NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/CO/71/VEN/Add.525 avril 2007

FRANÇAISOriginal: ESPAGNOL

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMESoixante et onzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

VENEZUELA*

Additif

Commentaires du Gouvernement vénézuélien concernant les observations finales du Comité des droits de l’homme

[19 janvier 2007]

Observations finales du Comité des droits de l’homme concernant le troisième rapport périodique du Venezuela, conformément au Pacte international relatif aux droits civils et politiques

12. Bien que le Comité accueille en principe avec satisfaction la réforme du Code organique de procédure pénale, il se déclare préoccupé par le manque d’informations sur le contenu des dispositions du nouveau Code qui visent les garanties prévues à l’article 14 du Pacte.

Des réformes touchant les points qui préoccupent le Comité ont bien sûr été incluses dans le Code organique de procédure pénale (COPP); elles concernent: a) l’égalité des personnes devant la loi et les tribunaux; b) les décisions des tribunaux et/ou des cours de justice, c’est‑à‑dire les sentences, seront publiques et leur exécution sera obligatoire (les débats ne seront pas publics lorsque la protection des mineurs ou des adolescents l’exige); c) la présomption d’innocence a non seulement été confirmée dans ledit Code, mais elle a aussi toujours été établie dans les codes pénaux antérieurs; d) les garanties accordées aux personnes présumées coupables sont celles qui sont prévues à l’article 4 du Pacte; e) l’État vénézuélien s’efforcera de mettre en œuvre des politiques d’insertion des mineurs ayant commis une infraction pénale ou un délit; f) une fois la sentence pénale prononcée, la personne reconnue coupable aura la possibilité, conformément à la législation pénale en vigueur, de saisir les juridictions supérieures, y compris, le cas échéant, le Tribunal suprême de justice, en formation plénière, après que les recours antérieurs auront été épuisés; g) une personne dont le jugement est entaché de vices, tant de forme que de fond, pourra demander une réparation et une indemnisation, conformément à la législation nationale en vigueur.

À cet égard, il ne fait aucun doute que le Code organique de procédure pénale est conforme à l’article 14 du Pacte, dont il respecte les dispositions en matière de procès équitable, dispositions mentionnées dans ces deux instruments.

13. Le Comité est particulièrement préoccupé par la situation du pouvoir judiciaire vénézuélien, qui est toujours en voie de réorganisation. Un processus de réorganisation prolongée met en danger l’indépendance de ce pouvoir, le risque étant que les juges soient révoqués en conséquence de l’exercice de la fonction judiciaire, en violation du paragraphe 3 de l’article 2 et de l’article 14 du Pacte. Le Comité est également préoccupé par le manque d’informations sur les conséquences qu’a eues ce processus jusqu’à présent et par l’absence de date prévue pour son achèvement.

Le processus de réorganisation du pouvoir judiciaire, mené par la Commission de réorganisation, s’est achevé lorsqu’il a été mis fin aux fonctions de ladite Commission, voilà plusieurs années. On entend par indépendance judiciaire la capacité du juge de prendre des décisions sans subir de pressions externes ou internes. Cette notion n’est pas associée à un attribut personnel, puisque l’indépendance absolue des critères n’existe pas, d’une manière ou d’une autre, les personnes se font leur opinion sur les questions les plus diverses, l’environnement, l’économie, la politique, etc.

En ce sens, l’indépendance est davantage un comportement qu’une manifestation ontologique. Ainsi, pour le juge, c’est une manière d’agir de façon indépendante lorsqu’il prend une décision ou prononce une sentence. Il convient d’ajouter qu’il incombe à l’État d’organiser le système judiciaire de manière à favoriser l’indépendance des juges. Au Venezuela, celle‑ci est fondée sur les éléments suivants:

a)La sélection: Le candidat est choisi par la Commission judiciaire (il s’agit d’un organe technico‑auxiliaire de la formation plénière du Tribunal suprême de justice, composé de cinq magistrats) sur la base d’un ensemble de critères universitaires, démocratiques et moraux. L’intéressé sera juge à titre temporaire ou provisoire pendant une période d’un an, au cours de laquelle il devra rigoureusement se conformer aux obligations de sa fonction. Il peut être destitué sur simple ordre d’un supérieur.

