Nations Unies

CAT/C/SR.1214

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

6 mai 2014

Original: français

Comité contre la torture

Cinquant e-deuxième session

Co mpte rendu analytique de la première partie (publique)* de la 1214 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 30 avril 2014, à 10 heures

Président (e): Mme Belmir (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Rapport initial de la Thaïlande

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19 de la Convention (suite)

Rapport initial de la Thaïlande (CAT/C/THA/1; HRI/CORE/THA/2012)

Sur l’invitation de la Présidente, la délégation thaïlandaise prend place à la table du Comité.

M. Savestanan (Thaïlande) dit que bien que la Thaïlande ait formulé des déclarations interprétatives concernant les articles 1er, 4 et 5 de la Convention, sa législation n’admet en aucun cas le recours à la torture. De même, si le Code pénal actuel ne contient pas de définition de la torture et ne prévoit pas expressément cette infraction, il comporte des dispositions comparables à celles de l’article premier de la Convention. Le Code de procédure pénale, pour sa part, dispose que lorsqu’il recueille la déclaration de l’auteur présumé d’une infraction, l’agent chargé de l’enquête n’a pas le droit de conclure des arrangements entraînant l’octroi de garanties, d’user de promesses, de menaces, de tromperie ou de recourir à la torture ou à la force ou à tout autre acte illégal pour amener l’auteur présumé de l’infraction à faire une déclaration concernant les charges retenues contre lui.

Le Gouvernement thaïlandais s’emploie actuellement à modifier sa législation interne pour la mettre en conformité avec la Convention. Il a ainsi achevé l’élaboration d’un projet de loi portant modification du Code pénal, qui incrimine la torture et dispose que tout agent administratif, policier ou enquêteur qui commet des actes de torture est puni d’une peine pouvant aller jusqu’à la réclusion à perpétuité et d’une amende, et d’un projet de loi portant modification du Code de procédure pénale prévoyant que toute personne victime de torture ou soumise à une peine cruelle, inhumaine ou dégradante peut saisir les tribunaux et bénéficier de mesures de protection et de réparation. De plus, la Thaïlande envisage d’adhérer au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et, dans cette perspective, elle examine la possibilité de désigner la Commission nationale des droits de l’homme comme mécanisme national de prévention. En ce qui concerne la peine de mort, la possibilité de l’abolir est évoquée dans le troisième Plan national en faveur des droits de l’homme, qui sera soumis sous peu au Conseil des ministres.

Le Gouvernement s’efforce de résoudre pacifiquement la situation dans les provinces frontalières du sud. Les lois spéciales qu’il a promulguées afin d’assurer la paix et la sécurité de la population dans cette région sont appliquées dans le strict respect des principes de nécessité et de proportionnalité. Le Gouvernement est pleinement conscient des préoccupations exprimées par les organisations internationales et les ONG concernant la situation des droits de l’homme dans la région. Il tient néanmoins à souligner qu’il ne ménage aucun effort pour améliorer les conditions de vie de la population, pour préserver l’identité culturelle locale et pour protéger les droits de tous les groupes, sans discrimination.

Le Gouvernement a pris de nombreuses mesures pour mieux faire connaître les dispositions de la Convention et pour promouvoir l’éducation aux droits de l’homme. Depuis 2013, l’Institut national de médecine légale, en collaboration avec le Ministère de la justice, propose une série de modules de formation destinés aux médecins souhaitant se spécialiser dans l’examen de victimes présumées de torture. Le Ministère de la justice a également mis en place, à l’échelle nationale, une formation des formateurs aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels la Thaïlande est partie, y compris la Convention, à l’intention notamment des policiers, des militaires et des fonctionnaires des organes judiciaires. Par ailleurs, des matériels d’information sur les droits de l’homme et sur les obligations y relatives sont diffusés auprès de la population et des policiers et des militaires en poste dans les provinces frontalières du sud. Enfin, il convient de signaler que la Thaïlande a adressé une invitation permanente à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme, notamment le Rapporteur spécial sur la question de la torture, qui effectuera une visite dans le pays en août 2014.

M m e  Gaer (Rapporteuse pour la Thaïlande) dit que le Comité accueille avec une grande satisfaction le rapport initial de l’État partie mais qu’il souhaiterait connaître les raisons pour lesquelles celui-ci a été soumis avec cinq ans de retard. Elle note que dans son document de base commun, l’État partie indique que, conformément à un engagement pris dans le cadre de l’Examen périodique universel, il a retiré les déclarations qu’il avait formulées concernant certains instruments relatifs aux droits de l’homme. La délégation pourra peut-être préciser s’il envisage d’en faire autant pour les déclarations qu’il a formulées au sujet de la Convention. Elle voudra bien indiquer également si une échéance a été fixée pour la désignation du mécanisme national de prévention de la torture.

