Nations Unies

CCPR/C/IND/4

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

31 mai 2022

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l ’ homme

Quatrième rapport périodique soumis par l’Inde en application de l’article 40 du Pacte, selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2020 * , **

[Date de réception : 22 septembre 2021]

A.Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre du Pacte

Liste de points établie avant la soumission du rapport périodique (CCPR/C/IND/QPR/4)

1.Les questions mentionnées dans les précédentes observations finales du Comité sont traitées dans les présentes réponses à la liste des points établie avant la soumission du rapport périodique.

Réponse au paragraphe 2 de la liste de points

2.L’Inde a accompli des progrès considérables à cet égard depuis l’adoption des précédentes observations finales, en développant et en étoffant son cadre juridique et institutionnel de la promotion et de la protection des droits de l’homme. Ces éléments nouveaux, parmi lesquels des amendements constitutionnels, l’adoption de nouvelles lois, des modifications de lois existantes et des progrès résultant de la jurisprudence, sont soulignés aux endroits appropriés des réponses à la liste de points.

3.Le cadre institutionnel est constitué d’institutions à vocation générale ou orientées vers des groupes précis dont le rôle est d’observer, de promouvoir et de faciliter la réalisation des divers droits de la population. Relèvent de la première catégorie des organes officiels comme la Commission nationale des droits de l’homme, la Commission centrale de l’information, la Commission centrale de vigilance, le Lokpal de l’Inde (Défenseur du peuple) au niveau national et les Lokayuktas (Commissaires du peuple) au niveau des États. Dans la seconde catégorie, on trouve la Commission nationale de la femme, la Commission nationale des minorités, la Commission nationale de la protection des droits de l’enfant, le Bureau du Commissaire principal pour les personnes handicapées et des organes constitutionnels comme la Commission nationale des castes répertoriées, la Commission nationale des tribus répertoriées et la Commission nationale des classes arriérées (NCBC), etc. (pour des renseignements détaillés, voir annexe 3).

B.Renseignements concernant spécifiquement la mise en œuvre des articles 1er à 27 du Pacte, y compris au regard des précédentes recommandations du Comité

Cadre constitutionnel et juridique de la mise en œuvre du Pacte (art. 2)

Réponse au paragraphe 3 de la liste de points

4.Le Pacte a été largement incorporé dans le droit interne de l’Inde. L’incorporation a porté sur l’ensemble des divers aspects du Pacte, quant à son fond, à ses grandes notions et à la philosophie qui le sous-tend. Premièrement, les tribunaux indiens ont fait fond sur les normes internationales pour donner effet à des garanties que la Constitution indienne, dans son esprit, consacre déjà implicitement, ce qui a permis la reconnaissance expresse de droits spécifiques. Deuxièmement, la compréhension large et progressiste que reçoivent dans le Pacte des notions comme l’égalité et la liberté trouve son pendant dans le cadre juridique indien (voir détails aux annexes 1 et 2). La Cour suprême de l’Inde, dans l’affaire Navtej Singh Johar v. Union of India, s’est appuyée sur l’observation générale no 16 relative à l’article 17 du Pacte pour considérer que le droit à la vie privée fait partie intégrante du droit à la vie consacré par la Constitution du pays. Troisièmement, la philosophie fondamentale du Pacte, qui reconnaît des droits inhérents et inaliénables, s’est diffusée profondément dans le système juridique national, que ce soit par renvoi exprès au Pacte ou d’autres moyens (voir annexe 2). Le pouvoir législatif s’est employé activement à donner effet aux obligations internationales en adoptant les lois en Inde et a été une force motrice majeure dans l’adoption de bon nombre de nouvelles lois et de modifications de textes existants (voir annexe 1). Le pouvoir judiciaire a aussi fait fond sur ces obligations pour donner une interprétation progressiste de lois existantes. Les tribunaux n’ont pas seulement invoqué les dispositions du Pacte mais se sont aussi référés au commentaire des droits figurant dans les observations générales ainsi qu’à la jurisprudence développée par le Comité des droits de l’homme dans ses avis concernant les plaintes dont il est saisi.

5.La Commission nationale des droits de l’homme a organisé des formations pour les juges, les policiers, les responsables d’établissements pénitentiaires, d’autres fonctionnaires ainsi que les membres de la société civile. De même, le Conseil national de la femme mène des programmes de sensibilisation aux questions de genre pour les fonctionnaires de la police, de l’administration et de la justice. Des programmes de sensibilisation et de renforcement des capacités à l’intention des fonctionnaires des États et des districts concernant les lois et les règlements réprimant les atrocités contre les castes et les tribus répertoriées sont menés par les commissions nationales compétentes. Les écoles de la magistrature à l’échelon national et au niveau des États forment les juges et les procureurs en ce qui concerne les diverses catégories de droits et le cadre normatif y afférent.

6.Si la Constitution indienne, par son article 51, invite à respecter le droit international et les obligations conventionnelles, les instruments internationaux, en Inde, ne sont pas d’application directe et doivent être incorporés spécifiquement dans la loi pour que les tribunaux nationaux puissent les appliquer. Cependant, dans l’affaire Vishaka v. State of Rajasthan, la Cour suprême de l’Inde a dit, dans un arrêt qui a fait date, que toute convention internationale qui n’est pas incompatible avec les droits fondamentaux et qui est conforme à leur esprit doit être interprétée dans un sens large afin de promouvoir l’objet de la garantie constitutionnelle correspondante. Dès lors, sous réserve de compatibilité avec les principes normatifs nationaux, les normes internationales sont désormais applicables par les tribunaux nationaux même en l’absence d’un acte spécifique d’incorporation dans la loi.

7.La Constitution indienne prévoit un accès direct à la Cour suprême et aux Hautes Cours pour la réparation des atteintes à tout droit fondamental, par tout individu ou groupe d’individus. En outre, le pays dispose de plusieurs mécanismes officiels pour examiner ces violations, dont la CNDH et les commissions des droits de l’homme des États. Comme il existe des recours efficaces pour traiter les atteintes aux droits individuels ou collectifs, l’Inde n’estime pas nécessaire, à ce stade, d’adhérer au Protocole facultatif.

Réponse au paragraphe 4 de la liste de points

8.Il n’est pas proposé, à ce stade, de revoir les réserves et déclarations faites par l’Inde au moment de son adhésion au Pacte.

Réponse au paragraphe 5 de la liste de points

9.L’Inde a établi un cadre d’institutions spécialisées mais intégrées pour la protection et la promotion des droits de l’homme eu égard à sa diversité démographique (voir annexe 3). La CNDH, créée en 1993, a été encore renforcée et rendue plus compatible avec les Principes de Paris par la loi de 2019 portant modification de la loi sur la protection des droits de l’homme, qui vise à assurer à la Commission une autonomie et une indépendance accrues. Le nombre de membres principaux a été porté de cinq à six, soit trois magistrats en exercice ou retraités et trois autres membres désignés parmi des personnes ayant une formation et une expérience pratique dans le domaine des droits de l’homme, dont une doit être une femme. D’autre part, les présidents des organes auxquels la Constitution ou une autre loi donne compétence pour protéger et promouvoir les droits des groupes vulnérables, dont les commissions nationales des castes répertoriées, des tribus répertoriées, des classes arriérées, de la protection des droits de l’enfant, etc. sont membres d’office de la CNDH. Les membres sont nommés par le Président de l’Inde sur recommandation d’un comité de sélection, organe pluraliste constitué de représentants élus du peuple et des partis politiques de la majorité et de l’opposition. La loi de 2006 portant modification de la loi sur la protection des droits de l’homme a élargi les moyens de réparation que la CNDH peut recommander aux autorités publiques au versement d’une indemnisation ou de dommages-intérêts au plaignant ou à la victime ou aux membres de leur famille ainsi qu’à toute mesure complémentaire qu’elles jugent appropriée. La loi a aussi supprimé l’obligation d’informer les autorités publiques au préalable des visites de la commission dans tout établissement pénitentiaire ou autre sous leur responsabilité. La Commission est ainsi en mesure de découvrir en toute indépendance la situation de fait qui existe dans les établissements pénitentiaires et de garantir la protection des droits de l’homme des détenus.

10.Les raisons fondamentales pour lesquelles une procédure spéciale a été inscrite dans la loi de 1993 sur la protection des droits de l’homme concernant les forces armées sont de deux ordres. En premier lieu, les forces armées sont affectées à des missions de sécurité intérieure de longue durée uniquement dans les zones touchées par des troubles insurrectionnels ou le terrorisme, où le contexte sécuritaire est complexe. En deuxième lieu, les forces armées ont leurs propres lois où des procédures claires sont définies pour juger les auteurs d’infractions. Ces procédures sont, à bien des égards, aussi efficaces que les procédures civiles. En outre, la Commission est habilitée à demander à l’État central de faire rapport sur les violations des droits de l’homme imputées aux forces armées et, après réception du rapport, à adresser des recommandations à l’État. L’État est tenu de soumettre à la Commission un rapport sur la suite donnée aux recommandations dans un délai de trois mois ou dans le délai plus long qu’elle aura fixé.

11.Un bureau spécial des droits de l’homme a été créé sous l’autorité administrative du vice-chef d’état-major des armées, deuxième plus haut gradé des forces armées indiennes, en août 2019. Ce bureau, dirigé par un officier qui a le rang de général de division, est le point nodal pour l’examen des plaintes faisant état de violations des droits de l’homme. Un officier supérieur de la police est aussi détaché auprès de ce service pour accroître la transparence et faire en sorte que le bureau dispose des meilleures compétences d’enquête. Enfin, un délai de prescription d’un an a été prévu pour les enquêtes relatives à des violations passées des droits de l’homme en raison des difficultés insurmontables que la Commission risque de rencontrer pour mener en bonne et due forme des enquêtes justes au-delà d’une longue période.

Lutte contre la corruption (art. 2 et 25)

Réponse au paragraphe 6 de la liste de points

12.L’Inde adhère à une politique de tolérance zéro vis-à-vis de la corruption et est déterminée à mettre fin à ce problème. La loi de 1988 sur la prévention de la corruption, y compris ses modifications de 2018, a pour objet d’assurer une prévention efficace des diverses formes de corruption. De conception intégrée, elle vise à garantir la conformité du droit indien à la Convention des Nations Unies contre la corruption. Tous les aspects de la corruption sont couverts, y compris la corruption passive et le fait de solliciter ou d’accepter un pot-de-vin par le truchement d’intermédiaires. En outre, les dispositions sur les cas de faute grave pénale ont été redéfinies pour couvrir deux types d’infractions, à savoir l’appropriation frauduleuse de biens et l’enrichissement illicite. La loi de 2002 sur la prévention du blanchiment d’argent reprend les infractions visées dans la loi sur la prévention de la corruption en définissant celles-ci comme un préalable de l’infraction de blanchiment d’argent. Ce texte donne compétence à un organisme spécifique pour enquêter sur les infractions à la loi sur la prévention du blanchiment d’argent, ordonner des procédures de saisie de biens et engager des poursuites devant des juridictions spéciales en cas d’infraction à la loi. La loi de 2014 sur la protection des lanceurs d’alerte est un autre texte important qui institue un mécanisme chargé de recevoir les plaintes ayant pour objet la divulgation d’informations en rapport avec toute allégation de corruption ou d’actes intentionnels liés à un abus de pouvoir ou à l’exercice abusif d’un pouvoir discrétionnaire de la part d’un fonctionnaire, et de protéger les personnes qui signalent des faits de corruption des représailles qu’elles pourraient subir de la part de leurs auteurs.

13.Parmi les autres initiatives du législateur, on mentionnera la loi de 2013 relative au Lokpal et aux Lokayuktas, qui crée des institutions chargées d’enquêter sur les allégations de corruption mettant en cause des fonctionnaires et des responsables publics. La loi de 1988 portant interdiction des transactions sous prête-nom (benami), telle que modifiée en 2016, punit toute personne qui détourne des fonds en s’appropriant au nom d’un tiers des biens qu’elle entend utiliser pour son propre compte.

14.Les tribunaux indiens ont estimé à maintes reprises que le droit de savoir et d’être informé fait partie intégrante de la liberté de parole et d’expression, particulièrement dans le contexte du bon fonctionnement d’institutions démocratiques. Dans l’affaire People Union for Civil Liberties v. Union of India, la Cour suprême a fait observer que le droit à l’information relève de la liberté de parole et d’expression,consacrée à l’article 191)a) de la Constitution indienne, et constitue donc irréfutablement un droit fondamental. Le droit fondamental de savoir a été reconnu formellement par la loi sur le droit à l’information, qui a créé un système efficacepour l’accès des citoyens à l’information détenue par les autorités publiques, afin de promouvoir la transparence et la responsabilité à tous les niveaux de l’administration publique.

15.En outre, le Gouvernement a pris plusieurs mesures pour lutter contre la corruption, parmi lesquelles : i) des améliorations et des réformes systémiques pour assurer aux citoyens des services transparents et conviviaux, comme le versement direct aux bénéficiaires des prestations sociales au titre de divers programmes publics, la mise en place de l’adjudication électronique des marchés publics, la mise en place de l’administration en ligne, la simplification des procédures, et la création d’une plateforme électronique des marchés publics ; ii) l’abolition des entretiens de recrutement pour les postes du groupe « B » et du groupe « C » de la fonction publique ; iii) la loi de 2018 portant modification de la loi de 1988 sur la prévention de la corruption, pour incriminer le fait de donner un pot-de-vin, en vue de lutter contre la grande corruption, en instaurant la responsabilité du fait d’autrui pour les cadres dirigeants des entreprises ; et iv) la mise en place de l’institution du Lokpal, qui peut recevoir et traiter directement les plaintes visant des fonctionnaires conformément à la loi sur la prévention de la corruption.

16.La création en 2003 de la Commission centrale de vigilance fait partie des mesures qui ont été prises sur le plan institutionnel. La Commission formule des stratégies pour lutter contre la corruption, y compris des mesures préventives de vigilance qui consistent à repérer les domaines exposés à un risque de corruption et à remédier ensuite à ces vulnérabilités par des mécanismes appropriés. Ces mesures se répartissent dans les grandes catégories suivantes : simplification et normalisation des règles, utilisation de la technologie et de l’automatisation, reconfiguration des processus, transparence, responsabilité, détection précoce des fautes, application dans les délais utiles de sanctions efficaces, formation et sensibilisation, création d’un milieu de travail favorable, inculcation de comportements conformes à l’éthique, mise en place d’un mécanisme pour les lanceurs d’alerte, etc. Des données comparatives à partir de 2016 montrent une diminution de l’incidence de la corruption et de la quantité totale des peines infligées. De même, le Bureau de la répression des fraudes graves, créé en 2003, a pour mission de lutter contre la criminalité et la fraude en col blanc. Les enquêtes sur ce type d’infractions ont les caractéristiques suivantes : elles concernent une question importante d’intérêt général ; l’enquête est susceptible d’aboutir ou de contribuer à une amélioration manifeste du système ; ou l’enquête peut avoir des ramifications interministérielles et interdisciplinaires.

17.Le pouvoir judiciaire est un organe indépendant de l’État, doté d’un mécanisme indépendant de nomination et de révocation des juges des cours constitutionnelles. La loi sur la prévention de la corruption s’applique également aux juges de toute juridiction, d’après l’arrêt de principe rendu dans l’affaire K. Veeraswami v. Union of India. Un mécanisme supplémentaire qui permet de lutter contre la corruption au niveau des juridictions inférieures est celui qui découle de l’article 235 de la Constitution indienne, qui confère aux juridictions supérieures un pouvoir de contrôle sur les juridictions inférieures. En outre, l’article 56 j) des Règles fondamentales constitue un moyen possible de lutte contre la corruption en ce qu’il reconnaît à l’autorité compétente le droit absolu de révoquer un fonctionnaire si elle estime qu’une telle mesure est dans l’intérêt général. Afin de lutter activement contre la corruption au niveau des juridictions supérieures, la Cour suprême a décidé en 1997 que chaque juge devait déclarer l’ensemble de son patrimoine immobilier ou financier dans un délai raisonnable après son entrée en fonctions. La même année, elle a adopté à l’unanimité un code de conduite réaffirmant les valeurs de la profession judiciaire où il est indiqué que les juges doivent avoir un comportement honnête. Une procédure interne permet de prendre des mesures correctives appropriées à l’égard des juges qui ne respectent pas les valeurs universellement admises de leur profession. En 2018, dans le souci d’améliorer encore la transparence des procédures judiciaires, la Cour suprême de l’Inde a autorisé la diffusion en direct des débats pour certaines affaires. Des travaux sont en cours afin de rendre cette mesure pleinement opérationnelle. Les écoles de la magistrature du pays organisent régulièrement des ateliers où une formation est dispensée sur la lutte contre la corruption.

Non-discrimination (art. 2 et 26)

Réponse au paragraphe 7 de la liste de points

Réponse au paragraphe 7 a)

18.Les mécanismes de lutte contre la corruption prévus par la Constitution indienne évoluent avec un certain dynamisme depuis plusieurs années grâce à un solide travail législatif et à une interprétation vivante de la Constitution par la Cour suprême. Les articles 14 à 18 de la Constitution définissent une structure reposant sur les principes complémentaires de la non-discrimination et de l’égalité fondamentale. La garantie de l’égalité devant la loi et le droit à l’égale protection de la loi, prévus à l’article 14 de la Constitution, interdisent toute discrimination fondée sur un motif arbitraire, comme l’identité, le statut, l’opinion ou l’orientation d’une personne. L’article 15 interdit toute discrimination fondée sur la religion, la race, la caste, le sexe ou le lieu de naissance. Les articles 15 3), 15 4), 15 5), 15 6) et 16 4), 16 4-A), 16 4-B) et 16 6) permettent de recourir à l’action positive afin de réaliser l’égalité. L’article 17 n’abolit pas seulement l’intouchabilité mais en réprime la pratique. La non-discrimination et l’égalité auxquelles chacun a droit, indépendamment de son identité religieuse ou autre, sont aussi renforcées par la reconnaissance expresse de la liberté de religion et par la protection spécifique des intérêts des minorités linguistiques et culturelles conformément aux articles 25, 29 et 30 de la Constitution.Le cadre juridique interdit la discrimination horizontale et la discrimination verticale. Le cadre normatif général défini par les articles 2 et 26 du Pacte est repris de toute évidence par le cadre juridique applicable en Inde, comme il ressort de l’arrêt de la Cour suprême dans l’affaire Jeeja Ghosh v. Union of India. Dans cette affaire, la Cour a estimé que l’égalité suppose l’acceptation des notions de droit positif, d’action positive et d’aménagement raisonnable.

