Nations Unies

CAT/C/SR.1065

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

22 mai 2012

Original: français

Comité contre la torture

Quarante-huitième session

Co mpte rendu analytique de la 1065 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 10 mai 2012, à 15 heures

Président: M. Grossman

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Cinquième et sixième rapports périodiques de la Grèce(suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Cinquième et sixième rapports périodiques de la Grèce (CAT/C/GRC/5-6, CAT/C/GRC/Q/5, HRI/CORE/1/Add.121) (suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation grecque reprend place à la table du Comité.

2.M. Ioannidis (Grèce) dit que la Grèce traverse actuellement une tempête politique et économique. Les dernières élections ont vu une montée d’un parti radical d’extrême droite, ce qui pose des problèmes inédits aux pays. Il convient toutefois de noter que l’écrasante majorité des partis politiques et des forces sociales en Grèce sont conscients des dangers que comporte cette situation et que le parti concerné est exclu des pourparlers engagés pour la constitution d’un gouvernement. Les autorités ne ménageront aucun effort pour s’attaquer aux causes profondes du racisme qui émerge dans certains secteurs de la société et pour éradiquer ce phénomène. Un projet de loi visant à moderniser la loi antiracisme actuelle et à la mettre en conformité avec la décision-cadre de l’Union européenne sur la lutte contre certaines formes et manifestations de racisme et de xénophobie au moyen du droit pénal a été soumise au Parlement, et une attention particulière sera accordée à la poursuite des infractions à motivation raciste.

3.M. Kastanas (Grèce) dit que tous les enfants de parents grecs acquièrent la nationalité grecque à la naissance, sans distinction d’origine ou autre. Des modifications législatives récentes permettent l’acquisition de la nationalité grecque par les enfants d’immigrants de la deuxième et de la troisième génération. Une disposition législative permettant le retrait de la nationalité grecque avait déjà été abrogée en 1998. Par ailleurs, la Grèce reconnaît la minorité musulmane de Thrace, qui jouit de droits particuliers. Bien entendu, toute personne relevant de la juridiction de l’État grec bénéficie des garanties prévues par la Convention, sans discrimination aucune.

4.M. Ioannidis (Grèce) dit que les professions de magistrat et de policier ne sont pas des professions fermées et que tout citoyen grec peut y accéder. L’admission à l’École nationale de la magistrature se fait par voie de concours ouvert à tous. Des cours portant spécifiquement sur les droits de l’homme y sont dispensés, notamment des cours sur le droit constitutionnel et les libertés fondamentales, sur la protection offerte par la Convention européenne des droits de l’homme et sur les procédures pénales s’y rapportant, sur la protection des minorités, des personnes handicapées et des mineurs, sur la protection des victimes dans le cadre des procédures pénales, sur les droits des personnes inculpées et sur la protection internationale des droits de l’homme. L’École nationale de la magistrature organise en outre des séminaires de formation permanente à l’intention des juges. Les écoles de police dispensent également une formation aux droits de l’homme. Les autorités grecques ne sont nullement indulgentes à l’égard des manquements des fonctionnaires en matière de droits de l’homme et elles s’emploient à former et à sensibiliser les juges et les policiers aux questions s’y rapportant.

5.La définition de la torture qui figure dans le Code pénal grec n’est pas plus étroite que celle énoncée dans la Convention; elle couvre les cas où des actes de torture sont infligés à l’instigation d’un agent de la fonction publique ou avec son consentement exprès ou tacite. En vertu de l’article 137B du Code pénal, tout supérieur qui donne l’ordre de commettre un acte de torture est passible d’une peine d’emprisonnement d’au moins dix ans; un supérieur peut également être puni pour complicité si un acte de torture est commis avec son consentement exprès ou tacite. Cet article dispose en outre que le fait de commettre des actes de torture de manière systématique constitue une circonstance aggravante de cette infraction et emporte une peine d’emprisonnement d’au moins dix ans. S’agissant de l’affaire Zontul c. Grèce, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la peine prononcée par le tribunal grec était insuffisante en l’espèce mais n’a pas estimé que la définition de la torture figurant dans le Code pénal grec était inadéquate ou que les peines prévues pour les actes de torture et autres actes humiliants ou dégradants étaient insuffisantes.

6.La Grèce déploie d’importants efforts pour se conformer aux arrêts définitifs de la Cour européenne des droits de l’homme. Ainsi, elle verse les indemnités accordées par la Cour dans les délais impartis et prend, le cas échéant, les mesures voulues pour mettre un terme à la violation constatée, pour remédier aux conséquences de celle-ci et pour éviter qu’une violation similaire soit à nouveau commise. Par ailleurs, une procédure ayant donné lieu à un jugement définitif rendu par une juridiction nationale peut être rouverte si une violation de la Convention européenne des droits de l’homme a été constatée par la Cour.

7.Le système actuel de collecte et de traitement des données relatives à la justice doit être repensé, modernisé et informatisé car il ne permet pas de disposer des informations de base nécessaires pour assurer une bonne administration de la justice, réorienter les politiques de lutte contre la criminalité, s’acquitter des obligations du pays en matière d’établissements de rapports à l’intention des organes conventionnels et assurer le suivi des affaires. Un groupe de travail spécial a été constitué à cette fin et chargé de soumettre une proposition à la fin de 2012, l’objectif étant, à terme, de mettre en place un système informatisé de collecte de données et de suivi des affaires pénales.

