Nations Unies

CAT/C/SR.1152

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

24 mai 2013

Original: français

Comité contre la torture

Cinquantième session

Co mpte rendu analytique de la première partie (publique)* de la 1152 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 21 mai 2013, à 10 heures

Président e: Mme Gaer (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique du Japon

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique du Japon(CAT/C/JPN/2; CAT/C/JPN/Q/2; HRI/CORE/JPN/2012)

1. Sur l ’ invitation de la Présidente, la délégation japonaise prend place à la table du Comité.

2.M. Ueda (Japon) dit que depuis l’examen de son rapport initial (CAT/C/JPN/1) en mai 2007, le Japon a réalisé de nombreux progrès dans l’application de la Convention, comme le montre le rapport à l’examen. Ce deuxième rapport périodique a été établi avec le concours des ministères et organismes publics compétents et celui de la société civile, y compris d’organisations non gouvernementales (ONG), dont le Gouvernement reconnaît qu’elles jouent un rôle important dans la promotion du respect des droits de l’homme.

3.Les mesures prises en avril 2008 par le parquet pour garantir la régularité des procédures d’interrogatoire prévoient que lorsqu’un suspect ou son conseil expose à un procureur des griefs concernant un interrogatoire, celui-ci doit en référer au procureur chargé de l’affaire, lequel procède sans délai à une enquête et prend les mesures nécessaires en veillant autant que possible à informer l’intéressé de la suite donnée à sa plainte. En outre, en juillet 2011, une unité d’inspection a été créée au sein du Bureau du Procureur général; elle est chargée d’enquêter entre autres sur tout manquement ou infraction imputé à des procureurs et de faire des recommandations en conséquence. La Police nationale a de son côté élaboré en janvier 2008 une politique visant à garantir la régularité des interrogatoires menés dans le cadre des enquêtes de police qui met l’accent sur le renforcement de la surveillance des interrogatoires, notamment de leur durée, et sur la formation des enquêteurs aux bonnes pratiques en la matière. Reconnaissant l’utilité de l’enregistrement des interrogatoires, notamment pour vérifier que les aveux ont été faits spontanément, le Gouvernement a étendu cette pratique à titre expérimental. Une réforme du système de justice pénale prévoyant la systématisation de l’enregistrement audiovisuel des interrogatoires est actuellement à l’étude au Ministère de la justice, et un rapport sur cette question devrait être remis au Gouvernement prochainement.

4.La séparation des fonctions d’enquête et de détention est expressément prévue par la loi relative aux établissements pénitentiaires et autres lieux de détention et au traitement des détenus, entrée en vigueur en 2007, et est scrupuleusement respectée par la Police nationale. En application de cette loi et afin de garantir le respect des droits de l’homme par les membres des forces de l’ordre dans l’exercice de leurs fonctions, des visites sont régulièrement effectuées dans les lieux de détention par des fonctionnaires de la Direction de la Police nationale ou des préfectures de police ainsi que par le Comité d’inspection des lieux de détention. De plus, un mécanisme permettant de recueillir les plaintes des détenus a été mis en place. Le Japon ne veille pas seulement à la protection des droits fondamentaux de ses nationaux; il veille également à celle des droits des étrangers. En juillet 2009, la loi relative au contrôle de l’immigration et à la reconnaissance du statut de réfugié a été modifiée de manière à préciser que nul ne peut être expulsé vers un pays où des infractions à la Convention contre la torture ou à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées risquent d’être commises. Des mesures ont également été prises pour améliorer la gestion des centres de rétention pour étrangers et renforcer la surveillance de ces établissements, et un accord avec la Fédération des barreaux du Japon garantit désormais l’accès des étrangers retenus dans ces centres à l’assistance gratuite d’un avocat.