b)La stabilité du juge: Passé le délai d’un an, le juge provisoire fait l’objet d’une évaluation destinée à déterminer sa capacité et son aptitude professionnelles (nombre d’audiences, de sentences, etc.), et il est soumis à des tests psychologiques et à des examens médicaux; il suit ensuite un cours de préparation, à l’issue duquel il doit passer un concours, comportant des épreuves écrites, orales et pratiques portant sur des matières juridiques générales et de sa spécialité. Le juge qui réussit les évaluations et le concours est titularisé, et jouit donc d’une stabilité professionnelle à vie. Après cela, il ne peut être destitué que pour faute disciplinaire, conformément à la loi, et après une procédure au cours de laquelle son droit constitutionnel de bénéficier d’une défense et d’un procès équitable est respecté.

Il convient de souligner que la formation plénière du Tribunal suprême de justice a approuvé, le 1er juin 2005, les normes d’évaluation et les concours pour l’admission à la carrière judiciaire et la promotion; à partir de cette date, des concours ont été organisés sur la base de ces normes.

c)L’École nationale de la magistrature: Il s’agit de l’établissement universitaire qui assure la formation des juges et leur évaluation s’agissant de leur admission dans la carrière judiciaire et de leur mobilité verticale, des juridictions inférieures aux juridictions supérieures. Cette année, l’École sera transformée en institut universitaire supérieur, une convention ayant déjà été signée à cette fin avec le Ministère de l’enseignement supérieur.

d)Le code de déontologie du juge: À l’heure actuelle, cette question est régie par des normes figurant dans divers textes législatifs, antérieurs à la Constitution de 1999. Cela étant, les critères ont été unifiés dans un instrument légal unique (le «Código del subtítulo»), qui est actuellement examiné par l’Assemblée nationale, et deviendra prochainement une loi de la République. Ce code comporte une partie qui énonce les règles et les principes applicables à la conduite morale du juge, et une autre qui établit les procédures applicables au juge sur le plan disciplinaire.

e)L’Inspection nationale des tribunaux: Cet organisme est chargé d’inspecter les tribunaux et d’établir des rapports. C’est sur la base de ses conclusions que sont éventuellement engagées les procédures disciplinaires contre les juges.

f)La sécurité sociale des juges et des auxiliaires de justice: Outre le fait qu’ils sont correctement rémunérés, les juges et le personnel administratif bénéficient d’une large couverture sociale qui comprend les soins médicaux et l’hospitalisation, pour eux‑mêmes et les membres de leur famille proche (parents, conjoint et enfants), ainsi que des garderies, des écoles qui assurent le transport des enfants, des prestations sociales versées annuellement sur un compte bancaire, une assurance décès, et d’autres avantages.

g)L’indépendance économique du pouvoir judiciaire: Conformément à la Constitution, le budget du pouvoir judiciaire ne doit pas être inférieur à 2 % du budget de l’État au minimum.

h)Situation actuelle au sujet des juges titulaires au Venezuela: En 2000, la situation était la même que celle qui a prévalu au cours des cinquante dernières années: moins de 18 % des juges étaient titularisés. Les évaluations et les concours organisés l’année dernière ont permis de titulariser 60 % des juges.

Les listes de magistrats convoqués à des concours et les calendriers des concours ont été publiés dans la presse, et peuvent également être consultés sur la page Web de l’École nationale de la magistrature (http://enm.tsj.gov.ve/formacion/formacionDocentes.asp):

1.Convocation à un concours de juges non titulaires de catégorie A, communiqué de presse du 6 octobre 2005;

2.Convocation à un concours de juges non titulaires des catégories B et C, communiqué de presse du 10 novembre 2005;

3.Liste définitive des juges des catégories B et C participant aux concours du 21 au 23 novembre 2005, publiée le vendredi 18 novembre 2005;

4.Convocation à un concours des juges non titulaires des catégories B et C II, communiqué de presse du 26 novembre 2005;

5.Nouveau calendrier pour les concours de la catégorie «A» (contentieux administratif, fiscal, agraire et maritime), 2 décembre 2005;

6.Nouveau calendrier pour les concours des catégories «A», «B» et «C» qui auront lieu entre le 6 et le 15 décembre 2005, communiqué de presse du 2 décembre 2005;

7.Liste définitive des juges des catégories A, B et C participant aux concours du 6 au 15 décembre 2005, communiqué de presse du 5 décembre 2005.

