Quarantième session

14 janvier-1er février 2008

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes

Bolivie

Le Comité a examiné le rapport unique de la Bolivie valant deuxième à quatrième rapports périodiques (CEDAW/C/BOL/2-4) à ses 811e et 812e séances, le 15 janvier 2008 (voir CEDAW/C/SR.811 et 812). On trouvera la liste des questions suscitées par le rapport dans le document CEDAW/C/BOL/Q/4 et les réponses données par la Bolivie dans le document CEDAW/C/BOL/Q/4/Add.1.

Introduction

Le Comité remercie l’État partie pour son rapport unique (valant deuxième à quatrième rapports périodiques) qui, bien que présenté en retard, est conforme aux directives du Comité en la matière, sincère et objectif et tient compte des observations finales précédentes du Comité. Il remercie également l’État partie pour ses réponses écrites aux questions soulevées par le groupe de travail présession.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau présidée par la Ministre de la justice et la Vice-Ministre de la condition féminine et des générations. Il remercie l’État partie pour son exposé oral, qui a donné une vue d’ensemble des progrès accomplis et des problèmes rencontrés dans la promotion de l’égalité entre les sexes, ainsi que pour les éclaircissements qu’il a apportés en réponse aux questions posées par le Comité.

Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié, en 2000, le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie s’est efforcé d’appliquer la Convention en adoptant divers lois, politiques, plans et programmes, comme la loi 1674 contre la violence familiale, la loi 1779 sur la réforme et le renforcement du régime électoral, la loi 1788 sur la réforme du pouvoir exécutif, qui énonce des mesures visant à promouvoir l’égalité entre les sexes, la loi sur les groupements de citoyens et les peuples autochtones, la loi 2033 relative à la protection des victimes de délits contre la liberté sexuelle, la loi 3325 sur la traite et le trafic des personnes et les crimes connexes, le plan national de politiques publiques de promotion des droits de la femme, le plan national pour des grossesses et des accouchements sans risques et le plan national de santé procréative.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant l’obligation de l’État partie de veiller à ce que toutes les dispositions de la Convention soient systématiquement et constamment appliquées, le Comité estime que, d’ici à la présentation de son prochain rapport, l’État partie doit en priorité accorder son attention aux sujets de préoccupation et aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il engage donc l’État partie à concentrer son action sur ces sujets et à indiquer, dans son prochain rapport, les mesures adoptées et les résultats obtenus en la matière. Il l’engage également à transmettre les présentes observations finales à tous les ministères concernés, au Parlement et à l’appareil judiciaire, afin d’obtenir qu’elles soient appliquées dans leur intégralité.

Le Comité se dit préoccupé par les disparités de droit et de fait entre hommes et femmes pour ce qui est de la protection juridique et de l’inégalité entre les sexes. Il se félicite des réformes législatives menées à bien et des projets de loi en cours d’examen, qui visent à améliorer la situation de la femme bolivienne, mais note avec préoccupation que des dispositions discriminatoires subsistent, en particulier dans le droit pénal et civil. Le Comité fait référence notamment à l’article 317 du Code pénal, qui favorise, en cas de viol ou d’autres abus, l’octroi de l’impunité au coupable si ce dernier se marie avec la victime, ainsi qu’à l’article 13 du Code de la famille relatif aux causes de divorce.

Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour assurer l’application effective de la législation relative à l’égalité entre les sexes. Il l’engage à rationaliser les procédures d’examen de la compatibilité de ces lois avec la Convention, à abroger sans délai toutes les dispositions discriminatoires contre les femmes qui subsistent, en particulier dans sa législation pénale et civile, pour assurer l’application des lois contre la discrimination à l’égard des femmes.

Le Comité prend acte des restructurations menées par l’actuel Vice-Ministère de la condition féminine et des générations, mais se dit préoccupé par l’instabilité institutionnelle des mécanismes nationaux de promotion de la femme, qui n’ont ni le pouvoir décisionnel ni les ressources financières et humaines requis pour promouvoir efficacement l’application de la Convention et l’égalité entre les sexes, tant au niveau central qu’aux échelons départemental et municipal. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’une politique générale d’institutionnalisation et d’intégration de l’égalité des sexes, en particulier aux niveaux départemental et municipal, comme axe principal de la définition des priorités stratégiques de l’État.