5.Le Japon est devenu partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale le 1er octobre 2007, démontrant ainsi sa volonté de combattre l’impunité des crimes les plus graves, y compris la torture. La formation de l’ensemble des agents de l’État comprend un enseignement des principes énoncés dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, que le Japon entend intensifier à l’avenir. Les procureurs, les membres des forces de l’ordre, les agents pénitentiaires et les fonctionnaires de l’immigration en particulier reçoivent en la matière une formation approfondie en fonction de leurs domaines de compétence respectifs et de leur niveau d’expérience. Le Gouvernement japonais est déterminé à éradiquer la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, à améliorer la situation des droits de l’homme dans le pays et à promouvoir ces droits dans le monde, en particulier en Asie et dans le Pacifique, et s’engage à cette fin à collaborer étroitement avec le Comité contre la torture, les institutions des Nations Unies, les États parties et la société civile.

6.M. Mariño Menéndez (Rapporteur pour le Japon), relevant que le droit pénal de l’État partie ne prévoit toujours pas l’incrimination de torture, dit que l’absence dans la législation nationale d’une définition de la torture comprenant tous les éléments énoncés à l’article premier de la Convention peut faire obstacle à l’application de la Convention, notamment de son article 3, ainsi que d’autres normes internationales employant la notion de torture. Il souhaiterait savoir si l’État partie entend remédier à cette lacune. En ce qui concerne les dispositions du Code pénal qui punissent les violences et les actes de cruauté commis par des agents de l’État exerçant des fonctions spéciales, qui lui semblent indûment restrictives, il demande des précisions sur les catégories de fonctionnaires visées.

7.Quarante-huit heures après son arrestation, un suspect peut être placé soit dans un centre de détention administré par la police («Daiyo Kangoku»), soit dans un centre de détention sous l’autorité du parquet. La délégation voudra bien expliquer selon quels critères s’opère cette distinction. Le fait que les enquêtes de police demeurent essentiellement axées sur l’obtention d’aveux accroît le risque que des méthodes extrêmes soient utilisées à cet effet. Il serait donc intéressant de savoir quelles sont les règles en vigueur en ce qui concerne la mise à l’isolement et la durée des interrogatoires, et si des mesures sont prévues pour garantir que l’avocat du détenu assiste aux interrogatoires, ce qui n’est actuellement jamais le cas. La délégation pourra peut‑être également préciser si des aveux ont déjà été déclarés irrecevables en tant que preuves par un juge au motif qu’ils avaient été obtenus par la contrainte.

8.À propos de l’application de l’article 3 de la Convention, M.MariñoMenéndez demande si des recours, y compris judiciaires, sont ouverts aux demandeurs d’asile déboutés et aux étrangers en situation irrégulière sous le coup d’une mesure d’expulsion et s’il existe des directives sur l’application du principe de non-refoulement à l’intention des fonctionnaires des services de l’immigration qui statuent sur ces matières. Notant avec regret que l’État partie n’envisage pas pour le moment d’abolir la peine de mort, il invite ce dernier à prendre des mesures pour humaniser le système, notamment à interdire l’isolement des condamnés à mort, à garantir leur droit de recours et à faire en sorte qu’une condamnation à mort ne puisse être prononcée qu’à l’unanimité. Au sujet de la violence àl’égard des femmes, M. Mariño Menéndez demande si l’avortement constitue toujours une infraction pénale en toutes circonstances, si le viol et les autres formes de violence sexuelle peuvent être poursuivis d’office ou uniquement à la suite d’une plainte et s’il existe une procédure spécifique pour le traitement des plaintes pour violence dans la famille qui prévoie notamment des mesures d’urgence visant à mettre les victimes hors de portée de leur agresseur. M. Mariño Menéndez conclut en invitant l’État partie à mettre en place une institution nationale des droits de l’homme ainsi que l’avait envisagé le Gouvernement précédent.

9.M. Tugushi (Corapporteur pour le Japon) dit qu’en l’absence de disposition pénale réprimant expressément la torture, il serait utile que la délégation dresse une liste complète des chefs pouvant être retenus contre les auteurs d’actes de torture ou de mauvais traitements et qu’elle indique, s’il y a lieu, le délai de prescription prévu pour chacune des infractions visées. La délégation voudra bien également indiquer combien de visites le Comité d’inspection des centres de rétention pour étrangers a effectuées depuis sa création et à qui il adresse ses rapports, en précisant quelle est la suite donnée à ces derniers. Combien d’étrangers en rétention ont-ils bénéficié de l’assistance gratuite d’un avocat en vertu de l’accord conclu avec la Fédération des barreaux du Japon?