8.M. Karageorgos (Grèce) dit qu’un Bureau d’intervention en cas d’acte arbitraire a été créé par voie législative au sein du Ministère de la protection du citoyen. Ce Bureau est chargé de recueillir, d’enregistrer et d’examiner les allégations d’actes de torture, de mauvais traitements et d’abus de pouvoir de la part des forces de l’ordre. Il comporte un comité composé de trois membres ayant exercé les fonctions de juge, de Médiateur, de Médiateur adjoint ou d’Inspecteur général de l’administration publique. Le Comité examine chaque plainte aux fins de déterminer si le Bureau est compétent en l’espèce et s’il y a lieu de donner suite. Lorsque la plainte porte sur des faits graves, le Ministère de la protection des citoyens peut, sur proposition du Comité, confier l’enquête à un des membres du Comité. Le Comité traite également des affaires dans lesquelles la Cour européenne des droits de l’homme a condamné la Grèce pour violation de la Convention européenne des droits de l’homme et dans lesquelles il y a de nouveaux éléments qui n’avaient pas été pris en considération dans l’enquête initiale. Le Bureau peut, s’il l’estime nécessaire, ordonner à la police ou au service concerné de procéder à une nouvelle enquête.

9.L’article 12 de la loi no 3064/2002, complétée par le décret présidentiel no 233/2003, dispose que les enfants migrants et demandeurs d’asile victimes de vente, de traite et d’exploitation sexuelle ou économique bénéficient d’une protection et d’une aide visant à subvenir à leurs besoins et à garantir leur accès à des soins et à un soutien psychologique, et ce, pendant aussi longtemps que cela est nécessaire. Si la victime n’est pas un ressortissant grec, elle bénéficie également des services d’un conseil et d’un interprète et de mesures de protection contre l’expulsion. Le rapatriement de ces enfants doit se faire selon une procédure bien définie, avec l’autorisation du Procureur chargé des enfants et sur avis du Commissaire à l’enfance. Il convient à ce sujet de signaler que les Gouvernements grec et albanais ont conclu un accord fixant les modalités de rapatriement des enfants victimes. Cet accord prévoit que les enfants sont rapatriés de leur plein gré, qu’ils bénéficient d’une aide juridique et que ce rapatriement doit être conforme à leur intérêt supérieur. Des programmes spéciaux doivent être mis en place dans leur pays d’origine pour faciliter leur réintégration, leur apporter l’aide matérielle, médicale et psychologique dont ils ont besoin et garantir leur protection. Un suivi de leur situation doit en outre être assuré.

10.La récente loi portant ratification et application de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et de ses protocoles additionnels étend l’assistance dont bénéficient les victimes des faits visés à l’article 12 de la loi no 3064 aux victimes du tourisme sexuel et de la pédopornographie et prévoit que toute procédure ouverte contre ces personnes pour des infractions telles qu’entrée illégale dans le pays, travail illicite ou prostitution est suspendue tant que les poursuites engagées contre les auteurs des faits dont elles ont été victimes sont en cours. Si ces poursuites débouchent sur une condamnation, aucune procédure n’est engagée contre les victimes pour les faits mentionnés précédemment. En outre, les non-ressortissants qui ont été inscrits sur la liste des personnes indésirables pour avoir commis de tels faits et dont il est établi qu’ils ont été victimes de traite sont retirés de cette liste. Des mesures peuvent également être prises pour protéger les victimes ou leur famille contre des représailles, même si l’infraction dont ils ont été victimes ne relève pas de la criminalité organisée. La loi prévoit en outre la possibilité d’accorder, à certaines conditions, un permis de résidence pour raison humanitaire aux non-ressortissants victimes de la traite et prolonge le délai de réflexion accordé aux victimes de la traite de un à trois mois; dans le cas d’enfants, ce délai peut être prolongé de deux mois supplémentaires. Il n’est pas procédé à l’expulsion de la personne concernée pendant le délai de réflexion.

11.Un programme national visant à prévenir et à combattre la violence à l’égard des femmes a été adopté pour la période 2009-2013 et un plan d’action pour la protection des femmes et la lutte contre la violence à l’égard des femmes aux niveaux national et local est mis en œuvre par le Secrétariat général à l’égalité des sexes. Les principales mesures prises dans ce cadre ont été la création de 12 centres de consultation et de 13 foyers d’accueil, dans les différentes régions du pays, la formation du personnel de ces centres et des professionnels travaillant avec les femmes victimes de violence (policiers, juges et personnel médical, notamment) et la formation d’avocats en vue de leur participation à des programmes d’aide juridique destinés aux femmes victimes, la mise en place d’une ligne téléphonique d’urgence et la réalisation de campagnes de sensibilisation. Des initiatives ont également été entreprises sur le plan législatif, notamment l’élaboration d’un projet de loi visant à lutter contre la violence sexiste à l’égard des femmes.

12.M. Kastanas (Grèce) dit que les enfants réfugiés ou demandeurs d’asile et les enfants d’étrangers dont le statut en matière de résidence n’a pas encore été déterminé peuvent être scolarisés dans les écoles publiques, même s’ils n’ont pas tous les documents requis. Les demandeurs d’asile et les ressortissants étrangers atteints d’une maladie infectieuse bénéficient de soins médicaux et hospitaliers gratuits, qu’ils soient en situation régulière ou non. Tous les ressortissants étrangers ont accès aux services de soins d’urgence des hôpitaux, quelle que soit leur situation. Les victimes de la traite ont accès aux établissements de soins publics, de même que les mineurs étrangers, quelle que soit leur situation ou celle de leurs parents.

13.M. Io a nnidis (Grèce) dit que la loi grecque relative à la protection des données prévoit que les procureurs peuvent autoriser la divulgation de données personnelles sur des personnes contre lesquelles une procédure a été engagée si la protection de la santé publique l’exige. Cela a été le cas s’agissant de personnes atteintes du sida qui se prostituaient illégalement et qui étaient accusées d’avoir volontairement mis en danger la santé de leurs clients. Ces personnes ne faisaient donc pas l’objet d’une détention administrative mais avaient été inculpées, et c’est dans ce contexte que le procureur à donné l’autorisation de révéler des données personnelles les concernant. Il s’agit d’une question qui fait actuellement l’objet d’un débat dans le pays et qui soulève le problème du juste équilibre à trouver dans la protection des divers intérêts et droits en présence.

