Trente-neuvième session

23 juillet-10 août 2007

Observations finales du Comité pour l’éliminationde la discrimination à l’égard des femmes : Brésil

Le Comité a examiné le sixième rapport périodique du Brésil (CEDAW/C/BRA/6) à ses 795e et 796e séances, le 25 juillet 2007 (voir CEDAW/C/SR.795 B et 796 B). La liste des points et des questions du Comité figure dans le document CEDAW/C/BRA/Q/6 et les réponses du Gouvernement brésilien sont publiées sous la cote CEDAW/C/BRA/Q/6/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie d’avoir présenté son sixième rapport périodique, qui est conforme aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports et dans lequel sont prises en compte ses observations finales précédentes. Il le remercie également de ses réponses écrites à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail de présession ainsi que de son exposé oral qui a fourni des informations sur les faits les plus récents relatifs à l’application de la Convention au Brésil.

Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, dirigée par la Ministre responsable du Secrétariat spécial chargé des politiques de la femme, accompagnée d’autres membres dudit secrétariat et des représentants des Ministères du développement agricole, des relations extérieures, de la santé et de la justice. Le Comité se félicite du dialogue constructif établi entre la délégation et les membres du Comité.

Le Comité se félicite que l’État partie reconnaisse la contribution active du mouvement des femmes au Brésil et qu’il coopère avec des organisations non gouvernementales, dans le cadre de ses efforts pour réaliser l’égalité entre les sexes.

Aspects positifs

Le Comité loue l’État partie pour sa volonté politique affirmée et soutenue d’éliminer la discrimination à l’égard des femmes, qu’il manifeste par une réforme législative approfondie et des politiques, plans et programmes importants ainsi que par la mise en place de dispositifs décentralisés pour assurer l’égalité entre les femmes et les hommes.

Il félicite l’État partie des efforts progressifs qu’il déploie pour adapter la législation au principe de l’égalité entre les hommes et les femmes dans la Constitution et dans la Convention, par des mesures telles que la loi 11340 (loi Maria da Penha) du 7 août 2006 sur les délits de violence familiale à l’égard des femmes ainsi que le nouveau Code civil (2003), la loi 11106 du 28 mars 2005 portant modification du Code pénal, d’autres lois concernant l’emploi, la maternité et la santé ainsi que plusieurs initiatives législatives prises au niveau de l’État dans différents domaines.

Le Comité accueille avec satisfaction les politiques, plans et programmes nombreux et variés, initiés dans des domaines importants pour la vie des femmes comme l’élimination de la pauvreté, l’autonomie économique, la violence à l’égard des femmes, les violences sexuelles contre les enfants et les adolescents, la traite des êtres humains, l’hygiène sexuelle et la santé génésique et la prévention du VIH/sida.

Le Comité félicite l’État partie de sa stratégie visant à encourager la mise en place de mécanismes institutionnels chargés de suivre et d’appliquer des politiques d’égalité entre les sexes au niveau de l’État et des municipalités.

Le Comité loue l’État partie de s’être engagé dans des processus pleinement participatifs pour définir ses priorités et élaborer des propositions concernant des politiques pour l’égalité entre les sexes, comme la première Conférence nationale sur les femmes, tenue en juillet 2004, et la deuxième Conférence nationale, prévue en août 2007.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant l’obligation qui incombe à l’État partie d’appliquer systématiquement et sans discontinuer toutes les dispositions de la Convention, le Comité estime que les préoccupations et recommandations formulées dans les présentes observations finales doivent recevoir son attention prioritaire d’ici à la présentation du prochain rapport périodique. Le Comité appelle donc l’État partie à axer ses interventions sur ces domaines et à lui rendre compte, dans son prochain rapport périodique, des mesures prises et des résultats concrets obtenus. Il lui demande également de soumettre les présentes observations finales à tous les ministères et autres services publics compétents de tous les niveaux ainsi qu’au Parlement, de façon qu’elles soient pleinement prises en compte.

Le Comité est préoccupé par l’écart persistant entre l’égalité de droit et l’égalité de fait entre les hommes et les femmes, notamment chez les groupes les plus vulnérables de la société, tels que les femmes d’ascendance africaine, les femmes autochtones et autres groupes marginalisés, écart exacerbé par des disparités régionales, économiques et sociales.

Le Comité encourage l’État partie à redoubler d’efforts pour éliminer l’écart entre l’égalité de droit et l’égalité de fait entre les hommes et les femmes, en veillant à l’application intégrale des lois, plans et politiques par un suivi régulier et efficace et par une évaluation des résultats, notamment en ce qui concerne les groupes de femmes les plus défavorisées. Il recommande à l’État partie de faire en sorte que ceux qui, à tous les niveaux, sont chargés d’appliquer ces lois et politiques aient pleine connaissance de leurs obligations.