10.Faisant référence aux paragraphes 124 et 129 du rapport de l’État partie, M. Tugushi demande combien de fois l’article 112 de la loi relative aux établissements pénitentiaires et autres lieux de détention et au traitement des détenus a été invoqué et pour quels motifs, et combien de plaintes de détenus dénonçant des actes de torture ou des mauvais traitements ont été enregistrées. Il voudrait également savoir comment est assurée la confidentialité des plaintes émanant de détenus et quelles mesures sont mises en œuvre pour protéger les auteurs des plaintes et les témoins contre d’éventuelles représailles. L’État partie fournit dans son rapport des statistiques indiquant le nombre de personnes poursuivies et condamnées du chef d’abus d’autorité de la part d’agents de l’État (art. 193 du Code pénal), d’abus d’autorité de la part d’agents de l’État exerçant des fonctions spéciales (art. 194) et de violences et actes de cruauté commis par des agents de l’État exerçant des fonctions spéciales (art. 195). Il serait intéressant de savoir si ces statistiques reflètent les cas où les infractions commises étaient assimilables à de la torture ou à des mauvais traitements, ou si des statistiques distinctes existent pour ce type de cas.

11.En référence au paragraphe 145 du rapport, M.Tugushi demande des précisions au sujet du système d’indemnisationdont les victimes d’infractions peuvent bénéficier et des circonstances dans lesquelles les victimes de torture ou de mauvais traitements peuvent s’en prévaloir. Il souhaiterait également des informations sur les mesures de réparation auxquelles les victimes de torture ou de mauvais traitements peuvent prétendre et des exemples concrets de cas dans lesquels de telles mesures ont été accordées. À propos des quelque 200 000 femmes qui ont été exploitées comme esclaves sexuelles pendant la Seconde Guerre mondiale, M. Tugushi voudrait savoir quelles mesures sont prises par l’État partie pour recenser avec exactitude les victimes de cette pratique et pour informer le grand public à ce sujet.

12.En ce qui concerne l’article 16 de la Convention et, en particulier, la situation dans les centres de rétention pour migrants en situation irrégulière, la délégation est invitée à fournir des statistiques sur le nombre de mineurs placés dans ces établissements aux fins de leur renvoi et à indiquer quels critères doivent être remplis pour qu’un mineur puisse être remis en liberté provisoire. Des statistiques ventilées par année, âge, sexe et pays d’origine sur les décisions de remise en liberté provisoire de migrants en situation irrégulière seraient bienvenues. La délégation voudra bien indiquer en outre combien de temps un détenu peut être contraint de porter des menottes de type II ou une camisole de force. Les médecins qui examinent des détenus qui ont été contraints de porter des menottes de type II ou une camisole de force sont-ils tenus de faire état de ces informations dans le dossier des intéressés et l’État partie entend-il mettre en place des registres plus détaillés sur l’utilisation des moyens de contention dans les lieux de détention?

13.La délégation est invitée à indiquer quand les trois nouveaux établissements pénitentiaires en construction seront opérationnels et à donner des statistiques sur la capacité d’accueil et le taux d’occupation de l’ensemble des centres de détention pendant la période 2007-2012. Elle voudra bien aussi décrire les mesures prises par l’État partie pour garantir que les établissements pénitentiaires, en particulier les prisons pour femmes, ne soient pas surpeuplés et s’assurer qu’ils soient tous chauffés en hiver. En ce qui concerne l’accès des détenus aux soins médicaux, le Corapporteur demande des précisions sur le nombre de nouveaux médecins qui ont été engagés dans les prisons, les efforts déployés pour améliorer les services médicaux pénitentiaires, le nombre de détenus qui ont été transférés dans un établissement médical extérieur à la prison et les raisons de ces transferts.

