Nations Unies

CRC/C/LSO/CO/2

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

25 juin 2018

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant le deuxième rapport périodique du Lesotho *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le deuxième rapport périodique du Lesotho (CRC/C/LSO/2) à ses 2294e et 2295e séances (voir CRC/C/SR.2294 et 2295), les 22 et 23 mai 2018, et a adopté les observations finales ci-après à sa 2310e séance, le 1er juin 2018.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le deuxième rapport périodique du Lesotho, ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/LSO/Q/2/Add.1), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité prend note avec satisfaction des progrès réalisés par l’État partie dans divers domaines, ainsi que des mesures législatives et institutionnelles et des politiques adoptées aux fins de l’application de la Convention, comme la loi sur la protection et le bien-être des enfants (2011), la loi sur l’éducation (2010) et la loi relative à la lutte contre la traite des personnes (2010).

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6) de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

4. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à ses recommandations de 2001 (voir CRC/C/15/Add.147) qui n ’ ont pas encore été mises en œuvre, ou qui ne l ’ ont pas été dans toute la mesure voulue, en particulier celles concernant le mécanisme de suivi indépendant (par. 14), l ’ allocation des crédits budgétaires (par. 18), la diffusion, la sensibilisation et la formation (par. 22), la non-discrimination (par. 26) et l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant (par. 28).

Législation

5.Le Comité prend note des mesures législatives adoptées pour donner effet aux dispositions de la Convention, notamment l’adoption de la loi relative à la lutte contre la traite des personnes, de la loi sur l’éducation et de la loi générale sur la protection et le bien-être des enfants, ainsi que la réforme législative en cours qui comprenait un examen de la loi sur la protection et le bien-être des enfants en vue de sa modification (2018). Toutefois, le Comité s’inquiète des points suivants :

a)Aucun règlement d’application de la loi sur la protection et le bien-être des enfants n’a encore été adopté ;

b)Les parties prenantes et les enfants ont été peu consultés lors de l’élaboration du projet de modification de la loi.

6. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place des structures, des mécanismes ou des systèmes pour mettre effectivement en œuvre la Convention au moyen de lois et de politiques nationales y relatives ;

b) D ’ adopter le projet de modification de la loi sur la protection et le bien ‑ être des enfants, ainsi que le règlement d ’ application de cette loi, dans le cadre d ’ un processus consultatif et participatif associant les organisations de la société civile et les enfants, et d ’ allouer les ressources humaines et financières nécessaires à son application.

Politique et stratégie globales

7.Le Comité prend acte de la Stratégie multisectorielle nationale de protection des enfants (2014-2018) et de l’examen du Plan stratégique national pour les orphelins et les enfants vulnérables (2012-2017), qui est arrivé à échéance. Cependant, le Comité constate avec préoccupation que plusieurs politiques et plans sont déjà arrivés à expiration sans qu’aucun n’ait encore été renouvelé.

8. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ évaluer les politiques en faveur de l ’ enfance arrivées à échéance, d ’ adopter des versions actualisées, par exemple du Plan stratégique national pour les orphelins et les enfants vulnérables, en se fondant sur les évaluations qu ’ il aura menées, et d ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à leur mise en œuvre.

Coordination

9.Le Comité prend note de l’établissement de la Direction des services de protection de l’enfance et du Comité national de coordination chargé des orphelins et enfants vulnérables. Toutefois, il constate avec inquiétude qu’il n’existe pas de mécanisme de coordination formel ou officiel chargé de toutes les questions relatives à l’enfance couvertes par la Convention. Il s’inquiète également de ce que, sur les neuf sièges que compte le Comité de coordination, quatre étaient vacants en raison de contraintes budgétaires.

10. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ établir un système de coordination formel ou officiel intégré, d ’ un bon rapport coût-efficacité et correspondant aux moyens disponibles, ainsi qu ’ un mécanisme d ’ évaluation et de suivi, à l ’ intention de tous les enfants et couvrant tous les domaines visés par la Convention, et d ’ allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à leur bon fonctionnement, notamment en pourvoyant les postes vacants.

Allocation de ressources

11. Compte tenu de son observation générale n o  19 (2016) sur l ’ élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l ’ enfant, le Comité rappelle la recommandation qu ’ il avait formulée à ce sujet dans ses observations finales de 2001 (voir CRC/C/15/Add.147, par. 18) et recommande à l ’ État partie, lors de la planification de ses budgets :

a) D ’ augmenter autant que possible les crédits budgétaires spécifiquement consacrés aux enfants, conformément à l ’ article 4 de la Convention ;

b) D ’ accroître les efforts visant à utiliser plus efficacement les ressources et à les affecter plus rapidement à tous les secteurs, en particulier à ceux de la santé et de l ’ éducation ;

c) De tenir compte de la cible 16.5 des objectifs de développement durable, qui consiste à réduire nettement la corruption et la pratique des pots-de-vin sous toutes leurs formes, de prendre sans délai des mesures pour lutter contre la corruption et de renforcer les moyens institutionnels visant à détecter la corruption, enquêter sur les cas de corruption et en poursuivre les auteurs.

Collecte de données

12.Le Comité relève que l’État partie a établi un système national d’information pour l’assistance sociale et qu’il est en train de définir des indicateurs adaptés aux enfants. Cependant, il note avec inquiétude que le système national d’information ne couvre que les trois quarts environ de l’État partie, laissant principalement de côté des zones rurales, et qu’il ne peut par conséquent être utilisé pour élaborer les programmes sociaux de l’État partie relatifs aux enfants.

13. Compte tenu de son observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d ’ application générales de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ étendre le système national d ’ information pour l ’ assistance sociale de sorte qu ’ il couvre pleinement son territoire, en particulier les zones rurales et montagneuses, et de veiller à ce que les données concernant les enfants soient ventilées par âge, sexe, origine ethnique, origine nationale, zone géographique et situation socioéconomique pour tous les domaines couverts par la Convention. Le Comité recommande de demander l ’ assistance technique du Fonds des Nations Unies pour l ’ enfance (UNICEF) afin que des indicateurs adaptés aux enfants soient mis au point pour tous les domaines couverts par la Convention et que les données recueillies soient utilisées lors de l ’ élaboration de tous les programmes relatifs aux enfants.

