Nations Unies

CAT/C/SR.1063

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

16 mai 2012

Original: français

Comité contre la torture

Quarante-huitième session

Co mpte rendu analytique de la 1063 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 9 mai 2012, à 15 heures

Président: M. Grossman

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 19de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de l ’ Albanie (suite)

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l ’ article 19 de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de l ’ Albanie (CAT/C/ALB/2; CAT/C/ALB/Q/2 et Add.1; HRI/CORE/1/Add.124) (suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation albanaise reprend place à la table du Comité.

2.M. Peka (Albanie) dit qu’en vertu de l’article 112 de la Constitution, la Convention fait partie intégrante du droit interne et qu’elle est donc directement applicable par les tribunaux nationaux. En vertu de l’article 250 du Code pénal, on entend par «acte arbitraire» le fait pour un fonctionnaire agissant au nom de l’État ou d’un service public de commettre des actes ou de donner des ordres arbitraires portant atteinte à la liberté des citoyens. Ces actes sont passibles d’une amende ou d’une peine de sept ans d’emprisonnement. En ce qui concerne l’applicabilité de l’article 86 du Code pénal, qui définit la torture, M. Peka souligne que celle-ci dépend des éléments constitutifs de l’infraction.

3.En mars 2012, le Code pénal a été modifié par l’introduction de nouvelles dispositions réprimant la violence dans la famille. Ainsi, en vertu du paragraphe a) de l’article 130 dudit Code, le fait d’infliger des coups ou d’autres formes de violence à un conjoint ou un ex-conjoint dans le but notamment de porter atteinte à son intégrité physique ou psychologique est passible de deux ans d’emprisonnement. Si ces violences ont entraîné un handicap ou une incapacité de travail de plus de neuf jours, la peine encourue est de cinq ans d’emprisonnement. En cas de récidive, la peine est d’un an à cinq ans d’emprisonnement.

4.En 2011, le Bureau du Procureur chargé des infractions graves a enquêté sur 28 plaintes pour traite. Deux affaires de traite de mineurs ont été portées devant les tribunaux. Treize plaintes ont été classées ou ont abouti à un non-lieu et dans les 13 autres affaires, dont 9 concernent la traite des femmes, 3 la traite des mineurs et 1 la traite des personnes, l’instruction est toujours en cours.

5.En 2011, le tribunal de première instance chargé des infractions graves a jugé 13 affaires de traite et rendu une décision finale dans 11 d’entre elles. Au total, 18 personnes ont été ou vont être jugées par cette juridiction. Six ont été condamnées à des peines allant de dix à quinze ans d’emprisonnement et au versement de 4 à 6 millions de leks de dommages-intérêts (soit environ 38 000 à 57 000 euros). De plus, le tribunal de première instance chargé des infractions graves a ordonné le gel des avoirs bancaires de deux personnes soupçonnées de trafic d’êtres humains et de leurs complices qui sont poursuivis en Grèce pour diverses infractions pénales, dont la traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle. Cette affaire est en instance devant la Cour d’appel de Tirana. En 2011, cette dernière a réexaminé 12 décisions relatives à des affaires de traite. Elle a confirmé sept décisions du tribunal de première instance, annulé une décision, commué la peine et réduit le montant des dommages-intérêts dans deux affaires et renvoyé une affaire devant le tribunal constitutionnel.

6.En ce qui concerne les trois hommes tués par balle au cours de la manifestation du 21 janvier 2012, M. Peka indique qu’une procédure est en cours et que les proches des victimes pourront demander réparation sur la base des articles 61 à 67 du Code de procédure pénale.

7.Le Médiateur (ou Défenseur du peuple), dont la fonction a été créée par la loi no 8454 de 1999, assume le rôle de mécanisme national de prévention. Il est doté d’un budget propre, qu’il gère de manière indépendante. Il est habilité à effectuer régulièrement des visites inopinées dans tous les lieux privatifs de liberté, dont les commissariats de police, les locaux de détention provisoire et les prisons. Dans certains cas, en particulier lorsque des séquelles de violences et des lésions sont constatées, le juge ordonne qu’un examen médico-légal soit pratiqué sur les détenus concernés.

8.Un mineur ne peut être privé de liberté que sur décision judiciaire. Des unités spéciales pour mineurs en conflit avec la loi ont été mises en place dans les locaux de la police. À Kavaja, la Direction générale de l’administration pénitentiaire a ouvert un centre correctionnel éducatif pour mineurs délinquants. La question de la réduction de la durée de la mise à l’isolement est actuellement à l’étude. Une structure spécialisée dans la protection des droits des victimes de la violence familiale a été créée au sein de la Direction de la police. En outre, une institution nationale chargée de la protection des droits de l’enfant a été mise en place et un plan d’action pour la protection des droits de l’enfant pour la période 2012-2015 a été adopté par le Gouvernement.

