Observations finales concernant le huitième rapport périodique de la Bulgarie *

Le Comité a examiné le huitième rapport périodique de la Bulgarie (CEDAW/C/BGR/8) à ses 1761e et 1762e séances (voir CEDAW/C/SR.1761 et CEDAW/C/SR.1762), le 19 février 2020.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le huitième rapport périodique de l’État partie, qui a été soumis à partir de la liste de points établie avant la soumission du rapport (CEDAW/C/BGR/QPR/8), ainsi que le rapport sur la suite donnée à ses précédentes observations finales (CEDAW/C/BGR/CO/4-7/Add.1). Il remercie l’État partie, dont la délégation a présenté le rapport oralement et qui a apporté des éclaircissements complémentaires aux questions posées oralement par le Comité pendant le dialogue.

Le Comité remercie l’État partie d’avoir envoyé une délégation, conduite par le Vice-Ministre des affaires étrangères, Georg Georgiev. La délégation comprenait aussi des représentants du Ministère de la justice, du Ministère du travail et de la politique sociale, du Ministère de la santé, du Ministère de l’intérieur, du Conseil des ministres et de la Mission permanente de la Bulgarie auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis sur le front des réformes législatives depuis l’examen, en 2012, du rapport valant quatrième à septième rapports périodiques de l’État partie, et notamment ce qui suit :

a)L’adoption de la loi sur l’égalité entre les femmes et les hommes, en 2016 ;

b)L’intégration, en 2017, dans le Code de procédure pénale, de la Directive 2012/29/UE du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 établissant des normes minimales concernant les droits, le soutien et la protection des victimes de la criminalité ;

c)L’adoption d’une nouvelle loi sur les services sociaux, en 2019.

Le Comité salue l’action menée par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et politique en vue d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des genres, notamment l’adoption des textes suivants :

a)La Stratégie nationale pour la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes pour la période 2016-2020 ;

b)Le Programme national d’amélioration de la santé maternelle et infantile pour la période 2014-2020 ;

c)Le programme de développement rural pour la période 2014-2020.

Le Comité se félicite que, depuis l’examen du précédent rapport, l’État partie ait ratifié, en 2018, la Convention de 1970 sur la fixation des salaires minima (no 131) de l’Organisation internationale du Travail.

C.Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite du soutien apporté par la communauté internationale aux objectifs de développement durable et appelle au respect de l ’ égalité des genres en droit et dans les faits, conformément aux dispositions de la Convention, dans tous les aspects de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030 . Il souligne l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte systématique des principes d ’ égalité et de non-discrimination dans la réalisation des 17 objectifs. Il encourage vivement l ’ État partie à reconnaître le rôle moteur des femmes dans le développement durable de la Bulgarie et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel du pouvoir législatif s ’ agissant de garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir A/65/38 , deuxième partie, annexe VI). Il invite l ’ Assemblée nationale, dans le cadre de son mandat, à prendre les mesures nécessaires en vue de mettre en œuvre les présentes observations finales avant la soumission du prochain rapport périodique, en application de la Convention.

E.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité note que le principe de la discrimination directe et indirecte à l’égard des femmes est inscrit dans la législation de l’État partie. Il reste toutefois préoccupé par le fait que cette définition n’inclut pas la discrimination fondée sur le genre ni les formes de discrimination croisée, comme l’exige l’article premier de la Convention.

Rappelant ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/BGR/CO/4-7 , par. 12 ) et les liens entre les deux premiers articles de la Convention et la cible 5 . 1 associée aux objectifs du développement durable, à savoir mettre fin, partout dans le monde, à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et des filles, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ adopter une définition de la discrimination à l ’ égard les femmes conforme à l ’ article premier de la Convention, qui couvre la discrimination directe et indirecte et les formes de discrimination croisée, dans les sphères publique et privée.

Accès à la justice

Le Comité est préoccupé par le fait que les femmes et les filles dans l’État partie, en particulier celles qui subissent des formes de discrimination croisée, n’ont qu’un accès limité à la justice en raison de la corruption généralisée, de la stigmatisation sociale, de l’inaccessibilité du système judiciaire, des préjugés liés au genre qui existent dans les forces de l’ordre, y compris la police, de la priorité accordée aux procédures de médiation et de réconciliation dans les affaires de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, de la méconnaissance qu’ont les femmes de leurs droits et de la connaissance limitée qu’ont les juges et les agents des forces de l’ordre de la Convention, de son protocole facultatif et des recommandations générales du Comité.

Rappelant sa recommandation générale n o 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De mener une étude visant à déterminer quels sont les obstacles auxquels se heurtent les femmes et les filles, en particulier celles qui subissent des formes de discrimination croisée, lorsqu ’ elles tentent d ’ accéder à la justice, et prendre des mesures efficaces pour supprimer ces obstacles, notamment en faisant en sorte que les femmes connaissent mieux leurs droits et en améliorant l ’ accessibilité du système judiciaire  ;

b) De créer un environnement favorable dans lequel les femmes sont encouragées à exercer leurs droits, à signaler les crimes dont elles sont victimes et à participer activement aux procédures pénales, et d ’ empêcher que les femmes ne subissent une revictimisation lors de leurs interactions avec le système judiciaire et les autorités chargées de l ’ application de la loi  ;

c) De combattre la corruption et de renforcer les capacités des juges, des procureurs, des avocats et des fonctionnaires de police, notamment en faisant de la formation sur la Convention, son protocole facultatif ainsi que la jurisprudence et les recommandations générales du Comité un élément obligatoire de leur formation professionnelle  ;

d) De créer une base de données et de fournir des données statistiques et des informations sur les affaires dans lesquelles la Convention et le Protocole facultatif ont été invoqués devant les tribunaux nationaux.

