NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/SR.84023 janvier 2009

Original: FRANÇAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

Quarante et unième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)*DE LA 840e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mercredi 5 novembre 2008, à 10 heures

Président: M. GROSSMAN

SOMMAIRE

EXAMEN DE RAPPORTS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (suite)

Deuxième rapport périodique de la Serbie

La séance est ouverte à 10 h 5 .

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATIONDE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Serbie (CAT/C/SRB/2; CAT/C/SRB/Q/1 et CAT/C/SRB/Q/1/Add.1 (document distribué en anglais seulement)).

1. Sur l ’ invitation du Président, M. Ćiplić, M. Karadžić, M. Vukčević, M me  Jašarević, M me  Ćamber, M. Vujić, M. Ignjatović, M. Pantelić, M. J oka, M. Vulević, M. Ivanović, M Decklić, M me Podanin et M me  Stajić prennent place à la table du Comité.

2.M. ĆIPLIĆ (Serbie) rappelle qu’après les changements démocratiques intervenus en 2000, ce qui était alors la République fédérale de Yougoslavie a été admise comme Membre de l’Organisation des Nations Unies en tant qu’un des État successeurs de l’ex‑République fédérative socialiste de Yougoslavie, en maintenant son adhésion à tous les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme. La République fédérative socialiste de Yougoslavie a signé la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en avril 1989 et l’a ratifiée en 1991. En septembre 2006, la République de Serbie a également ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, et elle a ratifié la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants en 2004.

3.Une fois signifiée la notification de succession, le 12 mars 2001, la République fédérale de Yougoslavie a entrepris de présenter aux organes conventionnels pertinents ses rapports initiaux sur l’application des instruments internationaux et conventions des Nations Unies qu’elle avait ratifiés: le rapport initial de la Serbie‑et‑Monténégro sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son rapport initial sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ont été soumis aux organes conventionnels compétents en juillet 2004 et en mai 2005 respectivement. Le rapport initial de la République de Serbie sur l’application de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes a été présenté en mai 2007 et le rapport initial sur l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant a été présenté en mai 2008. Pour qu’il soit rendu compte de l’application des instruments des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme sur l’ensemble de son territoire, la République de Serbie a jusqu’à présent demandé aux comités concernés d’examiner l’application de ces textes dans la Province autonome du Kosovo‑Metohija, qui est une fraction du territoire de l’État partie placée depuis 1999 sous l’autorité de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK) en application de la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies. C’est ainsi qu’en juillet 2006, le Comité des droits de l’homme a examiné le rapport de la MINUK sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dans ladite province. Le rapport de la MINUK sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels sera examiné en novembre 2008.

4.Jusqu’à présent, la présentation par la République de Serbie de rapports sur l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme a revêtu un caractère complexe, notamment en raison des périodes prolongées qu’ils couvraient. Ces rapports ont été élaborés dans un contexte marqué par un rythme soutenu de réformes et par des changements structurels à l’issue desquels la République fédérale de Yougoslavie est devenue la Communauté étatique de Serbie‑et‑Monténégro. Après la dissolution de celle-ci en juin 2006, la République de Serbie, seul État successeur de la Communauté étatique, a endossé l’ensemble des obligations qui avaient été souscrites par celle-ci au titre des traités et conventions des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme. C’est pourquoi les rapports soumis par la République de Serbie reprennent en partie les rapports présentés à l’époque où la Communauté étatique de Serbie‑et‑Monténégro existait.

5.Il faut reconnaître que la période antérieure à 2000 a été marquée par des violations des droits de l’homme commises au mépris des engagements internationaux souscrits. La République de Serbie a alors connu une période de conflits, d’isolement, de tensions avec les pays voisins et la communauté internationale, de sanctions économiques et d’instabilité au plan interne, autant de facteurs qui ont rapidement provoqué l’effondrement de son économie et l’appauvrissement de la quasi‑totalité de la population. Mais cela étant, lorsque les forces démocratiques ont accédé au pouvoir en octobre 2000, elles ont engagé le processus de transition démocratique et abrogé les lois qui étaient discriminatoires et contraires au droit international. La question de la réintégration du pays au sein des organisations internationales a tout d’abord été réglée à l’égard de l’ONU, puis de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) et du Conseil de l’Europe, des organisations avec lesquelles la République de Serbie coopère activement en matière de protection et de promotion des droits de l’homme. Dans le cadre de sa stratégie d’intégration à l’Europe, la Serbie a entrepris de réformer sa législation afin de mettre son droit interne en conformité avec les «acquis communautaires» de l’Union européenne et de se doter des normes internationales les plus exigeantes dans le domaine des droits de l’homme. Conformément à ses obligations internationales, la République de Serbie coopère activement avec le Tribunal pénal international pour l’ex‑Yougoslavie ainsi qu’avec la MINUK. De même qu’elle présente les rapports périodiques conformément aux obligations qui sont les siennes au titre des instruments internationaux auxquels elle est partie, la République de Serbie a un intérêt direct à ce que la MINUK s’acquitte régulièrement de son obligation de faire rapport, de façon que les organes conventionnels concernés examinent l’application de ces instruments sur l’ensemble de son territoire.