9.En ce qui concerne l’article 3 de la Convention, M. Peka indique que les conditions dans lesquelles un non-ressortissant peut être expulsé du territoire ou renvoyé dans son pays et la procédure pertinente sont définies dans la loi no 9959 de 2008 sur les étrangers. Conformément à l’article 8 de ce texte, le Ministère de l’intérieur peut déclarer qu’un étranger est indésirable sur le territoire national dans les cas suivants: si l’intéressé a mené des activités de propagande ou commis des infractions portant atteinte à la sécurité nationale et à l’ordre public; s’il a été reconnu coupable d’une infraction pénale et condamné à une peine de plus de trois ans d’emprisonnement; s’il fait partie d’une organisation terroriste; si son extradition a été demandée par une juridiction internationale pour crimes contre l’humanité ou pour une autre qualification grave; s’il fait partie d’une organisation criminelle qui se livre à la traite, au trafic de drogues ou à d’autres types de trafic. L’interdiction du territoire, prononcée par le Ministère de l’intérieur pour une durée de dix ans, peut faire l’objet d’un recours devant une juridiction de première instance dans les dix jours qui suivent la notification de l’intéressé.

10.Les demandeurs d’asile déboutés ont dix jours pour contester la décision des autorités devant le tribunal de district de Tirana. En matière d’extradition, l’Albanie applique le principe de la réciprocité, qu’un accord bilatéral ait été conclu avec le pays concerné ou non. Actuellement, les tribunaux ne sont saisis d’aucun recours contre une décision de renvoi faisant état d’un risque de torture dans le pays de destination.

11.L’Albanie a accueilli 11 anciens détenus de la base de Guantánamo. Deux d’entre eux ont déjà quitté le pays. Les neuf autres ont le statut de réfugié et bénéficient de toutes les aides publiques afférentes à ce statut. Ils peuvent en outre suivre des cours d’albanais, bénéficier des services d’un interprète et suivre une formation professionnelle ou étudier gratuitement à l’université s’ils le souhaitent.

12.Les autorités albanaises ne disposent d’aucune information officielle sur la situation des quelque 500enfants roms qui, selon une organisation non gouvernementale grecque, auraient disparu d’un foyer à Athènes. L’organisation concernée est invitée à communiquer les renseignements portés à sa connaissance aux autorités compétentes albanaises et grecques afin que toute la lumière puisse être faite sur ces allégations.

13.Les programmes de formation de la police comprennent des cours thématiques sur les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Albanie est partie, en particulier la Convention contre la torture. Ces programmes sont établis compte tenu des recommandations formulées par les organes internationaux et nationaux et des conclusions formulées par les organisations de la société civile dans leurs rapports. Une formation est également dispensée sur les droits des femmes et des minorités. Une stratégie de promotion de la diversité a été adoptée par la Police nationale et, grâce à cette initiative, 50 % des fonctionnaires de police récemment recrutés sont des femmes. Les femmes travaillant dans la police sont affectées à des tâches délicates, dont la prise en charge des victimes de la violence dans la famille, des mineurs et des victimes présumées de la traite.

14.En 2011, plusieurs mesures disciplinaires ont été prises pour sanctionner des membres des forces de l’ordre qui avaient commis des actes arbitraires dans l’exercice de leurs fonctions. Trois affaires d’utilisation illégale et excessive de la force et six affaires d’attentats à la pudeur ont été jugées et certains des responsables ont été démis de leurs fonctions ou suspendus pendant un mois et privés du salaire correspondant. De janvier à mars 2012, six membres des forces de l’ordre qui ont été jugés pour actes arbitraires ont fait l’objet de sanctions disciplinaires. Quatre d’entre eux ont été expulsés de la police pour faute professionnelle, abus de fonction ou violation du règlement. En revanche, aucun membre des forces de l’ordre n’a été condamné pour faits de torture car, à ce jour, aucune plainte dénonçant ce type d’acte n’a été déposée en Albanie.

15.En droit albanais, l’arrestation et la détention sont deux notions distinctes. L’arrestation fait l’objet de l’article 251 du Code pénal, lequel dispose notamment que la police judiciaire doit obligatoirement arrêter toute personne surprise en flagrant délit si l’infraction qu’elle a commise ou qu’elle s’apprêtait à commettre emporte une peine d’au moins cinq ans d’emprisonnement. L’article 253 du Code pénal porte quant à lui sur la détention. Il prévoit que le Procureur peut ordonner le maintien en détention d’un suspect qui a été arrêté s’il a des motifs raisonnables de penser que l’intéressé pourrait se soustraire à la justice s’il était remis en liberté. En vertu de l’article 263 du Code de procédure pénale, la durée maximale de la détention provisoire est de trois ans si l’infraction commise est passible d’une peine allant de dix ans d’emprisonnement à la réclusion criminelle à perpétuité.

16.Conformément aux dispositions du Code de procédure pénale, les droits des personnes soumises à un interrogatoire sont protégés quel que soit le type d’affaire. La présence de l’avocat permet de garantir que les droits fondamentaux des suspects soient respectés au cours de la procédure. Le règlement général des établissements pénitentiaires prévoit que tout détenu doit être examiné à son arrivée à la prison par une commission composée d’un médecin, de membres de la police et de travailleurs sociaux. Des copies du dossier médical sont fournies sur demande au détenu, à ses proches ou à son conseil. Le règlement de la police prévoit que des examens médicaux doivent être réalisés au plus tard dans les douze heures suivant l’arrestation d’un suspect. Les consultations médicales ont lieu en privé. Les dossiers médicaux sont confidentiels et ne sont accessibles qu’au personnel médical.