Le Comité est préoccupé par les difficultés que rencontre l’État partie pour mettre en œuvre les dispositions de la Convention à tous les niveaux de la République fédérale et de façon systématique, difficultés qui sont liées aux différents degrés de volonté politique et d’engagement des autorités étatiques et municipales.

Le Comité observe qu’indépendamment de la structure constitutionnelle de l’État partie, celui-ci, notamment ses branches du pouvoir (exécutif, législatif et judiciaire) , a l’entière responsabilité de s’acquitter , à tous les niveaux, des obligations contractées au titre de la Convention. Il recommande d’assurer l’uniformité des normes et des résultats dans la mise en œuvre de la Convention dans l’ensemble du pays, notamment par la mise en place de mécanismes d’application efficaces et par la coordination. Il recommande également que toutes les autorités, aux niveaux fédéral, étatique et municipal, soient pleinement sensibilisées aux engagements internationaux contractés par le Brésil au titre de la Convention et dans le domaine des droits de l’homme en général.

Le Comité s’inquiète de ce que les dispositions de la Convention n’ont été invoquées que rarement devant les tribunaux au cours des dernières années, ce qui indique une méconnaissance de ladite convention. Il s’inquiète également de ce que les femmes ont une connaissance limitée des droits qui leur sont reconnus par la Convention et son Protocole facultatif et par la législation nationale qui s’y rapporte.

Le Comité demande à l’État partie de s’assurer que la Convention et la législation nationale qui s’y rapporte sont étudiées dans les programmes de formation théorique et pratique des juristes, dont les juges, les avocats, les procureurs et les avocats de la défense, ainsi que dans les programmes universitaires, afin d’ancrer solidement le pays dans une culture juridique propice à l’égalité des femmes et à la non-discrimination. Il engage également l’État partie à mieux faire connaître leurs droits aux femmes, notamment dans les régions reculées et auprès des groupes les plus défavorisés, par des programmes de vulgarisation juridique et par une assistance juridique, afin qu’elles puissent faire valoir tous les droits qui leur sont reconnus au titre de la Convention. Il encourage l’État partie à diffuser plus largement la Convention et son protocole facultatif auprès du public et à les y sensibiliser , p our mieux faire connaître les droits fondamentaux des femmes.

Le Comité s’inquiète du caractère fragile et du peu de capacité des mécanismes de promotion de l’égalité entre les sexes dans certains États et municipalités, eu égard aux fonctions de coordination et de suivi qui leur sont confiées. Il s’inquiète également de ce que les ressources humaines et financières affectées au Secrétariat spécial chargé des politiques de la femme ne soient pas adaptées à son mandat.

Le Comité recommande que l’État partie renforce les mécanismes de promotion de l’égalité entre les sexes, tant au niveau fédéral qu’au niveau des États et des municipalités, par une dotation adéquate en ressources humaines et financières et par le renforcement de leurs capacités techniques, afin qu’ils puissent mener effectivement les tâches qui leur ont été confiées.

Tout en reconnaissant les efforts entrepris, notamment dans le secteur de l’éducation, pour mettre à plat les mythes et les stéréotypes négatifs concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la communauté au sens large, le Comité se préoccupe de la persistance de ces stéréotypes et de la nécessité de faire évoluer davantage les mentalités.

Le Comité invite l’État partie à mettre en œuvre des mesures systématiques pour accélérer l’évolution des attitudes et des pratiques largement acceptées qui réduisent les femmes à des rôles subalternes et pour s’attaquer aux conceptions stéréotypées des rôles de l’un et l’autre sexe. De telles mesures devraient prévoir notamment des campagnes de sensibilisation et d’information des femmes et des hommes, des filles et des garçons, des parents, des enseignants et des agents de l’État, conformément aux obligations qui découlent de l’alinéa f) de l’article 2 et de l’alinéa a) de l’article 5 de la Convention. Le Comité recommande également que l’État partie redouble d’efforts pour encourager les médias à proposer et promouvoir des images positives non stéréotypées de la femme et à valoriser l’égalité entre les sexes.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir promulgué de nouvelles lois importantes contre la violence dans la famille, notamment la loi 11340 (loi Maria da Penha) du 7 août 2006, comme l’avait recommandé le Comité dans ses observations finales précédentes, et d’avoir adopté diverses autres mesures pour lutter contre la violence à l’égard des femmes; toutefois, le Comité se préoccupe de ce que la violence à l’égard des femmes et des filles est largement répandue et qu’apparemment on en parle peu. Il s’inquiète également de ce que la violence à l’égard des femmes et des filles n’est toujours pas reconnue par la société dans son ensemble comme une violation des droits de l’homme.