Mécanisme national de promotion des femmes

Le Comité prend note de la création du Conseil national de l’égalité des genres au sein du Conseil des ministres. Il félicite également l’État partie d’avoir mis en place, en 2013, un mécanisme national de coordination des droits humains. Il est toutefois préoccupé par les points suivants :

a)Le Conseil national ne dispose pas des ressources humaines, techniques et financières dont il a besoin pour fonctionner efficacement et de manière pérenne ;

b)Toutes les municipalités n’ont pas instauré de mécanisme local en faveur de l’égalité des genres ;

c)Les budgets nationaux et municipaux ne sont pas établis selon les principes de budgétisation tenant compte des questions de genre.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De renforcer son mécanisme national de promotion des femmes en définissant clairement le mandat et les responsabilités et en mettant à sa disposition les ressources humaines, financières et techniques qui lui permettront de coordonner et de mener efficacement ses activités en faveur de l ’ égalité des genres et de la prise en compte des questions de genre  ;

b) De mettre en place des mécanismes d ’ égalité des genres au niveau local, de les doter de ressources humaines, techniques et financières adéquates et d ’ assurer la coordination entre ces mécanismes et d ’ autres éléments du mécanisme national  ;

c) De garantir l ’ inscription dans le budget de l ’ État d ’ un financement adéquat destiné aux entités nationales et locales du mécanisme national  ;

d) De renforcer les mécanismes d ’ évaluation des résultats afin que les politiques menées en faveur de l ’ égalité des genres, de même que leur application, fassent l ’ objet d ’ un suivi et d ’ une évaluation appropriés.

Organisations de la société civile

Le Comité prend note de l’importance de la société civile dans la mise en œuvre des politiques et des programmes dans l’État partie. Il s’inquiète toutefois des restrictions imposées aux activités de certaines organisations non gouvernementales, ainsi que de la suspension ou de la fermeture de plusieurs de ces organisations travaillant à la promotion des droits des femmes et de l’égalité des genres.

Le Comité recommande à l ’ État partie de renforcer sa collaboration avec les organisations de la société civile travaillant dans le domaine des droits des femmes et de l ’ égalité des genres et d ’ appuyer leurs initiatives tendant à mettre en œuvre la Convention. Le Comité invite également l ’ État partie à  :

a) Garantir un environnement qui soit sûr de jure et de facto dans lequel les organisations travaillant à la promotion des droits des femmes et de l ’ égalité des genres participent systématiquement à l ’ élaboration et à la mise en œuvre de la législation et des politiques pertinentes  ;

b) Soutenir financièrement les organisations de la société civile qui apportent une aide aux femmes victimes de discrimination, de violence fondée sur le genre et de violation de leurs droits, tout en veillant à ce que l ’ État partie conserve la responsabilité première de fournir à ces femmes des mesures de protection, de réadaptation et de réintégration ainsi que les autres services dont elles ont besoin.

Institution nationale pour la promotion et la protection des droits de la personne

Le Comité se félicite que la médiatrice bulgare ait reçu, en mars 2019, la note « A » de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme, conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris). Il se félicite également de la précieuse contribution de la médiatrice au dialogue constructif avec l’État partie. Il est néanmoins préoccupé par le fait que la médiatrice ne dispose pas de suffisamment de ressources techniques et financières pour remplir efficacement son mandat de promotion et de protection des droits des femmes et de l’égalité des genres.

Le Comité recommande à l ’ État partie de faire en sorte que la médiatrice dispose de ressources humaines, financières et techniques suffisantes et de renforcer son mandat relatif à la promotion et à la protection des droits des femmes et de l ’ égalité des genres.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité s’inquiète du fait que l’État partie n’a pas adopté de mesures temporaires spéciales pour atteindre une égalité réelle entre les femmes et les hommes et n’a pas appliqué de systèmes de quotas aux secteurs public et privé.

Compte tenu du paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et rappelant sa recommandation générale n o 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter et d ’ appliquer des mesures temporaires spéciales et de se fixer des objectifs assortis de délais en vue d ’ accélérer la réalisation de l ’ égalité réelle des hommes et des femmes dans tous les domaines dans lesquels les femmes continuent d ’ être défavorisées ou sous-représentées, comme la vie politique et publique, l ’ éducation et l ’ emploi  ;

b) D ’ accroître le niveau de participation des femmes subissant des formes de discrimination croisée, telles que les femmes roms, les migrantes, les réfugiées et les femmes présentant un handicap, à la prise de décisions  ;

c) De mener des programmes de renforcement des capacités à l ’ intention de tous les employeurs et responsables de la fonction publique sur le caractère non discriminatoire des mesures temporaires spéciales et leur importance pour ce qui est de réaliser l ’ égalité réelle entre les femmes et les hommes dans tous les domaines où les progrès sont lents ou inexistants.

