NATIONS

UNIES

CCPR

Pacte international

relatif aux droits civils

et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.231617 novembre 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-cinquième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA PREMIÈRE PARTIE (PUBLIQUE)* DE LA 2316e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 20 octobre 2005, à 10 heures

Présidente: Mme CHANET

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE ET DE LA SITUATION DANS DES PAYS (suite)

Deuxième rapport périodique du Paraguay (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE ET DE LA SITUATION DANS DES PAYS (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique du Paraguay (CCPR/C/PRY/2004/2; CCPR/C/85/L/PRY) (suite).

1. Sur l’invitation de la Présidente, la délégation paraguayenne reprend place à la table du Comité.

2.La PRÉSIDENTE invite la délégation paraguayenne à répondre aux questions nos 19 à 23 de la liste des points (CCPR/C/85/L/PRY).

3.M. BARREIRO PERROTTA (Paraguay), répondant à la demande de description des programmes mis en œuvre par le Secrétariat national de l’enfance et de l’adolescence (question no 19), dit que ce Secrétariat exécute différents programmes et projets par l’intermédiaire de comités sectoriels interinstitutions publics et privés, et que les résultats déjà obtenus sont satisfaisants. Les activités visent en particulier à offrir une assistance dans tous les domaines aux enfants des rues − plus précisément à 2 000 enfants et adolescents d’Asunción et de sa banlieue −, aux enfants et adolescents handicapés (1 200 enfants), ainsi qu’aux enfants âgés de zéro à cinq ans (en collaboration avec le Ministère de l’éducation et de la culture). Sont en cours d’exécution un programme national de protection des mineurs contre la consommation d’alcool, de tabac et d’autres substances psychotropes, axé sur la prévention et prévoyant une surveillance des établissements de divertissement nocturne, de la voie publique et des stades de football et divers autres projets, destinés à lutter contre l’exploitation sexuelle des enfants par des moyens juridiques, judiciaires et sociaux et en insistant sur la réadaptation des mineurs. Enfin, on a lancé un projet visant à renforcer et à appuyer les 14 Conseils départementaux de l’enfance et les 10 Conseils municipaux des droits des enfants et des adolescents (CODENI), un projet d’appui des foyers d’accueil pour mineurs, ainsi qu’une campagne nationale intitulée «Donne‑moi un nom, une famille, un pays».

4.En ce qui concerne l’inscription des enfants autochtones aux registres d’état civil (question no 20), la campagne nationale pour l’identité, lancée en mars 2005, devrait permettre d’améliorer la situation dans ce domaine; elle a déjà permis l’enregistrement d’un millier d’autochtones qui viennent s’ajouter à 30 000 autres inscriptions. L’objectif est de donner une identité officielle à 100 000 personnes d’ici 2006. Il convient de noter également que l’inscription au registre d’état civil est gratuite pour les autochtones. D’une façon générale, le processus d’enregistrement est très récent, et les autorités doivent veiller à ne pas heurter les sensibilités et à effectuer un travail d’information et de sensibilisation pour convaincre les autochtones qu’ils ne perdent rien de leur identité propre en s’inscrivant aux registres d’état civil.

5.M. SANDOVAL (Paraguay), répondant à la question de l’enseignement en guaraní (question no 21), indique que depuis 1992 le guaraní est une langue officielle du Paraguay, au même titre que l’espagnol. Le guaraní est une langue essentiellement parlée et constitue la langue de communication orale de plus de 90 % des habitants des régions rurales, et de la moitié des habitants des zones urbaines, la langue de communication écrite étant l’espagnol. Depuis environ cinq ans, l’instruction élémentaire est dispensée dans la langue maternelle et la deuxième langue − espagnol ou guaraní − est progressivement incorporée dans le programme d’études. Ainsi, l’enseignement du guaraní est assuré à tous les niveaux élémentaire, primaire, secondaire et supérieur. Le guaraní n’est donc nullement défavorisé et la difficulté viendrait plutôt de ce que les instituteurs sont souvent originaires de zones rurales et qu’ils sont plus aptes à enseigner dans cette langue qu’en espagnol. Le guaraní peut également être utilisé oralement dans les procédures judiciaires. D’une façon générale, cette langue jouit d’une très haute considération au Paraguay, où elle est un sujet de grande fierté. En ce qui concerne les minorités ethniques (autochtones ou émigrants allemands, coréens, japonais, brésiliens ou autres), l’enseignement leur est d’abord dispensé dans leur langue maternelle, puis à titre de seconde langue dans l’une des deux langues officielles (espagnol ou guaraní). La plupart des communautés minoritaires choisissent cependant l’espagnol comme seconde langue.