Le Comité demande à l’État partie d’assurer la stabilité institutionnelle des mécanismes nationaux de promotion de la femme et de leur donner un pouvoir décisionnel suffisant et des ressources humaines et financières, aussi bien au niveau central qu’aux échelons régional et municipal, pour qu’ils puissent promouvoir et coordonner efficacement l’application de la Convention et l’intégration d’une démarche soucieuse de l’égalité des sexes dans tous les domaines d’activité et dans tous les organes gouvernementaux. Le Comité encourage l’État partie à élaborer, adopter et appliquer un plan d’action national intégré d’ensemble visant à réaliser l’égalité des sexes et la promotion de la femme.

Le Comité note avec préoccupation la persistance de niveaux élevés de pauvreté et d’exclusion sociale chez les femmes boliviennes, particulièrement celles des zones rurales, les autochtones, les femmes âgées et les handicapées, ainsi que le fait qu’elles n’ont pas suffisamment accès à la terre, au logement et aux services sociaux de base. Le Comité note que l’économie de marché privée d’une dimension sociale, qui a contribué à l’accroissement de la pauvreté, risque d’avoir un impact plus important sur la pauvreté des femmes. Comme indicateurs de la pauvreté chez les femmes, on peut retenir les taux d’analphabétisme élevés, la faible scolarisation et les taux élevés d’abandon scolaire, le piètre accès aux soins de santé, y compris aux services de santé procréative et d’hygiène sexuelle, qui entraînent des taux de mortalité maternelle élevés, et le manque d’accès à la terre, au logement, aux possibilités de formation à des activités génératrices de revenus et aux services sociaux de base.

Le Comité recommande d’étudier l’impact de l’économie de marché sur la pauvreté des femmes et d’intégrer des mesures appropriées pour y faire face dans la stratégie de réduction de la pauvreté.

Le Comité prie instamment l’État partie de faire en sorte qu’une démarche soucieuse d’équité entre les sexes soit intégrée dans toutes les politiques et tous les programmes d’éradication de la pauvreté et que ces politiques et programmes s’attaquent à la nature structurelle et aux diverses dimensions de la pauvreté que connaissent les femmes, en particulier les femmes rurales, les autochtones, les femmes âgées et les handicapées. Il recommande que l’État partie redouble d’efforts pour exécuter, à l’échelle nationale, des programmes efficaces dans les domaines de l’éducation et de la santé, notamment en ce qui concerne l’alphabétisation fonctionnelle, le développement des compétences et la formation à des activités rémunératrices, y compris la fourniture de mécanismes de microfinancement, de façon à réduire la pauvreté, et l’engage à prendre des mesures visant à assurer aux femmes l’égalité d’accès à la terre, au logement, aux soins de santé et aux services sociaux de base.

Le Comité est particulièrement préoccupé par la situation d’invisibilité et d’exclusion sociale dont souffre la communauté afro-bolivienne du fait qu’elle n’est pas reconnue dans les statistiques nationales, ce qui entrave son accès aux services sociaux de base et fait en particulier que les femmes afro-boliviennes souffrent des chevauchements des formes de discrimination fondées sur la race et sur le sexe.

Le Comité exhorte l’État partie à prendre les mesures nécessaires afin que les hommes et les femmes de la communauté afro-bolivienne aient accès à tous les services sociaux de base, en étant inclus dans les statistiques nationales, à s’attaquer à la vulnérabilité particulière des femmes afro-boliviennes et à faire rapport sur les mesures prises à cette fin dans son prochain rapport.

Le Comité est préoccupé par la question de l’accès à la justice, particulièrement en ce qui concerne les femmes qui souffrent des handicaps suivants : leur faible taux d’analphabétisme; le déficit d’information concernant leurs droits; l’absence d’une assistance juridique adaptée à leurs besoins; la lenteur et le coût des procédures judiciaires; et le fait que le pouvoir judiciaire ne connaisse pas suffisamment la Convention.

