Nations Unies

CAT/C/NGA/FCOAR/1

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

4 janvier 2023

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Renseignements reçus du Nigéria au sujet de la suite donnée aux observations finales formulées en l’absence de son rapport initial *

[Date de réception : 1er décembre 2022]

I.Introduction

1.La République fédérale du Nigéria remercie le Comité contre la torture (« le Comité ») pour les observations finales et les recommandations (CAT/C/NGA/COAR/1) qu’il a formulées en l’absence de son rapport initial, à ses 1852e et 1855e séances, les 16 et 17 novembre 2021, lors de sa soixante-douzième session.

2.Les autorités nigérianes remercient aussi le Comité d’avoir dialogué avec sa délégation pendant la session et regrettent que leur rapport initial, transmis par l’intermédiaire du Ministère des affaires étrangères avant l’examen, ne soit pas parvenu au Comité avant la date limite en raison d’erreurs de communication. C’est pourquoi elles prient le Comité de ne pas leur tenir rigueur d’avoir dépassé, dans le présent rapport, la limite de 3 500 mots recommandée, afin de pouvoir fournir les précisions nécessaires qui n’auraient pas été portés à la connaissance du Comité au moment où il a adopté ses observations finales.

II.Réponse aux recommandations du Comité

3.Au paragraphe 37 de ses observations finales, le Comité a demandé au Nigéria de lui faire parvenir, le 3 décembre 2022 au plus tard, des renseignements sur la suite donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 14 (al. b)), 18, 22 et 32.

4.On trouvera dans les paragraphes ci-après la réponse des autorités nigérianes concernant les mesures prises à l’égard de ces recommandations.

Allégations de torture, de mauvais traitements, de détention arbitraire et d’usage excessif de la force

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 14 (al. b)) des observations finales (CAT/C/NGA/COAR/1)

5.Les pouvoirs publics ne cautionnent ni la torture, ni les mauvais traitements, ni la détention arbitraire ni l’usage excessif de la force sous quelque forme que ce soit. C’est pourquoi ils ont établi un cadre juridique et un cadre institutionnel pour la prévention et la répression des actes de torture commis sur son territoire.

6.En ce qui concerne les allégations de violations commises par la Brigade spéciale de lutte contre le vol à main armée de la Police nigériane, les autorités ont mené une enquête en deux phases.

7.La première phase a été conduite par le Groupe d’enquête sur la réforme de la Brigade spéciale de lutte contre le vol à main armée (2018-2019), une entité indépendante tant dans sa composition que son fonctionnement, créée par les pouvoirs publics par l’intermédiaire de la Commission nationale des droits de l’homme. À l’issue de cette phase de l’enquête, un rapport a été soumis et le Gouvernement a publié un livre blanc, qui est un document public. Le communiqué de presse de la Commission nationale des droits de l’homme, dans lequel figurent les recommandations du Groupe d’enquête concernant chaque État intéressé, peut être consulté sur le site Web de la Commission.

8.La deuxième phase d’enquête, engagée par suite de l’intensification des manifestations tenues en octobre 2020 pour réclamer la dissolution de la Brigade spéciale de lutte contre le vol à main armée, a également été conduite par des commissions d’enquête judiciaire indépendantes constituées dans le Territoire de la capitale fédérale et dans 28 États de la Fédération, conformément aux lois en vigueur.

9.Les rapports finaux de la plupart des commissions d’enquête ont été soumis au Gouvernement et sont actuellement à différents stades de mise en œuvre, conformément aux décisions suivantes du Conseil économique national :

a)Chaque État collabore avec l’administration fédérale à la définition des modalités de règlement de toutes les indemnisations financières accordées par les commissions d’enquête ;

b)Les gouverneurs des États transmettent les rapports des commissions d’enquête aux procureurs généraux des États et de la Fédération afin que ceux-ci puissent intenter des poursuites contre les personnes mises en cause dans ces rapports (membres des forces de sécurité et civils) ;

c)Lorsqu’ils contiennent des recommandations qui ont trait à la discipline, les rapports sont transmis à la police ou à l’organe de sécurité concerné pour qu’il prenne les mesures disciplinaires voulues, conformément aux procédures disciplinaires des différents organes de sécurité.