À ce jour, 200 juges ont prêté serment et des concours continuent d’être organisés, de manière à ce que 95 % des 1 860 juges soient titularisés d’ici à la fin de l’année. Sur l’ensemble des juges qui étaient en fonctions en 2000, 400 seulement ont été destitués, et ce au vu des résultats du processus d’évaluation et des concours.

i)Le Tribunal suprême de justice: C’est l’instance suprême de révision du droit dans le système judiciaire vénézuélien, et l’organe chargé de la cassation. En outre, le Tribunal suprême de justice dirige la magistrature, c’est-à-dire qu’il administre le pouvoir judiciaire, nomme les juges, les promeut, s’occupe du personnel auxiliaire, de la construction des bâtiments qui rendent la justice, de l’organisme national de la défense, de l’Inspection générale des tribunaux, de l’École nationale de la magistrature, de la Commission judiciaire et du système disciplinaire. Sur les 32 magistrats qui le composent, 4 occupent des fonctions de direction de la magistrature au sein de la direction exécutive de la magistrature, de l’Inspection nationale des tribunaux, de l’organisme national de la défense et de l’École nationale de la magistrature, et 5 sont membres de la Commission judiciaire. C’est essentiellement pour cette raison que le nombre de magistrats a été porté de 20 à 32 lors de l’approbation de la loi organique du Tribunal suprême de justice en 2004. L’organisme national de défense est l’organe chargé de fournir aux citoyens ayant de faibles revenus du personnel judiciaire, tel qu’assesseurs, avocats de la défense en matière pénale ou avocats assistants chargés de les représenter devant toute autre juridiction. La Commission judiciaire est l’instance technique qui procède à l’évaluation des juges provisoires ou temporaires et propose leur nomination ou leur suspension à la formation plénière, qui est l’organe chargé de les nommer et de les destituer. Comme indiqué plus haut, la procédure pour la désignation de juges titulaires est totalement distincte.

j)La nomination des magistrats du Tribunal suprême de justice: La Constitution de la République bolivarienne du Venezuela prévoit une procédure en vertu de laquelle l’Assemblée nationale nomme un comité de candidatures judiciaires qui reçoit les propositions d’organisations de la société civile, des universités et des candidats motu proprio; ce comité examine les titres universitaires et professionnels des candidats, et vérifie qu’ils remplissent les conditions prévues par la Constitution pour exercer cette charge. Le Comité dresse une liste comportant les noms des postulants, qui est publiée dans la presse nationale, et fixe un délai pendant lequel les citoyens peuvent présenter des objections et des contestations; à l’issue de ce délai, il procède à des entrevues individuelles et effectue une première sélection qu’il communique au Conseil moral républicain (qui est le cinquième pouvoir, l’autre étant le pouvoir électoral, tous deux s’ajoutant aux trois pouvoirs traditionnels). Le Conseil moral républicain, qui regroupe le Procureur général de la République, l’Inspecteur général de la République et le Défenseur du peuple, effectue une seconde sélection qui est transmise à l’Assemblée nationale, laquelle prend la décision finale. La durée du mandat des magistrats est de douze ans, sans possibilité de renouvellement.

14. La préoccupation du Comité à propos de l’indépendance du pouvoir judiciaire concerne également les informations fournies par la délégation selon lesquelles l’article 275 de la Constitution permettrait au Conseil moral républicain, qui est composé du Défenseur public, du Procureur général et du Contrôleur général, d’adresser des informations aux magistrats des tribunaux, y compris à ceux de la Cour suprême, le non ‑respect de ces observations pouvant entraîner l’imposition de sanctions.

Les articles 256 et suivants de la Constitution de la République bolivarienne du Venezuela établissent clairement l’indépendance et l’autonomie du pouvoir judiciaire. Les avertissements dont il est question à l’article 275 ejusdem concernent les fonctionnaires de l’administration publique, étant entendu que cette expression fait référence au pouvoir exécutif.

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