Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants |
Distr. GÉNÉRALE CAT/C/SR.524/Add.1 14 novembre 2002 Original: FRANÇAIS |
COMITÉ CONTRE LA TORTURE
Vingt-huitième session
COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA DEUXIÈME PARTIE (PUBLIQUE)*DE LA 524e SÉANCE
tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 15 mai 2002, à 11 h 55
Président: M. BURNS
SOMMAIRE
DISCUSSION ENTRE LES MEMBRES DU COMITÉ ET LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA TORTURE
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*Le compte rendu analytique de la première partie (privée) de la séance est publié sous la cote CAT/C/SR.524.
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Le présent compte rendu est sujet à rectifications.
Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.
Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.
La partie publique de la séance commence à 11 h 55.
DISCUSSION ENTRE LES MEMBRES DU COMITÉ ET LE RAPPORTEUR SPÉCIAL SUR LA TORTURE
1.Le PRÉSIDENT, souhaite la bienvenue au nouveau Rapporteur spécial sur la torture, M. Theo van Boven, et lui demande s’il entend suivre la voie tracée par son prédécesseur, tout particulièrement en ce qui concerne l’engagement qu’avais pris celui‑ci de ne pas traiter de la situation dans un pays pour lequel une procédure lancée par le Comité au titre de l’article 20 de la Convention n’est pas achevée.
2.M. van BOVEN (Rapporteur spécial sur la torture) dit qu’il appliquera les mêmes méthodes que son prédécesseur. Des tensions peuvent apparaître lorsqu’un comité et un rapporteur traitent des mêmes questions, mais il ne devrait pas a priori y en avoir entre le Rapporteur spécial sur la torture et le Comité contre la torture. Les deux parties mènent des travaux complémentaires, sur des bases juridiques et selon des procédures différentes, mais poursuivent le même but qui est de contribuer à l’interdiction de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Ils ne peuvent pas toujours éviter les doubles emplois, mais ils doivent à tout prix veiller à ce qu’il n’y ait pas de contradictions dans leurs conclusions et recommandations pour ne pas saper l’autorité de l’un ou de l’autre. C’est là un engagement mutuel qu’ils peuvent prendre. Le travail du Rapporteur spécial peut être considéré, entre autres, comme s’inscrivant dans le cadre du suivi des conclusions et recommandations du Comité. Comme son prédécesseur, M. van Boven fera fréquemment référence à celles‑ci dans ses rapports. Le Comité peut quant à lui consulter utilement les documents établis par le Rapporteur spécial.
3.Le Rapporteur spécial a des possibilités limitées. Il ne peut visiter qu’environ deux pays par an et doit donc choisir ceux‑ci avec le plus grand soin. Il lance, d’autre part, 10 à 20 appels urgents par semaine, soit seul, soit avec d’autres rapporteurs. Ces appels ont un caractère essentiellement humanitaire. Le Comité en revanche applique des procédures quasi juridiques (critères de recevabilité, épuisement des recours internes, etc.). Le Rapporteur spécial traite de nombreux cas visés à l’article 3 de la Convention contre la torture. Dans ce domaine, il est important, dans le cas où un préjudice irréparable risque d’être causé, que le Comité demande à l’État concerné de prendre des mesures provisoires.
La coopération et la coordination sont extrêmement importantes à la fois entre le Comité et le Rapporteur spécial et entre les groupes du secrétariat qui leur fournissent des services.
4.Le PRÉSIDENT dit que le Comité ne manquera pas en toutes occasions de se référer aux rapports ou communications émanant du Rapporteur spécial.
5.Mme GAER rappelle qu’au moment de la création du Comité, l’idée avait été exprimée que son mandat n’était peut‑être pas assez large. Lorsque le poste de rapporteur spécial sur la torture a été établi, certains ont pensé que ce dernier pourrait, d’une part, exercer une certaine supervision sur les États non parties à la Convention contre la torture et, d’autre part, examiner des cas pouvant relever d’une définition de la torture plus large que celle qui figure dans la Convention. Par ailleurs, en ce qui concerne les situations visées par l’article 20 de la Convention, il avait été dit que le Rapporteur spécial pourrait peut‑être jouer un rôle de procureur général et communiquer des informations pertinentes au Comité. Tel n’a pas été le cas. Quel est l’avis de M. van Boven sur toutes ces questions?
6.M. van BOVEN (Rapporteur spécial sur la torture) précise qu’il s’intéresse à tous les États Membres des Nations Unies, qu’ils soient ou non parties à la Convention contre la torture. Pour le Rapporteur spécial comme pour le Comité, la Convention est un document fondamental, mais le premier doit aussi tenir compte de l’évolution survenue sur le plan juridique depuis l’adoption de cet instrument; il doit par exemple prendre en considération le fait que, dans le Statut de la Cour pénale internationale, la torture est mentionnée dans la liste des crimes contre l’humanité. L’approche du Rapporteur spécial diffère de celle du Comité essentiellement sur le plan des appels urgents parce que ceux‑ci sont lancés pour des raisons purement humanitaires.
7.Dans les cas où le Comité a lancé la procédure visée à l’article 20 de la Convention, c’est à celui‑ci qu’il appartient de déterminer si le Rapporteur spécial a un rôle à jouer dans ce contexte. Pour pouvoir intervenir, il faut que le Rapporteur spécial soit informé de la procédure engagée. Les principes de confidentialité s’appliquant à l’un et à l’autre, ceci ne devrait pas poser de problèmes. Le Rapporteur spécial est quant à lui tout à fait disposé à fournir au Comité toutes les informations utiles dont il pourrait disposer, en particulier par le biais de la coopération et de la coordination au sein du secrétariat.
