Observations finales concernant le rapport valant septième et huitième rapports périodiques de la Roumanie *

1.Le Comité a examiné le rapport valant septième et huitième rapports périodiques de la Roumanie (CEDAW/C/ROU/7-8) lors de ses 1506e et 1507e séances (voir CEDAW/C/SR.1506 et 1507) le 6 juillet 2017.

A.Introduction

2.Le Comité félicite l’État partie de la soumission de son rapport valant septième et huitième rapports périodiques, établi en réponse à la liste de points et de questions soulevés avant la communication des rapports (CEDAW/C/ROU/QPR/7‑8). Il salue la présentation orale faite de la délégation et les éclaircissements supplémentaires donnés en réponse aux questions posées oralement par le Comité durant le dialogue.

3.Le Comité félicite la délégation de l’État partie, qui était conduite par le Secrétaire d’État de l’Agence nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes, Mme Aurelia Graţiela Drăghici, et composée de représentants du Ministère de l’intérieur, du Ministère du travail et de la justice sociale, du Ministère de l’économie, du commerce et des relations avec le milieu des affaires, du Ministère de la justice, du Ministère de l’éducation nationale et de la mission permanente de la Roumanie auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

4.Le Comité salue les progrès accomplis depuis l’examen en 2006 du sixième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/ROU/6) dans la mise en place de réformes législatives, en particulier :

a)Les amendements de 2013, 2015 et 2016 à la loi no 217/2003 relative à la prévention de la violence familiale et à la lutte contre ce phénomène;

b)Les amendements de 2012 et 2015 à la loi n °202/2002 sur l’égalité des chances et de traitement des femmes et des hommes;

c)L’adoption, en juillet 2009, du nouveau Code de procédure pénale, qui harmonise la législation relative à la traite des êtres humains.

5.Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique afin d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, notamment :

a)La mise en place en 2016 du Comité interministériel pour la prévention de la violence familiale et la lutte contre ce phénomène;

b)Le rétablissement en 2015 de l’Agence nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes;

c)Le lancement le 8 mai 2015 de la campagne « HeForShe »;

d)La création en 2014 du Département pour l’égalité des chances des femmes et des hommes;

e)Le lancement de la Stratégie nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes, en 2006 pour la période 2006-2009, en 2010 pour la période 2010-2012, et en 2014 pour la période 2014 - 2017, assortie du plan d’action général relatif à sa mise en œuvre;

f)L’élaboration en 2012 de la Stratégie nationale de prévention et d’élimination de la violence familiale et des plans d’action nationaux y relatifs pour la période 2013-2017;

g)L’adoption en 2011 de la Stratégie nationale de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2012-2016.

6.Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié les instruments internationaux et régionaux suivants, ou d’y avoir adhéré, au cours de la période écoulée depuis l’examen du rapport précédent :

a)La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul), en 2016;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2008.

C.Parlement

7. Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif dans la pleine application de la Convention (voir la d éclaration sur s es relations avec les parlementaires , qu’il a adoptée à sa quarante-cinquième session , en 2010). Il invite le Parlement à prendre, conformément à son mandat, les mesures nécessaires concernant la mise en œuvre des présentes observations finales d ’ ici à la présentation du prochain rapport au titre de la Convention.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Visibilité de la Convention, Protocole facultatif et recommandations généralesdu Comité

8.Le Comité note avec préoccupation qu’à ce jour, la Convention n’a pas été directement invoquée, appliquée ou citée dans les procédures judiciaires, et qu’il n’existe pas non plus de données indiquant que des femmes ont revendiqué leurs droits à la non-discrimination et à l’égalité en invoquant les dispositions de la Convention ou d’une législation nationale pertinente, ce qui trahit un manque de connaissance, de la part du corps judiciaire, des avocats et des femmes elles-mêmes, des droits des femmes, garantis par la Convention et les procédures prévues par le Protocole facultatif y relatif.

9.Le Comité réitère sa recommandation précédente (A/55/38, deuxième partie, para graphe  305) , dans laquelle il priait l ’ État partie de veiller à ce que l ’éducation et la formation juridiques de tous les juges, procureurs et avocats incorporent la Convention, le Protocole facultatif y relatif, les recommandations générales du Comité, les avis sur les communications individuelles, les enquêtes et la législation nationale pertinente, afin que ceux-ci puissent directement appliquer la Convention ou interpréter les dispositions juridiques nationales à la lumière de la Convention. Il recommande également à l ’ État partie de continuer à sensibiliser les femmes sur leurs droits au titre de la Convention et des procédures prévues par le Protocole facultatif y relatif.

Accès à la justice et recours

10.Le Comité prend note des mesures positives adoptées par l’État partie en vue de faciliter l’accès des femmes à la justice, notamment la mise en place d’un système d’aide juridictionnelle publique et le renforcement des capacités des juges, magistrats et procureurs en ce qui concerne la législation relative à la lutte contre la discrimination. Le Comité est cependant préoccupé par :

a)Le manque de confiance des femmes dans le système judiciaire, leur connaissance limitée des recours disponibles pour obtenir réparation et la stigmatisation des victimes, qui entraîne un sous-signalement des cas de violence sexiste contre les femmes et les filles, notamment des violences psychologiques et économiques, du harcèlement sexuel et du viol conjugal;

b)La publication en ligne des noms des victimes et des témoins dans le cadre des procédures visant la délivrance d’ordonnances de protection, à moins que le demandeur ne requière expressément l’anonymat, et le défaut de protection physique des victimes dans les salles d’audience, qui empêche les femmes de réclamer justice lorsqu’elles sont victimes de violence sexiste et de discrimination;

c)Le caractère restreint des critères d’éligibilité, qui empêche les femmes aux moyens limités d’accéder au système d’aide judiciaire nouvellement mis en place, ainsi que les ressources financières limitées allouées à ce système;

d)L’insuffisance de la formation des professionnels de la police et de la justice, qui les empêche de traiter les cas de violence sexiste en tenant compte des disparités entre les sexes.

