L’existence de nombreux mécanismes d’évaluation du handicap, y compris des mécanismes particuliers pour les enfants jusqu’à l’âge de 16 ans, et de multiples définitions du handicap, qui sont en contradiction avec l’objet de la Convention (art. 1er) et reposent toutes sur une approche médicale du handicap, comme il ressort de l’emploi de termes péjoratifs et de concepts vagues comme ceux de « retard mental », d’« incapacité de travail », d’« inaptitude à participer à la vie en société » ou de « dépendance ou inaptitude à l’autonomie » ;

c)Le fait que les professionnels concernés et les fonctionnaires ne soient pas suffisamment sensibilisés aux droits des personnes handicapées et aux obligations de l’État partie au regard de la Convention ;

d)Le caractère sélectif et limité que revêtent la participation des organisations de personnes handicapées à l’élaboration des politiques et les consultations concrètes menées dans ce cadre ;

e)Les dispositions légales qui encouragent les tests génétiques prénataux à titre de mesures de prévention primaire du développement d’un handicap chez le fœtus ;

f)La déclaration interprétative de l’article 12 et les réserves relatives aux alinéas a) et b) de l’article 23 1) et à l’alinéa a) de l’article 25 de la Convention, et le fait que l’État partie n’ait pas encore ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

6. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer une stratégie et un plan d’action pour la mise en œuvre des obligations découlant de la Convention , en y associant largement les organisations de personnes handicapées et en faisant en sorte que le handicap soit abordé selon une approche fondée sur les droits de l’homme, et non plus selon une approche caritative, dans l’ensemble des politiques nationales, régionales, locales et sectorielles, et partant, que les personnes handicapées soient considérées comme des titulaires des droits de l’homme ;

b) De faire en sorte que l’évaluation du handicap repose entièrement sur un modèle fondé sur les droits de l’homme et adopte une approche fondée sur ces droits, notamment :

i) En associant les organisations de personnes handicapées à la mise au point des mécanismes d’évaluation du handicap ;

ii) En associant les personnes handicapées à la production des informations utilisées pour l’évalua tion du handicap ;

iii) En agissant contre la multiplicité des méthodes d’évaluation  ;

iv) En rendant l es informations sur les critères d’évaluation accessibles et facilement compréhensibles ;

c) De supprimer tous les termes péjoratifs de tous les règlements existants et projets de règlements pour les remplacer par des termes pleinement respectueux de la dignité et de l’autonomie des personnes handicapées ;

d) De faire en sorte que diverses organisati ons de personnes handicapées, y  compris mais pas seulement celles qui représent ent les femmes handicapées, les  enfants handicapés, les réfugiés et les demandeurs d’asile handicapés, les lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres handicapés et les personnes handicapées ayant d’autres orientations sexuelles et identités de genre, les personnes ayant un handicap psychosocial et/ou intellectuel, les personnes ayant un handicap auditif ou visuel, les personnes handicapées vivant dans les zones rurales et les personnes handicapées ayant besoin d’un accompagnement poussé, participent pleinement et activement à l’élaboration des nouvelles lois et stratégies, de sorte que la législation soit conforme à la Convention, ainsi qu’à la réalisation des objectifs de développement durable et au suivi et à la notification des progrès accomplis dans ce domaine, et qu’elles soient consultées de façon utile sur ces sujets ;

e) De dispenser aux professionnels concernés, y compris des juges et des responsables de l’application des lois, des professionnels de la santé, des enseignants et des personnes qui travaillent avec des personnes handicapées, une formation pour les sensibiliser aux droits consacrés par la Convention ;

f) De s’abstenir à l’avenir de faire figurer dans ses rapports des informations sur la prévention primaire du handicap , étant donné que celle-ci ne contribue pas à l’application de la Convention ;

g) D’envisager de retirer sa déclaration interprétative et ses réserves concernant la Convention, et de ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

B.Droits particuliers (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

7.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que le principe d’« aménagement raisonnable » et l’obligation d’apporter des aménagements raisonnables à toutes les personnes handicapées dans tous les domaines de la vie ne sont pas clairement définis, et que le refus d’aménagement raisonnable n’est pas reconnu comme une forme de discrimination fondée sur le handicap ;

b)Que la discrimination multiple et croisée n’est pas visée par la législation antidiscrimination et qu’il n’est pas fait interdiction de la discrimination, notamment fondée sur le sexe, l’âge, l’origine ethnique, l’orientation sexuelle et l’identité de genre, à l’égard de toutes les personnes handicapées dans tous les domaines de la vie ;

c)Qu’il n’existe pas de dispositifs efficaces de prévention et de protection contre la discrimination et la violation du droit à l’égalité de traitement pour les personnes handicapées ;

d)Que l’État et les acteurs publics, ainsi que les personnes handicapées elles‑mêmes, ne sont pas sensibilisés aux droits des personnes handicapées à l’égalité et à la non-discrimination, y compris le droit à des informations et conseils juridiques accessibles.