Mécanisme de suivi indépendant

14. Le Comité constate toujours avec préoccupation que l ’ État partie ne dispose toujours pas d ’ une institution nationale des droits de l ’ homme. Il lui recommande d ’ établir une commission des droits de l ’ homme en associant les organisations de la société civile au processus, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris), et de prévoir la nomination, au sein de cette commission des droits de l ’ homme, d ’ un commissaire qui aurait des compétences particulières dans le domaine des droits des enfants et serait expressément chargé de cette question. La commission des droits de l ’ homme devrait être en mesure de recevoir et d ’ examiner des plaintes émanant d ’ enfants et d ’ enquêter sur celles-ci tout en respectant la sensibilité des enfants.

Diffusion, sensibilisation et formation

15. Tout en relevant que des activités de sensibilisation sont menées pour diffuser des informations, favoriser une prise de conscience et dispenser des formations sur la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De former de manière systématique les parents et tous les professionnels qui travaillent avec et pour des enfants ;

b) De renforcer les programmes et les actions de sensibilisation des communautés, y compris en menant des campagnes, de façon que les dispositions et principes de la Convention soient largement reconnus et compris dans les langues locales, et de veiller à ce que les enfants, les parents, les communautés et les chefs religieux jouent un rôle majeur dans ces initiatives ;

c) D ’ engager avec les communautés et les parents un dialogue sur les droits de l ’ enfant, notamment sur des questions telles que le genre, le mariage d ’ enfants et le travail des enfants.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

16.Le Comité se félicite de la réforme législative en cours, qui a pour but d’harmoniser la définition de l’enfant dans toute la législation relative à l’enfance pour la mettre en conformité avec la Convention et d’interdire le mariage d’enfants, sans exception, notamment par l’abrogation des dispositions de la loi sur le mariage (1974) qui autorisent les filles à se marier dès l’âge de 16 ans.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer la réforme législative en vue de parvenir à une définition unique de l ’ enfant et d ’ interdire le mariage d ’ enfants.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

18. Le Comité rappelle ses précédentes observations finales (par. 26) et recommande à l ’ État partie de prendre des mesures plus énergiques pour mettre fin à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des enfants, en accordant une attention particulière à la discrimination à l ’ égard des jeunes filles et à leur droit à l ’ héritage, ainsi qu ’ à l ’ accès à l ’ éducation et aux services de base, en particulier pour les enfants vivant dans les régions rurales, les filles et garçons chargés de garder les troupeaux, les enfants handicapés, les enfants atteints d ’ albinisme, les enfants vivant avec le VIH/sida, les enfants nés hors mariage et les enfants issus des minorités ethniques.

Intérêt supérieur de l’enfant

19. Tout en saluant le fait que le principe de l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant a été intégré dans la législation nationale, notamment dans la loi sur la protection et le bien ‑ être des enfants, et compte tenu de son observation générale n o  14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour que ce droit soit dûment pris en considération et soit interprété et respecté de manière uniforme dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires et dans tous les programmes, projets et politiques qui concernent les enfants et ont des conséquences pour eux, notamment en ce qui concerne la protection de remplacement et les procédures d ’ adoption.

Droit à la vie

20.Le Comité est gravement préoccupé par les informations selon lesquelles des enfants seraient tués puis mutilés dans le but d’utiliser des parties de leur corps à des fins médicales.

21. Le Comité engage instamment l ’ État partie à prendre immédiatement des mesures pour prévenir le meurtre d ’ enfants suivi de la mutilation de parties de leur corps, en menant des campagnes de sensibilisation de la population, en ouvrant des enquêtes sur tous les cas et en traduisant les coupables en justice.

Respect de l’opinion de l’enfant

22.Le Comité se réjouit de ce que l’État partie a alloué des crédits budgétaires au Parlement des enfants pour l’année 2018/19. Cependant, le Comité constate avec préoccupation que la participation des enfants demeure limitée par des pratiques culturelles et par le fait que, malgré la protection assurée par la loi, les opinions des enfants ne sont pas toujours prises en compte dans les tribunaux pour enfants.

23. Se référant à son observation générale n o  12 (2009) sur le droit de l ’ enfant d ’ être entendu, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ assurer un financement et un appui permanents au Parlement des enfants, qui sert de fondement à la participation active des enfants. L ’ État partie devrait également veiller à ce que l ’ opinion des enfants soit dûment prise en considération dans la famille, dans la communauté, à l ’ école et dans toutes les procédures administratives et législatives de prise de décisions les concernant, en particulier les procédures judiciaires, au moyen d ’ activités de sensibilisation à la participation des enfants menées aux niveaux national et local et de la formation des professionnels compétents.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances et nationalité

24.Le Comité prend note de la mise en place, en mars 2018, de guichets uniques chargés de l’enregistrement des naissances et d’un service dédié dans les conseils communautaires, ainsi que des centres mobiles d’enregistrement de l’état civil et de la citoyenneté, et salue les efforts que le Gouvernement et d’autres parties prenantes ont conjointement déployés pour sensibiliser davantage à l’enregistrement des naissances. Toutefois, le Comité reste préoccupé par :

a)Les faibles taux d’enregistrement des naissances, en particulier dans les zones rurales, et les difficultés et les retards dus au fait que les services d’enregistrement ne se trouvent pas toujours dans des lieux facilement accessibles ;

b)Les pénalités imposées en cas d’enregistrement tardif ;

c)La situation des enfants trouvés, qui seraient nés dans l’État partie, mais à qui il n’est pas accordé la nationalité, même s’ils risquent de se retrouver apatrides ;

d)Les dispositions discriminatoires dans le droit interne, notamment dans la Constitution et dans l’Ordonnance sur la citoyenneté (1971), à l’égard des Lesothans nés à l’étranger et des Lesothanes, qui pourraient porter atteinte au droit de l’enfant d’acquérir une nationalité sans discrimination ;

e)Le fait que seuls les apatrides âgés de plus de 18 ans et présents légalement dans le pays peuvent déposer une demande de nationalité ;

f)L’absence de données sur les enfants apatrides.