Réparations accordées aux victimes

10.En application des décisions du Conseil économique national, de nombreux États ont créé des fonds d’indemnisation des victimes, lesquels ont versé à plusieurs victimes les indemnisations financières accordées par les commissions d’enquête. À titre d’exemple, entre 2021 et août 2022, l’administration fédérale a versé en tout 431,8 millions de naira à 94 victimes. L’État de Lagos a versé 410,2 millions de naira à 70 victimes. L’État d’Osun a versé 53,2 millions de naira à des victimes en mai 2022, et l’État d’Ekiti 21,2 millions de naira.

Poursuites (y compris les mesures disciplinaires)

11.Le Groupe d’enquête sur la réforme de la Brigade spéciale de lutte contre le vol à main armée (2018-2019) a recommandé au Procureur général de la Fédération de poursuivre 60policiers. Cependant, ces recommandations n’ont pas pu être appliquées car un examen des cas a confirmé que les infractions présumées ne relevaient pas de la compétence fédérale ou que, les éléments avancés n’étant pas suffisants à première vue, il convenait de recueillir d’autres éléments de preuve. Les affaires ont donc été renvoyées pour complément d’enquête ou renvoyées aux procureurs généraux des États. Les cas appelant des mesures disciplinaires ont également été renvoyés à l’Inspection générale de la police pour qu’elle prenne les mesures voulues conformément aux règles, protocoles et procédures disciplinaires envigueur.

12.De manière générale, la police et les autres organes chargés d’assurer le maintien de l’ordre et la sécurité au Nigéria ont mis en place des mécanismes de plainte et des procédures disciplinaires qui leur permettent d’examiner les plaintes déposées contre les agents. Ces mécanismes se sont avérés efficaces et ont permis d’imposer des sanctions aux auteurs d’actes répréhensibles. À titre d’exemple, le Service de traitement des plaintes de la police nigériane a reçu, depuis qu’il a été créé en 2015 (sa création ayant été consacrée en 2020 par l’article 131 de la loi sur la police) précisément pour assurer l’examen des plaintes visant des policiers fautifs, 14 976 plaintes, dont 11 567 étaient réglées en juin 2022. Plus de 258 policiers ont été sanctionnés et 31 ont été démis de leurs fonctions. Au cours des quatre derniers mois, cinq policiers ont été licenciés sur la base d’informations, diffusées sur les médias sociaux, selon lesquelles ils avaient commis des violations des droits de l’homme.

Détention provisoire et surpopulation carcérale

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 18 (al. a) des observations finales

13.Au nombre des dispositions novatrice de la loi de 2015 sur l’administration de la justice pénale (art. 293 à 299) figuraient les dispositions relatives à la détention provisoire, qui prévoient des durées maximales de détention et des protocoles et qui visaient à remédier aux problèmes de la détention provisoire prolongée et de l’engorgement des centres de détention du pays.

14.Le Gouvernement nigérian s’inquiète de ce que cette initiative ne se soit pas traduite par une évolution sensible des statistiques concernant les personnes détenues avant jugement dans les centres de détention du pays. Il a donc pris des mesures, depuis 2019, pour que les dispositions de la loi sur l’administration de la justice pénale qui se rapportent à la détention provisoire soient appliquées et contrôlées plus efficacement, afin d’atteindre le but recherché.

15.En 2019, la loi sur l’administration pénitentiaire a été adoptée en remplacement de la loi de 1972 relative aux prisons. Elle comporte, en son article 18, des dispositions pragmatiques qui visent à remédier aux problèmes de la détention provisoire et de l’engorgement des centres de détention.

16.En 2020, le Comité présidentiel sur la réforme et la décongestion du système pénitentiaire, en collaboration avec le Ministère fédéral de la justice et le Comité de surveillance de l’administration de la justice pénale, a élaboré un modèle de projet de directive pratique pour l’application efficace des procédures de détention provisoire conformément à la loi relative à l’administration de la justice pénale et à la législation applicable en la matière dans les différents États, pour adoption par les présidents des tribunaux du Territoire de la capitale fédérale et des États de la Fédération. La directive en question comporte des dispositions qui, entre autres choses, garantissent que la détention des suspects ne dépasse pas la durée légale ou la durée fixée par le tribunal compétent, en imposant aux magistrats, à l’organisme chargé de l’enquête et à l’administration pénitentiaire de rendre des comptes et de se conformer à d’autres obligations. Ce projet de directive pratique fait actuellement l’objet de consultations.