17.En ce qui concerne les doutes émis quant à l’impartialité des enquêtes sur les allégations de brutalités policières menées par le Service de surveillance interne de la police, M. Peka dit que cet organe est indépendant, que son mandat est bien spécifique et qu’il dispose d’un budget propre. Par ailleurs, les enquêtes pénales ouvertes sur ces affaires sont menées sous l’autorité du Bureau du Procureur. La surpopulation carcérale diminue progressivement grâce aux mesures qui ont été prises, telles que le développement des peines avec sursis assorties d’une mise à l’épreuve et des peines de substitution et l’utilisation du bracelet électronique et, surtout, aux ressources engagées en vue d’ouvrir de nouveaux centres de détention. Il n’existe aucun élément de preuve officiel montrant que le surpeuplement des lieux de détention provisoire est dû aux lenteurs de la justice.

18.Comme indiqué aux paragraphes 99 et 107 des réponses écrites, d’importants travaux de rénovation ont été effectués dans plusieurs établissements pénitentiaires et lieux de détention provisoire du pays ainsi que dans les locaux des commissariats de police d’une demi-douzaine de villes.

19.Les dispositions de l’article 22 de la Convention sont applicables, l’Albanie n’ayant formulé aucune réserve concernant cet instrument. Dans tous les établissements pénitentiaires du pays, les détenus sont dûment informés de leurs droits. Comme il est indiqué dans le rapport du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) sur sa visite de 2010 en Albanie, des modifications ont été apportées au règlement pénitentiaire et des investissements ont été réalisés pour améliorer les conditions de détention. Toute plainte relative à quelque forme de violence que ce soit dans les centres de détention est prise en considération. Les autorités pénitentiaires ont adopté une procédure normalisée de collecte d’informations sur les cas de violence, fondée sur le Protocole d’Istanbul. Les établissements pénitentiaires sont équipés d’un système de surveillance par caméra. Pour ce qui est des décès qui y sont survenus, les informations officielles indiquent qu’ils étaient dus à des causes naturelles; des informations sont réunies sur chaque cas de décès.

20.En ce qui concerne la détention administrative, M. Peka indique que la loi relative à la Police d’État prévoit la possibilité de conduire une personne qui a enfreint une règle administrative à un poste de police à des fins d’identification, avec ou sans son consentement. Dans un tel cas, l’intéressé n’est pas placé dans les mêmes locaux que les personnes en détention provisoire et ne peut être retenu pendant plus de dix heures. Les mesures disciplinaires applicables pendant la garde à vue, quant à elles, sont proposées par les chefs des commissariats de police et approuvées par les directeurs régionaux de la police. L’application de ces mesures peut être interrompue lorsque le détenu dépose une plainte contre la police.

21.Le nouveau centre correctionnel éducatif de Kavaja, destiné aux mineurs âgés de 14 à 18 ans, accueille actuellement 51 mineurs. Cet établissement dispense aux mineurs des cours d’enseignement général et professionnel visant à faciliter leur réinsertion; il leur propose également des activités de loisirs. La Constitution et le Code de procédure pénale comportent diverses dispositions précises relatives au traitement des mineurs détenus ou en état d’arrestation, prévoyant notamment l’obligation de prévenir sans délai le procureur et les parents ou le tuteur du mineur de son arrestation et d’informer le mineur de ses droits, notamment de celui d’être assisté par un conseil, l’obligation d’interroger le mineur en présence de son représentant légal ou de son tuteur, de lui fournir une assistance médicale et de prendre les mesures voulues pour protéger sa santé et l’obligation d’informer rapidement le procureur des déclarations du mineur afin de lui assurer des conditions de détention sûres. Les mineurs sont toujours détenus séparément des adultes.

22.La possibilité de placer des mineurs en isolement cellulaire pour une période de dix jours a été introduite en application d’une directive publiée par la Direction générale de l’administration pénitentiaire en 2009. Le Gouvernement albanais est disposé à revoir la question à la lumière des recommandations formulées à ce sujet par le Comité des droits de l’homme et le Comité contre la torture. Des modifications pourront être apportées au règlement pénitentiaire afin de réduire la durée maximale des mesures disciplinaires prises à l’encontre de mineurs de dix jours à trois jours.

23.Un régime carcéral semi-ouvert particulier a été mis en place pour les femmes détenues. Le personnel qui s’occupe d’elles est entièrement composé de femmes. Les hommes et les femmes sont détenus séparément, et des services sociaux sont assurés aux enfants des détenues. Par ailleurs, la surveillance électronique est assurée au moyen d’un système de localisation par GPS; aucun système d’enregistrement audio et vidéo n’est utilisé.

24.La police utilise depuis septembre 2011 un manuel détaillé portant notamment sur le traitement des personnes gardées à vue et sur le respect de leurs droits. Un programme de formation destiné à quelque 500 membres de la police directement concernés par le traitement des personnes en état d’arrestation doit être dispensé de mai à septembre 2012. Le deuxième volet de ce programme, qui sera intégré au programme de formation de l’École de police, se déroulera de septembre à décembre 2012. Par ailleurs, la police et les autorités pénitentiaires ont conclu des accords de coopération avec plusieurs ONG de défense des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

25.La délégation ne dispose pas d’informations sur les suites données à la circulaire du Procureur généraldont il est question au paragraphe 157 du rapport ou sur le point de savoir s’il y a eu de nouvelles circulaires, mais les renseignements voulus pourront être adressés par écrit au Comité.