25. À la lumière de la cible 16.9 des objectifs de développement durable, qui vise à garantir à tous une identité juridique, notamment grâce à l ’ enregistrement des naissances, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De recourir davantage à des équipes mobiles pour assurer des services d ’ enregistrement dans les communautés reculées et de mettre en place des dispositifs d ’ enregistrement des naissances dans les hôpitaux du pays ;

b) De redoubler d ’ efforts pour que chaque enfant soit inscrit au registre de l ’ état civil immédiatement après sa naissance et de garantir la délivrance d ’ actes de naissance, en particulier au niveau local ;

c) De supprimer les pénalités imposées en cas d ’ enregistrement tardif ;

d) De prendre des mesures législatives pour prévenir les normes discriminatoires et de garantir le droit de tous les enfants d ’ acquérir une nationalité dans l ’ État partie, y compris des enfants trouvés qui risquent de se retrouver apatrides ;

e) De recueillir des données sur les enfants apatrides dans l ’ État partie ;

f) De lancer de vastes programmes de sensibilisation montrant l ’ importance de l ’ enregistrement des naissances et expliquant les procédures de déclaration ;

g) De solliciter l ’ assistance technique du Haut-Commissariat aux réfugiés (HCR) et de l ’ UNICEF, entre autres, pour la mise en œuvre de ces recommandations.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Châtiments corporels

26.Le Comité constate que les châtiments corporels sont interdits par la loi dans les écoles. Cependant, le Comité relève avec une vive préoccupation qu’ils ne sont pas expressément interdits par la loi au sein de la famille, dans les structures de protection de remplacement, dans les garderies ou dans les établissements pénitentiaires, et qu’ils continuent d’être pratiqués à l’école malgré l’interdiction en vigueur.

27. Compte tenu de son observation générale n o  8 (2006) sur le droit de l ’ enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) À interdire expressément par la loi les châtiments corporels en toutes circonstances ;

b) À faire observer efficacement l ’ interdiction des châtiments corporels dans les établissements scolaires et à mettre en place un mécanisme de plainte pour les enfants dans ces établissements afin qu ’ ils puissent en toute sécurité et en toute confidentialité signaler les cas de châtiments corporels ;

c) À prévoir des programmes destinés aux parents, aux enseignants et aux professionnels qui travaillent avec et pour les enfants, dans le but d ’ encourager le recours à d ’ autres formes de discipline non violentes, à mieux former les enseignants en particulier à ces formes de discipline et à veiller à ce qu ’ elles fassent partie des programmes de formation préalable et continue ;

d) À renforcer les programmes de sensibilisation pour faire évoluer les mentalités.

Maltraitance et négligence, et exploitation et violence sexuelles

28.Le Comité salue l’établissement de l’Unité de protection des femmes et des enfants dans les commissariats de police, mais est vivement préoccupé par ce qui suit :

a)Le grand nombre de cas présumés de violence contre les enfants, y compris de violence familiale, d’exploitation et de violence sexuelles, et le manque de mesures, de mécanismes et de ressources visant à prévenir et à combattre cette violence ;

b)L’insuffisance des ressources humaines, matérielles et logistiques allouées à l’Unité de protection des femmes et des enfants, le manque de formation des agents de l’Unité aux questions relatives au genre et à l’enfance, et le transfert fréquent des agents formés vers d’autres unités ;

c)La méconnaissance par les enfants de leur droit d’être protégés contre la violence et des instances auxquelles signaler les actes de violence dont ils sont victimes ;

d)Le peu de dispositifs mis en place pour venir en aide aux enfants victimes de violence, par exemple les refuges et le soutien psychologique, et l’inadéquation des procédures de réadaptation et de réinsertion pour les enfants victimes d’infractions ou les enfants témoins qui participent à des procédures judiciaires ;

e)Le manque de données détaillées sur les enfants victimes de maltraitance, de négligence, de violence familiale et de sévices sexuels.

29. Faisant référence à son observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence, ainsi qu ’ à la cible 16.2 des objectifs de développement durable visant à mettre un terme à la maltraitance, à l ’ exploitation et à la traite, et à toutes les formes de violence et de torture dont sont victimes les enfants, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De prendre toutes les mesures qui s ’ imposent pour prévenir et combattre la violence à l ’ égard des enfants, y compris la violence familiale et l ’ exploitation et la violence sexuelle ;

b) De favoriser les programmes à assise communautaire visant à prévenir et à combattre la maltraitance des enfants, notamment la violence familiale et l ’ exploitation et la violence sexuelle ;

c) D ’ allouer des ressources humaines et financières suffisantes à l ’ Unité de protection des femmes et des enfants, d ’ accélérer la formation des agents de cette unité aux questions relatives au genre et à l ’ enfance et de renforcer leur capacité de collecter et de conserver des données détaillées et dûment ventilées sur la violence à l ’ égard des enfants ;

d) De veiller à ce qu ’ il existe des mécanismes, des procédures et des directives efficaces pour le signalement des cas d ’ exploitation sexuelle et de maltraitance, d ’ envisager de rendre obligatoire le signalement dans certains cas et de mettre en place des dispositifs adaptés aux enfants, accessibles et efficaces pour le signalement de toutes les infractions ;

e) De prendre toutes les mesures nécessaires pour enquêter sur les cas signalés d ’ exploitation sexuelle et de maltraitance et pour poursuivre les auteurs de ces actes et les traduire en justice ;

f) De veiller à ce que tous les enfants victimes de violence aient accès à un accompagnement, à un soutien psychologique, ainsi qu ’ à des services de réadaptation et de réinsertion, et d ’ allouer des ressources suffisantes aux refuges pour enfants ;

g) D ’ offrir une protection de remplacement aux enfants victimes s ’ il y a lieu et de soutenir les organisations non gouvernementales (ONG) qui fournissent de tels services ;

h) De créer une base de données nationale sur tous les cas de violence à l ’ égard des enfants, dont les cas de châtiments corporels, de maltraitance et de négligence, de violence familiale, et d ’ exploitation et de violence sexuelles.