6.M. BARREIRO PERROTTA (Paraguay) explique, à propos de l’âge de la responsabilité pénale, fixé à 14 ans (question no 22), que, lorsque le Paraguay a ratifié la Convention relative aux droits de l’enfant, la Cour suprême s’est engagée à adapter les dispositions législatives internes aux principes et orientations établis dans la Convention. Au paragraphe 3 a) de son article 40, la Convention reconnaît aux États parties le droit d’établir un âge minimal au‑dessous duquel les enfants seront présumés n’avoir pas la capacité d’enfreindre la loi pénale. Le législateur paraguayen a fixé cet âge à 14 ans mais la règle ne s’applique que si le mineur délinquant avait une maturité psychologique suffisante pour savoir qu’il commettait un acte illégal. En tout état de cause, la responsabilité pénale du mineur n’est engagée qu’à l’issue d’un examen au cas par cas. En ce qui concerne l’atténuation de la responsabilité prévue pour les mineurs, l’article 322 du Code pénal prévoit que, sauf dispositions contraires de la loi, le fait pour un délinquant d’être âgé de 14 à 18 ans est considéré comme une circonstance atténuante de la responsabilité pénale. Les autorités s’efforcent d’offrir des réponses pénales mais aussi éducatives à la délinquance des mineurs et d’une façon générale l’intérêt supérieur de l’adolescent est la considération qui prime. M. Barreiro Perrotta précise encore que depuis le 1er décembre 2001 la responsabilité pénale des adolescents est régie par les dispositions du livre V du Code de l’enfance et de l’adolescence.

7.M. SANDOVAL (Paraguay), répondant à la question no 23 consacrée aux problèmes des communautés autochtones, indique tout d’abord que la question foncière est fondamentale pour les autochtones puisqu’il en va de la survie de leurs communautés. Un grand nombre de revendications territoriales des autochtones ont été portées devant les tribunaux ainsi que devant la Commission et la Cour interaméricaine des droits de l’homme. En ce qui concerne la communauté autochtone Enxet Yakye Axa située dans le département de Presidente Hayes, la négociation avec le propriétaire des terres revendiquées est actuellement suspendue, à la suite d’un arrêt rendu par la Cour interaméricaine des droits de l’homme. L’État paraguayen devra d’abord acquérir les terres et il faudra dans un deuxième temps déterminer celles qui reviennent à la communauté Enxet Yakye Axa. Il existe également un problème de représentation de cette communauté. Par exemple, une communauté religieuse qui prétend la représenter réclame les terres qui sont les plus chères de toute la zone concernée et l’État paraguayen n’a pas les moyens de les acquérir, outre que le propriétaire n’est pas disposé à les céder. Il est actuellement envisagé d’acquérir d’autres terres pour cette communauté. La situation ne diffère guère pour les autres communautés autochtones. L’État a par exemple entrepris d’acquérir des terres pour un montant de 600 000 dollars destinées à la communauté Enxet San Fernando, dans le département de Presidente Hayes. En ce qui concerne la communauté Ayoreo Totobiegosode, dans le département de Boquerón, il s’agit de l’une des communautés autochtones qui n’avaient jamais eu de contacts avec le monde civilisé, et des anthropologues et ethnologues du monde entier viennent étudier son mode de vie et sa situation. L’État a acquis des terres pour cette communauté et a d’ailleurs procédé à des expropriations beaucoup plus importantes que ce que la communauté autochtone demandait. L’État a acquis ou est en train d’acquérir des terres également pour les autochtones du département d’Alto Paraguay. La communauté autochtone Mbya Guarani Tekoha Ñembiara, dans le département de Caaguazú, avait été chassée des ses terres ancestrales par une société étrangère mais elle y est revenue et les a occupées. L’État paraguayen s’efforce actuellement de lui assurer environ 200 hectares.

8.Enfin, en ce qui concerne l’accès à la santé des communautés autochtones, un projet commun de l’Organisation panaméricaine de la santé et de l’Organisation mondiale de la santé auquel est associé le Ministère paraguayen de la santé prévoit la création d’unités médicales qui se déplacent là où vivent des communautés autochtones. Dans le Chaco, par exemple, vaste région où est concentrée la grande majorité des 100 000 autochtones du Paraguay, l’accès à l’eau est difficile, il n’y a guère de routes et les autochtones ne vont en ville se faire soigner que dans les cas graves. Pour remédier à la situation, le Ministère de la santé a donc décidé de créer les unités médicales mobiles. Il existe dans la ville de Limpio un hôpital pour les autochtones. Enfin, les médicaments pour les personnes hospitalisées sont distribués par l’Institut des autochtones du Paraguay.