8. Rappelant son observation générale n o  6 (2018) sur l’égalité et la non-discrimination, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter une législation qui définit et reconnaît le principe d’aménagement raisonnable dans tous les domaines de la vie et qui sanctionne le refus d’aménagement raisonnable en tant que forme de discrimination fondée sur le handicap ;

b) De reconnaître et d’interdire expressément la discrimination multiple et croisée, fondée sur le handicap, le sexe, l’âge, l’origine ethnique, l’identité de genre ou l’orientation sexuelle, ou toute autre situation, dans tous les domaines de la vie, dans ses lois, politiques et stratégies de lutte contre la discrimination, y compris la loi sur l’égalité ;

c) De mettre en place des mécanismes judiciaires et quasi judiciaires de prévention et de protection contre la discrimination ainsi que de réparation intégrale pour les personnes handicapées ;

d) De prendre des mesures concrètes pour que les fonctionnaires et les acteurs non étatiques, y compris les personnes handicapées elles-mêmes, bénéficient d’activités de formation continue et de sensibilisation sur les droits des personnes handicapées à l’égalité et à la non ‑discrimination ainsi qu’à des informations juridiques accessibles et à des conseils juridiques gratuits.

Femmes handicapées (art. 6)

9.Le Comité constate avec préoccupation que, bien qu’elles soient exposées à un risque très élevé de violences sexistes, y compris de violences sexuelles, domestiques et institutionnelles, les femmes handicapées :

a)Ne sont pas bien protégées contre les violences, en raison de lacunes dans le cadre juridique relatif à la violence et au handicap ;

b)Ne disposent pas d’un système efficace de lutte contre les violences, puisque les enquêtes ne sont pas fructueuses et que les victimes ne reçoivent pas d’assistance ;

c)Font face à de sérieux obstacles dans l’exercice de leur droit à la santé sexuelle et procréative, notamment dans l’accès à l’éducation sexuelle et procréative, aux informations sur la contraception et aux services de contraception, et dans la prise de décisions concernant leur santé sexuelle et procréative ;

d)Restent absentes des mesures relatives au genre et au handicap, du processus d’élaboration des politiques, des activités de collecte de données et de recherche, et, d’une manière générale, des lois et des politiques.

10. Rappelant son observation générale n o  3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées et la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, le Comité prie instamment l’État partie :

a) De considérer les femmes et les filles handicapées comme des titulaires de droits, d’adopter une stratégie globale de prévention et d’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes et des filles handicapées dans tous les contextes, y compris au domicile et en institution, et de se doter d’une législation qui garantit la protection des femmes et des filles handicapées contre les violences, la poursuite des auteurs de ces violences et l’octroi d’une réparation aux victimes ;

b) D’élaborer une stratégie visant à prévenir et à combattre les violences à l’égard des femmes et des filles handicapées dans tous les contextes, d’intégrer des indicateurs relatifs au handicap dans la procédure dite de la « carte bleue », qui est appliquée par la police dans les affaires de violence domestique, et de veiller à l’élaboration de services de qualité accessibles aux femmes et aux filles handicapées victimes de violences sexistes ;

c) De tenir compte des questions relatives à la santé sexuelle et procréative des femmes et des filles handicapées, de prendre en considération les droits de celles-ci dans ce domaine et de leur fournir des services inclusifs qui les aident à s’occuper de leurs enfants, à prendre des décisions sur des questions concernant leur santé sexuelle et procréative, leur contraception et leur éducation sexuelle, conformément à la version révisée des Principes directeurs internationaux sur l’éducation sexuelle (2018) de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) ;

d) De faire figurer les droits des femmes et des filles handicapées en bonne place dans les programmes sur l’égalité des sexes et le handicap, de recueillir des données ventilées et de mener une étude participative sur la condition sociale des femmes et des filles handicapées dans l’ensemble de l’État partie, et, dans le cadre de l’élaboration des politiques, de veiller à la consultation et à la participation systématiques des femmes et des filles handicapées par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Enfants handicapés (art. 7)

11.Le Comité note avec préoccupation :

a)Que des enfants handicapés sont placés dans des foyers sociaux, dans lesquels ils ne sont pas toujours séparés des adultes ;

b)Qu’à en juger par certaines attitudes, les enfants handicapés dépendent des autres et ont peu de possibilités d’exprimer leur opinion sur des questions qui les touchent directement ;

c)Qu’il n’existe pas de données ventilées concernant les enfants handicapés.

12. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’accélérer la désinstitutionnalisation des enfants handicapés en leur proposant une solution de remplacement sûr, dans une structure familiale, et des services pour leu r inclusion dans la société ;

b) De prendre des mesures concrètes pour aider les enfants handicapés à être a utonomes et de créer des plate formes à leur intention pour qu’ils puissent exprimer leur propre opinion sur toutes les questions qui les concernent ;

c) De recueillir des données ventilées et de mener une étude participative sur la condition sociale de tous les enfants handicapés.

Sensibilisation (art. 8)

13.Le Comité est préoccupé par :

a)Les perceptions négatives du handicap, selon lesquelles le handicap est une « condition indésirable » et les personnes handicapées sont des personnes « de moindre valeur » ;

b)Le fait que les personnes handicapées ne sont pas socialement reconnues comme des titulaires de droits ;

c)Le fait qu’aucune mesure n’a été prise pour sensibiliser aux droits des personnes handicapées tels qu’ils sont énoncés dans la Convention.

14. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures concrètes pour promouvoir le respect des droits et de la dignité des personnes handicapées auprès des parents et du grand public, y compris les médias publics et privés, le personnel médical, le personnel enseignant et les employeurs, et de donner une image positive des personnes handicapées en tant que titulaires des droits de l’homme ;

b) D’associer les organisations de personnes handicapées à l’élaboration des campagnes, des programmes de sensibilisation et des activités de formation sur le modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme ainsi qu’à la diffusion de ces campagnes, programmes et activités dans tout le pays, et de veiller à mettre en place des programmes complets de sensibilisation financés par l’État.