17.En 2021, le Bureau du procureur général de la Fédération et Ministre de la justice, en collaboration avec le Comité présidentiel sur la réforme et la décongestion du système pénitentiaire et avec le soutien des partenaires de développement, a élaboré un projet de lignes directrices sur la négociation de plaidoyer pour appuyer la mise en œuvre de l’article 272 de la loi sur l’administration de la justice pénale, qui autorise le recours à cette modalité dans le règlement des affaires pénales. Lorsqu’elles seront publiées, ces lignes directrices devraient favoriser le recours à la négociation de plaidoyer, réduisant ainsi le nombre de procès excessivement longs et l’utilisation de la détention provisoire. Elles font actuellement l’objet de consultations avec les organismes chargés des poursuites.

18.En janvier 2022, le Comité de surveillance de l’administration de la justice pénale a institué un système de permanence d’avocats dans les postes de police de 16 divisions de police du Territoire de la capitale fédérale, grâce auquel des avocats sont mis à la disposition des personnes démunies ou non représentées pour leur fournir une aide juridictionnelle et les assister lors de leurs auditions, les aider à obtenir une libération sous caution, assurer leur bien-être et défendre leurs droits.

19.En juillet 2022, le Comité de surveillance de l’administration de la justice pénale a également lancé un système de permanence d’avocats dans les tribunaux, afin de garantir la tenue de procès rapides, de décongestionner les centres de détention et de réduire la charge de travail des tribunaux.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 18 (al. b)) des observations finales

20.En plus des renseignements fournis aux paragraphes 13 et 16 ci-dessus, on notera que les articles33 et 34 de la loi relative à l’administration de la justice pénale habilitent également les magistrats à contrôler les placements en détention provisoire par les forces de l’ordre qui n’ont pas été ordonnés par un tribunal. Afin de faciliter la mise en œuvre de ces dispositions, les pouvoirs publics, par l’intermédiaire de la Commission fédérale de coordination de la réforme du secteur de la justice, ont organisé des ateliers de sensibilisation destinés aux parties prenantes de cinq des six zones géopolitiques du pays. Jusqu’à présent, environ 1 000 personnes ont reçu une formation concernant leurs différentes fonctions relatives à l’application des dispositions susmentionnées et un haut degré de respect de ces dispositions a été observé dans tout le pays, en particulier dans le Territoire de la capitale fédérale.

21.Les diagrammes ci-dessous représentent les contrôles judiciaires réalisés dans les postes de police du Territoire de la capitale fédérale et le nombre de détenus libérés à l’issue de ces contrôles, en 2022.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 18 (al. c)) des observations finales

22.Le Gouvernement nigérian est déterminé à traiter globalement la question de la surpopulation carcérale ; c’est pourquoi la loi de 2015 sur l’administration de la justice pénale prévoit en ses articles 453 à 467 le recours à des peines non privatives de liberté, telles que les travaux d’intérêt général, la condamnation à des peines assorties de sursis et le sursis probatoire. L’article 468 autorise en outre la libération conditionnelle.

23.La loi de 2019 sur l’administration pénitentiaire porte création, en ses articles 37 à 44, d’un dispositif complet de mise en œuvre du système de justice réparatrice et d’application des dispositions non privatives de liberté.

24.Le Gouvernement nigérian a pris des mesures pour garantir l’application des dispositions mentionnées ci-dessus. En 2020, le Comité présidentiel sur la réforme et la décongestion du système pénitentiaire, en collaboration avec le pouvoir judiciaire du Territoire de la capitale fédérale et certains partenaires de développement, a élaboré et adopté les directives pratiques des tribunaux du Territoire de la capitale fédérale (peines privatives et non privatives de liberté) en vertu desquelles les tribunaux sont tenus de prononcer des peines non privatives de liberté dans des cas où cela est opportun, tels que définis par les directives. Plusieurs États de la Fédération ont également adopté des directives pratiques analogues.

25.En août 2022, l’administration pénitentiaire a institué la Commission nationale des libérations conditionnelles, chargée de recommander la libération conditionnelle dans les cas où cela est justifié. Cette initiative vient s’ajouter aux autres collaborations mises en place par l’administration pénitentiaire en vue d’appliquer des mesures non privatives de liberté.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 18 (al. d)) des observations finales

26.Les pouvoirs publics ont pris plusieurs mesures, énumérées ci-après, pour mettre à la disposition de toutes les personnes privées de liberté des mécanismes de plainte efficaces, indépendants et accessibles et pour que les plaintes fassent l’objet d’une enquête rapide, impartiale et approfondie.