26.Le Gouvernement est déterminé à améliorer les conditions de vie des enfants et, depuis la ratification par l’Albanie de la Convention relative aux droits de l’enfant, il déploie des efforts croissants pour assurer la réalisation et la protection des droits de tous les enfants par la mise en place de politiques nationales et de cadres juridiques et institutionnels adaptés. La loi relative à la protection des droits de l’enfant adoptée en 2010 contient une définition de l’enfant et porte création du Service national de protection des droits de l’enfant. Le Parlement a en outre apporté des modifications à l’article 16 du Code pénal, qui dispose désormais que toute personne qui soumet un enfant dont elle est légalement responsable à des mauvais traitements physiques ou psychologiques est passible d’une peine d’emprisonnement allant de deux mois à deux ans.

27.D’après les résultats de l’enquête démographique et sanitaire réalisée en 2008-2009, 98 % des accouchements ont lieu dans un établissement de santé public. Un certificat de naissance est délivré dans les maternités, sur la base duquel l’enfant doit être enregistré à l’état civil dans un délai de soixante jours. Pour ce qui est des enfants nés à l’étranger, toutes les ambassades et représentations consulaires albanaises fournissent des services de certification des naissances. Les documents certifiés doivent ensuite être envoyés aux services de l’état civil compétents en Albanie.

28.Diverses dispositions ont été adoptées pour indemniser les victimes de torture, les anciens prisonniers politiques et les victimes de persécution. Il convient de citer notamment la loi no 9831 (12 novembre 2007) relative à l’indemnisation des anciens prisonniers politiques du régime communiste, qui a pour objet de définir les bénéficiaires, les montants, ainsi que les critères de sélection et les procédures applicables à l’octroi d’une indemnité financière aux ex-prisonniers politiques ayant directement subi des persécutions sous le régime communiste, et la décision no 933 du Conseil des ministres (17 novembre 2010) relative à l’établissement des procédures administratives d’examen des demandes d’indemnisation des membres des familles des victimes exécutées sans avoir été jugées, pour des motifs politiques, pendant la période comprise entre le 30 novembre 1944 et le 1er octobre 1991.

29.Concernant la recevabilité des éléments de preuve, le paragraphe 4 de l’article 151 du Code de procédure pénale dispose que tout élément de preuve obtenu par des moyens illégaux est irrecevable et la Cour constitutionnelle, dans sa décision no 14 du 3 mai 2011, a estimé que toute déclaration obtenue par la violence était irrecevable. En outre, l’irrecevabilité peut être déclarée à tout moment de la procédure.

30.M me Milo (Albanie) dit que la protection des droits des minorités nationales et ethnolinguistiques fait l’objet d’une convention-cadre applicable à tous les Albanais appartenant à une minorité. La pratique de l’aménagement de «zones de minorités» ayant été abandonnée depuis plus de vingt ans, aucune discrimination territoriale n’est exercée. En 2010, le Parlement a adopté la loi antidiscrimination, qui a été élaborée en collaboration avec des ONG de défense des droits de l’homme et qui vise à éliminer toute discrimination fondée sur la race, la religion ou l’appartenance ethnique, notamment. Cette loi a porté création de l’institution du Commissaire à la lutte contre la discrimination, qui est chargée de surveiller la situation dans le pays, de recenser les violations et de formuler des propositions visant à y remédier.

31.M. Peka (Albanie) dit que l’Albanie considère qu’elle a achevé sa transition et qu’elle est maintenant un pays démocratique fondé sur le principe de la primauté du droit et doté d’une économie de marché. Elle devrait obtenir le statut de pays candidat à l’adhésion à l’Union européenne et elle assurera la présidence du Conseil des ministres du Conseil de l’Europe à partir de mai 2012.

32.Comme l’a souligné le Rapporteur spécial sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires, M. Alston, le phénomène des querelles meurtrières entre familles en Albanie constitue un problème anachronique, auquel le Gouvernement accorde toute l’attention qu’il mérite. Des progrès ont été accomplis, et le Gouvernement s’inspirera des recommandations de M. Alston dans l’action qu’il continuera de mener pour éradiquer ce phénomène.

33.M me Milo (Albanie), abordant les questions des centres de détention secrets et des disparitions et des meurtres qui auraient été commis en Albanie après la guerre du Kosovo, dit que le Gouvernement considère que les allégations figurant dans le rapport de la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe (dit «rapport Marty») sont fallacieuses et ne reposent que sur des suppositions. Le Gouvernement albanais regrette que M. Alston, dans la partie de son rapport sur l’Albanie où il traite de ces questions, se soit en grande partie appuyé sur le rapport de la Commission, dont les conclusions sont infondées et ne sont étayées par aucun fait ou élément de preuve. Les autorités albanaises ont fait part à plusieurs reprises de leur volonté de coopérer pleinement avec les institutions internationales compétentes, avec la mission de police et de justice de l’Union européenne (EULEX)et avec le Conseil de l’Europe en vue d’établir la vérité. Bien que la compétence du Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) ne s’étende pas à l’Albanie, le Gouvernement albanais a apporté son entière collaboration au groupe d’enquête du TPIY, en 2004, ainsi qu’à M. Marty lors de la mission qu’il a effectuée en Albanie en 2008. Il convient de rappeler à ce sujet que le TPIY a qualifié d’infondées les allégations selon lesquelles l’Albanie était impliquée dans un trafic d’organes. En août 2011, un groupe spécial d’enquête d’EULEX a été chargé d’enquêter sur les allégations figurant dans le rapport de la Commission et l’Albanie l’a invité à enquêter de manière approfondie et transparente sur tous les aspects de ces allégations qui concernent le territoire albanais et l’a assuré de son plein appui.