La Rapporteuse constate avec inquiétude que la définition de la torture qui figure dans le projet de loi portant modification du Code pénal n’est pas conforme à celle énoncée dans l’article premier de la Convention. En effet, le terme «torture» y désigne un viol, une agression physique causant des lésions corporelles graves ou une agression physique entraînant des souffrances mentales prolongées, ce qui exclut, par exemple, certaines formes de torture psychologique. Ainsi, pour être qualifiés de torture, les actes visés par ce texte devraient entraîner une douleur ou des souffrances plus aiguës que ceux visés par la Convention. En outre, le projet de loi ne prévoit pas l’ensemble des nombreux motifs pour lesquels des actes de torture peuvent être infligés, notamment la discrimination, et la définition de l’agent de la fonction publique qui y figure pourrait ne pas couvrir tous les auteurs potentiels d’actes de torture. Au nombre des autres préoccupations suscitées par ce projet de loi figure le fait qu’il n’interdit pas expressément d’invoquer quelque circonstance que ce soit ou l’ordre d’un supérieur pour justifier la torture et qu’il n’exclut pas la prescription de l’infraction de torture. La délégation voudra bien indiquer, compte tenu de ce que ce projet de loi a été établi sous sa forme définitive, quelles mesures le Gouvernement pourrait encore prendre pour tenir compte de ces préoccupations et faire en sorte que l’interdiction de la torture qui sera inscrite dans la loi couvre tous les éléments de l’article premier de la Convention.

La délégation est priée de donner des renseignements supplémentaires sur les garanties prévues par le Code de procédure pénale pour protéger les personnes privées de liberté parce qu’elles sont soupçonnées d’une infraction et d’indiquer si ces personnes ont le droit de consulter un médecin indépendant et si tous les lieux de détention ont l’obligation de tenir des registres fiables et de les mettre à la disposition des détenus, de leurs avocats et des membres de leur famille. Il conviendrait également de donner des renseignements sur la manière dont le Gouvernement assure le respect de ces garanties dans la pratique et dont il surveille le comportement des membres des forces de sécurité à cet égard. La délégation pourrait peut-être, par exemple, indiquer comment le Gouvernement contrôle le respect par les policiers du droit de toute personne privée de liberté d’être assistée par un conseil lorsqu’elle est interrogée, et si des policiers dont il a été établi qu’ils ont violé le Code de procédure pénale en privant une personne privée de liberté du droit de prendre contact avec un avocat ont été sanctionnés. Il serait également intéressant de savoir combien de détenus ont présenté une requête en habeas corpus aux tribunaux au cours des dernières années et combien d’entre eux ont été libérés après qu’il y a été fait droit.

La législation d’urgence promulguée dans les provinces du sud soulève de nombreuses questions, notamment en ce qui concerne les garanties minimales pour les personnes accusées d’une infraction. D’après les informations reçues par le Comité, 5 283 arrêtés d’urgence auraient été pris et 4 080 suspects auraient été arrêtés en vertu du seul décret relatif à l’administration publique dans les situations d’urgence (2005). Il serait intéressant de savoir combien de personnes ont été privées de liberté en vertu de ce décret depuis que la Thaïlande a adhéré à la Convention contre la torture. La délégation est invitée à indiquer si le Gouvernement envisage de prendre des mesures pour renforcer la protection de tous les détenus contre la torture dans le sud du pays, pour exiger que toute personne privée de liberté soit présentée à un juge dans un délai de quarante-huit heures et pour modifier les directives relatives à l’application du décret relatif à l’administration publique dans les situations d’urgence afin qu’elles disposent clairement que tout détenu a le droit de contacter rapidement un avocat et d’être examiné par un médecin indépendant s’il en fait la demande. La délégation voudra bien également décrire les mesures prises pour faire en sorte que les autorités respectent les garanties auxquelles ont droit les détenus, ainsi que les méthodes employées pour repérer et sanctionner les cas de déni de ces garanties.