Stéréotypes et pratiques néfastes

Le Comité trouve regrettable le peu d’engagement de l’État partie dans la lutte contre les stéréotypes de genre persistants qui affectent les choix des femmes et des filles en matière d’éducation et de carrière. Il est particulièrement préoccupé par ce qui suit :

a)La multiplication des discours anti-genre dans le domaine public, les vives réactions eu égard à la perception de l’égalité des genres et les déclarations misogynes exprimées dans les médias, y compris par de hauts responsables politiques ;

b)La promotion d’un concept de valeurs familiales traditionnelles qui confine les femmes au seul rôle de mère responsables des tâches domestiques et l’absence d’une stratégie globale d’élimination des stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société ;

c)La persistance des mariages d’enfants et des mariages forcés, en particulier chez les filles roms, malgré l’existence d’une législation interdisant le mariage des personnes de moins de 16 ans ;

d)La multiplication des discours de haine et la prévalence des préjugés de genre dans les médias, en particulier dans les médias sociaux en ligne.

Le Comité réitère ses précédentes recommandations (CEDAW/C/BGR/CO/4-7, par. 22) et prie instamment l ’ État partie  :

a) De mettre en place une stratégie et de mener des campagnes publiques à grande échelle en faveur des femmes et des hommes à tous les niveaux de la société, notamment auprès des ministères concernés, de la société civile, des dirigeants communautaires et religieux, des établissements universitaires, du monde des affaires et des médias, afin de réaffirmer la notion d ’ égalité entre les genres et de représenter les femmes de manière positive et comme participant activement à la vie économique, sociale et politique  ;

b) De faire la chasse aux termes misogynes dans les déclarations publiques des responsables politiques et dans les reportages des médias, d ’ encourager les médias à instaurer un mécanisme d ’ autorégulation efficace afin de lutter contre l ’ utilisation de tels termes, et de promouvoir des représentations positives et non stéréotypées des femmes dans le système éducatif  ;

c) De veiller à ce que les cas de mariages d ’ enfants ou de mariages forcés fassent l ’ objet de véritables enquêtes et que les auteurs soient poursuivis et dûment sanctionnés, et que les femmes et les filles victimes de mariage forcé aient accès à une protection, y compris à des foyers d ’ accueil et à des services d ’ appui  ;

d) De former les journalistes à l ’ égalité des genres, à la protection des droits des femmes et aux formes de couverture de la violence et des stéréotypes de genre par la presse  ;

e) D ’ introduire des sanctions ou d ’ instaurer le principe de responsabilité dans la législation administrative concernant les stéréotypes répétés ou les comportements sexistes.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité prend note de la décision no 13/2018 du 27 juillet 2018 de la Cour constitutionnelle sur l’incompatibilité de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique (Convention d’Istanbul) avec la Constitution et s’inquiète du fait que cette décision fasse obstacle à la ratification de la Convention d’Istanbul. Il reste également préoccupé par :

a)Le fait que toutes les formes de violence fondée sur le genre, y compris la violence physique, sexuelle, psychologique et économique, à l’égard des femmes et des filles ne sont pas définies ni criminalisées dans la législation actuelle, et qu’il n’existe pas de disposition permettant de poursuivre d’office les actes de violence à l’égard des femmes fondée sur le genre ;

b)Le fait que la définition du viol dans le Code pénal n’inclut pas le viol conjugal ;

c)Le taux élevé de retrait des plaintes des victimes de violence de genre, le délai d’un mois accordé pour déposer une demande d’ordonnance de protection (voir la loi sur la protection contre la violence domestique, art. 10, par. 1) et l’absence de transfert de la charge de la preuve en faveur des victimes dans les procédures civiles concernant les ordonnances de protection ;

d)Les cas de décès, de violence et de mauvais traitements enregistrés dans les établissements psychiatriques et de santé mentale et les centres de protection sociale ;

e)L’absence de services d’État spécialisés d’accompagnement des victimes, notamment de foyers accueillant les victimes de violence de genre, malgré la forte incidence dans l’État partie de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre, y compris la violence domestique, qui reste largement sous-déclarée en raison de la stigmatisation sociale et du manque de confiance des victimes dans les autorités chargées de l’application de la loi ;

f)Le fait que les juges, les procureurs, les fonctionnaires de police et le personnel de santé ne soient pas sensibilisés au problème de la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre ni formés pour y faire face, en conséquence de quoi ils ne peuvent pas intervenir dans les affaires de violence fondée sur le genre en tenant véritablement compte des besoins particuliers des femmes ;

g)L’absence de données exhaustives sur la violence à l’égard des femmes et des filles fondée sur le genre ventilées par âge et par relation entre la victime et l’auteur (nombre de plaintes déposées, de poursuites engagées et de déclarations de culpabilité prononcées, sanctions imposées aux personnes reconnues coupables et mesures de réparation prises en faveur des victimes) ;

h)L’insuffisance des crédits alloués aux organisations de la société civile qui fournissent des services d’aide spécialisés aux femmes victimes de violence fondée sur le genre.