19.Le cadre juridique de la lutte contre la discrimination en Inde ne prend pas en compte et ne vise pas seulement les formes directes de la discrimination mais aussi ses formes indirectes et croisées, qu’elles s’exercent sur un plan horizontal ou vertical. Ainsi, l’article 3 1) w) de la loi de 1989 sur les castes et tribus répertoriées (prévention des atrocités) érige en infraction le fait d’attenter à la pudeur d’une femme issue d’un de ces groupes protégés, en complément de la disposition générale prévue sur le sujet dans le Code pénal indien de 1860. Dans l’affaire Vidyadharan v. State of Kerala, la Cour suprême a reconnu que c’est l’identité de caste de la femme victime qui différencie cette infraction des voies de fait (en vue de commettre un attentat à la pudeur) visées à l’article 354 du Code pénal indien. Adoptant le point de vue de la discrimination croisée, la Cour suprême a estimé que l’agression est vécue différemment dans le cas d’une femme issue d’un groupe répertorié comme caste et souffrant d’un handicap, car l’agression est alors le résultat de l’imbrication de plusieurs rapports de force qui entrent en jeu. Dans l’affaire Navtej Singh Johar v. Union of India, la Cour a estimé que l’article 15 reconnaît que la discrimination opère en réalité à l’intersection d’identités et de caractéristiques diverses. Elle a aussi confirmé que la discrimination fondée sur le sexe, qu’elle soit directe ou indirecte, est interdite par l’article 15. L’observation de la Cour selon laquelle l’interdiction de la discrimination prévue à l’article 15 ne doit pas être appréciée à l’aune des objectifs que l’État s’était donnés en la décidant, mais de l’effet que cette disposition produit pour les individus concernés et leurs droits fondamentaux, saisit l’essence de la discrimination indirecte ; la Cour a confirmé récemment sa position dans l’affaire Lt. Col. Nitisha v. Union of India.

Réponse au paragraphe 7 b)

20.La Constitution indienne reconnaît un ensemble exceptionnellement vaste de droits individuels aux citoyens, ainsi que, dans certains cas, aux non-citoyens, tout en conférant de larges pouvoirs aux Hautes Cours et à la Cour suprême. Cette dernière, à laquelle il est possible d’adresser directement une requête, est investie de la compétence première pour ce qui est de veiller au respect de chacun des droits fondamentaux. Le système solide ainsi établi prévoit qu’un juge unique de la Haute Cour statue sur le respect des droits, avec possibilité d’un recours interne devant une formation de deux juges de la Haute Cour, et d’un recours supplémentaire par autorisation spéciale devant la Cour suprême, de sorte que même si la justice n’est pas rendue à un échelon donné, la situation peut être rectifiée en appel ou devant la Cour suprême. L’objectif recherché est de disposer d’une justice indépendante permettant de remédier à toute violation des droits de l’homme qui serait commise par des agents de l’État où que ce soit dans le pays. Parallèlement, l’Autorité nationale des services juridiques et ses homologues dans chaque État offrent des services gratuits aux justiciables qui en ont besoin.

21.Les garanties constitutionnelles de non-discrimination et d’égalité sont encore renforcées par les obligations juridiques internationales acceptées par l’Inde ainsi que le cadre juridique établi dans divers domaines pour la réalisation de ces principes par le droit et la jurisprudence. Les organes de l’administration sont eux aussi tenus aux principes de non‑discrimination, d’égalité et de justice naturelle dans leurs actes et leurs décisions. En l’absence d’interdiction ou de recours spécifique dans une loi, les pouvoirs reconnus aux tribunaux en vertu des articles 32 et 226 peuvent être invoqués.

Réponse au paragraphe 8 de la liste de points

22.L’Inde est résolue à garantir tous les droits reconnus dans le Pacte, sur un pied d’égalité, pour tous les secteurs de la société, en particulier le droit à la vie, à la liberté et à la dignité. Les mesures prises pour lutter contre la violence à l’égard des groupes les plus faibles au sein de la société, dont les castes et les tribus répertoriées, ont consisté à rendre la loi stricte et efficace, à sensibiliser les personnes chargées de son application sur ces questions et à éduquer la population pour instaurer une culture du respect mutuel et de la dignité.

Réponse au paragraphe 8 a)

23.Pour lutter contre les infractions visant des membres des castes et des tribus répertoriées et mieux protéger les droits de ces personnes, des changements importants ont été adoptés dans le cadre de la loi de 2015 portant modification de la loi de 1989 sur les castes et tribus répertoriées (Prévention des atrocités), qui a inscrit plusieurs nouvelles infractions dans la loi, ce qui a sensiblement renforcé ce texte. Les obligations imposées aux fonctionnaires par la loi ont été définies de façon plus claire et détaillée. D’après la loi de 2015, le fait d’avoir eu connaissance de l’identité de caste ou tribale de la victime constitue une circonstance aggravante pour le prévenu ou l’accusé si celui-ci connaissait personnellement la victime ou sa famille, ce qui renforce la responsabilité concernant les infractions visées par la loi. Un chapitre IV-A a aussi été inséré dans la loi aux fins de reconnaître les droits des victimes et des témoins. Dans l’affaire National Campaign on Dalit Human Rights v. Union of India, la Cour suprême a invité les gouvernements des États et le gouvernement central à « faire respecter strictement les dispositions de la loi » et a chargé l’Autorité nationale des services juridiques d’établir un programme de sensibilisation et d’assurer une aide judiciaire gratuite aux membres des castes et des tribus répertoriées.

Réponse au paragraphe 8 b)

24.La loi modificative de 2015 prévoit la mise en place de tribunaux spéciaux exclusifs par les autorités de l’État pour permettre le jugement rapide des infractions. L’enquête doit être achevée et l’acte d’accusation être déposé au tribunal dans un délai de soixante jours. Des instructions du Ministère de l’intérieur recommandent d’établir des programmes de formation bien structurés pour sensibiliser et conscientiser le personnel de la police et d’inclure de tels programmes dans le cursus des divers centres de formation et écoles de la police. Des zones supplémentaires devaient être désignées comme étant à risque d’atrocités afin que des mesures préventives soient prises pour protéger la vie et les biens des membres des castes et tribus répertoriées.

Réponse au paragraphe 8 c)

25.Pour mettre fin à la pratique de l’enlèvement manuel des excréments et assurer la réinsertion des vidangeurs, la loi de 2013 sur l’interdiction d’employer des personnes à l’enlèvement manuel des excréments et la réinsertion des vidangeurs manuels, remplaçant la loi de 1993 portant interdiction de l’emploi de personnes à l’enlèvement manuel des excréments et de la construction de latrines sèches, a été adoptée. La loi interdit expressément de recruter ou d’employer directement ou indirectement quelque personne que ce soit à des activités dangereuses de nettoyage d’égouts ou de fosse septiques. Elle établit une structure institutionnelle pour l’identification des vidangeurs manuels dans les campagnes et les villes. Elle prévoit aussi la création de comités de vigilance et de suivi à l’échelon central et au niveau des États pour guider et superviser l’application générale de la loi, y compris en matière de réinsertion des vidangeurs manuels. Partant du constat que la pratique inhumaine de l’enlèvement manuel des excréments doit principalement son existence à la persistance des latrines insalubres, la nouvelle loi charge les autorités locales de veiller à ce qu’il soit mis fin aux latrines insalubres.

26.La Société nationale de financement et de développement des safai karamcharis organise des ateliers de sensibilisation dans les municipalités pour les ingénieurs, les agents d’assainissement et les entrepreneurs sur le nettoyage sûr des égouts et des fosses septiques. Le Ministère du logement et des affaires urbaines a publié des directives générales sur le nettoyage des égouts et des fosses septiques en 2018. Au total, 62 904 vidangeurs manuels ont été recensés entre le 6 décembre 2013 et le 31 janvier 2020. Pour faire en sorte que plus aucune latrine insalubre ne subsiste dans le pays, dans le cadre de la campagne pour une Inde propre (« Swachh Bharat Mission »), 107 105 000 toilettes hygiéniques individuelles ont été installées dans les zones rurales, et 6 257 000 dans les zones urbaines, à l’état neuf ou en convertissant des latrines insalubres. Le Ministère de la justice sociale et de l’autonomisation a lancé en 2020 l’application mobile « Swachhata Abhiyan » qui permet à toute personne de télécharger des informations, y compris des photos, concernant des latrines insalubres et des vidangeurs éventuellement employés à leur nettoyage manuel. Un plan d’action national est formulé actuellement par le Ministère du logement et des affaires urbaines en consultation avec le Département de l’eau potable et de l’assainissement du Ministère des ressources en eau en vue de mettre fin au nettoyage manuel des égouts et des fosses septiques et d’assurer la réinsertion des vidangeurs.

27.En ce qui concerne le paragraphe 3 de l’ordonnance de 1950 sur les castes répertoriées adoptée en vertu de la Constitution, celui-ci a été révisé en 1990. Aucune autre révision n’a été adoptée par la suite. Le fait que l’applicabilité de l’ordonnance soit limitée aux seuls hindous, sikhs et bouddhistes a été contesté devant la Cour suprême sur la base des principes de l’égalité, de la liberté religieuse et de la non-discrimination ; l’affaire est actuellement en instance.

Réponse au paragraphe 9 de la liste de points

Réponse au paragraphe 9 a) et b)

28.L’Inde a renforcé son cadre juridique afin de lutter contre la discrimination à l’égard des lesbiennes, des gays, des bisexuels, des transgenres et des intersexués (LGBTI). La Cour suprême, par sa décision dans l’affaire Navtej Singh Johar v. Union of India, a dépénalisé l’homosexualité entre adultes consentants dans le cadre privé, éliminant ainsi la restriction déraisonnable qui était imposée à la liberté de choix et d’expression de la communauté LGBTI. Cette décision a aussi créé un cadre favorable pour l’accès à la justice des LGBTI, conformément au Pacte.

29.En outre, le Parlement a adopté la loi de 2019 sur la protection des droits des transgenres, qui interdit systématiquement la discrimination à l’égard des transgenres dans tous les domaines de l’existence et fait obligation à l’État de garantir leur inclusion dans la société en leur assurant l’accès à la sécurité sociale, à l’éducation et à la santé. Cette loi, complétée par le règlement de 2020 sur la protection des droits des transgenres, consacre le droit à l’identité sexuelle telle que perçue par la personne elle-même et prescrit la délivrance du certificat d’identité sur la seule base d’une déclaration sous serment présentée par la personne « à l’exclusion de tout examen médical ». Pour permettre aux transgenres de faire une demande de certificat et de carte d’identité en ligne, le portail national mis en service en novembre 2020 pour ces personnes propose un service complet à cette fin. La loi réprime la violence et les mauvais traitements à l’égard des transgenres, et le fait de leur interdire l’accès à des lieux publics, de les expulser de leur domicile ou de les soumettre au travail forcé. Les infractions sont punies de six mois à deux ans d’emprisonnement et d’une amende. Les peines prescrites par la loi s’ajoutent à celles prévues par toute autre loi et n’y substituent pas.

30.Le Gouvernement indien réfléchit actuellement à un programme-cadre destiné à remédier aux problèmes rencontrés par la communauté transgenre en matière d’accès à la santé, à l’éducation, à la protection sociale, à la formation continue, au logement, à l’aide économique et aux moyens d’existence. Le premier foyer d’accueil destiné à ces personnes, Garima Greh, qui offre un hébergement, des repas, des soins médicaux, des installations de loisirs et une aide au renforcement des capacités et à l’acquisition de compétences, a été inauguré en novembre 2020. Dix villes ont été désignées en vue de créer 13 de ces foyers d’accueil. En outre, le Ministère de la justice sociale et de l’autonomisation a alloué des fonds à la Société nationale de financement et de développement des classes arriérées pour l’organisation d’activités de formation destinées à la communauté transgenre.Plusieurs États indiens ont adopté des initiatives visant à développer et améliorer la qualité de vie des transgenres, dont l’État d’Odisha, qui a lancé un programme-cadre nommé Sweekruti visant à créer un cadre propice à l’égalité des chances, à l’équité, à la justice sociale et à l’autonomisation des transgenres, et à instaurer des quotas en leur faveur dans les établissements d’enseignement et pour les emplois publics. La politique de la science, de la technologie et de l’innovation 2020 vise à promouvoir la participation de la communauté LGBTQ+ à l’ensemble du débat relatif à l’équité entre les sexes ainsi qu’à promouvoir leur représentation dans la science, la technologie et l’innovation.

Égalité entre hommes et femmes (art. 2, 3 et 25)

Réponse au paragraphe 10 de la liste de points

Réponse au paragraphe 10 a)

31.L’Inde a adopté une stratégie en plusieurs volets afin d’éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes profondément ancrés qui perpétuent la discrimination à l’égard des femmes. Les mesures adoptées pour faire évoluer les mentalités vont du domaine du droit à celui de l’éducation et de la formation, outre les mesures volontaristes consistant dans des pratiques administratives, des mécanismes et des programmes visant à remédier à certains obstacles précis à l’égalité entre les sexes et à créer des conditions favorables à l’exercice des droits protégés par le Pacte.

32.En 2013, le Code pénal indien a été modifié pour ériger en infraction diverses formes de violence sexiste. Les lois spéciales relatives à la violence domestique, au harcèlement sexuel des femmes sur le lieu de travail, au mariage d’enfants et à la conception et à l’avortement sélectifs en fonction du sexe du fœtus qui ont été adoptées ou modifiées depuis l’an 2000 ont incontestablement renforcé l’égalité entre les sexes comme principe organisateur du droit lui-même.

33.Les politiques de l’éducation successives ont permis de nets progrès dans l’atténuation des disparités entre les sexes et la sensibilisation à ces questions. Le programme d’enseignement national établi en 2005 par le Conseil national pour la recherche et la formation pédagogiques a apporté une riche contribution en indiquant comment un changement épistémique, pédagogique et linguistique pouvait être opéré en ce sens. Dans le prolongement de cette stratégie, la politique de l’éducation nationale de 2020 a fait de la sensibilisation aux questions de parité une composante à part entière de l’enseignement à tous les niveaux. Au-delà même de l’éducation formelle, des programmes de sensibilisation à l’égalité entre hommes et femmes sont organisés régulièrement à l’intention des fonctionnaires de la police et de la justice afin qu’ils intègrent pleinement cet état d’esprit dans leur culture professionnelle. Dans l’affaire Aparna Bhat v. State of Madhya Pradesh, la Cour suprême a réaffirmé la nécessité de sensibiliser les juges, les procureurs et les conseillers permanents aux questions d’égalité entre hommes et femmes et donné des consignes à propos de cours de base obligatoires pour les juges sur ces questions, et de l’inscription de celles-ci aux programmes du premier cycle des facultés de droit et au programme des examens du barreau et de la magistrature.

34.Concernant les mesures d’action positive visant à promouvoir l’égalité entre hommes et femmes, la loi nationale Mahatma Gandhi de 2005 relative à la garantie de l’emploi en milieu rural prévoit qu’un tiers des bénéficiaires du programme doivent être des femmes ; le Code de la sécurité sociale de 2020 prévoit le passage de la durée du congé de maternité rémunéré de douze à vingt-six semaines ainsi que la mise en place de services de crèche par tout établissement de plus de 50 salariés. Tandis que le taux de participation minimum des femmes inscrit dans la loi était de 33 %, ce taux a atteint 54,56 % et 56,87 % en 2018-2019 et en 2019-2020. Les règles relatives aux passeports et au numéro de compte permanent ont été modifiées afin que le demandeur puisse communiquer le nom d’un seul parent et non des deux, ce qui permet aux enfants de mères célibataires d’obtenir ces documents. La budgétisation tenant compte de la problématique hommes-femmes a été adoptée par l’Inde en 2005 afin d’intégrer les considérations d’égalité dans l’ensemble des politiques et des programmes publics.

35.L’Inde a renforcé son action pour l’autonomisation des femmes en engageant ou rendant plus efficaces divers autres programmes. Pradhan Mantri Kaushal Vikas Yojana, programme d’amélioration des compétences de courte durée, lancé en 2015, a été révisé pour les périodes 2020-2021 et 2021-2026, avec l’ajout d’une composante renforcée pour les groupes spécialement marginalisés, y compris les femmes et les transgenres. Pendant la période 2014-2018, l’inscription des femmes à des cours d’amélioration des compétences de longue durée a augmenté de 97 %. Le programme Beti Bachao Beti Padhao (Protéger les petites filles, leur permettre de s’instruire) a été lancé en 2015 pour faire face à la diminution du ratio filles-garçons et a été étendu depuis 2019 à l’ensemble des 640 districts du pays. Pradhan Mantri Matru Vandana Yojana, programme officiel de prestations de maternité lancé en 2016, assure une aide financière aux femmes enceintes et aux mères allaitantes. En 2020, plus de 10,75 millions de femmes en avaient bénéficié. Le programme Rashtriya Mahila Kosh accorde des prêts aux femmes pauvres par l’intermédiaire d’organisations intermédiaires de microfinancement. Des foyers pour femmes actives ont été créés pour garantir un hébergement sûr aux femmes qui travaillent loin de leur lieu de résidence. En outre, le Gouvernement indien a lancé en 2010 la Mission nationale pour l’autonomisation des femmes pour renforcer l’ensemble des processus qui contribuent au développement global des femmes.

