Pacte international relatif aux droits civilset politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/CO/74/SWE

24 avril 2002

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMMESoixante-quatorzième session

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIESEN VERTU DE L’ARTICLE 40 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits de l’homme

Suède

1.Le Comité a examiné le cinquième rapport périodique de la Suède (CCPR/C/SWE/2000/5) à ses 1989e et 1990e séances (CCPR/C/SR.1989 et CCPR/C/SR.1990), tenues le 20 mars 2002, et a adopté les observations finales ci‑après à ses 2003e et 2004e séances (CCPR/C/SR.2003 et CCPR/C/SR.2004), le 1er avril 2002.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son rapport, en temps voulu et conformément aux directives en la matière. Il note avec satisfaction que ce rapport contient des informations utiles sur l’évolution de la situation depuis l’examen du quatrième rapport périodique. Le Comité se félicite également des réponses qui lui ont été données aux questions posées et aux préoccupations exprimées lors de l’examen du rapport. Il souligne en outre la franchise du dialogue engagé avec la délégation et les éclaircissements utiles apportés oralement. Enfin, il relève avec appréciation l’importance accordée par la délégation au rôle des organisations non gouvernementales dans la promotion et la protection des droits de l’homme et à leur contribution au respect du Pacte.

B. Aspects positifs

3.Le Comité se félicite de l’adoption:

a)En janvier 2002, du Plan national d’action pour les droits de l’homme dont les domaines prioritaires sont la protection contre la discrimination, les droits des personnes handicapées, des enfants et des personnes âgées, le droit au logement, les minorités nationales, la population samie, la privation de liberté ainsi que la liberté d’expression et de religion;

b)En février 2001, du Plan national d’action contre le racisme, la xénophobie, l’homophobie et la discrimination;

c)En 1997, du Plan national d’action contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales.

4.Le Comité relève avec satisfaction la modification apportée à la législation afin de permettre, depuis le 1er janvier 2002, aux enfants demandeurs d’asile d’accéder à l’enseignement préscolaire, primaire et secondaire, ainsi qu’aux soins médicaux dans les mêmes conditions que les enfants résidant en Suède.

5.Le Comité félicite l’État partie du rôle toujours actif qu’il joue auprès de la communauté internationale en faveur de l’abolition de la peine de mort.

C. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

6.Tout en se félicitant de la manière avec laquelle les tribunaux font référence au Pacte dans l’interprétation des droits, le Comité regrette que le Pacte en tant que tel ne puisse pas être invoqué directement devant les tribunaux suédois ni devant les autorités administratives. Il note à ce sujet que dans certains domaines (droits visés aux articles 25, 26 et 27) le Pacte assure une plus grande protection que la Convention européenne des droits de l’homme, qui a été incorporée au droit interne.

L’État partie devrait s’assurer que sa législation donne plein effet aux dispositions du Pacte et que des recours soient disponibles pour l’exercice de ces droits.

7.Le Comité note avec préoccupation la persistance, malgré les textes législatifs adoptés par l’État partie, de la violence domestique (art. 3 et 7 du Pacte).

L’État partie devrait poursuivre sa politique de lutte contre la violence domestique et, dans ce cadre, prendre des mesures plus efficaces pour la prévenir et venir en aide aux victimes.

8.Le Comité relève, avec préoccupation, des cas d’excision et de «crimes d’honneur» affectant des jeunes filles et des femmes d’origine étrangère (art. 3, 6 et 7 du Pacte).

L’État partie devrait poursuivre ses efforts afin de prévenir et de faire cesser ces pratiques. Il devrait en particulier veiller à ce que des poursuites soient engagées à l’encontre de leurs auteurs, tout en assurant la promotion d’une culture des droits de l’homme dans la société tout entière, spécialement les secteurs les plus vulnérables issus de l’immigration.

9.Le Comité se déclare préoccupé par la reconnaissance des mariages précoces des jeunes filles de nationalité étrangère établies en Suède (art. 3 et 26 du Pacte).

L’État partie devrait prendre des mesures vigoureuses en vue d’assurer une meilleure protection des mineurs relativement au mariage et d’éliminer toute forme de discrimination entre eux.

10.Le Comité constate avec inquiétude plusieurs cas d’usage excessif de la force par la police ayant entraîné de graves blessures et des décès, par exemple lors de la détention ou à l’occasion du Sommet de Göteborg (art. 6, 7 et 10 du Pacte).

L’État partie devrait s’assurer de l’aboutissement en toute transparence, au moyen d’un mécanisme indépendant des forces de l’ordre, des enquêtes sur ces cas de violence, et diligenter, selon les résultats des investigations, des poursuites à l’encontre des membres des forces de l’ordre mis en cause. L’État partie devrait en outre garantir une meilleure formation du personnel de police dans le domaine des droits de l’homme. Pendant les manifestations, l’État partie devrait veiller à ce que des équipements susceptibles de mettre en danger la vie des personnes ne soient pas utilisés.