Le Comité exhorte l’État partie à créer les conditions nécessaires pour que les femmes, notamment les pauvres, les femmes rurales et les autochtones, puissent accéder à la justice et à mieux les informer dans les langues pertinentes, s’il y a lieu, de la législation et de leurs droits ainsi que des moyens dont elles disposent pour revendiquer efficacement ces droits. Il exhorte également l’État partie à prendre des mesures supplémentaires pour diffuser des informations, sous les formes appropriées, sur la Convention, les procédures prévues au titre du Protocole facultatif et les recommandations générales du Comité et à mettre en œuvre, à l’intention des procureurs, des juges et des avocats, des programmes couvrant tous les aspects pertinents de la Convention et du Protocole facultatif.

Tout en notant les efforts faits par l’État partie, le Comité est préoccupé par le fait que de nombreuses femmes, notamment les autochtones dans les zones rurales, les femmes âgées et les handicapées, ne possèdent toujours pas de pièces d’identité et ne peuvent donc pas avoir accès aux institutions publiques ou aux services et avantages sociaux auxquels elles ont droit.

Le Comité engage l’État partie à continuer de faciliter et d’accélérer l’inscription des femmes dépourvues de documents d’identité, notamment les autochtones dans les zones rurales, les femmes âgées et les handicapées, et à délivrer à ces personnes des certificats de naissance et des documents d’identité. Il exhorte l’État partie à fixer des objectifs et des calendriers concrets concernant ce processus et à présenter dans son prochain rapport des informations sur les progrès accomplis dans ce domaine.

En dépit de la mise en œuvre de programmes de sensibilisation, le Comité s’inquiète de la persistance de stéréotypes traditionnels liés aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille, dans l’éducation et dans la société en général. Ces stéréotypes renforcent la notion d’infériorité des femmes et touchent ces dernières dans tous les aspects et tout au long de leur vie. Le Comité est préoccupé par le fait que la dernière réforme de l’éducation n’ait pas traité de ces questions de manière approfondie.

Le Comité recommande l’élaboration et l’application, à l’intention des femmes et des hommes des zones rurales et urbaines, de politiques et de programmes qui contribuent à garantir l’élimination des stéréotypes associés aux rôles traditionnels des deux sexes dans la famille, et qui se reflètent dans l’éducation, l’emploi, la politique et la société. Il recommande aussi d’encourager les médias à donner une image favorable des femmes, ainsi que de l’égalité, au niveau du statut, des rôles et des responsabilités, des femmes et des hommes dans les sphères privée et publique.

Tout en félicitant l’État partie de reconnaître, dans sa législation et dans ses politiques, la diversité culturelle et d’autres différences, tout comme les particularités de ses communautés autochtones, le Comité est préoccupé par le fait que l’accent mis sur ces particularités pourrait compromettre le respect des normes de non-discrimination et l’égalité formelle et réelle des femmes et des hommes inscrite dans la Convention. Il s’inquiète particulièrement de ce que la reconnaissance de la justice communautaire par l’État partie – sans doute plus accessible à la population autochtone et rurale – pourrait se transformer en un mécanisme de perpétuation des stéréotypes et des préjugés, qui sont discriminatoires à l’égard des femmes et constituent des violations des droits de l’homme consacrés dans la Convention.

Le Comité exhorte l’État partie à harmoniser les concepts et les pratiques autochtones traditionnelles avec le cadre juridique de la Convention et à créer les conditions d’un dialogue interculturel élargi qui, tout en respectant la diversité, garantisse le plein respect des principes, des valeurs et des normes internationales relatifs à la protection des droits fondamentaux, notamment ceux des femmes.

Tout en prenant note des nombreuses initiatives d’ordre législatif et politique visant à réduire la violence à l’égard des femmes, particulièrement la violence au sein de la famille et la violence sexuelle, le Comité continue de constater avec préoccupation la portée, l’intensité et la prévalence de ce phénomène dans l’État partie, qui atteint pratiquement le féminicide, ainsi que l’absence de données statistiques relatives à la question. Il s’inquiète plus particulièrement des insuffisances de la loi 1674 contre la violence au sein de la famille et de la loi 2033 sur la protection des victimes de la violence sexuelle, notamment de la priorité accordée à la réconciliation et à l’intégrité familiale, ainsi que de l’incitation, par les autorités judiciaires, à ce que les femmes victimes renoncent à faire valoir leurs droits dans le cadre du système judiciaire.