Réponse au paragraphe 10 b)

36.L’Inde soutient la participation des femmes à la vie politique et celle-ci a augmenté progressivement. La proportion de femmes siégeant au Lok Sabha (chambre basse du Parlement) est passée de 11,6 % en 2014 à 14,4 % en 2019. Le taux de participation des femmes aux élections a aussi augmenté progressivement, passant de 55,82 % en 2009 à 65,3 % en 2014, puis à 68 % en 2019. Il a dépassé le taux de participation des hommes en 2019. Pour la nomination des juges aux plus hautes instances judiciaires, le Gouvernement a demandé à ce que les candidatures de personnes issues des castes et des tribus répertoriées, des autres classes arriérées, des minorités et des femmes ayant les qualifications requises soient dûment prises en considération. Au 31 mars 2021, il y avait une juge à la Cour suprême de l’Inde et 75 juges dans les diverses Hautes Cours.

37.La Constitution indienne garantit la participation des femmes à l’administration locale en prescrivant qu’au moins 33 % du nombre total de postes soit réservé aux femmes. Afin de garantir la parité, plus de 20 États indiens ont déjà pris des dispositions pour réserver 50 % du total des postes aux femmes. À cet égard, un projet de loi est en cours d’examen au Parlement. Dans d’autres domaines, des progrès sont accomplis lentement mais sûrement pour ouvrir l’accès à des postes d’où les femmes étaient exclues auparavant. La mesure la plus notable à cet égard a consisté à reconnaître et faire appliquer l’égalité des chances pour les femmes pour le service court dans les forces armées avec le rang d’officier et la possibilité d’obtenir un poste permanent non seulement à l’état-major mais aussi parmi les postes attribués sur critères et les postes de commandement. Le Gouvernement indien conseille aussi activement aux États de porter à 33 % la représentation des femmes dans les postes subalternes de la police et a approuvé cette mesure pour les Territoires de l’Union en 2015. Au moins 20 États ont adopté diverses cibles à cet égard s’échelonnant entre 38 % (1 État), 33 % (9 États) et moins de 33 % (10 États).

38.Des mesures législatives ont aussi été prises pour améliorer la participation des femmes dans le domaine économique. Toute société cotée en bourse ayant un capital social libéré égal ou supérieur à 1 milliardde roupiesou un chiffre d’affaires égal ou supérieur à 3milliardsde roupies doit compter au moins une femme parmi les membres de son conseil d’administration en vertu de l’article 149 de la loi de 2013sur les sociétés. La Commission indienne des opérations de bourse a imposé aux 1 000 premières entreprises indiennes selon la capitalisation boursière la présence d’une administratrice indépendante à leur conseil d’administration à compter du 1eravril 2020. Au 3mars 2021, 850 de ces 1000 entreprises avaient nommé des administratrices indépendantes.

39.Les mesures concernant l’inclusion financière des femmes visent à les autonomiser et à les faire accéder à un niveau de vie normal. De 2015 à 2020, 68 % de l’ensemble des bénéficiaires du Pradhan Mantri Mudra Yojana ont été des femmes. Les femmes constituent aussi les bénéficiaires les plus nombreux du Pradhan Mantri Jan Dhan Yojana, l’une des initiatives d’inclusion financière les plus ambitieuses au monde, qui donne aussi accès à des prestations directes au titre de divers programmes d’aide sociale, de crédit et de services d’assurance. En août 2020, sur les 400 millions de comptes ouverts au titre du Pradhan Mantri Jan Dhan Yojana, 55,2 % étaient détenus par des femmes. Le programme Mahila Shakti Kendra a été engagé en 2017 pour autonomiser les femmes par l’amélioration des compétences, l’emploi, l’apprentissage des compétences numériques de base, la santé et la nutrition. Il incite aussi les femmes à adhérer à des collectifs, leur facilite l’accès à l’information et vise à accroître leur participation aux institutions des panchayats.

Réponse au paragraphe 10 c)

40.En Inde, le mariage et les relations familiales sont régis au premier chef par les lois sur le statut personnel de la communauté religieuse particulière à laquelle une personne appartient. Pays laïque, l’Inde observe une politique de non-immixtion dans les affaires personnelles des communautés sans l’initiative et le consentement de la communauté concernée. Néanmoins, l’Inde a continué de progresser régulièrement vers l’égalité fondamentale des femmes dans les affaires familiales, principalement par la voie de modifications législatives et de décisions judiciaires. La loi de 2005 portant modification de la loi hindoue sur les successions a égalisé le statut des filles par rapport à celui des fils concernant la propriété indivise selon le régime hindou du Mitakshara. Il a également supprimé la disposition interdisant aux femmes de demander leur part d’héritage, dans le cas d’un logement occupé entièrement par la famille commune, tant que les héritiers masculins n’ont pas décidé de procéder au partage de l’héritage. La loi de 2010 relative aux statuts personnels a modifié la loi de 1890 relative à la tutelle et la loi hindoue de 1956 sur l’adoption et l’entretien des enfants. La loi modifiée relative à la tutelle autorise la mère à être tuteur au même titre que le père. Depuis cette modification, les hommes et les femmes hindous disposent des mêmes droits pour ce qui est de donner à l’adoption ou d’adopter les enfants. En outre, la loi de 2019 sur la protection des droits femmes musulmanes dans le mariage érige en infraction le fait pour un époux musulman de prononcer le triple talaq et permet à l’épouse musulmane à l’égard de qui le talaq a été prononcé de demander un règlement à l’amiable.

41.L’inégalité qui existe entre hommes et femmes en droit hindou en matière de tutelle s’est amenuisée depuis la décision de la Cour suprême dans l’affaire Githa Hariharan v. Reserve Bank of India, à la faveur d’une interprétation progressiste de l’article 6 a) de la loi hindoue de 1956 sur la minorité et la tutelle, qui reconnaissait à la mère et au père des droits de tutelle très inégaux et différents. L’interprétation éclairée qui a été faite de la loi de 1986 sur la protection des droits femmes musulmanes dans le divorce par la Cour suprême dans l’affaire Danial Latifi v . Union of India a garanti aux femmes musulmanes divorcées un droit étendu à l’entretien et à la pension alimentaire.

42.Symbole majeur du patriarcat et des stéréotypes sexistes, l’infraction d’adultère définie dans le Code pénal indien a été déclarée inconstitutionnelle par la Cour suprême dans l’affaire Joseph Shine v. Union of India. Tout en incriminant l’adultère commis par l’épouse, la loi permettait seulement à l’époux de déposer une plainte pénale contre la personne avec laquelle l’épouse était présumée entretenir une relation adultère. La Cour a jugé que cette disposition violait le principe de non-discrimination et privait les femmes de l’égalité fondamentale.

Réponse au paragraphe 10 d)

43.Si les coutumes ont force de loi en Inde, celles qui sont contraires à la Constitution peuvent être interdites. La Constitution consacre à la fois l’égalité entre hommes et femmes et le droit de conserver sa culture. Dans l’affaire Madhu Kishwar v. State of Bihar, la Cour suprême, tout en confirmant la pratique coutumière des tribus répertoriées accordant le droit d’hériter aux descendants masculins, a établi le droit des femmes de tirer des moyens de subsistance de biens fonciers hérités, et limité le droit des descendants masculins à la propriété exclusive des terres héritées jusqu’à ce que l’épouse à charge/descendante décide d’un autre moyen de subsistance. Cette décision offre un exemple de situation à l’interface des droits culturels et du droit à l’égalité et à la non-discrimination.

Violences contre les femmes et pratiques préjudiciables (art. 2, 3, 6, 7, 8 et 26)

Réponse au paragraphe 11 de la liste de points

44.L’Inde a toujours pris au sérieux la persistance de pratiques néfastes à l’égard des femmes et a adopté des mesures cohérentes pour y mettre fin.

45.Mariage d ’ enfants − La loi de 2006 interdisant le mariage d’enfants interdit et réprime la célébration du mariage d’enfants. Elle permet à l’enfant marié officiellement de faire annuler son mariage par les tribunaux. Elle crée une structure institutionnelle en prescrivant la désignation d’un responsable pour l’interdiction du mariage d’enfants, chargé d’assurer la prévention de ces mariages et la sensibilisation au problème et de conseiller les habitants. et le conseil aux résidents locaux. En outre, la loi renforce les peines applicables aux infractions visées et prévoit la création d’un mécanisme d’aide à l’épouse.

46.Crimes d ’ honneur − Estimant que les crimes d’honneur sont la négation même de la liberté individuelle et de la liberté de choix, la Cour suprême, dans l’affaire Shakti Vahini v. Union of India, a fait valoir que le libre choix des époux doit être protégé et ne peut être abandonné à la conception sociale particulière de l’honneur ou à la pensée de groupe qui prévalent. La Cour a défini des mesures préventives, punitives et réparatrices pour remédier au problème des crimes d’honneur. Elle a aussi décidé que seraient créées au niveau des districts des cellules spéciales équipées d’une ligne d’assistance téléphonique 24 heures sur 24 et que ces affaires seraient jugées par des tribunaux désignés à cet effet pour en permettre le traitement rapide.

47.Système de la dot − La pratique du système de la dot constitue un sujet de préoccupation majeur en Inde. Outre les modifications apportées à la loi de 1961 portant interdiction de la pratique de la dot pour rendre celle-ci plus stricte et plus efficace, le harcèlement en vue d’obtenir une dot a été érigé en infraction et, en vertu de la loi de 2005 sur la protection des femmes contre la violence domestique, peut être invoqué pour demander un recours civil.

48.A vortement sélectif en fonction du sexe du fœtus − En Inde, les pratiques de détermination et de sélection du sexe avant la naissance sont strictement interdites et punies par la loi. La loi de 1994 sur les techniques de diagnostic préconceptionnel et prénatal a été modifiée en 2002, devenant la loi de 1994 sur les techniques de diagnostic préconceptionnel et prénatal (interdiction de la sélection du sexe), en vue de renforcer le dispositif institutionnel créé pour mettre fin à ces pratiques et d’interdire systématiquement toute forme de publicité relative à des services de sélection du sexe. Dans l’affaire Sabu Mathew George v. Union of India, la Cour suprême de l’Inde a ordonné aux sociétés de logiciels de désigner des « experts en interne » pour veiller à ce que l’interdiction soit strictement respectée. Dans l’affaire Voluntary Health Association of Punjab v. Union of India, la Cour suprême a formulé des indications détaillées pour simplifier encore l’interprétation de la loi et en permettre une application rigoureuse grâce à un ensemble de mécanismes aux niveaux social, administratif et judiciaire.

49.Système des dévadâsî − Le Code pénal indien de 1860, tel que modifié en 2013, interdit la traite des personnes et l’exploitation des victimes de la traite. Sa définition exhaustive de l’exploitation, qui englobe l’exploitation sexuelle, l’esclavage ou les pratiques analogues à l’esclavage et la servitude, est suffisamment large pour considérer qu’elle s’applique à l’exploitation des dévadâsî. Elle incrimine aussi le fait de recruter, transporter, héberger, transférer ou recevoir quelque personne que ce soit à des fins d’exploitation. Elle précise en outre que le consentement de la victime n’entre pas en considération pour déterminer que l’infraction de traite a été commise. Comme il relève de l’État central, le Code pénal s’applique partout en Inde. Le Ministère de l’intérieur a aussi apporté des éclaircissements dans le cadre de notes d’orientations adressées à tous les États et Territoires de l’Union, auxquels il a aussi recommandé d’engager une campagne spéciale pour identifier les dévadâsî et les réinsérer en leur assurant des conseils, des traitements médicaux et une orientation. Il leur est aussi demandé d’engager des programmes spéciaux de sensibilisation et d’amélioration des compétences.

50.Sati − La pratique néfaste du sati, qui consiste à brûler la veuve sur le bûcher funéraire de son mari, a été éradiquée. La loi de 1987 sur l’interdiction du sati a été promulguée en 1987 pour interdire efficacement cette pratique et sa glorification et aucun cas de sati n’a été enregistré en Inde depuis lors.

51.Sorcellerie − La violence exercée pour quelque motif que ce soit, y compris du fait qu’une personne est accusée de sorcellerie, tombe sous le coup de diverses catégories d’infractions définies et réprimées par le Code pénal indien. Huit États indiens, dont le Jharkhand, l’Odisha et le Chhattisgarh, ont promulgué des lois spéciales pour lutter contre la persécution des femmes accusées d’être des sorcières.

52.Mutilations génitales féminines − La pratique des mutilations génitales féminines constitue une infraction pénale en vertu des articles 320 à 326 du Code pénal indien qui répriment le fait de porter atteinte à l’intégrité physique en infligeant des blessures ou des blessures graves au moyen d’une arme à feu, d’une arme blanche ou de tout instrument tranchant. En outre, si la pratique concerne une mineure, la loi de 2012 sur la protection des enfants contre les infractions sexuelles peut aussi être invoquée. Dans l’affaire Sunita Tiwari v. Union of India, il a été soutenu que la question des mutilations génitales féminines se situe à l’interface du droit à l’intégrité corporelle et de la liberté de religion. L’affaire a été renvoyée à une chambre constitutionnelle de la Cour suprême et est actuellement en instance.

53.Violences sexuelles − Le cadre juridique de l’élimination de la violence à l’égard des femmes a été élargi par une modification du Code pénal indien qui a érigé en infraction des formes caractérisées de violence à l’égard des femmes comme les agressions à l’acide, le déshabillage, le voyeurisme et le harcèlement. Le harcèlement sexuel a aussi été défini et incriminé en droit pénal. La définition du viol, qui était limitée aux rapports sexuels péno‑vaginaux, a été élargie à un certain nombre de formes d’agression sexuelle avec ou sans pénétration. Il existe une définition précise du consentement dans le contexte du viol. Des peines plus lourdes et graduées sont définies désormais pour l’infraction de viol en fonction des préjudices supplémentaires qui ont été infligés en commettant l’infraction, comme le décès de la victime ou le fait que celle-ci soit restée dans un état végétatif persistant, le nombre d’auteurs, l’âge de la victime, et concernant l’auteur, le fait de savoir si ce dernier exerçait une autorité sur la victime ou s’il s’agit de sa part d’une récidive. Par ailleurs, en vertu de cette modification, l’amende infligée à l’auteur doit être versée à la victime, et doit être juste et suffisante pour couvrir ses frais médicaux et sa réadaptation. Pour faire en sorte que la législation adoptée pour lutter efficacement contre la violence à l’égard des femmes soit rigoureusement appliquée, des peines sont prescrites à l’égard des fonctionnaires qui manquent à leurs obligations, s’agissant en particulier d’enregistrer les plaintes et d’enquêter sur les cas de violence sexuelle à l’égard des femmes.

54.Dans l’affaire Independent Thought v. Union of India, la Cour suprême a retenu une interprétation étroite de l’article 375 du Code pénal indien et estimé que l’infraction de viol conjugal n’admet pas d’exception quand l’épouse est âgée de moins de 18 ans.

55.L’absence de loi complète sur la violence domestique a été corrigée par l’adoption de la loi de 2005 sur la protection des femmes contre la violence domestique. Cette loi comporte une définition complète de la violence domestique et prévoit des recours civils en complément des sanctions pénales qui existaient déjà tout en donnant à celles-ci une portée encore plus large dans certaines circonstances. Elle institue une structure remarquable pour l’aide aux victimes de violence domestique. La Commission nationale de la femme dispose d’un service spécialement chargé des Indiens résidant à l’étranger pour traiter les plaintes liées à des mariages internationaux dans lesquels les droits de l’épouse ont été bafoués.

56.Le Gouvernement a aussi institué en 2019 un programme visant à créer 1 023 tribunaux spéciaux à procédure accélérée, dont 389 tribunaux s’occupant exclusivement de la protection des enfants contre les infractions sexuelles, dans tout le pays, afin de pouvoir juger rapidement les affaires relatives à des infractions sexuelles. Au-delà du renforcement du cadre juridique, des dispositions ont été prises sur le plan opérationnel pour lutter efficacement contre le problème de la violence à l’égard des femmes. Les autorités ont mis en place un système national d’intervention d’urgence disposant d’un numéro unique reconnu dans le monde entier pour toutes les urgences et permettant l’acheminement assisté par ordinateur des ressources opérationnelles sur le lieu de l’urgence. Des centres à guichet unique sont installés actuellement dans tout le pays pour faciliter l’accès à un service intégré allant de services médicaux, juridiques et psychosociaux à l’assistance temporaire aux femmes victimes de violence, le tout étant regroupé sous un même toit. Parmi les 728 centres de ce type qui ont été approuvés, 595 sont déjà opérationnels à travers le pays.

57.Un service de télécommunication gratuit, disponible 24 heures sur 24, 7 jours sur 7, a été mis en place dans tout le pays pour faciliter les interventions en situation de crise ou autre auprès des femmes qui demandent de l’aide en les orientant vers les organismes compétents et pour les renseigner sur les programmes d’aide et d’autonomisation auxquels elles peuvent accéder. Un système national de suivi des enquêtes relatives aux infractions sexuelles a été créé pour assurer le contrôle et le suivi de la conduite en temps utile des enquêtes menées dans ce type d’affaires. Une base de données nationale sur les délinquants sexuels a été mise en service en 2018 pour faciliter le travail d’enquête et de surveillance des forces de l’ordre concernant les délinquants sexuels dans tout le pays. Un portail sur la cybercriminalité a aussi été créé pour permettre aux citoyens de signaler les contenus obscènes. Des projets de ville sûre ont été validés en première phase pour huit villes − ces projets utilisant la technologie à l’appui d’une gestion intelligente du maintien de l’ordre et de la sécurité. Le Gouvernement indien a créé un fonds spécial (Nirbhaya Fund) pour la réalisation d’initiatives visant à améliorer la sécurité des femmes dans le pays. Le programme d’indemnisation pour les femmes ayant été victimes ou ayant survécu à des agressions sexuelles et autres crimes, créé en 2018, accorde une indemnisation aux femmes victimes d’infractions à caractère sexiste et aux enfants victimes d’atteintes sexuelles. Le système She-Box de gestion de plaintes en ligne a été mis en place pour donner accès à chaque femme à un guichet unique pour l’enregistrement des plaintes liées au harcèlement sexuel sur le lieu de travail.