Violence fondée sur le genre

30.Le Comité constate avec une profonde préoccupation l’augmentation du nombre de cas signalés de violence sexuelle à l’encontre des écolières et des filles travaillant comme domestiques. Il est également préoccupé par le risque de violence physique et sexuelle auquel les enfants, et les filles en particulier, sont exposés lorsqu’ils vont chercher de l’eau, se lavent ou utilisent les toilettes la nuit.

31. Faisant référence à son observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence, et à la cible 5.2 des objectifs de développement durable consistant à éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence faite aux femmes et aux filles, y compris la traite et l ’ exploitation sexuelle et d ’ autres types d ’ exploitation, le Comité recommande instamment à l ’ État partie :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et combattre les violences sexuelles faites aux écolières et aux filles travaillant comme domestiques ;

b) De veiller à ce que toutes les allégations concernant des cas de violence fondée sur le genre fassent l ’ objet d ’ une enquête approfondie et indépendante et à ce que les auteurs soient traduits en justice ;

c) De tenir compte des besoins des filles dans le cadre des mesures relatives à l ’ accès à l ’ eau , à l ’ assainissement, aux installations et aux services sanitaires, et à leur utilisation, dans le but de prévenir les violences sexuelles que les filles peuvent subir lorsqu ’ elles vont chercher de l ’ eau, se lavent ou utilisent les toilettes la nuit.

Pratiques préjudiciables

32.Le Comité s’inquiète du taux élevé de mariages d’enfants.

33. Faisant référence à la recommandation générale/observation générale conjointe n o  31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et n o  18 (2014) du Comité des droits de l ’ enfant sur les pratiques préjudiciables, le Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre des mesures énergétiques pour mettre fin aux mariages d ’ enfant s , notamment aux mariages de droit coutumier.

Lignes téléphoniques d’assistance

34. Le Comité recommande à l ’ État partie de créer une ligne téléphonique d ’ assistance sans frais, accessible 24 heures sur 24 et à la disposition de tous les enfants au niveau national, et d ’ allouer les ressources nécessaires à son bon fonctionnement.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Enfants privés de milieu familial

35.Le Comité prend note de l’adoption de politiques et de directives, notamment des normes de qualité pour les structures d’accueil (2011), de la politique relative au placement en famille d’accueil et à l’adoption (2012) et de la politique relative à l’établissement de centres d’accueil et de foyers pour les enfants victimes de la violence. Toutefois, le Comité s’inquiète de ce qui suit :

a)De nombreux orphelins ont été placés chez des proches à titre informel, sans que ce placement ait été reconnu par la loi ;

b)L’État partie s’appuie sur des services et des établissements de garde d’enfants qui sont gérés par des ONG ou par le secteur privé et qui ne sont pas suffisamment aidés et supervisés ;

c)Nombre d’enfants sont placés dans des structures de protection de remplacement sans décision de justice, alors qu’une prescription légale rend cette décision obligatoire ;

d)Il n’y a pas suffisamment de données sur les enfants placés à titre informel dans des familles et des centres d’hébergement.

36. Appelant l ’ attention de l ’ État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants (voir résolution 64/142 de l ’ Assemblée générale, annexe), le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mettre en place un système chargé de reconnaître la prise en charge informelle par les proches, sans surcharger le système formel, en renforçant les services communautaires de soins et de protection ;

b) De fournir un appui financier et autre suffisant aux structures de protection de remplacement gérées par des ONG ou le secteur privé, et de veiller à l ’ enregistrement de tous les enfants et à l ’ assurance qualité en exigeant le respect des normes minimales prescrites ;

c) De garantir que les enfants ne soient placés dans des centres de protection de remplacement que sur décision de justice ;

d) De créer et de tenir à jour une base de données complète et fonctionnelle sur le nombre d ’ enfants placés dans des centres de protection de remplacement et chez leurs proches ;

e) De demander une assistance technique aux fins de l ’ application de ces recommandations dans le cadre d ’ une coopération régionale et internationale.

Adoption

37.Le Comité relève que le projet de modification de la loi sur la protection et le bien‑être des enfants (2018) prévoit l’établissement d’une agence d’adoption et d’une autorité centrale pour s’occuper des adoptions internationales. Toutefois, il constate avec une profonde inquiétude que :

a)L’autorité centrale chargée des adoptions n’est pas encore dotée du personnel nécessaire et n’est pas pleinement fonctionnelle ;

b)La politique de 2012 relative à l’adoption n’est pas appliquée dans la pratique ;

c)Le Ministère du développement social n’est pas en mesure de tenir des registres des adoptions faute de moyens ;

d)Les procédures d’adoption prennent beaucoup de temps et se font sans la participation d’une autorité chargée des adoptions bien établie.

38. Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De fournir à l ’ Autorité centrale chargée des adoptions et à l ’ Unité des adoptions du Ministère du développement social les ressources humaines, financières et techniques qui leur sont nécessaires pour s ’ acquitter efficacement de leur mandat, et de veiller à ce qu ’ il soit toujours tenu compte de l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant ;

b) D ’ appliquer la politique de 2012 relative à l ’ adoption et d ’ en suivre la mise en œuvre ;

c) D ’ allouer des ressources suffisantes au Ministère du développement social et de renforcer ses capacités afin qu ’ il tienne efficacement les registres des adoptions ;

d) D ’ éviter les retards excessifs dans les procédures d ’ adoption et d ’ associer à ces procédures une autorité chargée des adoptions bien établie ;

e) De susciter une prise de conscience sur l ’ adoption et d ’ encourager l ’ adoption nationale.