Seuls deux exemples d’affaires dans lesquelles des agents de la fonction publique ont été condamnés pour des actes de torture figurent dans le rapport initial (arrêts no 1399/2508 et no 706/2516 de la Cour suprême) alors que les allégations de torture signalées au Comité, notamment par la Commission nationale des droits de l’homme, se comptent par centaines. La délégation est priée de donner des précisions sur ces deux affaires, en indiquant notamment le grade des agents poursuivis, la date et le lieu des infractions et la peine prononcée. Des informations détaillées sur toute mesure disciplinaire prise contre des agents de l’État accusés d’actes de torture au sens de la Convention et sur le nombre de plaintes pour torture reçues par les organismes compétents de l’État et de poursuites engagées depuis l’adhésion de la Thaïlande à la Convention seraient également les bienvenues.

La Rapporteuse note avec préoccupation que, dans certains cas, les organes compétents de l’État ont établi que des fonctionnaires avaient commis des actes de torture mais que les coupables n’ont pas été poursuivis et encore moins sanctionnés, notamment dans les affaires concernant Imam Yapa Kaseng, battu à mort par des militaires en 2008, et Ashari Samae-ae, mort en juillet 2007 des lésions cérébrales provoquées par les coups des policiers et des militaires qui l’avaient arrêté. Les informations sur l’impunité dont jouissent les auteurs d’actes conduisant à des disparitions forcées sont également très préoccupantes. À cet égard, Mme Gaer cite la disparition forcée de Jahwa Jalo en 2003, de Somchai Neelapaijit en 2004, de Kamon Laosopapan en 2008 et de Por Cha Lee Rakchongcharoen, connu sous le nom de «Billy», en avril 2014. Dans le cas de Somchai Neelapaijit, de hauts responsables ont déclaré publiquement que la victime avait été torturée et tuée par les autorités, mais les responsables n’ont fait l’objet d’aucune action pénale. Dans une autre affaire, concernant la disparition forcée de Mayateng Maranor en 2007, des indemnités ont été versées à la famille en vertu d’une décision du comité de compensation et de restitution pour les personnes touchées par les troubles dans le sud du pays mais aucun agent de l’État n’a été poursuivi. Dans ce contexte, et compte tenu du fait que le Gouvernement thaïlandais envisage de ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, il serait intéressant de savoir s’il est prévu d’ériger les disparitions forcées en infraction pénale. La délégation pourrait en outre indiquer s’il est prévu de modifier la loi martiale de 1914 ainsi que l’article 17 du décret relatif à l’administration publique dans les situations d’urgence, qui favorise l’impunité en soustrayant expressément aux actions civiles, pénales et disciplinaires les agents de l’État compétents exerçant dans certaines conditions les pouvoirs et les devoirs que leur confère le décret, et préciser quelles mesures ont été prises pour signifier clairement à tous les agents de l’État que le Gouvernement thaïlandais est résolu à éliminer la torture et à punir les auteurs de tels actes. La Rapporteuse souhaite également savoir si la Thaïlande envisage de confier aux juridictions civiles plutôt que militaires la responsabilité des poursuites contre les militaires ayant commis des actes de torture.

Il ressort des renseignements dont dispose le Comité que les mécanismes de plainte existants, notamment la Commission nationale des droits de l’homme, ne sont pas en mesure de déclencher immédiatement une enquête impartiale et efficace en cas d’allégations de torture du fait d’un manque général d’indépendance. La plupart des enquêtes sur les plaintes pour torture sont menées par les services dont relèvent les personnes visées. Deux organes extérieurs à la police, à l’administration pénitentiaire et aux services de sécurité, à savoir la Division des enquêtes spéciales et la Commission nationale de lutte contre la corruption, sont habilités à enquêter sur ce type d’actes. Il serait utile d’avoir des précisions sur leurs attributions exactes et sur le nombre d’affaires qui leur ont été soumises et la suite donnée à ces affaires et de savoir si le Gouvernement envisage de prendre des mesures pour renforcer leurs capacités et leur indépendance. La possibilité existe également pour les victimes de saisir directement un tribunal mais il semblerait qu’elle soit peu utilisée, en particulier dans les provinces du sud. La délégation est invitée à donner des explications sur ce point et au sujet des dispositions pertinentes du projet de loi portant modification du Code de procédure pénale (Article 90/1). Elle voudra bien également indiquer ce qui est fait pour améliorer et renforcer les dispositifs de protection des plaignants et des témoins dans les affaires de torture et pour encourager les victimes à porter plainte.