27.En 2009, le Président de la Cour suprême du Nigéria a publié une version révisée des règles relatives à la procédure visant à faire respecter les droits fondamentaux, lesquelles visent expressément à garantir un accès facile aux tribunaux et un règlement rapide des plaintes par la voie judiciaire. Cet objectif a été atteint grâce à l’élargissement des modalités d’introduction de l’action et à la suppression de l’obligation d’avoir qualité pour agir dans les affaires relatives au respect des droits fondamentaux, les organisations de la société civile étant ainsi habilitées à engager des procédures visant à faire respecter ces droits au nom des victimes et en l’absence de celles-ci.

28.La loi de 2017 contre la torture, en son article 6, permet à une victime d’atteinte aux droits de l’homme de demander à la Commission des droits de l’homme, à une organisation non gouvernementale ou à un particulier, directement ou par l’intermédiaire d’un mandataire, l’assistance d’un conseil pour introduire une plainte. La loi relative à la Commission nationale des droits de l’homme, en ses articles 5 et 6, habilite également celle-ci à recevoir des plaintes concernant les violations des droits de l’homme, à enquêter sur ces plaintes et à prendre les décisions qu’elle juge nécessaires.

29.Afin d’assurer l’utilisation effective de ces dispositions, la Commission nationale des droits de l’homme a élaboré deux documents, le Règlement intérieur et le manuel de procédure du système de plainte, qui ont simplifié les procédures de plainte.

30.Ces procédures se sont révélées efficaces et ont permis de régler un nombre important de plaintes pour atteinte aux droits de l’homme, y compris des actes de torture.

31.À titre d’exemple, en 2021, la Commission nationale des droits de l’homme a reçu 1 701 519 plaintes au total, dont 1 701 357 plaintes courantes. Parmi celles-ci, 1 697 777 ont été jugées recevables, et 1 187 079 (69,8 %) ont fait l’objet d’une enquête et étaient réglées au 31 décembre 2021. On trouvera de plus amples informations dans le rapport annuel 2021 de la Commission nationale des droits de l’homme, qui peut être consulté sur son site Web.

Surveillance indépendante des lieux de privation de liberté et Protocole facultatif

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 22 (al. a)) des observations finales

32.Le Nigéria a pris des mesures pour se conformer aux dispositions pertinentes du Protocole facultatif se rapportant à la Convention, ainsi qu’aux recommandations énoncées dans les observations finales, en adoptant un modèle de mécanisme national de prévention dont il estime qu’il permettra d’atteindre au mieux l’objectif du Protocole, compte tenu de l’organisation politique, sociale et économique particulière du Nigéria, de sa situation actuelle en matière de sécurité et des enseignements tirés des difficultés rencontrées par le précédent mécanisme de prévention dans l’exercice de son mandat.

33.En réponse à la recommandation formulée au paragraphe 22 (par. a)) des observations finales, le Gouvernement nigérian a reconstitué, en juillet 2022, le mécanisme national de prévention, dénommé Comité national contre la torture, d’une manière qui, selon lui, permettra de satisfaire aux prescriptions de l’article 18 du Protocole concernant l’indépendance du mécanisme dans l’exercice de ses fonctions et l’indépendance de son personnel, la compétence de ses experts, l’équilibre entre les sexes, la représentation adéquate des groupes ethniques et minoritaires du pays et la disponibilité des ressources nécessaires à son fonctionnement.

34.Dans sa forme reconstituée, le Comité national contre la torture a pour présidente la solliciteure générale de la Fédération et secrétaire permanente du Ministère fédéral de la justice et pour président suppléant le secrétaire exécutif de la Commission nationale des droits de l’homme, qui est l’institution nationale des droits de l’homme du Nigéria. Le but recherché en adoptant ce nouveau modèle était de régler la question du financement compte tenu des contraintes budgétaires auxquels est soumis le Comité. Des crédits distincts seront ouverts au Comité au titre des budgets du Ministère fédéral de la justice et de la Commission nationale des droits de l’homme pour l’exercice 2023 et, dans l’intervalle, le financement du Comité sera prélevé sur les crédits déjà ouverts. Le Comité comprend actuellement un ancien ambassadeur de carrière et un ancien rapporteur du système des Nations Unies, un universitaire de renom, des experts des droits de l’homme, le Directeur du Ministère public de la Fédération et le Directeur des droits des citoyens du Ministère fédéral de la justice ; cette composition fait la part belle à la diversité en termes d’expérience, de connaissances, de genre et d’ethnicité et par rapport à d’autres considérations. Dans un souci d’indépendance, les organisations de la société civile sont mieux représentées qu’auparavant, notamment l’Ordre des avocats du Nigéria, le Human Rights Agenda Network, qui regroupe plus de 300 organisations de la société civile, le groupe Access to Justice, l’organisation Avocats sans Frontières et l’organisation Prisoners’ Rehabilitation and Welfare Action (PRAWA). Le secrétariat du Comité national contre la torture est désormais hébergé par la Commission nationale des droits de l’homme et son personnel est détaché de la Commission et du Ministère fédéral de la justice, par souci d’efficacité. Les principaux organismes chargés de la sécurité et de l’application des lois sont également représentés, ce qui vise à faciliter la communication entre le Comité national contre la torture et ces organismes, compte tenu de la situation actuelle du Nigéria sur le plan de la sécurité.

