Pacte international relatif aux droits civilset politiques

Distr.

LIMITÉE

CCPR/CO/74/SWE/Add.1

14 mai 2003

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

COMMENTAIRES DU GOUVERNEMENT SUÉDOIS AU SUJET DES OBSERVATIONS FINALES DU COMITÉ DES DROITS DE L’ HOMME ( CCPR /CO/74/ SWE )

[6 mai 2003]

1.Dans ses observations finales (CCPR/CO/74/SWE), le Comité des droits de l’homme a prié le Gouvernement suédois de lui fournir des renseignements pertinents, en particulier sur: a) les mesures prises dans le cadre de la campagne internationale contre le terrorisme et leur conformité avec les dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et b) la pratique et la tradition de respect par la Suède du principe de non‑refoulement, en particulier lorsqu’elle expulse une personne vers un autre État sur la base d’assurances quant au traitement de cette personne par l’État de destination.

2.En outre, le Comité a prié le Gouvernement suédois c) de lancer une campagne d’éducation à travers les médias afin de préserver les populations d’origine étrangère, en particulier les Arabes et les musulmans, des stéréotypes les associant au terrorisme, à l’extrémisme et au fanatisme. Le Gouvernement suédois fournit ci‑après les renseignements demandés par le Comité.

Mesures de lutte contre le terrorisme prises conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques

3.La Suède a ratifié toutes les conventions de droit pénal international visant l’élimination du terrorisme.

4.Le dernier instrument que la Suède a ratifié est la Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme. La ratification a eu lieu le 6 juin 2002 et le 1er juillet 2002, une nouvelle loi relative à la répression du financement des infractions graves est entrée en vigueur. Conformément à cette loi, constitue une infraction le fait de fournir, de rassembler ou de recevoir des fonds ou autres ressources financières que l’on prévoit d’utiliser ou dont on sait qu’ils seront utilisés pour commettre des infractions graves qualifiées d’actes de terrorisme dans les conventions internationales. La tentative est également punie par la loi. Les banques et les institutions financières sont tenues – comme en cas de soupçon de blanchiment d’argent – de surveiller et de signaler à la police les transactions dont elles soupçonnent qu’elles portent sur des fonds qui seront utilisés pour financer des infractions graves.

5.Une décision‑cadre relative à la lutte contre le terrorisme a été adoptée en juin 2002 par l’Union européenne. Elle contient une définition des actes qui doivent être considérés comme des infractions terroristes. En vue de s’acquitter des obligations qui y sont énoncées, le Gouvernement a soumis au Parlement suédois (Riksdag) une proposition incluant notamment un nouveau projet de loi relatif à des actes de terrorisme précis. Le Riksdag a approuvé le projet de loi et la nouvelle législation entrera en vigueur en juillet 2003.

6.La Constitution suédoise contient des règles de procédure relatives à l’adoption d’une nouvelle législation. Lorsqu’une nouvelle législation est élaborée, les renseignements et les avis nécessaires sont toujours recueillis auprès des autorités concernées. Selon qu’il convient, il est offert aux organisations et aux particuliers la possibilité de faire connaître leur opinion (Constitution, chap. 7, art. 2).

7.Composé de juges de la Cour suprême et de la Cour administrative suprême, le Conseil de la législation s’exprime au sujet des projets de loi. Il doit notamment examiner la compatibilité du projet avec les lois organiques et le système juridique dans son ensemble (voir Constitution, chap. 8, art. 18).

8.Conformément à la Constitution, aucune loi ni disposition ne peut être adoptée si elle est contraire aux engagements de la Suède en vertu de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (voir Constitution, chap. 2, art. 23). L’une des obligations du Conseil de la législation est de s’assurer que la nouvelle législation n’est pas incompatible avec la Convention. Il va sans dire que le Conseil interviendrait également s’il jugeait qu’un projet de loi est incompatible avec tout autre engagement international contracté par le Gouvernement suédois dans le domaine des droits de l’homme, notamment en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

Respect du principe de non ‑refoulement

9.Les dispositions de base relatives au droit des étrangers d’entrer et de demeurer en Suède figurent dans la loi sur les étrangers de 1989. Cette loi définit notamment les conditions dans lesquelles un étranger peut se voir refuser l’entrée sur le territoire suédois ou en être expulsé.

10.Tout étranger qui est considéré comme réfugié ou ayant besoin d’une protection peut prétendre, avec certaines exceptions, à un permis de séjour en Suède. Ce permis peut toutefois être refusé, notamment si des circonstances exceptionnelles le justifient. Le refus peut être dû à ce que l’on sait des activités de l’étranger par le passé ou à des raisons de sécurité nationale. Il convient de souligner que cette disposition est conforme à la Convention relative au statut des réfugiés de 1951.