14.M. Tugushi souhaiterait savoir si la durée de l’utilisation de moyens de contention pour maîtriser les patients souffrant de troubles mentaux est limitée par la législation. Se référant aux précédentes observations finales du Comité (CAT/C/JAP/CO/1, par. 26), il invite la délégation à décrire les initiatives prises pour garantir que les mesures privatives de liberté imposées aux patients placés dans un établissement public ou privé de soins de santé mentale soient soumises à un contrôle judiciaire efficace et approfondi. La délégation voudra bien indiquer les critères que doit remplir un patient pour pouvoir obtenir une autorisation de sortie d’un hôpital psychiatrique. D’après des informations portées à la connaissance du Comité, le Japon aurait l’un des taux d’hospitalisations non volontaires en institution psychiatrique les plus élevés au monde et généralement la durée du séjour serait passablement longue. Il serait intéressant de savoir pourquoi les soins ambulatoires ne sont pas plus développés et si l’État partie entend prendre des mesures pour combler les lacunes dans ce domaine. La délégation voudra peut-être donner des précisions sur les possibilités de former un recours devant un tribunal lorsque la décision d’hospitaliser un patient contre sa volonté est prise par l’établissement lui-même.

15.Le Corapporteur souhaiterait en savoir davantage sur les préoccupations exprimées par les comités de visite des lieux de détention au sujet du traitement réservé aux détenus et sur les mesures prises par l’État partie afin que les institutions dans lesquelles sont placés les mineurs en conflit avec la loi soient surveillées par un mécanisme externe indépendant. Il aimerait en outre connaître la nature des motifs sur lesquels les décisions de placement à l’isolement sont fondées. La délégation voudra bien indiquer si des solutions de remplacement existent et décrire les initiatives prises par l’État partie depuis la présentation de son rapport initial pour éviter que des détenus ne soient maintenus à l’isolement pendant des périodes excessivement prolongées. Elle pourrait également indiquer si les détenus placés à l’isolement qui présentent des troubles psychiatriques bénéficient de soins adaptés et si des évaluations de la santé mentale des personnes maintenues à l’isolement pendant des périodes prolongées sont réalisées. Des précisions sur le nombre et l’aboutissement des recours formés à ce jour par des détenus placés à l’isolement seraient bienvenues.

16.La délégation est invitée à donner de plus amples informations sur la formation dispensée aux membres de la police, aux juges, aux procureurs, aux fonctionnaires des services de l’immigration et au personnel des établissements pénitentiaires en ce qui concerne la violence à l’égard des femmes. Il serait intéressant de savoir s’il est prévu de modifier les dispositions en vigueur afin que les victimes d’infractions sexuelles ne soient plus obligées de porter plainte pour que l’auteur présumé de ces actes puisse être poursuivi. En outre, il serait utile d’avoir des statistiques sur le nombre de visas d’artiste délivrés chaque année à des étrangères ainsi que des renseignements actualisés sur l’état d’avancement des travaux menés par l’État partie dans la perspective de la ratification du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. Des statistiques sur le nombre de plaintes relatives à des faits de traite ainsi que des explications sur le faible nombre de poursuites engagées contre les personnes soupçonnées de traite seraient appréciées. En outre, le Corapporteur demande des précisions sur les peines réprimant les violences infligées à un enfant ainsi que des statistiques sur les condamnations et les peines prononcées dans les affaires de sévices à enfant. Enfin, ilaimerait savoir où en sont les travaux entamés par l’État partie en vue de déterminer s’il souhaite reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des requêtes émanant de particuliers et ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

17.M. Domah aimerait savoir sur quelle base la police procède à l’arrestation d’un individu et si celui-ci est informé du motif de son arrestation et de son droit de contacter un avocat, de se faire examiner par un médecin et d’informer des proches de sa situation. Il souhaiterait en outre connaître le délai dans lequel le suspect doit être présenté à un juge et le moment à partir duquel un avocat commis d’office peut être mis à sa disposition. Il voudrait savoir si le système de contrôle de la légalité de la détention provisoire n’est pas illusoire étant donné que la légalité de cette mesure ne peut être contestée que par le prévenu. Compte tenu du pourcentage extrêmement faible de plaintes pour torture portées devant les tribunaux, il serait intéressant de savoir si les juges sont formés à la détection des séquelles de torture.