9.La PRÉSIDENTE remercie la délégation paraguayenne et invite les membres du Comité à poser leurs questions complémentaires.

10.Mme PALM, revenant sur l’application de l’article 14 du Pacte, a noté avec satisfaction que l’engagement de lutter contre la corruption que les partis politiques avaient pris en août 2003 a abouti à un procès et que six membres de la Cour suprême reconnus coupables de corruption ont été démis de leurs fonctions. Toutefois, la délégation paraguayenne n’a pas répondu à un certain nombre de questions concernant l’organisation judiciaire, en particulier l’absence de critères objectifs pour la nomination des juges, la durée de leur mandat, etc. Compte tenu de ce qui est dit à ce sujet dans le rapport (CCPR/C/85/L/PRY) et dans le document de base (HRI/CORE/1/Add.24), ainsi que des renseignements communiqués par des organisations non gouvernementales, un certain nombre de doutes subsistent quant à l’impartialité et à l’indépendance du pouvoir judiciaire. Mme Palm souhaiterait que la délégation indique avec précision par qui sont nommés les juges de toutes les juridictions, selon quels critères et pour quelle durée, et dans quelles conditions ils peuvent être démis de leurs fonctions.

11.M. SOLARI‑YRIGOYEN relève que, depuis l’adoption de la Constitution en 1992, l’objection de conscience pour des motifs religieux ou éthiques est reconnue et que la Commission des droits de l’homme de la Chambre des députés reçoit les demandes des objecteurs de conscience. Toutefois, cette situation est apparemment provisoire et il conviendrait de savoir si les autorités envisagent d’adopter une loi consacrant le droit à l’objection de conscience. M. Solari‑Yrigoyen voudrait également savoir s’il existe un service civil de remplacement et, si c’est le cas, quelles en sont les caractéristiques et la durée. La délégation a indiqué que les objecteurs de conscience n’avaient pas à acquitter de taxes particulières, mais le texte de la Constitution et ce qui est dit au paragraphe 457 du rapport laissent entendre le contraire. Des éclaircissements sur ce point seraient bienvenus. Enfin, M. Solari-Yrigoyen note que le Comité n’a reçu aucune plainte concernant la liberté d’expression, ce qui est un très bon signe. Cependant, d’après la délégation, le syndicat des journalistes s’est plaint de ce que la loi sanctionne les fonctionnaires qui donnent des informations et selon une ONG internationale l’accusation de diffamation (délit défini par les articles 150 à 154 du Code pénal) est parfois utilisée pour entraver la liberté d’expression. M. Solari-Yrigoyen souhaite donc connaître l’opinion de la délégation à ce sujet.

12.M. RIVAS POSADA dit que les arguments avancés par l’État partie pour expliquer les restrictions au droit de manifester sont compréhensibles car la question des moyens de concilier le droit de manifester et la sécurité intérieure se pose aux autorités de tous les États et l’histoire du Paraguay justifie ses préoccupations. Toutefois, les dispositions de la loi no 1066/1997 sont exagérément restrictives, en particulier les restrictions relatives à la durée et aux lieux des manifestations, et le pouvoir quasiment discrétionnaire qu’a la police d’interdire une manifestation est préoccupant. L’élément fondamental de l’article 21 du Pacte est le caractère pacifique d’une manifestation. Dès lors que celui-ci est garanti, il n’y a aucune raison de limiter les lieux, la durée et le nombre de participants. Vu les dispositions de la loi, il est légitime d’avoir des doutes sur l’application de cet article dans la pratique et de craindre un certain arbitraire pour ce qui est de l’autorisation d’organiser des réunions pacifiques.

13.En ce qui concerne l’inscription des enfants sur les registres d’état civil (question no 20), la situation actuelle, où de nombreux enfants dans les zones rurales et les communautés autochtones ne sont pas inscrits, semble en voie d’amélioration mais il existe un risque réel de non‑respect de l’article 16 du Pacte. La campagne lancée en 2005 ayant pour objectif très ambitieux d’inscrire tous les enfants à l’état civil, le Comité souhaite savoir comment progresse cette campagne, facteur important dans la reconstruction démocratique du Paraguay, en effet, une grande partie de la population serait marginalisée si les moyens administratifs permettant de garantir la protection de la personnalité juridique n’étaient pas mis en œuvre.