14.M me Arvaniti (Grèce) indique que l’aide juridictionnelle accordée en matière pénale couvre l’ensemble des frais de justice, y compris des frais administratifs et des honoraires d’avocats, tandis que dans les affaires relevant du droit civil ou commercial les parties peuvent être exemptées d’une partie des frais de procédure et des honoraires des avocats et des huissiers de justice si la demande en est faite. Dans les litiges d’ordre administratif, en revanche, l’État ne prend pas en charge les honoraires d’avocats.

15.En vertu de l’article 3 de la loi no 3226/2004 sur l’aide juridictionnelle, le barreau est tenu d’adresser chaque mois aux tribunaux une liste des avocats pouvant être commis d’office. Les avocats sont désignés par ordre alphabétique et ne traitent qu’un dossier à la fois. En 2011, le budget de l’aide juridictionnelle s’élevait à 5 200 000 euros. Ce chiffre a été légèrement augmenté en 2012. Le Secrétariat général à la jeunesse met en œuvre un programme qui vise à assurer aux mineurs l’accès gratuit à l’assistance d’un avocat dans toute procédure, pénale, civile ou administrative. Dans le cas des procédures administratives, la priorité est donnée aux mineurs non accompagnés, en particulier dans les situations suivantes: enregistrement des données personnelles concernant le mineur, demande de permis de travail, demande ou renouvellement de permis de séjour, demande d’asile, recours contre une mesure d’internement administratif ou une décision de renvoi. Malgré le dévouement des avocats qui participent à ce programme, les demandes sont trop nombreuses pour pouvoir toutes être satisfaites.

16.M. Karageorgos (Grèce) dit qu’une réforme a été entreprise pour renforcer l’efficacité du système d’asile. Un nouveau service chargé de l’asile, totalement indépendant de la police, a été créé au sein du Ministère de la protection du citoyen en 2011. Une commission d’appel indépendante a également été mise en place pour examiner les demandes d’asile rejetées en première instance. En attendant que le nouveau service soit pleinement opérationnel, diverses mesures transitoires ont été prises afin d’améliorer la procédure de première instance concernant l’examen des demandes d’asile. Une procédure d’octroi du statut de réfugié, pleinement conforme aux dispositions de la Directive CE/2005/85 a été établie en vertu du décret no 114/2010. Ont également été créés en vertu de ce décret cinq comités d’appel, trois pour statuer sur les recours en souffrance et deux pour statuer sur les recours présentés au titre de la procédure prévue dans le décret. Un représentant du HCR et un avocat recommandés par le Comité national des droits de l’homme participent aux travaux de ces comités. Cinq comités supplémentaires devraient être constitués en septembre 2012 pour accélérer le traitement des dossiers en souffrance et examiner les nouvelles demandes.

17.Des activités de formation concernant les questions relatives au droit d’asile ont été menées à l’intention du personnel de police avec la collaboration du HCR. Trois séminaires ont ainsi été organisés à Athènes et à Thessalonique avec le concours des services locaux compétents pour recevoir et examiner les demandes d’asile. D’autres séminaires, consacrés au curriculum européen en matière d’asile, seront organisés dans les mois à venir. Les conclusions des missions d’experts de la Commission européenne sont dûment prises en considération pour améliorer l’efficacité de la procédure d’asile. Le Ministère de la protection civile a signé avec le Bureau européen d’appui en matière d’asile un plan d’action qui prévoit une série de mesures concrètes à court et à moyen terme dont la mise en œuvre sera financée par des fonds européens. Une brochure d’information récapitulant les points essentiels de la législation et de la procédure en matière d’asile a été élaborée en plusieurs langues et largement diffusée, notamment sur le site Web de la police.

18.Un membre du Comité a demandé si le fait d’avoir été victime de mutilations génitales féminines pouvait constituer un motif d’obtention de l’asile. À ce jour, les autorités n’ont jamais eu à traiter de demande fondée sur ce motif. Plusieurs questions ont été posées au sujet de la détention des demandeurs d’asile. En vertu de la législation, un demandeur d’asile ne peut être placé en détention que dans les circonstances suivantes: s’il ne possède aucun document permettant de vérifier sa nationalité et d’établir les circonstances de son entrée illégale dans le pays; s’il est considéré comme représentant une menace pour la sécurité nationale ou l’ordre public; si la détention est nécessaire pour permettre un examen immédiat et efficace de la demande d’asile. Il convient de souligner que la détention ne dure que le temps strictement nécessaire et que tous les demandeurs d’asile ont accès à l’assistance d’un avocat.

19.Grâce aux travaux des comités d’appel chargés de traiter les dossiers en souffrance, le nombre de recours présentés avant le 22 novembre 2010 (date d’entrée en vigueur du décret présidentiel no 114/2010) encore en suspens a été ramené de 47 155 à 29 807. Quant aux recours qui avaient été présentés en vertu du décret no 61/1999 (demandes de statut humanitaire pour raisons de santé), pour lesquels la décision appartient au Secrétaire général ou au Ministre, leur nombre est passé de 2 000 à 1 823. La proportion de recours auxquels il est fait droit est de 12,3 %, soit un résultat proche de la moyenne des pays de l’Union européenne, ce qui est encourageant. Un statut uniforme sera prochainement reconnu aux personnes ayant besoin d’une protection internationale conformément aux procédures prévues par la loi. Les migrants économiques devront en revanche retourner dans leur pays d’origine.