58.Agressions à l ’ acide − La loi de 2013 portant modification du Code pénal indien a incorporé dans le Code pénal indien de 1860 les nouveaux articles 326A et 326B établissant des dispositions spéciales contre les attaques à l’acide, avec des peines allant de la réclusion criminelle pour 10 ans au minimum à la réclusion criminelle à perpétuité, assorties d’une amende. L’amende doit être juste et raisonnable et couvrir les frais du traitement médical de la victime. La défiguration à la suite d’une agression à l’acide a été inscrite comme handicap dans la loi de 2016 sur les droits des personnes handicapées, ce qui permet aux victimes de se prévaloir des prestations prévues par cette loi.

59.Les comités de la société civile pour la protection de la famille, institués par la Cour suprême en 2018 ont, par la suite, été déclarés irrecevables juridiquement par la Cour dans l’affaire Social Action Forum for Manav Adhikar and Another v. Union of India, Ministry of Law and Justice and Others.

Interruption de grossesse, mortalité maternelle et droits liés à la procréation (art. 2, 3, 6 et 7)

Réponse au paragraphe 12 de la liste de points

60.L’Inde est fermement résolue à remédier aux obstacles juridiques et pratiques qui entravent l’accès des femmes et des filles à l’avortement sûr et légal, conformément aux obligations que lui impose le Pacte. À cet égard, la loi de 1971 sur l’interruption médicale de grossesse, modifiée en 2021, a pour objectif de garantir aux femmes qui doivent interrompre leur grossesse la dignité, l’autonomie, la confidentialité et la justice. On mentionnera aussi que cette loi a été adoptée à l’issue d’un large processus consultatif associant l’ensemble des parties prenantes.

Réponse au paragraphe 12 a)

61.Pour permettre l’accès aux méthodes contraceptives à tous les niveaux du système de santé, le Ministère de la santé et de la famille a lancé la campagne Mission Pariwar Vikas en 2016. Cette campagne vise à assurer un plus grand choix de contraceptifs, un service garanti et des produits sûrs. D’après la dernière enquête nationale sur la santé familiale (cinquième enquête, phase I), le taux général d’utilisation des contraceptifs a sensiblement augmenté. Un programme de distribution gratuite de contraceptifs a aussi été adopté. La qualité des contraceptifs est vérifiée au moment de l’achat, après quoi les produits sont distribués gratuitement dans les dispensaires, les hôpitaux et les centres de santé primaire, ainsi qu’à domicile par des agents sanitaires et sociaux agréés. L’accès à des services de soins complets pour l’avortement est renforcé par la formation des prestataires de santé, la livraison de médicaments et d’équipements, l’information, l’éducation et la communication, etc. Plus de 25 000 « points de service » ont été renforcés dans le pays sur le plan des infrastructures, du matériel et du personnel qualifié pour assurer des services complets de santé procréative, maternelle, néonatale, infantile et adolescente. L’obligation de signaler les grossesses d’adolescentes et les agressions sexuelles est prévue par la loi de 2012 sur la protection des enfants contre les infractions sexuelles et par le Code pénal indien. Étant donné la culture du silence qui entoure les infractions sexuelles et le contexte sensible, l’obligation de signalement vise essentiellement à faire en sorte qu’aucune infraction sexuelle à l’égard d’un enfant ne reste sans signalement : dans ce cas, en effet, la victime ne peut bénéficier de la protection de l’État, et l’auteur ne peut être retrouvé par le système de justice pénale. Par ailleurs, l’obligation d’obtenir l’autorisation d’un praticien agréé pour pratiquer l’avortement, prévue par la loi sur l’interruption médicale de grossesse, vise à protéger la santé et le bien‑être des femmes qui subissent un avortement.

Réponse au paragraphe 12 b)

62.La loi sur l’interruption médicale de grossesse vise à garantir le droit à l’avortement dans des conditions sûres et adaptées à la santé des femmes. L’exercice de ce droit suppose que certaines conditions légitimes soient remplies. Trois d’entre elles concernent la durée de la grossesse, le fait que l’avortement ne peut être réalisé que par un praticien agréé, et le fait que la procédure ne peut être effectuée que dans un hôpital ou dans un lieu désigné à cet effet par les autorités compétentes. L’avortement autoprovoqué est donc illégal.

Réponse au paragraphe 12 c)

63.Eu égard aux progrès de la technologie médicale en matière d’avortement sécurisé, les restrictions de l’accès à l’avortement légal après vingt semaines de grossesse ont été revues par la loi de 2021 modifiant la loi sur l’interruption médicale de grossesse. En conséquence, l’avortement légal sans obligation d’obtenir une autorisation judiciaire est désormais possible jusqu’à vingt-quatre semaines de grossesse, et même au-delà dans certains cas.

Réponse au paragraphe 12 d)

64.La non-applicabilité de l’échec de la contraception comme motif d’avortement pour les femmes et les filles non mariées a été supprimée par la loi modificative, où les mots « toute femme mariée ou son mari » sont remplacés par les mots « toute femme ou son partenaire ». Cette modification étend l’applicabilité de l’échec de la contraception comme motif d’avortement à toutes les femmes et les filles, mariées ou non.

Réponse au paragraphe 12 e)

65.L’exigence du consentement parental ou du consentement du tuteur à l’avortement pour les filles âgées de moins de 18 ans découle de la loi sur l’interruption médicale de grossesse. Cette disposition est ancrée dans l’approche de politique publique qui est suivie à l’égard des mineurs pour tous les aspects de leur vie.

Réponse au paragraphe 12 f)

66.Les problèmes de la disponibilité limitée des services d’avortement et du manque de professionnels de la santé font l’objet d’une attention soutenue. Les chiffres récents à cet égard dénotent une amélioration encourageante. Les besoins non satisfaits en services de planification familiale ont été réduits de 12,9 % en 2015-2016 à moins de 10 % en 2019‑2020 dans tous les États sauf deux. Afin de passer de la densité médicale actuelle de 1:1456 à la densité médicale de 1:1000 préconisée par l’OMS, l’Inde a engagé un programme ambitieux de modernisation des infrastructures de santé. Depuis 2014, 141 nouvelles écoles de médecine ont été agréées et l’admission des étudiants en médecine a été augmentée. La décision récente par laquelle, dans l’affaire Association of Medical Superspeciality Aspirants and Residents and Others v. Union of India, la Cour suprême a confirmé la constitutionnalité de l’obligation d’accomplir des périodes de service obligatoire dans le secteur de la santé publique comme condition d’admission au troisième cycle des études de médecine, devrait aussi contribuer à augmenter le nombre de médecins dans les centres de santé publics.

Réponse au paragraphe 12 g)

67.La crainte de faire l’objet de poursuites en application de la loi de 1994 sur les techniques de diagnostic préconceptionnel et prénatal, loi dûment adoptée, de la part de certains professionnels de la santé, bien que des recours existent en cas d’utilisation abusive de la loi, est infondée. Qui plus est, la Cour suprême, dans l’affaire Voluntary Health Association of Punjab v. Union of India, a refusé de limiter l’application de certaines dispositions de cette loi, et d’ajouter des réserves et des exceptions à certaines autres de ses dispositions au motif que les professionnels de la santé pourraient être exposés à un harcèlement en cas d’utilisation abusive de la loi.

68.En ce qui concerne les informations relatives à la pratique de procédures de stérilisation non sûres et de mauvaise qualité dans des camps de stérilisation, la politique nationale de la santé adoptée en 2017 reconnaît dûment la nécessité impérative d’abandonner ce type de services. En outre, des commissions de vérification ont été créées dans tous les États et les districts du pays pour superviser le fonctionnement des camps de stérilisation. Des visites de contrôle et des évaluations officielles sont régulièrement effectuées concernant les services de stérilisation par la division de la planification familiale du Ministère de la santé et de la protection de la famille. On a constaté une diminution de 0,55 point et de 62,5 points, respectivement, des taux de décès et d’échec imputables aux procédures de stérilisation par rapport à l’année précédente (2017-2018). Les principes applicables en ce qui concerne la réparation à assurer aux victimes d’une procédure de stérilisation ont été établis par la Cour suprême de l’Inde dans l’affaire Ramakant Rai (I) v. Union of India.

Traite des personnes (art. 7, 8 et 9)

Réponse au paragraphe 13 de la liste de points

69.Le cadre juridique de la lutte contre la traite des personnes est constitué de l’article 23 de la Constitution indienne, de la loi de 1956 sur la prévention des trafics immoraux et du Code pénal indien de 1860. Ce cadre a été consolidé au fil du temps par nombre d’initiatives du législateur, dont les objectifs sont de deux ordres : premièrement, prévenir, réprimer et sanctionner la traite en tant que telle, et deuxièmement, punir l’exploitation ultérieure dont font l’objet les victimes de la traite et offrir des moyens de réparation aux victimes d’une exploitation. En outre, la loi de 2013 portant modification du Code pénal indien a introduit dans celui-ci un nouvel article 370A qui donne une définition complète de la traite des êtres humains et attache des peines strictes à l’infraction d’exploitation d’une victime de la traite. L’article 370 a été renforcé de façon à élargir le champ de l’infraction et à y inclure non seulement la qualification d’esclavage, mais aussi la traite en général − de mineurs et d’adultes, le travail forcé ou sous contrainte pour dette, la prostitution, la transplantation d’organes et, dans une certaine mesure, les mariages d’enfants, etc. En 2019, la loi de 2008 sur l’Agence nationale d’enquête a été modifiée pour autoriser cette dernière à enquêter sur les affaires de traite des personnes en vertu des articles 370 et 370A du Code pénal indien.

70.En ce qui concerne les préoccupations soulevées par le Comité des droits de l’homme dans ses observations finales quant à « l’ampleur de la prostitution des enfants », l’action menée pour remédier à ce fléau prend des formes multiples. C’est ainsi que les textes d’application de la loi de 2015 sur la justice pour mineurs (soins et protection des enfants) reconnaissent en particulier la notion d’« enfant délaissé risquant d’être victime de la traite » et créent des institutions pour la prise en charge de ces enfants. L’article 2 14) ii) de la loi reconnaît aux enfants trouvés en situation de mendicité le statut d’« enfant ayant besoin de soins et de protection ». En 2016, l’Inde est passée d’une interdiction de l’emploi des enfants fondée sur la nature du travail à une interdiction complète du travail des enfants jusqu’à l’âge de 14 ans. L’emploi des adolescents est interdit pour les métiers dangereux et est réglementé pour les autres métiers. En outre, le problème de l’exploitation sexuelle des enfants, qui est une des conséquences possibles de la traite des êtres humains, fait l’objet d’une loi spécifique, rigoureuse et plus complète, à savoir la loi de 2012 sur la protection des enfants contre les infractions sexuelles, qui a été renforcée par la loi modificative de 2019 sur la même question.

71.Dans l’affaire Public Union for Civil Liberties v. State of Tamil Nadu and Others, la Cour suprême a chargé la Commission nationale des droits de l’homme de contrôler et superviser l’application de ses consignes ainsi que des dispositions de la loi de 1976 sur l’abolition du régime du travail servile. Par la suite, la Commission a rendu compte périodiquement de l’état d’avancement de l’application de cette loi dans les différents États et Territoires de l’Union.

72.En outre, l’Inde a adopté un cadre de protection et de réadaptation des victimes de la traite. Un certain nombre de programmes centrés sur le sauvetage, la réadaptation et le rapatriement des victimes de la traite ont été mis en place par le Gouvernement. Dans le cadre du programme Swadhar Greh, les femmes victimes de circonstances difficiles ont accès à un hébergement, des aliments, des vêtements et des soins de santé ainsi qu’à une sécurité économique et sociale. Au titre du programme de protection des victimes de la traite et de l’exploitation sexuelle à des fins commerciales (2015), les victimes de la traite et de l’exploitation disposent d’une assistance juridique au moment du sauvetage, et par la suite, lors du procès. Le programme Ujjawalaconcerne la prévention de la traite, le sauvetage, la réadaptation, la réinsertion et le rapatriement des victimes de la traite ayant pour but l’exploitation sexuelle commerciale. Il existe dans le pays 254 projets, parmi lesquels 134foyers de protection et de réadaptation.En juillet 2019, 5 291 femmes avaient bénéficié du programme.

73.En 2019, il y a eu au total 2 260 cas signalés de traite des êtres humains (concernant le travail forcé, l’exploitation sexuelle à des fins de prostitution, d’autres formes d’exploitation sexuelle, la servitude domestique, le mariage forcé, les infractions mineures, la pédopornographie, la mendicité, le trafic de drogue, le prélèvement d’organes et d’autres motifs). Le nombre d’affaires qui en sont à l’étape des poursuites et de la détermination des sanctions s’élève à 1 606 et à 172, respectivement. Au cours de la même année, 6 571 victimes ont été secourues.

74.Pour empêcher la revictimisation des victimes de la traite, en particulier pendant les étapes de l’enquête et des poursuites, une série d’initiatives ont été prises, dont la publication de consignes et de procédures opérationnelles normalisées, et une formation plus efficace des personnes chargées des enquêtes et des poursuites. Compte tenu de la vulnérabilité particulière des enfants victimes de la traite qui sont soumis à l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et au travail forcé, des consignes précises ont aussi été publiées sur les mesures à prendre dans le cadre du sauvetage et de la réinsertion des enfants victimes de la traite.

75.En association avec l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), le Gouvernement indien a engagé un projet pluriannuel de formation des agents des services de détection et de répression sur la traite des êtres humains dans quatre États (Maharashtra, Goa, Bengale occidental et Andhra Pradesh), afin de sensibiliser ces agents, et de renforcer leurs capacitésà enquêter sur les auteurs d’infractions et à les poursuivre efficacement, et à protéger activement les victimes et les survivants de la traite.Le Gouvernement central a aidé les autorités des États et des Territoires de l’Union à mettre en place de nouvelles unités spéciales de lutte contre la traite des êtres humains au niveau des districts, et un service d’assistance aux femmes au niveau des commissariats de police qui couvre tous les districts, en vue de prévenir et de réprimer la criminalité liée à la traite des êtres humains. Une cellule de lutte contre la traite des êtres humains a été créée en 2006 pour assurer l’interface entre les différents ministères concernés, les États et les Territoires de l’Union. Une structure de communication à l’échelon national, le Centre interinstitutions pour la lutte contre la criminalité, a aussi été créée pour faciliter la diffusion en temps réel d’informations sur la grande criminalité, y compris les cas de traite des êtres humains pouvant se produire dans tout le pays, et permettre la coordination entre les États. Ce portail, entre autres, aide les services de détection et de répression à diffuser rapidement des alertes sur la traite des êtres humains à toutes les autorités de police concernées, et est utile pour localiser et identifier les victimes de la traite, outre qu’il facilite la prévention et la détection des infractions et les enquêtes à leur sujet.

76.Des ateliers centrés sur le renforcement des capacités, la sensibilisation et l’amélioration des compétences des agents des services judiciaires en ce qui concerne les procès relatifs à la traite des êtres humains, et l’appui et l’assistance aux victimes ont été organisés régulièrement en collaboration avec l’ONUDC et les écoles de la magistrature de tout le pays. Outre qu’elle a ratifié en 2011 la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et les protocoles y relatifs, l’Inde est signataire depuis 2002 de la Convention de l’Association sud-asiatique de coopération régionale (ASACR) pour la prévention et l’élimination de la traite des femmes et des enfants à des fins de prostitution, et a également conclu un mémorandum d’accord bilatéral pour la prévention de la traite des êtres humains avec les Gouvernements du Bangladesh, des Émirats arabes unis, du Cambodge et du Myanmar.

Lutte contre le terrorisme et mesures de sécurité, et responsabilité des violations graves des droits de l’homme (art. 2, 6, 7, 9, 14 et 26)

Réponse au paragraphe 14 de la liste de points

77.L’Inde continue d’être victime du terrorisme. De ce fait, certaines mesures spécifiques ont dû être adoptées au fil des ans, comme la loi de 1987 sur la prévention des activités terroristes et subversives et la loi de 2002 sur la prévention du terrorisme, pour garantir la sécurité des citoyens. La validité constitutionnelle de ces lois a été confirmée par la Cour suprême dans l’affaire Kartar Singh v. State of Punjab et People ’ s Union for Civil Liberties and Another v. Union of India.

78.En ce qui concerne les affaires relevant de ces lois, on notera que l’une et l’autre comportaient des clauses d’extinction et de sauvegarde. En vertu de la clause d’extinction, les lois ne devaient rester en vigueur que pour une durée limitée. En vertu de la clause de sauvegarde, nonobstant l’abrogation des lois, les procès en cours étaient autorisés à se poursuivre jusqu’à leur terme. Après l’abrogation, aucune nouvelle action n’a été engagée sur le fondement de ces textes.

Réponse au paragraphe 15 de la liste de points

79.Les lois relatives à la sécurité nationale, par exemple la loi de 1958 sur les pouvoirs spéciaux des forces armées, la loi de 1990 sur les pouvoirs spéciaux des forces armées (Jammu-et-Cachemire), la loi de 1980 sur la sécurité nationale, la loi de 1967 sur la prévention des activités illicites et la loi de 1978 sur la sécurité publique (Jammu‑et‑Cachemire), ont été adoptées pour protéger la souveraineté de l’Inde et garantir la sécurité de ses citoyens. En vertu de ces lois, le personnel des forces armées et des forces de sécurité est investi de pouvoirs pour assurer le maintien de l’ordre public et la prévention d’actes préjudiciables à la défense et à la sécurité de l’Inde. Le Gouvernement indien demeure résolu à traiter les situations de maintien de l’ordre et de sécurité en recourant le moins possible à la force, conformément aux principes de sécurité juridique, de nécessité et de proportionnalité, et compte dûment tenu des divers facteurs, y compris les réalités du terrain. Le recours à la force et le pouvoir d’ordonner la détention sont subordonnés dans les lois susmentionnées aux conditions suivantes : i) la zone doit avoir été déclarée « perturbée », « interdite » ou « protégée » ; ii) l’association visée doit avoir été déclarée « illicite » ; et iii) la personne placée en détention doit avoir été informée des motifs sa détention. Dans l’affaire Extra Judicial Execution Victim Families Association and Another v. Union of India and Another (ci-après « l’affaire Extra Judicial »), la Cour suprême de l’Inde a souligné la nécessité de recourir au minimum à la force même contre des terroristes, des militants et des insurgés, et la nécessité d’enquêter sur tout recours disproportionné à la force.