18.M me  Belmir note que la Cour suprême ne statue en matière pénale que lorsqu’elle considère que l’affaire soulève des questions de constitutionnalité ou qu’elle est susceptible d’entraîner un revirement de jurisprudence, ce qui signifie que les particuliers ne peuvent pas saisir cette juridiction afin de faire valoir leurs droits s’ils sont insatisfaits des décisions des juridictions inférieures. Des commentaires de la délégation seraient bienvenus sur ce point.

19.M. Bruni demande si les comités de visite des lieux de détention sont habilités à effectuer des visites inopinées et si l’État partie a l’intention d’appliquer la recommandation du Comité des droits de l’homme tendant à ce que les condamnés à mort et leur famille soient informés de la date et de l’heure prévues de l’exécution. Dans son rapport consacré à la question de l’isolement cellulaire (A/66/268), le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants se dit particulièrement préoccupé par la pratique de l’isolement cellulaire prolongé qui, au-delà d’une durée de quinze jours, peut avoir des effets psychologiques dommageables irréversibles. La délégation est invitée à indiquer si l’État partie pourrait envisager d’interdire le maintien à l’isolement cellulaire pendant des périodes prolongées. Enfin, il serait intéressant de savoir si des peines de substitution pourraient être introduites dans l’État partie afin de réduire la surpopulation carcérale.

20.M. Gaye, se référant au paragraphe 164 du rapport, demande si les auteurs de plaintes relatives à des interrogatoires ont pu former un recours contre la décision de n’engager aucune poursuite contre les personnes mises en cause dans leur plainte. Selon certaines informations, les mesures prises par les organes judiciaires dans les affaires de traite ne seraient pas assez dissuasives, ce que semble confirmer l’écart saisissant entre le nombre de personnes arrêtées pour traite figurant au paragraphe 276 du rapport et le nombre de personnes poursuivies indiqué au paragraphe 277. La délégation est invitée à commenter ces allégations et à indiquer où en est la mise en place d’une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris.

21.D’après des informations portées à la connaissance du Comité, un tiers des condamnés à la peine capitale qui ont été exécutés depuis 2010 n’avait pas épuisé toutes les voies de recours disponibles contre le jugement prononcé contre eux. La délégation voudra bien donner des détails sur les recours ouverts aux condamnés à mort, en précisant notamment s’ils ont un effet suspensif. Par ailleurs, elle est invitée à indiquer si le Japon s’est doté d’une procédure de détermination du statut d’apatride.

22.Relevant que l’État partie s’est engagé à l’issue de l’examen de son rapport initial à construire de nouvelles cellules de protection dans les centres de détention afin de pouvoir renoncer à l’utilisation de bâillons, M. Gaye souhaiterait savoir si cette intention s’est traduite dans les faits. Il aimerait savoir quels obstacles objectifs empêchent l’État partie d’assigner un avocat commis d’office aux personnes arrêtées quelle que soit la nature de l’infraction dont elles sont soupçonnées. Enfin, il semblerait que le procureur ait le droit d’écarter des preuves dans une affaire et puisse empêcher ainsi les avocats de la défense de consulter certaines pièces du dossier. La délégation voudra bien indiquer si des mesures ont été prises pour abolir cette prérogative et faire en sorte que les procureurs et les avocats soient à armes égales dans une procédure.