20.La Grèce reconnaît la nécessité de disposer d’un cadre contraignant pour répartir équitablement les responsabilités en matière d’immigration entre les États membres de l’Union européenne. Le Règlement Dublin II s’est révélé inefficace à cet égard et devrait par conséquent être révisé. Il faudrait suspendre les transferts à destination des États membres submergés et modifier les critères relatifs à l’entrée illégale dans un État membre, selon lesquels l’État membre dont le demandeur a franchi irrégulièrement les frontières est l’État responsable de l’examen de la demande d’asile. La Grèce serait favorable à l’établissement de règles obligatoires qui assureraient une répartition des réfugiés et des groupes de personnes vulnérables proportionnelle au potentiel économique et au nombre d’habitants de chaque État concerné. Il faudrait également étudier les possibilités de traitement des demandes d’asile dans des pays non membres de l’Union européenne et des pays de transit, en collaboration avec la Commission européenne, les États membres et les organisations internationales, en vue de répartir équitablement les bénéficiaires d’une protection internationale au sein de l’Union européenne, comme le prévoit le Programme de Stockholm. Les actions menées dans ce domaine à l’échelon communautaire devraient s’inscrire dans une politique conjointe prévoyant également des mesures économiques et sociales ainsi qu’une plus grande coopération en matière de surveillance des frontières.

21.M me  Arvaniti (Grèce) indique qu’au 1er mai 2012, la prison de Koridalos, d’une capacité de 800 places, accueillait 2 163 détenus; la prison de Larisa, d’une capacité de 500 places, 913 détenus; la prison de Trikala, d’une capacité de 700 places, 736 détenus; et la prison de Patras, d’une capacité de 780 places, 791 détenus. Elle précise qu’un nouveau quartier, d’une capacité de 60 places, a récemment été construit à la prison de Patras, et que l’actuelle prison de Trikala, qui a ouvert ses portes en 2006, a remplacé l’ancienne prison dont la capacité était bien inférieure.

22.Les fouilles corporelles sont effectuées dans la plus stricte intimité par des agents pénitentiaires de même sexe que la personne détenue. La loi dispose expressément que l’exploration des cavités corporelles ne peut être pratiquée que sur ordonnance d’un procureur, par un médecin, et d’une manière qui ne porte pas atteinte à la dignité de la personne. Cette mesure n’est autorisée que s’il existe des motifs raisonnables qui la rendent nécessaire, par exemple si l’on soupçonne un détenu de dissimuler des substances illégales. En cas de violences entre détenus, le directeur de l’établissement pénitentiaire ordonne l’isolement du détenu dont la sécurité est en danger pour le protéger. Si la présence d’un détenu constitue une menace pour l’ordre et la sécurité de l’établissement, le directeur peut faire transférer l’intéressé dans un autre établissement. La libération conditionnelle ne peut être accordée qu’en vertu d’une décision judiciaire, aux conditions prévues par la loi.

23.Le personnel pénitentiaire se décompose actuellement comme suit: 2 201 gardiens relevant de l’administration pénitentiaire, 1 108 gardiens issus du secteur privé, 17 médecins, 2 pharmaciens, 27 psychologues, 73 travailleurs sociaux et 78 auxiliaires médicaux. En raison du manque de personnel médical dans les prisons, les détenus qui ont besoin de soins sont envoyés à l’hôpital local. Les établissements spéciaux de soins pour détenus qui relèvent du Ministère de la justice, comprenant une clinique psychiatrique, un hôpital et un centre de désintoxication, et auxquels s’ajouteront prochainement deux nouvelles structures, sont désormais rattachés au système national de santé. Les modalités concrètes de ce rattachement sont encore à l’étude et seront arrêtées par décret présidentiel. Un accord de coopération a été signé avec des ONG et des hôpitaux universitaires pour améliorer l’offre de soins médicaux et psychiatriques en milieu carcéral.

24.Face au problème du surpeuplement carcéral, le Ministère de la justice a lancé un projet de construction de nouveaux établissements pénitentiaires. Le nouveau centre de détention de Nigrita (Serres) est achevé; d’une capacité de 600 places, il accueille pour le moment 236 détenus. Un nouveau quartier offrant 50 places supplémentaires a été construit dans le centre de détention de Larissa. Les prisons de Drama et Chania, d’une capacité de 600 places chacune, permettront lorsqu’elles seront opérationnelles de désengorger les établissements les plus surpeuplés. Il faut encore signaler qu’un centre de désintoxication pour détenus est en cours de construction à Kassandra (Halkidiki). Pour pouvoir fonctionner à pleine capacité, ces nouvelles structures auront besoin de personnel supplémentaire, mais les possibilités de recrutement sont pour le moment limitées en raison des contraintes budgétaires actuelles.

25.M. Karageorgos (Grèce) dit que la loi n° 3907/2011 prévoit que les ressortissants étrangers sous le coup d’une mesure de renvoi sont placés en détention jusqu’à l’exécution de la mesure. La détention est limitée à la durée strictement nécessaire pour mener à bien la procédure et ne peut excéder six mois. Elle peut exceptionnellement être prolongée de douze mois en cas de refus de coopérer de la part des services compétents du pays de renvoi ou si un délai supplémentaire est nécessaire pour obtenir les documents administratifs requis. Toute prolongation de la détention requiert l’accord préalable du tribunal administratif compétent. Les conditions de détention des étrangers en attente de renvoi sont examinées chaque trimestre par l’autorité qui a ordonné la mise en détention.