Le Comité, rappelant sa recommandation générale n o 35 (2017) sur la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale n o 19 , recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ accélérer la mise en conformité avec la Convention de la législation nationale visant à éliminer la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, et de ratifier la Convention d ’ Istanbul  ;

b) De modifier la législation actuelle, notamment la loi sur la protection contre la violence domestique, afin de reconnaître toutes les formes de violence de genre, y compris la violence physique, sexuelle, psychologique et économique, à l ’ égard des femmes et des filles et de faire en sorte que cette violence puisse être poursuivie d ’ office et sanctionnée par des peines appropriées, proportionnées à la gravité de l ’ infraction  ;

c) De modifier le Code pénal afin de définir le viol conjugal comme une circonstance aggravante  ;

d) De veiller à ce que des mécanismes de plainte indépendants et efficaces soient mis en place à l ’ usage des femmes vivant dans des institutions psychiatriques et de santé mentale et dans des centres de protection sociale, et à ce que tous les décès et les cas de violence et de mauvais traitements fassent l ’ objet d ’ une enquête et de véritables sanctions, avec l ’ établissement d ’ une responsabilité pénale, le cas échéant  ;

e) De modifier le paragraphe 1 de l ’ article 10 de la loi sur la protection contre la violence domestique afin de supprimer le délai d ’ un mois pour le dépôt des ordonnances de protection, de garantir l ’ accès à une aide juridictionnelle gratuite dans les procédures liées à la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre, d ’ empêcher la stigmatisation des victimes qui demandent des ordonnances de protection et d ’ alléger la charge de la preuve qui pèse sur elles, et d ’ imposer de véritables sanctions en cas de non-respect de ces ordonnances  ;

f) D ’ augmenter le nombre de foyers d ’ accueil publics accessibles dans les zones urbaines et rurales et de services de conseil et de réadaptation dans tout l ’ État partie et de veiller à ce que les femmes et les filles victimes de violence fondée sur le genre, y compris celles qui appartiennent aux groupes les plus défavorisés, bénéficient d ’ un accès total et sans entrave à un accompagnement médical et psychologique  ;

g) D ’ instaurer un système permettant de donner aux juges, aux procureurs, aux fonctionnaires de police et aux autres agents chargés de l ’ application de la loi les moyens de faire appliquer strictement les dispositions du droit pénal relatives à la violence à l ’ égard des femmes fondée sur le genre et aux procédures d ’ enquête tenant compte des questions de genre, et de mettre en place une formation systématique du personnel de santé à un traitement des victimes tenant compte des questions de genre  ;

h) D ’ allouer un financement suffisant aux organisations de la société civile qui mettent à la disposition des femmes victimes de violences fondées sur le genre des foyers et des services de soutien accessibles, et de renforcer la coopération avec ces organisations, tout en veillant à ce que l ’ État partie conserve la responsabilité première quant à la supervision de la prestation de ces services  ;

i) De créer une base de données et de collecter systématiquement des données statistiques sur toutes les formes de violence fondée sur le genre, y compris la violence domestique et sexuelle, ventilées par sexe, âge, handicap, nationalité et relation entre la victime et l ’ auteur.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité salue les travaux de la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains et du Mécanisme national d’orientation et de soutien pour les victimes de traite, mais s’inquiète de l’absence de coordination entre ces deux organes et du manque de ressources humaines, techniques et financières allouées à la Commission. Il reste également préoccupé par :

a)Le fait que l’État partie soit un pays d’origine et de destination de la traite des femmes et des filles à des fins d’exploitation sexuelle et de travail forcé ;

b)Des informations faisant état de 64 cas, en 2018, d’enfants et d’organes vendus à l’étranger par de jeunes femmes appartenant à des communautés roms vulnérables en raison de la pauvreté et de l’absence de perspectives économiques ;

c)Le manque de services de protection des victimes de la traite, dont des femmes et des filles, et de services d’aide qui bénéficient d’un financement suffisant, et le fait que les agents de la fonction publique ne connaissent ni ne maîtrisent suffisamment les indicateurs relatifs à cette traite ;

d)Le manque d’informations sur les services de réadaptation et de réinsertion, y compris les foyers d’accueil et l’assistance psychologique, auxquels peuvent avoir recours les femmes et les filles victimes de la traite, en particulier les femmes appartenant à des groupes défavorisés, ainsi que sur les programmes destinés à faire sortir les femmes de la prostitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières appropriées à la Commission nationale de lutte contre la traite des êtres humains  ;

b) De veiller à la bonne application de la législation relative à la lutte contre la traite des personnes, notamment en dispensant aux juges, aux procureurs, à la police des frontières, aux autorités d ’ immigration et aux autres responsables de l ’ application des lois une formation systématique sur la détection précoce des victimes de la traite et l ’ orientation de celles-ci vers des services appropriés et sur les méthodes d ’ interrogatoire tenant compte des questions de genre  ;

c) D ’ enquêter sur les cas de vente d ’ enfants et d ’ organes à l ’ étranger, d ’ en sanctionner les auteurs, de proposer des services de réadaptation et une assistance aux victimes et d ’ offrir aux communautés roms défavorisées une protection et des perspectives économiques  ;

d) De veiller à ce que les victimes de la traite aient accès à des services efficaces et soient indemnisées  ;

e) De recueillir des informations et des données sur les femmes contraintes de se prostituer, de s ’ attaquer aux causes profondes de l ’ exploitation des femmes et des filles à des fins de prostitution, de mettre en place des mesures visant à faire reculer la demande de prostitution et de proposer aux femmes des programmes visant à les sortir de la prostitution et à leur donner accès à d ’ autres sources de revenus.