Le Comité exhorte l’État partie à faire en sorte que la législation relative à la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles, particulièrement la violence au sein de la famille et la violence sexuelle, soit formulée et appliquée de façon appropriée, et à accorder une attention accrue et prioritaire à la conception et à la mise en œuvre d’une stratégie globale d’élimination de toutes les formes de violence à l’égard des femmes, conformément à la recommandation générale 19, afin de prévenir les actes de violence, de punir leurs auteurs et de mettre en place des services de soutien aux victimes. Cette stratégie devrait aussi inclure des mesures de sensibilisation, notamment à l’intention des autorités judiciaires, des responsables de l’application des lois et des procureurs, ainsi que des enseignants, des agents des services sanitaires et des services sociaux et des médias. Le Comité encourage l’État partie à communiquer, dans son prochain rapport périodique, des données statistiques détaillées sur l’impact des mesures prises pour lutter contre le phénomène, les progrès accomplis et les obstacles qui restent à surmonter.

Tout en prenant note des initiatives récentes de l’État partie visant à résoudre le problème de la traite, du trafic et de l’exploitation sexuelle des femmes et des filles, y compris la loi 3325 relative à la traite et au trafic de personnes et aux autres délits connexes, le Comité continue de s’inquiéter de la persistance de ce phénomène et de l’insuffisance des informations concernant ses causes et son ampleur dans l’État partie, ainsi que de l’absence de mesures appropriées permettant de lutter contre ce phénomène aux échelons national et régional.

Le Comité exhorte l’État partie à veiller à ce que soi en t promulgués et pleinement appliqués la législation relative à la traite, au trafic et à l’exploitation sexuelle des être humains, ainsi que le plan d’action national et d’autres mesures visant à lutter contre toutes les formes de la traite et de l’exploitation sexuelle des femmes. Il encourage l’État partie à promouvoir, dans toute la mesure du possible, des accords régionaux relatifs à cette question dans la zone du Marché commun du Sud. Le Comité recommande également à l’État partie de s’attaquer à la cause première de la traite et de l’exploitation sexuelle, en s’employant davantage à améliorer la situation économique des femmes, de manière à éliminer leur vulnérabilité face à l’exploitation et aux trafiquants, et de prendre des mesures visant à assurer la réhabilitation et la réintégration sociale des femmes et des filles victimes de la traite et de l’exploitation sexuelle, ainsi que des mesures punitives effectives à l’encontre des auteurs de ces délits.

Le Comité déplore que l’État partie n’ait pris que peu de mesures temporaires spéciales visant à accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes, comme le prévoient le paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et la recommandation générale no 25 du Comité, et que son gouvernement semble ne pas saisir la nature et la finalité, ainsi que la nécessité des mesures temporaires spéciales prévues par la Convention.

Le Comité engage l’État partie à adopter un cadre législatif pour prendre des mesures temporaires spéciales, conformément aux dispositions du paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et de sa recommandation générale n o 25 et à les appliquer lorsque cela est nécessaire pour accélérer l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes dans tous les domaines visés par la Convention.

Tout en se félicitant que cinq femmes aient récemment été nommées ministres et en soulignant l’importance des dispositions législatives établissant des quotas de participation des femmes aux organes dont les membres sont élus, le Comité note avec préoccupation que les femmes ne sont pas suffisamment représentées aux postes de responsabilité dans de nombreux domaines de la vie professionnelle et de la vie publique, comme la magistrature, notamment aux échelons les plus élevés. Il regrette également que la participation des femmes aux échelons supérieurs de la vie économique continue d’être très inférieure à celle des hommes. Il prend note de l’élaboration du projet de loi sur le harcèlement politique mais exprime sa vive préoccupation face à l’incidence de cette forme de violence à l’égard des femmes titulaires d’un poste dans la fonction publique.