34.Les recommandations du Comité concernant les services de santé dans les centres de détention sont mises en œuvre, y compris celle tendant à donner aux détenus la possibilité de choisir leur médecin. Toutes les personnes admises dans un centre de détention subissent un examen médical qui se déroule sans la présence d’autres membres du personnel. Les informations médicales les concernant sont consignées sur leur fiche médicale et dentaire, selon une procédure commune à l’ensemble du système pénitentiaire. Il n’est pas procédé au volet de l’examen médical portant sur les maladies infectieuses dans les premières vingt‑quatre heures mais dans un délai qui dépend de l’état clinique de chaque détenu; des tests de laboratoire et d’imagerie sont d’abord effectués, puis complétés les jours suivants. Les détenus bénéficient gratuitement de tous les services médicaux voulus, y compris de services spécialisés.

35.En vertu de la loi sur la santé mentale de 2012, le Ministère de la santé offre aux détenus souffrant de troubles mentaux tous les services de diagnostic, de traitement et de réadaptation dont ils ont besoin. Les professionnels de la santé qui travaillent dans les postes de police et au sein du système pénitentiaire suivent une formation continue, y compris dans le domaine de la santé mentale. Étant donné la pénurie de psychiatres à l’extérieur de la capitale, les consultations psychiatriques sont souvent dispensées à l’établissement de soins public le plus proche. Il ne peut être recouru à des mesures de contrainte physique (immobilisation, administration forcée de médicaments, placement à l’isolement) que dans des établissements de soins de santé mentale résidentiels, sur ordre d’un psychiatre. La délégation ne dispose pas de statistiques sur l’administration forcée de médicaments mais tient tous les documents et rapports en sa possession à la disposition du Comité.

36.Conformément à la recommandation du Comité, des dispositions législatives sont prises pour placer le personnel médical des établissements pénitentiaires sous la responsabilité du Ministère de la santé. De même, l’ensemble des institutions spécialisées de soins de santé mentale destinés aux détenus et aux personnes souffrant de troubles mentaux qui ont commis une infraction pénale et qui doivent suivre un traitement sur ordre d’un tribunal relèvent désormais du Ministère de la santé. Les règles concernant les conditions d’hygiène dans les centres de détention sont fixées par des directives communes des Ministres de la justice et de la santé, l’Inspection sanitaire étant tenue de contrôler tous centres de détention au moins deux fois par an.

37.Le Président (Rapporteur pour l’Albanie) demande si la Convention est directement invocable devant les tribunaux. Évoquant le cas de deux policiers qui ont été accusés d’avoir gravement battu trois jeunes hommes au cours de leur arrestation à Tirana, il indique que ces policiers ont été inculpés de l’infraction visée à l’article 250 du Code pénal, à savoir d’acte arbitraire, plutôt que de l’infraction de torture, qui relève de l’article 86, et qu’un de ces policiers a été condamné à une amende d’un montant équivalent à quinze dollars. Cet exemple illustre une tendance que le Comité a noté dans plusieurs États parties, consistant à inculper les policiers accusés d’actes de torture d’infractions emportant une peine plus légère que celle applicable aux faits de torture. Le Comité, à cet égard, souhaiterait savoir quelles mesures sont prises pour garantir que les peines prononcées à l’encontre des auteurs d’actes de torture soient proportionnelles à la gravité de ces actes.

38.La hausse du nombre de cas de violence dans la famille signalés à la police montre que la population est sensibilisée au problème, ce qui est positif. Il faudrait savoir si, de leur côté, les autorités policières et judiciaires agissent avec la diligence voulue dans ce type d’affaires. La politique de féminisation des effectifs de la police menée par l’État partie est certainement favorable à une meilleure prise en considération des plaintes pour violence dans la famille. La délégation pourra peut-être donner des précisions sur les enquêtes et les poursuites auxquelles ces plaintes ont pu donner lieu. Il serait également intéressant de savoir quelles peines sont prévues par la loi pour les actes de violence au foyer, si ces peines ont déjà été appliquées et si le viol conjugal constitue une infraction distincte dans le Code pénal de l’Albanie.

39.La désignation du Médiateur en tant que mécanisme national de prévention renforce l’importance de son rôle dans la réalisation de l’objectif général de la Convention. Pour que le Médiateur puisse s’acquitter efficacement de ce rôle, il faut toutefois qu’il dispose de ressources suffisantes. À cet égard, des précisions sur le budget qui lui a été alloué seraient utiles. Les châtiments corporels ont longtemps été perçus comme faisant partie intégrante de l’éducation des enfants dans de nombreuses cultures; cette vision traditionnelle de l’éducation semble n’avoir pas totalement disparu dans l’État partie. Dans ce contexte, il serait intéressant de savoir s’il existe une loi interdisant expressément tous les châtiments corporels en Albanie. En ce qui concerne le régime de la mise à l’isolement, la délégation pourra peut-être indiquer si son application à des mineurs est expressément prévue par la loi et, le cas échéant, dans quelles circonstances et pour quels motifs elle est autorisée.