En ce qui concerne les conditions pénitentiaires, Amnesty International et la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH) signalent de nombreux actes de violence, notamment des passages à tabac et des viols, commis par les agents pénitentiaires et par des détenus bénéficiant de certains privilèges (trusty) dans différentes prisons. Il serait utile de savoir si ces incidents ont fait l’objet d’enquêtes et si des sanctions disciplinaires ou pénales ont été prises. L’utilisation des moyens de contrainte en prison constitue un autre sujet de préoccupation. La délégation est invitée à préciser si le Gouvernement a clairement indiqué aux agents pénitentiaires que les entraves ne doivent être utilisées qu’en cas de nécessité absolue et s’il encourage d’autres moyens de contrôle, comme les bracelets électroniques. Des précisions sur la composition, le mandat et les pouvoirs du comité chargé de surveiller l’utilisation de moyens de contrainte en détention seraient en outre les bienvenues. Regrettant que la Thaïlande n’ait pas fourni des données suffisantes sur la forte surpopulation et les mauvaises conditions sanitaires dans les prisons et dans les centres de rétention de migrants, la Rapporteuse cite le décès de 2 personnes détenues avec 78 autres personnes au centre de rétention de Ranong en 2009 et celui de 5 Rohingyas, en 2014, peu après leur placement dans un centre de rétention. Elle demande si les établissements où ces décès ont eu lieu ont été inspectés et si des fonctionnaires ont été sanctionnés. Elle souhaite également savoir si les détenus ont accès à un avocat et si des peines de substitution sont utilisées pour remédier au surpeuplement carcéral.

D’après certaines informations, les autorités thaïlandaises auraient renvoyé des demandeurs d’asile rohingyas au Myanmar et empêché des embarcations transportant des personnes appartenant à cette minorité de s’approcher des côtes thaïlandaises. La Rapporteuse souhaiterait savoir si une enquête a été ouverte sur ces allégations et demande sur quels éléments les autorités se fondent pour déterminer si un demandeur d’asile court un risque de torture en cas de renvoi. En 2005, 2008 et 2009, les autorités thaïlandaises ont renvoyé en République démocratique populaire lao plusieurs groupes de Hmongs, parmi lesquels 158 personnes qui avaient été identifiées par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) comme courant le risque d’être arrêtées et torturées en cas de renvoi dans leur pays. D’après des sources crédibles, l’une des personnes rapatriées de force en 2009 aurait été arrêtée en 2011 et serait décédée en garde à vue des suites d’actes de torture. La délégation voudra bien expliquer pourquoi l’État partie n’a pas tenu compte de l’évaluation du HCR ni des inquiétudes exprimées par Amnesty International au sujet de ces renvois.

La délégation est invitée en outre à donner des statistiques sur la population carcérale ainsi que sur le nombre de femmes et de mineurs en détention, de prévenus, de personnes placées dans un centre de désintoxication, de suspects détenus en application du décret relatif à l’administration publique dans les situations d’urgence, de décès en détention et d’enquêtes ouvertes sur ces incidents, en précisant quelle a été l’issue de ces enquêtes. La délégation voudra bien indiquer si des poursuites ont été intentées contre les militaires soupçonnés d’avoir torturé à mort l’imam Yapa Kaseng pendant sa garde à vue et si une enquête impartiale a été ouverte sur l’incident survenu en octobre 2004, au cours duquel 78 personnes qui avaient été entassées dans des camions en vue d’être transférées dans une caserne militaire sont mortes asphyxiées. Étant donné que les tribunaux nationaux ont considéré que les fonctionnaires mis en cause n’avaient pas commis de faute professionnelle, il serait intéressant de savoir si les proches de ces 78 personnes ont la possibilité de réclamer l’ouverture d’une nouvelle enquête et de demander réparation. La délégation est également invitée à commenter l’une des conclusions du rapport de la Commission nationale des droits de l’homme, dont il ressort que les prévenus et les condamnés ne sont pas séparés dans les lieux de détention, et demande si les autorités thaïlandaises ont autorisé un organe indépendant à surveiller les conditions de détention dans les locaux relevant du Ministère de la défense et dans le centre des opérations de la police des provinces frontalières du sud, comme recommandé par la Commission nationale des droits de l’homme dans son rapport.

La Rapporteuse aimerait en outre savoir si l’État partie entend prendre des mesures pour que la violence dans la famille ne soit plus considérée comme un litige susceptible d’être réglé à l’amiable mais comme une infraction grave passible de poursuites et de sanctions pénales. Elle demande si le Gouvernement a appliqué les recommandations que lui a adressées la Rapporteuse spéciale sur les droits fondamentaux des victimes de la traite des êtres humains, en particulier les femmes et les enfants à l’issue de sa visite en 2011 (A/HRC/20/18/Add.2). Enfin, la délégation est invitée à fournir des statistiques sur le nombre d’affaires dans lesquelles les tribunaux ont déclaré irrecevables des déclarations faites sous la torture et à commenter les allégations selon lesquelles les médecins auraient des réticences à établir l’existence de séquelles d’actes de torture par crainte de représailles.

