Soixante et onzième session

Compte rendu analytique de la 1906e séance

Tenue au siège, à New York, le vendredi 23 mars 2001, à 10 heures

Président : M. Bhagwati

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Quatrième rapport périodique de la République dominicaine

La séance est ouverte à 10 h 20.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Quatrième rapport périodique de la République dominicaine (CCPR/C/DOM/99/4) *

À l’invitation du Président, les membres de la délégation de la République dominicaine prennent place à la table du Comité.

M me  Abreu de Polanco (République dominicaine) remercie les membres du Comité pour cette nouvelle occasion de procéder à des échanges de vues, et les rassure quant à l’engagement pris par la République dominicaine de mettre en œuvre le Pacte. L’importance que son pays attache à la réunion se mesure à la grande taille de sa délégation, composée de représentants des organismes gouvernementaux et des institutions intéressées par les questions des droits de l’homme.

Elle affirme que des progrès sont en train d’être réalisés pour ce qui est de la promotion des droits de l’homme en République dominicaine. Par exemple, après la présentation du troisième rapport périodique, le Comité des droits de l’homme a demandé au pays de procéder à un amendement de sa constitution, pour garantir l’indépendance totale du pouvoir judiciaire. La Constitution a été régulièrement modifiée en 1994, avec la création du Conseil judiciaire national, chargé de nommer les juges de la Cour suprême, qui à leur tour désignent les autres juges du pays. La phase initiale, retransmise à la télévision, a abouti à la nomination de cinq femmes et de 11 hommes à la Cour suprême. Par ailleurs, le nouveau visage de l’organe judiciaire de la République dominicaine en fait un modèle pour les autres pays des Amériques.

En février 1999, la Cour suprême a intégré le recours de l’amparo dans l’ordre juridique du pays. Elle relève le fait que la République dominicaine fut signataire de la Convention américaine de 1969 sur les droits de l’homme (Pacte de San José), et que l’article 8 de la Constitution dominicaine amendée de 1994 s’inspira de la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Un Bureau de l’Ombudsman a été récemment mis en place; son rôle est de veiller à ce que les étrangers et les nationaux puissent rapidement, librement et de manière informelle introduire des recours contre des actes ou omissions de tout organe de l’État constituant une violation des droits de l’homme.

Elle fait savoir que les étrangers résidents jouissent depuis longtemps des mêmes droits que les nationaux, la République dominicaine ayant signé la Convention relative aux droits des étrangers en 1932.

Elle ajoute que le Code civil contient des dispositions permettant de reconnaître les décisions rendues par les tribunaux étrangers. Rappelant aux membres que la République dominicaine a adhéré au Protocole facultatif au Pacte, elle annonce qu’il y a eu une seule affaire de cette nature, qui a été réglée à l’amiable.

La République dominicaine a ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDAW) et a aussi abrité le siège de l’Institut international de recherche et de formation pour la promotion de la femme (INSTRAW). À travers ces initiatives et bien d’autres, le gouvernement s’est engagé à offrir de meilleures chances à toutes les femmes dominicaines dans un contexte d’équité et de liberté.

En effet, beaucoup de progrès ont été réalisés pour ce qui est des droits de la femme, avec l’adoption d’une série de textes de lois (Constitution, loi électorale, loi sur la réforme agraire, loi sur l’éducation) contenant des dispositions basées sur la Déclaration universelle des droits de l’homme.

S’agissant de la liste des questions posées par le Comité (CCPR/C/71/L/DOM), elle déclare que l’affaire B. Mójica c. la République dominicaine sera commentée par M. García Lara, que tous les cas d’abus extrajudiciaire font l’objet d’enquêtes et que les plus importants ont été sanctionnés.

Elle signale que l’Académie judiciaire nationale a commencé à former tous les membres de l’organe judiciaire en matière de droits de l’homme. En outre, un institut des droits de l’homme a été créé au sein des forces armées pour les sensibiliser sur la nécessité de protéger les droits de l’homme.