14.M. AMOR demande à la délégation d’expliquer le sens et la portée de l’article 24 de la Constitution, en vertu duquel la liberté de religion, de culte et de conviction est reconnue sans autres limitations que celles qui sont prévues dans la Constitution et la loi. Il souhaite savoir si le régime de la liberté de religion est le même que le régime de la liberté de manifester sa religion, ce qui poserait un problème: en effet, si la liberté de manifester sa religion peut connaître des restrictions dans certaines circonstances, la liberté de religion est absolue et ne peut pas être limitée quelles que soient les circonstances. Il souhaite également savoir si une loi a été établie pour préciser le régime de l’exercice de la liberté de religion, si elle a apporté des limitations et dans l’affirmative, lesquelles. Enfin, il demande si le renvoi à la loi constitue une garantie supplémentaire apportée à la liberté de religion ou de conviction ou si c’est au contraire un moyen susceptible d’apporter des restrictions supplémentaires à cette liberté.

15.Sir Nigel RODLEY demande à quel moment exactement les personnes privées de liberté ont accès à un avocat, en particulier à un défenseur public, et si ce moment est le même pour les avocats privés et pour les avocats commis d’office. En ce qui concerne l’article 10 du Pacte, le problème de la surpopulation carcérale est d’une façon générale extrêmement difficile à régler mais l’est encore davantage quand les trois‑quarts de la population carcérale sont des personnes en détention provisoire. Il serait donc utile d’avoir des renseignements sur l’issue des jugements, par exemple des statistiques faisant apparaître le pourcentage des acquittements et des condamnations et la durée moyenne des peines prononcées.

16.M. SANDOVAL (Paraguay) répond que le délai dans lequel une personne en détention peut communiquer avec un avocat est le même que l’avocat soit privé ou soit un défenseur public. Les défenseurs publics, qui sont en nombre très insuffisant, font un travail considérable car près de 60 % des affaires leur sont confiées. Il précisera par écrit le moment exact où une personne peut rencontrer un avocat ainsi que le calendrier prévu pour le jugement des personnes en détention provisoire.

17.En ce qui concerne l’objection de conscience, M. Sandoval préférerait personnellement que la loi d’application prévue dans la Constitution ne soit pas élaborée, car la procédure actuellement en vigueur est efficace et garantie par la Chambre des députés qui est multipartite et qui a décidé de se charger de vérifier la recevabilité des demandes d’objection de conscience. À sa connaissance, il n’existe pas pour le moment de proposition quelconque tendant à régir l’objectif de conscience par une loi mais M. Sandoval répondra à cette question par écrit.

18.Le Président de la République est un ancien journaliste qui connaît donc bien la question de la liberté d’expression; celle‑ci est pratiquement absolue au Paraguay. Les problèmes, d’après le président du syndicat des journalistes, viennent de ce que des groupes de pouvoir et des groupes d’intérêt, représentant notamment les intérêts de sociétés multinationales, sont en train d’acquérir les médias, comme dans de nombreux autres pays, pour défendre des intérêts particuliers qui vont bien au-delà des intérêts politiques locaux. En ce qui concerne la loi régissant les manifestations les objections exprimées par M. Rivas Posada sont fondées; le texte répondait à une nécessité historique et devrait être revu pour être adapté à l’époque actuelle. Le Ministère des relations extérieures va s’atteler à cette tâche et faire en sorte de lancer les travaux nécessaires à la modification de la loi. Le Comité recevra également des informations sur la campagne d’inscription des enfants à l’état civil, en particulier sur les résultats obtenus et sur le budget qui y sera affecté et qui sera déterminant pour la poursuite des activités.

19.Les préoccupations exprimées par Mme Palm au sujet de la nomination des juges et d’autres fonctionnaires sont légitimes et la situation décrite par les ONG est exacte. Cependant, il faut garder à l’esprit que dans de nombreux autres pays, par exemple aux États-Unis d’Amérique, les juges de la Cour suprême sont nommés par le Président de la République en fonction de critères à la fois professionnels et politiques, les seconds l’emportant parfois sur les premiers sans que l’on s’en émeuve. La Constitution prévoit que les juges de première instance, qui sont à la base de la pyramide judiciaire, sont nommés uniquement sur des critères de compétences, et tel a été le cas encore le mois dernier, avec la nomination d’un groupe de juges de première instance. L’équilibre des pouvoirs est établi par le pouvoir législatif exercé par le Parlement, organe politique de l’État, tandis que le Président de la République, chef de l’exécutif, doit prendre en considération outre les critères d’excellence des facteurs de politique interne. La délégation présentera un rapport écrit complet sur les critères de nomination des juges de la Cour suprême, des juges de première instance, du Procureur de la République, des procureurs et des membres du tribunal électoral. Les observations des membres du Comité au sujet de la responsabilité pénale des mineurs et des problèmes des communautés autochtones ont été notées et ne manqueront pas d’orienter la réflexion.