Le Comité prie instamment l’État partie de continuer à donner priorité à l’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes, y compris la violence familiale, et d’adopter rapidement des mesures efficaces pour donner pleinement effet à la nouvelle législation, comme la constitution rapide de tribunaux spéciaux sur la violence familiale à l’égard des femmes dans l’ensemble du pays et la pleine participation de tous les acteurs concernés, notamment les organisations non gouvernementales, le personnel judiciaire et autres professionnels engagés dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Le Comité recommande également de procéder à un suivi et à une évaluation systématiques de l’effet de la loi 11340 ( loi Maria da Penha ), notamment par la collecte de données ventilées selon le type de violence et le lien entre l’auteur de l’agression et sa victime. Il recommande également d’organiser de nouvelles campagnes de sensibilisation du public sur le caractère inacceptable de la violence à l’égard des femmes, qui constitue une violation des droits fondamentaux de la personne. Le Comité encourage l’État partie à utiliser pleinement la recommandation générale 19 du Comité ainsi que les informations contenues dans l’étude approfondie de toutes les formes de violence à l’égard des femmes, réalisée par le Secrétaire général (A/61/122 et Add.1 et Add.1/Corr.1).

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour lutter contre la traite des être humains, aux niveaux national et international, telles que son adhésion au Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et l’approbation, par le décret no 5948 du 27 octobre 2006, de la politique nationale sur la lutte contre la traite des êtres humains; toutefois, le Comité est préoccupé par l’ampleur du phénomène et par l’insuffisance, en nombre et en qualité, des services d’appui apportant des soins spécialisés et des compétences en matière d’aide aux victimes.

Le Comité invite l’État partie à appliquer effectivement ses mesures contre la traite, à mettre en œuvre intégralement sa politique nationale sur la lutte contre la traite des êtres humains et à achever sans délai l’élaboration d’un plan national contre la traite des êtres humains, qui devrait prendre en compte les spécificités liées au sexe, à la race et à l’âge. Le Comité prie l’État partie d’envisager d’adopter une législation contre la traite prévoyant des sanctions adéquates contre les auteurs et assurant aux victimes une protection et une assistance fondées sur les droits de l’homme, y compris des programmes de réinsertion à long terme. Le Comité demande également à l’État partie d’adopter des mesures visant à réduire la vulnérabilité des femmes et des filles à l’égard des trafiquants.

Le Comité est préoccupé par le fait que la loi no 9504 du 30 septembre 1997, qui établit un système de quotas, s’est avérée inefficace et a eu un effet minime, sinon nul, sur la participation des femmes à la vie politique. Le Comité demeure également préoccupé par le fait que les femmes sont toujours nettement sous-représentées à tous les niveaux et instances de prise de décisions politiques, notamment dans les corps élus, aux plus hautes instances du pouvoir judiciaire et dans la diplomatie.

Le Comité encourage l’État partie à prendre des mesures juridiques durables et d’autres mesures pour augmenter la représentation des femmes dans les corps élus ou désignés ainsi qu’aux plus hautes instances du pouvoir judiciaire et dans la diplomatie. Il recommande que l’État partie introduise les mesures juridiques voulues et autres mesures, dont la modification ou le remplacement de lois inefficaces et l’adoption de mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et la recommandation générale n o  25, pour augmenter le nombre de femmes occupant des postes politiques et publics suivant un calendrier précis, et conformément à la recommandation générale n o  23. Le Comité recommande que l’État partie organise des campagnes visant à sensibiliser aussi bien les hommes que les femmes à l’importance d’une participation pleine et égale des femmes à la vie politique et publique et aux prises de décisions, en tant qu’élément nécessaire d’une société démocratique, et d’instaurer des conditions favorables, propres à encourager et à faciliter cette participation.