26.Des travaux ont été faits ou sont en cours pour augmenter la capacité d’accueil et moderniser les installations des postes de contrôle aux frontières et des centres de rétention, notamment dans la région d’Evros. Pour faire face à l’afflux de migrants illégaux à Athènes, un nouveau centre d’accueil fermé, indépendant de la police, a été construit à Amygdaleza (Attique). En activité depuis février 2012, le centre accueille des étrangers qui sont entrés ou séjournent illégalement sur le territoire. Le confort et la sécurité qu’il offre aux résidents ont été salués par la Haut-Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme ainsi que par des représentants d’associations de défense des migrants. Le centre de détention de Sparte n’est à l’heure actuelle pas adapté pour accueillir des migrants en situation irrégulière. Des travaux vont être menés en vue de le convertir en centre de premier accueil.

27.M. Ioannidis (Grèce) dit que le Gouvernement a adopté une politique de transparence totale en ce qui concerne les établissements pénitentiaires. En l’espace d’une année, une cinquantaine d’ONG ont effectué des visites dans plusieurs prisons. Le Médiateur, les membres des partis politiques et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés jouissent d’un accès sans réserve à tous les établissements pénitentiaires. L’instrument de ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture a été déposé au Parlement; il devrait être voté dès que le nouveau gouvernement sera constitué. En référence à la déclaration publique du Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) mentionnée par un membre du Comité, M. Ioannidis dit que les autorités grecques accordent toute l’attention voulue aux recommandations du CPT et s’efforcent de les mettre en œuvre.

28.Pour les délits punis d’une peine d’emprisonnement n’allant pas au-delà de cinq ans, le Code pénal impose la suspension de la peine lorsque l’auteur du délit n’a pas de casier judiciaire. Dans les cas où l’auteur n’en est pas à son premier délit, la peine peut être convertie en une amende ou en une peine d’intérêt général si l’intéressé n’a pas les moyens d’acquitter l’amende. Toute personne arrêtée par la police peut prendre immédiatement contact avec un avocat et doit être conduite devant un procureur dans les vingt-quatre heures suivant son arrestation.

29.M. Kastanas (Grèce) dit que la législation prévoit que le service civil est deux fois plus long que le service militaire mais que, dans les faits, les objecteurs de conscience peuvent être libérés de leur obligation avant d’avoir accompli toute la durée du service civil, si bien que celle-ci oscille en moyenne entre cinq et quinze mois, contre trois à douze mois pour le service militaire. Dans ces conditions, on ne saurait considérer le service civil comme une forme de mauvais traitement contraire à la Convention.

30.M. Ioannidis (Grèce) dit que les affaires relatives à des mineurs sont instruites et jugées par des juges spécialisés. Lorsque des mineurs sont reconnus coupables d’infractions, les juges privilégient les mesures éducatives ou thérapeutiques plutôt que les mesures punitives privatives de liberté.

31.M. Karageorgos (Grèce) dit que le Gouvernement grec a signé avec le Gouvernement albanais un accord bilatéral visant à protéger les mineurs de nationalité albanaise victimes de la traite en Grèce et à assurer leur rapatriement ainsi que leur accès à des soins et des mesures de réadaptation. La mise en œuvre du protocole de réadmission des étrangers en situation irrégulière conclu avec la Turquie en 2001 pose de graves problèmes. Depuis avril 2002, les autorités turques n’ont réadmis sur leur territoire que 5 469 des 111 547 personnes qui avaient illégalement franchi la frontière avec la Grèce. En outre, depuis 2012, les autorités turques refusent la réadmission sur leur territoire de ressortissants syriens en raison de la crise actuelle à la frontière turco-syrienne. Il convient par ailleurs de signaler que les centres de rétention turcs à proximité de la frontière avec la Grèce sont surpeuplés et ne peuvent par conséquent pas accueillir plus de 40 migrants par semaine.

32.M me  Sveaass (Rapporteuse pour la Grèce) remercie la délégation de ses réponses détaillées aux nombreuses questions posées à la séance précédente. En ce qui concerne la définition de la torture, elle relève que l’article 137 du Code pénal établit des critères restrictifs − les souffrances doivent avoir été infligées de manière systématique et avoir causé des dommages psychologiques graves et durables − qui sont susceptibles d’exclure du champ de l’incrimination de torture des actes qui devraient être considérés comme tels au regard de la Convention. À ce sujet, elle souhaiterait savoir s’il y a eu des affaires portant sur des actes constitutifs de torture dans lesquelles le caractère systématique des actes incriminés a été invoqué en tant que circonstance aggravante, comme le prévoit l’article 137B. Dans l’affirmative, la délégation pourra peut-être indiquer quelles peines ont été prononcées. Dans son arrêt sur l’affaire Zontul c. Grèce, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que la condamnation n’était pas à la mesure de la gravité des faits, il serait intéressant de savoir si cette affaire pourrait être rejugée par une juridiction nationale.

33.Mme Sveaass demande si le nouveau bureau du Ministère de la protection du citoyen chargé d’examiner les cas de comportement ou d’actes arbitraires peut recevoir des plaintes confidentielles et si, compte tenu de sa composition et de son statut, il peut exercer sa tâche en toute indépendance. Par ailleurs, le rapport du CPT signalant des cas de harcèlement, elle aimerait savoir, si des plaintes peuvent également être déposées à titre confidentiel pour ce motif et, dans l’affirmative, auprès de quelles instances.

34.Concernant la lutte contre la violence à l’égard des femmes, la Rapporteuse fait observer que si un grand nombre d’actes de violence commis contre des femmes ne sont pas enregistrés, c’est en partie parce que les personnes qui sont en première ligne, c’est‑à‑dire les policiers, ne sont pas suffisamment formés à cet effet. La formation des policiers devrait figurer au premier rang des priorités dans ce domaine. Il serait donc intéressant de savoir s’il est prévu de dispenser aux membres des forces de l’ordre une formation aux dispositions du Protocole d’Istanbul, qui est utile pour identifier non seulement les victimes de mauvais traitements en détention mais aussi les femmes victimes de violence. Il serait également utile de disposer de renseignements sur le nombre de condamnations prononcées contre des personnes reconnues coupables d’actes de violence à l’égard des femmes.