Participation des femmes à la vie politique et à la vie publiquedans des conditions d’égalité

Le Comité note avec préoccupation :

a)La sous-représentation persistante des femmes, en particulier des femmes handicapées et des femmes roms, au Parlement, aux postes ministériels, aux postes de décision au niveau municipal et aux postes diplomatiques de haut niveau ;

b)L’absence de programmes et de stratégies visant à assurer la participation à la vie politique et publique des femmes roms, des femmes rurales et des femmes handicapées ;

c)Le fait que les candidates à des fonctions publiques ne sont pas formées aux fonctions de direction, à la négociation et aux techniques de campagne.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De renforcer rapidement la participation des femmes, notamment les femmes roms, les femmes rurales et les femmes handicapées, à la vie politique et publique, en particulier au niveau de la prise de décision  ;

b) De prendre des mesures temporaires spéciales, notamment des quotas réglementaires et un ensemble de règles visant à garantir la parité des genres dans les services public et diplomatique, conformément à l ’ article 4 1 ) de la Convention et à la recommandation générale n o 25 du Comité, afin d ’ accroître la représentation des femmes au Parlement, aux postes ministériels, dans le système judiciaire et dans les services public et diplomatique  ;

c) De proposer des formations aux fins du renforcement des capacités en matière de gestion de campagnes et de direction politique, en particulier aux femmes subissant des formes de discrimination croisée, telles que les femmes roms, les femmes rurales ou les femmes handicapées, et de sensibiliser les dirigeants politiques et le public au fait que la participation pleine, libre et démocratique des femmes à la vie politique et publique, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, est nécessaire à la pleine application des droits humains des femmes.

Éducation

Le Comité prend note des réformes de l’éducation engagées dans l’État partie, en particulier de l’adoption, en 2015, de la nouvelle loi sur l’éducation préscolaire et scolaire, qui introduit les principes d’éducation inclusive dans tous les jardins d’enfants et toutes les écoles, ainsi que de la stratégie nationale visant à réduire l’abandon scolaire précoce pour la période 2013-2020, de la stratégie nationale de scolarisation des enfants et d’intégration des étudiants issus de minorités ethniques pour la période 2015-2020, de la stratégie nationale d’apprentissage tout au long de la vie pour la période 2014-2020 et de la stratégie nationale visant à améliorer et à promouvoir l’alphabétisation pour la période 2014-2020. Il est toutefois préoccupé par les points suivants :

a)Aucune étude d’impact à mi-parcours des différentes politiques et stratégies n’a été entreprise ;

b)Malgré l’adoption du programme de science et d’éducation pour une croissance intelligente pour la période 2014-2020, les femmes et les filles tendent à se concentrer dans des domaines d’études traditionnellement féminins et sont sous-représentées dans les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques, ce qui limite leurs perspectives d’emploi ;

c)En l’absence de programmes d’éducation à l’égalité des genres et d’éducation systématique concernant la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, les programmes scolaires contribuent à renforcer les stéréotypes de genre ;

d)Il y a des disparités entre les zones urbaines et rurales et les taux d’assiduité des filles et des femmes, notamment des roms, sont relativement faibles à tous les niveaux du système éducatif.

Rappelant sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De procéder à une étude de l ’ impact des différentes politiques et stratégies adoptées dans le domaine de l ’ éducation et de prendre des mesures ciblées visant à réduire les taux d ’ abandon scolaire, en mettant l ’ accent sur les mesures destinées à faire en sorte que les filles vivant dans des zones rurales, les filles handicapées et les filles roms, ainsi que les filles migrantes ou réfugiées, poursuivent leur scolarité et qu ’ il y ait une augmentation des taux de scolarisation de ces filles à tous les niveaux du système éducatif  ;

b) De s ’ attaquer aux stéréotypes discriminatoires et aux obstacles structurels susceptibles de dissuader les filles de faire des études dans des domaines où les hommes sont traditionnellement majoritaires, tels que les sciences, la technologie, l ’ ingénierie, les mathématiques et l ’ informatique, et évaluer l ’ impact des programmes visant à diversifier les choix éducatifs  ;

c) De prendre des mesures coordonnées pour favoriser une plus grande diversité des choix éducatifs et professionnels s ’ offrant aux garçons et aux filles et d ’ accroître le nombre de filles dans les filières d ’ apprentissage, les filières d ’ artisanat et les filières techniques et scientifiques  ;

d) De veiller à ce que du matériel pédagogique tenant compte des questions de genre soit utilisé à tous les niveaux d ’ enseignement  ;

e) D ’ élaborer et d ’ intégrer dans les programmes scolaires des cours inclusifs et accessibles sur l ’ égalité des genres, notamment sur les droits des femmes, les femmes ayant joué un rôle de premier plan dans la vie publique et la prévention des stéréotypes de genre et de la discrimination fondée sur le genre, ainsi qu ’ une éducation adaptée à l ’ âge sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, comprenant une éducation sexuelle complète destinée aux adolescentes et aux adolescents qui mette l ’ accent sur les comportements sexuels responsables  ;

f) D ’ envisager la suppression des taxes et des paiements supplémentaires imposés au titre des jardins d ’ enfants et de l ’ éducation préscolaire afin de réduire la charge des ménages ruraux, roms et migrants.