80.Il importe de noter que les lois susmentionnées intègrent aussi certaines garanties essentielles contre l’exercice des pouvoirs d’arrestation et de détention conférés à l’État. Les arrestations et les détentions autorisées par ces textes doivent être effectuées dans les plus courts délais et faire l’objet d’un rapport sur les circonstances qui les ont provoquées. Les lois prévoient que l’ordonnance de détention peut être révoquée pour faciliter la libération provisoire des détenus. Conformément à l’article 6 de la loi sur la prévention des activités illicites, la notification déclarant une association illicite est susceptible d’annulation par le Gouvernement central à la suite d’un recours de la partie plaignante. Préalablement à la saisie des « produits du terrorisme », les motifs de la décision doivent avoir été notifiés, à la suite de quoi la partie plaignante a la possibilité de former un recours.

81.La Cour suprême, dans l’affaire Naga Peoples ’ Movement of Human Rights v. Union of India, a confirmé la constitutionnalité de la loi de 1958 sur les pouvoirs spéciaux des forces armées et a estimé que les pouvoirs spéciaux prévus par cette loi n’étaient pas arbitraires ou contraires aux droits consacrés par la Constitution indienne à l’égalité, à la liberté et à la vie. Elle a indiqué certaines conditions supplémentaires à l’exercice des pouvoirs prévus par la loi : i) une zone ne peut être déclarée perturbée que si une situation grave menace l’ordre public ; ii) cette déclaration doit porter sur une durée limitée ; iii) le recours à la force conformément à la loi doit correspondre au minimum nécessaire pour sanctionner efficacement la/les personne(s) dont les actes contreviennent à la décision d’interdiction ; et iv) les perquisitions et les saisies ordonnées en vertu de la loi doivent être menées conformément aux dispositions du Code de procédure pénale de1973. Dans l’affaire Extra Judicial, la Cour Suprême a fait valoir que si l’État, au nom de la préservation de l’ordre public, a recours à une force excessive ou à des mesures de représailles et que cela conduit à une exécution extrajudiciaire, une telle situation n’est pas acceptable car elle est destructrice pour l’état de droit. En l’absence de lien légitime entre un acte officiel et le recours à une force excessive, celui-ci ne doit pas être défendu et une enquête doit être ouverte. Ce qui précède est une conséquence des exigences démocratiques de l’État indien.

82.Le fonctionnement de la loi sur les pouvoirs spéciaux des forces armées est évalué périodiquement par le Gouvernement indien après consultation des Gouvernements des États et des Agences centrales. En raison d’une amélioration de la situation de sécurité, la loi a entièrement cessé de s’appliquer dans l’État de Tripura par avis du Gouvernement de l’État en date du 27 mai 2015, et dans l’État de Meghalaya à compter du 1er avril 2018.

Réponse au paragraphe 16 de la liste de points

83.Les forces de sécurité et les forces armées et de l’Inde remplissent la fonction d’intérêt public essentielle consistant à protéger les citoyens indiens contre les menaces intérieures et extérieures à la vie et à la liberté. En conséquence, la loi les protège contre les poursuites abusives pour des actes commis de bonne foi en imposant une autorisation préalable du Gouvernement pour poursuivre les membres de ces forces. Cette condition ne signifie pas cependant l’impunité ou l’immunité en cas de violations des droits de l’homme, comme l’a indiqué la Cour suprême dans l’affaire Extra Judicial. Dans des cas légitimes, le Gouvernement indien a autorisé les poursuites. En outre, dans les cas appropriés, des réparations ont été accordées par des tribunaux et des organes quasi judiciaires.

84.Certaines régions de l’Inde ont souffert d’actes de terrorisme et de troubles insurrectionnels à l’origine d’une situation critique en matière d’ordre public. Ces actes persistants de terrorisme et autres actes de violence ont nécessité l’intervention de forces civiles et armées pour protéger la vie et la liberté des citoyens indiens. De fait, ces interventions concernent des zones spécifiques désignées comme perturbées et sont limitées dans le temps en fonction de la gravité de la situation. Ainsi, au Jammu-et-Cachemire, les mesures suivantes ont été adoptées : i) organisation de réunions entre la police et le public et conseils aux jeunes par les autorités de police ; ii) consigne a été donnée aux forces de sécurité/à la police de respecter strictement les instructions permanentes et d’utiliser des armes non létales dans les situations de maintien de l’ordre ; iii) une formation spéciale a été dispensée à certains bataillons des forces de police de l’État sur la gestion des foules de grande taille et l’emploi de méthodes plus efficaces de gestion des foules ; et iv) en cas de nécessité, des services d’ambulance et autres ont été assurés aux personnes qui en avaient besoin. La Cour suprême de l’Inde a reconnu le fait que des exécutions extrajudiciaires se produisaient tout en constatant que la police indienne a une tâche délicate à remplir dans une société où s’enracinent de nombreux criminels. Ainsi, dans l’affaire People ’ s Union for Civil Liberties and Another v. State of Maharashtra and Others, elle a défini une procédure type pour la conduite d’enquêtes approfondies, efficaces et indépendantes dans les affaires de décès consécutifs à un contact avec la police. La loi de 1978 sur les pouvoirs spéciaux des forces armées (Jammu-et-Cachemire) i) désigne certains lieux comme des lieux interdits et des zones protégées ; et ii) interdit la diffusion de certains documents susceptibles de perturber l’harmonie communautaire, sectaire ou régionale ou de troubler l’ordre public. La loi ne se borne pas à définir les motifs pour lesquels quelqu’un peut être placé en détention, motifs qui doivent être communiqués à toute personne visée par une décision de placement en détention, elle prévoit aussi des motifs de révocation de ces décisions et permet la mise en liberté provisoire des personnes concernées, lorsqu’une telle mesure protège la liberté individuelle, même dans les contextes difficiles. Les règles fixées par la loi en matière d’arrestation et de détention cherchent donc à équilibrer un objectif double : maintenir la sûreté et la sécurité des citoyens et garantir l’absence de mesures arbitraires.

85.La Constitution indienne et les lois qui en découlent prévoient des recours appropriés, dont l’ordonnance d’habeas corpus qui garantit la liberté de chaque individu en Inde. D’autres moyens de recours sont aussi prévus dans les lois pénales. La Commission nationale des droits de l’homme s’est saisie de sa propre initiative de cas de disparitions. L’Inde maintient la plus ferme des positions en ce qui concerne la torture, le viol ou la violence sexuelle par des acteurs étatiques, y compris les membres des forces de sécurité. Les dispositions du Code pénal relatives à certaines formes aggravées de viol couvrent le viol par un membre des forces armées.

Droit à la vie et interdiction de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et liberté et sécurité de la personne (art. 6, 7, 9 et 14)

Réponse au paragraphe 17 de la liste de points

86.En Inde, la peine de mort est considérée comme un châtiment exceptionnel qui n’est imposé que dans les cas les plus rares, lorsque toute autre possibilité est incontestablement exclue, dans la mesure où le crime qui a été commis est odieux au point que la société est atteinte dans sa conscience. Ce principe, qui a été développé par la jurisprudence, s’applique à l’ensemble des dispositions pénales où la peine de mort fait partie des peines prescrites. La peine est commuée en réclusion à perpétuité si elle est prononcée à l’égard d’une femme enceinte, et ne peut être prononcée à l’égard d’un enfant en conflit avec la loi.

87.Dans les cas où elle est prononcée, il existe des recours multiples dont le condamné peut se prévaloir au niveau judiciaire et au niveau de l’exécutif pour faire examiner sa condamnation. Le Président de l’Inde et les Gouverneurs des États ont le pouvoir d’accorder la grâce, le sursis ou la remise de la peine, ou encore de suspendre, de remettre ou de commuer la condamnationà mort, responsabilité constitutionnelle importante confiée au plus haut responsable de l’exécutif. La Constitution indienne prévoit également une disposition permettant de déposer une requête en révision corrective, qui permet à la Cour suprême de l’Inde de réexaminer ses propres arrêts ou décisions. Le Gouvernement a aussi publié conformément à l’arrêt Shatrughan Chauhan & Anr. v. Union of India & Ors. des lignes directrices sur la protection des intérêts des condamnés à mort, qui doivent bénéficier, entre autres, d’une aide judiciaire, d’une procédure rapide pour la soumission du recours en grâce au Président de l’Inde, et de la prescription d’une période minimale pour l’exécution de la condamnation à mort.

88.L’Inde a adopté la position que la peine capitale obligatoire est inconstitutionnelle car elle « va à l’encontre des garanties légales qui donnent au pouvoir judiciaire le pouvoir discrétionnaire d’imposer la peine de mort. Elle constitue donc un abus de droit par rapport à la notion de contrôle juridictionnel qui est une des caractéristiques fondamentales de la Constitution ». Des modifications sont intervenues pour les peines attachées à certains crimes qui font intervenir des formes aggravées de viol et pour lesquels la peine de mort est désormais une des peines possibles.

89.Le cadre de justice pénale de l’Inde est fermement établi sur les principes de l’égalité et de la non-discrimination. Le fait de classer les accusés et les détenus en fonction de leur appartenance à une religion, une caste ou une classe est étranger, en Inde, à l’institution de la justice pénale.

Réponse au paragraphe 18 de la liste de points

90.L’Inde condamne toute forme de torture. La Cour suprême, dans l’affaire Sube Singh v. State of Haryana & Ors., a fait valoir que la torture en détention devait être abordée sous deux angles, celui des mesures correctives et celui de la prévention.Du côté de la prévention, le Gouvernement centre son attention sur les points suivants: i) la formation de la police doit être réorientée pour faire évoluer les mentalités et le comportement des policiers concernant les enquêtes, afin qu’ils reconnaissent et respectent les droits de l’homme, et adoptent des méthodes d’enquête rigoureuses et scientifiques. ii) Le comportement des policiers subalternes devrait être soumis à une surveillance et un contrôlepermanents de leur hiérarchie afin d’empêcher la violence en détention et d’imposer le respect des méthodes d’enquête licites normales. iii) L’informatisation, l’enregistrement vidéo et des méthodes modernes de tenue des dossiers devraient être adoptés pour empêcher les manipulations, les ajouts, les substitutions et les antidatations concernant toute information et tout rapport d’enquête et apporter de la transparence dans l’action des policiers. Diverses lignes directrices publiées par la Commission nationale des droits de l’homme ont conduit à mettre en place un mécanisme de responsabilité au niveau i) des cadres supérieurs de l’administration et de la police; ii) du personnel de la santé publique ;et iii) de la conduite de l’instruction par un magistrat des affaires de décès en cours de détention.

91.Le Gouvernement indien a publié une circulaire sur les décès en cours de détention qui reprend les lignes directrices publiées par la Commission nationale des droits de l’homme concernant divers aspects des décès en cours de détention. D’après ces lignes directrices, le magistrat de district et le commissaire de police de chaque district doivent signaler à la Commission des droits de l’homme tout cas de décès en cours de détention sous la responsabilité de la police ou de la justice dans un délai de vingt-quatre heures après les faits ou à compter du moment où les fonctionnaires ont eu connaissance des faits, faute de quoi il y aurait présomption de tentative de dissimulation de l’incident. La Commission a publié d’autres lignes directrices concernant le filmage et la photographie de l’examen post-mortem dans les cas de décès en cours de détention. Elle y indique les précautions à prendre avant de procéder à l’examen post-mortem. Des consignes strictes sont formulées, imposant d’enregistrer la voix du médecin et de prendre des photographies en couleur de tout le corps et de certaines parties de celui-ci en particulier. Des instructions analogues concernant les décès en prison ont aussi été publiées par la Commission.

92.La Commission nationale des droits de l’homme a publié d’autres lignes directrices à observer dans la conduite de l’instruction par un magistrat des affaires de décès en cours de détention ou pendant une opération de police. La procédure doit être menée dans les meilleurs délais, sans retard injustifié, pour examiner des aspects comme la nature des circonstances du décès, le déroulement des faits ayant conduit au décès, les causes du décès, la personne à qui est attribuée la responsabilité du décès et l’adéquation du traitement médical. Il est demandé au magistrat d’examiner le rapport d’enquête, le rapport d’autopsie et les autres rapports de cette nature.

93.Dans l’affaire Prakash Singh and Ors. v. Union of India and Others, la Cour suprême a demandéque soit instituée à l’échelon du district une autorité chargée d’examiner les plaintes contre la police pour examiner les plaintes contre les officiers de police (de rang équivalent à celui de commissaire de police adjoint), une structure analogue devant être mise en place à l’échelon de l’État. La Commission nationale des droits de l’homme s’emploie à sensibiliser les fonctionnaires au moyen d’ateliers et de séminaires afin de garantir une meilleure protection des droits de l’homme.

94.La loi ne reconnaît pas aux personnes qui se disent victimes d’arrestation ou de détention illégales de droit à réparation opposable à l’État. Les tribunaux indiens ont cependant reconnu ce droit, comme il ressort des observations de la Cour suprême dans l’affaire Nilabati Behra v. State of Orissa : « la réparation sous forme d’indemnisation pécuniaire ... concernant les droits inaliénables garantis à l’article 21 de la Constitution fait partie des recours existant dans le droit public ». Dans un nombre limité de cas, les tribunaux et la Commission nationale des droits de l’homme ont ordonné le versement d’une indemnisation, et l’État a dûment donné suite.

95.La loi indienne reprend les prescriptions de l’article 7 du Pacte. L’Inde a signé mais n’a pas ratifié la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Le cadre de la lutte contre la torture, y compris les mesures correctives dont l’Inde a fait état dans son troisième rapport périodique, est toujours appliqué intégralement. En outre, un rapport complet de la Commission juridique de l’Inde est attendu sur la question de la prévention de la torture, dont celle-ci s’est saisie.

Liberté et sécurité de la personne, et administration de la justice et procès équitable (art. 2, 7, 9 et 14)

Réponse au paragraphe 19 de la liste de points

96.Les dispositions du Code de procédure pénale relatives à l’arrestation des personnes reposent sur les principes du caractère raisonnable, de la certitude et de la nécessité. La loi prévoit que des mesures minimales de contrainte sont appliquées aux personnes arrêtées afin d’empêcher l’évasion. Elle leur garantit aussi le droit d’être représentées en justice et le droit à la libération sous caution. Soulignant l’importance primordiale des libertés individuelles, la Cour suprême, dans l’affaire DK Basu v. State of West Bengal, a défini des lignes directrices complètes concernant les arrestations. Les tribunaux indiens ont accordé une réparation pour les violations établies de droits fondamentaux, y compris le droit à la liberté. La Cour suprême a fait valoir à ce propos que « le droit à indemnisation pallie dans une certaine mesure les actes illégaux d’entités qui agissent au nom de l’intérêt public et s’abritent pour leur protection derrière le paravent des pouvoirs de l’État ».

Réponse au paragraphe 19 a)

97.L’Inde, pays de 1,35 milliard d’habitants ayant des besoins et attentes juridiques très divers, veille à ce que chacun ait accès à l’aide juridictionnelle à travers le Comité des services juridiques de la Cour suprême, 39 Comités des services juridiques près les Hautes Cours, 36 Autorités des services juridiques au niveau des États, 670 Autorités des services juridiques à l’échelon du district et 2 277 Comités des services juridiques à l’échelon du taluk. L’article 39A de la Constitution indienne prévoit l’aide juridictionnelle gratuite afin que chaque citoyen ait la possibilité d’obtenir justice. Des Autorités des services juridiques ont été instituées en vertu de la loi de 1987 relative aux Autorités des services juridiques au niveau national, des États et des districts. Ces autorités sont chargées d’assurer divers services comme l’aide juridictionnelle, l’organisation du lok adalat, les services de médiation, la sensibilisation au droit, etc. En 2019, 11 356 et 72 915 détenus ont bénéficié d’une aide juridictionnelle au poste de police avant leur comparution au tribunal et au stade de la détention provisoire, respectivement. Pour renforcer le cadre de l’aide juridictionnelle en Inde, de nouvelles initiatives portant entre autres sur la formation et le renforcement des capacités, non seulement des avocats commis d’office, mais aussi des bénévoles paralégaux, des représentants élus des panchayats et des agents de santé en milieu rural ont été organisées à intervalles réguliers.

Réponse au paragraphe 19 b)

98.L’article 21 de la Constitution s’applique au même titre à tous les citoyens et aux étrangers, assurant une garantie contre la privation arbitraire de la vie et de la liberté personnelle. L’Inde continue d’assurer un accès consulaire aux ressortissants étrangers détenus/arrêtés en Inde. Le Ministère des affaires étrangères est l’institution centrale à cet égard. Pour de plus amples renseignements sur l’accès consulaire, voir le paragraphe 118 du présent rapport.

Réponse au paragraphe 19 c)

99.La présomption d’innocence est un principe cardinal de la jurisprudence pénale en Inde. Cependant, dans certaines circonstances spéciales en nombre limité, expressément indiquées dans les lois correspondantes, la présomption d’innocence a été supprimée. Ainsi, l’absence de présomption d’innocence au titre de la loi sur la prévention des activités illicites est limitée à un nombre très réduit de cas où un lien précis a été établi entre l’infraction commise et l’accusé, de manière scientifique, par des experts.

Réponse au paragraphe 19 d)

100.Conformément à la loi sur la preuve, ne peuvent être retenus comme preuve tous les aveux faits à des policiers, à moins que des lois spéciales ne le permettent. Quoi qu’il en soit, aucun aveu obtenu sous la contrainte ne peut être retenu comme preuve devant un tribunal. Pour empêcher que de telles pratiques ne se produisent pendant les enquêtes, la Cour suprême a formulé des instructions détaillées concernant l’installation de caméras de télévision en circuit fermé dans les postes de police.