6.En novembre 2006, la Serbie a adopté une nouvelle Constitution, qui garantit notamment le respect de l’intégrité physique et mentale de chacun. En vertu de ce texte, nul ne peut être soumis à la torture ou à des peines ou traitements inhumains ou dégradants, et ne peut faire l’objet d’expériences scientifiques et médicales sans y avoir librement consenti. Le nouveau Code pénal et la loi sur la police adoptés en 2005 prévoient des procédures efficaces et modernes que la police est tenue d’appliquer lorsqu’elle est au contact de la population et en particulier des personnes privées de liberté. Par ailleurs, une nouvelle loi sur la procédure pénale a été adoptée en 2006 et entrera en vigueur le 1er janvier 2009. La loi sur l’asile entrée en vigueur le 1er avril 2008 définit pour la première fois le statut de réfugié sur la base de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés. En septembre 2005, le Ministre de l’intérieur a mis sur pied un organe chargé de surveiller l’application de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants, afin de détecter et prévenir toutes les formes d’actes de torture perpétrés par la police. Un volet particulièrement important de la réforme de la police a été la mise en place d’un dispositif de contrôle interne obligeant la police à assumer ses responsabilités et permettant de lutter efficacement contre la corruption en son sein, et, à terme, d’établir des règles déontologiques rigoureuses. La principale mesure institutionnelle adoptée à cette fin a été la création, en mai 2006, d’une Unité de contrôle internedes services de police au sein du Ministère de l’intérieur. Un autre aspect important de la mise en place de ce dispositif a été l’adoption de règles concernant la procédure de traitement des plaintes portées par les particuliers contre des fonctionnaires de police. Pour prévenir les actes de torture commis sur les personnes privées de liberté, des fonctionnaires de la Direction de l’application des peines de placement en institution sont chargés de contrôler la légalité des agissements du personnel de ces institutions, en effectuant des contrôles réguliers et inopinés.

7.Le Bureau du Médiateur, institution indépendante créée en vertu de la Constitution, est chargé de protéger les droits des citoyens et de contrôler les activités de l’administration, les activités de l’organe chargé de la protection juridique des droits et intérêts de la République de Serbie ainsi que celles des autres organismes, organisations, sociétés et institutions habilités à exercer la puissance publique. À ce jour, le Bureau est opérationnel à l’échelon national, dans la Province autonome de Voïvodine et à l’échelon local. Au plan national, le Médiateur a été introduit dans l’ordre juridique interne par le biais de la loi. Il s’agit d’un Médiateur parlementaire national de type classique bénéficiant des services de quatre adjoints dont l’un est spécialisé dans la protection des personnes privées de liberté. Depuis 2003, les activités du Médiateur sur le territoire de la Province autonome de Voïvodine consistent notamment à exercer un contrôle externe sur les institutions pénitentiaires de la Province. Étant donné qu’en octobre 2008, le Parlement de la République de Serbie a élu un Médiateur adjoint spécialisé dans la protection des droits des personnes privées de liberté et que le Bureau du Médiateur a d’ores et déjà fait ses preuves dans le domaine de la protection des droits de l’homme, les instances politiques ont convenu que le Médiateur assumerait les fonctions de mécanisme national de prévention de la torture prévue par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention. La République de Serbie apprécie et soutient les activités de la société civile dans le domaine de la surveillance des établissements accueillant des personnes privées de liberté. Diverses organisations non gouvernementales effectuent régulièrement des visites dans les établissements pénitentiaires serbes et formulent des recommandations sur l’amélioration des conditions de détention, recommandations que la République de Serbie a incorporées dans la stratégie de réforme du système d’application des peines qu’elle a adoptée en 2005.

8.M. Ćiplić souhaite attirer l’attention du Comité sur la question de l’application de la Convention dans la Province autonome du Kosovo-Metohija, placée sous l’administration internationale des Nations Unies depuis juin 1999 conformément à la résolution 1244 du Conseil de sécurité des Nations Unies. Selon cette résolution, le Kosovo-Metohija fait partie intégrante du territoire de la République de Serbie; la Convention y est par conséquent applicable, mais c’est à la MINUK qu’il incombe de veiller à son application dans la Province. C’est pourquoi le rapport à l’examen ne contient pas de renseignements précis sur l’application de la Convention dans cette partie du territoire de la République de Serbie. Il convient cependant de souligner que de manière générale, la situation des droits de l’homme au Kosovo‑Metohija est loin d’être satisfaisante et notamment que les droits de l’homme des minorités, en particulier des minorités serbe et rom, n’y sont pas respectés. Dans un climat de discrimination généralisée fondée sur l’appartenance ethnique, religieuse, l’origine et la langue, les relations entre les communautés et le traitement réservé aux minorités sont extrêmement préoccupants. Dans ces circonstances, et eu égard aux observations finales formulées par les organes conventionnels compétents à l’issue de l’examen des rapports initiaux sur l’application des instruments internationaux pertinents présentés à ce jour par la République de Serbie, il serait souhaitable que le Comité demande à la MINUK de lui communiquer toutes informations pertinentes afin qu’il puisse examiner l’application de la Convention dans cette province autonome de la République de Serbie et faire des recommandations à ce sujet.

9.L’ordre juridique et la réglementation de la République de Serbie sont conformes aux normes et règles internationales relatives à la protection de toutes les personnes contre les violences et les conséquences de traitements ou peines inhumains ou cruels. Que ce soit individuellement ou en coopération avec les organisations internationales, les autorités œuvrent sans relâche en faveur de la mise en place de mécanismes efficaces à tous les niveaux de l’administration pour assurer une mise en œuvre cohérente de la Convention. La coopération avec le Comité est à cet égard précieuse. La République de Serbie reconnaît la compétence du Comité au titre de l’article 20 de la Convention; des membres du Comité se sont d’ailleurs rendus en Serbie en 2002 en application de cet article. Elle reconnaît également la compétence du Comité pour examiner les communications reçues d’autres États et pour recevoir et examiner les requêtes présentées par des personnes relevant de sa juridiction, ou en leur nom.

10.La République de Serbie, consciente de toutes les difficultés dont elle a hérité et des défis auxquels elle est confrontée, demeure résolue à progresser encore dans la voie de la démocratie, à s’acquitter de ses obligations internationales et à se doter des normes les plus élevées, en particulier dans le domaine des droits de l’homme et de la protection contre la torture, en coopérant pleinement avec les organismes internationaux compétents en la matière. Le dialogue engagé avec le Comité s’inscrit dans ce processus et l’échange ouvert et constructif auquel donnera lieu l’examen du rapport, ainsi que les recommandations formulées par le Comité, contribueront à la pleine application de la Convention et à une meilleure protection des droits de l’homme dans le pays.

11.M. MARIÑO MENÉNDEZ (Rapporteur pour la Serbie) remercie la délégation serbe de sa présentation qui permet au Comité de mesurer l’importance des changements survenus dans le pays au cours des quinze dernières années, l’adoption d’une constitution démocratique en 2006 ayant été à cet égard l’un des faits les plus marquants. Le Comité se félicite de la volonté de la République de Serbie, devenue sujet de droit international à part entière, de relever l’ensemble des défis auxquels elle est confrontée en tant que membre de la communauté internationale. Bien que le rapport couvre la période allant de 1992 à 2003, il sera certainement nécessaire de revenir sur un certain nombre de faits plus anciens dans la mesure où ils sont évoqués par l’État partie dans ses réponses écrites à la liste des points à traiter. La délégation a indiqué que, succédant à la République socialiste fédérative de Yougoslavie qui avait ratifié la Convention contre la torture en 1991, la Serbie est liée par cet instrument et reconnaît aussi la compétence du Comité pour examiner des communications reçues de particuliers au titre de l’article 22 de la Convention. En cas de succession d’États, l’État successeur est notamment tenu de s’acquitter des obligations qui découlent de décisions prises par le Comité concernant des communications dont il a été saisi. Il serait donc utile de connaître la position de la Serbie concernant les suites qu’elle entend donner, en tant qu’État successeur, aux décisions prises par le Comité alors qu’elle faisait partie intégrante de la République socialiste fédérative de Yougoslavie ou de la Communauté étatique de Serbie-et-Monténégro.

12.Le Comité a pris bonne note du fait que la Serbie ne se tient pas pour responsable de l’application de la Convention dans la Province autonome du Kosovo-Metohija, celle-ci étant placée sous l’autorité de la Mission d’administration intérimaire des Nations Unies au Kosovo (MINUK). Il appartiendra en effet au Comité de trouver le moyen de surveiller l’application de la Convention contre la torture dans cette Province.

13.Le Comité accueille avec satisfaction les principaux changements portés à sa connaissance par la délégation: ratification de la Convention européenne pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants et mise en place d’un organe chargé de surveiller son application, adoption de la loi sur l’asile de 2008 portant création du statut de réfugié, de la loi portant création d’un Bureau du Médiateur et de la loi de 2006 relative à la coopération avec le Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie. À ce sujet, il convient également de se féliciter de la création d’un Bureau du Procureur chargé des crimes de guerre. De manière générale, la coopération de la Serbie avec le Comité s’est révélée étroite et fructueuse, comme en témoigne notamment la visite effectuée par des membres du Comité en Serbie en application de l’article 20 de la Convention. La Serbie a incontestablement progressé dans la voie de la mise en conformité de ses règles de droit et de sa pratique avec sa propre Constitution et avec les règles pertinentes du droit international, notamment les «acquis communautaires» de l’Union européenne.

14.En ce qui concerne l’application de l’article premier de la Convention, M. Mariño Menéndez rappelle tout d’abord que le Comité a coutume de recommander vivement aux États parties d’incorporer dans leur législation l’intégralité de la définition de la torture énoncée dans la Convention. Bien que la Constitution de 2006 consacre le principe de l’interdiction de la torture, celle-ci ne fait l’objet d’aucune définition spécifique en droit serbe. Il serait intéressant de savoir si le nouveau Code pénal contient une telle définition et prévoit des peines proportionnées à la gravité de ces actes, et si l’imprescriptibilité de la torture est consacrée par sa législation pénale. La Convention contre la torture étant intégrée à la législation serbe, il serait aussi intéressant de savoir si elle peut être directement invoquée devant les tribunaux. Enfin, le Comité souhaiterait savoir si la législation relative aux crimes de guerre contient une définition spécifique de la torture, différente de celle du droit commun.

15.En ce qui concerne les articles 2 et 4 de la Convention, dont les dispositions sont étroitement liées, des précisions sur les procédures susceptibles d’être engagées en cas d’allégation de torture seraient utiles. L’examen de la législation pénale serbe en vigueur montre que les détenus n’ont pas accès à un médecin. La délégation pourrait-elle présenter ses observations à ce sujet en indiquant notamment si le droit de la personne détenue d’être examinée par un médecin est prévu dans le nouveau Code pénal? Lorsqu’il y a lieu de croire qu’une personne privée de liberté a été soumise à la torture, une enquête est-elle diligentée d’office? La victime peut-elle directement porter plainte ou doit-elle saisir le Bureau du Procureur? Il serait utile d’apprendre si la Serbie pourrait envisager de doter l’organe chargé de surveiller l’application de la Convention européenne pour la prévention des actes de torture de pouvoirs d’enquête. Il serait également intéressant de savoir si les décisions des organes chargés de traiter les plaintes relatives à des actes de torture sont susceptibles de recours devant les tribunaux et si les policiers suspectés d’avoir commis un acte de torture ou reconnus coupables d’un tel fait continuent d’exercer leurs fonctions ou s’ils sont suspendus d’office. Des données statistiques sur les cas de policiers suspendus seraient les bienvenues. Le Comité voudrait des précisions sur la durée de la détention avant jugement et sur les conditions dans lesquelles les prévenus peuvent être mis à l’isolement pour des raisons de sécurité, ainsi que sur la durée pendant laquelle des personnes peuvent être détenues avant jugement dans des établissements pénitentiaires accueillant des personnes atteintes de troubles mentaux. Des renseignements sur les autorités chargées de surveiller les conditions de détention dans ces établissements seraient également utiles. À leur propos toujours, il est indiqué au paragraphe 67 des réponses de la Serbie à la liste des points à traiter (CAT/C/SRB/Q/1/Add.1) qu’il est envisagé de modifier la législation relative à la protection sociale; il serait utile que la délégation précise les raisons pour lesquelles elle estime que la loi qui régit la situation des handicapés mentaux placés dans des établissements pénitentiaires et l’inspection des lieux de privation de liberté doit être modifiée. Il semble bien que la situation dans les établissements pénitentiaires accueillant des personnes atteintes de troubles mentaux laisse beaucoup à désirer, en particulier pour ce qui est des conditions de vie des détenus, et M. Mariño Menéndez souhaite savoir si des mesures ont été prises pour y remédier.

16.Concernant le Bureau du Médiateur nouvellement créé, il y aurait lieu, compte tenu du fait que des postes de délégués du Médiateur ont été créés au niveau des collectivités locales et des provinces, de préciser la manière dont s’articulent les divers niveaux ainsi que les attributions respectives du Bureau national et des antennes locales. Cette institution ayant apparemment été créée dans le but de mettre en place le mécanisme national de prévention prévu par le Protocole facultatif se rapportant à la Convention, il serait utile de savoir si les antennes locales du Bureau du Médiateur joueront un rôle de surveillance de l’application du Protocole facultatif et veilleront à ce que des visites soient effectuées dans les lieux de privation de liberté. Les ONG qui font de telles visites doivent passer un accord préalable avec la direction de l’organe administratif chargé de surveiller l’application des peines dans les prisons et il serait utile de savoir si des ONG autres que Human Rights Watch et le Comité de Helsinki pour les droits de l’homme ont conclu un pareil accord.

17.Il est fait état, au paragraphe 89 du rapport, de la mise en place d’un nouveau système judiciaire; la délégation pourrait peut-être en décrire les caractéristiques et donner des précisions sur le degré d’indépendance qu’auront les procureurs dans le cadre de ce système et sur leur rôle pour ce qui est de la surveillance de la situation des personnes privées de liberté, en indiquant s’ils seront habilités à engager des poursuites pénales lorsque des cas de torture auront été constatés. Les procureurs agiront-ils en toute indépendance ou dépendront-ils du pouvoir exécutif?

18.S’agissant de l’article 3 de la Convention, la Serbie a indiqué que la procédure administrative d’examen des demandes d’asile est régie par des règlements administratifs et non par une loi. Or les règlements peuvent changer et il conviendrait peut-être d’élever ces textes administratifs au rang de loi afin de renforcer certaines garanties. Il serait en outre utile de savoir s’il existe une procédure d’examen d’urgence de la recevabilité des demandes d’asile comparable à celle qui a été adoptée dans des pays de l’Union européenne et, dans l’affirmative, si un recours contre le rejet d’une demande d’asile déposé au titre de cette procédure a un effet suspensif sur l’expulsion prévue. Par ailleurs, la Serbie indique au paragraphe 93 de ses réponses à la liste de points à traiter qu’elle demande des assurances diplomatiques aux États vers lesquels elle extrade des personnes; il conviendrait, à cet égard, de préciser si la Serbie demande également de telles assurances dans les cas de refoulement, de transfert, d’expulsion ou de non‑admission sur le territoire.

19.Concernant les articles 6, 7 et 8 de la Convention et le fait que, comme l’a souligné la délégation serbe, le Kosovo n’est pas administré par la Serbie, M. Mariño Menéndez souhaiterait apprendre si des affaires sont encore pendantes devant les juridictions serbes pour des faits survenus au Kosovo-Metohija avant l’adoption par le Conseil de sécurité de sa résolution 1244. Il serait également utile de savoir si les actes visés par la Convention dont des citoyens serbes peuvent être victimes au Kosovo relèvent de la juridiction serbe; on se rappellera à cet égard que les États s’efforcent généralement de protéger les droits de leurs ressortissants même lorsque ceux-ci se trouvent hors du territoire sur lequel lesdits États exercent pleine souveraineté. Pour ce qui est de l’article 9 de la Convention, et s’agissant des procédures visant les auteurs de crimes de guerre, M. Mariño Menéndez rappelle que la Cour internationale de Justice, dans le cadre d’une procédure engagée par la Bosnie-Herzégovine contre la Serbie pour génocide, a déclaré l’État serbe non coupable de ce crime, mais a estimé que des personnes – principalement des paramilitaires – impliquées dans les événements de Srebrenica s’étaient rendues coupables de génocide; il serait donc utile que la délégation précise si une enquête a été menée à ce sujet et si les autorités serbes ont pris des mesures pour faire répondre de leurs actes des citoyens serbes ou des personnes relevant de leur juridiction qui auraient participé à ce génocide, ou si elles prévoient d’en prendre. La Serbie devrait également faire le point concernant la question de la remise de M. Mladic au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie.

20.MmeSVEAASS, évoquant tout d’abord le point 5 de la liste des points à traiter, dans lequel il est demandé à la Serbie de donner des informations sur le contrôle de divers types d’établissements accueillant des personnes privées de liberté, aimerait avoir des précisions sur les modifications qui vont être apportées à la loi sur la protection sociale, sur le processus engagé à cet égard et sur les mesures concrètes qui ont été prises. Elle note que le Gouvernement serbe fait preuve d’une certaine ouverture et que plusieurs organisations indépendantes telles que le Comité d’Helsinki pour les droits de l’homme en Serbie ont effectué des visites dans divers établissements, en particulier des institutions accueillant des enfants handicapés et des handicapés mentaux. Elle souhaiterait savoir si l’organisation Mental Disability Rights International, qui a soumis un rapport au Comité, a pu se rendre régulièrement dans ces établissements. La délégation pourrait aussi indiquer ce qu’il advient des rapports et des informations présentées par ces organisations, quel sort leur est réservé et quelle suite leur est donnée. Il importe en effet non seulement d’avoir des mécanismes de contrôle, mais aussi d’enquêter sur les informations recueillies et, le cas échéant, d’engager des procédures judiciaires et d’indemniser les victimes. À ce propos, il serait utile de savoir dans quelle mesure les responsables de violations sont tenus pour responsables de leurs actes, comment les victimes sont indemnisées et en quoi les programmes de traitement ont changé. Il semble par ailleurs que dans certains établissements, des personnes présentant des troubles d’ordre psychiatrique cohabitent avec des personnes ayant d’autres genres de handicaps et des problèmes d’apprentissage. Or, toute personne prise en charge doit pouvoir bénéficier d’un traitement qui corresponde au diagnostic établi. Enfin, le Médiateur, dont le bureau fera partie du mécanisme national de prévention, n’a pas été en mesure de s’occuper de ces questions, faute de ressources peut-être. Il conviendrait donc de renforcer cette institution.

21.À propos des réparations dues aux victimes de crimes de guerre, il est indiqué dans les réponses de la Serbie à la liste des points à traiter qu’un programme de protection des témoins de crimes de guerre a été mis en place en 2006. Il s’agit là d’une mesure très importante, mais il serait souhaitable d’avoir davantage de renseignements sur l’indemnisation des victimes de tels crimes. En particulier, la délégation devrait préciser s’il existe des programmes d’indemnisation, si des indemnisations ont effectivement été accordées et s’il existe des programmes plus complets de prise en charge des victimes de crimes de guerre quel que soit l’endroit où elles se trouvent lorsqu’une telle indemnisation leur est accordée. Mme Sveaass souhaiterait enfin savoir quelles sont les peines applicables aux personnes déclarées coupables de crime de guerre, et en particulier quelle est la peine d’emprisonnement maximale prévue, combien de décisions judiciaires ont été rendues pour de tels faits et quelles ont été les peines prononcées.

22.M. GAYE (Corapporteur pour la Serbie) partage les appréciations de M. Mariño Menéndez sur la situation générale qui prévaut en Serbie et salue les efforts déployés par l’État partie pour instaurer l’état de droit sur son territoire, renforcer la démocratie et se rapprocher des valeurs de l’Union européenne. Il est fort compréhensible, compte tenu de la situation difficile qu’a connue la Serbie, qu’il y ait encore des distorsions importantes sur le plan normatif et il faut se féliciter de ce que le Gouvernement serbe ait engagé un processus de clarification normative. S’agissant de l’article 10 de la Convention, l’État partie a indiqué qu’un programme de formation des forces de l’ordre et des responsables de l’application des lois avait été mis au point, et M. Gaye se demande quels en sont les résultats et si une évaluation de l’action engagée en la matière a été réalisée. S’agissant des prisons, il semble que la surpopulation qui y règne favorise les actes de violence et de torture. Il serait utile au Comité d’avoir des informations plus précises sur la situation réelle de la population carcérale et des données statistiques sur le nombre de personnes qui sont en détention avant jugement et sur la durée de cette détention. En effet, ou bien la justice fonctionne normalement, sans lenteurs, et la surpopulation carcérale est due à un problème d’infrastructure et à un manque de moyens, ou bien la justice est lente; dans le second cas, il serait opportun d’envisager de procéder à une réforme de l’organisation judiciaire afin que les personnes inculpées soient jugées dans un délai raisonnable.

23.Concernant les actes de violence et de torture commis contre les détenus par des agents de l’État ou par d’autres détenus, il serait utile d’avoir des données statistiques sur les procédures qui ont été engagées à la suite de plaintes portant sur de tels actes. Il serait également souhaitable que la délégation serbe fournisse des informations beaucoup plus détaillées sur le contrôle de la détention et sur les autorités qui en sont chargées. M. Gaye a pris note des informations fournies par la Serbie sur les fonctions du Bureau de l’Inspecteur général, mais il estime qu’une ou plusieurs autorités judiciaires devraient être chargées de contrôler la situation dans les prisons et il se demande si tel est bien le cas. La Serbie a par ailleurs indiqué que le Médiateur, diverses ONG et des organisations internationales effectuaient des visites dans les prisons. Des recommandations sont-elles ensuite formulées à l’adresse des autorités, et celles-ci en tiennent-elles compte? Il serait utile, concernant les actes de torture et mauvais traitements infligés dans les prisons, que la délégation serbe fournisse des renseignements sur les procédures prévues et sur les possibilités de porter plainte en pareil cas, en précisant qui traite ces plaintes, quelle suite leur est donnée et si un organe judiciaire indépendant est habilité à engager d’office une procédure lorsqu’il est allégué que de tels actes ont été commis. Il conviendrait en outre de fournir des données statistiques sur ces procédures et d’indiquer si elles ont débouché sur des sanctions disciplinaires ou judiciaires. Enfin, concernant les réparations à accorder aux victimes d’actes de torture, M. Gaye souhaiterait que l’État partie fournisse des données statistiques sur les actions intentées en ce sens, sur les décisions prises par les tribunaux, sur les mesures de réparation qui ont pu être ordonnées et sur la publication de ces décisions.

24.Pour ce qui est de l’article 15 de la Convention, il serait souhaitable de disposer d’informations sur les affaires dans lesquelles des preuves ont été écartées parce qu’elles avaient été obtenues par la torture et sur les éventuelles décisions de justice qui ont été annulées pour avoir été fondées sur de telles preuves. S’agissant de la violence contre les femmes et les fillettes, il serait important de préciser si un programme de sensibilisation a été mis en place, si une formation est dispensée à ce sujet aux agents de l’État et si les tribunaux ont été saisis d’affaires de violence de ce type; il conviendrait également de donner des renseignements sur les moyens judiciaires dont disposent les victimes pour obtenir réparation. Concernant le statut des réfugiés, M. Gaye souhaite avoir des précisions sur la norme qui leur est appliquée et sur les protections dont ils bénéficient dans la période précédant l’examen de leur demande; en outre, des données statistiques permettraient au Comité de se faire une meilleure idée de la situation des réfugiés en Serbie.

25.S’agissant du matériel spécifiquement conçu pour torturer ou infliger d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, M. Gaye demande si la Serbie a pris des mesures pour en interdire le commerce et l’importation. Il souhaiterait également savoir si la Serbie a adopté une loi pour faire face à la menace terroriste et, dans l’affirmative, quelle est son incidence sur les dispositions relatives aux droits de l’homme en vigueur. Enfin, il serait intéressant d’avoir confirmation du fait que la Serbie est partie au Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

26.MmeBELMIR se félicite de l’accent mis par le Gouvernement serbe sur l’instauration de l’état de droit. Il est notamment indiqué dans le rapport (CAT/C/SRB/2) que l’État partie s’engage à respecter le principe du procès équitable, que les juges sont indépendants et autonomes et qu’ils sont nommés à vie. Or il ressort du paragraphe 98 dudit rapport que les règles de procédure des tribunaux sont désormais définies par le Ministre de la justice et doivent être approuvées par le Président de la Cour suprême. Il semble donc que l’autorité judiciaire, pour ce qui est de l’établissement des règles de procédures qui gouverneront ses activités, va dépendre d’une autorité exécutive. Il conviendrait que la délégation serbe fournisse des précisions à ce sujet.

27.Il ressort des paragraphes 240 et suivants du rapport que le décret sur les mesures spéciales adopté le 12 mars 2003 restreint certains droits et libertés de l’homme et du citoyen garantis par la Constitution et confère des compétences particulières aux organes de l’État pendant l’état d’urgence; Mme Belmir voudrait savoir quelles mesures l’État partie a mises en œuvre pour que soient respectés les principes relatifs à l’état d’urgence énoncés dans le Pacte relatif aux droits civils et politiques.

28.Rappelant que le Comité des droits de l’homme a, dans ses observations finales du 14 août 2006 (CCPR/C/UNK/CO/1), exprimé son inquiétude au sujet de l’absence de garanties adéquates en ce qui concerne l’indépendance des juges et procureurs internationaux, de la faible rémunération des juges et procureurs locaux, de la faible représentation des minorités ethniques au sein de l’institution judiciaire, de la lenteur excessive des procédures civiles, du nombre d’affaires en souffrance devant les tribunaux et de l’inexécution fréquente des décisions judiciaires, Mme Belmir voudrait savoir si l’État partie a fait en sorte d’améliorer la situation sur ces différents points depuis lors.

29.Un complément d’information serait souhaitable sur la distinction faite au paragraphe 217 du rapport entre les cas d’abus de pouvoir et les cas d’infraction pénale comportant des agissements pouvant être assimilés à des actes de torture; on parle généralement d’abus de pouvoir pour des actes relevant du droit administratif, non pour des actes qui constituent une atteinte à l’intégrité physique des personnes.

30.Mme Belmir déplore qu’aucune stratégie globale n’ait été mise en œuvre dans l’État partie pour prévenir la traite et l’exploitation des enfants, ce qui expliquerait le nombre élevé d’enfants victimes d’exploitation sexuelle et de travail forcé. Enfin, il semblerait que de nombreux réfugiés sont soit expulsés du pays, soit contraints de quitter des centres d’hébergement de fortune créés sans aucun fondement juridique, et dont les autorités ordonnent la fermeture sans pour autant offrir aux personnes concernées une possibilité de se reloger. Un complément d’information à ce sujet serait le bienvenu.

31.M. GALLEGOS CHIRIBOGA dit que l’isolement pénitentiaire, surtout lorsqu’il se prolonge, constitue une violation des droits de la personne humaine d’autant plus grave que les détenus sont des handicapés. Il rappelle que la République de Serbie est partie à la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

32.MmeGAER remercie l’État partie pour ses réponses écrites à la question no 6 de la liste des points à traiter relative à la situation régnant dans les différents lieux de détention et prisons pour femmes et voudrait savoir si la République de Serbie s’est donné les moyens de lutter contre les violences sexuelles dont sont victimes les femmes en milieu carcéral, et notamment si un mécanisme a été créé pour recueillir leurs plaintes et dans l’affirmative, si ces plaintes donnent généralement lieu à des poursuites pénales et aboutissent le cas échéant à des condamnations et si les victimes peuvent demander réparation et bénéficier de mesures de réadaptation. Pour ce qui est de la violence à l’égard des femmes et des fillettes en général, Mme Gaer convient que l’introduction dans le Code pénal, en mars 2002, de l’article 118 a) qui érige le viol conjugal en infraction pénale constitue une avancée décisive. Elle apprécierait de savoir si cette loi a déjà été appliquée par les tribunaux, et si des plaintes ont été déposées et des enquêtes ouvertes pour ce motif.

33.Parmi les problèmes le plus souvent portés à la connaissance des membres du Comité qui se sont rendus en 2002 dans l’État partie pour effectuer une mission au titre de l’article 20 figurait le fait que les plaintes mettant en cause des membres de la police et des personnels pénitentiaires donnaient rarement lieu à l’ouverture d’une enquête judiciaire. Des informations complémentaires ainsi que des statistiques sur la suite donnée aux plaintes de ce type, en particulier à celles émanant de membres de la communauté rom et de personnes vivant dans la région du Sandjak, seraient utiles.

34.Selon de nombreuses informations émanant d’ONG, les milliers de personnes qui ont été arrêtées dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de l’ancien Premier Ministre Zoran Djindjic n’auraient pas eu accès à un avocat et, pour certaines d’entre elles, n’auraient pas eu le droit de recevoir la visite de membres de leur famille pendant près de deux mois. Le Comité apprécierait d’obtenir des statistiques ainsi qu’un rapport détaillé et mis à jour sur les plaintes déposées au cours de cette période.

35.D’après des sources dignes de foi, il semblerait que les détenus n’ont pas toujours accès à un médecin pour faire constater des traumatismes, même s’ils en font la demande, que les rapports des médecins ne reflètent pas toujours la réalité et que ceux-ci ne sont pas inquiétés s’ils minimisent les lésions constatées. Le Comité souhaiterait avoir des informations complémentaires sur les procédures mises en place pour veiller à ce que les détenus qui en font la demande aient accès à un médecin et pour veiller à la véracité des rapports médicaux. Il serait utile de savoir si des poursuites sont engagées en cas de manquements à ces exigences, en particulier lorsqu’ils concernent des habitants de la région du Sandjak ou des Roms. Par ailleurs, d’après plusieurs sources, dont Human Rights Watch, depuis que le Kosovo a proclamé son indépendance, les Albanais de souche feraient l’objet d’actes d’intimidation, de menaces et d’autres types d’agressions et ne bénéficieraient d’aucune protection de la part de la police. Le Comité apprécierait que la délégation s’exprime à ce sujet.

36.Le Comité s’interroge en outre sur le rôle de la Cour suprême, qui annule manifestement de manière systématique les décisions prises en première instance dans les affaires relatives à des crimes de guerre de grande ampleur jugés en République de Serbie. Aussi des informations à jour sur la suite donnée aux actes perpétrés à Ovčara en relation avec le massacre de Vukovar seraient-elles les bienvenues.

37.Enfin, la délégation pourrait indiquer si l’État partie a suivi les recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs des droits de l’homme qui, à la suite de sa visite en République de Serbie, a invité les autorités à exprimer publiquement leur soutien aux défenseurs des droits de l’homme, lesquels seraient souvent dénoncés comme des traîtres, voire des ennemis de l’État.

38.Pour le PRÉSIDENT, il est très important que les États reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications présentées par ou pour le compte de particuliers relevant de leur juridiction qui prétendent être victimes d’une violation des dispositions de la Convention et que ce mécanisme de plainte n’est efficace que si les États donnent suite aux constatations du Comité. Or tel n’a pas été le cas dans les affaires impliquant la République de Serbie dont a été saisi le Comité (Hajrizi Dzemajl et al. c. Serbie ‑ et ‑ Monténégro, Dimitrov c. Serbie ‑ et ‑ Monténégro, Nikolic c. Serbie ‑ et ‑ Monténégro, Dimitrijevic c. Serbie ‑ et ‑ Monténégro). Il serait donc utile de savoir quels mécanismes juridiques ont été mis en place par l’État partie pour s’acquitter des obligations qu’il a librement consenties en faisant les déclarations prévues aux articles 21 et 22 de la Convention.

39.Il serait important de savoir combien de temps peut s’écouler entre le moment où une personne interpelée par la police est conduite au commissariat et celui où elle a le droit d’accéder à un avocat, et si le Code de procédure pénale autorise les personnes placées en détention à se faire assister par un avocat et à avertir leurs proches. Le Président fait notamment référence au rapport d’une ONG où est exposé le cas de Zoran Katič qui, bien que détenu pendant six jours pour une infraction au code de la route, n’a pas eu le droit de prévenir sa famille pendant toute la durée de sa détention.

40.La possibilité existant en République de Serbie de restreindre certains droits fondamentaux pendant l’état d’urgence a déjà été évoquée; il y a lieu de rappeler que certains droits et principes de droit international ne sont pas susceptibles de dérogation, comme l’interdiction de la torture. Il serait donc important de savoir quelles dispositions législatives consacrent le principe qui veut que certains droits ne souffrent aucune dérogation.

41.Le Président aimerait savoir quelle a été l’issue de l’affaire Milan Petrovič, décédé dans des circonstances suspectes dans la prison de Požarevac le 17 juillet 2006. Il souhaiterait également savoir quand la Cour suprême entend se prononcer dans l’affaire Antun Silađev, en souffrance depuis 2004, dans laquelle la défense invoque la prescription des faits. Il rappelle à cet égard que l’affaire porte sur un acte de torture, par définition imprescriptible. Il demande en outre si des mesures ont été prises dans les prisons pour femmes pour que les détenues enceintes et les jeunes accouchées soient prises en charge de manière adéquate, et de façon générale, si ces établissements emploient des personnels pénitentiaires de sexe féminin. Enfin, il serait utile que la délégation serbe fournisse au Comité des statistiques sur les sans‑papiers présents sur le territoire de la République de Serbie, ainsi que sur les demandeurs d’asile ne disposant pas de documents d’identité, ou sur ceux qui ont été expulsés pour ce motif.

42.Rappelant qu’aux termes de l’article 2 de la Convention, l’ordre d’un supérieur ou d’une autorité publique ne peut être invoqué pour justifier la torture, le Président précise qu’une manière de s’assurer que cette disposition sera bien appliquée consiste à mettre en place des programmes de formation reposant sur des cas concrets, afin que les soldats de rang inférieur prennent conscience qu’il y a des ordres qu’ils ne sont pas tenus d’exécuter.

43.Dans l’affaire Cvetković c. Serbi e, la Cour européenne des droits de l’homme a rendu un arrêt en date du 10 juin 2008 dans lequel elle a conclu que la République de Serbie avait violé l’article 6 de la Convention en détenant l’intéressé pour une période supérieure au délai nécessaire à l’engagement de poursuites pénales. Il serait intéressant de savoir quelles mesures l’État partie a prises pour donner effet à cette décision de la Cour. Par ailleurs, il y a lieu de se féliciter de ce que dans une affaire datant de 2003, relative au passage à tabac par des membres des forces de l’ordre d’une femme participant à une manifestation, le tribunal de Belgrade a ordonné que l’État partie indemnise la victime pour les séquelles qu’elle en garde: cette décision marque un important progrès dans le fonctionnement de la justice. Il serait d’ailleurs utile de savoir si en vertu de la législation serbe, l’État est tenu pour responsable des dommages causés par l’un de ses agents, et plus précisément qui, de l’État ou du fonctionnaire à l’origine du dommage, est considéré comme responsable au premier chef. Enfin, le Président voudrait savoir si l’État partie a pris des mesures pour remettre aux normes l’installation électrique de l’établissement de soins psychiatriques de Curug, dont la vétusté préoccupait le Directeur de l’établissement et où un incendie se révélerait particulièrement grave vu que la plupart des résidents sont incapables de se déplacer par eux-mêmes.

L a première partie (publique) de la séance prend fin à 12 h 15.

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