Emploi

Le Comité reste inquiet du fait que, bien qu’ayant ratifié la Convention de 1951 sur l’égalité de rémunération (no 100) de l’Organisation internationale du Travail, l’État partie n’applique pas pleinement le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale. Le Comité note également avec préoccupation :

a)Le fait que, malgré une diminution ces dernières années, l’écart de rémunération entre les femmes et les hommes persiste (13,5 %) et a des répercussions négatives sur les femmes tout au long de leur vie professionnelle ;

b)La ségrégation verticale et horizontale des emplois et les difficultés d’intégration sur le marché du travail des femmes migrantes, des femmes roms, des femmes rurales, des femmes âgées et des femmes handicapées ;

c)Le très faible nombre de cas de harcèlement sexuel et de discrimination fondée sur le genre sur le lieu de travail ayant fait l’objet d’enquêtes entre 2014 et 2018, malgré l’existence d’une législation y relative ;

d)La différence entre l’âge maximum de la retraite pour les femmes et les hommes, qui a un effet préjudiciable sur les prestations de retraite des femmes, l’écart entre les pensions versées aux hommes et aux femmes étant de 28 % ;

e)Le fait que les travailleurs et travailleuses domestiques sont souvent embauchés sans être déclarés et n’ont donc pas accès à des avantages tels qu’une assurance maladie et une pension.

Le Comité rappelle ses précédentes recommandations (CEDAW/C/BGR/CO/4-7, par. 34) et prie instamment l ’ État partie  :

a) De faire appliquer le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale afin de réduire et, à terme, de combler l ’ écart de rémunération entre hommes et femmes en passant en revue régulièrement les salaires pratiqués dans tous les secteurs, en adoptant des méthodes analytiques de classement et d ’ évaluation des emplois qui tiennent compte des questions de genre, et en réalisant régulièrement des inspections du travail et des enquêtes sur les salaires  ;

b) De renforcer les mesures visant à mettre un terme à la ségrégation verticale et horizontale des emplois et à améliorer l ’ accès des femmes, notamment des femmes migrantes, des femmes roms et des femmes handicapées, au marché du travail officiel, à encourager les femmes et les filles à choisir des parcours professionnels non traditionnels et à encourager en priorité les femmes à passer du travail à temps partiel au travail à temps plein, avec l ’ appui de structures de garde d ’ enfants adéquates, qui soient de qualité et accessibles  ;

c) De ratifier la Convention de 2019 sur la violence et le harcèlement (n o 190 ) de l ’ Organisation internationale du Travail et de centraliser l ’ enregistrement de toutes les plaintes de harcèlement sexuel  ;

d) De modifier le Code du travail afin d ’ harmoniser l ’ âge de la retraite, en vue de réduire et de combler l ’ écart entre les pensions des hommes et des femmes  ;

e) De ratifier la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o 189 ) et de garantir les droits des travailleurs domestiques.

Santé

Le Comité note avec préoccupation :

a)Des informations faisant état de violences fondées sur le genre commises à l’égard des femmes pendant l’accouchement et l’absence de procédures et de mécanismes de contrôle permettant de garantir l’application de normes de soins adéquates dans les services de maternité des hôpitaux ;

b)Le nombre élevé de grossesses précoces, l’absence dans les programmes scolaires d’un enseignement obligatoire adapté à l’âge sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation et le manque de formation des enseignants dans ce domaine ;

c)L’accès limité des femmes et des filles à des méthodes de contraception modernes et abordables, en particulier dans les zones rurales, et les difficultés auxquelles les adolescentes sont confrontées lorsqu’elles souhaitent avoir des informations sur les services de santé sexuelle et procréative ;

d)Des informations faisant état d’interventions chirurgicales en grande partie irréversibles pratiquées sur des femmes intersexes.

Le Comité, rappelant sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé et la cible 3 . 7 associée aux objectifs de développement durable, dont l ’ objet est d ’ assurer l ’ accès de toutes et tous à des services de soins de santé sexuelle et procréative, ainsi que sa précédente recommandation ( CEDAW/C/BGR/CO/4-7 , par. 36 ), recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ ériger en infraction la violence obstétricale et les autres formes de violence commises pendant l ’ accouchement et de garantir l ’ application de normes de soins adéquates et accessibles dans toutes les maternités des hôpitaux  ;

b) De prendre des mesures appropriées pour réaliser une enquête nationale sur la santé procréative, de mettre en œuvre la stratégie nationale de santé 2020 et le plan d ’ action national pour la période 2015 - 2020 et d ’ introduire dans les programmes scolaires un enseignement obligatoire, adapté à l ’ âge et inclusif, sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, y compris sur les formes modernes de contraception, la prévention des infections sexuellement transmissibles et les risques que comportent les avortements non médicalisés  ;

c) De renforcer la mise en œuvre des programmes de santé, notamment des programmes de sensibilisation inclusifs, afin de faire en sorte que toutes les femmes et les filles, y compris celles qui appartiennent à des groupes défavorisés ou vivent dans des zones rurales, aient accès à des méthodes contraceptives modernes et abordables  ;

d) De mettre en place des mesures appropriées afin de garantir des normes de soins adéquates, notamment l ’ accessibilité et le respect de l ’ autonomie des femmes et l ’ exigence du consentement libre, préalable et éclairé de toutes les femmes, et d ’ introduire des mécanismes permettant aux femmes ayant subi des mauvais traitements pendant l ’ accouchement de porter plainte  ;

e) D ’ élaborer et de mettre en œuvre un protocole de soins de santé fondé sur les droits concernant les femmes intersexes et de veiller à ce que ces dernières ne subissent pas d ’ intervention chirurgicale ni de traitement sans avoir fait part de leur consentement préalable, libre et éclairé.

