Observations finales concernant les cinquième et sixième rapports périodiques (présentés en un seul document) du Burundi

Additif

* La version originale du présent document n ’ a pas été revue par les services d ’ édition.

Renseignements reçus du Burundi au sujet de la suite donnée aux observations finales *

[Date de réception : 18 mai 2019]

Le Comité avait recommandé à l’Etat partie de :

Renseignements complémentaires concernant le paragraphe 33 des observations finales (CEDAW/C/BDI/CO/5-6)

33. Modifier le Code de la nationalité et le Code des personnes et de la famille de manière à les mettre en conformité avec l’article 9 de la Convention et de veiller à ce que toutes les naissances soient déclarées à l’état civil.

Renseignements complémentaires concernant le paragraphe 51 a) des observations finales (CEDAW/C/BDI/CO/5-6)

51 a) Établir de toute urgence la version définitive du projet de code des personnes et de la famille révisée et celle du projet de loi relatif aux successions, aux régimes matrimoniaux et aux libéralités pour les adopter, conformément aux recommandations que l’Etat partie a acceptées lors de l’examen périodique universel en 2013.

Concernant la modification du Code de nationalité et du Code des personnes et de la famille de manière à le mettre en conformité avec l’article 9 de la Convention, le Gouvernement du Burundi informe le Comité qu’il reste sensible par rapport à la question. En effet, la Constitution de la République du Burundi de 2018, en son article 19 stipule que « Les droits et les devoirs proclamés et garantis par les textes internationaux relatifs aux droits de l’homme régulièrement ratifiés font partie intégrante de la Constitution ».

En plus, l’article 13 de la même Constitution prescrit que « Tous les burundais sont égaux en mérite et en dignité. Tous les citoyens jouissent des mêmes droits et ont droit à la même protection de la loi. Aucun burundais ne sera exclu de la vie sociale, économique ou politique de la nation du fait de sa race, de sa langue, de sa religion, de son sexe ou de son origine ethnique ».

L’article 22 complète l’article 13 en disposant que « Tous les citoyens sont égaux devant la loi, qui leur assure une protection égale. Nul ne peut être l’objet de discrimination du fait notamment de son origine, de sa race, de son ethnie, de son sexe, de sa couleur, de sa langue, de sa situation sociale, de ses convictions religieuses, philosophiques ou politiques ou du fait d’un handicap physique ou mental ou du fait d’être porteur du VIH/SIDA ou tout autre maladie incurable ».

Dans le but de rendre effectif ces principes, le Burundi a révisé en 2000 le Code de la nationalité à travers la loi n° 1/013 du 18 juillet 2000 portant réforme du Code de la nationalité. Ainsi, les articles 4 et 10 de ce Code consacrés à la femme précisent respectivement que « Devient burundaise par mariage la femme étrangère qui épouse un burundais ou dont le mari acquiert cette qualité par option ».

Toutefois, l’acquisition de la nationalité burundaise n’est attachée qu’à la célébration d’un mariage valide » et « La femme étrangère acquiert par mariage la nationalité de son conjoint burundais par simple déclaration ».

De ces articles, l’on comprend que la femme étrangère marié à un Burundais a des facilités dans l’acquisition de la nationalité burundaise alors que l’inverse ne l’est pas.

Le Burundi est conscient de ce déséquilibre existant entre les hommes et les femmes pour ce qui est de la transmission de la nationalité et a déjà entamé les discussions sur le sujet de la révision de cette disposition. Dans ce contexte, le Gouvernement du Burundi informe la Comité qu’il ne ménage aucun effort pour l’adoption de nouvelles lois et la révision de celles existantes au cas échéant.

Par rapport au Code des Personnes et de la Famille, il convient de signaler que le processus de sa révision est toujours en cours afin que les innovations à apporter puissent tenir compte des préoccupations des familles, des juges, des défenseurs des droits de la femme et des recommandations des différents partenaires et comités spécialisés.

À cet effet, un comité intersectoriel chargé de travailler sur les dispositions discriminatoires et celles lacunaires a été créé et son travail est facilité par la disponibilité des documents produits par différentes organisations de la Société civile, des rapports du Parlement, du contenu des outils de plaidoyer de divers acteurs ainsi que sur les défis relevés par les juges des cours et tribunaux pour produire une version de loi à même de protéger les intérêts de la femme sur tous les aspects.

Au Burundi, ce processus de révision du cadre légal en vue de le mettre en conformité avec l’article 9 de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de Discrimination à l’égard de la Femme est donc progressif.