35.Bien que le Comité national contre la torture n’ait pas été institué par une loi, sa création par le Bureau du Procureur général de la Fédération et Ministre de la justice repose sur les articles 10 et 12 de la loi de 2017 contre la torture.

36.Le Comité national contre la torture a été créé le 9 septembre 2022 et pourvu d’un mandat clair ; il est notamment chargé de proposer des projets de loi appropriés (y compris en ce qui concerne la suite à donner aux paragraphes 9, 10 et 21 des observations finales).

37.Le Comité national contre la torture a été conçu pour servir d’organe de coordination concernant les questions relatives à la torture dans le pays. D’autres organismes indépendants, chargés de permettre au Nigéria de s’acquitter des obligations qu’il a contractées au titre de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, du Protocole et d’autres traités relatifs aux droits de l’homme auxquels il est partie, ont été créés en vertu d’une loi. Parmi ces institutions, on peut citer la Commission nationale des droits de l’homme (art. 1er de la loi relative à la Commission nationale des droits de l’homme), le Conseil de l’aide juridique du Nigéria (art. 1er de la loi de 2011 relative à l’aide juridique), la Commission des plaintes (art. 1er de la loi relative à la Commission des plaintes) et le Service de traitement des plaintes de la police (art. 131 de la loi de 2020 sur la police).

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 22 (al. b) des observations finales

38.L’administration nigériane estime que son modèle de mécanisme national de prévention (tel que reconstitué) est actuellement celui qui lui permettra au mieux de s’acquitter des obligations qui lui incombent au titre de la Convention contre la torture et du Protocole s’y rapportant. Néanmoins, elle envisagera, en cas de besoin, de solliciter une assistance technique conformément à l’article 11 (al. b) ii)) du Protocole.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 22 (al. c)) des observations finales

39.Le Nigéria a mis en place des mécanismes permettant d’assurer des visites de contrôle régulières des lieux de privation de liberté par des organismes indépendants, à savoir le Comité national contre la torture et la Commission nationale des droits de l’homme (art. 6 de la loi relative à la Commission nationale des droits de l’homme). En 2022, ces deux organismes ont effectué de telles visites séparément. Toutes ces visites ont été menées dans le respect des procédures établies et conformément à la recommandation formulée au paragraphe 22 (al. c)) des observations finales (la liste de contrôle des visites de la Commission nationale des droits de l’homme se trouve sur son site Web, à l’adresse nigeriarights.gov.ng).

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 22 (al. d)) des observations finales

40.L’administration pénitentiaire collabore depuis longtemps avec des organisations non gouvernementales (ONG) et des acteurs de la société civile qui fournissent des services de santé et d’éducation, pour mener des activités de surveillance dans les centres de détention et fournir aux détenus des services de santé et d’éducation.

41.Cette collaboration est désormais encadrée par la loi de 2019 sur l’administration pénitentiaire (art. 8, 14, 21, 23, 24 et 34).

42.Les entités susmentionnées effectuent des visites régulières et, en collaboration avec l’administration pénitentiaire, organisent différents programmes de soins et d’éducation au bénéfice des détenus. Les principales ONG et organisations de la société civile qui sont actives dans ce domaine sont les suivantes : Carmelite Prisoners’ Interest Organization (CAPIO), Prisoners’ Rehabilitation and Welfare Action (PRAWA), Prison Fellowship of Nigeria, Dream Again et Forum on Detention and Corrections (auquel adhèrent 96 organisations). Ces ONG sont soutenues par des partenaires de développement, notamment le programme sur l’état de droit et la lutte contre la corruption, administré par le British Council et financé par l’Union européenne, le Comité international de la Croix‑Rouge, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), l’Ambassade de Suisse, le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), l’Agence nationale de lutte contre le sida (NACA), Heartland Alliance, FHS 360 et l’Agence des États-Unis pour le développement international (USAID).