35.Au sujet du système d’asile, Mme Sveaass croit comprendre que le nouveau service d’asile doit permettre à l’État partie de disposer d’une procédure d’enregistrement décentralisée et de réduire ainsi le délai d’attente imposé aux demandeurs d’asile, ce qui constituerait un grand progrès compte tenu du volume de dossiers en souffrance. Elle demande si ce nouveau système est déjà opérationnel. Elle souhaiterait en outre des précisions sur les mesures prises pour faire en sorte que l’information sur le droit d’asile soit disponible dans davantage de langues et sous des formes accessibles aux personnes malvoyantes.

36.Le Comité a eu connaissance de cas de demandeurs d’asile qui ont été expulsés alors qu’un recours avait été introduit, ce qui soulève la question de l’application de l’effet suspensif des recours contre les ordonnances d’expulsion dans la pratique. La délégation pourra peut-être apporter des éclaircissements sur ce point. Elle pourra peut-être également indiquer de quelle manière les ordonnances d’expulsion sont notifiées, et si la personne qui reçoit la notification est dûment informée de son droit de faire appel de la décision.

37.Notant que la détention administrative peut être prolongée jusqu’à douze mois dans des cas exceptionnels, Mme Sveaass demande quel pourcentage de cas ont été jugés exceptionnels et ont donné lieu à une détention de douze mois. À propos du nouveau centre de rétention d’Amygdaleza, le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR) a signalé dans un communiqué de presse sur sa visite dans ce centre que des personnes y seraient conduites en masse. Des commentaires sur ce point seraient les bienvenus. Des précisions sur les dispositions prises concernant les mineurs non accompagnés qui ne sont pas demandeurs d’asile accueillis dans les nouveaux centres seraient également utiles.

38.D’après les renseignements dont dispose le Comité, il existait auparavant un centre de réadaptation des victimes de la torture administré par une organisation non gouvernementale, qui a fermé. La délégation pourra peut-être indiquer s’il existe des services de réadaptation dans le système public de santé et quelle formation spécifique reçoivent les médecins, psychologues et autres spécialistes qui ont affaire à des victimes d’actes de torture.

39.M me Belmir, rappelant que la disposition législative permettant de déchoir certaines personnes de la nationalité grecque a été abrogée en 1998, demande si des mesures ont été prises pour que la nationalité de ces personnes puisse être rétablie. En ce qui concerne les minorités, elle demande si les membres d’une minorité reconnue comme telle sont considérés comme des étrangers ou comme des nationaux, et s’ils peuvent travailler dans la police ou la magistrature par exemple. Notant que la délégation a parlé uniquement des migrants victimes de la traite, elle s’interroge sur la situation des nationaux ou des membres de minorités victimes de la traite. Au sujet de la justice pour mineurs, Mme Belmir voudrait savoir ce qu’il en est de la responsabilité pénale des mineurs et, rappelant que la Convention relative aux droits de l’enfant considère comme un enfant toute personne de 0 à 18 ans, demande si l’État partie partage cette définition.

40.M. Bruni croit comprendre que de nouveaux organes indépendants ont été chargés de traiter les demandes d’asile mais qu’ils ne sont pas encore opérationnels. Il aimerait savoir quelle en est la raison et qui traite les demandes d’asile à l’heure actuelle. Au sujet de la surpopulation carcérale, il constate, d’après les chiffres fournis par la délégation, que les mesures et les plans mis en place pour remédier à ce problème ne semblent pas donner de résultats très substantiels. Dans les prisons de Koridalos et Larisa, par exemple, au cours des cinq dernières années, la surpopulation a diminué seulement de 300 à 250 % et de 300 à 200 % respectivement, en dépit des mesures prises. Tout complément d’information à ce sujet sera le bienvenu.

41.M me Gaer note qu’il est écrit dans le rapport du CPT que les examens des cavités corporelles sont réalisés de manière courante en Grèce et non sur la base d’une évaluation des risques. En outre, la délégation a indiqué que ces examens étaient pratiqués sur les détenus à leur retour de permission. Il serait utile qu’elle précise si chaque détenu est soumis à ce type de fouille à chaque fois qu’il rentre de permission ou si l’on procède cas par cas. En ce qui concerne les 502 enfants albanais portés disparus, Mme Gaer souhaiterait savoir s’il est envisagé de créer une commission bilatérale réunissant les autorités albanaises et grecques et peut-être aussi les médiateurs des deux pays, et demande quelles mesures ont été prises ou sont envisagées pour établir les responsabilités pénales et disciplinaires.

42.M. Gaye demande si les personnes qui dénoncent des actes de torture commis par des membres des forces de sécurité bénéficient de mesures de protection. Selon plusieurs organisations non gouvernementales, notamment Amnesty International, les lenteurs de la justice pénale seraient telles que certaines procédures aboutiraient à des prescriptions, et donc à des situations d’impunité. La délégation est invitée à commenter ces informations.

43.M. Wang Xuexian demande si la disposition faisant du motif de haine une circonstance aggravante de toute infraction a déjà été invoquée dans la pratique et si, dans l’affirmative, la délégation peut donner des exemples. Il souhaiterait par ailleurs des précisions sur les raisons invoquées pour justifier la détention des demandeurs d’asile, qui peut être autorisée dans le but de permettre un examen rapide et efficace des demandes d’asile mais semble revêtir en Grèce un caractère systématique. La délégation ayant indiqué qu’en 2010, le Gouvernement turc avait délivré 42 000 visas à des citoyens algériens, la question se pose de savoir où se trouvent à présent ces personnes.

44.Au sujet de la substitution des peines d’emprisonnement allant jusqu’à cinq ans par des amendes, M. Mari ñ o Menéndez dit que d’après la réponse écrite de la délégation, cette disposition s’appliquerait aussi aux peines prononcées pour des faits de torture, ce qui semble difficilement justifiable et appelle une explication. Par ailleurs, sur la nature transitoire des normes relatives à l’asile et la renégociation du Règlement Dublin II, M. Mariño Menéndez demande si en l’état actuel des choses, les permis de séjour délivrés à des étrangers pour motifs humanitaires ou parce que la personne a été victime de la traite prévoient des mesures comme le regroupement familial ou la possibilité de s’installer en Grèce. Il voudrait en outre savoir si les recours introduits contre des décisions de rejet de demandes d’asile ou de permis de séjour pour raisons humanitaires ont ou non pour effet de suspendre le renvoi des intéressés.

45.M. Tugushi note que malgré la fermeture de certains centres de rétention pour migrants et la réalisation de travaux d’amélioration dans plusieurs autres, comme ceux de la police des frontières de Tihero et Soufli, le CPT a fait état de conditions déplorables dans certains centres en 2011 encore. Il invite la délégation à commenter cette situation. En ce qui concerne le personnel pénitentiaire, il serait intéressant de disposer de chiffres sur l’évolution du nombre d’agents ces dernières années, sachant que des effectifs suffisants sont non seulement essentiels pour assurer la sécurité dans les prisons mais aussi pour créer un environnement sûr dans l’ensemble de l’institution. Pour ce qui est des examens subis par les prisonniers à leur retour de permission, il y a lieu de s’interroger sur la pratique apparemment courante de l’administration de laxatifs.

46.Le Président souhaite savoir dans quelle mesure la Grèce s’emploie à développer des solutions de substitution à la détention en faisant fond sur sa propre expérience et sur celle d’autres pays. Il invite la délégation à communiquer au Comité des statistiques sur les enfants en détention et sur les enquêtes pénales ouvertes en 2010 et 2011 suite à des plaintes pour mauvais traitements infligés par des membres des forces de l’ordre à des migrants, ainsi que sur les poursuites et les sanctions auxquelles elles ont pu donner lieu.

47.S’agissant de la fonction de mécanisme national de prévention, qui a été confiée au Médiateur, M me Sveaass (Rapporteuse pour la Grèce) demande s’il est vrai, comme l’affirment certaines sources, qu’il y aurait certaines limites au mandat du Médiateur par rapport à ce qui est prévu dans le Protocole facultatif, en particulier en ce qui concerne la mise en place d’un système de visites régulières et la possibilité de se rendre dans tous les lieux où se trouvent des personnes privées de liberté, y compris ceux qui ne sont pas officiellement des lieux de détention.

48.M me Belmir dit que la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un certain nombre d’arrêts concernant des violations du droit à un procès équitable et le comportement de la police en Grèce. Des circulaires ont été émises par les autorités compétentes pour y donner suite, mais il ne semble pas que cela ait permis de faire évoluer les comportements. Elle aimerait savoir à quoi cela est dû.

49.M me Gaer demande quelle formation est dispensée aux forces de police au sujet de la violence familiale et, quelles suites ont été données à la lettre adressée par le Comité à l’État partie au sujet du suivi du dernier examen de la situation de la Grèce. Compte tenu des informations figurant dans le rapport de la Grèce faisant état d’un nombre élevé d’arrestations d’Albanais mineurs et au vu de l’actualité récente, marquée par la montée du parti anti-immigration de l’Aube dorée, elle invite la délégation à donner un complément d’information sur les mécanismes de plainte auxquels ont accès les personnes victimes de violences xénophobes ou racistes ou de pratiques discriminatoires.

50.M. Ioannidis (Grèce) dit que la délégation a pris bonne note des observations du Comité concernant la nécessité d’harmoniser la définition de la torture figurant à l’article 137 du Code pénal avec celle énoncée à l’article premier de la Convention. Un projet de nouveau Code pénal est en cours d’élaboration. Des modifications ont déjà été apportées aux dispositions relatives à la torture afin de garantir que les agents de l’État condamnés pour ce type d’acte soient exclus de la fonction publique. Des mesures seront prises afin de garantir que le comité de rédaction du projet prenne en considération tous les instruments internationaux auxquels la Grèce est partie, dont la Convention, ainsi que la jurisprudence pertinente de la Cour européenne des droits de l’homme dans le cadre ses travaux.

51.En ce qui concerne la suite donnée aux arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme, M. Ioannidis dit que le Code de procédure pénale prévoit la possibilité de rouvrir une procédure lorsque cette juridiction conclut à une violation par la Grèce de la Convention européenne des droits de l’homme. Toutefois, le législateur semble avoir eu à l’esprit les cas dans lesquels les droits de l’accusé − et non ceux de la victime − sont lésés. Dans la pratique, lorsqu’une procédure aboutit à un acquittement ou à une peine trop légère et que la victime forme un recours, il est très rare que le procès soit rouvert et, s’il l’est néanmoins, la décision finale est généralement en faveur de l’accusé. M. Ioannidis reconnaît que cela représente une lacune et qu’il conviendrait de légiférer dans ce domaine.

52.La législation grecque ne contient pas de disposition spécifique sur le dépôt de plaintes confidentielles mais les dispositions relatives à la protection des victimes et des témoins peuvent être appliquées afin de préserver l’anonymat de l’auteur d’une plainte, notamment en cas de plainte visant des membres des forces de l’ordre. L’indépendance du bureau chargé d’examiner les allégations de brutalités policières est garantie par sa composition. En effet, son personnel, qui est composé de juges à la retraite, n’est pas hiérarchiquement subordonné au Ministère de la protection du citoyen.

53.La publication de l’identité et de photos de plusieurs femmes séropositives poursuivies par la justice, mesure critiquée non seulement par le Médiateur mais aussi par la Secrétaire générale à l’égalité, a été ordonnée par un procureur indépendant, qui a agi conformément à une disposition de la législation relative à la protection des données autorisant la divulgation de l’identité d’un suspect lorsque l’intérêt public est en jeu. Le Ministère de la justice examine actuellement la question de savoir si l’interprétation de cette disposition a été incorrecte comme l’affirme le Médiateur.

54.M. Karageorgos (Grèce) dit que les services de l’asile ont été décentralisés et que les demandes peuvent désormais être examinées dans tout le pays. Des renseignements sur la procédure d’asile sont disponibles en plusieurs langues sur le site Web de la police hellénique. Les demandeurs d’asile ne devraient certes pas être systématiquement privés de liberté mais, lorsqu’une personne n’a manifestement pas de motif valable de demander l’asile et abuse de ce droit, elle doit être placée en rétention tant que sa demande est en cours d’examen. Les autorités grecques ne savent pas où se trouvent actuellement les ressortissants algériens auxquels les autorités turques avaient délivré un visa en 2010.

55.En avril 2004, le rapport sur la disparition des quelque 500 enfants roms d’origine albanaise qui avaient été placés dans l’institution Aghia Varvara a été publié et, en 2007, tous les documents et informations disponibles sur cette affaire ont été transmis au ministère public pour suite à donner. Cependant, force est de reconnaître que, depuis, rien n’a été fait. La situation dans les centres de rétention situés aux frontières du pays laisse certes à désirer, mais des efforts considérables sont déployés pour y remédier et tout est mis en œuvre pour que le centre de premier d’accueil puisse ouvrir ses portes en automne 2012. Enfin, l’exécution d’une mesure de renvoi prononcée contre un demandeur d’asile débouté est suspendue dès lors que l’intéressé forme un recours.

56.M. Ioannidis (Grèce) indique à propos des fouilles corporelles que, dans les établissements pénitentiaires, 40 % des détenus ont été condamnés pour une infraction grave, notamment pour trafic de drogues, et que 50 % de la population carcérale est ou a été toxicomane. De ce fait, le risque d’introduction de drogues dans les prisons est très élevé. En outre, il est arrivé que des détenus meurent d’overdose et que l’administration pénitentiaire soit attaquée en justice par leur famille. Pour toutes ces raisons, lorsqu’un détenu a eu une permission de sortie, il doit impérativement être soumis à une fouille corporelle à son retour à la prison.

57.M. Kastanas (Grèce) dit que la grande majorité des personnes qui avaient été déchues de leur nationalité en application de la disposition abrogée en 1998 ont obtenu la nationalité d’un autre pays. Les personnes qui souhaiteraient être réintégrées dans la nationalité grecque ont la possibilité de demander leur naturalisation en vertu de la législation relative à la nationalité. À l’instar d’autres pays européens, la Grèce limite l’accès à la fonction publique à ses ressortissants. En revanche, il n’existe pas de restriction fondée sur l’origine sociale ou le sexe. À ce propos, il convient de souligner qu’en Grèce, 80 % des juges sont des femmes.

58.M. Ioannidis (Grèce) explique que si les nouveaux organes indépendants chargés d’examiner les demandes d’asile ne sont pas encore opérationnels, c’est parce qu’ils manquent encore des ressources financières et humaines voulues. À cela s’ajoute le fait qu’en Grèce, les procédures de recrutement sont très longues et qu’il faut compter au moins un an pour qu’une personne soit nommée.

59.Le centre de réadaptation des victimes de la torture d’Athènes a dû fermer ses portes en raison d’une pénurie de fonds. Toutefois, les hôpitaux publics, en particulier les établissements psychiatriques, sont dotés de structures qui sont à même de prendre en charge les personnes souffrant de séquelles de la torture.

60.Depuis 2010, plusieurs lois ont été adoptées afin de remédier aux lenteurs de la justice mais, comme l’a constaté la Cour européenne des droits de l’homme dans deux arrêts, ce problème est endémique. Le Ministère de la justice prend des mesures aussi bien législatives que techniques pour aider les juges à s’acquitter de leurs tâches. En 2011, 1 million de plaintes ont été déposées, ce qui est à la fois encourageant, car cela montre que la population est informée de ses droits et sait les faire valoir, et inquiétant, car cela implique un risque de paralysie du système. Des mesures ont donc été prises afin d’empêcher que le droit de plainte ne soit utilisé de manière abusive. En 2011, une loi autorisant l’avocat général de la Cour de cassation à accorder la priorité absolue aux affaires très importantes, dont les affaires de torture, a été adoptée.

61.Il est théoriquement possible qu’une peine prononcée contre l’auteur d’actes de torture soit commuée en amende si elle n’est que de trois ans d’emprisonnement parce que le juge a tenu compte de circonstances atténuantes. Toutefois, il est hautement improbable que ce cas de figure se produise car un juge ne saurait prononcer une peine aussi légère dans une affaire de torture.

62.M. Karageorgos (Grèce)dit qu’en attendant que la nouvelle structure chargée de l’asile soit opérationnelle, 10 comités habilités à statuer sur les demandes d’asile ont été créés. Six d’entre eux sont chargés d’examiner les demandes soumises jusqu’en octobre 2010 et quatre s’occupent des demandes soumises après octobre 2010.

63.M. Ioannidisse félicite du dialogue engagé avec le Comité et dit que ses futures recommandations seront dûment prises en considération par les autorités grecques.

La séance est levée à 18 heures.