Réponse au paragraphe 19 e)

101.L’Inde est partie à la Convention relative aux droits de l’enfant et en respecte le principe consistant à faire de l’intérêt supérieur de l’enfant la considération primordiale dans toutes les décisions qui concernent les enfants. La loi de 2015 sur la justice pour mineurs (soins et protection des enfants) a été adoptée pour assurer systématiquement des soins et une protection aux enfants en conflit avec la loi. Lorsqu’un enfant âgé de 16 ans et plus est présumé avoir commis un crime odieux, alors seulement dans ce cas le Conseil de la justice pour mineurs constitué en application de la loi procède-t-il à une évaluation préliminaire de sa capacité mentale et physique de commettre un tel acte, de sa capacité de comprendre les conséquences de son acte et des circonstances dans lesquelles le crime est présumé avoir été commis. À l’issue de cette investigation, si le Conseil décide que l’enfant doit être jugé comme un adulte, il peut renvoyer le procès de l’affaire au tribunal pour enfants. Ce tribunal décide alors s’il convient de juger l’enfant comme un adulte. En tout état de cause, la peine capitale ou la réclusion à perpétuité (sans possibilité de libération) ne peuvent être prononcées à l’égard d’un enfant en conflit avec la loi.

Réponse au paragraphe 20 de la liste de points

Réponse au paragraphe 20 a)

102.La vie et la liberté des individus sont garanties par la Constitution indienne et les lois qui en découlent. Dans l’affaire Hussainara Khatoon and Others v. Home Secretary, State of Bihar, la Cour suprême a fait observer qu’une procédure qui maintient un grand nombre de personnes en détention sans procès pendant aussi longtemps ne peut absolument pas être considérée comme « raisonnable, juste ou équitable » et donc conforme aux critères de l’article 21. Un détenu peut se prévaloir des dispositions relatives à la mise en liberté sous caution qui lui sont applicables. En outre, le Code de procédure pénale a été modifié en 2005 par l’ajout de l’article 436A qui soumet la détention d’un détenu provisoire à un délai de prescription. Il a aussi été modifié en 2006 pour adopter le plaider-coupable, négociation se déroulant avant le procès.

103.Dans l’affaire Hussain & Anr. v. Union of India, la Cour suprême a demandé aux Hautes Cours d’ordonner aux juridictions inférieures de traiter les demandes de mise en liberté sous caution, les procès accélérés et les libérations sous caution personnelle dans des délais fixes et d’établir à cet effet des mesures permettant de mener à bien rapidement l’enquête et le procès et d’en contrôler le bon déroulement.

104.Un manuel pénitentiaire type, élaboré selon les instructions données par la Cour suprême de l’Inde dans le document In Re: Inhuman conditions in 1382 prisons, indique entre autres quels services doivent être assurés aux personnes en attente de jugement, à savoir les services d’un conseil,un entretien avec des avocats, la signature de la procuration (vakalatnama)et la présentation au tribunal de la demande d’octroi d’une aide juridictionnelle dont le coût sera pris en charge par l’État. L’Autorité nationale des services juridiques joue un rôle important dans la réduction de la surpopulation carcérale. Elle assure des services juridiques gratuits à tous les détenus en attente de jugement dans le cadre de consultations juridiques organisées dans tous les centres de détention du pays et encourage aussi le plaider-coupable comme moyen de régler rapidement les affaires.

Réponse au paragraphe 20 b)

105.Le droit pénal indien prévoit comme mesures de substitution à la détention la mise en liberté provisoire et la mise en liberté sous caution. Le point de vue adopté a été bien résumé par la Cour suprême dans l’affaire State of Rajasthan v. Balchand, où la Cour a noté que « la règle de base, en quelques mots, est la suivante : libération provisoire plutôt que détention ». Dans l’affaire Sanjay Chandra v. Central Bureau of Investigation, la Cour a aussi noté que « [l]es buts principaux de la mise en liberté provisoire dans les affaires pénales sont d’épargner l’emprisonnement à l’accusé, d’épargner à l’État la charge de sa détention dans l’attente du procès, et parallèlement, de maintenir concrètement l’accusé sous la garde du tribunal, que ce soit avant ou après la condamnation, pour s’assurer qu’il se soumettra à l’autorité du tribunal et sera présent chaque fois qu’il aura à l’être ».

Réponse au paragraphe 20 c)

106.Le portail en ligne de l’administration pénitentiaire et la Commission d’examen de la situation des prévenus constituent deux mesures administratives de mise en application de l’article 436A du Code de procédure pénale. Dans le portail en ligne de l’administration pénitentiaire a été intégré l’ensemble des activités en rapport avec la gestion des prisons et des détenus, y compris la numérisation et l’informatisation des renseignements sur les personnes placées en détention. La Commission d’examen de la situation des prévenus a pour mission d’identifier périodiquement les prévenus qui répondent aux conditions requises pour bénéficier d’une mise en liberté provisoire conformément à l’article 436A du Code de procédure pénale. En 2020, la Commission d’examen de la situation des prévenus avait procédé à 315 identifications, 2 201 détenus en attente de jugement ayant accompli plus de la moitié de leur peine maximale possible avaient été identifiés, et 759 détenus en attente de jugement avaient été mis en liberté sur recommandation de la Commission. En 2014, la décision de la Cour suprême dans l’affaire Bhim Singh v. Union of India a donné un élan supplémentaire à l’application des principes de l’article 436A. Elle a ordonné au juge compétent de siéger pendant un certain temps pour identifier les détenus en attente de jugement qui ont accompli la moitié de la peine maximale qui leur aurait été infligée s’ils avaient été condamnés, en vue de leur mise en liberté immédiate. Le portail en ligne de l’administration pénitentiaire a beaucoup facilité la tâche aux autorités pénitentiaires pour ce qui est d’établir les liste de détenus dont le cas doit être examiné par la commission, ce qui a rendu le système plus robuste et transparent. Le Gouvernement indien a accordé à tous les États une subvention de 1 milliard de roupies pour la numérisation des dossiers pénitentiaires et l’informatisation du fonctionnement de toutes les prisons du pays pour les détenus en attente de jugement libérés entre 2018-2019 et 2019-2020. Le portail en ligne de l’administration pénitentiaire est coordonné avec le Système interopérable de justice pénale, plateforme commune pour l’échange de renseignements et l’analyse de tous les secteurs du système de justice pénale (police, médecine légale, poursuites, tribunaux et prisons).

Réponse au paragraphe 20 d)

107.Le tableau ci-dessous indique le nombre de détenus en attente de jugement par rapport au nombre de condamnés depuis 2014 :

Année

Détenus en attente de jugement

Détenus condamnés

2014

282 879

131 517

2015

282 076

134 168

2016

293 058

135 683

2017

308 718

139 149

2018

323 537

139 488

2019

330 487

144 125

Source : Bureau national des registres pénitentiaires.

108.Des réformes approfondies et complètes ont été apportées au système judiciaire indien afin deréaliser le droit à un procès rapide. Ces réformes ont mis l’accent sur la rapidité du jugement, l’utilisation accrue de la technologie, l’adoption d’un processus de gestion des affaires et la mise en place d’instances parallèles. On mentionnera en particulier à cet égard les lok adalats, institués en vertu de la loi de 1987 sur les autorités des services juridiques pour promouvoir le règlement à l’amiable des litiges et les tribunaux à procédure accélérée créés en 2000 afin de permettre le traitement rapide des affaires qui sont en instance depuis longtemps.

109.Dans l’affaire Anil Rai v. State of Bihar, la Cour suprême a décidé que le jugement devait être prononcé sans retard injustifié au terme du procès. Dans l’affaire Salem Bar Association v. Union of India, elle a recommandé de lancer un système d’administration du traitement des affaires qui permette au juge ou à un auxiliaire de justice de fixer un calendrier et de suivre l’évolution des affaires de bout en bout.

110.En outre, le projet d’administration en ligne des tribunaux a été lancé en 2005 dans le but d’améliorer la productivité du système judiciaire sur les plans qualitatif et quantitatif grâce à l’adoption des technologies de l’information et de la communication (TIC). Le portail national d’administration en ligne des tribunaux, lancé en 2013 pour être un instrument clef des réformes du système judiciaire, en est actuellement à sa deuxième phase, et met l’accent en particulier sur la prestation de services par voie numérique aux justiciables, aux avocats et aux autres parties prenantes. Il prévoit aussi un service de vidéoconférence entre les tribunaux et les prisons devant faciliter l’audition des détenus en attente de jugement de 500établissements du pays.

Traitement des personnes privées de liberté (art. 10)

Réponse au paragraphe 21 de la liste de points

111.L’Inde prend au sérieux la question de la surpopulation carcérale et a adopté une stratégie à plusieurs niveaux fondée sur le texte révisé en 2015 de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela). Le Manuel pénitentiaire type, adopté en 2016, donne des orientations détaillées sur divers aspects importants de l’administration pénitentiaire, à savoir les soins médicaux, l’éducation des détenus, l’aide judiciaire, le bien-être des détenus, l’aide postpénitentiaire et la réinsertion, les femmes détenues et l’inspection formelle des établissements pénitentiaires. Le manuel prévoit la possibilité d’inspections informelles aussi bien que formelles et l’obligation de faire rapport aux autorités compétentes.

112.Divers programmes publics sont en place, parmi lesquels la Mission nationale pour l’administration de la justice et la réforme du droit, lancée en 2009, a adopté des mesures innovantes pour le traitement rapide des affaires, visant en particulier à améliorer l’accès à la justice, réduire les retards et les arriérés, renforcer la responsabilité grâce à des changements structurels. Dans le cadre du programme de modernisation des prisons, 119 nouvelles prisons, 1 572 quartiers supplémentaires dans des établissements pénitentiaires existants et 8 568 logements destinés au personnel pénitentiaire ont été construits.

113.Diverses mesures ont été prises pour améliorer les conditions de détention en Inde. Des circulaires et avis des Ministères et des lignes directrices de la Cour suprême paraissant à intervalles réguliers ont pour objet d’améliorer la situation dans les prisons concernant l’hygiène et d’autres questions médicales. Des ateliers de formation et de sensibilisation sont organisés à l’intention du personnel pénitentiaire sur l’action préventive et la lutte contre le VIH/sida.

114.Des mesures analogues ont été prises pour améliorer la santé mentale des détenus. Dans le document Re: Illegal Detention of Machal Lalung, la Cour suprême a formulé des orientations générales visant à éviter le séjour prolongé des malades mentaux dans les hôpitaux psychiatriques. Elle y donne compétence au tribunal ou au juge pour prendre les mesures appropriées. Dans l’affaire Shatrughan Chauhan and Anr. v. Union of India & Ors, la Cour suprême a décidé que la santé mentale des condamnés à mort devait être évaluée régulièrement. Pour veiller à la santé mentale des détenus, des programmes d’atténuation du stress sont régulièrement organisés. La Commission nationale des droits de l’homme est chargée de mener des inspections indépendantes des conditions des centres de détention et de garantir la protection des droits de l’homme des détenus. Par ailleurs, le Ministère de l’intérieur collabore avec l’Institut national de la santé mentale et des neurosciences de Bangalore pour étudier ces questions. À titre d’exemple, deux manuels ont été élaborés par l’Institut sur la gestion des problèmes de santé mentale chez les détenus pendant la pandémie de COVID-19 en consultation avec les autorités pénitentiaires.

Traitement des étrangers, y compris les réfugiés et les demandeurs d’asile (art. 7, 9, 13 et 24 (par. 3))

Réponse au paragraphe 22 de la liste de points

115.La Constitution indienne garantit à toutes les personnes, et non aux seuls citoyens, les droits fondamentaux que sont notamment le droit à la vie, la liberté individuelle, l’égalité devant la loi et l’égale protection de la loi. Sont exclus cependant le droit de résider et de s’installer dans le pays, qui ne valent que pour les citoyens du pays. Conformément à l’article 9 du Pacte, nul ne peut être privé, si ce n’est conformément à la procédure prévue par la loi, de ses droits, protégés par la Constitution indienne, à la vie et à la liberté.

116.Si l’Inde n’a pas adopté de législation nationale sur la question des réfugiés, tous les ressortissants étrangers, y compris les réfugiés et les demandeurs d’asile, relèvent des dispositions de la loi de 1946 sur les étrangers, de la loi de 1939 sur l’enregistrement des étrangers, de la loi de 1920 sur les passeports (entrée en Inde) et de la loi de 1955 sur la citoyenneté, des règles, ordonnances et instructions générales adoptées en application de ces textes. Conformément aux dispositions de l’article 13 du Pacte et aux déclarations faites par l’Inde à cet égard au moment de son adhésion, l’Inde ne procède à aucune expulsion d’étrangers en dehors du cadre des lois applicables.

117.L’Inde a une longue tradition d’accueil des réfugiés et applique les principes du rapatriement librement consenti et de la réinstallation conformément à ses lois nationales et d’un commun accord avec le pays concerné. Le nombre de réfugiés originaires des pays limitrophes qui peuvent regagner librement leur pays d’origine, en toute sécurité et selon les accords conclus, est en augmentation.

118.Chaque étranger qui entre ou séjourne en Inde doit être en possession de documents valides et d’un permis délivré par les autorités compétentes (passeport et visa). L’Inde attache une haute importance à ce que les missions étrangères disposent d’un accès consulaire rapide pour leurs ressortissants détenus en Inde. Les Gouvernements des États sont tenus d’informer immédiatement le Ministère des affaires étrangères lorsqu’un étranger est arrêté ou placé en détention en tout lieu du pays, et le Ministère en informe alors à son tour l’ambassade étrangère concernée.

119.Si l’Inde reste fidèle au principe de la protection humanitaire des réfugiés, elle continue de considérer que cet effort humanitaire doit être compatible avec ses objectifs liés au bien-être de ses citoyens et à la sécurité nationale. Cette position est conforme à l’article13 du Pacte. La question de l’expulsion des migrants en situation irrégulière de l’État rakhine a été examinée par la Cour suprême de l’Inde dans l’affaire Mohammad Salimullah and Anr . v . Union of India et les juges n’ont trouvé aucun motif de contester la décision. Par ailleurs, d’autres affaires relatives au retour de migrants en situation irrégulière de l’État rakhine sont actuellement en instance.

120.L’Inde propose une aide au développement et une aide humanitaire aux personnes déplacées, en particulier dans la région voisine. Elle a la ferme conviction qu’un retour à la normale n’est possible que si les personnes déplacées peuvent rentrer en toute sécurité, rapidement et durablement au Myanmar dans l’État rakhine, et que la seule solution à long terme à la situation est un développement rapide sur le plan socioéconomique et au niveau des infrastructures, qui aiderait toutes les populations vivant dans cet État. À cet égard, l’Inde a signé un mémorandum d’accord portant sur le programme de développement pour l’État rakhine avec le Gouvernement du Myanmar en décembre 2017, et réservé un montant de 5millions de dollars des États-Unis par an au développement économique de l’État rakhine. Pour ceux qui retournent au Myanmar, il a été construit et livré 250 maisons modernes préfabriquées en juillet 2019.L’Inde réalise actuellement la deuxième phase du programme conclu en 2020, qui inclut des projets sur l’approvisionnement en eau, les centrales solaires, la construction de routes, etc. L’Inde participe aussi au développement, dans l’État rakhine, du port de Sittwe, ce qui renforce le commerce et la connectivité. Il importe de noter que tous les projets engagés par l’Inde dans l’État rakhine sont sous forme de dons et sont axés sur le bien-être de la population ; il n’y a donc pas d’intérêt commercial en jeu. Afin d’aider le Bangladesh, qui accueille lui aussi 1 million de personnes déplacées sur son territoire, le Gouvernement indien a livré cinq tranches d’aide distinctes, comprenant des produits alimentaires, des médicaments, des vêtements, des vêtements d’hiver, du combustible de cuisson et des fourneaux, ainsi que des lampadaires solaires, pour un montant de près de 7millions de dollars.

121.Les réfugiés ou les demandeurs d’asile ne subissent aucune discrimination dans l’accès à l’enregistrement des naissances en Inde. On notera toutefois que la citoyenneté est régie en Inde par les dispositions de la loi sur la citoyenneté de 1955 et de ses règlements d’application. Dès lors, la citoyenneté n’est pas accordée automatiquement aux enfants nés en Inde de non-ressortissants.

Droit au respect de la vie privée (art. 17)

Réponse au paragraphe 23 de la liste de points

122.Si le droit à la vie privée est reconnu comme un droit inaliénable qui fait partie intégrante du droit à la vie, à la liberté individuelle et à la dignité consacré à l’article 21 de la Constitution indienne, ce n’est pas un droit absolu en soi. Néanmoins, un ensemble de textes de loi, dont le Code pénal indien, la loi de 1885 sur le télégraphe, la loi de 1898sur les postes, la loi de 2000sur les technologies de l’information, et la loi sur le droit à l’information, offre un cadre interdépendant pour la protection de la vie privée dans certains cas et pour la protection des données. Pour de plus amples renseignements voir le paragraphe 127 du présent rapport.

123.Ces dernières années, au titre de ses initiatives pour la bonne gouvernance, l’Inde a pris de nombreuses mesures visant améliorer les services par l’utilisation des technologies. Le programme phare est le projet Aadhaar lancé en application de la loi de 2016 sur l’identifiant Aadhaar (versement ciblé d’allocations et d’autres subventions, prestations et services). Le but de la loi est de permettre aux personnes résidant en Inde d’avoir accès aux subventions, prestations et services de façon efficace, transparente et ciblée grâce à l’attribution d’un identifiant unique fondé sur la biométrie. L’identifiant Aadhaar peut être utilisé comme adresse financière permanente, ce qui facilite l’inclusion financière des secteurs défavorisés et plus vulnérables de la société dans le filet de sécurité économique assuré par l’État. Il s’agit donc d’un outil de justice distributive et d’égalité. Le numéro est aléatoire et ne peut être utilisé pour profiler les personnes en fonction de la caste, de la religion, des revenus, de l’état de santé ou de la situation géographique. La base de données Aadhaar n’est reliée à aucune autre base de données, ni à aucun renseignement stocké dans d’autres bases de données. Son seul but est la vérification de l’identité de la personne qui reçoit une subvention, une prestation ou un service, avec le consentement du détenteur de l’identifiant Aadhaar.