Le Comité recommande que des politiques dynamiques et efficaces favorisant la participation des femmes à tous les niveaux de la vie professionnelle et de la vie publique, y compris des mesures spéciales temporaires, soient adoptées, que toute infraction aux dispositions en vigueur visant à établir un pourcentage minimal et un pourcentage maximal de chaque sexe soit dûment sanctionnée et que d’autres moyens volontaristes efficaces de veiller à leur application soient mis en œuvre. Il engage l’État partie à adopter dans les plus brefs délais le projet de loi sur le harcèlement politique en vue de lutter contre cette forme de violence et de l’éliminer, à s’assurer que les femmes qui en sont victimes ont accès à des moyens de protection et à des recours efficaces, que les auteurs de ces infractions sont traduits en justice et punis comme il se doit et que les femmes sont protégées contre d’éventuelles représailles.

Tout en notant que l’État partie s’est employé à réduire le taux d’analphabétisme, à faciliter l’accès des filles et des garçons à l’enseignement et à améliorer le taux de fréquentation scolaire en Bolivie, notamment grâce au bon scolaire « Juancito Pinto » ou au programme d’alphabétisation « Yo sí puedo », le Comité s’inquiète du faible niveau d’instruction des femmes et des filles et, en particulier, des forts taux d’analphabétisme et d’abandon scolaire. Il juge .particulièrement préoccupante la situation des filles et des femmes autochtones ou vivant en milieu rural, qui continuent d’être nettement défavorisées en termes d’accès à l’éducation et à un enseignement de qualité et en ce qui concerne la durée de leur scolarité, essentiellement en raison de l’absence d’infrastructures, de la distance, du risque d’être victimes d’actes de violence, du coût du transport et de la langue.

Le Comité exhorte l’État partie à prendre toutes les mesures voulues, y compris les mesures temporaires spéciales prévues au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention et dans sa recommandation générale n o 25, en vue de réduire le taux d’analphabétisme et d’abandon scolaire des filles, en particulier des autochtones et de celles qui vivent en milieu rural, et d’assurer l’accès de ces femmes et de ces filles à une éducation, de type scolaire ou autre.

Malgré l’existence d’une législation sur l’emploi, le Comité s’inquiète de la persistance des inégalités sur le marché du travail, en particulier des possibilités d’emploi limitées pour les femmes, et de l’important écart salarial entre hommes et femmes, de la ségrégation des emplois et des mauvaises conditions de travail.

Le Comité recommande de prendre les mesures voulues pour garantir le respect des dispositions de l’article 11 de la Convention et l’application des conventions de l’Organisation internationale du Travail sur la question, que la Bolivie a ratifiées. Il engage l’État partie à créer des mécanismes efficaces de suivi de l’application de la législation existante, et d’assurer la non-discrimination dans l’emploi et l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes.

Le Comité note avec préoccupation l’absence de législation générale sur l’emploi pour s’occuper des femmes dans le secteur non structuré, en particulier des femmes qui travaillent dans l’agriculture et au foyer, qui ne bénéficient d’aucune protection et prestation sociale. Le Comité juge préoccupant également l’absence de données sur l’emploi des femmes dans les secteurs structurés et non structurés de l’économie.

Le Comité recommande d’adopter une politique de l’emploi pour s’occuper des femmes dans le secteur non structuré, en particulier des femmes qui travaillent dans l’agriculture et au foyer. Il recommande également de recueillir systématiquement des données statistiques ventilées par sexe, par âge, par lieu de résidence en milieu urbain ou rural et par appartenance ethnique concernant les femmes dans les secteurs structurés et non structurés de l’économie.

Le Comité juge particulièrement préoccupants la vulnérabilité élevée des filles pour ce qui est du travail des enfants et des menaces particulières que les filles qui ont ou non une famille subissent dans la rue. Il note également les lacunes constatées dans l’élaboration du Programme national pour l’élimination progressive des pires formes de travail des enfants (2000-2010) et l’insuffisance des moyens financiers qui y sont consacrés, notamment le fait qu’il porte sur les filles, ce qui empêche le pays de se doter de mécanismes de contrôle et de suivi de ses incidences selon le sexe.