11.Le Comité note l’absence de clarté en ce qui concerne le droit de l’accusé à l’assistance d’un avocat d’office et aux services d’un interprète (art. 14 du Pacte).

L’État partie est invité à fournir les éclaircissements nécessaires afin que le Comité ait l’assurance que la législation et la pratique dans ce domaine sont compatibles avec l’article 14 du Pacte.

12.Tout en comprenant les exigences de sécurité liées aux événements du 11 septembre 2001, et en prenant acte de l’appel au respect des droits de l’homme dans le cadre de la campagne internationale contre le terrorisme lancée par la Suède, le Comité fait part de sa préoccupation quant aux effets de cette campagne sur la situation des droits de l’homme en Suède, en particulier pour les personnes d’origine étrangère. Il est préoccupé par les cas d’expulsion vers leur pays d’origine de demandeurs d’asile soupçonnés de terrorisme. Malgré des assurances que leurs droits fondamentaux seront respectés, il peut y avoir dans ces pays des risques pour l’intégrité physique et la vie des personnes expulsées, surtout en l’absence de dispositions suffisamment sérieuses pour vérifier l’observation de ces garanties (deux visites par l’Ambassade en trois mois, la première seulement cinq semaines après le retour et sous la supervision des autorités carcérales) (art. 6 et 7 du Pacte). Le Comité souligne également les risques d’atteinte aux droits fondamentaux des personnes d’origine étrangère (liberté d’expression et droit à la vie privée) notamment par un recours accru aux écoutes téléphoniques secrètes et en raison d’un climat latent de suspicion à leur encontre (art. 13, 17 et 19 du Pacte).

a)L’État partie doit veiller à ce que les mesures prises dans le cadre de la campagne internationale contre le terrorisme soient pleinement conformes aux dispositions du Pacte. Il lui est demandé de veiller à ce que la crainte du terrorisme ne soit pas une source d’abus.

b)L’État partie devrait en outre maintenir sa pratique et sa tradition de respect du principe de non‑refoulement. Lorsqu’un État partie expulse une personne vers un autre État sur la base d’assurances quant au traitement de cette personne par l’État de destination, il doit instaurer des mécanismes crédibles afin de s’assurer que l’État de destination observe, dès l’expulsion, les garanties données.

c)L’État partie est également engagé à lancer une campagne d’éducation à travers les médias afin de préserver les populations d’origine étrangère, en particulier les Arabes et les musulmans, des stéréotypes les associant au terrorisme, à l’extrémisme et au fanatisme.

13.Le Comité se déclare préoccupé par les informations faisant état de la persistance de manifestations de racisme et de xénophobie, qu’il s’agisse du refus d’entrée dans des lieux publics pour des raisons d’appartenance ethnique, ou des difficultés rencontrées par les étrangers sur le marché de l’emploi (art. 19 et 26 du Pacte).

L’État partie devrait faire des efforts soutenus en vue d’une meilleure application de la législation réprimant les délits commis pour motifs racistes, de l’intégration dans la société des personnes appartenant à des minorités et de la diffusion d’une culture de tolérance en particulier dans le cadre de la scolarité primaire et secondaire.

14.Le Comité est profondément préoccupé par l’existence et l’important activisme d’organisations néonazies ainsi que par la production et la diffusion de la musique dite du «pouvoir blanc» prônant la supériorité de la race blanche (art. 20 du Pacte).

L’État partie devrait prendre des dispositions tendant à revoir sa politique concernant la création et le maintien d’organisations racistes et xénophobes et, en particulier, néonazies. Il devrait également revoir sa position à l’égard de la production et de la diffusion de la musique dite du «pouvoir blanc».

15.Le Comité se déclare préoccupé de ce que le Parlement sami n’a que des possibilités limitées de jouer un véritable rôle dans le processus de décision sur des questions touchant les terres ancestrales et les activités économiques des autochtones samis, telles que les projets hydroélectriques, miniers et forestiers, ainsi que dans le domaine de la privatisation des terres (art. 25, par. 1, 25 et 27 du Pacte).

L’État partie devrait prendre des dispositions pour faire participer davantage les Samis de façon qu’ils aient une influence dans la prise des décisions touchant leur environnement naturel et leurs moyens de subsistance.

16.L’État partie devrait donner une large diffusion au texte de son cinquième rapport périodique et aux présentes observations finales.

17.Conformément au paragraphe 5 de l’article 70 du règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait adresser dans un délai d’un an des renseignements sur la suite donnée aux recommandations du Comité figurant au paragraphe 12, relatives notamment au suivi des cas d’expulsion. Le Comité demande à l’État partie de communiquer dans son prochain rapport, qu’il doit soumettre d’ici au 1er avril 2007, des informations sur les autres recommandations qu’il a faites et sur l’application du Pacte dans son ensemble.

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