11. Conformément à sa recommandation générale n o 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’enrayer la stigmatisation des victimes et de sensibiliser sur la nature pénale de la violence sexiste contre les femmes, de mieux informer les femmes et les filles de leurs droits à demander réparation, de veiller à ce que tous les cas signalés de violence sexiste à l’égard des femmes et des filles fassent l’objet d’enquêtes en bonne et due forme, que les auteurs soient poursuivis et que les peines infligées soient proportionnelles à la gravité du crime ;

b) D ’ encourager les femmes à signaler des cas de violence sexiste et de discrimination aux autorités compétentes en cessant de publier les noms des témoins et des victimes dans toutes les affaires, en employant des moyens efficaces pour protéger les témoins pendant et après les procédures judiciaires, et en veillant à ce que les femmes et les filles aient accès aux programmes d ’ aide et de protection aux victimes et témoins ;

c) D’allouer les ressources adéquates et de veiller à fournir une aide juridique gratuite à toutes les femmes disposant de moyens limités, notamment aux femmes rurales, aux femmes handicapées et aux femmes roms afin de leur permettre d’intenter des actions en justice en cas de violation de leurs droits fondamentaux ;

d) D’assurer un renforcement obligatoire des capacités à tous les membres de la police et du système de justice pénale en ce qui concerne les méthodes d ’ enquête tenant compte des disparités entre les sexes .

Institutions nationales de défen se des droits de l’homme

12.Le Comité note que l’Institut roumain pour les droits de l’homme se prépare à présenter une nouvelle évaluation conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Toutefois, il constate avec préoccupation que, nonobstant l’engagement pris pendant son examen périodique universel, l’État partie n’a pas encore amendé la loi no 9/1999 afin d’évaluer convenablement le statut et l’efficacité de l’Institut.

13. Le Comité encourage l ’ État partie à veiller à ce que l’ Institut roumain pour les droits de l ’ homme respecte pleinement les Principes de Paris, particulièrement en ce qui concerne son mandat de protection des droits des femmes et de promotion de l ’ égalité des sexes, le statut de ses membres et la durée de leur mandat au sein du Conseil général, ainsi que les immunités accordées à ses membres pour des actes posés pendant l ’ exercice en toute bonne foi de leurs fonctions au sein de l ’ Institut. Il invite l ’ État partie à rechercher le soutien et l ’ avis du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme à cet égard.

Mécanisme national de promotion de la femme

14.Le Comité prend note du rétablissement de l’Agence nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes et de ses activités actuelles relatives à l’élaboration d’une nouvelle Stratégie pour l’égalité des sexes et contre la violence familiale, en collaboration avec la société civile. Il est toutefois préoccupé par :

a)Le manque de ressources humaines, financières et techniques allouées à l’Agence nationale en vue de l’application de la loi no 202/2002, l’absence d’un mécanisme de supervision de cette application et une collaboration insuffisante avec la société civile à cet égard;

b)L’application médiocre de la loi no 202/2002 et des stratégies relatives à l’égalité des chances et à la lutte contre les discriminations, en raison de ressources limitées;

c)Le défaut de prise en compte systématique du souci de l’égalité des sexes dans les stratégies du gouvernement, telles que la Stratégie nationale pour « une société sans obstacle pour les personnes handicapées » 2016-2020, et l’absence de mesures efficaces visant à pratiquer une allocation de ressources budgétaires aux activités favorisant l’égalité des sexes;

d)L’accent exclusif mis sur l’augmentation de la représentation des femmes dans les forces armées à l’étranger afin de donner suite à la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, couplée à l’absence d’un plan national d’action attendu de longue date pour sa mise en œuvre.

15. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer davantage l’Agence nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes en lui allouant les ressources humaines, techniques et financières appropriées, en introduisant au niveau central et local des mécanismes de surveillance et de responsabilisation efficaces relatifs à la loi n o  202/2002, en renforçant la collaboration avec la société civile à cet égard, et en imposant des sanctions en cas de non-respect de cette loi ;

b) De tenir dument compte des présentes recommandations dans l’élaboration de la nouvelle Stratégie nationale pour l’égalité des sexes et contre la violence familiale et d’en assurer l’application effective, ainsi que celle de la loi n o  202/2002, notamment à travers une allocation adéquate des ressources ;

c) D’inclure dans la nouvelle Stratégie pour l’égalité des sexes et contre la violence familiale des mesures visant à appliquer le principe de transversalité, tel que défini par la loi n o  202/2002, à travers la prise en compte systématique du souci de l’égalité des sexes et l’adoption de la budgétisation sensible à la problématique hommes-femmes dans toutes les stratégies et institutions gouvernementales, l’évaluation de l’incidence pour les hommes et les femmes de la législation existante afin de déterminer les mesures à prendre sur le plan législatif et d’exécuter les plans visant l’institution de responsables de la coordination des questions d’égalité des sexes dans tous les ministères et institutions concernés au niveau national, régional et local ;

d) D’adopter, en collaboration avec les organisations de femmes, un plan d’action national visant à appliquer pleinement les dispositions de la résolution1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

16.Le Comité salue les renseignements fournis pendant le dialogue sur la préparation des modifications à apporter à la politique audiovisuelle nationale et des initiatives en cours visant à introduire la question de l’égalité des sexes dans les manuels scolaires. Il est toutefois préoccupé par :

a)Les images stéréotypées et parfois dégradantes des femmes, en particulier des femmes roms, véhiculées par les médias, et l’absence de modules de formation à l’égalité des sexes dans les programmes scolaires, ainsi que le manque d’une formation appropriée des enseignants sur ces questions;

b)La résurgence récente des propos véhiculant des stéréotypes tenus par des personnalités politiques et des acteurs religieux et non étatiques tels que l’Église orthodoxe roumaine sur les droits des femmes en matière de sexualité et de procréation, qui sont amplifiés par la diffusion dans les médias d’images stéréotypées sur les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la société et dans la famille;

