Pacte international relatif aux droits civilset politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/CO/74/HUN*

25 septembre 2002

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMESoixante‑quatorzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIESEN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Hongrie

1.Le Comité a examiné le quatrième rapport périodique de la Hongrie (CCPR/C/HUN/2000/4) à ses 1993e et 1994e séances, tenues le 22 mars 2002 (CCPR/C/SR.1993 et 1994), et a adopté les observations ci‑après à sa 2005e séance (soixante‑quatorzième session), tenue le 2 avril 2002 (CCPR/C/SR.2005).

A. Introduction

2.Le Comité accueille le quatrième rapport périodique de l’État partie avec satisfaction et se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie. Il apprécie les détails et données statistiques supplémentaires fournis par celle‑ci pour compléter les renseignements figurant dans le rapport. Il souligne qu’il aurait été utile que ces informations soient incluses dans le rapport lui‑même, afin de lui permettre un examen plus approfondi.

B. Aspects positifs

3.Le Comité félicite l’État partie pour les progrès substantiels qu’il a réalisés dans le renforcement des institutions démocratiques relevant de sa juridiction. Il se félicite des mesures législatives et autres qui ont été prises pour mettre en place et consolider un régime de protection des droits de l’homme depuis la présentation du dernier rapport. Il note en particulier la mise en place d’un cadre pour la protection et la représentation électorale des minorités.

4.Le Comité se félicite de la contribution apportée par la Cour constitutionnelle au règlement des conflits entre la législation nationale et les obligations imposées par le Pacte.

5.Le Comité prend note des assurances données par l’État partie selon lesquelles les mesures prises pour lutter contre le terrorisme respecteront les garanties prévues dans le Pacte.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Si le Pacte a été incorporé dans l’ordre juridique interne et est directement applicable devant les tribunaux hongrois, dans la pratique tous les droits qu’il énonce ne sont pas garantis. Le Comité constate également avec inquiétude que, nonobstant l’article 26 du Pacte, il n’y a pas de texte législatif de portée générale contre la discrimination.

L’État partie est prié de prendre des mesures pour se doter d’une législation de portée générale contre la discrimination (art. 26).

7.Le Comité est profondément préoccupé par la situation des Roms qui, malgré les diverses mesures prises par l’État partie, demeurent défavorisés dans presque tous les aspects de la vie envisagés dan le Pacte. Il regrette en particulier la discrimination dont sont victimes les Roms dans les domaines de l’emploi, du logement, de l’éducation, de la sécurité sociale et de la participation à la vie publique. Le nombre excessivement élevé de Roms dans les prisons, les mauvais traitements dont ils seraient victimes pendant la garde à vue, et le maintien d’écoles séparées préoccupent également le Comité.

L’État partie devrait renforcer les mesures visant à améliorer la situation des Roms. Outre de nouvelles mesures législatives, la formation des fonctionnaires, en particulier des fonctionnaires de police, est fortement recommandée, ainsi qu’une vigoureuse campagne visant à modifier l’attitude de la population vis‑à‑vis des Roms. L’État partie devrait aussi mettre fin à la pratique consistant à placer les enfants roms dans des écoles spéciales ou des classes spéciales et donner la priorité à des mesures permettant à ces enfants de fréquenter les écoles et classes ordinaires (art. 26 et 27).

8.Le Comité regrette qu’aux termes de la nouvelle loi sur la procédure pénale, la garde à vue reste possible pendant une période allant jusqu’à 12 heures. Il se déclare préoccupé à la fois par la durée de la phase initiale de détention provisoire (jusqu’à 72 heures) et par les difficultés que les détenus éprouvent à contacter leur famille et à avoir accès à un avocat, en particulier lorsqu’ils n’ont pas les moyens d’engager leur propre avocat. Le Comité est aussi profondément préoccupé par la pratique continue de la détention provisoire dans les locaux de la police, où les risques de mauvais traitements sont élevés. En outre, il regrette vivement qu’aux termes de la loi la durée de la détention provisoire puisse atteindre trois ans.

L’État partie devrait envisager de supprimer ces dispositions de la nouvelle loi sur la procédure pénale, notamment celles autorisant la détention dans les postes de police pendant plus de 48 heures. Il devrait veiller à ce que sa législation et sa pratique soient compatibles avec l’article 9 du Pacte. Il devrait également appeler l’attention des juges sur les risques particuliers de mauvais traitements dans les locaux de la police, et prendre des mesures appropriées pour garantir le droit qu’ont les détenus de contacter leur famille et d’obtenir une assistance juridique (art. 7, 9 et 14).