Violence fondée sur le genre

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 32 (al. a)) des observations finales

43.La loi interdisant la violence sur autrui a été adoptée en mai 2015 dans le cadre de l’action menée par les pouvoirs publics pour éliminer la violence dans la sphère privée et la sphère publique, pour interdire toutes les formes de violence sur autrui, pour offrir une protection maximale et des recours utiles aux victimes et pour punir les auteurs de tels faits.

44.Par l’intermédiaire de différents organismes publics, dont le Conseil économique national, le Forum des Gouverneurs, le Ministère fédéral des affaires féminines et l’Organisme national de lutte contre la traite des personnes, les pouvoirs publics plaident sans relâche, depuis l’entrée en vigueur de cette loi, pour son incorporation dans la législation des 36 États du Nigéria.

45.Grâce à cette action, la loi interdisant la violence sur autrui a été adoptée dans 32 des 36 États. Des démarches sont en cours pour que les quatre autres États l’adoptent au plus vite.

46.En outre, les autorités, en collaboration avec des partenaires de développement et d’autres parties prenantes dans certains États, ont simplifié la loi interdisant la violence sur autrui et l’ont diffusée au niveau local ; elles s’efforcent à présent de renforcer les mécanismes institutionnels d’autres États afin de garantir l’application effective de cette loi, par la formation des policiers, des travailleurs sociaux et du personnel des centres d’orientation des victimes d’agression sexuelle.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 32 (al. b)) des observations finales

47.Le Nigéria ne cautionne pas la violence fondée sur le genre, sous quelque forme que ce soit, et a montré, par ses lois et ses politiques, qu’il était déterminé à combattre toutes les formes de violence sexuelle et fondée sur le genre, y compris celles qui sont associées à une action ou à une omission de la part des autorités de l’État ou d’autres entités.

48.Outre les mesures mentionnées au paragraphe 31 des observations finales du Comité, le Gouvernement nigérian, par l’intermédiaire de différents organismes publics (notamment le Ministère fédéral de la santé et le Ministère fédéral des affaires féminines) et en collaboration avec les principales parties prenantes, a mis au point les politiques, lignes directrices, protocoles et manuels de formation énumérés ci-après, qu’il met actuellement en œuvre et qui visent à prévenir et à atténuer la violence fondée sur le genre et, d’une manière générale, à lutter contre cette violence au Nigéria, ainsi qu’à assurer une prise en charge médicale des problèmes de santé qui en découlent :

a)Politique nationale 2022 pour l’égalité entre les hommes et les femmes (couvrant la période 2021-2026) ;

b)Normes et lignes directrices relatives à la prise en charge médicale des victimes de violence au Nigéria (2017) ;

c)Politique nationale relative à la santé et aux droits en matière sexuelle et procréative des personnes handicapées, l’accent étant mis sur les femmes et les filles (2018) ;

d)Politique nationale relative à la place du genre dans la santé (2021) ;

e)Ensemble de services essentiels relatifs à la santé et aux droits en matière sexuelle et procréative des femmes et des filles ayant réchappé à des actes de violence fondée sur le genre, à un mariage d’enfant ou à des mutilations génitales féminines ;

f)Protocole national sur la prise en charge des complications résultant de mutilations génitales féminines au Nigéria (2020) ;

g)Politique et plan d’action nationaux pour l’élimination des mutilations génitales féminines au Nigéria (2021) ;

h)Lignes directrices nationales relatives à la prise en charge sanitaire des victimes de violence fondée sur le genre : manuel clinique ;

i)Lignes directrices nationales relatives à la prise en charge sanitaire des victimes de violence fondée sur le genre : guide d’animation pour la formation des prestataires de soins ;

j)Lignes directrices nationales relatives à la prise en charge sanitaire des victimes de violence fondée sur le genre : livre d’exercices.

Personnes déplacées à l’intérieur du pays, en particulier les femmes et les filles

49.Dans le cadre des mesures prises pour protéger les personnes déplacées à l’intérieur du pays, en particulier les femmes et les filles, le Nigéria a adopté en 2021 une politique nationale révisée concernant les personnes déplacées, qu’elle met actuellement en œuvre et qui vise à renforcer le mécanisme et le cadre institutionnels pour la réalisation des droits, le respect de la dignité et l’amélioration du bien-être des populations vulnérables par l’atténuation des conséquences des déplacements internes au Nigéria et la mise en place de solutions durables.