40.En ce qui concerne l’article 3, le Président demande si l’État partie considère l’obtention d’assurances diplomatiques comme une garantie suffisante pour renvoyer des personnes dans un pays où il y aurait des motifs de croire qu’elles risqueraient d’être soumises à la torture. Pour ce qui est de l’internement forcé de patients souffrant de troubles psychiatriques, la délégation voudra bien indiquer si cette procédure est encadrée par la loi, notamment si des juges procèdent régulièrement à un examen de tous les cas de patients internés contre leur gré et si la loi garantit à ces patients le droit de demander le réexamen de la mesure d’internement.

41.M. Gaye (Corapporteur pour l’Albanie) dit que son intervention sera centrée sur les questions relatives aux articles 10 à 16 de la Convention. En ce qui concerne la formation, il voudrait savoir si une formation spécifique fondée sur le Protocole d’Istanbul est dispensée au personnel médical et judiciaire pour lui apprendre à détecter les signes de torture. D’après les réponses données par la délégation, il semblerait que les membres des forces de l’ordre qui commettent des violations dans l’exercice de leurs fonctions fassent dans la majorité des cas l’objet d’une procédure disciplinaire mais soient rarement poursuivis. Ceci soulève la question de savoir comment le droit à réparation des victimes est garanti en l’absence de procédure judiciaire. En outre, même lorsque des poursuites pénales sont engagées, la qualification appliquée aux faits reprochés aux fonctionnaires concernés correspond généralement à des infractions punies de peines plus légères que l’infraction de torture. Le cas cité dans le rapport de l’État partie (par. 256) de la condamnation d’un policier à trois ans d’emprisonnement pour «violation des règles de service» alors qu’un détenu était décédé des suites des mauvais traitements que ce policier lui avait infligés illustre parfaitement ce problème. M. Gaye souhaiterait entendre la délégation à ce sujet.

42.La délégation a donné des précisions bienvenues au sujet de la distinction à faire entre les notions d’arrestation et de détention. M. Gaye n’est toutefois pas certain d’avoir compris à quoi correspondait le délai de douze heures qui a été évoqué et demande à la délégation de bien vouloir préciser s’il correspond au délai dans lequel toute personne arrêtée par la police doit être présentée devant un juge. Il voudrait également savoir si la loi fixe une limite à la durée de la détention avant jugement. Cette question est capitale du point de vue de la prévention de la torture, car il est bien connu que plus la durée de la détention est longue, plus le risque de torture augmente. La délégation a indiqué que le parquet surveillait la situation de toutes les personnes détenues par la police. Des précisions sur les modalités de cette surveillance seraient utiles.

43.De nombreuses ONG ont dénoncé l’inefficacité de l’appareil judiciaire. La délégation pourra peut-être indiquer si des mesures sont envisagées pour renforcer son indépendance et améliorer la formation de tous les acteurs de la justice. L’efficacité de l’action du Médiateur dépend certes des ressources allouées à ce dernier, mais aussi de l’étendue de ses pouvoirs, lesquels gagneraient à être renforcés afin qu’il puisse intervenir directement en cas de violations des droits de l’homme.

44.M. Bruni voudrait savoir si les résultats des visites que le Médiateur a effectuées dans des lieux de détention en tant que mécanisme national de prévention ont été analysés et, dans l’affirmative, quels domaines d’action prioritaires cette analyse a permis d’identifier. Que l’État partie ait ratifié la Convention sans formuler aucune réserve est une très bonne chose, mais cela ne suffit pas pour signifier officiellement qu’il accepte la procédure d’examen de communications émanant de particuliers prévue à l’article 22. Il doit pour cela faire la déclaration spécifiquement requise à cet effet. La délégation pourra peut-être confirmer que telle est bien l’intention de l’État partie. L’article 8, paragraphe 2, de la Convention prévoit que si un État partie est saisi d’une demande d’extradition par un autre État partie avec lequel il n’est pas lié par un traité d’extradition, il peut considérer la Convention comme constituant la base juridique de l’extradition. L’État partie reconnaît-il la Convention comme base juridique de l’extradition?

45.M. Mariño Menéndez demande si la législation de l’État partie prévoit, pour certains types d’infractions comme par exemple le terrorisme ou le trafic de drogues, la possibilité d’ordonner la mise au secret des suspects. Croyant comprendre que l’octroi de la nationalité albanaise est fondé sur le droit du sang, il demande si la délégation peut dans ce cas confirmer que l’État partie accorde la nationalité albanaise aux enfants nés à l’étranger de parents albanais.

46.M me  Gaer dit que sa question sur le point de savoir si des policiers avaient déjà été poursuivis et condamnés pour non-assistance à personne en danger dans des affaires de violence dans la famille est restée sans réponse. Elle souhaiterait entendre la délégation sur ce sujet. À propos des querelles meurtrières entre familles, des données ventilées en fonction du sexe des victimes seraient utiles. Des statistiques sur les crimes d’honneur et sur le nombre de procédures pénales ouvertes sur des faits de traite dans le pays seraient également bienvenues.