c)L’absence de mesures afin de prévenir les pratiques préjudiciables relatives aux mariages d’enfants conclus illégalement et en vertu des exceptions légales permettant de contracter des mariages avant l’âge de 18 ans, ainsi que l’absence de mesures de lutte contre les effets de ces pratiques sur la scolarisation des filles roms.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’accélérer la révision des manuels scolaires pour y éliminer les stéréotypes discriminatoires liés au sexe et à l’ethnie, notamment en instituant des modules obligatoires sur l’éducation à l’égalité des sexes dans les manuels scolaires, et de dispenser une formation sur ces mêmes questions aux enseignants ;

b) D’inclure dans la nouvelle Stratégie pour l’égalité des sexes et contre la violence familiale des mesures durables et pensées en amont à l’intention des femmes et des hommes de tous horizons sociaux, y compris des acteurs religieux et non étatiques et des membres des partis politiques, afin d’éliminer les stéréotypes discriminatoires relatifs aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, d’encourager les médias à promouvoir l’égalité des femmes et des hommes dans la vie publique et privée et d’interdire les représentations dégradantes des femmes dans les médias en modifiant la politique audiovisuelle nationale ;

c) D’étudier l’envergure et les conséquences des mariages forcés, précoces et d’enfants et de prendre des mesures d’urgence visant à prévenir ces types de mariages en sensibilisant sur leurs répercussions extrêmement négatives sur les filles, conformément à la recommandation générale/observation générale conjointe n o  31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n o  18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjudiciables (2014), de modifier la législation dans le but d’en supprimer les exceptions qui permettent les mariages avant l’âge de 18 ans et de poursuivre et réprimer en conséquence leurs auteurs.

Violence sexiste contre les femmes

18.Le Comité se félicite de la présentation du projet de loi au Parlement, qui vise à harmoniser la législation nationale sur la violence sexiste avec la Convention d’Istanbul. Il est toutefois préoccupé par :

a)L’absence de données sur le nombre de plaintes et de décisions de justice relatives à la discrimination fondée sur le sexe dans le cadre de l’application de la loi contre la discrimination;

b)La portée limitée de la législation existante sur la violence sexiste contre les femmes et sur les ordonnances de protection, ainsi que de la stratégie de lutte contre la violence sexiste et du projet de stratégie concernant l’égalité des sexes et la violence familiale, qui excluent les actes de violence sexiste commis en dehors du foyer et les actes de violence commis dans les unions de fait du champ d’application du cadre législatif, et le fait que la législation ne mentionne pas expressément le viol et le viol conjugal et ne traite pas de la violence visant les femmes roms;

c)Le fait que la police n’intervienne dans les affaires de violence sexiste contre les femmes que sur mandats judiciaires, et l’insuffisance de la collaboration entre les tribunaux, la police et les travailleurs sociaux en cas de violence familiale;

d)Le taux élevé de retraits de plaintes par les victimes de violence sexiste et l’absence de poursuites d’office pour les infractions de ce type, ainsi que le recours à la médiation en cas de violence familiale;

e)L’obligation de présenter des preuves médico-légales concernant les violences subies pour demander une ordonnance de protection, le faible taux de délivrance d’ordonnances de protection et l’application médiocre des ordonnances de protection, l’efficacité limitée des distances de sécurité imposées et les faibles taux d’enquête pour violation de propriété et harcèlement;

f)L’insuffisance de la formation du personnel judiciaire, de la police et des travailleurs sociaux et sanitaires concernant la nature et l’esprit des dispositions du droit pénal applicables aux affaires de violence sexiste contre les femmes, et la procédure de délivrance des ordonnances de protection, ainsi que la prise en charge des victimes dans le respect des spécificités propres à chaque sexe;

g)L’obligation de présenter des documents d’identité pour avoir accès aux refuges et aux services de santé, l’accès restreint à des conseils juridiques et psychologiques, le nombre limité de refuges et de centres de crise pour les victimes dans l’État partie et le manque d’information du public concernant les mécanismes de recours.

19.Rappelant ses précédentes observations finales (CEDAW/C/ROM/CO/6, paragagraphe 21 ) et ses recommandations générales n o 19 (1992) sur la violence à l ’ égard des femmes et n o 35 (2017) sur la violence sexiste à l ’ égard des femmes, laquelle met à jour la recommandation générale n o 19, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De recueillir systématiquement des données ventilées sur les affaires de violence sexuelle et sexiste et de discrimination contre les femmes portées devant les tribunaux et sur le nombre d’ordonnances de protection, et de faire figurer ces données dans son prochain rapport périodique ;

b) D’adopter un ensemble de textes législatifs visant à lutter contre toutes les formes de violence sexiste, y compris celles qui se produisent dans des unions de fait et des mariages - en particulier le viol conjugal - et dans la vie publique et privée, d’harmoniser la législation nationale relative à la violence contre les femmes avec la Convention d’Istanbul, et de remédier en particulier à la violence contre les femmes roms ;

c) De permettre à la police de rendre des ordonnances de protection, en plus de celles délivrées par les tribunaux, et de mettre rapidement en place une base juridique pour leur délivrance, et de les appliquer aussi bien aux couples mariés qu’aux unions de fait ;

d) D’accélérer la mise en œuvre par la police d’initiatives permettant d’empêcher le retrait des plaintes par les victimes, d’introduire des poursuites d’office pour les infractions de violence sexiste à l’égard des femmes, et de veiller à ce que les affaires de violence sexiste contre les femmes, y compris de violence familiale, ne soient en aucun cas traitées dans le cadre de procédures de médiation ;

e) D’alléger la charge de la preuve pour les victimes qui demandent des ordonnances de protection, de garantir la mise en œuvre de ces ordonnances par la police et les tribunaux, de fournir un accès à l’aide juridictionnelle gratuite dans les procédures liées aux ordonnances de protection, de renforcer la collaboration entre la police et les travailleurs sociaux dans les enquêtes sur la violence sexiste contre les femmes et les filles, et de prendre des mesures pour prévenir efficacement la violation de propriété et le harcèlement ;

f) De mettre en place une formation obligatoire à l’intention des juges, des procureurs, des avocats, des policiers, des travailleurs sociaux et des professionnels de la santé concernant la stricte application de la législation érigeant en infraction pénale la violence contre les femmes et les protocoles de prise en charge des victimes en tenant compte des disparités entre les sexes, et de faire connaître les procédures normalisées relatives à la violence contre les femmes ;

g) De veiller à ce que les femmes et les filles victimes de la violence sexiste aient véritablement libre accès à un soutien médical et psychologique, à des foyers sûrs à une distance raisonnable, ainsi qu’à des services de conseil et de réadaptation dans toutes les régions de l ’ État partie.

