NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.84513 novembre 2008

Original: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Quarante et unième session

COMPTE-RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)*DE LA 845e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 7 novembre 2008 à 15 heures

Président: M. GROSSMAN

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième rapport périodique du Kazakhstan (suite)

La séance est ouverte à 15h05

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième rapport périodique du Kazakhstan (suite)

(CAT/C/KAZ/2; CAT/C/KAZ/Q/2)

1.Sur l’invitation du Président, les membres de la délégation du Kazakhstan prennent place à la table du Comité.

2.M. KUSDAVLETOV (Kazakhstan), en réponse à la question de savoir si le Kazakhstan envisage de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale, il répond que son Gouvernement étudie actuellement cette possibilité. Toutefois, certains éléments de ce Statut posent des problèmes eu égard à la constitution kazakhe; le Statut ne pourra être ratifié qu’une fois qu'ils seront résolus. En principe, son Gouvernement est prêt à coopérer dans le cadre de tous les efforts internationaux dont les objectifs sont dans le droit fil des priorités nationales.

3.À propos de la traite des êtres humains, il fait observer qu’un comité interinstitutionnel dirigé par le Ministère de la justice et composé de représentants d'institutions étatiques et d’ONG dédiées a été créé pour étudier les questions relatives à ce problème. Ce comité a préparé un programme de travail pour 2008 incluant 16 mesures portant sur l’assistance juridique des victimes de la traite, ainsi que sur la coopération dans les domaines de la migration et de la lutte contre le crime organisé.

4.Le Kazakhstan s’appuie sur l’expérience internationale dans ses efforts visant à venir en aide aux victimes de la traite et améliore constamment la législation s’y rapportant. Le Code pénal a été modifié afin d’ériger en infractions pénales l’esclavage, l’exploitation et la traite des êtres humains. Les victimes de la traite des être humains sont protégées par la loi sur la protection par l'État des personnes impliquées dans un procès pénal. Rien qu’en 2007, un procès pénal a été engagé dans 7 affaires impliquant 31 victimes. Les ressortissants kazakhs qui ont fait l’objet d’une traite dans d’autres pays disposent d’une assistance consulaire.

5.Des fonds ont été dégagés en faveur des programmes menés sous l'égide de l'État et d'ONG en vue d'aider les victimes de la traite des êtres humains, qui sont assurées de disposer d’un logement temporaire et d’être exonérées de toute responsabilité en cas d’infraction liée à leur arrivée au Kazakhstan. Les médias publient des informations sur les droits des victimes et une assistance téléphonique d’urgence a été mise sur pied. En 2008, une délégation s’est déplacée afin d’étudier les centres de crise créés en Italie pour les victimes de la traite des êtres humains. Au terme de cette visite, des démarches ont été entreprises afin de créer des centres similaires au Kazakhstan. Le Ministère de l'intérieur a inauguré des centres pour former des officiers spécialisés dans la lutte contre la traite des êtres humains. Un projet de loi sur les services sociaux, incluant des dispositions sur l’aide aux victimes de violence domestique et de la traite, est actuellement examiné par le Parlement.

6.Au niveau international, son pays a ratifié le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, à réprimer et à punir la traite des personnes, en particulier celle des femmes et des enfants. Le Kazakhstan a aussi coopéré avec d’autres membres de la Communauté des États indépendants (CEI) et il a signé le programme de coopération conclu par les membres de la CEI concernant la lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2007-2010.

7M. ZHUKENOV (Kazakhstan) répondant aux questions portant sur l'autonomie du système judiciaire, reconnaît que les tribunaux kazakhs ne disposent pas d’une pleine autonomie. Après avoir fourni une brève description de la structure du système judiciaire kazakh, il a expliqué que la plupart des affaires étaientréglées en première instance, en présence d’un jury. Il est prévu d’étendre le champ d’application des procès devant jury dès le 1er janvier 2010. La Cour suprême contrôle les activités des juridictions internes de droit commun et arrêtent des décisions en apportant des explications sur les questions relatives à l’application de la législation dans la pratique; les décisions de la Cour revêtent un caractère contraignant.

8.Les juges sont nommés à vie; leur nomination et leur révocation font l’objet d’un décret présidentiel et la procédure dans les deux cas est définie dans la législation. Les candidats doivent passer un examen de qualification avant d'être admis à un stage auprès d'un barreau et de faire ensuite l’objet d’une approbation de la part de la magistrature. Les compétences des juges peuvent être supprimées ou suspendues uniquement conformément aux modalités et sur la base des motifs stipulés dans la Constitution, suite à une décision prise par un tribunal disciplinaire.

9.Le Gouvernement reconnaît que pour garantir leur autonomie, les tribunaux et les juges doivent disposer de moyens financiers plus importants. Un comité spécial a été créé pour surveiller l’affectation des ressources financières et techniques du système judiciaire. De récents amendements de la législation régissant le statut des juges ont pour objectif de leur octroyer une autonomie plus grande, notamment, en augmentant leur salaire. Concernant la qualification professionnelle des juges, il souligne que la Loi constitutionnelle relative au système judiciaire et le Statut des juges, qui stipule que pour relever d’une juridiction supérieure, un juge doit attester d’une expérience minimale de 5 ans dans une profession juridique; les juges de la Cour suprême doivent être dotés d’une expérience de 10 ans au sein des tribunaux inférieurs.

10.De nombreux progrès ont été observés dans le domaine de la justice des mineurs d’âge. Le 27 juin 2008, son Gouvernement a approuvé une stratégie de développement en plusieurs phases du système judiciaire mis en place pour les mineurs d’âge sur la période 2009-2010. Cette stratégie prévoit, notamment, la création de départements spécialisés au sein du Ministère de l’intérieur et du Ministère de la justice, ainsi que des études spécifiques sur l’administration de la justice des mineurs d’âge par le bureau du Procureur général.

11.Des tribunaux de la jeunesse ont été créés par décret présidentiel du 23 août 2007 et leurs activités ont démarré le 26 juillet 2008. Ces tribunaux sont compétents dans le cadre des affaires pénales et civiles impliquant des mineurs d’âge, y compris en cas de plainte portant sur les conditions de détention et les violations des droits des mineurs d’âge. Au cours des trois premiers mois, les tribunaux ont jugé plus de 200 affaires civiles, 40 affaires pénales et 60 affaires administratives. La grande majorité des affaires civiles ont trait à l’adoption. Les procédures pénales ont trait pour la plupart au vol et au vandalisme. Le Code de procédure pénale comprend des dispositions spéciales pour les affaires impliquant des mineurs d’âge. En général, les juges optent pour une peine moins sévère; seules 5 affaires pénales sur 40 impliquant des mineurs ont abouti à une peine privative de liberté, infligée en raison de la gravité des délits commis. Certaines affaires ont été résolues par conciliation. Les informations sur des cas spécifiques peuvent être fournies sur demande.

12.Des salles d’interrogatoire séparées sont prévues pour les mineurs d’âge. Un bâtiment à part a été libéré à cet effet au tribunal d’Almaty. Le Gouvernement envisage d’installer des tribunaux pour mineurs d’âge dans toutes les régions.

13.Les allégations selon lesquelles les tribunaux kazakhs seraient soumis à l’autorité du bureau du Procureur général sont sans fondement. L’autonomie des tribunaux est garantie dans la Constitution; un comité indépendant veille à l’affectation des fonds dans le cadre du système judiciaire. Le bureau du Procureur général constitue une entité indépendante, qui a pour mission de représenter l’État lors de toute procédure judiciaire, de surveiller les instructions et de demander l'ouverture d'une enquête pénale. La subordinationdes tribunaux au Bureau n’implique pas la jouissance d'un statut spécial.

14.Le Code de procédure pénale prévoit des mesures d’indemnisation et de réparation en cas de tout préjudice lié à des activités illégales commises par des entités en charge d’enquêtes pénales, y compris tout dégât matériel ou préjudice moral. Toute instance judiciaire responsable de tels préjudices doit présenter des excuses formelles.

15.Dans l’affaire d’Amantaj Usenov, le tribunal de la ville de Zhezkazgan a ordonné au Ministère des finances, le 21 mars 2008, de payer à la victime un montant de 5 millions de tenges en réparation des dommages résultant d’un mauvais traitement infligé par des officiers de police. Le 21 août 2008, le Ministère des finances a adressé un courrier au tribunal dans lequel il expliquait que les modalités selon lesquelles cette décision serait appliquée devaient être modifiées. Le 9 septembre 2008, une conciliation a eu lieu entre M. Usenov et le Ministère de l’intérieur et le montant des indemnisations a été versé dans son intégralité le 29 septembre.

16.Concernant les questions relatives aux procédures d’arrestation et de détention et à l’application du principe de l’habeas corpus, il informe le Comité que la délivrance des mandats d’arrêt relève désormais de la responsabilité des tribunaux et non plus de celle du bureau du Procureur général. Personne ne peut être maintenu en détention pendant plus de 72 heures sans ordonnance du tribunal. Les tribunaux sont tenus d'octroyer une autorisation formelle en cas de toute prolongation de la détention; cette autorisation doit être demandée dans un délai maximum de 48 heures suivant l’arrestation. Des procédures spéciales sont en place afin de permettre aux tribunaux de vérifier le caractère légal de la détention. La durée exacte de la détention doit être mentionnée dans le procès-verbal d’arrestation, qui doit être rédigé dans les trois heures suivant le placement en détention du prévenu. Tout manquement à cette procédure peut aboutir à une procédure au pénal à l’encontre de l’officier responsable de l’arrestation. L’avocat du prévenu et celui de la défense doivent être tous deux présents pendant la procédure judiciaire. La partie lésée peut mais n’est pas obligée d’y assister.

17.Alors que l’aveu de culpabilité était admis au titre de preuve pendant l’ère soviétique, la priorité est désormais accordée à la présomption d’innocence et plus personne n’est tenu de témoigner contre sa personne ou de s’avouer coupable. L’article 106 du Code de procédure pénale stipule clairement que toute preuve obtenue sous la torture est irrecevable. Un règlement visant à clarifier les dispositions du Code a été adopté en avril 2008. Le paragraphe 12 de ce règlement stipule, par exemple, que le jugement d'un tribunal est réputé non valable s’il se base uniquement sur l’attestation fournie par le prévenu, sans que celle-ci ne soit étayée par d’autres preuves. Le paragraphe 24 souligne l’obligation des tribunaux de tout mettre en œuvre afin de s’assurer que les preuves n’ont pas été obtenues de manière illicite. Si les faits invoqués par un prévenu concernant une conduite inappropriée de la part des enquêteurs ne peuvent pas être vérifiés, le procureur doit se charger de recueillir les informations nécessaires. L’article 109 du Code de procédure pénale porte sur les plaintes relatives aux actes commis par des représentants du bureau du Procureur général et des institutions responsables de l'application de la loi. Des amendements visant à garantir que ces plaintes, y compris les allégations de torture, soient traitées sans délai, sont actuellement en cours de discussion.

18.Le 24 octobre 2003, la deuxième chambre du tribunal de district d’Almaty a acquitté M. S.P. Fisenko en application de l’article 116 du Code de procédure pénale des charges retenues contre lui, à savoir la possession d’héroïne en grande quantité, car il est apparu au cours de l’audience qu’il avait été battu par la police et contraint de signer sa déposition. Le recours à la violence a été confirmé par les résultats de son examen médical et le témoignage d'individus. Ce tribunal a aussi décidé d’engager une procédure à l’encontre des officiers de police concernés.

19.Le 1er août 2008, le tribunal régional d’Atirausk a acquitté M. M. V. Torshilov accusé de viol et de meurtre arguant du fait que les preuves de l’accusation avaient été obtenues sous la contrainte et la force exercées par les officiers de police lors de sa mise en détention en 2007. La Cour suprême a confirmé le jugement du tribunal régional le 24 septembre 2008.

20.En ce qui concerne la question des amnisties, il explique que le Parlement a promulgué des lois d’amnistie en 1996, 1999, 2002 et 2006. La loi d’amnistie du 9 janvier 2006 a été promulguée à l’occasion du Jour de l’indépendance. Les bénéficiaires sont des personnes coupables de délits de moindre gravité, des mineurs et des femmes avec des enfants en bas âge, des personnes handicapées ou à l'âge de la retraite et des personnes qui avaient déjà purgé une partie de leur peine.

21.Concernant M. Rakhat Aliyev, le tribunal régional d’Almaty l’a reconnu coupable, lui ainsi que plusieurs membres d’un groupe criminel, de kidnapping et de racket. Ce groupe qui intégrait des membres des forces armées a menacé des individus pour les dessaisir de leurs biens et a kidnappé deux directeurs de banque, qui n’ont toujours pas été retrouvés. Les membres de ce groupe ont été jugés et ont admis avoir recouru à la violence à l’encontre de leurs victimes. Ils ont tous été reconnus coupables et purgent une peine d’emprisonnement de six ans. D’autres complices, tels que des notaires, purgent une peine plus courte.

22.M. DEMBAYEV (Kazakhstan) répondant aux questions relatives à la définition de la torture dans la législation kazakhe, explique qu'avant que le Kazakhstan n’adhère à la Convention en 1999, toutes les affaires d’abus d’autorité de la part de fonctionnaires, y compris le recours aux pressions psychologiques ou à la violence physique, étaient punissables en application de la Constitution de 1995, qui stipule que personne ne peut être soumis à la torture ou à de mauvais traitements. En 2002, l’article 347 du Code pénal a été adopté; celui-ci définit la torture et les sanctions encourues et fait référence au recours à des mauvais traitements physiques ou psychologiques, par un enquêteur, un officier menant une enquête préliminaire ou tout autre officier. De plus, les fonctionnaires publics qui ne sont pas directement impliqués dans des actes de torture ou des mauvais traitements mais qui ont poussé les auteurs à le faire ou qui n’ont entrepris aucune action à leur encontre sont passibles de poursuites en vertu de l’article 128 du Code. L’article 308 visant tout abus de la part de fonctionnaires est aussi invoqué dans de nombreuses affaires. Entre 2006 et 2008, pas moins de 209 représentants chargés de faire respecter la loi ont été inculpés en application de cet article. Au cours de la même période, 14 personnes ont été poursuivies en vertu de l’article 347. Les sanctions appliquées en vertu de l’article 308 étaient généralement plus lourdes que celles prononcées en vertu de l’article 347. Les autorités admettent toutefois que les pratiques judicaires en la matière doivent être harmonisées et la Cour suprême pourrait être appelée à définir des lignes directrices relatives à l’application des différents articles et des sanctions à infliger.

23.Répondant aux questions portant sur l’accès à un avocat et sur la qualité de l'aide juridictionnelle, il explique que, conformément au Code de procédure pénale, l’autorité qui procède à l’arrestation doit dresser un procès-verbal officiel détaillant les motifs de l’arrestation dans un délai de trois heures. Cependant, il arrive que les fonctionnaires chargés de l’application des lois ignorent ce délai et mentionnent une heure d’arrestation inexacte. Le Parlement examine actuellement un projet de loi visant à remédier à ce problème, ainsi qu’à garantir le droit à l’assistance judiciaire. Une disposition contient une description du rôle de l’avocat commis d’office pendant la garde à vue ou la mise en détention provisoire. Ces avocats ne sont pas des fonctionnaires publics mais des professionnels rattachés au barreau de leur ville. Ils sont employés par l’État à tour de rôle et se montrent parfois réticents à accepter ce type d’affaire. La qualité des services qu’ils assurent est vérifiée par des entités de contrôle prévues à cet effet.

24.Le bureau du Procureur général traite les questions relatives à l’extradition, en fonction des traités bilatéraux. Les motifs d’un refus d’extradition sont définis dans la législation et le Code de procédure pénale. Par exemple, une personne qui bénéficie du droit d’asile ne peut pas être extradée. D’autres principes de base incluent le principe de double incrimination et le principe ne bis in idem. Après l’extradition, des mesures ont été prises afin de garantir que la personne extradée est jugée uniquement pour le délit mentionné dans la requête d’extradition.

25.Mme AMIROVA (Kazakhstan) rappelle que le bureau du Commissaire aux droits de l’homme (Ombudsman) a été créé en septembre 2002. Le responsable en place est nommé pour une période de cinq ans, renouvelable une fois. Les qualifications pour ce poste faisaient référence à un diplômede droit de niveau supérieur et une expérience minimum de trois ans dans le domaine du droit commun ou des droits de l’homme. Le candidat devait aussi observer une parfaite neutralité en matière politique ou dans tout autre domaine. L’Ombudsman est nommé par le Premier ministre avec l’approbation des deux chambres du Parlement, auxquelles il doit présenter un rapport annuel. L’Ombudsman est habilité à prendre des mesures en vue de protéger les droits de l’homme et d’alerter le Parlement, le Président et le Gouvernement si de graves manquements apparaissent. Il peut recommander l'application de mesures disciplinaires à l'encontre d'officiers qui ont violé les droits de l'homme et faire des déclarations à la presse. Il s’appuie sur un centre national des droits de l’homme qui compte 15 membres. Un budget triennal a été approuvé par le Parlement en 2008 et une loi prévoyant l’affectation de moyens financiers supplémentaires pour les services régionaux est sur le point d’être promulguée. Tous les efforts sont donc déployés afin de garantir la parfaite conformité de la base juridique de ce bureau avec les Principes de Paris.

26.À la fin 2006, un groupe d’experts de la Commission de Venise, l’organisme du Conseil de l’Europe en charge de l’ingénierie constitutionnelle, s’est déplacé dans notre pays. Dans ses recommandations, ce groupe indiquait que l’Ombudsman (médiateur) devait avoir le droit de prendre des initiatives législatives et de déposer des demandes auprès de la Cour constitutionnelle. Dans le cadre d’un nouveau projet de développement juridique, une loi spéciale sur l'institution de l’Ombudsman (médiateur) doit être promulguée. Sa version non définitive est actuellement examinée par les experts juridiques, les organismes publics et les ONG.

27.L’Ombudsman (médiateur) reçoit environ 2 000 plaintes individuelles chaque année. Malheureusement, presque 60 % des plaintes ont trait à des décisions judiciaires et ne relèvent donc pas de ses compétences.

28.Toutefois, il n’existe pas à ce jour d’Ombudsman (médiateur) pour les enfants, mais un comité des droits de l’enfant a été créé au sein du Ministère de l’éducation conformément à une recommandation formulée le Comité correspondant des Nations Unies. L’Ombudsman (médiateur) est impliqué dans un projet de deux ans qui est développé en collaboration avec l’UNICEF et l’un des cinq rapports soumis par ce dernier à ce jour concerne les droits de l’enfant. Le rapport le plus récent portait sur les droits des migrants, les migrants économiques et les réfugiés.

29.La commission des droits de l’homme est responsable de l’élaboration du rapport annuel sur la situation des droits de l’homme au Kazakhstan, tandis que l’Ombudsman (médiateur) doit rédiger un rapport séparé sur ses propres activités. Il collabore avec différents organes consultatifs interinstitutionnels, par exemple, dans le domaine des politiques juridiques ou du droit international et il est aussi impliqué dans la rédaction de la législation des droits de l’homme.

30.À la lumière de la ratification du Protocole facultatif, des débats sont en cours afin de créer un organisme chargé d’enquêter sur les affaires de torture. L’une des propositions est de le rattacher au bureau de l’Ombudsman (médiateur).

31.Mme ZHARBOSUNOVA (Kazakhstan) demande s’il est possible de soumettre par écrit, en russe, les réponses restantes que sa délégation n’a pas eu le temps de traiter dans les délais impartis.

32.Le PRÉSIDENT répond que toute information ultérieure doit être adressée d’ici le milieu de la semaine prochaine afin de permettre au Rapporteur du pays de rédiger ses observations finales.

33.M. KOVALEV (Rapporteur de pays) dit qu’en dépit des contraintes temporelles, il s’est forgé une impression favorable à la lumière des réponses spécifiques qu’il a obtenues. Vu le véritable enthousiasme de la délégation, il est confiant dans l’éradication rapide de la torture au Kazakhstan. Une question importante qu’il a oublié de soulever concerne la détermination des autorités habilitées à déclarer toute prolongation de la détention au-delà de 72 heures et les circonstances dans lesquelles elle peut être admise. Il serait préférable de recevoir les informations écrites supplémentaires en anglais.

34.M. WANG Xuexian (corapporteur de pays) remercie la délégation pour ses réponses sincères et convaincantes. Néanmoins, il aurait aimé obtenir une réponse à sa question sur la formation, car il s’agit de la méthode la plus efficace pour prévenir les actes de torture. Des informations complémentaires sur le calendrier des enquêtes seraient aussi les bienvenues. Il souligne le fait que la finalité de la question du Comité sur le Statut de Rome de la Cour pénale internationale vise à en encourager l’État partie à envisager d’accéder à cet instrument.

35.Mme BELMIR explique que certaines réponses de la délégation ne lui ont pas donné entière satisfaction, en particulier, celle relative à la définition de la torture. La « remarque » dans le paragraphe 14 du rapport qui stipule que les souffrances physiques ou mentales causées par un agent public agissant dans le cadre de la loi ne s'apparentent pas à des actes de torture, s’avère particulièrement préoccupante. Les informations fournies par la délégation semblent indiquer que c’est le degré des souffrances qui importe et non le fait qu’elles sont infligées, ce qui constitue un point de vue non conforme à la Convention. Elle s’interroge sur les circonstances dans le cadre desquelles la loi kazakhe autorise les agents à infliger des souffrances à des personnes privées de liberté.

36.La délégation a déclaré que le fait que les juges étaient nommés par le Président de la République offrait certaines garanties et que le Président était aussi responsable de l’organisation du travail du système judiciaire. Elle se demande comment cette situation peut coïncider avec les principes d’indépendance du système judiciaire et de la séparation des pouvoirs.

37.Enfin, elle aimerait savoir si une autorité supérieure surveille les procureurs dans leur tâche visant à assurer le respect des libertés et des droits constitutionnels des citoyens au cours des procédures pénales.

38.Mme SVEAASS salue la franchise avec laquelle la délégation a présenté certaines affaires spécifiques. Elle demande si M. Torshilov, qui a été acquitté alors que pesaient sur lui deux chefs d'accusions graves, a reçu une indemnisation. Elle s’enquiert des démarches entreprises pour enquêter et empêcher l'automutilation de la part des détenus.

39.Mme GAER fait observer qu’en dépit du manque de temps qui ne permet pas d’entendre toutes les réponses de la délégation, certains aspects sont désormais plus clairs. Alors que des progrès ont été réalisés dans certains domaines, d'autres restent préoccupants. Par exemple, le Comité devrait évaluer plus précisément la nécessité pour l’État partie de définir un équilibre entre la lettre de la loi et la pratique. Une autre préoccupation concerne la notion de maltraitance secondaire, incluant les brutalités et le harcèlement sexuel, sur laquelle elle aimerait recevoir de plus amples informations. Les réponses de la délégation relatives à certaines affaires importantes de mauvais traitement ne l’ont pas satisfaites pleinement, en particulier eu égard au caractère équitable du procès.

40.Elle demande un complément d’informations sur l’administration des centres de détention. Elle s’étonne que certains soient encore sous la tutelle du Ministère de l’intérieur, notamment ceux qui ont donné lieu aux plaintes les plus graves.

41.Elle s’enquiert de la manière dont les objectifs de l’Organisation de coopération de Shanghai peuvent s’accorder avec les obligations qui incombent à l'État partie en application de l’article 3 de la Convention relatif au principe de non-refoulement. Selon certaines allégations, des individus soupçonnés d’être à l’origine d’attentats terroristes, d’actes séparatistes ou d’activités extrémistes ont été renvoyés dans leur pays d’origine sans justification valable. Amnesty International a signalé que certains individus étaient répertoriés comme des migrants illégaux dépourvus de droits. La Convention ne prévoit pas une telle distinction; elle se réfère simplement à des individus susceptibles d’être soumis à des actes de torture. Il semble aussi que des personnes couvertes par la Convention de Minsk relative à l’entraide judiciaire et aux relations judiciaires en matière civile, familiale et pénale, disposent de moins de droits que celles originaires d’autres États. Elle demande que ces points soient clarifiés.

42.M. MARIÑO MENENDEZ remercie la délégation pour l’explication qu’elle a fournie sur le rôle de l’Ombudsman (médiateur). Toutefois, il exprime certains doutes quant aux procédures d’enregistrement de la durée exacte de la détention et fait part de ses inquiétudes concernant leur impact sur le statut juridique des personnes en détention.

43.En dépit des convictions de la délégation relatives à l'autonomie plus importante dont bénéficie le système judiciaire, le rôle spécifique joué par les procureurs au Kazakhstan reste problématique et doit être noté dans les observations finales.

44.Il demande si un accord a été conclu par les États parties à la Convention de Minsk selon lequel leurs citoyens doivent être automatiquement renvoyés dans leur pays d’origine sans qu’aucune enquête ne soit menée pour savoir s’il existe un risque de voir ceux-ci soumis à des actes de torture à leur arrivée.

45.Le PRÉSIDENT, s’adressant en la qualité de membre du Comité et se référant à une affaire citée qui s’est conclue par un règlement extrajudiciaire, se demande si celui-ci a donné lieu à des indemnisations et si oui, sur quelles bases elles ont été octroyées.

46.Les détenus se retrouvent confrontés à un vide juridique. Si leur détention est enregistrée officiellement, ils bénéficient d’une certaine protection; sinon, leur détention peut être prononcée de facto. Les dispositions de la Convention s’appliquent à tous les détenus; il est dès lors crucial d’établir le début et la durée de la détention.

47.Les États sont bien entendu libres de ratifier ou non le Statut de Rome de la Cour pénale internationale; le Comité peut simplement indiquer que la ratification de ce Statut constitue un choix car elle assurerait une protection aux citoyens et empêcherait d’autres États d’établir leur compétence juridictionnelle à leur égard.

48.MmeZHARBOSUNOVA (Kazakhstan) remercie le Comité pour ce dialogue constructif et les recommandations formulées jusqu’à présent. La ratification des instruments internationaux dépend de la volonté politique des États. Lorsque son pays s'est engagé sur la voie de la démocratie et du développement, il l’a fait avec l’intention de ratifier les principaux instruments internationaux en matière des droits de l’homme. Pour autant, la promulgation de la législation et l’élimination des stéréotypes nécessitent beaucoup de temps. La Constitution est valable mais il n’existe pas de formule magique susceptible de garantir la mise en œuvre pratique de la législation.

49.Le rapport et les informations fournies par la délégation et les ONG attestent des pas de géant qui ont été réalisés. Mais bien sûr des améliorations doivent encore être apportées. Depuis la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention en juin 2008, nos efforts se sont concentrés sur la création d’une structure de contrôle de la mise en œuvre de la Convention. Elle est certaine que la poursuite de la coopération avec le Comité et l'organisation éventuelle d'une mission au Kazakhstan en mai 2008, ainsi que le soutien de la société civile et d’autres organismes internationaux, contribueront à améliorer la situation générale et permettront au Kazakhstan de respecter les obligations qui lui incombent en vertu de la Convention. Sa délégation adressera les réponses restantes aux questions soulevées, en anglais et en russe, dans les délais impartis.

La partie publ ique de la séance prend fin à 17 h10

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