47.M me  Belmir demande des précisions sur la loi no 10347 relative à la protection des droits de l’enfant que l’État partie a adoptée en 2010. Elle souhaiterait notamment savoir si celle-ci contient une définition de l’enfant conforme à la Convention relative aux droits de l’enfant et si elle protège les droits des enfants en conflit avec la loi. À propos de la distinction entre arrestation et détention, dans les deux cas, la personne est privée de liberté et, partant, sous la responsabilité de l’État; les obligations des agents de l’État au regard de la Convention sont donc les mêmes dans les deux situations.

48.M. Tugushi dit qu’il avait demandé à la séance précédente si le budget du Médiateur avait été augmenté depuis que celui-ci avait été désigné comme mécanisme national de prévention. Il ne croit pas avoir entendu de réponse à cette question, ni d’explications concernant le fait que les personnes dont le placement en détention provisoire a été ordonné restent souvent en détention dans les locaux de la police au-delà du délai prescrit par la loi. Tout complément d’information que la délégation pourra apporter sur ces deux points sera apprécié.

49.M me  Sveaass souhaiterait en savoir plus sur les soins médicaux, notamment psychologiques, qui ont été dispensés aux anciens détenus de Guantanamo une fois en Albanie. Elle demande si la formation à l’utilisation du Protocole d’Istanbul à laquelle la délégation a fait référence vise uniquement le personnel judiciaire ou si elle est également destinée aux professionnels de la santé. La délégation a déclaré n’avoir aucune information officielle au sujet des 502 enfants roms disparus. Pourtant, Mme Sveaass dit avoir vu une liste avec le nom des enfants et, d’après certaines sources, quatre d’entre eux auraient été localisés. Ces enfants ont disparu depuis plusieurs années déjà; il est urgent de prendre des mesures, en collaboration avec les autorités grecques, pour les retrouver. Lorsque la délégation affirme qu’il n’y a pas de plaintes pour torture en Albanie, veut-elle dire qu’il n’y en a pas eu récemment? Dans ce cas, peut-elle indiquer quand une plainte pour torture a été enregistrée dans le pays pour la dernière fois? Il existe un programme de réadaptation et d’indemnisation pour les personnes qui ont été détenues et torturées sous le régime communiste. Des mesures de réparation sont-elles également prévues pour les personnes qui ont été soumises à la torture pendant la période de transition?

50.Le Président remercie les membres du Comité pour leurs questions complémentaires et, à la demande de la délégation albanaise, propose de suspendre la séance quelques minutes pour permettre à cette dernière de préparer ses réponses.

La séance est suspendue à 17 h 5; elle est reprise à 17 h 20.

51.M. Peka (Albanie) dit que le Gouvernement a décidé de confier la fonction de mécanisme national de prévention au Médiateur parce qu’il s’agit d’une institution fondée sur la Constitution et dotée de son propre budget. La loi relative au Médiateur a été modifiée en conséquence, le Bureau du Médiateur a été doté de cinq postes supplémentaires pour assurer les activités liées à sa nouvelle fonction et son budget a été relevé pour couvrir les frais correspondants. Il convient à ce sujet de souligner que la loi albanaise relative au Médiateur a été conçue en s’inspirant des meilleures pratiques des pays d’Europe et des pays nordiques, notamment celles du Danemark. Une crise politique au sein du Parlement a causé la vacance du poste de Médiateur au cours des deux dernières années mais aujourd’hui le poste est pourvu et pleinement opérationnel.

52.Les anciens détenus de Guantanamo accueillis en Albanie ont choisi librement d’être transférés vers l’Albanie. Ils bénéficient de prestations sociales et ont reçu tous les documents dont ils avaient besoin, y compris un permis de travail. Concernant leur réinstallation éventuelle dans un autre pays, les circonstances seraient à prendre en considération ainsi que tout un ensemble de facteurs, l’essentiel pour le Gouvernement albanais étant de s’assurer qu’il satisfait à ses obligations internationales en matière de protection des droits de l’homme et que ces personnes vivent en paix au sein de la collectivité et sont à l’abri du danger et des persécutions, que ce soit dans leur pays d’origine ou dans un pays tiers.

53.S’agissant des enquêtes menées sur le sort des 502 enfants roms d’Albanie qui auraient disparus, il faut savoir que le Gouvernement se préoccupe de chacun de ses citoyens et veille à leur protection, tant sur le territoire albanais qu’à l’étranger. Aucune information n’a été communiquée par les autorités grecques responsables de l’application des lois ni par le Gouvernement grec mais l’Albanie mettra assurément tout en œuvre pour obtenir toute l’information voulue et apporter la coopération la plus large à la Grèce et à toute autre partie prenante.

54.Le programme d’indemnisation des anciens prisonniers du régime communiste se poursuit. Au cours des vingt dernières années, les gouvernements successifs ont mis en œuvre divers moyens et dispositifs pour rendre la vie plus facile à ces personnes et les aider à s’adapter au nouveau système, notamment en leur donnant accès à des formations professionnelles, à une aide au logement et à la scolarité gratuite pour leurs enfants à tous les niveaux d’enseignement. Une réparation leur est également accordée pour les années d’emprisonnement subies.