Traite, exploitation sexuelle et prostitution

20.Le Comité constate que le nouveau Code pénal fait de l’implication d’un agent de l’État dans des affaires de traite une circonstance aggravante. Il est toutefois préoccupé par :

a)Le nombre élevé de Roumaines qui sont victimes de la traite à l’étranger, et la traite des femmes handicapées;

b)L’absence d’enquêtes sur des fonctionnaires soupçonnés d’être impliqués dans des affaires de traite et le sous-signalement de la traite en raison de la crainte de répercussions par les victimes et les témoins;

c)L’insuffisance de la formation des policiers et des inspecteurs du travail intervenant dans des entreprises privées et le secteur de l’industrie du sexe, concernant la détection et l’intervention dans les affaires de traite, et la manière de s’occuper des victimes de la traite en tenant compte des disparités entre les sexes, ainsi que l’absence d’inspections inopinées dans les agences de recrutement et sur le lieu de travail, notamment dans les entreprises textiles ou le secteur de la domesticité;

d)Les ressources limitées et le fonctionnement incohérent du mécanisme national de prise en charge, l’externalisation de l’assistance destinée aux victimes de la traite à des organisations non gouvernementales de femmes et l’appui limité accordé à ces organisations, les restrictions dans l’aide accordée aux victimes qui refusent de coopérer avec les procureurs, l’insuffisance de l’assistance psychologique disponible, la faible couverture géographique des services de réadaptation et des foyers d’accueil, et les obstacles administratifs à l’accès des victimes à des services de santé;

e)L’absence de sensibilisation des juges et des policiers au caractère criminel de l’exploitation des femmes par la prostitution.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’adopter une nouvelle stratégie de lutte contre la traite des êtres humains qui accorde la priorité aux mesures visant à améliorer la situation sociale et économique des femmes afin de les rendre moins vulnérables face à la traite, y compris en identifiant les victimes potentielles et en facilitant la réinsertion des victimes, et de mettre l’accent sur les groupes vulnérables, tels que les femmes rurales et les femmes roms, les travailleuses migrantes sans papiers, et les filles exploitées par des réseaux de mendicité, y compris les filles victimes d’exploitation sexuelle ;

b) D’encourager le signalement des crimes en garantissant l’anonymat et la protection des victimes de la traite et des témoins qui déposent dans des procès, d’enquêter sur tous les renseignements faisant état de la participation présumée d’agents publics, et de veiller à ce que les responsables soient dûment sanctionnés ;

c) De dispenser une formation sur la traite, l’identification des victimes et les moyens de s’occuper des victimes en tenant compte des disparités entre les sexes à l’intention des juges, des procureurs, des policiers, des gardes frontière et des inspecteurs du travail, et d’organiser des inspections en amont aux fins de l’identification des victimes de la traite sur le lieu de travail et dans les agences de recrutement ;

d) D’allouer suffisamment de fonds pour le bon fonctionnement du mécanisme national de prise en charge, et de garantir l’accès adéquat des victimes à des foyers, à des permis de séjour temporaires et à une assistance juridique, médicale et psychosociale, notamment en fournissant un appui financier et d’autres formes d’appui aux organisations de la société civile qui travaillent avec des femmes victimes de la traite, indépendamment du fait de savoir si la victime est désireuse ou en mesure de coopérer avec le parquet ;

e) De sensibiliser les juges et les policiers au caractère criminel de l’exploitation des femmes par la prostitution.

22.Le Comité note avec satisfaction que le nouveau Code pénal dépénalise la prostitution. Il est toutefois préoccupé par :

a)L’absence de données sur les femmes dans la prostitution;

b)Les incohérences entre les dispositions du droit civil et celles du droit pénal, qui font que ce sont les prostituées qui encourent des amendes;

c)Le manque de connaissances des membres du corps judiciaire, des policiers, des travailleurs sociaux et des administrations locales aux nouvelles dispositions du Code pénal et aux normes relatives à la prostitution;

d)Le refus des administrations locales de délivrer des documents d’identité aux prostituées qui ont des dettes envers l’État suite à des amendes reçues, situation qui les empêche d’accéder à d’autres formes d’emploi;

e)L’absence de politiques et de programmes portant sur la prévention de l’exploitation des femmes par la prostitution, la protection, l’assistance et l’appui juridique aux femmes qui sont victimes de cette exploitation, et d’un soutien spécifique aux femmes qui souhaitent sortir de la prostitution.

23. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De rassembler et d’analyser des données sur l’exploitation des femmes par la prostitution ;

b) D’harmoniser les dispositions du Code Civil et du Code pénal relatives à la prostitution, afin de légaliser la prostitution et de suspendre l’application de peines d’amendes administratives aux prostituées ;

c) De renforcer les capacités des responsables de l’application des lois, notamment des juges, des procureurs et des policiers, des travailleurs sociaux et des administrations locales, concernant les nouvelles dispositions du Code pénal et d’autres normes relatives aux prostituées ;

d) D’émettre des directives pour garantir l’accès des prostituées aux documents d’identité et sanctionner le non-respect de ces directives ;

e) De s’attaquer aux causes profondes de l’exploitation des femmes et des filles prostituées, notamment la pauvreté, et de proposer aux femmes d’autres possibilités de gagner leur vie et des programmes d’éducation en vu d’améliorer leur niveau d’éducation, ainsi que des programmes de soutien à celles qui veulent sortir de la prostitution.