Enfants vivant en prison avec leur mère

39.Le Comité constate avec préoccupation que l’intérêt supérieur de l’enfant n’est pas pris en considération lors de la détermination de la peine à imposer aux personnes qui en ont la charge et que les établissements pénitentiaires ne disposent pas d’installations appropriées pour les mères allaitantes.

40. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ encourager les tribunaux à accorder une attention prioritaire à l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant lors de la détermination de la peine à imposer aux personnes qui en ont la charge, en favorisant les peines à assise communautaire lorsque cela est possible, et de prévoir dans les prisons des services et des équipements appropriés pour les enfants de mères incarcérées, notamment une alimentation, des services de santé, des conditions d ’ hygiène et un hébergement adéquats.

G.Handicap, santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

41.Le Comité prend note du projet de loi sur l’équité pour les personnes handicapées (2018) et de l’adoption de la politique relative au handicap (2016) et relève que, conformément à la Constitution et aux principes de la politique de l’État, le Gouvernement devrait satisfaire les besoins des personnes handicapées. Cependant, le Comité est préoccupé par ce qui suit :

a)Le projet de loi sur l’équité pour les personnes handicapées est en instance d’adoption depuis 2011, et il n’existe aucune stratégie pour l’intégration des enfants handicapés ;

b)L’accès aux programmes communautaires de réadaptation, de dépistage précoce et d’orientation destinés aux enfants handicapés est limité, et le soutien et les ressources que reçoivent les prestataires de services et les familles d’enfants handicapés ne sont pas suffisants ;

c)Les enfants handicapés sont victimes de stigmatisation en raison de la façon dont le handicap est perçu sur les plans culturel et social ;

d)L’accès aux moyens de transport, aux écoles, aux soins de santé, aux espaces publics et aux services dans tous les secteurs, en particulier dans les communautés des zones rurales, est limité ;

e)L’aide sociale accordée aux enfants handicapés est insuffisante ;

f)Il existe peu de documents et d’informations en braille ;

g)Il n’y a pas de données sur les enfants handicapés ventilées par type de handicap, âge et sexe.

42. Compte tenu de son observation générale n o  9 (2006) sur les droits des enfants handicapés et des objectifs de développement durable 4, 9, 10 et 11, le Comité invite instamment l ’ État partie :

a) À adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l ’ homme ;

b) À renforcer le cadre législatif en examinant et en adoptant le projet de loi sur le handicap et en faisant appliquer la politique relative au handicap ;

c) À se doter d ’ une stratégie globale pour l ’ inclusion des enfants handicapés ;

d) À augmenter les ressources financières, humaines et techniques destinées aux enfants handicapés, à élargir les programmes communautaires de réadaptation, de dépistage précoce et d ’ orientation à leur intention, et à fournir aux prestataires de services et aux familles d ’ enfants handicapés le soutien humain, technique et financier dont ils ont besoin ;

e) À élaborer des campagnes et des programmes à assise communautaire, et à soutenir les campagnes et programmes existants, pour combattre la discrimination et la stigmatisation dont sont victimes les enfants handicapés et sensibiliser le public à l ’ importance du dépistage et de l ’ intervention à un stade précoce ;

f) À améliorer l ’ accès aux moyens de transport, à l ’ école, aux soins de santé, aux espaces et bâtiments publics et aux services dans tous les secteurs, en particulier dans les communautés rurales ;

g) À fournir des documents et des informations en braille ;

h) À prendre des mesures pour améliorer la collecte et l ’ analyse de données ventilées sur les enfants handicapés en vue d ’ orienter les lois, les politiques et les pratiques.

Santé et services de santé

43.Le Comité fait bon accueil à la politique en faveur de l’allaitement maternel des nourrissons et des jeunes enfants, à la Stratégie relative aux soins de santé procréative, maternelle et néonatale (2018-2022), à l’établissement d’une unité de pédiatrie, aux efforts faits pour éviter les ruptures de stocks de médicaments, notamment l’élaboration du plan stratégique national relatif à la chaîne d’approvisionnement, ainsi qu’aux mesures visant à absorber les coûts associés à la gratuité des soins médicaux pour les groupes vulnérables, en particulier les enfants. Le Comité est toutefois préoccupé par :

a)Les taux élevés de mortalité néonatale, infantile et juvénile, qui sont dus à des causes évitables telles que la malnutrition sévère, l’insécurité alimentaire et le rachitisme, les infections respiratoires aiguës, la fièvre et la diarrhée ;

b)Le financement limité, la médiocrité des services de prise en charge des enfants, le manque de professionnels de la santé dûment formés qui s’occupent des enfants et des femmes enceintes et les difficultés d’accès aux services de soins de santé, en particulier dans les zones rurales, qui sont autant d’obstacles majeurs à l’amélioration de la santé des enfants ;

c)La faible couverture vaccinale ;

d)La mauvaise gestion de l’approvisionnement pharmaceutique et du système de santé, en particulier au niveau local, et les ruptures de stocks de médicaments et de fournitures médicales ;

e)La nécessité de généraliser la pratique de l’allaitement au sein exclusif les six premiers mois de la vie de l’enfant.