Le Comité demande à l’État partie d’aborder la question du travail des enfants en général, et de la situation vulnérable des filles en particulier, et en comblant les lacunes constatées dans l’élaboration du Programme national pour l’élimination progressive des pires formes de travail des enfants (2000-2010), en remédiant à l’insuffisance des moyens financiers qui y sont consacrés et en adaptant ses politiques et sa législation de manière à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu des Conventions de l’Organisation internationale du Travail n o 138, concernant l’âge minimal d’admission à l’emploi (14 ans), et n o 182, concernant l’interdiction des pires formes de travail des enfants et l’action immédiate en vue de leur élimination.

Le Comité exprime son inquiétude quant à la méconnaissance et à l’absence de protection de la santé sexuelle et procréative des femmes en Bolivie et s’inquiète notamment de ce que la loi cadre 1810 sur les droits sexuels et procréatifs, adoptée en 2004, soit au point mort, dans l’attente d’être promulguée, constituant ainsi un frein à l’accès à la santé sexuelle et procréative pour la population bolivienne tout entière. Il juge particulièrement préoccupants les données que l’État partie a fournies concernant l’écart existant entre le taux de fécondité constaté et le taux de fécondité attendu des femmes boliviennes, notamment en milieu rural, ainsi que le grand nombre de grossesses chez les adolescentes et les conséquences que cela entraîne pour l’exercice de leurs droits.

Le Comité exhorte l’État partie à prendre les mesures voulues pour sortir de l’impasse concernant la loi 1810 et la promulguer dans les plus brefs délais. Il engage le Gouvernement à renforcer l’exécution des programmes et des politiques de planification familiale et de santé procréative visant à faciliter l’accès des femmes et des adolescentes, en particulier celles qui vivent en milieu rural, à l’information relative aux soins et à d’autres services de santé, notamment en ce qui concerne la santé procréative et les moyens de contraception, conformément à la recommandation générale n o 24 du Comité relative à la santé et à la Déclaration et au Programme d’action de Beijing. Il recommande également à l’État partie de redoubler d’efforts pour intégrer dans les programmes scolaires l’éducation sexuelle en fonction de l’âge et organiser des campagnes d’information visant à prévenir les grossesses chez les adolescentes.

Le Comité est préoccupé par l’absence d’une perspective soucieuse de l’égalité des sexes dans la fourniture des services de santé, limitée aux femmes en âge de procréer. Il est préoccupé par le taux élevé de mortalité maternelle dans l’État partie, dû essentiellement aux complications de la grossesse et au fait que les femmes ne reçoivent pas de soins médicaux en temps utile, en particulier en milieu rural. Il s’inquiète aussi de la difficulté d’accès à un avortement non punissable, qu’il soit d’ordre thérapeutique ou moral, due notamment au fait que les dispositions légales en vigueur ne sont pas appliquées, ce qui pousse beaucoup de femmes à avorter illégalement et dans des conditions dangereuses pour leur santé.

Le Comité recommande que l’État partie intègre une perspective soucieuse de l’égalité des sexes dans sa politique national e de santé, conformément à la recommandation générale n o 24 et qu’il améliore l’accès des groupes de femmes les plus vulnérables, en particulier celles vivant dans les zones rurales et les autochtones, aux services de santé. Il exhorte l’État partie à prendre sans tarder des mesures efficaces visant à résoudre le problème du taux élevé de mortalité maternelle, en garantissant des soins de santé appropriés pendant la grossesse, l’accouchement et la période postnatale, ainsi que l’accès de la population aux centres de santé et à des soins médicaux dispensés par un personnel qualifié dans toutes les régions, y compris en milieu rural. Il lui demande d’adopter des règlements portant application des lois existantes sur le droit des femmes à l’avortement thérapeutique. Il lui demande aussi, en vue de réduire le taux de mortalité maternelle, de faciliter l’accès des femmes à des services de qualité en cas de complications découlant d’avortements pratiqués dans de mauvaises conditions sanitaires.

Même si l’État partie a pris des dispositions visant à relever l’âge du mariage pour les femmes, notamment dans le cadre de la réforme actuelle du Code de la famille, le Comité constate avec préoccupation que cette réforme établit l’âge minimal légal du mariage à 16 ans aussi bien pour les filles que pour les garçons, mesure qui peut avoir des répercussions néfastes sur la poursuite de la scolarité des filles et inciter celles-ci à abandonner leurs études trop tôt.