Participation à la vie politique et publique

24.Le Comité se félicite de la représentation accrue des femmes au Parlement, et des initiatives législatives tendant à introduire des quotas réglementaires. Il est néanmoins préoccupé par :

a)La persistance de la faible représentation des femmes au Parlement, au niveau national et dans les collectivités régionales et locales, en particulier le petit nombre de femmes exerçant des fonctions de maire;

b)L’absence de mesures efficaces visant à mettre en œuvre le chapitre 4 de la loi no 202/2002 sur l’égalité des chances et de traitement des femmes et des hommes, pour garantir une participation équilibrée des femmes et des hommes dans les postes de responsabilité et de décision dans la fonction publique;

c)Le fait que l’initiative dont le Parlement est actuellement saisi ne garantit pas que les femmes ne seront pas systématiquement placées en fin de liste;

d)L’absence de suivi de l’application des dispositions demandant que les deux sexes soient représentés dans la vie politique et publique, par exemple sur les listes électorales des partis politiques et dans les commissions parlementaires.

25. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’étudier les causes profondes qui empêchent les femmes de participer à la vie publique et politique et de mettre au point des stratégies de nature à surmonter ces obstacles, en prêtant une attention particulière aux femmes issues des minorités ethniques ;

b) D’appliquer les dispositions du chapitre 4 de la loi n o  202/2002 et d’accélérer l’augmentation du nombre de femmes aux postes de haut niveau dans la fonction publique à l’échelon national et local, y compris en assurant aux femmes une formation aux fonctions de direction et en adoptant des mesures, telles que des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale du Comité n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales ;

c) D’adopter et de mettre en œuvre des initiatives législatives tendant à introduire des quotas réglementaires au Parlement, conformément à la recommandation générale du Comité n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, par exemple en plaçant alternativement les candidats, femmes et hommes, sur les listes électorales (système dit de « glissière » ou de « fermeture éclair ») à des fins de parité des sexes ;

d) D’adopter des mesures incitatives et des sanctions pour garantir le respect des dispositions légales en vigueur afin d’accélérer la participation des femmes à la vie politique et publique, et de renforcer le rôle de contrôle de l’Agence nationale pour l ’ égalité des chances des femmes et des hommes en la matière.

Éducation

26.Le Comité se félicite de l’adoption d’une stratégie nationale pour la prévention de l’abandon scolaire précoce et des renseignements fournis sur la révision en cours des manuels scolaires. Il est toutefois préoccupé par :

a)Le taux élevé d’abandon scolaire et le faible niveau d’acquisition des connaissances dans les zones rurales, ainsi que le faible taux de scolarisation, le taux élevé d’abandon scolaire et le faible taux de réussite dans les communautés roms et les communautés économiquement défavorisées, qui aggravent le risque d’exclusion et de pauvreté des femmes de ces communautés;

b)L’absence de prise de conscience de l’égalité entre les sexes parmi les enseignants, qui transmettent souvent une compréhension stéréotypée des rôles joués par les hommes et les femmes, comme le reflètent les manuels scolaires, et le fait que ces ouvrages ne donnent pas d’informations sur le rôle historique des femmes, y compris des femmes roms, et leur contribution aux sciences et à la culture roumaines;

c)La persistance de la ségrégation selon les sexes dans l’éducation, le faible nombre d’étudiantes dans les filières de formation professionnelle et les disciplines scientifiques et technologiques et le fait que la participation accrue aux études universitaires ne se traduit pas par une participation plus grande au marché du travail.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’améliorer l’infrastructure scolaire dans les zones rurales, y compris dans les zones où vivent des communautés roms et des communautés économiquement défavorisées, afin de réduire et d’éliminer les disparités dans l’accès à l’enseignement obligatoire et l’achèvement de la scolarité obligatoire, d’en finir avec la ségrégation des garçons et des filles en classe et d’accroître les possibilités d’enseignement inclusif, et de renforcer les programmes de formation continue, comme le programme de la « Deuxième chance » ;

b) D’améliorer la formation des enseignants aux droits de la femme et à l’égalité des sexes et d’achever la révision des manuels scolaires dans le but de tenir dûment compte du rôle historique des femmes, dont des femmes roms, et de leur contribution aux sciences et à la culture roumaines ;

c) D’accorder la priorité à l’élimination des stéréotypes traditionnels et des obstacles structurels susceptibles de dissuader les filles de s ’ engager dans des filières d ’ études traditionnellement dominées par les garçons, comme les sciences et la technologie, de redoubler d ’ efforts en vue de mettre à la disposition des filles un service d ’ orientation professionnelle sur les parcours professionnels non traditionnels et de les encourager à participer à une formation professionnelle non stéréotypée.

Emploi

28.Le Comité accueille avec satisfaction le fait que la Stratégie nationale de l’emploi 2014–2020 cherche à concilier travail et vie de famille et à éliminer les stéréotypes sexistes discriminatoires. Il est toutefois préoccupé par :

a)Le fort taux de chômage féminin, en particulier dans les zones rurales et chez les femmes roms, la répartition inégale des tâches familiales entre femmes et hommes, la fermeture d’écoles maternelles, en particulier dans les zones rurales, et le fardeau disproportionné que représentent pour les femmes les soins à la personne non rémunérés, qui restreignent encore plus leur accès au secteur formel de l’emploi et entraînent des pensions de retraite inférieures à celles des hommes ou leur exclusion du régime des pensions;

b)La persistance de l’écart salarial entre hommes et femmes malgré l’existence de la législation sur l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale;

c)La faible participation des femmes au secteur privé, en particulier aux postes de direction et dans les conseils d’administration des entreprises privées;

d)Le fait que le droit aux allocations pour l’éducation des enfants soit réservé aux parents qui travaillent dans le secteur formel, et l’adoption de critères de sélection pour le versement de ces allocations et d’allocations de soutien de famille, qui ont des répercussions disproportionnées sur les femmes et les ménages dirigés par une femme;

e)L’insuffisance des enquêtes et l’absence de poursuites dans les affaires de harcèlement sexuel et de discrimination fondée sur le sexe sur le lieu de travail;

f)L’absence de mesures correctives pour renforcer l’accès des femmes au prêt et au crédit.