44. Compte tenu de son observation générale n o  15 (2013) sur le droit de l ’ enfant de jouir du meilleur état de santé possible et de la cible 3.3 des objectifs de développement durable consistant à mettre fin à l ’ épidémie de sida et au paludisme et à combattre l ’ hépatite et les autres maladies transmissibles, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre des mesures, par exemple la mise en place d ’ un programme de prise en charge des maladies de l ’ enfant, pour faire diminuer les taux de mortalité néonatale , infantile et juvénile liés à des causes évitables telles que la malnutrition sévère, l ’ insécurité alimentaire et le rachitisme, les infections respiratoires aiguës, la fièvre et la diarrhée ;

b) D ’ étendre les programmes d ’ alimentation durable et de sécurité alimentaire à tous les enfants de moins de 5 ans, et aussi de mettre en place des services de nutrition dans tous les districts de l ’ État partie ;

c) De redoubler d ’ efforts pour améliorer l ’ accès de tous les enfants aux services de soins de santé de base, en particulier dans les zones rurales, de développer les programmes de renforcement des capacités des professionnels de santé qui travaillent avec des enfants et des femmes enceintes et d ’ allouer davantage de moyens aux dispensaires mobiles pour qu ’ ils soient plus nombreux et puissent s ’ occuper d ’ une plus large population ;

d) D ’ investir davantage dans les campagnes de vaccination dans les zones rurales et d ’ investir suffisamment dans des technologies pertinentes et dans les ressources humaines des services de vaccination ;

e) D ’ améliorer encore la gestion de l ’ approvisionnement pharmaceutique et du système de santé, ainsi que l ’ évaluation et le suivi, en accordant une attention particulière aux zones reculées, afin de remédier aux ruptures de stocks de médicaments et de fournitures médicales ;

f) De continuer à encourager l ’ allaitement maternel, notamment en mettant en place des hôpitaux « amis des bébés » dans l ’ État partie, et d ’ appliquer pleinement le Code international de commercialisation des substituts du lait maternel.

Santé mentale

45.Le Comité s’inquiète du fait que l’État partie ne dispose pas d’une politique de santé mentale et qu’il n’a pas fourni d’informations relatives aux services de santé mentale pour enfants.

46. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une politique de santé mentale qui prévoit expressément un traitement pour les enfants présentant des troubles mentaux. Il recommande également à l ’ État partie de prendre toutes les mesures qui s ’ imposent pour consacrer suffisamment de ressources financières et humaines à la santé mentale des enfants, notamment dans le cadre de la coopération internationale.

Santé des adolescents

47.Le Comité prend note de la politique et du plan stratégique relatifs à la santé sexuelle et procréative (2010), du Plan stratégique d’approvisionnement en produits de santé procréative, qui met l’accent sur la nécessité de fournir aux adolescents davantage d’informations sur la santé sexuelle et procréative, et des normes minimales et de leur guide d’application destinés aux services adaptés aux adolescents (2014). Toutefois, le Comité est préoccupé par :

a)Le nombre élevé de grossesses chez les adolescentes et de cas de maladies sexuellement transmissibles observés ;

b)L’accès limité à l’information et aux services en matière de santé sexuelle et procréative, en particulier dans les zones rurales, et la faible utilisation des préservatifs.

48. Faisant référence à ses observations générales n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l ’ adolescent dans le contexte de la Convention et n o  20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l ’ enfant pendant l ’ adolescence, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer le financement et les ressources suffisantes à la mise en œuvre, dans le respect des adolescents, de la politique et du plan stratégique relatifs à la santé sexuelle et procréative et du Plan stratégique d ’ approvisionnement en produits de santé procréative, en mettant l ’ accent sur tous les aspects de la prévention, y compris en ce qui concerne les maladies sexuellement transmissibles et les grossesses précoces ;

b) De garantir un accès aux informations et à l ’ éducation en matière de santé sexuelle et procréative dans tout le pays, en accordant une attention particulière à la prévention des grossesses précoces et des maladies sexuellement transmissibles ;

c) D ’ améliorer l ’ accès des adolescents aux soins de santé de la procréation, à la contraception , y compris aux préservatifs, et aux services connexes, et d ’ apporter un plus large concours aux services de santé de la procréation et de planification familiale, en particulier dans les zones rurales.

VIH/sida

49.Le Comité est gravement préoccupé par la forte prévalence du VIH/sida, par la fin de la Stratégie nationale de prévention du VIH (2012-2016) et par l’accès limité aux services de base relatifs au VIH et au traitement antirétroviral et aux services et à l’éducation dans les domaines de la santé sexuelle et procréative et du VIH/sida, y compris en ce qui concerne l’utilisation des préservatifs.

50. Faisant référence à l ’ observation générale n o  3 (2003) sur le VIH/sida et les droits de l ’ enfant, et prenant note des renseignements supplémentaires fournis au cours du dialogue constructif, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter une nouvelle stratégie nationale de prévention du VIH en s ’ inspirant de la précédente et de prendre des mesures pour renforcer la mise en œuvre des recommandations relatives à l ’ option B+ de l ’ Organisation mondiale de la Santé ;

b) D ’ améliorer l ’ accès à une éducation de qualité, adaptée à l ’ âge des patients, dans les domaines du VIH/sida, de la santé sexuelle et de la santé procréative, y compris en ce qui concerne l ’ utilisation des préservatifs.

Niveau de vie

51.Le Comité est préoccupé par l’accès limité des enfants à l’eau et à l’assainissement, en particulier dans les zones rurales.

52. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur la cible 1.3 des objectifs de développement durable consistant à mettre en place des systèmes et mesures de protection sociale pour tous, adaptés au contexte national, et recommande à l ’ État partie d ’ étendre la couverture aux groupes défavorisés qui n ’ ont à ce jour pas un accès suffisant à l ’ eau et à l ’ assainissement, en particulier dans les communautés rurales et reculées, dans les établissements de soins de santé et les écoles, y compris dans les établissements de la petite enfance.

H.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris formation et orientation professionnelles

53.Le Comité accueille avec satisfaction la loi sur l’éducation (2010), qui rend l’enseignement primaire gratuit et obligatoire pendant dix ans pour les élèves âgés de 6 à 13 ans ; les initiatives telles que le programme de bourse pour les orphelins et les enfants vulnérables, la gratuité des repas dans les écoles maternelles et primaires et la politique nationale relative à la prise en charge intégrée et au développement de la petite enfance (2013) ; et l’augmentation du nombre de places disponibles dans les crèches et du nombre d’écoles primaires et secondaires. Le Comité constate toutefois avec préoccupation :

a)Les coûts cachés dans l’enseignement primaire public, par exemple pour ce qui est du transport et des repas, en particulier dans les zones rurales, et les frais de scolarité dans le secondaire ;

b)Le faible taux de scolarisation dans le secondaire, en particulier des garçons, et surtout dans les zones rurales ;

c)Le mauvais état des écoles, le surpeuplement, le manque d’enseignants certifiés et les longues distances que les élèves doivent parcourir pour se rendre à l’école ;

d)Les disparités existant entre zones urbaines et zones rurales s’agissant de la qualité et de l’accessibilité de l’enseignement ;

e)Le fait que des adolescentes enceintes et des mères adolescentes sont renvoyées de leur établissement scolaire en guise de sanction, et qu’il leur est interdit de revenir en cours après l’accouchement ;

f)L’accès limité des enfants handicapés à l’éducation inclusive, notamment dans le secondaire, en raison d’un manque d’appareils d’aide et d’enseignants spécialisés dûment formés ;

g)L’intégration insuffisante des questions environnementales dans les programmes scolaires.