Le Comité prend note de l’évolution positive dans l’application de l’article 11 de la Convention, et notamment du Programme en faveur de l’égalité entre les sexes, du Programme pour encourager les femmes à se rendre économiquement autonomes dans le monde du travail et du Programme de lutte contre la pauvreté; toutefois, le Comité se préoccupe de la discrimination en matière d’emploi dont sont victimes les femmes, dont témoignent la persistance des inégalités de salaire, qui augmentent avec leur niveau de qualification, la discrimination professionnelle et leurs faibles possibilités d’avancement professionnel. Le Comité se préoccupe également de la situation des femmes travaillant comme employées de maison, notamment les femmes d’ascendance africaine, qui ne sont généralement pas protégées par le Code du travail et sont vulnérables à l’exploitation par leurs employeurs, y compris aux agressions sexuelles.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des politiques et des mesures concrètes pour accélérer l’élimination des écarts de rémunération discriminatoires et de s’employer à ce que les femmes bénéficient, dans les faits, des mêmes chances que les hommes sur le marché du travail. Il recommande également d’adopter et de mettre en œuvre d’autres mesures pour permettre à chacun de concilier plus facilement responsabilités familiales et responsabilités professionnelles, notamment par la fourniture de services de garderie abordables, et pour promouvoir un partage équitable des tâches domestiques et familiales entre les hommes et les femmes. Le Comité demande à l’État partie de veiller à ce que les femmes travaillant comme employées de maison soient dûment protégées contre la discrimination, l’exploitation et la violence. Il recommande de suivre et d’évaluer les résultats de la loi 11324 (2006), qui permet à l’employeur d’un domestique de déduire de ses impôts un pourcentage de sa contribution aux cotisations de la sécurité sociale, pour déterminer si cette incitation fiscale a contribué de façon notable à la formalisation du travail domestique. Il encourage l’État partie à adopter sans délai le projet de loi n o  7363/2006, réglementant la profession d’employé de maison, qui dispose que les employés de maison participent au Fonds de licenciement des salariés.

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour améliorer la santé des femmes, en particulier l’hygiène sexuelle et la santé génésique, telles que la politique nationale sur les droits sexuels et génésiques (mai 2006), le Pacte national visant à réduire la mortalité maternelle et le Plan de lutte contre la féminisation du VIH/sida et autres maladies sexuellement transmissibles; toutefois, le Comité reste préoccupé par : le taux de mortalité maternelle toujours élevé, révélateur de conditions socioéconomiques précaires; les faibles niveaux d’instruction et d’éducation; les dynamiques familiales liées à la violence dans la famille; et surtout les difficultés d’accès à des services de santé de qualité. Il est également préoccupé par le nombre important de grossesses chez les adolescentes et s’inquiète aussi du nombre élevé d’avortements dangereux, des dispositions répressives prévues à l’encontre des femmes qui subissent des avortements et des difficultés d’accès aux soins pour la gestion des complications qui en résultent.

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses efforts pour améliorer l’accès des femmes aux soins de santé, en particulier aux soins de santé sexuelle et génésique, conformément à l’article 12 de la Convention et à sa recommandation générale 24 sur les femmes et la santé. Il prie l’État partie de renforcer les mesures visant à prévenir les grossesses non souhaitées, notamment en faisant mieux connaître et mieux comprendre les moyens contraceptifs et les services de planification familiale et en y facilitant l’accès. Le Comité prie également l’État partie de suivre de près la mise en œuvre, au niveau des États et des municipalités, du P acte national visant à réduire la mortalité maternelle, notamment par la création de comités de lutte contre la mortalité maternelle là où il n’en existe pas encore. Il recommande que l’État partie donne une attention prioritaire à la situation des adolescents et qu’il leur assure la préparation voulue à la vie courante avec une attention particulière à la prévention des grossesses et du VIH/sida et autres maladies sexuellement transmissibles. Le Comité recommande également à l’État partie d’accélérer l’examen de sa législation pénalisant l’avortement afin de supprimer les dispositions répressives imposées aux femmes qui subissent un avortement, conformément à la recommandation générale 24 et à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing . Le Comité invite également l’État partie à donner aux femmes accès à des services de qualité pour la gestion des complications consécutives aux avortements dangereux.

Tout en notant les mesures prises pour améliorer la situation des femmes et des filles rurales, dont le lancement du Programme national d’établissement de pièces d’état civil à l’intention des travailleuses des zones rurales, le Comité s’inquiète des proportions de l’inégalité et de la pauvreté qui affectent les femmes rurales, et dont témoignent leur taux relativement élevé d’analphabétisme; leur faible taux de scolarisation; le manque d’accès aux soins de santé, en particulier les soins de santé sexuelle et génésique; et leur vulnérabilité à la violence. Le Comité se préoccupe également des femmes rurales qui n’ont toujours aucune pièce d’identité, que ce soit carte d’identité personnelle ou numéro personnel d’immatriculation, et ne peuvent donc bénéficier des programmes de sécurité sociale et autres programmes, tels que le Programme de subventions familiales, ni avoir accès au crédit ou à la propriété foncière.

Le Comité demande instamment à l’État partie de veiller à ce que toutes les politiques et tous les programmes de développement rural intègrent une perspective sexospécifique et s’attachent expressément à remédier au caractère structurel de la pauvreté qui affecte les femmes rurales. Il recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour mettre en œuvre des programmes globaux de santé et d’éducation à l’échelle de la nation, notamment des programmes dans des secteurs tels que l’alphabétisation fonctionnelle, la création d’entreprises, la formation et la microfinance, afin de réduire la pauvreté. Il recommande également à l’État partie de continuer d’élargir l’accès des femmes au Programme national de réforme agraire et de veiller à ce que le Programme national pour la régularisation de la situation des travailleuses rurales au regard de l’état civil touche toutes les femmes dans les zones rurales reculées. Le Comité encourage l’État partie à veiller à ce que la situation des femmes rurales soit prise en compte dans les efforts visant à éliminer la vulnérabilité des femmes à la violence.

Tout en appréciant les explications fournies dans le rapport et pendant le dialogue constructif sur l’utilisation des termes « équité » et « égalité » et sur le sens attribué à chacun de ces termes, tout en reconnaissant également que toutes les langues ont leurs particularités, le Comité demeure préoccupé par le fait que l’État partie utilise le terme « équité » concernant les femmes et les hommes en y incluant des notions subjectives de comparabilité et d’équivalence, ce qui risque d’en fausser le sens, eu égard à l’objectif de la Convention, qui est la réalisation pleine et entière de l’égalité, de droit et de fait, entre les femmes et les hommes.

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre sa réflexion sur la question, tout en réaffirmant que ce qui est en cause dans la mise en œuvre de la Convention, c’est la réalisation de l’égalité entre les sexes au sens le plus complet du terme, c’est-à-dire une égalité aussi bien juridique et formelle qu’une égalité réelle et concrète dans tous les domaines de la vie.

Le Comité est préoccupé par l’insuffisance de données sur les femmes d’ascendance africaine, les femmes autochtones et autres groupes vulnérables et marginalisés, qui sont souvent victimes de multiples formes de discrimination. Le Comité note que l’absence d’informations et de statistiques suffisantes ne lui a pas permis d’avoir un tableau complet de la véritable situation de ces femmes dans tous les domaines visés par la Convention ni de mesurer l’impact des politiques et programmes nationaux visant à éliminer la discrimination à leur égard.

Le Comité prie l’État partie d’améliorer la collecte de données ventilées par sexe, par race et par âge, selon que de besoin, dans tous les domaines visés par la Convention et d’inclure dans son prochain rapport des données et des analyses statistiques adéquates, ventilées par sexe, par race et par âge ainsi que par zones urbaine et rurale, de façon à donner un tableau complet de la mise en œuvre de toutes les dispositions de la Convention. Il recommande également à l’État partie de procéder régulièrement à des évaluations d’impact de ses mesures législatives, politiques, plans et programmes pour vérifier que les mesures prises ont les effets désirés et d’informer le Comité du résultat obtenu dans la mise en œuvre de la Convention dans son prochain rapport.

Le Comité prie instamment l’État partie, dans le cadre de l’application de la Convention, de faire pleinement usage des dispositions de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing qui renforcent celles de la Convention, et prie l’État partie d’inclure des informations sur ce point dans son prochain rapport périodique.

Le Comité souligne également que la mise en œuvre de la Convention est indispensable pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Il demande que tous les efforts visant à atteindre ces objectifs intègrent une perspective sexospécifique ainsi qu’une réflexion explicite sur les dispositions de la Convention et prie l’État partie d’inclure des informations à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Le Comité note que l’adhésion des États parties aux sept principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme contribue à promouvoir l’exercice effectif des droits individuels et des libertés fondamentales des femmes dans tous les aspects de leur vie. Il encourage donc le Gouvernement brésilien à envisager de ratifier l’instrument auquel il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Le Comité demande que les présentes conclusions soient largement diffusées au Brésil de façon à sensibiliser la population, en particulier les membres de l’administration, les responsables politiques, les parlementaires et les organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, aux mesures prises pour assurer l’égalité de droit et de fait entre les sexes et aux dispositions qui restent à prendre à cet égard. Il demande également à l’État partie de continuer de diffuser largement, surtout auprès des organisations de femmes et de défense des droits de l’homme, la Convention, son P rotocole facultatif, ses propres recommandations générales, la Déclaration et le Programme d’action de Beijing ainsi que les documents issus de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale, intitulée « Les femmes en l’an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle » (résolution S-23/3, annexe).

Le Comité prie l’État partie de donner suite aux préoccupations exprimées dans les présentes conclusions dans le prochain rapport périodique qu’il doit soumettre au titre de l’article 18 de la Convention, en mars 2009.