M. Gaye constate à la lecture du paragraphe 62 du rapport que la procédure pénale de l’État partie comporte des lacunes en ce qui concerne les garanties fondamentales, en particulier le droit de tout suspect de voir un médecin quel que soit son état de santé et de s’entretenir avec un avocat de son choix dès le début de la privation de liberté. La délégation est invitée à formuler des observations sur ce point.

M. Modvig demande combien de médecins participeront aux programmes de formation que la délégation a évoqués dans sa déclaration liminaire et quelle sera la teneur et la durée de ces programmes. Il souhaiterait savoir si les médecins ainsi formés pourront examiner les détenus dès leur arrivée dans un lieu privatif de liberté, participer aux visites effectuées par des entités indépendantes dans les lieux de détention et établir des documents attestant l’existence de séquelles de torture en se fondant sur le Protocole d’Istanbul. M. Modvig aimerait en outre savoir si les médecins reçoivent une formation dans le domaine de la réadaptation physique et psychologique des victimes de la torture. Enfin, il demande si le Gouvernement thaïlandais pourrait autoriser les organisations de la société civile à se rendre dans les lieux de détention en attendant que le mécanisme national de prévention soit mis en place.

M. Domah note que le rapport contient des renseignements trop généraux pour que le Comité puisse se faire une idée précise de la façon dont la Convention est concrètement appliquée dans l’État partie. Il serait utile de disposer de statistiques à l’appui de l’affirmation faite au paragraphe 93 du rapport selon laquelle le nombre de cas de torture a baissé depuis l’adhésion de la Thaïlande à la Convention.

M. Zhang Kening, lisant au paragraphe 41 du rapport qu’en matière pénale, les procureurs publics et les personnes lésées peuvent intenter une action en justice ou se constituer partie civile, prie la délégation de citer des exemples d’affaires dans lesquelles cette possibilité a été exploitée et demande quelle est son utilité.

M. Tugushi voudrait savoir si l’État partie envisage d’abroger les lois spéciales et les dispositions autorisant le placement de détenus à l’isolement pendant des périodes prolongées et si les personnes démunies peuvent bénéficier de l’aide juridictionnelle. Il demande en outre si des mesures ont été prises pour poursuivre les membres du personnel pénitentiaire soupçonnés d’infliger des mauvais traitements aux détenus et si les autorités thaïlandaises ont l’intention de mettre fin à la rétention administrative illimitée de migrants en situation irrégulière. Étant donné que les conditions régnant dans les centres de rétention constituent en elles-mêmes un traitement inhumain et dégradant, il serait intéressant de savoir si l’État partie pourrait envisager de ne plus y placer de familles avec enfants et de mineurs non accompagnés. Enfin, sachant que, dans les camps de réfugiés, des violences sont commises aussi bien par des gardiens que par des réfugiés, la délégation est invitée à préciser si des fonctionnaires chargés de l’administration ou de la surveillance de ces camps ont eu à répondre de ces incidents.

M. Grossman demande si l’État partie envisage de proclamer un moratoire sur la peine de mort et s’il reconnaît que des disparitions forcées sont survenues dans le pays. Si tel est le cas, il aimerait savoir si des enquêtes ont été ouvertes et si des personnes ont été poursuivies et condamnées pour ce type de faits et si les proches des personnes disparues ont obtenu pleinement réparation. À ce propos, il serait intéressant de savoir si la Thaïlande envisage d’incorporer dans son droit interne l’Observation générale no 3 du Comité concernant l’application de l’article 14 de la Convention (CAT/C/GC/3). La délégation voudra bien également décrire le système d’examen des demandes d’asile et indiquer si celui-ci permet de déterminer efficacement l’existence d’un risque de torture en cas de renvoi et de prévenir ainsi toute violation de l’article 3 de la Convention. Il serait utile de savoir si l’État partie envisage de prendre des mesures législatives afin que les affaires concernant des civils ne puissent plus être jugées par des juridictions militaires et soient uniquement du ressort des tribunaux ordinaires.

La Présidente demande si les lois spéciales en vigueur dans le sud du pays s’inscrivent dans la logique de l’état d’urgence et si l’État partie s’emploie à faire respecter le principe de l’égalité de tous les citoyens devant la loi dans cette région. D’après des informations, les femmes malaysiennes vivant en Thaïlande seraient victimes de discrimination. La délégation est invitée à donner des explications à ce sujet.

La première partie (publique) de la séance prend fin à midi.