55.Les instances judiciaires albanaises sont entièrement indépendantes du Gouvernement, qui ne peut en aucune manière influer sur les décisions des tribunaux. En tout état de cause, la meilleure façon d’assurer l’indépendance du pouvoir judiciaire est de veiller à l’absence de conflits d’intérêt. L’Albanie a beaucoup progressé dans la mise en place d’institutions démocratiques et responsables, y compris dans le secteur de la justice. Il reste encore à faire mais le pays est résolu à mettre en place un système judiciaire solide, démocratique et indépendant.

56.À la question de savoir si les enfants albanais nés à l’étranger reçoivent la nationalité albanaise, M me  Milo (Albanie) répond que le droit du sang est un principe très important pour son pays et que tout enfant né d’au moins un parent albanais a la nationalité albanaise.

57.M. Tafa (Albanie) précise, au sujet de l’application des articles 86 et 250 du Code pénal, que si une plainte est déposée pour faits de torture ou abus il n’appartient pas à la police mais au ministère public d’établir les chefs d’accusation. La délégation n’a connaissance d’aucune affaire portée devant les tribunaux pour faits de torture à ce jour. S’agissant de l’indemnisation des victimes, tant la législation civile que le Code de procédure pénale garantissent aux victimes d’actes de torture le droit de demander réparation.

58.En ce qui concerne les violences familiales, 472 cas ont été signalés au Bureau du Procureur en 2009, 439 en 2010 et 495 en 2011. Les cas dans lesquels une ordonnance de protection a été demandée ont été au nombre de 841 en 2009, 1 234 en 2010 et 1 345 en 2011. À ce sujet, il convient de souligner qu’il ne s’est encore présenté aucun cas de refus par des policiers d’assurer une protection. Les agents des forces de l’ordre sont bien conscients qu’un tel refus aurait des conséquences graves et qu’ils sont tenus de respecter strictement ces ordonnances et d’assurer la protection voulue. Le viol conjugal n’est pas considéré comme une infraction spécifique mais relève de la définition générale du viol.

59.En ce qui concerne les châtiments corporels à l’égard des enfants, une loi et un plan d’action pour la protection de l’enfance ont été adoptés en 2010 et des institutions ont été mises en place pour contrôler leur application. De plus, le Code pénal a été récemment modifié pour interdire les violences physiques et psychologiques infligées aux enfants par leurs parents, des proches ou les tuteurs légaux et punir ces actes de peines allant jusqu’à deux ans d’emprisonnement. Pour ce qui est des querelles meurtrières entre familles, aucun cas n’a été recensé cette année. Un crime d’honneur a été enregistré en avril 2012.

60.En cas d’arrestation, la loi albanaise relative à la police prévoit qu’une personne peut être amenée dans les locaux de la police pour des vérifications, et ce, pour une durée maximale de dix heures. La détention provisoire quant à elle s’applique aux cas pour lesquels la loi prévoit une peine allant de dix ans d’emprisonnement à la perpétuité. Sa durée maximale diffère selon le type d’infraction mais ne peut dépasser trois ans, conformément à l’article 263 du Code de procédure pénale.

61.Tout est mis en œuvre pour assurer au personnel judiciaire la meilleure formation possible. Les juges sont formés à la haute école de la magistrature et suivent aussi de nombreuses formations assurées par des experts internationaux dans le cadre de projets financés par la Commission européenne. Il est vrai qu’il n’existe pas en Albanie de tribunal pour mineurs mais des sections spécifiques, au sein des tribunaux de district, sont chargées des affaires impliquant des mineurs et les juges de ces sections reçoivent une formation spécialisée.

62.Au sujet de l’évaluation des rapports du mécanisme national de prévention, M. Tafa indique que le rapport du Médiateur fait l’objet d’un examen minutieux jusqu’au plus haut niveau hiérarchique de la police d’État. Les priorités principales de l’Albanie, suite aux recommandations du Médiateur et d’autres acteurs, sont de renforcer les capacités et la formation professionnelles des fonctionnaires de l’administration pénitentiaire et d’améliorer les conditions dans les centres de détention pour les rendre conformes aux normes internationales. Il existe un plan annuel de formation des fonctionnaires de police, qui comprend un certain nombre de formations relatives aux droits de l’homme.

63.En réponse à la question de savoir si la Convention est utilisée comme base juridique de l’extradition, M. Tafa dit que, jusqu’à présent, cela ne s’est jamais produit. La possibilité n’est pas exclue, mais les seuls accords ou traités invoqués comme base juridique jusqu’ici sont ceux qui ont été signés avec les États-Unis et l’Italie.

64.Répondant à la question relative à l’internement forcé, M. Betija (Albanie) dit que les juges doivent respecter la procédure prévue à l’article 239 du Code pénal, qui dispose qu’une hospitalisation en institution psychiatrique ne peut se poursuivre lorsque l’intéressé ne présente plus de troubles psychiques. Les juges ont l’obligation de réexaminer annuellement le cas de toutes les personnes visées par une mesure d’internement forcé, et la loi relative à la santé mentale adoptée en mars 2012 prévoit que lorsque les raisons qui ont motivé l’internement forcé ne s’appliquent plus, le chef de l’établissement concerné, un parent ou le tuteur légal du patient peuvent demander au juge de mettre fin à l’internement.

65.Le Président remercie la délégation pour les réponses apportées.

La séance est levée à 18 heures.