124.L’Autorité chargée de l’identifiant unique, organe officiellement chargé du projet Aadhaar, a adopté des protocoles de sécurité et de stockage stricts pour la protection des données Aadhaar. Les données de tous les détenteurs d’identifiant Aadhaar sont protégées au moyen de technologies de cryptage évoluées dans un coffre-fort de données de haute sécurité, le Dépôt central des données sur l’identité. Toutes les données d’accès sont correctement enregistrées. En 2018, une chambre constitutionnelle de la Cour suprême de l’Inde a confirmé que le cadre Aadhaar répondait aux critères constitutionnels de légalité, de légitimité et de proportionnalité. Jusqu’à présent, il n’y a pas eu de cas de violation de la base de données Aadhaar ou de divulgation publique de dossiers de cette base de données.

125.Dans une décision historique, un collège de neuf juges de la Cour suprême,siégeant en chambre constitutionnelle dans l’affaire Justice K.S.Puttuswamy (Retd.) v. Union of India (2017), a reconnu le droit à la vie privée comme un droit fondamental et estimé que toute limitation de ce droit devait répondre au critère triple de la légalité, de but légitime et de la proportionnalité. Pour arriver à cette conclusion, la Cour s’est appuyée sur le Pacte et a noté que « [l’]adhésion de l’Inde à un ordre international fondé sur le respect des droits de l’homme a été mis en exergue parallèlement aux articles précis de la Déclaration universelle des droits de l’homme et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui consacrent le droit à la vie privée. De l’avis de la Cour, le droit international doit être interprété comme faisant partie du droit interne en l’absence de législation contraire à celui‑ci et, plus important encore peut-être, le sens des garanties constitutionnelles doit être éclairé par la teneur des conventions internationales auxquelles l’Inde est partie ».

126.Le projet de loi de 2019 sur la protection des données personnelles, qui en est à une étape avancéede son examen par une commission parlementaire mixte, vise à établir un cadre juridique complet pour la protection, le traitement et le stockage des données personnelles. De même, un comité d’experts a été constitué en 2019 par le Ministère de l’électronique et des technologies de l’information avec pour mission de délibérer sur les questions relatives aux données à caractère non personnel, et de suggérer un cadre de gouvernance systématique pour réglementer ces données. Le comité a publié son rapport révisé en 2020 et le public a été invité à communiquer ses observations jusqu’au 31janvier 2021. Actuellement, l’utilisation et le transfert des données sensibles à caractère personnel des citoyens sont régis par les règles de 2011 concernant les technologies de l’information, relatives aux pratiques et procédures raisonnables de sécurité et aux données ou informations sensibles à caractère personnel.

127.Le cadre régissant les mesures d’interception légale est défini par la loi de 1885 sur le télégraphe et la loi de 2000 sur les technologies de l’information. Ces mesures ne peuvent être prises qu’en cas de danger public ou pour protéger la sûreté publique, quand on l’estime nécessaire ou opportun, la souveraineté et l’intégrité de l’Inde, la sûreté de l’État, les relations amicales avec les États étrangers ou l’ordre public, ou pour réprimer l’incitation à commettre une infraction. Elle doivent être prises en stricte conformité avec la loi et uniquement par les organismes chargés de l’application de la loi dûment habilités. Pour renforcer la protection contre les immixtions illégales et arbitraires, les décisions d’interception sont périodiquement évaluées par des comités d’examen indépendants établis conformément à la loi. Dans l’affaire PUCL v. Union of India, la Cour suprême a clairement établi que le contrôle judiciaire préalable n’était pas requis avant d’intercepter des conversations téléphoniques. Néanmoins, des garanties de procédure sont nécessaires pour empêcher les atteintes au droit à la vie privée consacré par l’article 21 de la Constitution indienne.

Liberté de conscience et de conviction religieuse, non-discrimination, et interdiction de l’appel à la haine nationale, raciale et religieuse (art. 2, 18, 20 et 26)

Réponse au paragraphe 24 de la liste de points

128.L’Inde est un État laïque, caractérisé par la tolérance religieuse, l’égalité de traitement de tous les groupes religieux et le respect de toutes les croyances et religions. Toutes les religions bénéficient de la même protection constitutionnelle, sans faveur ni discrimination. La laïcité est une caractéristique fondamentale de la Constitution indienne. Celle-ci protège la liberté de religion et de conscience, et le droit de tous les individus de professer, pratiquer et propager librement leur religion, sous réserve de considérations d’ordre public, de moralité et de santé. À cet égard, des lois peuvent être adoptées pour réglementer ou restreindre toute activité laïque − économique, financière, politique ou autre − pouvant être associée à la pratique religieuse.

129.Le Code pénal sanctionne des actes comme le fait d’encourager l’hostilité entre différents groupes pour des motifs liés à la religion, celui de commettre un acte délibéré et malveillant destiné à blesser le sentiment religieux de tout groupe social en insultant sa religion ou ses croyances religieuses, et celui de se livrer à des actes préjudiciables au maintien de l’intégration et de l’harmonie de la nation. Cette disposition du Code pénal est conforme au paragraphe 2 de l’article 20 du Pacte.

130.Conformément à l’arrêt de la Cour suprême de l’Inde dans l’affaire Tehseen S Poonawalla c. Union of India, des officiers supérieurs de la police ont été nommés agents de coordination au niveau de chaque district avec pour consigne de prendre des mesures strictes contre les membres des groupes d’autodéfense pour la protection des vaches qui commettent des actes illicites ou prennent part à des activités illicites, y compris tout acte consistant à se faire justice soi-même. D’autres mesures ont été prises, y compris la tenue régulière de réunions au niveau local, la constitution d’une équipe spéciale, l’organisation de patrouilles régulières dans les zones sensibles, des mesures actives pour freiner et arrêter la diffusion de messages irresponsables et provocants sur les médias sociaux, la constitution de tribunaux à procédure accélérée pour le traitement rapide de ce type d’affaires, et des mesures disciplinaires à l’égard des agents de l’État qui manquent à leur devoir. Le Gouvernement indien a publié des orientations détaillées sur l’harmonie entre les communautés pour la prévention et le règlement des troubles communautaires. Le Ministère de l’intérieur a aussi adressé de temps à autre aux États et aux Territoires des circulaires leur donnant pour instructions, en vue de maintenir l’ordre public, de surveiller la circulation des fausses nouvelles et des rumeurs qui risquent d’inciter à la violence, et de prendre toutes les mesures voulues pour lutter contre les incidents de lynchage collectif dans le pays et y remédier. Le Gouvernement a aussi sensibilisé le public dans le cadre des médias audiovisuels pour enrayer la menace des incidents de lynchage collectif. Il a constitué un groupe interministériel, sous la responsabilité du Ministre de l’intérieur, pour examiner la question et faire des recommandations. En outre, le Comité pour la réforme du droit pénal évalue actuellement l’opportunité d’inclure des dispositions relatives au lynchage collectif dans le Code pénal de 1860. La Commission des minorités et la Commission nationale des droits de l’homme enquêtent sur les allégations de discrimination religieuse. En outre, le Ministère des minorités et les Commissions des minorités au niveau des États sont aussi habilités à enquêter sur les allégations de discrimination religieuse.

Réponse au paragraphe 25 de la liste de points

131.L’Inde est une société multireligieuse et pluriethnique et accueille plusieurs religions, en particulier l’hindouisme, le bouddhisme, l’islam, le christianisme, le zoroastrisme, le jaïnisme et le sikhisme. Si la liberté de religion et de conscience est un droit fondamental en Inde, son exercice est subordonné au respect de l’ordre public, à la moralité, aux considérations de santé et à d’autres droits fondamentaux, de façon compatible avec le paragraphe 3 de l’article 18 du Pacte. Dans l’affaire Rev Stainislaus v. State of Madhya Pradesh, la Cour suprême de l’Inde a confirmé la validité constitutionnelle d’une loi interdisant de convertir une personne par la force, la fraude ou la séduction. Diverses lois anticonversion imposent des restrictions, et interdisent de convertir quelqu’un d’une religion à une autre en utilisant la force, l’incitation, la séduction ou des moyens frauduleux.

Liberté d’expression et liberté de réunion pacifique (art. 19 et 21)

Réponse au paragraphe 26 de la liste de points

132.La liberté d’expression fait partie en Inde du droit mixte à la liberté de parole et d’expression et est accessible aux seuls citoyens. Par nature, la liberté n’est pas absolue, et elle peut faire l’objet de restrictions raisonnables, pour protéger la souveraineté et l’intégrité de l’Inde, la sûreté de l’État, les relations amicales avec les États étrangers, l’ordre public, la décence ou les bonnes mœurs, et réprimer l’outrage à l’autorité de la justice, la diffamation ou l’incitation à commettre une infraction. Ces motifs de restriction sont explicités dans diverses lois, parmi lesquelles le Code pénal indien de 1860, la loi de 1952 sur le cinéma, etc. Il est de droit constant, en Inde, qu’aucune restriction qui serait appliquée ne doit être excessive ou disproportionnée. La procédure et les modalités d’application des restrictions doivent aussi être justes, équitables et raisonnables. Le critère général du caractère raisonnable tient compte des doctrines de la proximité, du caractère arbitraire, du caractère vague et de la proportionnalité. Cette approche est conforme à l’article 3 de l’article 19 du Pacte. Toute restriction d’un droit fondamental peut faire l’objet d’un contrôle juridictionnel par les cours constitutionnelles, y compris la Cour suprême en s’adressant directement à celle-ci.

133.La suspension des services de téléphonie mobile et d’accès à Internet, y compris au Jammu-et-Cachemire, a été imposée en vertu de la loi de 1885 sur le télégraphe et des règles de 2017 sur la suspension temporaire des services de télécommunications en cas de danger public ou pour des motifs de sécurité publique. Ces mesures étaient nécessaires et inévitables face à une situation manifeste de danger public. Elles visaient à empêcher que la situation ne soit aggravée par la désinformation et la diffusion de fausses nouvelles (y compris depuis l’étranger) qui dans tous les cas, menaçaient l’intégrité et la souveraineté de l’Inde. Dans l’affaire Anuradha Bhasin v. Union of India (2020), la Cour suprême a largement confirmé le pouvoir qui revient à l’État d’imposer des restrictions raisonnables sur les services de téléphonie mobile et d’accès à Internet sous réserve des principes prévus par la Constitution. La loi de 2000 sur les technologies de l’information, lue en parallèle avec les règles de 2009 sur les technologies de l’information (procédure et garanties applicables en cas de blocage de l’accès à l’information par le public), autorise le blocage de l’accès à l’information sur Internet. Le cadre ainsi défini soumet aussi l’exercice de ce pouvoir à un contrôle administratif et juridictionnel. Dans l’affaire Shreya Singhal v. Union of India, la Cour suprême a confirmé la constitutionnalité du cadre prévu par la loi.

134.Les règles de 2021 sur les technologies de l’information (directives à l’intention des intermédiaires et Code de déontologie des médias numériques), ont été promulguées le 25 février 2021, en remplacement des règles de 2011 sur les technologies de l’information (directives à l’intention des intermédiaires), pour répondre au problème croissant des cas de plus en plus fréquents d’utilisation abusive des médias sociaux par des criminels et des éléments antinationaux. Les intermédiaires sont aussi requis d’établir un système fiable de règlement des plaintes. Les mesures prises en vertu de ces règles sont soumises à un contrôle juridictionnel.

Réponse au paragraphe 27 de la liste de points

Réponse au paragraphe 27 a)

135.L’Inde condamne fermement les cas de harcèlement, d’intimidation, de campagnes de dénigrement et d’agression violente contre des défenseurs des droits de l’homme, des militants, des journalistes et les membres de leur famille. Elle attache la plus haute importance à la sûreté et à la sécurité de chaque citoyen, y compris les journalistes. Un programme de protection des journalistes permet l’octroi d’urgence aux journalistes ou aux membres de leur famille plongés dans la détresse à la suite du décès d’un journaliste, ou en cas d’incapacité permanente d’un journaliste, une aide à titre gracieux d’un montant maximum de 500 000 roupies. Au cours des trois dernières années (à compter de 2018-2019), 112 journalistes au total ont bénéficié de ce dispositif. Le Gouvernement indien adresse régulièrement aux États et aux Territoires de l’Union des circulaires sur la sécurité des journalistes, où il souligne en particulier la nécessité d’enquêter dans les meilleurs délais afin que la justice soit rendue rapidement.

136.Pour ce qui est des cas mentionnés d’attaques contre des écrivains et des militants, un certain nombre de personnes ont été arrêtées, les enquêtes sont achevées, les actes d’accusation correspondants ont été déposés à l’égard des responsables présumés et les procès sont en cours. Aucune interdiction de voyager n’a été imposée, contrairement à ce qui est indiqué dans la liste de points établie avant la soumission du quatrième rapport périodique de l’Inde.

137.La Commission nationale des droits de l’homme a désigné un coordonnateur spécial pour la réception et l’examen des plaintes relatives à des violations présumées des droits de l’homme concernant des défenseurs des droits de l’homme. Elle s’est aussi employée à renforcer son mécanisme de traitement des plaintes, en incitant à communiquer les plaintes en ligne et à utiliser les centres de services communs qui existent dans le pays, de façon à toucher un plus large public. Les plaintes reçues sont traitées en priorité et transmises aux autorités chargées, auprès du Gouvernement de l’État concerné, de garantir la protection des défenseurs des droits de l’homme et de réparer leurs préjudices. La Commission nationale des droits de l’homme a recommandé une réparation pécuniaire d’un montant de 1 325 000 roupies dans cinq affaires (survenues dans les États du Bihar, du Karnataka, du Bengale occidental, du Chhattisgarh et du Tamil Nadu) entre 2016 et le 31 août 2020. Toutefois, la remise en liberté des défenseurs des droits de l’homme est une question qui ressort de la compétence des tribunaux concernés. Par ailleurs, des lignes d’appel gratuites ont été créées pour assurer l’assistance nécessaire aux défenseurs des droits de l’homme, aux ONG, aux membres de la société civile, etc. de façon qu’ils aient facilement accès aux services de la Commission en cas de violation présumée des droits de l’homme. Des mesures sont aussi prises pour sensibiliser les fonctionnaires à cet égard au moyen d’ateliers, de séminaires et de retraites.

Réponse au paragraphe 27 b)

138.Les lois indiennes reconnaissent les droits et libertés mais des restrictions raisonnables peuvent s’appliquer. Les dispositions sur l’arrestation et la détention de lois comme la loi sur la sécurité nationale, entre autres, ont été adoptées pour obtenir un équilibre entre la liberté des citoyens et la sécurité de l’État. Un système solide de freins et contrepoids sous le contrôle d’un pouvoir judiciaire indépendant est prévu pour empêcher toute utilisation abusive et impropre de ces lois. À titre d’exemple, la Cour suprême, dans l’affaire Rajat Sharma and Anr. v. Union of India and Others, a statué que le fait d’exprimer un point de vue qui conteste une décision prise par le Gouvernement central lui-même ne peut être considéré comme un acte séditieux.

Réponse au paragraphe 27 c)

139.La mesure prévue à l’article 144 du Code de procédure pénale, qui confère des pouvoirs à certains fonctionnaires, vise à préserver l’ordre public. Cette ordonnance peut faire l’objet d’un contrôle juridictionnel, ce qui est un recours très efficace pour toute personne qui s’estimerait lésée par la décision. Dans l’affaire Anuradha Bhasin v. Union of India, la Cour suprême de l’Inde a résumé clairement la position juridique selon laquelle l’article en question vise essentiellement à corriger et à prévenir le danger considéré. Le juge doit équilibrer les droits et les restrictions sur la base du principe de la proportionnalité de façon à ne pas empêcher l’expression légitime d’une opinion ou d’un grief concernant le non‑respect de droits démocratiques.

Réponse au paragraphe 27 d)

140.Le Gouvernement du Tamil Nadu a nommé une commission d’enquête pour examiner les causes et les circonstances qui ont amené les forces de l’ordre à ouvrir le feu à Thoothukudi, déterminer s’il a été fait un usage approprié de la force compte tenu des circonstances et d’établir si des excès ont été commis par les policiers. En outre, le Gouvernement de l’État prend des mesures consistant par exemple à offrir un emploi et une aide financière aux citoyens qui ont été touchés par les violences, à retirer les plaintes déposées contre divers partis politiques et à délivrer des certificats de non-objection aux jeunes impliqués dans l’affaire afin qu’ils puissent postuler à un emploi ou poursuivre leurs études.

141.Dans l’état du Jammu-et-Cachemire, des fusils à plomb ont été utilisés pour maîtriser la foule quand les manifestations violentes et les émeutes ont porté atteinte à l’ordre public. Ces armes ont été utilisées en dernier recours, dans les cas les plus exceptionnels, pour maîtriser la situation de violence en cours. De plus, elles ont été utilisées dans le respect le plus strict des instructions permanentes en vigueur et en présence de supérieurs hiérarchiques et de hauts magistrats. Les instructions permanentes prescrivent d’utiliser un déflecteur permettant que le tir arrive sous la taille de façon à blesser le moins possible les émeutiers et les manifestants violents. Dans l’affaire J&K High Court Bar Association vs Union of India, la Haute Cour du Jammu-et-Cachemire a rejeté les allégations d’utilisation illégale et excessive des fusils à plomb. Conscient du nécessaire équilibre entre la liberté de parole et d’expression des citoyens et la sécurité de l’État, le Gouvernement indien a constitué un comité d’experts en 2016 pour étudier d’autres solutions possibles en remplacement des pistolets à plomb. Le Comité a adressé ses recommandations au Gouvernement pour suite à donner. En conséquence, il a été décidé que des grenades de maintien de l’ordre de divers types (aveuglantes/assourdissantes et lacrymogènes) peuvent être utilisées pour disperser des manifestants violents illégaux avant l’emploi de fusils à plomb.

Liberté d’association (art. 22)

Réponse au paragraphe 28 de la liste de points

142.La liberté de former des associations est accordée à tous en Inde conformément aux lois applicables. La loi de 2010 sur la réglementation des contributions étrangères a pour objet de réglementer l’acceptation et l’utilisation de contributions ou de dons de l’étranger par des particuliers, des associations et des entreprises en Inde.