Avantages économiques et sociaux et autonomisation économique des femmes

Le Comité est préoccupé par le fait que, selon l’Indice de l’égalité de genre de l’Institut européen pour l’égalité entre les hommes et les femmes, 24 % des femmes, en particulier les femmes roms, les femmes célibataires et les femmes handicapées, risquent de connaître la pauvreté dans l’État partie. Il note également avec inquiétude :

a)L’absence de mesures, notamment de mesures temporaires spéciales et de programmes ciblés destinés à promouvoir l’entrepreneuriat féminin et l’autonomisation économique des femmes ;

b)Le manque de renseignements sur les mécanismes de prêt et les autres formes de crédit financier auxquels les femmes peuvent avoir accès, et l’absence de formations aux compétences de chef d’entreprise ;

c)Le manque d’informations sur les ménages à faibles revenus dirigés par des femmes et sur la contribution des mesures sociales à l’amélioration de la situation économique des femmes à faibles revenus.

Le Comité appelle l ’ attention sur la cible 5 .a associée aux objectifs de développement durable, réitère sa recommandation précédente ( CEDAW/C/BGR/CO/4-7 , par. 40 ) et recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter des mesures ciblées, notamment en matière de formation professionnelle et d ’ enseignement technique, et de faciliter l ’ accès des femmes aux prêts et autres formes de crédit financier, afin de soutenir et de stimuler l ’ esprit d ’ entreprise et de promouvoir l ’ autonomisation économique des femmes, en particulier dans les zones rurales  ;

b) De recueillir des données sur les ménages à faibles revenus dirigés par une femme et de renforcer ses programmes de lutte contre la féminisation de la pauvreté  ;

c) De concevoir des stratégies et des programmes visant à tirer parti des possibilités d ’ autonomisation économique des femmes, en veillant à ce que les femmes soient associées à la conception de ces interventions, et d ’ axer sa démarche sur les femmes non seulement en tant que victimes ou bénéficiaires mais aussi en tant qu ’ actrices de la formulation et de l ’ application des politiques.

Femmes rurales, migrantes et demandeuses d’asile

Le Comité prend note de l’élaboration d’un programme national de développement rural dans l’État partie, mais s’inquiète du fait que ce programme n’est pas axé sur les femmes ou l’égalité des genres. Il est également préoccupé par le fait que les femmes rurales, les migrantes et les demandeuses d’asile continuent de subir des formes de discrimination croisée, et en particulier par ce qui suit :

a)Les femmes rurales n’ont pas accès aux infrastructures, aux transports ni à un soutien financier ou autre pour leurs activités agricoles et économiques, ce qui entraîne une migration à grande échelle des jeunes femmes vers les zones urbaines ou des pays étrangers ;

b)Les femmes migrantes et les demandeuses d’asile, qui ont parfois vécu dans le pays pendant de nombreuses années, n’ont qu’un accès limité aux services offerts aux citoyens bulgares, en particulier l’éducation, la santé et les services sociaux ;

c)Les femmes migrantes et les demandeuses d’asile n’ont qu’un accès limité aux centres d’accueil gérés par l’État en raison de conditions d’admissibilité strictes et d’un manque de coordination, ainsi que de l’absence, dans ces centres, d’une prise en compte des questions de genre qui soit conforme aux normes de l’ONU.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) De redoubler d ’ efforts pour garantir aux femmes rurales un accès adéquat aux services sociaux et sanitaires ainsi qu ’ aux autres services de base, aux transports et aux infrastructures, et de mettre en place des activités rémunératrices destinées aux femmes des zones rurales, conformément à la recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales  ;

b) D ’ offrir aux migrantes et aux demandeuses d ’ asile un meilleur accès aux services sociaux et sanitaires ainsi qu ’ aux autres services de base, aux transports et aux infrastructures  ;

c) Appliquer dans les centres d ’ accueil gérés par l ’ État une démarche tenant compte des questions de genre qui reconnaisse les besoins spécifiques des migrantes et des demandeuses d ’ asile, en particulier les femmes enceintes, handicapées, célibataires ou âgées.

Femmes et filles confrontées à des formes de discrimination multiples et croisées

Le Comité s’inquiète du fait que les femmes et les filles handicapées, les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres et les personnes intersexes continuent d’être confrontées à des formes de discrimination croisée et de violence fondée sur le genre.

Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre d ’ urgence des mesures temporaires spéciales visant à garantir l ’ égalité réelle, à tous les stades de la vie, des femmes et des filles qui sont aux prises avec des formes de discrimination croisée, telles que les femmes et les filles handicapées, les femmes lesbiennes, bisexuelles et transgenres et les personnes intersexes.