54. Compte tenu de son observation générale n o  1 (2001) sur les buts de l ’ éducation, et des cibles 4.1 et 4.2 des objectifs de développement durable, qui visent à faire en sorte que toutes les filles et tous les garçons suivent, sur un pied d ’ égalité, un cycle complet d ’ enseignement primaire et secondaire gratuit et de qualité et qu ’ ils aient accès à des services de développement et de prise en charge de la petite enfance et à une éducation préscolaire de qualité, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ examiner la manière dont son programme d ’ enseignement primaire gratuit et obligatoire est appliqué, dans le but de recenser les problèmes et de les résoudre ;

b) De supprimer les coûts cachés de l ’ éducation, en particulier dans les zones rurales, et d ’ allouer un budget suffisant au secteur de l ’ éducation ;

c) De cerner les facteurs qui contribuent à la faible scolarisation dans l ’ enseignement secondaire, en particulier des garçons, et de prendre des mesures efficaces pour améliorer l ’ accès des enfants aux établissements du secondaire et leur inscription dans ces établissements, notamment en élargissant la portée des programmes d ’ allocations visant à prendre en charge les dépenses des enfants défavorisés ;

d) De fournir suffisamment de ressources pour améliorer les infrastructures scolaires, d ’ augmenter le nombre d ’ enseignants certifiés et de mettre en place des transports scolaires ;

e) D ’ adopter des mesures efficaces visant à améliorer l ’ accès des enfants à un enseignement de qualité ;

f) De remédier au fort taux d ’ abandon scolaire des filles pour cause de grossesse et de faire en sorte que les adolescentes enceintes et les mères adolescentes bénéficient de l ’ accompagnement nécessaire pour poursuivre leurs études ;

g) De prendre des mesures, en faisant éventuellement appel à la coopération internationale, en vue de fournir des appareils d ’ aide, en particulier dans les établissements du secondaire, de former un nombre suffisant d ’ enseignants et de personnels spécialisés pour assurer un soutien individualisé, et de veiller à ce que les personnels reçoivent une formation adéquate, afin que les enfants présentant tout type de handicap puissent jouir effectivement du droit à une éducation inclusive de haute qualité ;

h) D ’ adopter des mesures pour approfondir les connaissances des enseignants et des éducateurs sur les questions relatives à l ’ environnement et aux changements climatiques et d ’ intégrer ces questions dans les programmes scolaires nationaux.

I.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)

Exploitation économique, notamment le travail des enfants

55.Le Comité prend note du programme spécial d’élimination des pires formes de travail des enfants et de la création d’une unité chargée de la lutte contre le travail des enfants dans le pays. Cependant, le Comité est préoccupé par ce qui suit :

a)La mise en œuvre du programme spécial prend du temps en l’absence de ressources suffisantes, et des enfants sont encore exposés aux pires formes de travail des enfants, notamment la garde des troupeaux, le travail domestique et l’exploitation sexuelle ;

b)Les normes minimales d’emploi pour les bergers/gardiens de troupeaux (2014) n’ont pas été largement diffusées ;

c)Le travail des enfants a des effets négatifs sur leur scolarité et leur temps libre, surtout pour les enfants des zones rurales ;

d)Il n’y a pas de statistiques sur les enfants qui travaillent.

56. Le Comité encourage l ’ État partie :

a) À allouer des ressources suffisantes pour appliquer pleinement le programme spécial d ’ élimination des pires formes de travail des enfants et pour lutter en particulier contre l ’ exploitation des enfants aux fins de la garde des troupeaux, du travail domestique et de l ’ exploitation sexuelle, et à mener une étude sur les pires formes de travail des enfants ;

b) À diffuser largement les normes minimales d ’ emploi pour les bergers/ gardiens de troupeaux (2014) et à mener des actions de sensibilisation, notamment des campagnes ;

c) À sensibiliser les parents à l ’ importance de l ’ éducation, et à fournir un soutien financier aux enfants les plus défavorisés ;

d) À recueillir des données sur les enfants victimes de différents types de travail des enfants, à mettre en place un mécanisme de plainte destiné aux enfants qui soit chargé de recevoir les signalements de cas d ’ exploitation d ’ enfants, d ’ en assurer le suivi et de mener des enquêtes, et à le faire connaître aux enfants.

Enfants en situation de rue

57.Le Comité s’inquiète de ce que le décès des parents et l’éclatement des familles élargies ont augmenté le nombre d’enfants en situation de rue et qu’il n’existe ni politique spécifique concernant ces enfants ni personnel spécialisé travaillant avec eux.

58. Se référant à son observation générale n o  21 (2017) sur les enfants en situation de rue, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De collecter des données sur les enfants en situation de rue et de les utiliser pour élaborer une politique et un plan d ’ action en vue de remédier à la situation actuelle ;

b) De fournir un soutien professionnel, en particulier un personnel ayant des compétences spécialisées dans les domaines de la psychologie et du travail social, aux organisations qui travaillent auprès des enfants en situation de rue ;

c) De veiller à ce que l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant soit pleinement respecté lorsqu ’ une aide lui est apportée, en particulier s ’ agissant de la réinsertion dans la famille ou du placement dans une structure de protection de remplacement, et à ce qu ’ il soit dûment tenu compte des opinions de l ’ intéressé, en fonction de son âge et de son degré de maturité.