8.Dans son rapport de l’année précédente, le Comité indique qu’il a longuement examiné la situation au Pérou et que le Gouvernement de ce pays a approuvé ses conclusions. M. van Boven aimerait savoir si les conclusions concernant un État sont soumises à l’approbation de ce dernier avant d’être publiées dans le rapport du Comité?
9.Le PRÉSIDENT indique que le Comité publie ses rapports sans demander au préalable le consentement des gouvernements concernés.
10.M. MARIÑO MENENDEZ se félicite de l’échange de vues en cours entre les membres du Comité et le nouveau Rapporteur spécial sur la torture et demande à ce dernier s’il compte, comme son prédécesseur, se consacrer aux questions relatives à l’intimidation, aux disparitions forcées ou involontaires, à la discrimination à l’égard des minorités sexuelles, à l’impunité, à la prévention et à la transparence ou s’il envisage d’aborder d’autres problèmes. Comme le travail du Rapporteur spécial se fonde sur un cadre normatif plus flexible que celui de la Convention, M. Mariño Menendez se demande si celui‑ci est habilité à effectuer des enquêtes dans le cadre de conflits armés. Il aimerait également savoir si, dans la pratique, le Rapporteur spécial a lancé des appels urgents à des fins préventives en coopération avec des organes conventionnels.
11.M. van BOVEN dit qu’il a examiné de très près le travail accompli par son prédécesseur et considère que les domaines susmentionnés méritent la plus grande attention. Toutefois, les événements du 11 septembre et leurs retombées ont modifié la situation des droits de l’homme dans le monde. D’une part, il importe de lutter contre le terrorisme, mais dans le même temps, il faut à tout prix préserver les valeurs relatives aux droits de l’homme. M. van Boven tient à souligner, à cet égard, le caractère impératif et intangible de l’interdiction de la torture et du principe de non‑refoulement. Il précise que son travail est également axé sur des notions fondamentales de droit humanitaire telles que celles qui figurent dans les Conventions de Genève de 1949 et les Protocoles additionnels. En l’absence de mécanismes de surveillance du respect du droit humanitaire, il est capital que les détenteurs de mandat de la Commission des droits de l’homme puissent effectuer des missions sur le terrain avec l’assentiment du gouvernement concerné.
12.M. van Boven dit qu’il n’a pas connaissance d’appels urgents qui aient été lancés en coopération avec des organes conventionnels. Par contre, certains appels sont lancés en coopération avec d’autres rapporteurs spéciaux. À ce sujet, il déplore, vu le nombre élevé de rapporteurs spéciaux, le peu de temps que la Commission des droits de l’homme consacre aux activités de chacun d’eux.
13.M. MAVROMMATIS dit qu’il serait judicieux que le Comité procède avec le Rapporteur spécial à des échanges d’informations, en particulier sur des situations de pays au titre de l’article 20 de la Convention en vertu duquel le Comité peut notamment procéder à une enquête confidentielle s’il reçoit des renseignements crédibles qui lui semblent contenir des éléments bien fondés indiquant que la torture est pratiquée systématiquement sur le territoire d’un État partie. Il est essentiel d’instaurer une coopération et une coordination efficaces dans l’intérêt des deux parties et de la cause qu’elles défendent.
14.M. van BOVEN dit que seules une coordination et une coopération parfaites au sein du Haut‑Commissariat aux droits de l’homme, notamment entre tous les fonctionnaires du secrétariat, peuvent permettre d’éviter certains écueils bureaucratiques, et il reconnaît que des progrès doivent encore être réalisés dans ce domaine, même si certaines mesures ont déjà été prises (par exemple, la création d’un coordonnateur chargé de veiller à ce que les appels urgents soient réellement lancés dans les 24 heures).
15.M. van Boven se félicite des contacts utiles instaurés entre le Comité et lui‑même sur les mesures provisoires. En effet, lorsque le Comité doit décider s’il faut par exemple demander que de telles mesures soient prises, l’avis du Rapporteur spécial peut s’avérer précieux.
16.Le PRÉSIDENT informe M. van Boven et les membres du Comité que Mme Gaer et lui‑même ont rédigé un bref projet de déclaration à diffuser à l’occasion de la Journée internationale de soutien aux victimes de la torture (CAT/C/XVIII/Misc.11). Le texte est axé sur le projet de protocole facultatif à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et sur la question de la création d’un mécanisme de visites d’inspection préventives sur les lieux de détention.
17.Mme GAER donne lecture du projet de déclaration.
18.M. van BOVEN prend acte avec satisfaction du texte du projet de déclaration et dit qu’il soutient sans réserve l’adoption rapide du protocole facultatif à la Convention qui représente une solution équilibrée et complémentaire qui fait appel à la fois aux mécanismes nationaux et aux mécanismes internationaux. Il suggère cependant de remplacer l’expression «lieux de détention» qui lui semble restrictif par «lieux où se trouvent des personnes privées de liberté».
19.Le PRÉSIDENT dit qu’il accepte cette proposition. Après avoir remercié M. van Boven d’avoir accepté de venir s’entretenir avec les membres du Comité, il invite ces derniers à reprendre l’examen du projet de déclaration à une prochaine séance.
La séance est levée à 12 h 50.
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