Pour ce qui est de la révision du Code des personnes et de la famille qui date d’avril 1993 et contentant des dispositions qui sont en contradiction avec la constitution du Burundi, sa révision est une priorité parmi d’autres priorités. Il convient de signaler que beaucoup d’actions ont été entreprises pour la légalisation des unions libres et l’enregistrement des naissances.

Le Gouvernement continue à consentir des efforts en vue de préserver l’identité de l’enfant qui acquiert son nom dès sa naissance, en même temps qu’il acquiert la nationalité de son pays. C’est le cas de l’enregistrement des enfants.

En effet, la mesure du Gouvernement de subventionner les soins de santé chez femmes enceintes et des enfants de moins de cinq ans a permis à bon nombre de familles de régulariser les mariages et à faire enregistrer leurs enfants pour bénéficier des dividendes de cette mesure (accès gratuit aux soins de santé, acquisition des documents de scolarisation, etc.). Des efforts de sensibilisation par des réunions, des émissions radiodiffusées sont menés par les autorités en vue d’expliquer à la population le bien-fondé de faire enregistrer leurs enfants dès la naissance à l’état civil.

S’agissant des avancées, SOS Enfants a déjà lancé un programme d’état-civil à Bujumbura ayant pour objectifs de :

•Régulariser l’acte d’état-civil par l’enregistrement systématique des enfants de la rue dont la naissance n’a jamais été enregistrée au niveau de l’état civil ;

•Sensibiliser les familles sur l’importance de la déclaration de naissance auprès de l’administration ;

•Rendre à chaque enfant de la rue son identité pour préserver ses droits et son avenir.

Dans un premier temps, le projet a assuré l’enregistrement de 251 enfants accueillis au sein de 8 foyers gérés par l’Œuvre humanitaire pour la Protection et le Développement de l’Enfant (O.P.D.E.) dans le cadre de ses missions de réinsertion d’enfants de la rue. Par la suite, une campagne de sensibilisation sur l’importance de la déclaration des naissances a été menée dans trois zones de la Mairie de Bujumbura choisies comme sites pilotes : Kamenge, Kinama, et Buterere. Les trois localités sont des entités très démunies et où sont originaires la plupart des enfants ayant trouvé refuge dans les rues de la capitale.

Depuis 2016, des campagnes de sensibilisation pour l’enregistrement des enfants qui n’ont pas été déclarés à l’état-civil ont été menées, la cible finale de ces campagnes était d’atteindre au moins un million d’enfants qui seront enregistrés. Notons que jusqu’à maintenant, plus de 800 000 enfants ont été déjà enregistrés. La dernière campagne a été lancée pendant la semaine dédiée à l’enfant africain, le 13 juin 2018 dans la zone Buterere de la Mairie de Bujumbura, cette zone enregistrait beaucoup de cas d’enfants qui n’étaient pas encore enregistrés. Signalons également que depuis janvier à mars 2019, plus de 1800 enregistrements tardifs des naissances sont déjà déclarés à l’état-civil.

Toutefois, certains facteurs peuvent être à la base du non enregistrement des naissances, notamment : (i) l’éloignement des bureaux de l’état civil, (ii) l’ignorance ou le manque d’information, (iii) la négligence, (iv) la honte pour les mères des enfants naturels, (v) le recouvrement des taxes communales dues par les parents en cas d’enregistrement des naissances.

Par ailleurs, une dispense généralisée a été donnée aux personnes déplacées, rapatriées et dispersées en vue de permettre l’enregistrement des naissances sans encourir des amendes prévues par la loi. Le renouvellement de cette dispense est fait chaque année à l’issue d’un séminaire-atelier sur l’état civil organisé à l’intention des contrôleurs provinciaux d’état civil et des Conseillers socioculturels des Gouverneurs de Province.

En outre, l’enregistrement ordinaire continue comme à l’accoutumée. Toutefois, les services d’Etat civil souffrent d’un manque de données informatisées. Néanmoins, la recommandation des Ministres africains chargés de l’Etat civil lors de la réunion tenue à Durban en Afrique du Sud, a mis en place un système de collecte des statistiques de vie et qui propulse le Burundi à la 1ère place parmi les pays africains francophones. À cette fin, un Comité National de pilotage ad hoc présidé par son Excellence le Premier Vice-Président de la République est fonctionnel depuis 2014.

Notons que selon l’EDS 2016-2017, la grande majorité des naissances d’enfants de moins de 5 ans (84 %) a été enregistrée à l’état civil. Cette majorité varie selon la province, passant d’un minimum de 54 % dans la province de KIRUNDO à un maximum de 94 % dans la province de Gitega.