Femmes roms

Le Comité prend note des mesures mises en œuvre par l’État partie dans le cadre de la stratégie nationale d’intégration des Roms pour la période 2012-2020. Toutefois, il s’inquiète du fait que ces mesures n’ont pas entraîné de changements dans la perception ou la situation des femmes et des filles roms, qui sont souvent marginalisées et exposées à des formes de discrimination croisée et continuent d’être victimes de stigmatisation et de pratiques néfastes.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ adopter des mesures ciblées pour lutter contre les formes de discrimination croisée à l ’ égard des femmes et des filles roms, notamment en ce qui concerne l ’ accès à l ’ éducation, à l ’ emploi, aux soins de santé, au logement et aux autres services sociaux  ;

b) De renforcer et d ’ appliquer des programmes sur l ’ égalité des genres, la réduction de la pauvreté et l ’ inclusion sociale des femmes et des filles roms  ;

c) D ’ établir des échanges avec les établissements nationaux d ’ enseignement et les organisations de la société civile représentant les femmes roms afin de coordonner les actions visant à combattre les préjugés, les stéréotypes ethniques et la discrimination et à promouvoir la participation égale des femmes roms dans tous les domaines de la vie  ;

d) D ’ effectuer une évaluation multisectorielle de la stratégie nationale d ’ intégration des Roms pour la période 2012 - 2020 en ce qui concerne l ’ égalité des genres, en mettant l ’ accent sur ses résultats concrets obtenus pour les femmes et les filles roms.

Mariage et rapports familiaux

Le Comité note avec préoccupation :

a)Le fait que malgré les dispositions du Code de la famille, dans lequel l’âge minimum du mariage est fixé à 18 ans pour les filles comme pour les garçons et la cohabitation avec des personnes de moins de 16 ans est interdite, le mariage d’enfants et la cohabitation avec des enfants restent courants dans la population rom ;

b)L’absence de mesures contre les personnes qui ne versent pas les pensions alimentaires ;

c)Le recours à la médiation dans des procédures de divorce concernant des cas de violence domestique ;

d)L’absence de protection des enfants dont les parents travaillent à l’étranger, en particulier les filles, contre la violence.

Le Comité recommande à l ’ État partie  :

a) D ’ empêcher les mariages d ’ enfants et les mariages forcés et d ’ éliminer ces pratiques au moyen d ’ une action concertée des autorités compétentes, des organisations non gouvernementales et de la communauté rom, notamment  :

i) en renforçant les campagnes de sensibilisation au caractère criminel de telles unions et aux répercussions négatives qu ’ elles ont pour la santé et le bien-être des femmes et des filles  ;

ii) en mettant sur pied des mécanismes qui permettent de détecter ces mariages  ;

iii) en veillant à ce que tous les cas fassent l ’ objet d ’ une enquête et que les responsables soient poursuivis et dûment sanctionnés  ;

iv) en recueillant systématiquement des données sur le nombre de cas de mariages forcés ou de cohabitation avec un mineur signalés et d ’ enquêtes menées, de poursuites engagées et de sanctions infligées dans le cadre de telles affaires  ;

b) De garantir l ’ application stricte des obligations alimentaires, notamment en renforçant les sanctions en cas de non-respect de ces obligations, et l ’ octroi d ’ une pension alimentaire par l ’ État lorsque le parent est en défaut  ;

c) D ’ abroger les dispositions du code de la famille exigeant le recours à la médiation dans les procédures de divorce  ;

d) De protéger les filles et les garçons dont les parents travaillent à l ’ étranger contre l ’ exploitation et les atteintes sexuelles.

Collecte et analyse de données

Le Comité déplore le manque de données statistiques, ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique, situation migratoire, handicap et autres facteurs utiles, qui permettraient à l’État partie de déterminer l’ampleur et la nature de la discrimination à l’égard des femmes et des filles, d’élaborer en connaissance de cause des politiques ciblées, mais aussi de suivre et d’évaluer systématiquement les progrès faits en vue de réaliser l’égalité réelle des femmes et des hommes dans tous les domaines visés par la Convention ainsi que d’atteindre les cibles relatives à l’égalité des genres associées aux objectifs de développement durable.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ améliorer la collecte, l ’ analyse et la diffusion de données exhaustives, ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique, situation migratoire, handicap et autres facteurs utiles, et d ’ utiliser des indicateurs mesurables permettant d ’ apprécier l ’ évolution de la situation des femmes et les progrès faits en vue de réaliser l ’ égalité réelle des femmes et des hommes dans tous les domaines visés par la Convention et d ’ atteindre les cibles relatives à l ’ égalité des genres associées aux objectifs de développement durable.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et à continuer d ’ évaluer la réalisation des droits consacrés par la Convention dans le contexte de l ’ examen après 25 ans de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing afin de parvenir à l ’ égalité réelle des femmes et des hommes.

Diffusion

Le Comité prie l ’ État partie de veiller à diffuser rapidement les présentes observations finales, dans la langue officielle de l ’ État partie aux institutions publiques concernées à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier au Gouvernement, aux ministères, à l ’ Assemblée nationale et au corps judiciaire, afin d ’ en permettre la pleine application.

Ratification d’autres instruments

Le Comité souligne que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme contribuerait à promouvoir l ’ exercice effectif des droits individuels et libertés fondamentales par les femmes dans tous les aspects de la vie. Il l ’ invite donc à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, auxquelles il n ’ est pas encore partie.

Suite donnée aux observations finales

Le Comité prie l ’ État partie de lui communiquer par écrit, dans un délai de deux ans, des informations sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations énoncées aux paragraphes 16 a) et b), 24 c) et 34 c) ci-dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son neuvième rapport périodique en février 2024 . Le rapport devra être présenté dans les délais et couvrir toute la période écoulée, jusqu ’ à la date à laquelle il sera soumis.

Le Comité invite l ’ État partie à se conformer aux directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, dont le document de base commun et les rapports correspondant à chaque instrument (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).