Accessibilité (art. 9)

15.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque d’accessibilité des bâtiments et des services publics, notamment des services de transports, d’information et de communication, pour toutes les personnes handicapées, en particulier dans les petites villes et les villages ;

b)Le nombre insuffisant de règlements à caractère normatif et contraignant visant à faire respecter les principes de la conception universelle des bâtiments et des services publics, y compris les règlements couvrant la construction des logements communaux et l’accessibilité des distributeurs automatiques de billets et autres appareils en libre-service ; et le fait que la loi de 1995 sur la construction contienne peu de dispositions destinées à garantir l’accessibilité pour toutes les personnes handicapées ;

c)Le nombre insuffisant de dispositifs de suivi de l’application des règlements et des normes sur l’accessibilité et le manque de sanctions en cas de non-respect des exigences en matière d’accessibilité ;

d)Le manque de formation aux questions de l’accessibilité et de la conception universelle dans les programmes d’études d’architecture, de design et d’informatique, y compris pour le personnel des institutions concernées.

16. Compte tenu de son observation générale n o  2 (2014) sur l’accessibilité ainsi que de l’objectif 9 et des cibles 11.2 et 11.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De tout faire pour garantir l’accessibilité dans tous les contextes, notamment l’accessibilité des bâtiments et des services publics tels que les services de transports, d’information et de communication, dans l’ensemble de l’État partie ;

b) D’actualiser les règlements existants ou d’adopter de nouveaux règlements de manière à se doter de textes qui définissent et rendent d’application obligatoire des normes de conception universelle pour les produits, les équipements, les services de transports, d’information et de communication, les distributeurs automatiques de billets et autres appareils en libre-service , et les logements communaux destinés à toutes les personnes handica pées dans tout l’État partie, y  compris les bâtiments construits avant 1995 ;

c) De modifier la loi sur les marchés publics pour qu’elle garantisse l’accessibilité par la conception universelle ;

d) De mettre en place des mécanismes de suivi qui fassent appel aux organisations de personnes handicapées de manière à garantir le respect des normes d’accessibilité dans tous les domaines applicables, y compris dans les projets d’investissement public, et d’instaurer des sanctions appropriées en cas de non-respect des normes d’accessibilité ;

e) De promouvoir des formations obligatoires sur l’accessibilité et la conception universelle dans le cadre des études d’architecture, de design et d’informatique, y compris pour le personnel des institutions concernées, ainsi que des activités de renforcement des capacités à l’intention des administrations locales chargées de surveiller l’application des normes d’accessibilité.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

17.Le Comité constate avec préoccupation que les besoins propres aux personnes handicapées ne sont pas suffisamment pris en considération dans la législation, les protocoles et les plans applicables aux situations de risque et aux situations d’urgence humanitaire.

18. Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et d’adopter des règlements, des plans et des mesures spécifiques pour la protection et le sauvetage de toutes les personnes handicapées dans les situations de risque ou les situations d’urgence humanitaire, à la faveur de consultations actives avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, conformément au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030) .

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

19.Le Comité est préoccupé par la déclaration interprétative de l’article 12 faite par l’État partie et par les dispositions du Code civil qui autorisent qu’une personne ayant un handicap psychosocial et/ou intellectuel soit privée de sa capacité juridique et se voit désigner un tuteur ou un curateur, chargé de prendre des décisions en son nom, ainsi que par le nombre toujours plus élevé de personnes handicapées qui sont privées de leur capacité juridique.

20. Le Comité invite l’État partie à retirer sa déclaration interprétative de l’article 12 de la Convention et, rappelant son observation générale n° 1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité , l’invite également à abroger toutes les dispositions à caractère discriminatoire du Code civil et d’autres textes juridiques qui autorisent que des personnes handicapées soient privées de leur capacité juridique, au motif que la capacité juridique telle qu’elle est définie par la législation recouvre la double capacité d’être titulaire de droits et d’accomplir des actes juridiques. Le Comité recommande aussi à l’État partie d’établir une procédure pour rendre leur pleine capacité juridique à toutes les personnes handicapées, et d’élaborer des mécanismes de prise de décisions accompagnée respectueux de l’autonomie, de la volonté et des préférences des personnes handicapées.

Accès à la justice (art. 13)

21.Le Comité constate avec préoccupation que les personnes ayant un handicap psychosocial ou intellectuel qui sont privées de leur capacité juridique se voient refuser le droit d’être parties à un procès ou de témoigner dans le cadre de procédures civiles. Il est également préoccupé par les difficultés que les personnes handicapées rencontrent généralement pour accéder à la justice :

a)Faute d’aménagements procéduraux et en raison de l’utilisation insuffisante de la langue des signes, du braille, de supports numériques accessibles, d’informations faciles à lire et à comprendre et d’autres moyens, modes et supports de communication accessibles, dans le cadre des procédures judiciaires ;

b)En raison du manque d’accessibilité des palais de justice, des cours de justice, des tribunaux et des postes de police, pour les personnes ayant un handicap physique ;

c)Faute d’une connaissance suffisante des droits des personnes handicapées en tant que titulaires des droits de l’homme par les professionnels de la justice et les membres des forces de l’ordre ;

d)Faute d’accès à des dispositifs de signalement des actes de violence, notamment le manque d’accès à la justice pour les enfants ayant un handicap intellectuel, les femmes handicapées ou les personnes handicapées vivant dans des institutions ;

e)Faute d’apport d’une aide juridique aux personnes handicapées, notamment d’une aide juridique et d’aménagements procéduraux aux personnes ayant un handicap psychosocial ;

f)Faute d’accès aux professions juridiques pour les personnes handicapées, considérées comme « inaptes » à les exercer.