29.Le Comité réitère sa recommandation précédente (CEDAW/C/ROM/CO/6, par agraphe  29), tendant à ce que l ’ État partie :

a) Crée davantage de débouchés pour les femmes afin qu’elles puissent avoir accès au secteur formel de l’économie, en particulier dans les zones rurales, et garantisse leur participation au régime des pensions, accélère la mise en œuvre des plans tendant à promouvoir un partage égal des responsabilités domestiques et familiales entre les hommes et les femmes, et accroisse le nombre de crèches de qualité et abordables sur l’ensemble de son territoire ;

b) Renforce la capacité de l’Agence nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes à contrôler et assurer l’application des dispositions relatives à l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale (article 7 de la loi n°202/2002) ;

c) Applique les plans de lutte contre la ségrégation professionnelle, moyennant notamment l’adoption de classifications non sexistes des emplois et des méthodes d’évaluation et des enquêtes régulières sur les salaires, et améliore la participation des femmes aux prises de décisions dans le domaine économique, en particulier dans la direction et les conseils de surveillance des sociétés privées, y compris en adoptant des quotas pour les conseils des grandes sociétés cotées à la Bourse de Roumanie ;

d) Fasse d’urgence le nécessaire pour offrir aux mères célibataires des allocations pour enfants à charge et de soutien de famille suffisantes et en temps opportun et veille à ce que les femmes qui exercent des activités non rémunérées ou travaillent dans le secteur informel en zone rurale comme en zone urbaine aient accès aux crèches et aux allocations de soutien de famille ;

e) Mette au point un système sûr d’enregistrement des plaintes pour harcèlement sexuel et discrimination fondée sur le sexe sur le lieu de travail, qui respecte leur caractère confidentiel ; et fasse le nécessaire pour que les victimes aient un accès effectif aux moyens de recours, et fournisse dans son prochain rapport périodique des données sur le nombre de cas signalés de harcèlement sexuel, d’enquêtes ouvertes et de poursuites engagées et les peines imposées à leurs auteurs ;

f) Adopte des mesures correctives ciblées pour renforcer l’accès des femmes au prêt et au crédit.

Travailleuses migrantes

30.Le Comité s’inquiète d’informations faisant état de mauvais traitements, de formes contemporaines d’esclavage et d’exploitation sexuelle de Roumaines qui sont des travailleuses saisonnières employées dans l’agriculture en Italie, ainsi que de l’exploitation d’employées chinoises dans l’industrie textile de l’État partie (voir A/HRC/18/30/Add.1). Il est aussi préoccupé par des renseignements selon lesquels des employées de maison philippines sont victimes, dans l’État partie, d’exploitation de la main d’œuvre et de violences physiques et craignent des représailles de la part de leurs employeurs si elles déposent plainte. Le Comité s’inquiète aussi de ce que l’État partie n’a pas encore ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention (no 189) de l’Organisation internationale du Travail sur les travailleuses et travailleurs domestiques, de 2011.

31. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre au point une politique de migration, dans des conditions de sécurité, du personnel de service, pour protéger les droits des travailleuses migrantes, conformément à la recommandation générale n o 26 (2008) du Comité sur les travailleuses migrantes, et de renforcer la capacité et le mandat des inspecteurs du travail pour leur permettre de procéder à des inspections sur les lieux de travail informels, auprès des ménages par exemple, lorsqu ’ ils reçoivent des allégations dignes de foi de violations graves des normes du travail. Il encourage également l ’ État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention (n o 189) de l ’ O rganisation internationale du T ravail sur les travailleuses et travailleurs domestiques, de 2011.

Santé

32.Le Comité se félicite de l’amélioration des procédures et des manuels de soins gynécologiques et obstétriques et de la formation des professionnels aux méthodes de planification familiale, ainsi que de l’adoption d’une stratégie nationale de santé pour la période 2014-2020. Il est toutefois préoccupé par :

a)L’accès limité aux soins de santé des femmes roms, des femmes handicapées, des migrantes, des femmes qui vivent avec le VIH/sida, des femmes âgées et des femmes qui vivent dans la rue, faute de matériel médical et à cause du taux élevé d’exode du personnel médical, qui touche plus précisément les zones rurales, le développement insuffisant des services de proximité et la fermeture d’hôpitaux en zone rurale, ainsi que l’augmentation du coût de la grossesse et le faible taux d’affiliation au régime national d’assurance maladie. Le Comité s’inquiète de ce que cette situation entraîne un nombre insuffisant de visites de contrôle médical, des taux élevés de mortalité infantile et maternelle et un taux élevé de cancers du sein;

b)Le taux élevé de grossesses chez les adolescentes, l’absence dans les programmes scolaires d’un enseignement obligatoire, adapté à l’âge, de la santé et des droits en matière de sexualité et de procréation, et le manque de formation des enseignants dans ce domaine;

c)Le refus de professionnels de la santé et d’hôpitaux de pratiquer des interruptions médicales de grossesse, ce qui incite des femmes à chercher à avorter clandestinement dans de mauvaises conditions, le recours à l’avortement comme moyen de contraception et l’interruption du financement de la fourniture gratuite de moyens de contraception en 2013, et le manque de sensibilisation des adultes aux moyens modernes de contraception.