50.Le Nigéria a également mis en œuvre un certain nombre de programmes par l’intermédiaire de ses principaux organes de coordination, dont le Ministère fédéral des affaires humanitaires, de la gestion des catastrophes et du développement social, la Commission nationale pour les réfugiés, les migrants et les personnes déplacées, l’Agence nationale de gestion des situations d’urgence et la Commission nationale des droits de l’homme.

Enquête et poursuites

51.Le Nigéria accorde la priorité aux enquêtes et aux poursuites concernant les actes de violence fondée sur le genre perpétrés par des acteurs étatiques et non étatiques. C’est pourquoi il a créé des unités spéciales d’enquête et de poursuite au sein de tous les services de répression et de tous les organes de poursuite, notamment la police, l’Organisme national de lutte contre la traite des personnes et le Ministère fédéral de la justice.

52.L’Organisme national de lutte contre la traite des personnes, responsable au premier chef de l’application de la loi interdisant la violence sur autrui, a fait passer intégralement au numérique son centre d’appels pour faciliter le signalement des cas et a récemment achevé l’aménagement d’une salle d’entretien adaptée.

53.En collaboration avec des partenaires de développement, dont l’ONUDC, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) et l’Union européenne en partenariat avec le British Council, des formations sont régulièrement organisées à l’intention des enquêteurs et les procureurs afin de renforcer leurs capacités en matière d’enquête et de poursuites.

54.Des formations sur les dispositions de la loi interdisant la violence sur autrui ont été dispensées aux juges de la Haute Cour, et quatre juges ont été désignés pour connaître des affaires de violence sexuelle et fondée sur le genre afin de garantir la tenue de procès rapides.

55.Dans le cadre des efforts qu’ils déploient pour décourager la violence fondée sur le genre, les pouvoirs publics créent actuellement un registre fédéral et des registres étatiques des délinquants sexuels afin de répertorier les personnes reconnues coupables d’infraction sexuelle.

56.Les différents organismes chargés des poursuites ont obtenu plusieurs déclarations de culpabilité et d’autres poursuites sont en cours. À titre d’exemple, depuis 2017, l’Organisme national de lutte contre la traite des personnes a reçu 1 023 signalements, secouru et conseillé 825 victimes, engagé 72 actions en justice (y compris les poursuites en cours) et obtenu une déclaration de culpabilité dans 14 affaires. L’Unité de lutte contre la violence sexuelle et la violence fondée sur le genre du Ministère fédéral de la justice a intenté 22 actions depuis janvier 2022.

57.L’administration fédérale a également créé le Comité de gestion interministériel pour l’élimination de la violence fondée sur le genre, qui regroupe plusieurs ministères et organismes compétents, afin d’assurer le suivi et la gestion des cas de violence fondée sur le genre dans le pays. Le Comité a été établi en vue de créer une synergie entre les ministères concernés et de renforcer l’action contre la violence fondée sur le genre au Nigéria.

Réparations accordées aux victimes

58.En plus des diverses lois et politiques visant à prévenir et à réprimer la violence sexuelle, à éliminer les pratiques et les valeurs culturelles qui encouragent la violence sexuelle et à offrir une réparation aux victimes de violence sexuelle, le Nigéria a pris d’autres mesures, notamment des mesures ad hoc, pour faire en sorte que les victimes de violence sexuelle obtiennent réparation.

59.À titre d’exemple, en octobre 2019, le Nigéria, par l’intermédiaire de sa commission nationale des droits de l’homme, a créé une entité indépendante, le Groupe spécial d’enquête sur la violence sexuelle et fondée sur le genre. Celui-ci a reçu et traité 162 plaintes en provenance de huit États, concernant notamment des cas de viol, de violence intrafamiliale, de discrimination fondée sur le genre, de privation d’héritage fondé sur le genre, de confiscation de biens, de menace de mort, d’intimidation et d’agression, de mariage forcé, de traitement inhumain ou dégradant, d’abandon, d’ostracisme, de privation d’accès aux ressources et de séparation forcée d’enfant.

Tableau relatif au statut des affaires traitées par le Groupe spécial d’enquête

N o

Statut

Nombre d’affaires

1

Réglées

65

2

Ayant donné lieu à une indemnisation

8

3

Renvoyées aux fins de poursuites

4

4

Renvoyées devant un autre organe

24

5

Ayant donné lieu au versement d’une assistance pécuniaire

4

6

Rejetées

57

Total

162

60.L’Organisme national de lutte contre la traite des personnes fournit régulièrement aux victimes un accompagnement psychosocial, des services de réadaptation et des soins de santé appropriés. En outre, il collabore avec des organisations de la société civile pour dispenser une formation aux victimes de violence sexuelle et fondée sur le genre et leur donner les moyens de se prendre en charge.

Renseignements complémentaires concernant les recommandations formulées au paragraphe 32 (al. c)) des observations finales

61.Les autorités nigérianes fournissent des services de santé sexuelle et procréative complets et accessibles selon une approche globale. Soucieuses de veiller à ce que toutes et tous puissent avoir accès à des services de santé abordables dans l’ensemble du pays, elles sont propriétaires d’hôpitaux et d’autres établissements de soins primaires, secondaires et tertiaires, qui offrent des services de santé sexuelle et procréative dont les coûts sont en partie pris en charge par l’État et dont elles assurent la gestion par l’intermédiaire du Ministère fédéral de la santé et des Ministères de la santé des États et de leurs organes compétents.

62.Un régime national d’assurance maladie a été instauré en application de la loi de 1999 sur le régime national d’assurance maladie, abrogée puis remplacée par la loi de 2022 sur l’autorité nationale d’assurance maladie. En 2014 et en 2019 ont été adoptées, respectivement, la loi nationale sur la santé et la politique nationale de santé, lesquelles visent à promouvoir l’accès universel aux services de santé sexuelle et procréative.

63.En 2018, le Nigéria a adopté les Lignes directrices nationales sur l’interruption de grossesse sans risque dans les cas visés par la loi, afin d’orienter la pratique de l’avortement sécurisé conformément à la législation applicable lorsque la poursuite d’une grossesse constitue un risque vital.

Dépénalisation de l’avortement

64.Les pouvoir publics font face à un défi de taille en ce qui concerne la recommandation visant à dépénaliser l’avortement, en raison de diverses convictions religieuses et culturelles et du fait que la dépénalisation de l’avortement est une question qui relève de la compétence législative résiduelle des différents États de la Fédération.

65.En 2012, par exemple, l’État d’Imo a adopté la loi de 2012 interdisant la violence sur autrui qui, en son article 40, légalise l’avortement en cas de viol ou d’inceste. Cependant, la levée de boucliers qui s’en est suivie, notamment chez les dignitaires religieux et les chefs traditionnels, a entraîné l’abrogation de cette loi en 2013.

66.La loi interdisant la violence sur autrui adoptée en 2022 dans ce même État n’a pas réinstauré une disposition équivalente à celle de l’article 40 de la loi de 2012. L’article 47 (par. 1) de la nouvelle loi garantit toutefois d’autres droits aux victimes de violence sexuelle, notamment le droit de recevoir une assistance médicale par l’intermédiaire d’organismes publics et d’autres prestataires, ainsi que le droit d’être informées des services de conseil juridique, de santé et de protection sociale gratuits disponibles et d’avoir facilement accès à ces services. La loi fédérale interdisant la violence sur autrui et des lois d’autres États comportent des dispositions analogues.

67.Malgré les difficultés rencontrées, les autorités restent déterminées à faire en sorte que tout un chacun puisse bénéficier de services de santé sexuelle et procréative complets et accessibles.

68.Les pouvoirs publics continueront de dialoguer avec les parties prenantes et d’œuvrer à leur sensibilisation en vue d’une application progressive de la recommandation si la situation s’y prête mieux sur les plans religieux et socioculturel, ainsi que sur celui de la sécurité.

69.Pendant la poursuite de ces travaux, il reste possible d’invoquer la jurisprudence (R v . Bourne (1938) 3 All ER 615) pour sa défense, bien que, selon les informations disponibles, aucune interruption de grossesse motivée par un viol ou d’autres actes ou situations provoquant de considérables souffrances pour une femme n’a donné lieu à des poursuites.

III.Conclusion

70.En ce qui concerne le paragraphe 41 des observations finales, le Nigéria accepte d’établir et de soumettre son deuxième rapport périodique, attendu en 2025, suivant la procédure simplifiée, et il invite le Comité à lui transmettre une liste des points à traiter.

71.La République fédérale du Nigéria attache toujours une grande importance aux obligations qui lui incombent au titre de la Convention contre la torture et du Protocole facultatif s’y rapportant, et elle continuera de prendre toutes les mesures possibles pour s’en acquitter.