Le Comité exhorte l’État partie à prendre, dans le cadre de la réforme en cours, les mesures nécessaires pour relever à 18 ans l’âge minimum légal du mariage pour les filles comme pour les garçons, conformément à l’article 1 de la Convention sur les droits de l’enfant, et au paragraphe 2 de l’article 16 de la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, ainsi qu’à la recommandation générale 21 du Comité concernant l’égalité dans le mariage et les relations familiales.

Le Comité aurait souhaité recevoir plus de données statistiques, ventilées par sexe, par âge, par lieu de résidence en milieu rural ou urbain et par appartenance ethnique, de façon à pouvoir évaluer précisément la situation des femmes dans tous les domaines visés par la Convention. Il craint que le manque de données détaillées n’empêche l’État partie de concevoir et de mettre en œuvre les politiques et programmes voulus et de vérifier leur efficacité eu égard à l’application de la Convention.

Le Comité invite l’État partie à renforcer dans les meilleurs délais son système de collecte de données dans tous les domaines visés par la Convention, de façon à pouvoir évaluer avec précision la situation des femmes et l’évolution des tendances dans ce domaine. Il lui demande d’évaluer, au moyen d’indicateurs mesurables, les effets des mesures prises et les progrès accomplis sur la voie de la réalisation de l’égalité de fait entre les femmes et les hommes. Il l’encourage à utiliser ces données et indicateurs pour l’élaboration de lois, de politiques et de programmes aux fins de l’application effective de la Convention. Il lui demande d’inclure dans son prochain rapport des données ventilées par sexe, par lieu de résidence en milieu rural ou urbain et par appartenance ethnique, et d’indiquer les incidences des mesures prises et les résultats obtenus pour ce qui est de l’égalité de fait entre les femmes et les hommes.

Le Comité exhorte l’État partie à accepter, dès que possible, l’amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention relatif au calendrier de réunions du Comité.

Le Comité engage instamment l’État partie à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu de la convention en appliquant pleinement la Déclaration et le Programme d’action de Beijing, qui renforcent les dispositions de la Convention, et le prie de faire figurer des informations sur ce point dans son prochain rapport périodique.

Le Comité souligne que les dispositions de la Convention doivent être appliquées intégralement et efficacement afin que les objectifs du Millénaire pour le développement soient atteints. Il demande à l’État partie d’appliquer le principe de l’égalité des sexes et de s’appuyer expressément sur les dispositions de la Convention dans l’action qu’il mène pour atteindre ces objectifs et le prie de lui fournir des renseignements à ce sujet dans son prochain rapport périodique.

Le Comité note que l’adhésion de l’État aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme renforce l’exercice par les femmes de leurs droits humains et libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. En conséquence, le Comité encourage le Gouvernement bolivien à envisager de ratifier les traités auxquels il n’est pas encore partie, à savoir la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

Le Comité demande que les présentes observations finales soient largement diffusées en Bolivie de manière à ce que la population, notamment les fonctionnaires de l’État, les responsables politiques, les parlementaires, les associations de femmes et les organisations de défense des droits de l’homme, soient informés des mesures qui ont été prises pour assurer l’égalité des sexes de jure et de facto ainsi que des dispositions qu’il reste à prendre dans ce domaine. Il prie l’État partie de continuer à diffuser largement, en particulier auprès des associations de femmes et de défense des droits de l’homme, le texte de la Convention, du Protocole facultatif s’y rapportant, des recommandations générales du Comité, de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing et du Document final de la vingt-troisième session extraordinaire de l’Assemblée générale.

Le Comité prie l’État partie de répondre aux préoccupations exprimées dans les présentes observations finales dans le prochain rapport périodique qu’il présentera au titre de l’article 18 de la Convention. Il l’invite à lui faire tenir son cinquième rapport périodique, qu’il devait soumettre en juillet 2007 et son sixième rapport périodique, qu’il doit soumettre en 2011, sous forme d’un rapport unique en 2011.