22. Le Comité recommande à l’État partie de garantir aux personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial qui sont privées de leur capacité juridique l’accès à toutes les procédures judiciaires, dans des conditions d’égalité avec les autres et au moyen de mesures d’accompagnement. Il lui recommande aussi de faire en sorte que les personnes handicapées aient effectivement accès à la justice et, en particulier :

a) D’apporter des aménagements procéduraux et d’utiliser la langue des signes, le braille, la communication améliorée et alternative, et tout autre moyen, mode et support de communication accessible, dans le cadre des procédures judiciaires ;

b) De faire en sorte que les palais de justice, les cours de justice, les tribunaux et les postes de police soient accessibles aux personnes ayant un handicap physique ;

c) De garantir aux membres des forces de l’ordre et de l’administration judiciaire une formation régulière aux droits de toutes les personnes handicapées et aux obligations de l’État partie au regard de la Convention ;

d) De faire en sorte que les personnes handicapées aient accès à des dispositifs efficaces de signalement des actes de violence, y compris des crimes haineux, et que les enfants ayant un handicap intellectuel, les femmes handicapées et les personnes handicapées vivant dans des institutions aient accès à la justice ;

e) De garantir une aide juridique gratuite à toutes les personnes handicapées, en particulier celles qui ont un faible revenu, et une aide juridique et des aménagements procéduraux aux personnes ayant un handicap psychosocial ;

f) De prendre des mesures pour que les personnes handicapées puissent exercer une profession juridique si elles le souhaitent, et de procéder à des aménagements raisonnables à cette fin ;

g) De suivre les orientations de l’article 13 de la Convention pour atteindre la cible 16.3 des objectifs de développement durable.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

23.Le Comité est préoccupé par :

a)La loi sur la protection de la santé mentale, qui autorise que les personnes handicapées reçoivent un traitement sans leur consentement et soient privées de leur liberté contre leur gré au motif de leur handicap psychosocial, et, par exemple, qu’elles soient placées en institution par leurs tuteurs soi-disant selon leur volonté ;

b)Les limites imposées à la liberté individuelle des personnes handicapées qui vivent dans des institutions d’aide sociale ;

c)Le fait que les établissements de soins et de santé mentale, publics et privés, ne soient pas soumis au contrôle d’un organisme indépendant ;

d)Le manque d’aménagements raisonnables et d’accès aux soins de santé pour les personnes handicapées qui se trouvent dans des établissements pénitentiaires.

24. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’abroger toutes les dispositions juridiques autorisant le traitement des personnes handicapées sans leur consentement et leur placement en institution au motif de leur handicap psychosocial ;

b) De supprimer les limites à la liberté individuelle des personnes handicapées qui vivent dans des institutions d’aide sociale ;

c) De créer des services communautaires de réadaptation, axés sur le rétablissement, pour les personnes ayant un handicap psychosocial ;

d) D’élaborer des mécanismes de contrôle des établissements de soins et de santé mentale publics et privés ;

e) De garantir des aménagements raisonnables et l’accès à des soins de santé de qualité à toutes les personnes handicapées qui se trouvent dans des établissements pénitentiaires.

25. Le Comité félicite l’État partie de s’être opposé à la ratification de la Convention du Conseil de l’Europe pour la protection des droits de l’homme et de la dignité de l’être humain à l’égard des applications de la biologie et de la médecine (Convention d’Oviedo) et l’encourage à exprimer ses préoccupations et son désaccord tout au long des débats régionaux sur le P rotocole additionnel à cette Convention.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

26.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque de données sur les personnes handicapées placées en détention et sur leurs besoins au regard de leur handicap ;

b)Le fait que l’aménagement raisonnable, l’accompagnement thérapeutique, l’aide à la réadaptation et les traitements médicaux nécessaires ne soient pas des obligations juridiques, et le manque de personnel dans les lieux de détention, qui entraîne une dégradation des conditions de vie des personnes handicapées, notamment une situation de surpopulation, l’usage de la contrainte et la surmédication.

27. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De recueillir des données sur les personnes handicapées placées en détention et de mener des études sur leur situation et leurs besoins ;

b) D’ériger en obligations juridiques l’aménagement raisonnable, l’accompagnement thérapeutique, l’aide à la réadap ta tion et les traitements médicaux nécessaires et de consacrer des fonds suffisants aux activités de formation et de renforcement des capacités à l’intention du personnel des lieux de détention, en définissant et en interdisant expressément les traitements dégradants à l’égard des personnes handicapées.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

28.Le Comité est préoccupé par :

a)Les informations portées à sa connaissance selon lesquelles des personnes handicapées, notamment des femmes ayant un handicap intellectuel, ont subi des actes de violence et de maltraitance dans des établissements médicaux et psychiatriques ;

b)Le fait que les actes de violence subis par les personnes handicapées dans tous les contextes ne soient pas tous signalés et qu’il n’y ait pas de données ventilées concernant ces actes ;

c)L’absence de mesures de protection particulières telles qu’une aide juridique ou une assistance psychosociale pour les femmes handicapées qui risquent de subir des violences, domestiques ou institutionnelles, dans des lieux publics ou au travail.

29. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De prendre des mesures législatives et pratiques, y compris l’instauration d’un dispositif indépendant de contrôle fondé sur les droits de l’homme, pour protéger les personnes handicapées qui vivent encore dans des institutions et pour éliminer tout risque de violence ou de maltraitance ;

b) De mettre au point des dispositifs de signalement des actes de violence commis à l’égard de personnes handicapées dans tous les contextes et de faire en sorte que des données ventilées soient recueillies sur le sujet ;

c) D’ériger en obligation juridique la protection des personnes handicapées victimes de violences et de prendre à cet égard des mesures concrètes telles que la mise en place de numéros d’urgence et de services en vue de leur rétablissement psychologique et physique qui soient accessibles, en particulier aux femmes handicapées.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

30.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des femmes et des filles handicapées, privées de leur capacité juridique, placées sous tutelle et vivant dans des institutions, ont été stérilisées de force. Il est aussi préoccupé par les informations selon lesquelles des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des personnes ayant d’autres orientations sexuelles ou identités de genre suivent une « thérapie de conversion » dans des services de santé publics et privés, contre leur gré et au motif qu’ils présenteraient un handicap psychosocial.

31. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les femmes et les filles handicapées aient accès à des mesures d’accompagnement lorsqu’elles prennent des décisions importantes pour leur vie et qu’elles ne soient pas stérilisées sans leur consentement plein, libre et éclairé. Il prie instamment l’État partie de cesser d’appliquer la thérapie de conversion et de proposer aux personnes ayant un handicap psychosocial un accompagnement respectueux de leur identité de genre et de leur orientation sexuelle.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

32.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que le processus de désinstitutionnalisation des personnes handicapées en vue de leur accession à une vie autonome, conformément à leur droit de choisir où, avec qui et comment vivre hors des institutions et des foyers, est au point mort faute de volonté politique, et, en particulier, qu’il ne fait l’objet d’aucune stratégie, d’aucun plan d’action ni d’aucun objectif de financement pour la période qui suivra la cessation des versements de l’Union européenne ;

b)Que l’accès aux services de proximité est insuffisant, surtout dans les villages, et que les programmes de logements protégés se poursuivent, notamment avec la création de foyers, ce qui est contraire à l’article 19 de la Convention tel qu’il est explicité par le Comité dans son observation générale no 5 (2017) sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société ;

c)Que les services d’assistance personnelle s’inscrivent dans des projets, ne sont pas systémiques et sont limités du point de vue du budget, de la durée et de leur disponibilité à l’échelle du territoire ;

d)Que les fonds alloués par l’Union européenne à la désinstitutionnalisation sont consacrés à des mesures qui ne sont pas conformes aux dispositions de la Convention telles qu’elles sont explicitées par le Comité dans son observation générale n° 5, et que l’emploi de ces fonds n’est pas contrôlé ;

e)Que la traduction de « community » par « société » dans la version polonaise de la Convention est incorrecte.

33. Compte tenu de l’observation générale n o  5 (2017) sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société, le Comité recommande à l’État partie :

a) De définir et d’adopter des plans d’action concrets pour passer, dans des délais donnés, de l’institutionnalisation à des programmes d’accession des personnes handicapées à une vie autonome au sein de la communauté, et de faire en sorte que des fonds suffisants soient alloués à ce processus de désinstitutionnalisation quand celui-ci ne bénéficiera plus du financement de l’Union européenne ;

b) D’adopter des cadres juridiques qui permettent d’apporter une assistance personnelle aux personnes handicapées, sous la forme de mesures d’accompagnement personnalisées et inclusives, et d’y consacrer un budget suffisant ;

c) De faire en sorte que les fonds alloués par l’Union européenne à la désinstitutionnalisation servent à financer des mesures conformes aux dispositions de la Convention et que l’emploi de ces fonds soit contrôlé, avec la participation effective des personnes handicapées et/ou des organisations qui les représentent, de sorte que les dépenses soient en accord avec les besoins des personnes handicapées elles-mêmes ;

d) Faire en sorte que le mot «  community  » soit traduit correctement dans la version polonaise de la Convention .

Mobilité personnelle (art. 20)

34.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les personnes handicapées ont des difficultés à obtenir le permis de conduire, faute d’aménagements des procédures d’examen — par exemple, de services d’interprétation en langue des signes ;

b)Que les personnes handicapées ne bénéficient pas de mesures d’accompagnement pour l’achat de véhicules et de moyens de transport qui leur sont adaptés ;

c)Que les personnes aveugles qui ont recours à un chien guide font l’objet de restrictions injustifiées dans l’accès aux bâtiments publics, aux moyens de transport et aux services destinés aux personnes handicapées.

35. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte :

a) Que les personnes handicapées aient accès à toutes les mesures d’aménagement nécessaires dans les centres d’examen de conduite ;

b) Que les personnes handicapées aient accès à des mesures d’accompagnement adéquates lorsqu’elles achètent un véhicule ou un moyen de transport qui leur est adapté ou installent des équipements pour adapter leur véhicule ;

c) Que les bâtiments, les moyens de transport et les services ouverts au public soient accessibles aux personnes aveugles qui ont recours à un chien guide.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

36.Le Comité relève avec préoccupation :

a)Que l’usage du braille ou des modes de communication améliorée et alternative, comme le langage facile à lire et à comprendre, n’est pas suffisamment encouragé ;

b)Que les services publics en ligne ne sont pas accessibles aux personnes handicapées ;

c)Que la loi sur la langue des signes et les autres moyens de communication n’est pas appliquée de manière efficace, en raison de sa faible portée, de son imprécision et de l’obligation faite aux fournisseurs de services publics et privés de proposer des services d’interprétation en langue des signes, en particulier dans les services de soins de santé ;

d)Que la loi sur la radiodiffusion n’impose pas expressément que les programmes de radio et de télévision soient accompagnés d’une interprétation en langue des signes, de sous-titres et d’une audio-description.

37.Le Comité est aussi préoccupé par les prescriptions formelles énoncées dans la loi sur le droit d’auteur qui empêchent l’utilisation de la langue des signes.

38. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De développer l’usage du braille, des modes de communication améliorée et alternative et du langage facile à lire et à comprendre dans tous les secteurs ;

b) D’adapter rapidement les sites Web des administrations publiques pour les rendre accessibles à toutes les personnes handicapées et de soumettre régulièrement ces sites Web à des contrôles ;

c) D’actualiser la loi sur la langue des signes et les autres moyens de communication et de lui donner effet, de manière à garantir l’exercice effectif des droits des personnes sourdes, y compris l’accès à des services d’interprétation en langue des signes dans tous les secteurs aux frais de l’État ;

d) D’inscrire dans la loi sur la radiodiffusion des obligations précises et progressives pour les organismes de radiodiffusion publics et privés concernant l’usage de l’interprétation en langue des signes, des sous ‑titres et de l’audiodescription, et de modifier la loi sur le droit d’auteur pour lever toute restriction d’accès aux services d’interprétation en langue des signes pour toutes les émissions.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

39.Le Comité est préoccupé par la réserve de l’État partie relative à l’alinéa a) du paragraphe 1 de l’article 23 de la Convention et par :

a)La pratique qui consiste à retirer les enfants handicapés de leur milieu familial au motif que leurs parents seraient incapables de s’occuper d’eux ;

b)L’interdiction de se marier qui est faite aux personnes privées de capacité juridique et aux personnes présentant un handicap psychosocial et/ou intellectuel ou une paralysie cérébrale, au motif que le handicap est un facteur de risque pour le mariage et la constitution d’une famille, et l’interdiction pour les personnes sourdes d’obtenir la garde de leurs enfants adoptifs. 

40. Le Comité recommande à l’État partie de retirer ses réserves relatives aux alinéas a) et b) du paragraphe  1 de l’article 23 de la Convention et d’abroger toutes les dispositions juridiques qui interdisent aux personnes handicapées de se marier et de fonder une famille. Il lui recommande également d’établir des systèmes d’accompagnement inclusif, qui aident les parents et les membres de la famille des enfants handicapés à remplir leur rôle.

Éducation (art. 24)

41.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence de dispositions visant expressément à faciliter la mise en œuvre de l’éducation inclusive et la confusion entre les termes « intégration » et « inclusion » ;

b)Le fait que la majorité des étudiants handicapés, en particulier ceux qui présentent un handicap modéré ou grave, sont scolarisés dans des établissements d’éducation ségrégative ;

c)Le fait que les chefs d’établissements scolaires et les parents dont les enfants ne sont pas handicapés ne sont pas sensibilisés à l’éducation inclusive et que les enseignants ne reçoivent pas une formation appropriée sur la question.

42. Rappelant son observation générale n° 4 (2016) sur le droit à l’éducation inclusive ainsi que l’objectif de développement durable n° 4 et les cibles 4.5 et 4.a, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter des dispositions expresses pour faciliter la mise en œuvre des aménagements raisonnables, des programmes d’apprentissage personnalisés et de l’enseignement inclusif en salle de classe, dans un environnement pédagogique accessible ;

b) De soutenir les mesures d’appui aux établissements scolaires, y compris le soutien aux enseignants, afin que l’éducation soit plus inclusive à l’égard des étudiants ayant un handicap modéré ou grave ;

c) De sensibiliser les parents dont les enfants ne sont pas handicapés aux avantages que l’éducation inclusive offre à tous et de former les chefs d’établissements scolaires et les enseignants aux méthodes et aux meilleures pratiques d’éducation inclusive.

Santé (art. 25)

43.Le Comité est vivement préoccupé par la réserve de l’État partie concernant l’alinéa a) de l’article 25 de la Convention et par :

a)Le manque de services de santé accessibles aux personnes handicapées, en particulier dans les zones rurales, notamment l’absence d’interprétation en langue des signes ;

b)Le manque d’informations sur les soins de santé et les services de santé adaptés aux besoins des femmes handicapées, en particulier des femmes aveugles ou ayant un handicap psychosocial ou intellectuel, et l’absence d’équipements de santé adaptés, de services de santé sexuelle et procréative appropriés et de salles de gynécologie dûment équipées ;

c)Le manque de produits de santé de qualité à un prix abordable et le fait que des personnes handicapées ayant des besoins analogues n’ont pas toutes accès à ces produits dans des conditions d’égalité ;

d)Le fait que le personnel de la santé ne sait pas et ne veut pas fournir des services de santé aux femmes handicapées ;

e)Les difficultés que les femmes handicapées ont à accéder aux services d’avortement médicalisé, par manque d’informations sur leurs droits à la santé sexuelle et procréative et sur les services qui existent dans ce domaine ;

f)La mise en œuvre du Programme national de santé mentale, qui ne traite pas des services nécessaires aux personnes ayant un handicap psychosocial.

44. Le Comité recommande à l’État partie de retirer sa réserve à l’alinéa a) de l’arti cle 25 de la Convention, et :

a) De faire en sorte que les services de santé soient disponibles et accessibles à toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap ;

b) De prendre des mesures pour assurer une couverture universelle des services de santé à toutes les femmes et les filles handicapées, notamment de communiquer des informations sous des formes accessibles sur le droit à la santé sexuelle et procréative, les services gynécologiques, les soins périnataux et les équipements de santé adaptés, don t les salles de gynécologie ;

c) De prendre des mesures pour que les personnes handicapées aient accès à des produits de santé de qualité à un prix abordable, et d’éliminer les différences de couverture sanitaire entre group es de personnes handicapées ;

d) D’organiser des formations pour sensibiliser les professionnels de la santé aux droits des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, qui découlent de la Convention ;

e) De faire le nécessaire pour que l’autonomie et les décisions des femmes handicapées soient respectées, que les droits des femmes en matière de santé procréative soient protégés, que l’accès à l’avortement médicalisé soit assuré et que les femmes handicapées ne subissent pas de stérilisation ni d’avortement contre leur gré ;

f) De faire en sorte que la mise en œuvre du Programme national de santé mentale permette d’étendre l’accès aux services de santé de proximité pour les personnes ayant un handicap psychosocial et de doter ces services de ressources suffisantes.

Adaptation et réadaptation (art. 26)

45.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les programmes de réadaptation ne sont pas accessibles à toutes les personnes handicapées, surtout si l’on considère les personnes ayant un handicap psychosocial ou intellectuel, et que l’admissibilité aux services de réadaptation est liée à des critères de revenu, ce qui impose une contrainte financière injustifiée aux personnes handicapées ;

b)Que les programmes de réadaptation sont déclinés en projets et fondés sur une approche médicale, et qu’ils ne sont pas financièrement viables ;

c)Que l’administration des programmes de réadaptation n’est pas suffisamment contrôlée ;

d)Que la traduction officielle du titre de l’article considéré (« Réadaptation ») est incomplète.

46. Compte tenu des liens entre l’article 26 de la Convention et la cible 8.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à l’accessibilité et à la continuité des programmes de réadaptation pour toutes les personnes handicapées, en particulier les personnes ayant un handicap psychosocial ou intellectuel, et d’éliminer les critères d’admissibilité à la réadaptation d’ordre financier ;

b) De fournir aux personnes handicapées des programmes de réadaptation inclusifs, personnalisés et axés sur leurs besoins, dans une large gamme de services de proximité ;

c) De mettre en place un mécanisme de suivi des programmes de réadaptation ;

d) De corriger le titre de l’article 26 en « Adaptation et réadaptation » dans la version polonaise de la Convention.

Travail et emploi (art. 27)

47.Le Comité est préoccupé par :

a)Le faible taux d’emploi des personnes handicapées et les difficultés que les femmes handicapées rencontrent lorsqu’elles cherchent à entrer sur le marché du travail général, et par voie de conséquence, leur niveau de revenu moins élevé, en particulier dans les zones rurales ;

b)La promotion des ateliers protégés et l’offre d’emplois de statut inférieur, qui entravent l’accès au marché du travail général pour les personnes handicapées, notamment de sexe féminin, et l’absence de mesures d’incitation au recrutement de personnes handicapées, surtout de personnes ayant un handicap grave, sur le marché du travail général ;

c)Le non-respect, en particulier dans la fonction publique, du quota d’emploi de personnes handicapées fixé à 6 % ;

d)Le manque de programmes d’activation du marché du travail et d’offres d’emplois pour les personnes handicapées.

48. Le Comité recommande à l’État partie de se doter d’une législation et de mesures pour l’emploi des personnes handicapées sur le marché du travail général, et en particulier :

a) D’encourager le travail et l’emploi des femmes handicapées et de garantir l’égalité des salaires, notam ment dans les zones rurales ;

b) D’agir en faveur d’un travail décent pour les personnes handicapées, notamment les femmes handicapées, dans les secteurs public et privé, et d’adopter des mesures spéciales d’incitation et des mesures d’appui à l’aménagement raisonnable, y compris une aide individuelle à l’emploi de personnes polyhandicapées ;

c) De faire en sorte que le quota d’emploi de 6 % de personnes handicapées soit atteint dans tous les secteurs et, en particulier, dans la fonction publique ;

d) De faire en sorte que les programmes d’activation du marché du travail général incluent véritablement toutes les personnes handicapées.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

49.Le Comité est préoccupé par :

a)Le taux de pauvreté élevé parmi les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, et le creusement des inégalités entre les ménages selon qu’ils comptent, ou non, des personnes handicapées ;

b)Le piège de l’assistanat, qui contraint les personnes handicapées et leur entourage à choisir entre activité professionnelle et prestations sociales, et qui finit par condamner les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, à la pauvreté et à l’exclusion sociale ;

c)Le manque de données ventilées sur la pauvreté des personnes handicapées et l’absence de contrôle de l’efficacité des mécanismes de sécurité sociale conçus pour lutter contre la pauvreté ;

d)Le manque de mesures visant expressément à garantir l’accessibilité des logements pour les personnes handicapées.

50. Compte tenu des liens entre l’article 28 de la Convention et la cible 1.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie :

a) De mettre en avant les droits des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, et de les faire figurer en bonne place dans la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté, en adoptant des mesures concrètes et en allouant un budget suffisant ;

b) D’empêcher que, du fait qu’elles ont un emploi, les personnes handicapées ne soient plus en droit de bénéficier de régimes d’aide tels que des allocations d’invalidité ;

c) De recueillir des données ventilées sur la pauvreté des personnes handicapées et de contrôler l’efficacité des mécanismes de sécurité sociale conçus pour lutter contre la pauvreté ;

d) De prendre des mesures propres à garantir aux personnes handicapées l’accès au logement ;

e) De faire en sorte que le terme « logements sociaux » soit traduit correctement dans la version polonaise de la Convention.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

51.Le Comité est préoccupé par :

a)Le paragraphe 2 de l’article 62 de la Constitution, qui prive du droit de voter ou de participer à un référendum les personnes déclarées juridiquement incapables, et d’autres textes législatifs tels que la loi sur les associations, qui interdit aux personnes privées de capacité juridique de fonder une association, de faire partie d’une association ou d’organiser des réunions publiques ;

b)La modification apportée en 2018 à la loi électorale, qui restreint les moyens de voter par correspondance et, par voie de conséquence, limite l’accessibilité des procédures de vote pour les personnes handicapées ;

c)L’inaccessibilité persistante des bureaux de vote, l’absence de mesures permettant aux personnes ayant une grave parésie de la main de voter en toute indépendance et dans le secret, et l’absence d’aide au vote pour les personnes sourdes.

52. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’abroger toutes les dispositions qui privent les personnes ayant un handicap psychosocial ou intellectuel et les personnes privées de capacité juridique de leur droit de vote et de tout autre droit politique ;

b) De revenir sur la modification apportée en 2018 à la loi électorale et de faire en sorte que les procédures de vote soient accessibles pour toutes les personnes handicapées ;

c) De faire en sorte que tous les bureaux de vote et toutes les procédures de vote soient accessibles pour toutes les personnes handicapées, y compris en prenant des mesures qui permettent aux personnes ayant une grave parésie de la main de voter en toute indépendance et dans le secret, et en proposant aux personnes sourdes une aide au vote.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

53.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence de données sur les personnes handicapées, y compris au niveau local ;

b)Le fait qu’il n’existe pas de base de données nationale sur les personnes handicapées et, partant, que les informations nécessaires à la mise en œuvre de la Convention font défaut.

54. Compte tenu de la cible 17.18 des objecti fs de développement durable, le  Comité recommande à l’État partie :

a) D’élaborer des procédures systématiques de collecte et de communication de données, conformément aux dispositions de la Convention, et de tenir compte du bref questionnaire du Groupe de Washington sur les s tatistiques des incapacités ;

b) De recueillir, d’analyser et de diffuser des données ventilées, conformément à l’ article 31 de la Convention ;

c) De faire en sorte que les organisations de personnes handicapées participent à la collecte de données, y compris à la définition des méthodes de collecte et au processus d’analyse des données .

Application et suivi au niveau national (art. 33)

55.Le Comité est préoccupé par :

a)Le manque de capacités techniques des organismes chargés de mettre en œuvre la Convention selon une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, et le paternalisme avec lequel ces organismes exercent leurs fonctions ;

b)Le fait que le Défenseur des droits de l’homme, désigné comme l’organisme indépendant chargé de promouvoir, de protéger et de surveiller la mise en œuvre de la Convention et de ses dispositions, n’a pas de fondement juridique et que les fonds qui lui sont alloués ont diminué ;

c)Le fait que les organisations qui représentent les personnes handicapées ne participent pas activement au suivi de l’application de la Convention.

56. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De désigner une autorité intersectorielle pour coordonner et diriger les activités visant à prendre en considération et à mettre en œuvre les droits des personnes handicapées, dans tous les secteurs et à tous les niveaux ;

b) De renforcer les capacités du Bureau du Défenseur des droits de l’homme en tant qu’organisme indépendant chargé de promouvoir, de protéger et de surveiller la mise en œuvre de la Convention, en le dotant d’un fondement juridique approprié et en lui allouant des ressources et des fonds suffisants pour qu’il puisse s’acquitter de son mandat de manière efficace et indépendante ;

c) De faire en sorte que les organisations de personnes handicapées participent pleinement et effectivement aux activités de suivi prévues par la Convention, et de leur apporter le financement nécessaire à cet effet.

IV.Suivi

Diffusion de l’information

57. Le Comité souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales , et appelle en particulier l’attention de l’État partie sur les recommandations concernant les articles 6 (Femmes handicapées ) et  19 (Autonomie de vie et inclusion dans la société) de la Convention, au titre desquels des mesures doivent être prises sans délai.

58. Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre ses recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des différents ministères, aux administrations locales et aux membres des professions concernées, tels les professionnels de l’éducation, de la santé et du droit, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

59. Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisati ons de personnes handicapées, à  l’élaboration de ses rapports périodiques.

60. Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations de personnes handicapées, ainsi qu’auprès des personnes handicapées elles-mêmes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment en langue des signes, et sous des formes accessibles telles que le langage facile à lire et à comprendre. Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web public consacré aux droits de l’homme.

Prochain rapport périodique

61. Le Comité prie l’État partie de lui soumettre son prochain rapport valant deuxième à quatrième rapports périodiques le 25 sep tembre 2026 au plus tard et d’y  faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il invite également l’État partie à envisager de soumettre ce rapport selon la procédure simplifiée de présentation des rapports, dans le cadre de laquelle le Comité établit une liste de points au moins un an avant la date prévue pour la soumission du rapport. Les réponses de l’État partie à cette liste de points constituent son rapport périodique.