11.Un étranger qui n’a pas obtenu un permis de séjour peut être expulsé. Toutefois, dès le moment où cette décision est prise et pendant qu’elle est effectivement appliquée, il faut prendre en considération les risques auxquels l’intéressé peut être exposé à son retour dans son pays d’origine. Ainsi, un étranger ne doit jamais être renvoyé dans un pays lorsqu’il y a des raisons sérieuses de penser qu’il risquerait de se voir infliger la peine capitale ou des châtiments corporels ou d’être soumis à la torture ou à d’autres peines ou traitements inhumains ou dégradants, ou encore s’il risque d’être persécuté.

12.Outre la législation susmentionnée, le Gouvernement suédois doit également respecter la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité selon laquelle tous les États sont priés de refuser de donner asile à ceux qui financent, organisent, appuient ou commettent des actes de terrorisme ou en recèlent les auteurs. En outre, conformément à la résolution, tous les États doivent prendre les mesures appropriées, conformément aux dispositions pertinentes de leur législation nationale et du droit international, y compris les normes internationales relatives aux droits de l’homme, afin de s’assurer, avant d’octroyer le statut de réfugié, que le demandeur d’asile n’a pas organisé ou facilité la perpétration d’actes de terrorisme et n’y a pas participé. De plus, tous les États doivent veiller, conformément au droit international, à ce que ceux qui commettent, organisent ou facilitent des actes de terrorisme ne détournent pas à leur profit le statut de réfugié.

13.Dans des circonstances particulières et, de fait, exceptionnelles, le Gouvernement suédois a expulsé deux personnes dans leur pays d’origine sur la base d’assurances quant au traitement de ces personnes par l’État de destination. Sans les garanties en question, cette expulsion n’aurait pu être envisagée.

14.Avant la décision d’expulsion, qui a été prise le 18 décembre 2001 et mise en application peu après, des assurances quant au traitement des intéressés ont été fournies par l’État de destination. Le Gouvernement suédois a exigé que les personnes en question bénéficient d’un procès équitable, qu’elles ne soient pas soumises à la torture ou à d’autres traitements inhumains et qu’elles ne soient ni condamnées à mort ni exécutées. En outre, selon l’accord passé entre les deux gouvernements, le procès à venir serait surveillé par la Suède et celle-ci serait autorisée à effectuer des visites périodiques dans la prison où les intéressés seraient détenus. Sur la base des assurances qui lui avaient été fournies, le Gouvernement suédois a estimé qu’il y avait une garantie suffisante de sécurité conformément au droit international et que la Suède ne violait donc pas ses obligations en vertu du droit international.

15.Le Gouvernement suédois a établi un mécanisme pour le suivi de l’affaire. L’Ambassadeur de la Suède dans l’État de destination rend régulièrement visite aux intéressés (environ chaque mois) dans la prison où ils sont détenus. En outre, il rencontre périodiquement les autorités compétentes. De plus, un haut responsable du Ministère des affaires étrangères a été chargé cette année de toutes les actions et mesures en rapport avec cette affaire, et notamment de participer régulièrement aux visites à la prison et aux réunions avec les autorités compétentes. Il va sans dire que le Gouvernement suédois continuera à suivre cette affaire ainsi que le procès qui doit avoir lieu.

16.L’ affaire mentionnée ci-dessus est exceptionnelle et c’est la toute première fois que le Gouvernement suédois expulse des personnes vers un pays sur la base de garanties fournies par celui‑ci. Le Gouvernement suédois est d’avis que les assurances qu’il a obtenues de l’État de destination sont satisfaisantes et irrévocables et qu’elles sont et seront respectées pleinement. Il n’a reçu aucune information qui puisse susciter des doutes quant à cette conclusion. En outre, un mécanisme de suivi satisfaisant fonctionne depuis plus d’un an.

17.Enfin, dans ce contexte, le Gouvernement souhaite appeler l’attention du Comité sur le rapport intérimaire (A/57/173, 2 juillet 2002) présenté par M. Theo van Boven, Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la question de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans son rapport, le Rapporteur spécial a demandé à tous les États «de veiller à ce qu’en aucun cas les personnes qu’ils ont l’intention d’extrader, pour qu’elles répondent du chef de terrorisme ou d’autres chefs, ne soient livrées, à moins que le gouvernement du pays qui les reçoit ne garantisse de manière non équivoque aux autorités qui extradent les intéressés que ceux‑ci ne seront pas soumis à la torture ou à aucune autre forme de mauvais traitement lors de leur retour et qu’un dispositif n’ait été mis en place afin de s’assurer qu’ils soient traités dans le plein respect de la dignité humaine» (par. 35).