Administration de la justice pour mineurs

59.Le Comité prend note de la mise en place de tribunaux pour enfants en 2011. Le Comité constate toutefois avec une vive préoccupation que :

a)Le système de justice pour mineurs n’est pas efficace ;

b)L’âge minimum de la responsabilité pénale est très bas puisqu’il est fixé à 10 ans ;

c)Tous les tribunaux pour enfants ne disposent pas d’une infrastructure adaptée aux enfants, et les magistrats ne peuvent pas compter sur des unités d’appui aux victimes ;

d)Les unités de protection des femmes et des enfants n’ont pas les moyens nécessaires à l’accomplissement de leur mission ;

e)Il n’y a pas de structures d’accueil telles que prévues par la loi sur la protection et le bien-être des enfants en raison de contraintes financières, et il n’existe qu’un seul centre de formation pour mineurs, qui n’est plus habitable ;

f)Les commissariats de police ne disposent pas de cellules séparées pour les enfants ;

g)Il n’est pas toujours possible de bénéficier d’une représentation juridique gratuite.

60. Compte tenu de son observation générale n o  10 (2007) sur les droits de l ’ enfant dans le système de justice pour mineurs, le Comité invite instamment l ’ État partie à mettre son système de justice pour mineurs en parfaite conformité avec la Convention et les autres normes applicables. En particulier, il lui recommande :

a) D ’ appliquer la loi sur la protection et le bien-être des enfants en ce qui concerne la justice réparatrice et la déjudiciarisation, et de veiller à ce que les enfants de moins de 18 ans se voient accorder les garanties prévues par ce texte ;

b) De relever l ’ âge minimum de la responsabilité pénale à un niveau acceptable au regard des normes internationales ;

c) D ’ allouer les ressources financières nécessaires à la mise en place d ’ une infrastructure adaptée aux enfants dans les tribunaux pour enfants et dans les comités villageois de la justice pour mineurs de tous les districts ;

d) De faire en sorte que tous les enfants appelés à comparaître en justice le fassent devant un tribunal pour enfants, au moyen de procédures spécialisées et avec le concours de magistrats dûment formés ;

e) De fournir des ressources en vue du renforcement des capacités des Unités pour la protection des femmes et des enfants ;

f) De faire en sorte que les enfants en détention soient séparés des adultes dans les commissariats de police ;

g) De veiller à ce que tous les enfants en conflit avec la loi bénéficient d ’ une représentation juridique gratuite assurée par des juristes qualifiés et indépendants dès le début de la procédure et tout au long de celle-ci ;

h) De promouvoir, dans les affaires d ’ enfants accusés d ’ infractions pénales, des mesures extrajudiciaires , en développant le programme de rééducation pour inclure la déjudiciarisation, la médiation et les conseils, et en infligeant des peines non privatives de liberté telles que la liberté conditionnelle ou le travail d ’ intérêt général, lorsque cela est possible ;

i) D ’ éviter de trop recourir aux structures d ’ accueil telles que les foyers de probation et les maisons d ’ éducation surveillée, de veiller à ce que de telles structures, si elles existent, soient adaptées aux enfants et favorisent leur réinsertion, de n ’ y recourir qu ’ en dernier ressort et pour la durée la plus courte possible et de prévoir la possibilité d ’ une remise de peine.

J.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

61. Le Comité recommande à l ’ État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant établissant une procédure de présentation de communications afin de mieux promouvoir l ’ exercice des droits de l ’ enfant.

K.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

62. Le Comité recommande à l ’ État partie, afin de mieux assurer la réalisation des droits de l ’ enfant, d ’ envisager de ratifier les principaux instruments relatifs aux droits de l ’ homme, énumérés ci-après, auxquels il n ’ est pas encore partie :

a) Le d euxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, visant à abolir la peine de mort ;

b) Le Protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

c) La procédure de plainte individuelle prévue par la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants ;

d) La procédure de plainte individuelle prévue par la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées ;

e) La procédure de plainte individuelle prévue par la Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale ;

f) Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

g) La procédure de plainte individuelle prévue par la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ;

h) Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

63. Le Comité demande instamment à l ’ État partie de s ’ acquitter de ses obligations en matière de présentation de rapports au titre du Protocole facultatif concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et du Protocole facultatif concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, les rapports sur la mise en œuvre de ces deux Protocoles étant attendus depuis le 24 octobre 2005.

L.Coopération avec les organismes régionaux

64. Le Comité recommande à l ’ État partie de coopérer avec le Comité africain d ’ experts sur les droits et le bien-être de l ’ enfant de l ’ Union africaine concernant la mise en œuvre de la Convention dans l ’ État partie ainsi que dans d ’ autres États membres de l ’ Union africaine.

IV.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

65. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il recommande également que le deuxième rapport périodique, les réponses écrites de l ’ État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi

66. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place un mécanisme national d ’ établissement des rapports et de suivi, en tant qu ’ organisme permanent de l ’ État, qui soit chargé de coordonner et d ’ élaborer les rapports devant être présentés aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l ’ homme et de nouer un dialogue avec ces mécanismes, et de coordonner et suivre l ’ exécution des obligations conventionnelles et la mise en œuvre des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Le Comité souligne que cette structure devrait être appuyée de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement les institutions nationales des droits de l ’ homme et la société civile. Dans cette optique, l ’ État partie devrait demander l ’ assistance technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme afin de mettre en place un mécanisme national chargé de l ’ établissement des rapports et du suivi.

C.Prochain rapport

67. Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son rapport valant troisième à septième rapports périodiques le 8 avril 2024 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l ’ instrument adoptées le 31 janvier 2014 (CRC/C/58/Rev.3) et ne pas dépasser 21 200 mots (voir la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale, par. 16). Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la résolution susmentionnée. S ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

68. Le Comité invite en outre l ’ État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l ’ établissement des rapports à présenter en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I), et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale.