NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.76111 mai 2007

Original: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Trente-huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 761e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 4 mai 2007, à 10 heures

Président: M. MAVROMMATIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de l’Italie

La séance est ouverte à 10 heures

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Quatrième rapport périodique de l’Italie (CAT/C/67/Add.3; CAT/C/ITA/Q/4/Rev.1 et Rev.1/Add.1)

1.Sur l’invitation du Président, les membres de la délégation de l’Italie prennent place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT invite la délégation à présenter le quatrième rapport périodique de l’Italie (CAT/C/67/Add.3).

3.Mme LUCIDI (Italie) dit que, depuis que l’Italie a présenté son troisième rapport périodique en 1999, la situation en politique, économique, sociale et culturelle du monde entier a été bouleversée et la menace croissante du terrorisme lance de nouveaux défis à la sécurité physique. Le maintien de la paix et de la sécurité, ainsi que la prévention et la gestion de la crise sont des priorités absolues pour son Gouvernement, fortement engagé aussi dans les efforts internationaux pour réduire la pauvreté, la faim et le sous-développement, et en matière de promotion des droits de l’homme et d’autres objectifs soutenus par les Nations Unies.

4.Le respect des droits de l’homme est également un critère directeur de la politique nationale de l’Italie et de l’ensemble de l’Union européenne (UE). D’une part, l’Italie s’efforce d’assurer le respect des droits fondamentaux de toutes les personnes sur son territoire et d’autre part, elle participe aux efforts internationaux pour sauvegarder la jouissance de la liberté, de la démocratie et des droits fondamentaux par les hommes, les femmes et les enfants dans les pays moins favorisés.

5.En plus d’intégrer les droits et les libertés fondamentales établis par les instruments internationaux, la Constitution italienne de 1948 soutient le principe de la non-discrimination en tant que doctrine de base, qui a toujours inspiré la législation nationale, ainsi que le pouvoir exécutif et judiciaire.

6.L’afflux croissant d’immigrants illégaux en Italie suscite une inquiétude de plus en plus vive. En réponse, le Conseil des ministres italien a adopté la loi Amato-Ferrero, qui vise notamment à améliorer la réglementation de la migration par des initiatives d’intégration et de marché du travail.

7.Un vaste projet de législation sur l’asile politique est en cours d’examen, processus qui suppose l’examen parlementaire de plusieurs lois et la transposition des directives européennes dans la législation nationale. Reconnaissant la nécessité d’adapter sa législation à une réalité internationale changeante, l’Italie base son cadre législatif et ses politiques gouvernementales sur le principe de l’intégration des ressortissants étrangers et sur le droit d’accès au logement, à l’assistance médicale et à l’éducation. Il n’y a pas d’intolérance à l’égard des 3 millions de travailleurs étrangers qui résident légalement en Italie. Tous les travailleurs, nationaux ou étrangers, bénéficient de droits et de prestations sociales égaux.

8.Elle assure le Comité que son Gouvernement s’efforce d’assurer que ses stratégies destinées à résoudre les problèmes posés par les flux démographiques, respectent les droits fondamentaux. Au lieu d’adopter des mesures répressives pour freiner la migration illégale, son Gouvernement a intensifié sa coopération avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, l’Office des migrations internationales et la Croix-Rouge italienne. Une nouvelle législation destinée à mettre en place des commissions territoriales pour la reconnaissance du statut de réfugié, la simplification des procédures et la création de centres pour l’identification des demandeurs d’asile est entrée en vigueur en 2005. En 2007, une directive du Ministère de l’intérieur est entrée en vigueur facilitant la prise en charge des mineurs non accompagnés arrivant aux frontières italiennes. Au fil des années, le Gouvernement a renforcé les mesures pour prévenir la traite des êtres humains et ses conséquences infâmes, notamment le commerce des organes, la prostitution et de nouvelles formes d’esclavage.

9.Dans le contexte de l’Année européenne de l’égalité des chances pour tous, l’Italie s’est particulièrement attachée à protéger les droits fondamentaux des femmes et a créé à cet effet un centre pour surveiller la prostitution et la traite des êtres humains, adopté une législation interdisant et punissant la discrimination à l’égard des femmes sur le lieu de travail et entamé l’examen parlementaire d’une proposition de législation sur la violence familiale.

10.Un Bureau national de la lutte contre la discrimination raciale(UNAR) a été créé en application de la directive européenne 2000/43/CE, en guise d’organe pour empêcher la discrimination, promouvoir l’égalité de traitement et évaluer l’application du principe de non-discrimination. En guise de ramification des activités de l’UNAR, un registre des associations œuvrant à combattre la discrimination a été créé pour autoriser les organes pertinents à agir au nom des victimes de discrimination.

11.En ce qui concerne l’intégration, elle dit qu’une attention spéciale est accordée aux mesures pour soutenir l’intégration des Roms, d’origine locale ou étrangère, et des immigrants en Italie. Les autorités italiennes attendent la mise en application imminente d’une législation complète sur la protection de l’identité culturelle des Roms et projette de convoquer une conférence internationale sur la situation des Roms en Europe.

12.Les actes de racisme sont étroitement surveillés et soigneusement contrés par l’adoption de politiques et sanctions appropriées. Une attention particulière est accordée à la discrimination raciale et à la violence lors des manifestations sportives.

13.S’agissant du recours à la force par les responsables de l’application des lois, elle dit que peu après les événements de Naples et Gênes, deux directives ad hoc ont été publiées et adressées aux chefs de la police afin d’assurer que les personnels des forces de police ont conscience du principe de la diligence due et, plus spécifiquement, de la manière d’utiliser correctement les moyensde dissuasion. La Constitution italienne prévoit de sanctionner la violence physique et psychologique contre les personnes dont la liberté est entravée. L’usage de la force et d’armes par la police est autorisé uniquement dans des circonstances spécifiques. Les initiatives adoptées ces dernières années confirment le ferme engagement de son Gouvernement en matière de protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

14.M. SIMONETTI (Italie), résumant les réponses de son Gouvernement à la liste de questions (CAT/C/ITA/Q/4/Rev.1), dit qu’un groupe de travail ad hoc a été constitué dans le cadre du Comité interministériel des droits de l’homme pour préparer les dossiers pertinents relatifs au rapport présenté au Comité contre la torture.

15.Au cours de la législature de 2006, le débat parlementaire s’est centré sur la double classification de la torture en tant que crime contre «la liberté morale» et «le droit à la vie et à la sécurité individuelle». Au cours de la législature, une législation complète concernant l’asile a été introduite, par sept lois et trois directives européennes. Outre la loi Amato-Ferrero susmentionnée, basée sur une directive du Ministère de l’intérieur de mars 2007, un texte consolidé sur l’instauration de la Commission nationale pour la promotion et la protection des droits de l’homme pour les détenus et les personnes privées de leur liberté a été adopté par la Chambre des députés et est en cours d’examen au Sénat. Il devrait ouvrir la voie à la ratification du Protocole facultatif à la Convention contre la torture. De même, son Gouvernement est particulièrement désireux de proposer une loi sur les principes fondamentaux de la non-discrimination, comprenant la reconnaissance des caractéristiques spécifiques et la protection des Roms.

16.D’autres textes législatifs sont en attente dans les domaines de la prévention et la sanction des crimes impliquant la violence domestique, l’orientation sexuelle, l’identité sexuelle ou d’autres formes de discrimination ainsi que l’harmonisation des législations nationales avec le Statut de Rome.

17.En ce qui concerne la torture et le recours excessif à la force par la police, il cite les dispositions de la Constitution, au titre desquelles l’inviolabilité de la liberté individuelle peut être restreinte par les autorités judiciaires uniquement sur des bases justifiées et conformément aux procédures prescrites par la loi. En cas d’urgence, les autorités de sécurité publique peuvent adopter des mesures provisoires, qui doivent être approuvées par les autorités judiciaires dans les 96 heures. Dans les forces armées, un soldat convaincu d’avoir commis un acte de torture est passible de sanctions pénales et disciplinaires, quelles que soient les circonstances, y compris l’obéissance aux ordres d’un supérieur.

18.Plusieurs articles du Code pénal citent des délits spécifiques et prévoient la protection des personnes contre le traitement illégal pendant l’arrestation et la détention. Outre l’application du Code pénal, le Gouvernement reconnaît l’importance de la formation, notamment par des cours de formation aux droits humains, pour tous les agents de la force publique. Un décret législatif concernant les sanctions pour violation du règlement du Conseil européen sur le commerce des marchandises pouvant être utilisées pour la peine de mort, la torture ou d’autres peines cruelles, inhumaines et dégradantes, a été adopté en janvier 2007. Par ailleurs, l’article premier et l’article 13 de la loi n° 352/1975 sur les règlements des prisons mettent en application la disposition constitutionnelle selon laquelle les peines doivent être humaines et destinées à rééduquer les personnes condamnées.

19.Des décrets présidentiels protègent les droits des immigrants: il est interdit d’expulser ou de refouler un étranger vers un pays où il risque d’être persécuté ou vers un pays où il risque d’être envoyé vers un autre État où il ne serait pas protégé contre la persécution. Faisant spécifiquement référence à l’augmentation de la migration illégale de Libye en Italie, il rappelle qu’un accord de 2002 entre les deux pays est basé sur la coopération pour lutter contre le terrorisme, le crime organisé, le trafic de drogues et l’immigration clandestine. En général, la gestion des centres pour immigrants relève de lignes directrices spécifiques publiées par le Ministère de l’intérieur et est basée sur le respect de la différence, la fourniture d’aide médicale et psychologique, l’information, l’assistance juridique, des conditions de vie adéquates, de la nourriture et autres services nécessaires.

20.Commentant la question du trafic, il dit que son Gouvernement a adopté des lois pour lutter contre les organisations qui s’adonnent à la traite des êtres humains, l’exploitation des femmes et des enfants.

21.Depuis l’entrée en vigueur de la Convention des Nations Unies sur les droits de l’enfant, le traitement des mineurs d’âge, surtout non accompagnés, étrangers ou en détention, veille soigneusement à garantir au mieux les intérêts de l’enfant. La législation italienne interdit l’expulsion des mineurs d’âge étrangers de moins de 18 ans, à moins que l’enfant ne manifeste son intention de suivre ses parents ou tuteurs expulsés. L’approche basée sur la protection est assurée par l’instauration d’un Comité sur les enfants étrangers en application du décret législatif n° 286/98 sur l’immigration et d’une directive appropriée du Ministère de l’intérieur. La discrimination contre les mineurs d’âge étrangers, notamment roms, n’est pas tolérée. Les mineurs étrangers sont sous la supervision du personnel du département de la justice pour mineurs et peuvent participer, au même titre que les ressortissants italiens, aux activités éducatives, aux programmes professionnels et d’emploi, ainsi qu’aux activités sportives et de loisirs.

22.La violence contre les femmes est un délit punissable au titre de l’article 609 bis du Code pénal. La loi n° 66/1996 prévoit des services de conseil juridique et des abris pour les femmes victimes de violence. Le décret législatif n° 216/2003 donne aux victimes, le droit de porter plainte et de recevoir une indemnisation. Et un décret législatif adopté le 8 juin 2005 garantit la non-discrimination et interdit le harcèlement sexuel, notamment sur le lieu de travail. En outre, la loi n° 154/2001 interdit la violence familiale sexiste ainsi que la violence contre les groupes vulnérables comme les personnes âgées et les personnes handicapées.

23.S’agissant de la question du racisme, il dit que l’Italie a ratifié la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et instauré l’UNAR (voir paragraphe 10), chargé de la sensibilisation et de la collecte de statistiques. Une attention spécifique est accordée à la situation des Roms, en insistant sur l’accès à l’éducation et au logement. Des réunions sont organisées régulièrement avec les représentants des Roms et un groupe de travail ad hoc a été créé sur les questions relatives aux Roms. Le projet de «vie interculturelle», en Calabre, est une initiative remarquable, destinée à éviter la ghettoïsation des Roms. La police a également bénéficié d’une formation en problèmes liés à la diversité culturelle et à la migration ainsi qu’en législation.

24.Dans le contexte des efforts internationaux de lutte contre le terrorisme, le Parlement a adopté, à une écrasante majorité, la loi n° 155/2005, conforme à la législation européenne pertinente et qui est actuellement en vigueur.

25.Mme SVEAASS, Rapporteuse de pays, prend note des efforts de l’État partie pour promouvoir les droits fondamentaux et éliminer la torture, et salue la signature du Protocole facultatif à la Convention mais se demande s’il ira jusqu’à la ratification. Elle prend acte de l’ajout de la torture dans le Code de pénal militaire en temps de guerre et des mesures pertinentes adoptées depuis la préparation du quatrième rapport périodique. Elle observe que le rapport, qui devait être remis en 2002, n’a pas été présenté avant 2004 et ajoute que son format le rend quelque peu difficile à comprendre. Elle demande si la société civile a participé à sa préparation. Elle note en outre que l’État partie n’a pas encore présenté de document de base.

26.M. MARIÑO MENÉNDEZ, Co-rapporteur de pays, dit qu’il posera des questions concernant les articles 1 à 9 de la Convention, en particulier les articles 1 à 4. Il se réjouit de l’adoption de la loi Amato-Ferrero sur l’asile et de la transposition des directives européennes connexes. Il salue également la réintroduction de la proposition de loi pour ajouter au Code pénal les articles 613 bis et 613 ter, concernant la torture, mais s’inquiète de ce que la définition de la torture qui y est reprise soit moins complète et absolue que celle de l’article premier de la Convention, qui est la norme internationalement acceptée.

27.Bien que l’article 609 bis du Code pénal réprime la violence sexuelle, il ne donne aucun exemple de ces crimes, et il demande si les mutilations génitales féminines, qui peuvent être considérées comme une forme de torture en vertu de la Convention, est considérée comme un délit. D’après les réponses orales de la délégation, une personne ne peut être expulsée vers un pays où elle risque des persécutions pour un certain nombre de raisons, notamment des persécutions fondées sur le sexe, et il se demande si le risque de mutilations génitales féminines ou de viol en temps de conflit, par exemple, est considéré comme une raison d’accorder l’asile ou le statut de réfugié. Il demande également si l’inclusion de la torture dans le Code pénal militaire en temps de guerre signifie que le recours à la torture peut être considéré comme un crime de guerre, si la Cour pénale internationale est compétente et si l’État partie considère que la Convention est applicable en temps de conflit armé.

28.Comme le crime de torture n’a pas encore été spécifiquement intégré dans la législation nationale, il n’y a pas de statistiques concernant le nombre de cas éventuels, les types de crimes et les auteurs. Il exhorte l’État partie à réprimer rapidement et spécifiquement la torture, et rappelle l’obligation des États parties en application de la Convention, d’enquêter sur toutes les allégations de torture ou de traitement inhumain, non seulement physique mais également psychologique et mental, y compris la torture par les agents de l’État.

29.L’article 2 de la Convention souligne l’obligation d’un État partie de prévenir les actes de torture et il s’inquiète qu’en vertu de la loi n° 155/2005, le décret dit Pisanu sur les mesures antiterroristes, les détenus peuvent apparemment être privés d’accès aux services d’un avocat pendant un maximum de huit jours, ce qui semble excessif. Il demande des éclaircissements sur cette question ainsi que sur la disponibilité de soins médicaux pour ces détenus. La plupart des détenus sont des étrangers et selon des rapports qu’il a reçus, leur détention peut durer des mois voire des années, six ans même, dans un cas. Il demande s’il existe une quelconque législation concernant la détention de ressortissants étrangers et si la durée de leur détention est limitée dans le temps.

30.Passant à l’article 3 de la Convention, il se demande comment le principe du non-refoulement est appliqué en pratique et rappelle que la Convention n’autorise aucune dérogation à ce principe s’il existe un risque de torture. Un complément d’information serait opportun concernant les pouvoirs de la police des frontières pour refuser l’entrée à un candidat réfugié ou un demandeur d’asile, et concernant le rôle du chef du siège de la police (Questore). Le nombre d’immigrants illégaux, dont beaucoup arrivent par mer, a nettement augmenté en 2004 et 2005, et il exhorte la délégation à répondre aux inquiétudes formulées par les défenseurs des droits humains quant à de supposées déportations collectives secrètes d’étrangers, à qui le droit de faire entendre leur demande de statut de réfugié ou d’asile a donc été refusé.

31.Beaucoup d’immigrants ont été expulsés vers la Libye, même s’ils n’étaient pas ressortissants libyens. Il demande s’il existe une procédure pour faire appel d’un ordre d’expulsion et si l’État partie a assuré le suivi de la situation des expulsés en Libye. La délégation devrait commenter les rapports selon lesquels l’État partie a conclu avec les autorités libyennes un accord concernant la construction de centres de rétention pour migrants en territoire libyen et indiquer comment sont protégés les droits des réfugiés de faire entendre leur demande de statut de réfugié ou d’asile et le droit de non-refoulement s’ils risquent de subir des actes de torture.

32.Il comprend qu’un étranger qui séjourne illégalement sur le territoire italien peut être expulsé par mesure administrative et qu’en vertu du «décret Pisanu», l’expulsion peut être immédiate bien qu’un recours soit possible devant le tribunal administratif régional. Il demande si les représentants consulaires sont automatiquement avertis de la détention ou de la présence de l’un de leurs ressortissants demandant le statut de réfugié, l’asile ou une protection humanitaire. Il souligne l’importance, lors de l’adoption des directives européennes pertinentes ou de la mise en application d’une nouvelle législation destinée à réguler l’immigration, d’assurer la protection des droits des ressortissants étrangers, en particulier en ce qui concerne le principe de non-refoulement comme exposé dans la Convention.

33.S’agissant de l’article 4 de la Convention, il s’inquiète que les sanctions pour usage de la torture en application du Code pénal militaire ne soient pas sévères et rappelle que l’article 4 (2) de la Convention demande que les sanctions pour des délits impliquant la torture soient appropriées et tiennent compte de la gravité de leur nature. Il craint que les mesures adoptées par les États parties pour combattre le terrorisme aient pour effet de diminuer la protection des droits de l’homme et salue dès lors les efforts de l’État partie pour poursuivre les agents de l’État impliqués dans la détention illégale d’étrangers ou leur transfert vers des États où ils risquent la torture. Il demande une mise à jour concernant les efforts de l’État partie pour extrader des agents de la CIA (services secrets des États-Unis d’Amérique). Un complément d’information serait opportun également en ce qui concerne les efforts de l’État partie pour la protection diplomatique de ses propres ressortissants, en particulier dans le cas d’un ressortissant italien d’origine arabe, torturé après avoir été transporté au Maroc.

34.Mme SVEAASS, Rapporteuse de pays, salue les informations complètes fournies dans le rapport et les réponses écrites concernant la formation aux droits de l’homme pour les responsables de l’application des lois. Elle demande s’il y a un quelconque suivi de cette formation et une évaluation de son efficacité. Elle demande quelles sont les conséquences pour les participants aux cours de formation qui affichent des attitudes et des comportements non conformes à l’esprit de la formation. Il importe d’inclure également dans cette formation un élément de non-discrimination à l’égard des immigrants et autres communautés ethniques.

35.Elle souhaite des informations plus spécifiques sur la recherche concernant le comportement de la police vis-à-vis de la communauté rom. Elle voudrait en savoir davantage sur la formation dispensée aux personnels intervenant dans le contrôle des foules, en particulier l’usage de méthodes non violentes. Elle demande quel type de formation professionnelle est dispensé au personnel des différents centres de protection et de séjour temporaire. Elle voudrait également connaître les mesures prises pour s’attaquer à la violence familiale, en particulier comment la police et autres personnes concernées sont formées pour intervenir dans ces situations. Elle demande des informations complémentaires sur la formation spécifique pour permettre au personnel de la santé de déceler les marques de torture et dispenser des soins de réhabilitation. Dans quelle mesure le Protocole d’Istanbul – Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels inhumains ou dégradants – a-t-il été intégré dans cette formation?

36.Observant que les réponses aux questions 19 et 20 de la liste relative à l’article 11 semblent concerner les étrangers uniquement, elle demande des informations complémentaires sur tous les détenus. Elle souhaiterait aussi un complément d’information sur la Commission nationale de protection des droits de l’homme. Elle demande une mise à jour de la situation en matière de surpopulation et de conditions de vétusté dans les prisons, ainsi que des mesures prises pour y remédier. Elle voudrait également des informations sur le recours à l’isolement et le suicide dans les prisons et les centres de détention.

37.Le Comité a été informé de plusieurs cas de recours à la force par la police lors d’émeutes et de grandes manifestations, et elle voudrait savoir comment ces cas ont été traités. Apparemment, plusieurs actions en justice ont été entamées mais elle se demande si quelqu’un a réellement été condamné ou jugé pour sa participation aux émeutes de 2001 et plus tard aux incidents mentionnés dans le rapport. Elle serait intéressée aussi d’entendre des commentaires généraux sur la façon dont le recours à la force et la violation des principes des droits de l’homme ont été examinés et quelle assistance a été fournie aux personnes souhaitant porter plainte.

38.Elle s’inquiète que, bien que la question de l’indemnisation des victimes de torture ait été longuement abordée lors de l’examen du rapport périodique précédent de l’Italie, en 1999, ni le présent rapport ni les réponses écrites n’y fassent référence. Elle salue la contribution régulière de l’Italie au Fonds de contributions volontaires des Nations Unies pour les victimes de la torture et demande si des mesures concrètes de réparation et d’indemnisation sont ordonnées par les tribunaux, combien de demandes ont été faites et combien ont été accordées, ainsi que les montants effectivement versés.

39.En ce qui concerne la disposition de l’article 15, selon laquelle toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue sous la torture ne peut être invoquée comme preuve dans aucune action, elle demande d’expliquer la signification de la référence, dans les réponses écrites, aux articles 64 et 188 du Code de procédure pénale, qui prévoient l’interdiction d’utiliser des méthodes ou techniques susceptibles d’influencer le jugement ou d’affecter la capacité de se souvenir et d’évaluer les faits, pendant l’interrogatoire et la recherche de preuves, même avec le consentement de la personne concernée. Y a-t-il eu des cas où cela s’est passé et, dans l’affirmative, quelles en ont été les conséquences?

40.Saluant diverses initiatives et textes législatifs dans le domaine de la non-discrimination et de l’intégration des étrangers, elle demande s’il y a un aperçu général clair de la façon dont les tribunaux traitent les violations de cette législation et combien de personnes ont été condamnées à cet égard. S’agissant de la traite des êtres humains, elle observe que beaucoup de cas sont actuellement à l’étude et demande des informations sur les mises en examen ou condamnations. Elle veut savoir également combien de victimes ont bénéficié d’un traitement en application des programmes décrits dans le rapport.

41.Observant les niveaux élevés de violence domestique, elle dit que le problème requiert manifestement une grande attention et demande quelles mesures juridiques sont adoptées en plus des mesures dans les domaines social et psychologique. Elle souhaite savoir combien de cas rapportés de violence domestique ont eu des enfants pour témoin. Prenant acte que des Italiens ont été condamnés pour crimes sexuels commis à l’étranger, elle demande s’il y a eu des condamnations comparables pour des crimes commis en Italie. Elle demande d’expliquer la référence des réponses écrites à l’extension des circonstances générales aggravantes des cas de violences sexuelles aux crimes commis sur la base de l’orientation sexuelle.

42.Mme BELMIR s’inquiète du fait que dans certains cas, le juge puisse reporter de cinq jours l’exercice par les personnes en garde à vue de leur droit d’accès aux services d’un avocat et demande s’il est possible de faire appel de ces décisions. En ce qui concerne la possibilité d’un examen médical, elle demande pourquoi ce n’est pas le directeur de la prison mais l’autorité judiciaire qui autorise la visite médicale des personnes en attente de jugement en première instance. Elle se dit préoccupée de l’absence d’installations dans les commissariats de police, où les détenus peuvent s’entretenir avec leurs avocats et s’inquiète également que, d’après certaines ONG, des actes soient commis qui relèvent des dispositions de l’article premier de la Convention et doivent être abordés.

43.Elle fait observer que diverses ONG et organismes internationaux des droits de l’homme recommandent la réforme du système italien de justice pour mineurs, en tenant compte d’une série de garanties prévues dans la Convention sur les droits de l’enfant et d’autres instruments, en particulier en ce qui concerne les enfants vulnérables, comme les enfants non accompagnés et ceux qui appartiennent aux groupes minoritaires. Elle se dit préoccupée de l’expulsion d’enfants non accompagnés, dont certains sont expulsés sans assurances concernant leur âge ou leur identité. Elle apprécierait des explications à cet égard.

44.En ce qui concerne le refoulement, elle s’inquiète du cas de M. Britel, renvoyé au Maroc sans que son avocat en ait été informé. Les autorités judiciaires marocaines ont attendu longtemps avant de lui permettre de bénéficier d’un conseil juridique, de lui donner les garanties d’un procès équitable et l’accès à la presse pour attirer l’attention sur sa situation.

45.M. CAMARA se dit préoccupé de l’incohérence apparente avec laquelle les autorités judiciaires italiennes traitent les délits commis à l’étranger contre des ressortissants italiens, d’une part et ceux commis par des Italiens à l’étranger, d’autre part. Il se dit particulièrement préoccupé de la façon dont a été traité le cas de Jorge Olivera, un officier militaire argentin, dont la France a demandé l’extradition. Dans le cadre de la procédure d’extradition, la Cour d’appel de Rome avait statué que les crimes dont il était accusé étaient presciptibles, ce qui est surprenant dans la mesure où il n’est pas courant dans les procédures d’extradition, que les autorités judiciaires examinent le fonds de l’affaire. Le traitement du cas d’un militaire italien qui avait commis des crimes odieux de torture contre des citoyens somalis alors qu’il était en mission de maintien de la paix est très surprenant aussi. Il désire savoir si ce cas a fait l’objet d’une enquête en Somalie. Des autorités judiciaires indépendantes ont-elles fait le voyage en Somalie pour identifier les victimes? Les condamnations sont dérisoires au vu de la gravité des délits. Une enquête est-elle prévue en Somalie ou l’affaire est-elle maintenant clôturée? Il se demande si une telle impunité manifeste ne risque pas de donner lieu à des représailles contre les forces armées italiennes dans les pays où elles opèrent.

46.M. GALLEGOS CHIRIBOGA souligne l’importance de définir la torture dans le Code pénal et dit qu’il faut enquêter sur les cas de torture dans le contexte de la traite des êtres humains et autres phénomènes migratoires.

47.M. GROSSMAN souligne l’importance d’intégrer la définition de la torture dans la législation nationale et d’examiner chaque demande d’asile au cas par cas.

48.Mme LUCIDI (Italie) dit que les mutilations génitales sont passibles de 4 à 12 ans d’emprisonnement. Quelque 20 demandes d’asile ont été reçues de femmes ayant subi des mutations génitales, en provenance du Nigéria, du Togo, de Somalie, de Guinée et du Cameroun.

49.M. MORCONE (Italie) dit que tous les centres d’assistance et de séjour temporaire ainsi que les centres d’identification sont gérés par du personnel civil. La police assure le maintien de l’ordre à l’extérieur des centres et n’a aucun contact avec les étrangers saufs pour des raisons d’ordre public. Des organisations internationales et non gouvernementales contribuent à améliorer la qualité de l’assistance médicale et juridique fournie aux étrangers dans ces centres. Une attention spéciale est accordée à leurs besoins. En particulier, ils ont la possibilité de s’adonner à des activités culturelles et de bénéficier d’une formation professionnelle. Les étrangers ne font pas l’objet de discrimination, sur aucune base.

50.En ce qui concerne la question 14 de la liste, il dit que son Gouvernement ne prévoit plus de construire des centres de rétention pour migrants en Libye, mais il a convenu de construire des centres de santé et un établissement où la police sera formée au titre d’un accord bilatéral de coopération entre l’Italie et la Libye.

51.Mme LUCIDI (Italie) dit que la loi interdit l’expulsion ou l’extradition de personnes vers des pays où ils risquent de faire l’objet de persécutions fondées sur la race, le sexe, la langue ou la religion. Bien que la discrimination en fonction d’une orientation sexuelle soit déjà prise en considération au moment d’examiner les demandes d’asile, son Gouvernement a l’intention de l’inclure explicitement dans les bases pertinentes de non-discrimination.

52.M. PINTO (Italie) dit qu’il faut faire une distinction entre les notions de «refoulement» et «expulsion». Le «refoulement» est une mesure adoptée à l’égard d’étrangers ayant récemment franchi la frontière italienne. «L’expulsion» a trait au renvoi d’étrangers présents sur le territoire italien depuis un certain temps et qui ont enfreint la loi ou n’ont pas demandé de permis de résidence. Les étrangers qui ne remplissent pas les conditions d’entrée dans le pays peuvent être renvoyés. Dans le cas de l’île de Lampedusa, la loi autorise l’expulsion immédiate d’étrangers qui ont contourné les contrôles aux frontières. La disposition pertinente s’applique spécifiquement aux immigrants illégaux arrivés dans l’île par bateau. Dès leur arrivée, les immigrants illégaux reçoivent de la nourriture et une assistance médicale. Ils sont auditionnés pour déterminer leur nationalité. Les enfants non accompagnés sont placés dans des familles locales. Au titre du paragraphe 2 de l’article 33 de la Convention concernant le statut des réfugiés, une exception au principe de «non-refoulement» peut être faite quand un étranger constitue un danger pour la sécurité nationale. Le «décret Pisanu» ne constitue pas une violation du principe de «non-refoulement», puisqu’il autorise l’expulsion d’étrangers qui sont considérés comme un danger pour la sécurité nationale, après une enquête approfondie par le service de renseignements. En raison de la présence massive d’Égyptiens parmi les immigrants illégaux, les autorités libyennes ont autorisé l’expulsion des Égyptiens vers la Libye, en vue de faciliter leur retour en Égypte.

53.Mme LUCIDI (Italie) dit que la notion de «rapatriement volontaire et assisté» a été introduite dans la législation italienne. Si des étrangers acceptent de partir volontairement et coopèrent avec les autorités italiennes, son Gouvernement s’engage à financer leur retour dans leur pays d’origine et à soutenir financièrement leur réintégration dans la société à leur retour.

54.Mme FORTE (Italie) dit que, outre la formation de base dispensée à tous les officiers de police en début de carrière, une formation aux droits de l’homme est désormais dispensée aux fonctionnaires de police à tous les niveaux. Les fonctionnaires promus doivent suivre une formation complémentaire.

55.Mme DELLA MONICA (Italie) dit que les mutilations génitales constituent un crime au titre de la loi n° 7 du 9 janvier 2006. De nombreuses organisations de la société civile sont activement engagées dans la protection des victimes de mutilations génitales et de violence domestique. Elles mènent des campagnes spéciales en vue de sensibiliser le public au problème. Une ligne téléphonique d’urgence gratuite est en place pour les victimes de mutilation génitale et de violence domestique. Un plan d’action pour combattre tous les types de violence doit être élaboré et un centre spécial créé pour surveiller la violence contre les femmes et les enfants. Un comité interministériel et plusieurs ONG luttent activement contre le phénomène de la traite des êtres humains.

56.M. PALAZZI (Italie) dit que la législation italienne contient des dispositions spécifiques anti-discrimination et établit le principe de l’égalité des personnes, quelle que soit leur race ou leur origine ethnique. Des recours légaux sont disponibles pour les victimes de discrimination. Un bureau spécial anti-discrimination a été créé au niveau national pour combattre la discrimination par des mesures préventives et des campagnes de sensibilisation. Une grande importance est accordée à la lutte contre la discrimination à l’égard des Roms, qui sont parmi les groupes les plus vulnérables de la population.

La séance est levée à 13 h 10

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