23.M me  Sveaass note que, d’après certaines sources, le nombre de cas non signalés de violences à l’égard de femmes est extrêmement élevé. Elle prie donc la délégation de fournir des informations sur la suite donnée aux plaintes faisant état de violences de ce type et sur les possibilités d’hébergement d’urgence offertes aux victimes. Elle aimerait savoir si l’État partie pourrait envisager de prendre des mesures pour réduire la proportion d’hospitalisations non volontaires dans les établissements psychiatriques, réduire la durée des séjours en institution psychiatrique et garantir la possibilité de former un recours contre une hospitalisation non volontaire. Des renseignements complémentaires sur l’augmentation considérable du nombre de placements à l’isolement cellulaire et de cas d’utilisation de moyens de contention signalés par certaines sources seraient utiles. Enfin, la délégation voudra bien indiquer si les pages sombres de l’histoire japonaise que représente l’exploitation sexuelle des femmes dites «de réconfort» pendant la Seconde Guerre mondiale pourraient être intégrées dans les manuels scolaires et si des excuses publiques pourraient être faites par le Gouvernement japonais sur les propos regrettables publiés récemment à ce sujet dans les médias nationaux.

24.La Présidente fait observer que certains éléments qui, pris isolément, ne constituent pas une violation de la Convention, peuvent poser problème lorsqu’ils sont combinés. Ainsi, la durée prolongée des interrogatoires couplée à l’absence d’avocat peut donner lieu à une situation dans laquelle les dispositions de la Convention ne sont pas respectées. Elle souhaiterait savoir ce que fait l’État partie pour prévenir ce type de situation et demande des statistiques sur le nombre de condamnations fondées essentiellement sur les aveux de l’accusé. Se référant au rapport, elle note qu’entre 2002 et 2009, le nombre de plaintes a quasiment doublé (par. 249), mais que le nombre de personnes arrêtées par la police n’a que faiblement augmenté (par. 253). La délégation voudra bien commenter ces statistiques et expliquer pourquoi le prêt d’équipements de sécurité a augmenté de manière aussi spectaculaire de 2005 à 2009. Elle demande des précisions sur la signification du mot «quasi» accolé aux chefs d’accusation énumérés dans le deuxième tableau figurant au paragraphe 254 du rapport.

25.Dans ses précédentes observations finales, le Comité avait recommandé à l’État partie de prendre des mesures éducatives pour modifier les comportements discriminatoires à l’origine des actes de violence sexuelle et des violations dirigés contre les femmes. Or, selon l’ONG Women’s Active Museum on War and Peace, le nombre de manuels scolaires destinés aux élèves du secondaire abordant la question des «femmes de réconfort» n’a cessé de diminuer ces quinze dernières années. La délégation voudra bien, à cet égard, indiquer quelles mesures éducatives sont prises pour prévenir l’apparition de conditions pouvant conduire à des violations telles que celles qui ont été commises pendant la Seconde Guerre mondiale. Dans ses observations finales, le Comité avait également fait part de sa préoccupation face à l’absence de poursuites contres les responsables de ces violations et recommandé à l’État partie de prendre des mesures de réadaptation en faveur des victimes. La Présidente note cependant qu’en dehors de la présentation d’excuses, le Gouvernement japonais ne semble pas avoir pris d’autres mesures de réparation en faveur des victimes, qui attendent encore d’être reconnues dans leurs droits. Quant aux déclarations du maire d’Osaka selon lesquelles le système dans le cadre duquel des femmes étaient exploitées et réduites en esclavage sexuel était nécessaire et il n’avait pas été prouvé que ces femmes avaient été forcées de s’y soumettre, elles constituent le type même de dénégations que le Comité a entendu à plusieurs reprises dans diverses situations et qu’il rejette fermement. Comme l’ont montré des historiens, ces femmes ont été victimes de traite commerciale à des fins de travail sexuel forcé et ont parfois été enlevées et soumises de force à ceux qui les tenaient captives ou encore réduites en servitude pour dette. Il est manifeste que le Gouvernement ne fait pas cas des avis des membres des administrations locales et des observateurs avertis qui ne partagent pas ses positions sur la question. Des commentaires de la délégation sur tous ces points seront les bienvenus.

26.M.  Ueda (Japon) dit que la délégation se penchera sur les nombreuses remarques, observations et questions qui lui ont été adressées. Si plusieurs d’entre elles semblent dénoter un certain manque d’information ou reposer sur des malentendus, bon nombre d’entre elles sont fondées et légitimes et la délégation s’efforcera d’y apporter des réponses aussi complètes et précises que possible à une séance ultérieure.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 12 h 5.