NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.240831 octobre 2006

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2408e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, Genève,le lundi 23 octobre 2006, à 15 heures

Président: Mme CHANET

puis: Mme PALM(Vice-Présidente)

puis: Mme CHANET(Présidente)

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE (suite)

Sixième rapport périodique de l’Ukraine (suite)

La séance est ouverte à 15 heures .

EXAMEN DES RAPPORTS CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Sixième rapport périodique de l’Ukraine (CCPR/C/UKR/6; CCPR/C/UKR/Q/6; HRI/CORE/1/Add.63/Rev.1) (suite)

1. Sur l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation de l’Ukraine reprennent place à la table du Comité.

2.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que les amendements à la Constitution ont été introduits en décembre 2004 pour étendre les pouvoirs du ministère public, lui donnant compétence, entre autres, pour surveiller le respect de la légalité par les organes exécutifs et les gouvernements locaux. En outre, un projet de loi a été élaboré pour amender la législation régissant le ministère public afin de rendre son rôle et ses fonctions conformes aux normes internationales. Toutefois, suite à l’évaluation critique formulée par la Commission de Venise, son adoption a été reportée à une date ultérieure en attendant la suite de la réforme constitutionnelle.

3.La législation sur l’égalité entre les sexes qui vient d’être adoptée prévoit la création de conseils de l’égalité des droits et la nomination d’officiers ministériels chargés de la question de parité; le Ministère de la jeunesse et des sports est chargé de surveiller le respect de la loi. Alors que la création de conseils d’égalité entre les sexes est en cours, les Ministères de la justice et des affaires intérieures ont nommé des vice-ministres pour s’occuper de ces questions. Aucune information n’est communiquée sur des offres d’emploi réservées à un seul sexe.

4.M. YATSENKO (Ukraine) dit que le Commissaire aux droits de l’homme du Parlement ukrainien (Médiateur) a relevé des violations dans un tiers des plaintes reçues. Le nombre élevé de violations est en partie dû au fait que la Constitution garantit un nombre important de droits, tels que le droit aux soins de santé gratuits, dont la mise en œuvre est freinée par des contraintes budgétaires. Le Bureau du Médiateur a exhorté les autorités à accorder des ressources supplémentaires afin d’assurer la jouissance de ces droits.

5.Le harcèlement de la police et les mauvais traitements infligés aux membres des groupes minoritaires continuent d’être une source de préoccupation au niveau local. Le Ministère des affaires intérieures a demandé à maintes reprises aux forces de police locale de prendre des mesures pour prévenir ces actes, et des efforts ont été déployés pour renforcer la formation des responsables de l’application des lois dans le domaine des droits de l’homme.

6.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que, suite à une action commune menée par le Ministère des affaires intérieures et le Bureau du Médiateur, le nombre de plaintes faisant état de harcèlement de la police et de mauvais traitements des groupes minoritaires ont diminué au cours des dernières années.

7.M. KOTLYAR (Ukraine) dit qu’aucun système n’est actuellement en place pour mettre en œuvre les observations finales du Comité. Le Gouvernement étudie la possibilité d’introduire une procédure semblable à celle utilisée pour l’exécution des jugements de la Cour européenne des droits de l’homme. Les informations mises à jour sur la mise en œuvre de la recommandation du Comité dans l’affaire Aliev c. Ukraine seront communiquées par écrit.

8.La liste, contenue dans la loi sur l’état d’urgence (règles juridiques) du16 mars 2003, des droits et des libertés de l’homme et du citoyen énoncés dans la Constitution qui pourraient être temporairement restreints, ne coïncide pas avec celle qui figure dans le Pacte. Elle est toutefois conforme aux dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme et ne constitue donc pas une violation des normes internationales. La loi prévoit que le Secrétaire général des Nations Unies soit informé de la déclaration d’un état d’urgence et des restrictions temporaires des droits et des libertés imposées en conséquence.

9.Des efforts sont faits pour améliorer la transparence et la responsabilisation en matière de sélection des juges, entre autres, par l’introduction de concours. Le nouveau système vise à assurer que la nomination et le transfert des juges soient seulement fondés sur le mérite. Afin de réduire la corruption, le salaire des juges, qui était auparavant bas, a été progressivement augmenté, selon les ressources disponibles. Différents modèles d’aide juridique sont actuellement introduits au niveau local.

10.Les droits des détenus, dont celui d’être représenté par un avocat de leur choix, sont garantis dans la Constitution. Le Code de procédure pénale détermine le rôle des avocats dans les procédures pénales, à savoir, protéger et établir les droits à toutes les étapes. Tous les interrogatoires doivent avoir lieu en présence d’un avocat. Afin de sensibiliser davantage les détenus, le Ministère des affaires intérieures a publié des directives à l’intention des responsables de l’application des lois sur les procédures à suivre pour informer les personnes détenues de leurs droits au moment de leur arrestation.

11.Le Ministère de la jeunesse et des sports a préparé un manuel de police sur la violence familiale fondé sur des sondages réalisés par le Ministère de la justice, du Ministère de la santé et des ONG. Des mesures visant à lutter contre la violence familiale sont mises en œuvre en coopération étroite avec les ONG. Un réseau de centres de consultation régionaux offre des conseils et une aide aux victimes de la violence familiale et des centres d’accueil ont été créés dans certaines régions. En conséquence, le nombre de plaintes concernant la violence familiale ont diminué.

12.Bien que le principe de non-refoulement soit inclus dans la législation nationale, il n’est pas toujours appliqué dans les faits en partie parce que le flux important de réfugiés dépasse la capacité du Comité d’État pour les minorités ethniques et les migrations. Les demandes ont été étudiées en coopération étroite avec le Bureau régional du Haut-Commissariat pour les réfugiés.

13.S’agissant de la déportation de 11 Ouzbeks le 14 février 2006, il dit que le Gouvernement n’a fait jusqu’à présent aucune déclaration reconnaissant que la mesure constituait une violation de la législation nationale et du droit international. Le Ministère de la justice, de son côté, a déclaré que l’expulsion était illégale.

14.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que le Bureau du Médiateur est aussi d’avis que la déportation des 11 ressortissants ouzbeks peu après leur arrestation le 7 février 2006 constitue une violation de la législation nationale et du droit international. Le Bureau a suivi l’affaire de près et demande vivement aux autorités de respecter les normes internationales. Des enquêtes supplémentaires sur l’affaire sont actuellement menées afin de prévenir ce type de violations à l’avenir.

15.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que les modifications apportées à la législation ont été élaborées pour rendre la définition de la torture conforme au libellé du Pacte. Le ministère public a la compétence requise pour ouvrir des enquêtes criminelles sur des allégations de torture et lancer des procédures disciplinaires.

16.Les victimes de la traite sont plus réticentes à signaler les cas de traite ou à témoigner, ce qui freine les efforts menés pour combattre ces délits. L’Ukraine adopte donc une approche globale au problème de la traite en collaboration avec la police, les travailleurs sociaux et les psychologues. En outre, les victimes de la traite ont accès au nouveau programme de protection des victimes.

17.Mme SHESTAKOVA (Ukraine) dit qu’une unité au sein du ministère public est chargée de surveiller le respect de la loi dans les services armés. Le nombre de viols dans l’armée a diminué: en 2005, 207 procédures pénales ont été engagées et 303 personnes ont fait l’objet de poursuites; en 2006, ces chiffres étaient respectivement de 143 et de 106.

18.M. KOTLYAR (Ukraine) dit qu’en 2003, le Ministère de la défense a spécialement demandé que les commandants des unités militaires n’aient plus le droit de qualifier les faits constituant une violation des règles statutaires régissant les relations entre militaires comme étant des violations ordinaires de la discipline militaire. Toute personne reconnue coupable de ces infractions sera punie en application des dispositions du Code pénal.

19.Il a été proposé d’introduire des quotas imposant une participation féminine afin d’augmenter le niveau de participation des femmes dans les organes législatifs, mais l’initiative n’a pas reçu l’appui du Parlement.

20.Sir Nigel RODLEY demande si les centres destinés aux victimes de la violence familiale ont été mis en place par l’intermédiaire du Ministère de la jeunesse et des sports et s’ils étaient seulement ouverts aux femmes de moins de 35 ans. La délégation devrait formuler des commentaires sur les informations selon lesquelles le lieu de ces centres est consultable en ligne et que ces centres donnent priorité aux intérêts de la famille plutôt qu’aux femmes victimes d’actes de violence. Il demande des informations sur le soi-disant «comportement des victimes» et rapporte le fait que lorsque des personnes portent plainte pour violence familiale, la police les prévient qu’agir de la sorte contribuerait à réduire la peine des auteurs.

21.Concernant l’arrestation et l’expulsion des citoyens Ouzbeks mentionnées plus haut, il demande si le Ministère de la justice a reconnu qu’une violation du principe de non-refoulement a été commise sur des questions de procédure et des questions de fonds. Il demande des exemples de cas où les procureurs ont lancé des procédures suite à des inspections faisant état de violences dans les centres de détention. Il souhaite avoir des informations supplémentaires sur la nature, l’ampleur et les méthodes du programme de protection des témoins.

22.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que les informations concernant les centres pour les victimes de violence familiale et le soi-disant «comportement des victimes» seront communiquées en temps utile au Comité. Le Ministère de la justice et le Bureau du Médiateur ont reconnu la violation du principe de non-refoulement à la fois pour des motifs d’ordre procédural et des raisons de fond.

23.Mme SHESTAKOVA (Ukraine) dit qu’en 2005, le ministère public a traité environ 3 000 appels liés à des procédures d’enquêtes illégales, dont 34 ont été acceptés; au cours des neuf premiers mois de 2006, le nombre de ces appels est passé à 716, dont 26 ont été jugés acceptables. L’action disciplinaire engagée à l’encontre des policiers qui ont commis des violations de toutes sortes, y compris les méthodes d’enquêtes illégales, a donné lieu à des sanctions et à trois procédures pénales.

24.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que les informations concernant le programme de protection des témoins seront communiquées en temps utile au Comité.

25.À propos de la question 17 de la liste des points à traiter, il dit que la surpopulation carcérale est un problème sérieux en Ukraine, nonobstant les quelques améliorations apportées au cours des dernières années. En 2001, les réformes législatives ont permis de transférer aux tribunaux la responsabilité des procureurs concernant la décision de détention durant l’instruction, ce qui a permis de moins recourir à la détention provisoire. Se fondant sur une recommandation de la Cour suprême, une campagne est actuellement menée, avec la participation de nombreuses ONG, pour encourager les tribunaux à trouver des mesures de substitution à la détention. Le pourcentage de détenus condamnés est passé de 37 % en 1999 à 26 % en 2004. Le Ministère de la justice a élaboré un projet de loi pour amender le Code de procédure pénale de façon à le rendre conforme aux normes internationales. Parmi les modifications proposées, la loi prévoit que la surface des cellules des prisonniers fasse au moins quatre mètres carrés, qu’une commission de surveillance soit mise en place pour mener des inspections dans les prisons, que le travail obligatoire des prisonniers soit aboli et que la durée de détention provisoire soit limitée à 18 mois. Les violences commises à l’égard des personnes placées en garde à vue ou incarcérées peuvent être signalées au ministère public, au Bureau du Médiateur, à un organe judiciaire ou aux mécanismes de plainte des organes internationaux créés par les traités.

26.M. YATSENKO (Ukraine) dit que le Bureau du Médiateur a joué un rôle important dans le traitement efficace de ces plaintes. La majorité des lieux de détention sont dépourvus de tout équipement sanitaire, d’installations de plomberie ou manquent d’éclairage. D’importants travaux de rénovation ont été entrepris dans les établissements pénitentiaires de Kiev et de Sébastopol; ces travaux sont cependant coûteux, et le Gouvernement sollicite une assistance financière auprès des donateurs pour poursuivre ces programmes.

27.Mme SHESTAKOVA (Ukraine) dit que, conformément à la Constitution, une unité a été créée au sein du ministère public pour surveiller le système carcéral, y compris les lieux de détention. Au cours des deux dernières années, cette unité a noté un nombre important de violations de la loi concernant, entre autres, les conditions de détention et les normes de santé et a pris des mesures disciplinaires dans 37 cas. Les médias ont été informés de certaines de ces violations.

28.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que la législation ukrainienne ne fait pas de distinction entre les organisations religieuses traditionnelles et non traditionnelles (question 18 de la liste des points à traiter). Le rôle de l’État est de s’assurer que les organisations religieuses sont conformes à la loi. Une organisation religieuse qui souhaite être reconnue en tant qu’entité légale est obligée de soumettre ses statuts. Un département au sein du Ministère de la justice a compétence pour approuver l’enregistrement ou le refuser aux motifs de non-conformité des statuts de l’organisation avec les dispositions de la Convention. Ces décisions peuvent être contestées devant les tribunaux. Entre janvier et septembre 2006, il y a eu 107 demandes d’enregistrement de statuts ou d’amendements aux statuts d’organisations religieuses enregistrés précédemment. Sur ces 107 demandes, 100 ont été accordées et 7 ont été refusées en raison d’éléments incompatibles avec la législation actuelle. La loi prévoit qu’en cas de problème associé à ses statuts, une organisation religieuse puisse amender les dispositions en question et soumettre à nouveau ses statuts pour se faire enregistrer.

29.Le climat général de liberté d’expression pour les journalistes a été considérablement amélioré depuis 2004 suite à la dite «révolution des journalistes» où plusieurs centaines de journalistes ont refusé de couvrir la campagne électorale pour protester contre la censure des médias et le harcèlement des journalistes (question 19). Dans l’ensemble, les médias sont libres et la liberté d’expression est garantie. Il est difficile de déterminer si les cas signalés de harcèlement physique commis par des autorités locales à l’encontre de journalistes sont liées à leur activité professionnelle ou aux personnes elles-mêmes.

30.M me Palm (Vice-Présidente) assume la Présidence.

31.Mme SHESTAKOVA (Ukraine) dit qu’un tribunal local à Kiev tient actuellement des auditions dans le cadre d’une affaire où un administrateur local a confisqué tous les exemplaires d’un journal donné et une affaire pénale est en cours concernant des agressions physiques dont a été victime une équipe de réalisation qu’un député local a empêché de travailler.

32.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que, selon le Bureau du Médiateur, la situation des journalistes s’est considérablement améliorée depuis plusieurs années. Tandis qu’en 2002, on a enregistré trois cas de décès ou la disparition d’un journaliste, de 2004 jusqu’à ce jour, aucun cas de ce type n’a été signalé. Mais, on continue de signaler des arrestations, la détention de journalistes et des violences physiques à leur encontre, bien qu’il apparaisse clairement que la tendance est à la baisse. Si les journalistes semblent jouir d’une plus grande liberté d’expression qu’auparavant, peu de progrès ont été réalisés pour traiter efficacement les violations de ces droits. Le Bureau du Médiateur a pris des mesures pour défendre les droits des journalistes dans de nombreux cas individuels portés à son attention, mais des mesures supplémentaires sont nécessaires à tous les niveaux pour garantir la liberté d’expression et l’accès à l’information.

33.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que, conformément à la législation adoptée en 2006, aucune personne morale ou physique ne peut détenir plus de 35 % des stations de radiotélévision (question 20). La loi nationale sur le contrôle des médias et la restriction des monopoles dans ce secteur est conforme aux normes internationales. Elle prévoit que les sociétés privées de radiodiffusion ne peuvent détenir qu’une seule licence aux niveaux national, régional ou local. Le Ministère de la justice a élaboré un projet de loi sur la propriété des médias afin de renforcer la transparence. Les demandes de création de nouveaux médias de la presse écrite ne sont refusées que si les informations figurant dans la demande sont incomplètes. Les demandes de création de nouveaux médias de radiodiffusion sont soumises selon le principe de la libre concurrence, et les résultats peuvent être contestés devant les tribunaux.

34.L’enquête initiale sur le décès de Georgiy Gongadze n’a donné aucun résultat, comme l’a confirmé la Cour européenne des droits de l’homme en 2005 (question 21). Celle-ci a constaté que l’enquête a violé les articles 2 et 3 de la Convention européenne des droits de l’homme concernant le droit à la vie et le droit de ne pas être soumis à la torture. Trois policiers ont admis avoir tué M. Gongadze et le tribunal procède actuellement à l’audition des témoins. La décision de la Cour européenne facilitera les enquêtes sur les fonctionnaires de police qui ont ordonné le meurtre. Un comité spécial a été créé pour surveiller la nouvelle enquête à la suite d’une audition parlementaire télévisée lors du sixième anniversaire de la disparition de M. Gongadze.

35.Onze agressions motivées par la haine religieuse ou ethnique ont été signalées en 2005 et en 2006 (question 22). Jusqu’ici, trois personnes ont été inculpées pour ces actes et plusieurs enquêtes sont en cours. Le Président a publiquement condamné les incidents en 2005. Cette situation a été examinée par le Ministère des affaires intérieures et portée à l’attention de la police. En 2005, le Président a décidé d’inclure dans les programmes scolaires à tous les niveaux l’enseignement de la tolérance et l’entente entre les religions.

36.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que les préoccupations du Comité sont justifiées, mais que les informations faisant état d’antisémitisme en Ukraine ont été souvent exagérées. Le Président a dit qu’il n’existe aucune discrimination à l’égard des Juifs au niveau de l’État, ce qui a été confirmé par une ONG juive connue. Le Bureau du Médiateur n’a reçu aucune information faisant état de discrimination à l’égard des juifs dans le marché du travail. Alors que des mesures devraient être prises pour prévenir les conflits interethniques, aucun incident d’islamophobie n’a été signalé.

37.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que le Gouvernement a accédé à la Convention sur les aspects civils de l’enlèvement international d’enfants et à la Convention concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l’exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants (question 23). Le Parlement a l’intention de ratifier la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale et de réviser la législation nationale pour la rendre conforme à cet instrument.

38.M. YATSENKO (Ukraine) dit qu’un grand nombre de familles nombreuses vivent dans la pauvreté et que le nombre d’orphelins et d’enfants livrés à eux-mêmes a plus que doublé au cours des dix dernières années. Actuellement, le nombre d’adoptions d’enfants ukrainiens est excessif et le Médiateur a reçu beaucoup plus de plaintes à cet égard qu’au cours des années précédentes. Un certain nombre d’adoptions internationales ont lieu illégalement et de nombreux parents adoptifs étrangers ne respectent pas la règle de faire rapport auprès de leur ambassade ukrainienne locale sur les progrès des enfants. En outre, les autorités ukrainiennes n’ont pas eu accès à plusieurs enfants qui ont été adoptés aux États-Unis et qui seraient en danger. Le Médiateur a soumis des propositions au Président concernant des mesures visant à protéger les enfants ukrainiens adoptés à l’étranger, notamment des accords bilatéraux avec les États concernés.

39.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que les droits de la minorité tatare de Crimée sont entièrement protégés en vertu de la législation nationale (question 24). Un programme national de réinstallation a été approuvé pour la période 2006 à 2010 et comprend des mesures pour faciliter leur réintégration sociale et leur adaptation. Un budget considérable a été consacré au logement et à des manifestations sociales et culturelles pour faciliter la réinstallation de cette minorité. Tous les enfants tatars de Crimée ont accès à un enseignement dispensé en langue tatare.

40.M me Chanet (Présidente) reprend la Présidence.

41.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que la majorité des membres de la minorité tatare de Crimée sont revenus et représentent actuellement environ 12 % de la population. Le Médiateur a recommandé au Gouvernement plusieurs mesures visant à résoudre les problèmes lié au logement et à l’éducation, bien que la superficie des terres allouées à la construction de logements pour les Tatares de Crimée demeure insuffisante.

42.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que ni la nationalité ni la race ne sont des facteurs pris particulièrement en compte chez les personnes qui se trouvent en détention dans son pays (question 25). Si de nombreux étrangers sont détenus pour entrée illégale dans le pays, il n’existe aucune discrimination fondée sur la nationalité à cet égard.

43.Tous les étudiants des universités et des écoles de droit étudient le droit relatif aux droits de l’homme, comme le font les fonctionnaires au cours de leur formation (question 26). Les cours sur les droits de l’homme, y compris sur le Pacte, sont également obligatoires pour les agents des forces de l’ordre, les avocats et les juges.

44.Mme WEDGWOOD, Rapporteuse de pays, dit qu’il faudrait déployer davantage d’efforts pour assurer que tous les étrangers incarcérés en Ukraine jouissent des droits qui leur sont garantis dans le cadre du Pacte, en particulier le droit à un conseiller juridique. Elle demande des informations supplémentaires sur la disponibilité du traitement antirétroviral et les mesures de prévention du VIH/sida dans les prisons. Elle souhaite savoir si des mesures ont été prises pour réduire les périodes de détention provisoire excessivement longues. Des organisations impartiales, comme le Comité international de la Croix-Rouge, devraient avoir accès aux prisons pour mener des enquêtes sur les conditions et parler aux prisonniers, étant donné qu’il est improbable que les prisonniers se plaignent auprès des organes officiels qui comptent parmi leurs membres d’anciens fonctionnaires du service pénitentiaire, par peur de représailles.

45.Passant à la question de la liberté de religion, elle dit que le Comité a été informé qu’après le retour des Tatars en Crimée, des cas de violence à l’égard des Tatars et des musulmans ont été signalés, cas de violence qui ont été encouragés par l’Église orthodoxe ukrainienne. Même si l’État n’a pas directement encouragé cette violence, il lui incombe de protéger les groupes vulnérables et minoritaires. Des efforts devraient être faits pour éviter les représentations stéréotypées des groupes nationaux et ethniques dans les manuels scolaires. Elle considère que la déclaration selon laquelle l’antisémitisme n’existe pas dans l’État partie est quelque peu exagérée. Il faut déployer des efforts pour augmenter la sensibilisation à la diversité religieuse et aux dangers de l’antisémitisme dans les programmes scolaires, en particulier en enseignant l’Holocauste. Elle souhaite savoir si l’Académie interrégionale de la gestion du personnel, un établissement d’enseignement supérieur qui encourage les discours antisémites, est toujours habilitée à décerner les diplômes. Elle se demande pourquoi il y a si peu de publications en hébreu dans l’État partie.

46.M. ANDO dit que le Comité demeure préoccupé par les cas de harcèlement et de violence à l’encontre des journalistes; des efforts sont donc nécessaires pour améliorer la liberté d’expression dans l’État partie. Il faudrait éliminer le monopole de l’emploi dans les médias. Il souhaite connaître la compétence, le pouvoir et la composition du Comité d’État de la radiotélévision et savoir comment est assurée la neutralité du Comité. Il se demande pourquoi l’Inspection nationale des impôts est autorisée à intervenir dans les activités des médias. Il demande quelle supervision l’État peut exercer pour surveiller les accords conclus entre les fondateurs et la rédaction des organes de l’information (CCPR/C/UKR/6, par. 293).

47.M. WIERUSZEWSKI demande si le Bureau du Médiateur reçoit des fonds suffisants et si le public a suffisamment accès au Bureau aux niveaux régional et municipal. Sur la question de la traite des enfants à des fins d’adoption, les mesures prises par le Gouvernement sont louables. Il souhaite cependant savoir ce qui a été fait pour garantir leur application. Quelles mesures le Gouvernement, comparé au Bureau du Médiateur, a-t-il prises pour veiller à ce que la minorité tatare de Crimée jouisse de ses droits consacrés par les articles 26 et 27 du Pacte?

48.M. SOLARI-YRIGOYEN dit que dans ses observations finales du cinquième rapport périodique de l’Ukraine (CCPR/CO/73/UKR), le Comité s’est dit préoccupé par le fait que l’objection de conscience au service militaire n’est acceptée seulement pour des motifs religieux et uniquement pour certaines confessions religieuses, énumérées dans une liste officielle (par. 20). Bien que le Comité ait recommandé d’élargir la liste pour qu’elle englobe toutes les confessions religieuses et autres convictions, l’État partie n’a pas pris de mesures à cette fin. Il demande pourquoi les périodes de service de remplacement sont plus longues que celles du service militaire et si le Gouvernement envisage de remédier à ce problème. Il souhaite savoir quelles conséquences l’établissement d’une armée de métier auraient sur l’objection de conscience.

49.M. KOTLYAR (Ukraine), se référant à la question 17 de la liste des points à traiter, dit que les personnes atteintes du VIH/sida et de la tuberculose en détention reçoivent un traitement approprié. Bien que les ressources financières soient insuffisantes pour améliorer les conditions pénitentiaires, le nombre de cas de tuberculose dans les prisons a diminué, mais demeure toutefois élevé. Conformément à la loi, les soins médicaux sont fournis dans les centres de détention provisoire.

50.Un certain nombre de plaintes ont été reçues concernant les activités antisémites de l’Académie interrégionale de la gestion du personnel. Dans les affaires portées devant les tribunaux concernant le contenu de certaines publications, la Cour a estimé qu’aucune violation de la loi n’avait été commise. Alors qu’elle n’y était pas autorisée, l’Académie a décerné un nombre important de diplômes, qui ont été récemment annulés par le Ministère de l’éducation.

51.Le Comité d’État de la radiotélévision est responsable de toutes les émissions de télévision publique et de l’enregistrement de tous les organes des médias en Ukraine. Bien que le rôle et l’influence de ce Comité soient limités et que beaucoup soient favorables à sa dissolution, il est mentionné dans la Constitution et son abolition nécessitera un amendement. Les organes de l’information sont des entreprises privées et paient donc des impôts. Conformément à un nouvel accord conclu entre l’Inspection nationale des impôts et l’Association de la presse ukrainienne, toutes les inspections seront programmées à l’avance afin qu’elles ne soient plus perçues comme un harcèlement. L’État ne joue aucun rôle ni exerce aucun contrôle dans les accords conclus entre la rédaction et les fondateurs des organes de l’information.

52.M. ZADVORNY (Ukraine) dit que le problème de l’accès limité au Bureau du Médiateur aux niveaux régional et municipal est lié à l’insuffisance des ressources du budget de l’État. Bien que le Bureau dispose de représentants dans toutes les régions ainsi que dans la République autonome de Crimée, il ne peut développer ses activités sans une augmentation du financement. Les principaux problèmes sont de nature pratique, notamment le mauvais état des bâtiments et les mauvaises conditions de travail. Il espère que dans les années à venir, les ressources budgétaires allouées au Bureau du Médiateur augmenteront afin de pouvoir rénover ses locaux.

53.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que même si l’on a engagé beaucoup d’efforts pour améliorer la situation des Tatars de Crimée, certains problèmes n’ont pas encore été résolus. Un décret présidentiel a été promulgué sur la nécessité d’établir une nouvelle loi sur l’objection de conscience au service militaire. Cette nouvelle loi est actuellement en cours de discussion. La question relative à la période de service de remplacement sera introduite dans la nouvelle loi. La loi sur le service de remplacement restera en vigueur jusqu’à l’établissement d’une armée de métier.

54.La PRÉSIDENTE, remerciant la délégation de l’Ukraine d’avoir répondu aux questions du Comité, dit que le Comité a pris note de l’amélioration de la situation des droits de l’homme en Ukraine ainsi que des questions qui continuent d’être une source de préoccupation. Ces questions seront présentées au Gouvernement dans les observations finales du Comité à la fin de cette séance.

55.M. KOTLYAR (Ukraine) dit que son Gouvernement est conscient qu’il reste de nombreux problèmes à résoudre et que des efforts doivent être consentis pour veiller à ce que toutes les lois soient efficacement mises en œuvre. Des informations supplémentaires seront soumises par écrit au Comité en temps utile.

La séance est levée à 17 heures 55.

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