143.Les ONG enregistrées ou ayant obtenu l’accord préalable du Gouvernement central conformément à la loi sur la réglementation des contributions étrangères peuvent recevoir des contributions ou des dons de l’étranger. Ces contributions peuvent être utilisées à un programme culturel, économique, éducatif, religieux ou social précis. Lorsque, sur la base des éléments communiqués par les organismes de sécurité, et après examen du dossier, des violations sont constatées, une procédure est engagée à l’égard des auteurs présumés dans les formes prévues par la loi. Selon la gravité de l’infraction, les mesures suivantes peuvent notamment être prises : suspension de l’autorisation accordée selon la loi sur la réglementation des contributions étrangères, ou annulation de celle-ci en cas de circonstances aggravantes ; ouverture de poursuites ; ou passage du bénéficiaire ou du donateur étranger à la catégorie des organisations soumises à la procédure d’accord préalable. Au 23 août 2021, 22 716 associations au total étaient valablement enregistrées conformément à la loi sur la réglementation des contributions étrangères.

144.Il est inexact de dire que l’Inde abuse en quoi que ce soit de la loi sur la réglementation des contributions étrangères à l’égard d’institutions et de militants des droits de l’homme. Les mesures prises à l’égard de ces institutions, en particulier Amnesty International, découlent de pratiques illicites, notamment de manquements aux règles de transparence concernant la destination des fonds, et de manquements intentionnels et répétés aux dispositions légales en vigueur, notamment aux règles de gestion des avoirs en devises imposées par la loi sur la réglementation des contributions étrangères et à la législation fiscale. L’affaire est actuellement en instance. Il est important de rappeler que toutes les institutions sont autorisées à exercer leur activité en Inde, mais qu’elles doivent le faire en respectant la loi.

145.L’Inde s’attache à garantir des conditions sûres aux personnes qui œuvrent à la promotion et à la protection des droits de l’homme. En même temps, elle considère que les défenseurs des droits de l’homme doivent agir dans le respect des lois locales et des droits garantis par la Constitution. Pour ce qui est des procédures pénales en cours visant Mme Indira Jai singh et M. Anand Grover de Lawyers Collective, l’organisation est présumée avoir reçu entre 2009 et 2015 des fonds étrangers dont elle a omis de déclarer une grande partie, en violation de la loi sur la réglementation des contributions étrangères et de la législation fiscale indienne. L’affaire est actuellement pendante devant la Cour suprême. À la dernière audience, la Cour a clairement laissé entendre que les services d’enquête compétents pouvaient examiner ce type d’affaire conformément à la loi.

Citoyenneté et prévention de l’apatridie (art. 2, 18, 24, 26 et 27)

Réponse au paragraphe 29 de la liste de points

146.Le premier Registre national des citoyens a été établi en 1951 après le recensement de 1951 ; il contenait les renseignements personnels de toutes les personnes recensées pendant celui-ci. Pour l’heure, le processus d’actualisation du Registre national des citoyens a été engagé pour le seul État d’Assam, en 2013, sur instruction de la Cour suprême. La loi sur la citoyenneté de 1955 et les règles de 2003 concernant la citoyenneté (enregistrement des citoyens et délivrance des cartes d’identité nationales) forment le cadre juridique régissant l’actualisation du Registre.

147.Le processus d’actualisation du Registre a été mené selon un mécanisme rigoureux mis en place conformément au cadre juridique en vigueur et comportant les garanties nécessaires pour protéger les droits des personnes concernées et répondre systématiquement à toute préoccupation liée à la discrimination. Des informations sur le processus ont été diffusées régulièrement par de nombreux médias numériques et traditionnels. Chacun a eu la possibilité d’être entendu à toutes les étapes du processus. Deux mille cinq cent centres et lignes d’assistance ont été mis en place dans l’État d’Assam pour aider le public. La vérification des demandes et objections concernant des omissions du Registre a été menée avec équité et transparence en ménageant des possibilités suffisantes à toutes les personnes concernées. Elle a été confiée à des fonctionnaires de rang élevé de l’administration de l’État et les travaux ont été suivis et supervisés étroitement par les juges de district. Ils devaient procéder à un contrôle de qualité dans 10% des cas au minimum. D’autres hauts fonctionnaires de rang élevéde l’administration locale ont été désignés comme observateurs pour superviser le processus de traitement des demandes et objections dans le district et devaient rendre compte directement au coordonnateur du Registre national des citoyens au niveau de l’État. En outre, le progrès des préparatifs et de l’actualisation du Registre pour l’État d’Assam a été suivi directement et étroitement par la Cour suprême.

148.Il est important de rappeler que la non-inscription du nom d’une personne dans le Registre national des citoyens ne signifiait pas que la personne concernée ait été déclarée étrangère. Toute personne en désaccord avec l’issue du traitement d’une demande ou d’une objection pouvait former un recours contre la décision devant les tribunaux des étrangers de l’État, institués conformément à l’ordonnance de 1964 relative aux tribunaux des étrangers, dans un délai de cent vingt jours. Un contrôle juridictionnel de l’ordonnance du tribunal pouvait être obtenu en formant un recours devant la Haute Cour de Gauhati, puis devant la Cour suprême de l’Inde.

149.La loi de 2019 portant modification de la loi sur la citoyenneté est un texte limité et ciblé qui réaffirme l’attachement fondamental de l’Inde à la laïcité. Elle a été promulguée par le Parlement indien à l’issue de longues délibérations dans les deux chambres du Parlement. Ses dispositions ont aussi été examinées en détail par une commission mixte parlementaire de 30 membres issus du Lok Sabha et du Rajya Sabha. La loi modificative vise à protéger les étrangers issus de six groupes minoritaires de trois pays voisins particuliers qui ont émigré en Inde du fait de persécutions religieuses. Elle ne retire la nationalité à aucun citoyen indien et ne modifie ni raccourcit aucune procédure en vigueur d’acquisition de la citoyenneté indienne par les étrangers, quel que soit le pays d’origine ou la confession ou la religion. Il est important de noter que la Constitution indienne garantit la vie et la liberté de chaque individu en Inde, qui ne peuvent être restreintes que conformément à la procédure établie par la loi. En outre, comme mentionné au paragraphe 116 du présent rapport et dans le rapport précédent, l’Inde ne procède à aucune expulsion d’étrangers en dehors de la procédure établie par la loi.

Participation aux affaires publiques (art. 25 et 26)

Réponse au paragraphe 30 de la liste de points

150.Les partis politiques sont une composante essentielle d’une démocratie parlementaire multipartite. Une méthode transparente de financement des partis politiques est indispensable à un système d’élections libres et régulières. Dans cette optique, le Gouvernement indien a adopté le système de cautionnement électoral en 2018 afin de réglementer le système de financement des partis politiques dans le pays. Celui-ci vise précisément à lutter contre la menace des fonds non vérifiés et des fonds occultes dans la politique indienne en rendant le processus de financement des élections plus transparent et plus responsable. Seuls les partis politiques enregistrés conformément à la loi de 1951 sur la représentation du peuple et qui ont obtenu au moins 1% des suffrages exprimés aux dernières élections générales à la Chambre du peuple ou à l’Assemblée législative de l’État peuvent bénéficier du cautionnement électoral.

151.Un cautionnement électoral peut uniquement être obtenu auprès d’un circuit financier officiel et encaissé par un parti politique répondant aux conditions requises, seulement au moyen d’un compte bancaire dans une banque autorisée. Cela permet de comptabiliser le détail de chaque transaction (y compris les données relatives aux donateurs et aux partis politiques bénéficiaires) et d’en assurer la traçabilité. On notera cependant que la confidentialité de l’identité des donateurs est préservée, dans la mesure où les donateurs ont manifesté par le passé de la réticence à faire des dons par chèque ou d’autres méthodes transparentes de par les répercussions négatives auxquelles ils seraient exposés une fois leur identité rendue publique. Qui plus est, divulguer le nom des donateurs et des donataires des cautionnements électoraux porterait atteinte à leur droit au respect de la vie privée. Dans l’affaire Vihar Durve v. CPIO, State Bank of India, Mumbai, la Commission centrale de l’information a suivi cette approche en statuant : « [l]a Commission souscrit à l’argument du défendeur selon lequel la divulgation du nom de donateurs et de donataires de cautionnement électoral figurant dans les livres de comptes serait potentiellement contraire aux dispositions de l’article 8 1) e) et j) de la loi de 2005 sur le droit à l’information. Il ne semble pas exister de motif d’intérêt général plus important qui l’emporterait sur le droit au respect de leur vie privée des donateurs et des donataires concernés ». Si le système du cautionnement électoral a suscité peu de contestations jusqu’à maintenant, ces affaires sont en instance actuellement devant la Cour suprême.

152.L’Inde pratique une démocratie directe et participative fondée sur le principe « à chacun une voix ». Le cadre juridique qui régit les divers aspects du processus électoral résulte de la Constitution, de la loi de 1950sur la représentation du peuple, de la loi de 1951 sur la représentation du peuple et des règles qui en découlent. La Cour suprême, dans l’affaire People ’ s Union for Civil Liberties v. Union of India, a estimé que le droit de vote est un droit légal et non un droit fondamental ou constitutionnel. Le droit de vote des personnes ayant une déficience intellectuelle ou psychosociale qui sont admises à voter est protégé par le droit applicable.

153.Le droit de se présenter aux élections des institutions du Panchayati Raj est un droit constitutionnel et statutaire et peut donc faire l’objet de restrictions raisonnables conformément à la loi. La Constitution fait despanchayats un instrument puissant pour les programmes de protection familiale et sociale en vue d’améliorer la santé de la population. L’adoption de la règle des deux enfants pour l’élection à ces institutions avait pour but de promouvoir la protection de la famille et la planification familiale.Cette mesure est conforme à la politique nationale de la population adoptée en 2000 qui a mis l’accent sur la planification familiale et l’amélioration de la qualité de vie. Elle est partie du principe que si la règle était suivie par les représentants élus, qui sont perçus comme des modèles, cela motiverait et inciterait d’autres personnes à suivre leur exemple s’agissant de la composition familiale. La restriction mentionnée s’applique à tous sans distinction. Dès lors, la loi est raisonnable et objective dans son objet, comme le Pacte y oblige. Adoptant ce point de vue, la Cour suprême, dans l’affaire Javed and others v. State of Haryana, a noté ce qui suit: «[à] notre avis, la privation du droit de se présenter à une élection lorsqu’une personne a plus de deux enfants vivants ne contrevient à aucun droit fondamental et n’outrepasse pas le critère du caractère raisonnable. Bien plutôt, il s’agit d’une mesure de principe conçue dans l’intérêt national ».

Droits des peuples autochtones (art. 27)

Réponse au paragraphe 31 de la liste de points

Réponse au paragraphe 31 a)

154.Du point de vue de l’Inde, tous les citoyens du pays sont autochtones. La Constitution désigne certaines populations comme tribus répertoriées et prévoit une action positive en leur faveur consistant à leur réserver des quotas dans les organes représentatifs, les établissements d’enseignement, les emplois, etc. Une Commission nationale des tribus répertoriées à la composition diversifiée a aussi été créée pour garantir l’efficacité de la protection et l’application des diverses mesures prévues en faveur des tribus répertoriées dans la Constitution et d’autres lois protectrices.

155.Afin d’autonomiser les tribus répertoriées et d’améliorer leur situation éducative, sociale et économique, un certain nombre d’initiatives ont été prises, notamment la création d’internats-pilotes Eklavya, la modernisation d’écoles existantes, la construction d’auberges et le renforcement des infrastructures locales et de soins de santé primaires, des programmes d’amélioration des compétences, des programmes de bourses, etc. Chaque année, ces initiatives bénéficient à environ 3 millions de bénéficiaires issus des tribus répertoriées à hauteur de 25 milliards de roupies. L’initiative pour le progrès des groupes tribaux particulièrement vulnérables soutient le développement socioéconomique de 75 de ces groupes répertoriés parmi les populations tribales les plus vulnérables. Dans le cadre de ce dispositif, les gouvernements doivent élaborer des activités pour des plans associant le développement et la préservation du patrimoine dans les secteurs de l’éducation, de la santé, de l’assainissement, de la nutrition, des moyens de subsistance, de la préservation de la culture, du patrimoine et de la reconnaissance de l’habitat. La Fédération indienne de développement du marché des produits de coopérative tribaux s’occupe de commercialiser des produits tribaux grâce à un réseau de points de vente au détail, dont le chiffre d’affaires a atteint plus de 21 millions de roupies en 2020. Quatre initiatives de développement en faveur des tribus ont été particulièrement efficaces : « écorégénération de villages tribaux par une méthode novatrice de gestion de l’eau utilisant des stupas de glace », « Swasthya : Portail sanitaire et nutritionnel pour les tribus », « Tableau de bord pour l’évaluation des initiatives pour l’autonomisation des tribus et la transformation de l’Inde » et « Autonomisation des tribus par les programmes de bourses informatisés ».

Réponse au paragraphe 31 b)

156.Notant le mode de vie distinct des tribus, la Constitution garantit une plus grande autonomie et des pouvoirs d’auto-administration aux zones désignées comme répertoriées, où le Gouverneur, assisté du Conseil consultatif des tribus, peut exclure ou adapter l’application de toute loi adoptée par le Parlement indien ou le Parlement de l’État. Afin de démocratiser encore le régime d’auto-administration des tribus dans les zones répertoriées, le Parlement a adopté la loi de 1996 sur l’extension des panchayats aux zones répertoriées, qui autorise expressément le Gram Sabha, instance composée de tous les membres adultes d’un village, à approuver les projets et les programmes de développement social et économique, à être consulté avant l’acquisition de terres, et à recommander l’octroi des baux et concessions pour l’exploitation des minéraux mineurs. La loi de 1996 confère une responsabilité particulière à l’assemblée parlementaire de l’État concerné dans la redéfinition du rôle des panchayats au niveau du district. Ces dispositions ont donc été appliquées par bon nombre de parlements locaux à des degrés divers, en obligeant à consulter leGram sabhaet à obtenir sa recommandation préalablement au transfert de terres pour des activités industrielles et autres.

157.Pour les activités extractives concernant des zones forestières, le transfert de terres est encadré par la loi de 2006 sur les tribus répertoriées et les autres peuples traditionnels des forêts. Cette loi garantit les droits individuels et collectifs des tribus répertoriées et des autres peuples traditionnels des forêts pour ce qui est, notamment, de détenir des terres forestières et d’y vivre, d’utiliser les produits forestiers mineurs, de les recueillir et d’en disposer, d’utiliser les ressources foncières communes, etc. Le Gouvernement indien a aussi publié des circulaires précisant que les baux miniers conclus par les Gouvernements des États en vertu de la loi de 1957 sur le développement et la réglementation des mines et des minéraux doivent nécessairement être conformes aux dispositions de la loi sur les peuples traditionnels des forêts. Le contexte des activités extractives impose souvent de trouver un équilibre entre le droit au développement et l’autonomie et les droits culturels des tribus et présente des situations difficiles.

Réponse au paragraphe 31 c)

158.Le nombre total de familles concernées par le projet de barrage de Sardar Sarovar est de 32 546. Toutes ces familles (4 764 du Gujarat, 4 180 du Maharashtra et 23 602 du Madhya Pradesh) ont été réinstallées et indemnisées comme il convient. Les principaux avantages accordés aux familles déplacées sont notamment la fourniture de parcelles agricoles, de biens productifs, d’indemnités de réinstallation, etc. Toutes les questions relatives à l’indemnisation, à la réadaptation et à la réinstallation des familles touchées sont administrées par l’Autorité de contrôle du bassin de la Narmada.

Réponse au paragraphe 31 d)

159.De façon générale, la vente de terres sous la contrainte est illégale, et de même, une telle vente peut être contestée en justice et déclarée nulle et non avenue par la juridiction compétente. Le transfert de terres d’un membre d’une tribu à une personne extérieure à la tribu sous la contrainte est de même interdit par les lois en vigueur dans les zones désignées comme zones répertoriées à la cinquième annexe de la Constitution. Certaines zones du district de Raigad de l’État de Chhattisgarh sont des zones répertoriées. L’article 170-B du Code des impôts fonciers de 1959 de l’État de Chhattisgarh prévoit que dans les zones répertoriées, lorsqu’il est établi qu’une personne extérieure à une tribu a dépossédé illégalement un propriétaire tribal de son bien foncier, les terres doivent être restituées. Outre les mécanismes juridiques en place pour contester la vente de terres sous la contrainte, la Commission nationale des tribus répertoriées, organe quasi judiciaire, s’est saisie activement de la question de la vente contrainte de terres tribales à des entreprises privées, et a adressé une série de recommandations au Gouvernement de l’État à ce propos.

Réponse au paragraphe 31 e)

160.L’acquisition de terres pour extraire du charbon peut intervenir dans une zone répertoriée ou une zone non répertoriée, ce qui détermine aussi le droit applicable dans ces différentes situations. La loi de 2013 sur le droit à une indemnisation équitable et à la transparence s’agissant de l’acquisition de terres, de la réadaptation et de la réinstallation est une loi générale qui soumet l’acquisition de terres à une obligation de consultation et s’applique aussi aux zones répertoriées. Elle adopte une approche équitable, transparente et consultative de l’acquisition de terres et de la réadaptation des personnes déplacées. Elle soumet le pouvoir souverain du domaine éminent à certaines limites en fonction des droits des personnes. Cela ne s’étend pas toutefois à certains objectifs qui sont fondamentaux pour les infrastructures essentielles et les besoins énergétiques de la société dans son ensemble. La loi de 2013 ne s’applique donc pas aux décisions d’acquisition relevant de la loi de 1957 sur l’acquisition et le développement des zones houillères. Cependant, l’acquisition de terres pour extraire du charbon dans une zone répertoriée doit être opérée conformément à la loi sur l’extension des panchayats aux zones répertoriées et aux règles adoptées par l’État concerné en application de celle-ci. La plupart des États indiens ont adopté des règles pour l’application de cette loi. Le Chhattisgarh lui a donné effet en modifiant son Code des impôts fonciers de 1959.