D’autres pistes de solution pour pallier à l’enregistrement tardif des naissances sont envisagées. C’est notamment (i) l’informatisation des bureaux d’état-civil.et (ii) la mise en place de certains centres de santé pilotes qui seront bientôt fonctionnels pour l’enregistrement des naissances avant la sortie de la mère du lit d’hôpital. Signalons que d’autres pistes sont opérationnelles à savoir : (i) la mise en place des Comités de Protection de l’Enfant (CPE) sur toutes les collinaires et quartiers ; (ii) l’octroi des extraits d’acte de naissance pour accéder aux différents services.

Rappelant ses recommandations générales n°21 (1994) sur l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux et n°29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, des liens familiaux et de leur dissolution, en plus de la recommandation générale conjointe n° 31 du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et n° 18 du Comité des droits de l’enfant sur les pratiques préjusticiables (2014), le comité avait recommandé à l’Etat partie :

D’établir de toute urgence la version définitive du projet de Code des personnes et de la famille révisée et celle du projet de loi relatif aux successions, aux régimes matrimoniaux et aux libéralités pour les adopter, conformément aux recommandations que l’Etat partie a acceptées lors de l’Examen Périodique Universel en 2013 (voir le document A/HRC/23/2, par.515)

Concernant la production du projet de loi du Code des Personnes et de la famille, nous renvoyons aux réponses données ci-haut. Pour ce qui est du projet de loi relatif aux successions, aux régimes matrimoniaux et aux libéralités, le Gouvernement du Burundi porte à la connaissance du Comité qu’il est conscient du problème d’accès des femmes aux facteurs de production, plus particulièrement l’accès à la terre, et ne ménage aucun effort pour y trouver une solution durable.

En effet, le problème du non existence d’une loi écrite régissant les successions, les régimes matrimoniaux et les libéralités préoccupe le Gouvernement et fait partie de ses priorités. C’est dans ce contexte qu’un projet de loi portant sur les successions, les régimes matrimoniaux et les libéralités avait initié afin que ce domaine soit régi par une loi écrite égalitaire pour suppléer à la coutume.

Cependant, l’adoption d’une telle loi mérite une certaine réflexion profonde quant aux besoins de la population par rapport à cette loi car l’adopter à la hâte sans avoir réfléchi sur la perception de la communauté sur son efficacité pourrait entraîner des conséquences néfastes sur la société car le Burundi se trouve parmi les pays les plus densément peuplés de l’Afrique et qui est régie par le système patriarcal.

Conscient de certains doutes quant à son effectivité qui tourne autour de cette loi et soucieux de promulguer une loi qui répondre aux désidératas de sa population, le Gouvernement du Burundi a recommandé au Ministère des Droits de la personne Humaine des Affaires Sociales et du Genre d’expliquer le projet de loi à la population et une large campagne d’explication a été organisée. Les principaux constats de cette campagne sont : (i) la population est encore réticente en ce qui est de la succession de la fille en matière foncière, (ii) tandis que pour d’autres biens que la terre, elle est favorable pour la succession de la fille et (iii) en milieu des intellectuels, la population est favorable à la succession de la fille au même pied d’égalité que son frère pour tous les biens en témoigne la jurisprudence des tribunaux en la matière.

Étant données que la perception de la population sur cette loi n’est pas unanime, les séances de sensibilisation à leur endroit se poursuivent. Parallèlement, le Gouvernement du Burundi profitera du processus de révision du Code des Personnes et de la Famille en cours pour y intégrer mutatis mutandis des dispositions relatives aux régimes matrimoniaux et les libéralités. Une fois le processus de révision du Code des Personnes et de la Famille terminé, le Burundi sera doté d’un cadre légal régissant le domaine des régimes matrimoniaux et des libéralités aussi.

Conscient des problèmes que vivent les femmes divorcées et les filles qui n’ont pas eu la chance de se marier, etc. le Gouvernement a confié au comité intersectoriel de révision du Code des Personnes et de la Famille la mission d’introduire dans le projet de code révisé des dispositions relatives à l’accès des femmes aux facteurs de production.

Il convient de signaler également que le Gouvernement a mené plusieurs différentes interventions visant à faciliter l’accès des femmes aux facteurs de production. C’est entre autres : (i) l’appropriation de l’approche NAWE NUZE de Care International pour l’autonomisation des femmes comme approche nationale, (ii) la formation de 54 formateurs sur cette approche, (iii) la création de 2488 groupement de solidarité utilisant l’Approche d’épargne et de crédit (NAWE NUZE), (iv) la facilitation de l’accès à la terre aux femmes en associations exerçant une activité génératrice de revenus dans le domaine agricole, etc.

Le Gouvernement du Burundi réitère encore une fois sa détermination pour l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard de la femme et promet la révision des textes de loi ci-haut évoqués qui sont d’une importance capitale dans un proche avenir.