Campagne d’éducation à travers les médias

18.Le Gouvernement suédois estime qu’il importe au plus haut point de protéger les personnes d’origine étrangère des stéréotypes et de la discrimination qui en découle. Néanmoins, il sait d’expérience qu’il existe des moyens plus efficaces pour atteindre cet objectif crucial que de lancer des campagnes dans les médias.

19.De manière très générale, les efforts globaux visant à combattre le racisme et la xénophobie ont également, dans une large mesure, un impact sur l’islamophobie. Les efforts du Gouvernement pour prévenir et combattre l’islamophobie reposent sur un cadre juridique efficace – et mis en œuvre –, associé au travail du Comité suédois pour l’intégration et du Médiateur contre la discrimination ethnique. En 2001, le Gouvernement a adopté un plan national d’action contre le racisme, la xénophobie, l’homophobie et la discrimination, qui est à présent largement appliqué. Les initiatives ci‑après prises dans le cadre de la mise en œuvre du plan d’action peuvent être intéressantes dans ce contexte:

Le Comité suédois pour l’intégration a créé sur Internet une «banque de savoir» contenant des renseignements relatifs aux expériences et méthodes, en Suède et dans d’autres pays, pouvant être mises à profit dans la lutte contre le racisme, la xénophobie et la discrimination ethnique;

Le Comité suédois pour l’intégration, en coopération avec l’Association des autorités locales suédoises, a mis en place un service de conseil et d’appui à l’intention des autorités locales et d’autres entités qui ont besoin d’être soutenues dans leur combat contre le racisme et les autres formes d’intolérance;

Le Médiateur contre la discrimination ethnique et le Bureau national pour l’intégration ont contribué à la constitution d’un réseau d’agences locales de lutte contre la discrimination. L’État a alloué des ressources à cette fin;

Le Gouvernement a décidé de financer le travail effectué localement par des organisations de jeunes en vue de combattre le racisme, la xénophobie et la discrimination durant la période 2001‑2003.

20.Deux organes sont spécifiquement chargés de combattre le racisme et les autres formes d’intolérance. En juin 2003, une nouvelle autorité, le Forum pour l’histoire vivante (Forum for Living History), sera créée. Elle encouragera les gens à travailler activement pour défendre le principe selon lequel tous les êtres humains sont de valeur égale et à appuyer les activités en faveur de la démocratie et des droits de l’homme à l’époque actuelle, dans une perspective historique, celle de l’holocauste et de l’histoire contemporaine suédoise. Ses principaux domaines d’action seront la sensibilisation, la culture et l’éducation. Afin d’encourager et d’appuyer les travaux des ONG dans ce domaine, le Gouvernement a décidé de financer un organisme indépendant, le Centre contre le racisme et l’intolérance qui y est associée, qui sera géré par une association d’ONG. Le Centre commencera ses activités en 2003. L’une de ses missions explicites sera la lutte contre l’islamophobie.

21.En janvier 2002, le Gouvernement a adopté et présenté au Parlement la communication écrite «Plan d’action suédois pour les droits de l’homme» (2001/02:83), qui couvre la période 2002‑2004. Ce plan décrit notamment les responsabilités de la Suède et le rôle des différents acteurs concernant les questions relatives aux droits de l’homme. Il décrit également certaines questions prioritaires telles que les droits des minorités nationales et la lutte contre le racisme, la xénophobie et la discrimination ethnique. En vue de renforcer la promotion et la protection des droits de l’homme, le plan d’action souligne l’importance de l’éducation et de l’information relatives aux droits de l’homme.

22.Le Forum pour l’histoire vivante, mentionné ci‑dessus, aura un mandat de large portée étroitement aligné sur les objectifs qui sous‑tendent le Plan d’action suédois pour les droits de l’homme. Le Forum jouera un rôle important dans la mise en œuvre du Plan d’action, en particulier en ce qui concerne l’éducation et l’information dans le domaine des droits de l’homme et la création de points de rencontre pour les ONG, les autorités nationales, les municipalités et les autres acteurs compétents.

23.Le site Internet du Gouvernement pour les droits de l’homme (www.manskligarattigheter.gov.se) est un élément essentiel de l’action du Gouvernement pour mieux faire connaître des droits de l’homme. On peut y trouver des renseignements sur les droits de l’homme et des documents pertinents tels que les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, les rapports que la Suède présente aux organes conventionnels et les conclusions de ces derniers, etc.

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