9.Le Comité est préoccupé par le faible niveau de participation des femmes à la vie politique et par la ségrégation sur le marché du travail, ainsi que par le faible degré de représentation des femmes aux échelons supérieurs du gouvernement et du secteur privé.

L’État partie devrait appliquer des mesures constructives pour donner effet aux obligations qui lui incombent en vertu du Pacte d’assurer la participation égale des femmes tant dans le secteur public que dans le secteur privé (art. 3).

10.Le Comité regrette de continuer à recevoir des informations faisant état d’actes de violence dirigés contre les femmes, en particulier de viols et de harcèlement sexuel.

L’État partie devrait prendre des mesures plus énergiques pour encourager l’instauration d’une culture des droits de l’homme et interdire la violence contre les femmes; dans ce contexte, une formation et une édudation aux droits de l’homme sont essentielles à tous les niveaux et dans tous les secteurs de la société. L’État partie devrait en particulier prendre des mesures pour encourager les femmes à signaler aux autorités les cas de violence dans la famille, et pour obtenir des officiers de police qu’ils traitent avec plus de sensibilité les allégations de viol et se montrent plus attentifs à ses effets psychologiques sur la victime. Il devrait également envisager d’adopter d’autres lois sur la violence dans la famille, instituant notamment des ordonnances d’interdiction temporaire pour séparer les femmes des hommes de la famille enclins à la violence; et il devrait prévoir des abris et d’autres formes d’appui pour les victimes de la violence dans la famille (art. 3, 7 et 9).

11.Le Comité est préoccupé par le taux élevé de mortalité liée à la maternité en Hongrie et le fait que l’État partie ne fournit pas un appui suffisant à la planification de la famille par le biais de moyens efficaces de contraception.

L’État partie devrait prendre des mesures pour protéger la vie et la santé des femmes, par des mesures plus efficaces de planification de la famille et de contraception (art. 6).

12.Le Comité est préoccupé par le grand nombre d’informations qu’il reçoit au sujet de mauvais traitements exercés par les services de police, le nombre limité d’enquêtes menées par l’État partie en pareil cas, et le nombre très limité de condamnations dans les affaires faisant l’objet d’enquêtes.

L’État partie devrait prendre des mesures pour éduquer les autorités de police et les juges en vue de prévenir ce genre de traitements et, en cas de sévices, veiller à ce que des enquêtes approfondies soient menées et des poursuites engagées, si nécessaire. Il devrait également mettre en place un système indépendant d’enquête sur les plaintes relatives à des mauvais traitements exercés par des membres de la force publique (art. 7).

13.Le Comité constate avec inquiétude que, malgré la construction de nouveaux établissements pénitentiaires, les prisons continuent à être surpeuplées.

L’État partie devrait prendre des mesures pour réduire les motifs de détention prévus par la loi, pour encourager l’adoption de solutions autres que la détention, et pour construire, le cas échéant, de nouveaux établissements pénitentiaires (art. 10).

14.Le Comité note avec préoccupation les pratiques discriminatoires concernant l’enregistrement de certains groupes religieux en Hongrie et la protection limitée des droits religieux des demandeurs d’asile et des détenus. Il constate en outre que le processus de restitution des biens d’église n’a pas été achevé dans des délais raisonnables. Il relève enfin que les programmes d’éducation relatifs à la tolérance et à l’absence de discrimination fondée sur la religion ou la conviction sont insuffisants.

L’État partie devrait veiller à ce que les organisations religieuses ne soient pas traitées de manière incompatible avec le Pacte, renforcer la protection des droits religieux des demandeurs d’asile et des détenus, achever le processus de restitution des biens d’église sans discrimination, et entreprendre des actions éducatives de nature à promouvoir la tolérance et à éliminer la discrimination fondée sur la religion ou la conviction (art. 18 et 26).

15.Le Comité déplore que l’État partie ne donne pas d’informations sur les mesures prises pour assurer, dans la pratique, le respect des obligations qu’il a contractées aux termes de l’article 19 du Pacte.

L’État partie devrait fournir des informations adéquates à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

16.L’État partie devrait diffuser largement le texte de son quatrième rapport périodique et des présentes observations.

17.Conformément au paragraphe 5 de l’article 70 du règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait fournir, dans l’année qui vient, des informations sur toute mesure qu’il aura prise pour donner suite aux observations et recommandations du Comité sur la situation du peuple rom (par. 7) et sur la détention provisoire dans les locaux de la police (par. 8). Le Comité demande que des renseignements se rapportant à ses autres recommandations figurent dans le cinquième rapport périodique, qui doit être présenté avant le 1er avril 2007.

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