Nations Unies

CCPR/C/BEL/CO/5/Add.1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

13 novembre 2012

Original: français

Anglais et français seulement

Comité des droits de l’homme

Examen des rapports soumis par les États parties conformement à l’article 40 du Pacte

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Belgique *

Additif

Informations reçues de la Belgique sur la suite donnée aux observations finales du Comité des droits de l’homme (CCPR/C/BEL/CO/5)

[18 novembre 2011]

1.Le Comité des droits de l’homme a examiné, les 14 et 15 octobre 2010, le cinquième rapport périodique de la Belgique (CCPR/C/BEL/5) et il a adopté, le 26 octobre 2010, ses observations finales (CCPR/C/BEL/CO/5), rendues publiques le 18 novembre 2010. Au paragraphe 25 de ce dernier document, le Comité demande à la Belgique de lui faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la situation actuelle et sur les suites données aux recommandations du Comité figurant aux paragraphes 14, 17 et 21. Conformément à cette demande, l’État belge fournit les renseignements demandés ci-après.

Réponse au paragraphe 14 des observations finales (CCPR/BEL/CO/5)

Recours à l’emploi de la force – conditions légales

2.Dans le cadre de ses missions, la police peut être amenée à recourir à la force dans le strict respect des conditions légales balisant la matière. Tout recours à la force doit s’inscrire, en effet, intégralement dans le cadre juridique interne et international, et dans le respect de la protection des droits de l’homme, y compris la prohibition des mauvais traitements et de toute forme de torture, qu’ils soient basés ou non sur une forme de discrimination. Toute violation de ces principes peut faire l’objet de poursuites sur le plan pénal ou disciplinaire.

3.Le principe et les conditions de l’emploi de la force sont prévus dans la Loi sur la fonction de policeet dans le Code de déontologie des services de polices..

4.Selon l’article 37 de la Loi sur la fonction de police, « Dans l’exercice de ses missions de police administrative ou judiciaire, tout fonctionnaire de police peut, en tenant compte des risques que cela comporte, recourir à la force pour poursuivre un but légitime qui ne peut être atteint autrement. Tout recours à la force doit être raisonnable et proportionné à l’objectif poursuivi. Tout usage de la force est précédé d’un avertissement, à moins que cela ne rende cet usage inopérant ».

5.L’article 38 de la Loi sur la fonction de police concerne spécifiquement l’usage des armes à feu : « Sans préjudice des dispositions de l’article 37, les fonctionnaires de police ne peuvent faire usage d’armes à feu contre des personnes que dans les cas suivants: 1° en cas de légitime défense […] ; 2° contre des personnes armées […], lorsqu’il est raisonnablement permis de supposer que ces personnes disposent d’une arme à feu prête à l’emploi et qu’elles l’utiliseront contre des personnes ; 3° et 4° lorsqu’en cas d’absolue nécessité, les fonctionnaires de police ne peuvent défendre autrement les personnes, les postes, le transport de biens dangereux ou les lieux confiés à leur protection […]. Dans ces cas, les armes à feu ne peuvent être utilisées que conformément aux instructions et sous la responsabilité d’un officier de police administrative […] judiciaire. Le recours aux armes prévu aux 2°, 3° et 4°, ne s’effectue qu’après avertissement donné à haute voix ou par tout autre moyen disponible, y compris par un coup de semonce, à moins que cela ne rende ce recours inopérant ». Enfin, depuis 2007, l’article 37 bis de la même loi traite, de manière spécifique, du recours à l’utilisation de menottes.

6.Selon l’article 46 du Code de déontologie des services de polices (force contraignante), « Dans toutes les situations, et plus particulièrement dans celles où s'impose une atteinte aux libertés et aux droits garantis par la Constitution, les membres du cadre opérationnel s'assurent au préalable que les ordres qu'ils donnent et les actes qu'ils posent sont bien fondés sur une base légale ou réglementaire et que les modalités de leur intervention sont bien proportionnelles au but poursuivi. Ils n'ordonnent ni commettent d'actes arbitraires qui puissent porter atteinte à ces droits et libertés, tels, entre autres, l'arrestation et la détention illégales et arbitraires ou la violation de domicile ».

7.L’article 49 du Code de déontologie des services de polices rappelle l’article 37 de la loi susmentionnée, en précisant que: « Les membres du personnel qui sont autorisés à utiliser la force ou la contrainte, conformément à la loi, s'assurent que : - l'objectif poursuivi par l'intervention est légal; - cet objectif ne peut être atteint d'une autre manière moins violente, tels la persuasion ou le dialogue; - les moyens mis en œuvre sont raisonnables et proportionnés à l'objectif poursuivi et aux circonstances propres au cas d'espèce. Ceci implique qu'ils doivent rechercher les modes d'intervention adéquats les moins violents possibles et qu'une certaine différenciation et gradation doivent exister dans les modalités du recours à la force ».

8.Il ressort de ces règles que le recours à la force ne peut jamais être automatique, puisqu’il requiert toujours l’appréciation du fonctionnaire ou de l’agent de police et doit, toujours, répondre aux conditions de légalité, de proportionnalité ainsi que de nécessité. Le système de formation des agents de police assure la bonne connaissance de ces principes, et ce tout au long de leur carrière. Ils sont aussi soumis à la circulaire GPI48 sur la formation et l’entraînement en maîtrise de la violence qui insiste sur, outre les techniques d’arrestation, d’immobilisation et d’usage des moyens de contrainte, l’aspect légal de l’usage de la force et le rappel des principes en la matière. On peut aussi noter que depuis la réforme de la police belge en 1998, celle-ci travaille, davantage, selon des principes de partage ainsi que de communication avec les communautés. Au départ d’un problème, la police agit, ainsi, de manière plus proactive et communicationnelle. Ce nouveau cadre signifie, entre autres, moins de place pour une police réactive et répressive recourant aux moyens de contrainte. Ces nouveaux principes sont également intégrés dans la formation des agents de la police.

9.Enfin, tout recours à la force doit faire l’objet d’un rapport systématique et spécifique. Selon la circulaire GPI62, « […] tout événement qui s'accompagne d'actes de violence, avec ou sans usage de l'armement policier, de techniques ou de tactiques d'intervention, est soumis à une obligation de signalement. Outre les autorités administratives et judiciaires compétentes et les services de prévention locaux, […] un signalement plus élaboré et circonstancié en sera adressé à la Direction générale de l'appui et de la gestion […]. Cette communication s'effectuera dans l'optique de la surveillance, de la gestion et de l'analyse qualitative et quantitative des événements par les services de police compétents tels que la Direction du service interne de prévention et de protection au travail, la Direction de la formation, Cellule des situations de danger ainsi que par l'Inspection générale de la police fédérale et de la police locale »..

Suites données aux plaintes alléguant de mauvais traitements (enquête, poursuite et sanctions)

10.Toute violation des règles susmentionnées peut faire l’objet de poursuites judiciaires et/ou disciplinaires selon la loi. En ce qui concerne le contrôle interne, selon les informations reçues du Conseil de discipline, le nombre de sanctions disciplinaires prononcées pour la période 2006-2010 à l’égard de policiers pour des faits de recours excessif à la force est le suivant : 9 sanctions en 2006, 12 sanctions en 2007, 12 sanctions en 2008, 13 sanctions en 2009 et 8 sanctions en 2010.

11.En vue de veiller au bon déroulement des missions policières, et notamment au respect des règles relatives au recours à la force et à la protection des droits de l’homme, l’Etat belge dispose aussi de mécanismes et organes indépendants de la police, dits de contrôle externe : 1) l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale dépendant du pouvoir exécutif (Ministères de l’Intérieur et de la Justice), 2) le Comité P dépendant du pouvoir législatif, et 3) le pouvoir judiciaire dans sa compétence de poursuite des crimes et délits.

12.Ces organes fonctionnent sur une base ponctuelle, régulière ou systématique selon les cas. Ils sont accessibles aux personnes en cas de manquements et permettent également une évaluation du fonctionnement des interventions policières (voir infra, à titre d’exemple, le rapport du Comité P sur les manifestations du 29 septembre et du 1er octobre 2010) et, le cas échéant, l’adoption de mesures correctrices.

13.Lorsque des incidents sont signalés, ils font l'objet d'un accusé de réception adressé au plaignant et d'une enquête préalable du service de contrôle interne. Au terme de l'enquête, la partie plaignante est systématiquement informée du résultat de l'enquête et des moyens de recours dont elle dispose. Dans l’hypothèse où les faits sont susceptibles de poursuites pénales, l’autorité judiciaire compétente est saisie. Cette dernière désigne le service chargé de l’enquête. La coopération avec les services chargés du contrôle externe des services de police (voir supra, Comité P et Inspection générale) est optimale, que ce soit lors d'enquêtes relatives au fonctionnement interne du corps de police ou lors d’enquêtes judiciaires ayant trait à des policiers en particulier.

14.Pour la période 2007 à 2009, les chiffres relatifs au nombre de plaintes alléguant des faits de violence policière (néanmoins, l’extraction de la banque de données ne permet pas de distinguer entre les allégations de violences policières exercées contre des personnes de celles contre des biens) introduites directement auprès du Comité P sont les suivants : 179 en 2007, 136 en 2008 et 161 en 2009. Quant aux chiffres pour les enquêtes judiciaires effectuées par le service d’enquêtes P pour le compte des autorités judiciaires concernant des allégations de violence policière (à nouveau contre des personnes ou contre des biens) pour la même période, ils sont les suivants : 81 en 2007, 48 en 2008 et 51 en 2009.

15.Selon la banque de données de l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale, les dossiers judiciaires (sous la direction d’un juge d’instruction ou Procureur du Roi) relatifs à des allégations de violences policières (emploi excessif de la force) traités par leur Service des enquêtes individuelles sont, pour la période 2006-2010, au nombre de : 106 dossiers en 2006, 135 dossiers en 2007, 98 dossiers en 2008, 148 dossiers en 2009 et 121 dossiers en 2010. Ces chiffres représentent 11,6% des dossiers traités par l’Inspection générale et ne comprennent pas les dossiers susmentionnés initiés ou traités par le Comité P ou par les services de contrôle interne des zones de police et de la police fédérale.

16.L’Inspection générale, après avoir rendu son avis, n’est généralement pas tenue informée des suites judiciaires données aux cas d’allégations de violences policières (classements sans suite, poursuites ou encore décisions de non-lieu). La banque de données du Service de politique criminelle du Ministère de la Justice ne permet pas non plus de connaître le nombre de condamnations prononcées, car il n’existe pas d’encodage spécifique pour les faits de violences policières. En revanche, l’article 14, alinéa 1er de la loi précitée du 18 juillet 1991 du contrôle des services de police et de renseignements et de l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace prévoit que le procureur général et l’auditeur général adressent, d’office, au président du Comité P copie des jugements et arrêts relatifs aux crimes ou délits commis par les membres des services de police et de l’Organe de coordination pour l’analyse de la menace. Toutefois, malgré cette obligation légale, toutes les données ne sont pas systématiquement transmises au Comité P et dès lors, les données chiffrées communiquées dans le tableau ci-dessous ne sont pas nécessairement complètes.

Tableau reprenant les informations communiquées au Comité P en exécution de l’article 14, alinéa 1 er , de la loi du 18 juillet 1991, quant aux condamnations pénales prononcées en 2009-2010 envers des fonctionnaires de police pour des faits de « violence policière »

2009

2010

Violences illégales

Coups

et blessures

Meurtre/

homicide

Traitement inhumain/

dégradant

Violences illégales

Coups et blessures

Meurtre/

homicide

Traitement inhumain/

dégradant

Non-lieu : prescription

2

Non-lieu : autres

9

2

14

21

3

Acquittement :

prescription

Acquittement : autres

4

5

1

4

5

Mesure de défense sociale

Suspension du prononcé

2

3

3

2

Déclaration de culpabilité

1

1

Peine de travail avec sursis total

Peine de travail avec sursis partiel

Peine de travail effective

1

Prison/amende avec sursis total

2

2

3

2

Prison/amende avec sursis partiel

3

3

Prison/amende effective

Commentaires :

a)Les poursuites pour violences illégales concernent des faits visés à l’article 257 du Code pénal (à savoir, notamment en tant que fonctionnaire de police, avoir, sans motif légitime, usé ou fait user de violences envers les personnes dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de ses fonctions) : les 14 non-lieux prononcés en 2010 s’inscrivent dans 5 dossiers et les 8 acquittements prononcés en 2009 et en 2010 concernent 6 dossiers. Des faits de violences illégales sont déclarés établis à charge de 5 fonctionnaires de police en 2009 (dans 5 affaires) et à charge de 4 fonctionnaires de police en 2010 (3 affaires), et ce très clairement dans 4 de ces 8 affaires, suite aux témoignages à charge d’autres policiers.

b)En matière de coups et blessures, il faut distinguer les situations « en service » et « en dehors du service ». En 2009, les 11 non-lieux sont relatifs à 4 affaires, toutes en service ; les 5 acquittements interviennent dans 3 affaires, dont 2 en service ; les faits sont déclarés établis dans 8 affaires (dont une en service) à charge de 8 membres de la police intégrée. En 2010, toujours pour les coups et blessures, les 21 non-lieux sont relatifs à 6 affaires, toutes en service ; les 5 acquittements interviennent dans 4 affaires, dont 2 en service ; enfin, les faits sont déclarés établis dans 9 affaires (dont 4 en service) à charge de 9 policiers.

c) En matière de meurtre/homicide : en 2009 et 2010, 5 policiers sont poursuivis dans 5 affaires distinctes suite aux conséquences mortelles de l’utilisation, dans le cadre de leurs fonctions, de leur arme de service : ils obtiennent tous un non-lieu.

d) Traitement inhumain/dégradant : dans une même affaire en 2010, 2 fonctionnaires de police sont acquittés pour traitement inhumain mais condamnés pour traitement dégradant envers une personne se trouvant en cellule. L’acquittement prononcé en 2009 a trait à des faits commis dans la sphère privée.

17.Enfin, il convient de rappeler l’article 257 du Code pénal qui renvoie à son article 266 qui indique que lorsqu'un officier public aura sans motif légitime usé ou fait user de violences envers les personnes, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le minimum de la peine portée contre ces faits sera doublé et augmenté de 2 ans lorsqu’il s’agit de la réclusion ou de la détention de 15 ans à 20 ans ou un terme inférieur.

Suivides plaintes lors des manifestations du 29 septembre et du 1er octobre 2010

18.Du 27 septembre au 3 octobre 2010, était organisé le « No Border Camp » sur le site de Tours et Taxis au centre de Bruxelles. Le réseau « No Border », fondé en 2000, lutte pour la liberté de circulation entre les différents pays et, plus particulièrement, contre les politiques de contrôle de l’immigration au sein de l’espace Schengen. Il milite également pour la régularisation des étrangers en situation irrégulière et la fermeture des centres de rétention administrative. La même semaine à Bruxelles, le 29 septembre 2010, a eu lieu une manifestation européenne des syndicats, réunissant plusieurs dizaine de milliers de manifestants. En marge du « No Border Camp », les activistes ont appelé, le 1er octobre 2010, en début de soirée, à un rassemblement aux abords de la gare du Midi. Lors de ces deux manifestations, les services de police ont été amenés à intervenir et à procéder à de nombreuses identifications et arrestations.

19.Le Comité P a été saisi de différentes plaintes dans le cadre de ces manifestations. Celles-ci ont donné lieu à l’ouverture d’une enquête de contrôle que le Comité P a confiée à son Service d’enquêtes. Les faits dénoncés dans les différentes plaintes étant souvent vagues, imprécis et généraux et ne permettant pas d’identifier les parties impliquées (hormis le cas des mineurs arrêtés le 1er octobre 2010), l’enquête s’est concentrée sur la gestion des deux manifestations dans leur globalité : les modalités prises par les services de police pour se préparer au mieux à la manifestation, les mesures prises par les autorités administratives, le dispositif policier mis en place ainsi que les mesures policières adoptées.

20.Cette enquête de contrôle a été clôturée début juin 2011. Les résultats ont fait l’objet d’un rapport final, accompagné de recommandations globales et spécifiques (voir annexe 1), qui a été transmis à la Ministre de l’Intérieur et aux différents services de police concernés.

21.L’Inspection générale, quant à elle, n’a pas été saisie de plaintes déposées à l’occasion des manifestations des 29 septembre et 1er octobre 2010. Par ailleurs, à notre connaissance, il n’y a pas eu non plus de plaintes introduites au niveau des autorités judiciaires belges.

Réponse au paragraphe 17 des observations finales

Droit d’accès à un avocat et à un médecin dès la privation de liberté

22.La Belgique a adopté, le 13 août 2011, la Loi modifiant le Code d'instruction criminelle et la loi du 20 juillet 1990 relative à la détention préventive afin de conférer des droits, dont celui de consulter un avocat et d’être assistée par lui, à toute personne auditionnée et à toute personne privée de liberté (voir annexe 2). La Belgique s’est mise en conformité, de la sorte, avec la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'homme (Salduz) et plusieurs recommandations des Nations Unies et du CPT (Comité européen de prévention contre la torture) par rapport à plusieurs droits des personnes privées de liberté : le droit à une consultation préalable aux interrogatoires avec un avocat, le droit d’être assisté par un avocat pendant les interrogatoires, le droit d’informer une personne de confiance de sa privation de liberté ainsi que le droit à l’assistance médicale. Ces droits avaient déjà été partiellement intégrés en droit belge pour les arrestations administratives (voir articles 33 bis à 33 septies de la Loi sur la fonction de police du 5 août 1992). Le 23 septembre 2011, le Collège des procureurs généraux a diffusé une circulaire sur l’organisation de l’assistance d’un avocat, à partir de la première audition, dans le cadre de la procédure pénale belge (COL 8/2011, voir annexe 3).

Réponse au paragraphe 21 des observations finales

Visites de contrôle des éloignements

23.Par note du Ministre de l’Intérieur en date du 10 mars 2003, l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale a été chargée de contrôler régulièrement le déroulement des rapatriements forcés. Cette mission a encore été renforcée par une autre note du 5 octobre 2009. Comme indiqué dans le cinquième rapport de la Belgique, les contrôles peuvent être des contrôles « discrets », des contrôles annoncés préventivement ou des contrôles sur des vols « spéciaux ». Les contrôles peuvent intervenir à divers moments de la procédure : lors de la prise en charge au centre pour refugiés, lorsque la personne à rapatrier se trouve dans les installations de la police fédérale à l’aéroport national, lors de son transfert vers l’avion, pendant le vol proprement dit mais également à son arrivée et sa réception dans le pays de retour. Des rapports sont rédigés pour tous les contrôles effectués et transmis aux instances concernées. Le nombre des contrôles varie, ne pouvant être systématiques.

24.Les derniers chiffres des contrôles réalisés par l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale sur les vols sont les suivants : en 2007 (8 contrôles de vols spéciaux et 28 contrôles de vols de ligne), en 2008 (5 contrôles de vols spéciaux et 13 contrôles de vols de ligne), en 2009 (5 contrôles de vols spéciaux et 12 contrôles de vols de ligne) et en 2010 (11 contrôles de vols spéciaux et un seul contrôle de vol de ligne).

25.On peut mentionner ici des extraits du rapport annuel 2010 de l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale sur le contrôle des missions de rapatriement : « En exécution de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, l’AIG a contrôlé, en 2010, le déroulement des missions de rapatriement effectuées par la police aéronautique LPA/BRUNAT. Nous avons transmis nos constatations à la Ministre de l’Intérieur comme aux autorités compétentes. Seize procédures d’embarquement sur des vols de ligne ont été contrôlées. Sept d’entre elles ont été annulées. Nos services ont également assuré le suivi de 11 vols sécurisés (special flights) sur toute la durée de la mission, c’est-à-dire depuis le briefing ou l’extraction de la personne devant être rapatriée jusqu’à la remise aux autorités du pays de destination. Nous avons également participé à un rapatriement sur un vol de ligne, et ce, sur toute la durée de la mission. Au cours des contrôles, aucune irrégularité n’a été constatée à charge des membres du personnel de LPA/BRUNAT. L’AIG a toutefois formulé un certain nombre de recommandations et de remarques, auxquelles une suite appropriée a été donnée […] ».

26.Dans le cadre de la transposition finale en droit belge de la directive européenne précitée, qui prévoit en son article 8.6 (relatif à l’éloignement) que « Les États membres prévoient un système efficace de contrôle du retour forcé », il est prévu que le Roi désigne, par un arrêté royal délibéré en Conseil des Ministres, l’instance chargée d’assurer le contrôle des retours forcés et détermine les modalités de ce contrôle. Cette instance est indépendante des autorités compétentes pour prendre les décisions en matière d’éloignement. Il importe de souligner que le projet de loi qui finalise la transposition de cette directive a été déposé, le 19 octobre 2011, à la Chambre des représentants.

27.En outre, sur le terrain, comme prescrit par la directive européenne précitée, les contrôles des aéroports et la participation aux vols communs entre États membres ont été renforcés depuis 2011. Ainsi, jusqu’au 2 novembre 2011 : 9 contrôles ont été réalisés sur des vols spéciaux (4 autres contrôles sont planifiés pour novembre), 33 contrôles réalisés jusqu’aux embarquements et 8 contrôles sur des vols de ligne jusqu’aux pays de destination. Enfin, il est intéressant de noter un projet actuel belge financé par la Commission européenne pour renforcer le système de surveillance des retours forcés. Ce dernier prévoit de renforcer les deux membres de l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale chargés de cette mission de surveillance par deux agents détachés supplémentaires (des membres du cadre opérationnel de la police intégrée), et ce jusqu’en juin 2013. Leur recrutement est en cours. Ce projet pourra, le cas échéant, être prolongé. Cette augmentation du dispositif de contrôle de deux membres du personnel à quatre membres permettra, certainement, une augmentation des contrôles et une surveillance plus efficace.

28.Par ailleurs, dans le cadre de sa mission plus générale de contrôle des services de la police (voir supra les observations relatives au paragraphe 14, l’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale peut aussi, en tant qu’organe de contrôle externe, examiner des plaintes relatives au déroulement des opérations de rapatriement. Il importe de noter que les plaintes en la matière restent, toutefois, très rares.

29.Enfin, le Comité P peut également être directement saisi par des particuliers de plaintes en matière de rapatriement. Pour la période 2007-2009, les données chiffrées sont les suivantes : 4 plaintes en 2007, 2 plaintes en 2008 et 5 plaintes en 2009. Par ailleurs, les autorités judiciaires peuvent aussi confier au Service d’enquêtes P des enquêtes en matière de rapatriement. Les données chiffrées sont les suivantes pour la période 2007-2009 : 2 plaintes en 2007, pas de plainte en 2008 et une plainte en 2009.

Indépendance des organes de contrôle

30.L’Inspection générale de la police fédérale et de la police locale est un organe indépendant par rapport aux services de police chargés d’exécuter les retours forcés (LPA-BRUNAT) et à l’autorité compétente pour prendre les décisions d’éloignement (Office des étrangers).

31.Contrairement à ce qui a été indiqué par erreur dans le cinquième rapport belge, il s’agit d’un organe de contrôle indépendant externe de la police fédérale et de la police locale. En effet, l’Inspection générale ne fait pas partie de la police. Elle est placée sous l’autorité des Ministres de l’Intérieur et de la Justice qui fixent ensemble les principes généraux de son organisation, fonctionnement et administration générale et qui décident de la politique à mener. Sa gestion quotidienne est confiée au Ministre de l’Intérieur. Lorsque la gestion de ces dossiers influence directement la Direction générale de la police judiciaire, les services judiciaires ou la gestion de l’information, il y associe le Ministre de la Justice (voir article 3 de la loi susmentionnée du 15 mai 2007). L’Inspection générale est dirigée et organisée par l’Inspecteur général et les Inspecteurs généraux adjoints (article 4, par. 2). Son personnel se compose des catégories suivantes : fonctionnaires de police issus de la police fédérale ou d’un corps de police locale et membres du cadre administratif et logistique de la police fédérale ou d’un corps de police locale (article 4, par. 3 de la même loi).

32.Pour rappel, la mission de l’Inspection générale, en tant qu'organe de contrôle indépendant des services de police relevant du pouvoir exécutif, consiste à optimiser le fonctionnement de la police fédérale et de la police locale, ainsi que de leurs composantes, dans le respect de la démocratie et de la protection des libertés et droits fondamentaux. Elle enquête sur le fonctionnement, les activités et méthodes des services de police. Elle vérifie en particulier l'application des lois, règlements, ordres, instructions et directives ainsi que des normes et standards. Elle participe à la définition, au respect et à l'actualisation de la déontologie policière. Elle examine régulièrement l'efficacité et l'efficience de la police fédérale et des corps de police locale, sans préjudice des procédures internes (article 5 de la même loi).

33.L’Inspection générale agit soit d'initiative, soit sur ordre du Ministre de la Justice ou du Ministre de l'Intérieur, soit à la demande des autorités judiciaires et administratives dans le cadre des compétences de chacun (article 6 de la même loi). Pour l'accomplissement de leurs missions, les membres de l’Inspection générale ont un droit d'inspection général et permanent. Ils peuvent librement entendre les personnes et, après avoir avisé leur autorité responsable, pénétrer sur les lieux de travail. Ils peuvent consulter sur place, prendre des copies, se faire communiquer et si nécessaire saisir tous documents, pièces ou objets utiles à leurs missions. Sauf concernant ses devoirs judiciaires, l'Inspection générale soumet les résultats de ses missions au Ministre de l'Intérieur et, le cas échéant, au Ministre de la Justice et à l'autorité qui l'a saisie. L’Inspection générale informe aussi, le cas échéant, les autorités disciplinaires compétentes (article 8 de la même loi).