20.M. SOLARI-YRIGOYEN demande si les appelés peuvent effectuer un service civil à la place du service militaire et dans l’affirmative, quelles sont ses caractéristiques, notamment sa durée.

21.M. SANDOVAL (Paraguay) répond que la durée du service militaire est de deux ans et croit savoir que celle du service civil est de deux mois. La délégation fera parvenir par écrit les autres précisions demandées.

22.La PRÉSIDENTE remercie la délégation du Paraguay et dit que le Comité est très heureux d’avoir pu examiner le rapport de l’État partie, même s’il s’est fait attendre et souffre de quelques lacunes puisqu’il comporte peu d’informations sur l’application effective du Pacte. La délégation a fait des efforts très louables pour apporter ces informations mais beaucoup d’éléments, qui auraient dû figurer dans le rapport, ont été omis et le Comité a souvent été renvoyé à des réponses écrites. Il est clair que l’organisation de la justice, la nomination des magistrats et les conditions de leur révocation devraient être exposées dans le rapport de l’État partie, voire dans le document de base. La délégation aurait dû être en mesure d’expliquer comment et pourquoi six magistrats de la Cour suprême ont été destitués car cet événement aurait mérité d’être discuté devant le Comité. Il en va de même pour des questions aussi importantes que la présence d’un avocat pendant la garde à vue, car ce sont ces informations qui permettent au Comité de dire si l’article 9 du Pacte est parfaitement respecté. Plusieurs aspects positifs doivent être dégagés – d’autres figureront certainement dans les observations finales – notamment l’institution d’un défenseur du peuple et le système d’alerte d’urgence concernant les violences conjugales, intéressant en soi, même s’il faudrait voir comment il fonctionne. Le Comité a pris note des informations concernant les poursuites engagées et les condamnations prononcées à la suite des manifestations de 1999 et salue la franchise dont a fait preuve la délégation ainsi que son souci de relancer un processus qui semble s’essouffler un peu. Il reste préoccupé par certains points, en particulier par l’achat d’armes par les policiers et les militaires qui ne laisse pas d’être inquiétant au regard de l’application de l’article 6 car on ne voit pas comment des militaires ou des policiers peuvent avoir la latitude de décider eux-mêmes de l’arme qu’ils vont utiliser pour des opérations de maintien de l’ordre, au risque que des armes de guerre soient employées pour réprimer de petites manifestations d’étudiants. Cette absence de législation et de réglementation sur le calibre des armes ne peut pas perdurer car elle fait courir un grave danger à la population. En ce qui concerne les exécutions extrajudiciaires, dont la délégation n’a pas nié l’existence, le Comité n’a pas reçu d’éléments autres que ceux ayant trait aux manifestations de 1999 sur les poursuites effectivement engagées pour lutter contre l’impunité. En ce qui concerne les enfants soldats, problème qui selon la délégation n’existe plus, le Comité souhaiterait connaître les mesures qui ont éventuellement été prises pour que ce phénomène ne se reproduise pas. La délégation n’a pas non plus donné beaucoup de précisions sur les mesures prises pour lutter contre le travail des enfants et pour l’inscription à l’état civil, alors que de toute évidence on ne peut pas marginaliser toute une population sous prétexte qu’il existe des obstacles administratifs. Le Comité attend donc avec beaucoup d’intérêt les informations écrites et ne doute pas de la collaboration de l’État partie dans la procédure de suivi qu’il a mise en œuvre.

23.M. SANDOVAL (Paraguay) remercie le Comité de sa patience et dit que la délégation va présenter un rapport écrit en temps voulu, les travaux nécessaires à son élaboration ayant commencé la veille au soir à Asunción. Ce rapport adoptera une approche holistique afin de prendre en compte l’intérêt général du pays et non pas uniquement les points particuliers soulevés par des organisations gouvernementales ou des ONG. La délégation paraguayenne est convaincue que la notion d’indivisibilité des droits de l’homme doit être appliquée dans la pratique si l’on veut que ces droits soient respectés et le Paraguay déploie des efforts considérables pour conserver sa place dans le concert des nations.

24.La délégation paraguayenne se retire.

La première partie (publique) de la séance prend fin à 11 h 15.

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