33. Conformément à sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’assurer l’accès à des soins de santé abordables et de qualité élevée, la planification familiale et des services de santé sexuelle et de la procréation, en particulier dans les zones rurales et à l’intention des femmes enceintes, des femmes âgées, des femmes handicapées, des migrantes et des femmes roms, y compris en réformant le système de santé, en améliorant l’accès à l’assurance maladie, en envisageant de recourir aux conseils techniques du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en vue d’appliquer une approche fondée sur les droits de l’homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire la mortalité et la morbidité des enfants de moins de 5 ans ( A/HRC/27/31 ).

b) De prendre les mesures appropriées visant à réaliser l’Enquête nationale sur la santé de la procréation, mettre en œuvre la Stratégie nationale de santé en matière de procréation et de sexualité, et le Programme national de planification familiale, et de prévoir dans les programmes scolaires un enseignement obligatoire, adapté à l’âge des élèves, sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, y compris un enseignement sur les formes modernes de contraception et la prévention des infections sexuellement transmissibles, sur les risques que présente l’avortement non médicalisé et sur le caractère criminel des violences sexuelles et sexistes ;

c) De garantir l’accès suffisant et sans entrave à l’avortement légal et aux services d’accompagnement postavortement à toutes les femmes de l’État partie, y compris en assurant l ’ interdiction par la loi de l ’ objection de conscience aux établissements de santé, en définissant les motifs autorisés que peuvent invoquer les professionnels de santé afin de soulever ce type d ’ objection, et en garantissant le renvoi obligatoire vers d ’ autres professionnels et établissements en cas d ’ objection de conscience de professionnels de santé, de sensibiliser aux moyens de contraception et aux droits à la santé, de la procréation notamment, et de garantir à toutes les femmes et les filles, y compris à celles issues de groupes défavorisés, la disponibilité de formes modernes de contraception et leur accessibilité.

Femmes rurales

34.Le Comité demeure préoccupé par :

a)Les disparités considérables dans l’accès des femmes urbaines et rurales à une eau potable sûre, à l’assainissement et à des services de base tels que l’éducation, l’emploi, les soins de santé et les transports;

b)La persistance des attitudes patriarcales et des stéréotypes discriminatoires relatifs aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société en milieu rural, qui entraîne une augmentation de la violence sexiste contre les femmes rurales et restreint la participation de celles-ci à la prise de décisions relatives au développement rural;

c)L’absence de mesures spécifiques pour résoudre les problèmes rencontrés par les femmes rurales de l’État partie dans le cadre du Programme national pour le développement local.

35.Le Comité rappelle le paragraphe 31 de ses observations finales précédentes (CEDAW/C/ROM/CO/6) et, conformément à sa recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales, recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer les mesures visant à s’assurer que les femmes rurales aient un accès adéquat à l’eau potable et à l’assainissement, ainsi qu’aux services sociaux, de santé, de transport et à d’autres services de base et développer des activités génératrices de revenus particulièrement destinées aux femmes rurales ;

b) D’élaborer des programmes spécifiques de sensibilisation à l’intention des femmes, hommes, filles et garçons des zones rurales, axés sur l’importance de la participation égale des femmes et des filles à la vie publique et politique, dans le but de lutter contre les stéréotypes discriminatoires à l’égard des femmes et d’éliminer la violence contre les femmes rurales ;

c) De prendre en compte les recommandations susmentionnées dans la mise en œuvre du Programme national pour le développement local.

Femmes confrontées à des formes multiples et croisées de discrimination

36.Le Comité note les renseignements reçus sur l’élaboration d’une stratégie de prévention et de lutte contre la discrimination, sur la révision de la définition des discriminations multiples dans la législation de l’État partie, et sur l’introduction de l’égalité des sexes dans les principes de la stratégie pour l’intégration des citoyens roumains appartenant à la minorité rom pour la période 2012-2020. Il est néanmoins préoccupé par :

a)Le fait que les femmes roms, migrantes et rurales, les femmes handicapées, les femmes âgées et les femmes vivant avec le VIH/sida soient affectées de manière disproportionnée par la pauvreté et disposent d’un accès limité aux services de santé, à l’éducation et à l’emploi;

b)Le fait que la législation existante ne prévoit pas de rendre opérationnelle et de faire appliquer l’interdiction des formes croisées de discrimination;

c)Le manque de ressources humaines et financières allouées au Conseil national de lutte contre la discrimination lui permettant de garantir la prise en compte de mesures de lutte contre les formes croisées de discrimination dans toutes les stratégies et institutions gouvernementales;

d)Les initiatives visant à abolir les lois sur la non-discrimination, le discours public haineux tenu par les hommes politiques contre les femmes roms, la maltraitance des femmes roms par une partie de la police, la discrimination dont sont victimes les femmes roms de la part des travailleurs sociaux, et la ségrégation des femmes roms dans les maternités;

e)Le faible taux d’enregistrement des naissances des bébés et enfants roms, qui les empêche de bénéficier des services de base, et l’insuffisance des financements pour la stratégie pour l’intégration des citoyens roumains appartenant à la minorité rom pour la période 2012-2020;

f)Le fait que la loi no 448/2006 n’assure pas la promotion des droits des femmes et des filles handicapées, ainsi que les informations faisant état de leur internement forcé et les mauvais traitements entraînant leur décès, les discriminations contre les femmes handicapées et leurs difficultés à accéder aux services de santé en raison de l’insuffisance du matériel médical qui permettrait d’assurer leurs soins.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures ciblées, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et à la recommandation générale du Comité n o  25 (2004) en vue de garantir l’accès à l’éducation, aux services sociaux, aux soins de santé et à l’assurance maladie des femmes roms, des migrantes et des femmes vivant avec le VIH/sida, afin d’accélérer la réalisation d’une égalité réelle de ces groupes, qui continuent à subir des formes de discrimination croisée dans l’État partie ;

b) D’introduire l’interdiction des formes croisées de discrimination dans toutes les stratégies gouvernementales, y compris dans la Stratégie nationale pour l’égalité des chances des femmes et des hommes pour la période 2014-2017, et la Stratégie nationale « Une société sans obstacle pour les personnes handicapées » 2016-2020 ;

c) De modifier la loi pour définir le discours haineux comme un crime distinct, d’être attentif à ces actes et de les sanctionner, au même titre que la ségrégation des femmes roms dans les hôpitaux et les cliniques, de renforcer la maîtrise de la nouvelle législation par les professionnels concernés, notamment à travers une formation ciblée des hommes politiques, professionnels de santé, travailleurs sociaux et policiers, et de travailler avec la société civile, les médias et d’autres parties prenantes pour promouvoir une image positive des femmes appartenant aux minorités ethniques, des femmes réfugiées et des migrantes.

d) D’élaborer des mesures visant à recenser les enfants non enregistrés et de veiller à ce que tous les enfants nés sur le territoire de l’État partie, en particulier les enfants roms, soient enregistrés à la naissance pour garantir leur accès à l’éducation, aux services sociaux, aux soins de santé et à la citoyenneté, et d’allouer les financements requis pour la mise en œuvre de la stratégie pour l’intégration des citoyens roumains appartenant à la minorité rom pour la période 2012-2020, et d’accélérer l’adoption de plans d’action assortis d’échéances claires.

e) D’examiner la loi n o  448/2006 à la lumière de la Convention sur les droits des personnes handicapées afin de l ’ axer sur l ’ autonomie et l ’ intégration des femmes et des filles handicapées, de réformer le système de soins de santé et de protection sociale pour prévenir leur internement, de renforcer les capacités du personnel de santé pour éliminer les discriminations contre les femmes handicapées et de faciliter le signalement de cas de violences et de mauvais traitements .

Mariage et relations familiales

38.Le Comité est préoccupé par :

a)Les renseignements faisant état de mariages non enregistrés et le fait que ces unions ne fournissent pas une protection juridique aux femmes, pas plus que leur dissolution ne garantit des droits aux femmes, particulièrement en l’absence d’une reconnaissance légale des unions de fait;

b)Le fait que le mécanisme législatif en place ne permette pas de lutter convenablement contre la violence sexiste en milieu domestique induite par la question du droit de garde de l’enfant;

c)L’absence de mesures législatives adéquates qui garantissent les droits de propriété des femmes en cas de divorce, compte tenu des disparités économiques liées au sexe qui existent entre les époux et qui résultent de la ségrégation sexuelle sur le marché du travail et du fait que la plus grande part des travaux non rémunérés est effectuée par des femmes.

39. Le Comité, rappelant ses recommandations générales n o 21 (1994) sur l ’ égalité dans le mariage et les rapports familiaux et n o 29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, et des liens familiaux et de leur dissolution, recommande à l ’ État partie :

a) D’empêcher la pratique de mariages non enregistrés et d’entreprendre des réformes législatives afin de protéger les droits économiques des femmes dans les unions de fait ;

b) De prendre spécifiquement en compte les besoins spécifiques des femmes et des enfants afin de régler la question de la garde des enfants dans les cas impliquant des violences sexistes en milieu domestique ;

c) De mettre en place un mécanisme permettant de prendre en considération les disparités de revenus et de potentiel humain entre des époux qui se séparent, du fait de la ségrégation sexuelle sur le marché du travail et d’une plus grande représentation des femmes dans les activités non rémunérées.

Collecte et analyse des données

40.Le Comité reste préoccupé par le manque de données statistiques ventilées par sexe, âge, ethnie, localisation géographique et contexte socioéconomique, en particulier par l’absence d’analyses qui en découle, sachant que celles-ci sont nécessaires pour une évaluation précise de la situation des femmes et pour déterminer si elles sont victimes de discrimination, en particulier de formes multiples de discrimination, pour des processus de décision éclairés et ciblés, et pour le suivi et l’évaluation systématiques des progrès enregistrés dans la réalisation d’une égalité réelle des femmes dans tous les domaines couverts par la Convention.

41.Le Comité rappelle le paragraphe 11 de ses précédentes observations finales (CEDAW/C/ROM/CO/6) et engage l ’ État partie à recueillir davantage de données ventilées par sexe, par ethnie, par groupe d ’ âge et par type de zone (urbaine ou rurale), s ’ il y a lieu, pour pouvoir évaluer la situation effective des femmes et leur capacité d ’ exercer leurs droits essentiels et déterminer les tendances au fil du temps. Le Comité prie l ’ État partie de faire figurer ces données et études statistiques dans son prochain rapport. À cet égard, il attire l ’ attention de l ’ État partie sur sa recommandation générale n o 9 (1989) sur les données statistiques concernant la situation des femmes et encourage l ’ État partie à rechercher l ’ assistance technique des organismes pertinents du système des Nations Unies et à renforcer sa collaboration avec les associations de femmes qui pourraient aider à garantir la collecte de données précises.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

42. Le Comité demande à l ’ État partie d’accepter, dans les meilleurs délais, l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention concernant le calendrier des réunions du Comité .

Déclaration et Programme d’action de Beijing

43. Le Comité demande à l ’ État partie de tenir compte de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing dans ses efforts visant à mettre en œuvre la Convention.

Programme de développement durable à l’horizon 2030

44. Le Comité appelle à la réalisation de l ’ égalité des sexes, conformément aux dispositions de la Convention, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

Diffusion

45. Le Comité demande à l ’ État partie d ’ assurer la diffusion en temps opportun des présentes observations finales , dans la langue officielle de l ’ État partie , auprès des institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au sein du Gouvernement, des ministres, du Parlement et du système judiciaire, en vue d ’en assurer la pleine application.

Assistance technique

46. Le Comité recommande à l ’ État partie de conjuguer la mise en œuvre de la Convention à ses efforts de développement, et de mettre à profit l ’ assistance technique régionale ou internationale à cet effet .

Ratification d’autres instruments

47. Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neufs principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribue rait à favoriser l ’ exercice effectif par les femmes de leurs droits individuels et de leur s libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Il encourage donc l ’ État partie à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, à laquelle il n ’ est pas encore partie.

Suivi des observations finales

48. Le Comité demande à l ’ État partie de fournir, dans un délai de deux ans, des renseignements écrits sur les mesures prises en vue de faire appliquer les recommandations contenues dans les paragraphes 15 d) , 19 a) et b) et 21 a) ci ‑ dessus.

Élaboration du prochain rapport

49. Le Comité demande à l ’ État partie de soumettre so n neuvième rapport périodique, attendu en juillet 2021. Le rapport doit être soumis à temps, et, en cas de retard, couvrir toute la période allant jusqu ’ à l a date de sa soumission .

50.Le Comité invite l ’ État partie à respecter les directives harmonisées relatives à l ’ établissement de rapports conformément aux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, y compris les directives relatives au document de base commun et aux documents spécifiques aux instruments (voir HRI/GEN/2/Rev.6, chap itre  I) .