Elle cite par la suite une série d’autres réalisations : le Ministre des affaires étrangères a compilé et distribué un guide énumérant toutes les lois internes et internationales relatives aux droits de l’homme. La République dominicaine travaille avec les organismes des Nations Unies pour mettre au point un plan d’action national sur les droits de l’homme. Depuis son dernier rapport, le pays a reçu la visite d’une délégation de la Commission interaméricaine des droits de l’homme. Un séminaire a été organisé pour former les organismes gouvernementaux sur la rédaction des rapports relatifs aux conventions sur les droits de l’homme. Enfin, la République dominicaine a récemment reconnu la compétence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme.

Liste de questions (CCPR/C/71/L/DOM)

Cadre constitutionnel et juridique de mise en œuvre du Pacte et du Protocole facultatif (articles 1 et 2).

Le Président invite la délégation à répondre aux questions des paragraphes 1 à 4 de la liste de questions (CCPR/C/71/L/DOM) : dispositions du Pacte qui ont été directement invoquées devant les organes de l’État, et la place du Pacte dans la hiérarchie des normes juridiques internes; le statut d’une commission indépendante des droits de l’homme et la création d’un Bureau d’Ombudsman; réciprocité des droits des étrangers; et mise en œuvre des décisions du Comité.

M me  Abreu de Polanco (République dominicaine) dit que même si les dispositions du Pacte ne sont pas directement invoquées devant les tribunaux, le recours de l’amparo a été reconnu par les juges conformément à une ordonnance de la Cour suprême et à la suite de la signature par son pays du Pacte de San José. Elle fait également savoir qu’un Bureau de l’Ombudsman a été créé en application des dispositions de la loi 19-2001.

M.  Guzmán (République dominicaine) fait savoir que le Code civil permet aux étrangers d’ester en justice (comme demandeur ou défendeur), d’acquérir des biens et de constituer des hypothèques. De même, les étrangers jouissent des mêmes droits que les nationaux, tels que le droit à la vie, à la sécurité et au travail, garantis par la loi. Il relève cependant que la loi sur l’immigration fait une distinction entre les immigrants et les non-immigrants. Si les immigrants sont autorisés à résider légalement en République dominicaine, les non-immigrants (tels que les travailleurs agricoles saisonniers et leurs familles, les personnes en transit, et les membres des équipages des navires) ne le sont pas. Les non-immigrants n’ont pas non plus le droit de recevoir ou d’acquérir des biens. En ce qui concerne les sentences prononcées par les tribunaux étrangers, elles peuvent être reconnues et appliquées en République dominicaine. Toutefois, elles doivent au préalable être validées par un tribunal interne conformément à la Constitution et aux préceptes moraux du pays. Si l’on estime que le jugement ne viole pas la loi dominicaine, la sentence est exécutée et les intérêts des individus sauvegardés.

Égalité des sexes et principe de non-discrimination (article 3 du Pacte)

Le Président invite la délégation à répondre à la question du paragraphe 5 de la liste de questions (CCPR/C/71/L/DOM) : la situation des femmes en fait et en droit dans les secteurs public et privé, et les mesures prises par le gouvernement pour promouvoir l’égalité des sexes.

M me de Castro (République dominicaine) énumère une série de textes de lois en faveur des droits de la femme dans les domaines suivants : violence dans la famille; accès des femmes au crédit et à la propriété dans le cadre de la réforme agraire; création du Ministère de la femme; ratification de la Convention interaméricaine de 1994 sur la prévention, la répression et l’éradication de la violence à l’encontre des femmes (Convention of Belém do Pará); égalité des sexes et augmentation obligatoire, de 25 % à 33 %, du nombre de femmes au sein des conseils municipaux et dans les représentations nationales.

Elle ajoute qu’un plan national en faveur de l’égalité des sexes a été mis en place, et que le Ministre de la femme organise à l’intention de la police et des autres membres du système judiciaire dominicain des séminaires de formation et de sensibilisation sur les droits des femmes. Elle signale qu’une femme a été élue Présidente de l’Assemblée nationale et que le Vice-Président de la République est une femme. En outre, de plus en plus de femmes entrent dans la police et dans l’armée, dont quatre ont atteint le grade de général.

Droit à la vie (article 6 du Pacte)

Le Président prie la délégation de répondre aux questions des paragraphes 6 à 8 de la liste de questions (CCPR/C/71/L/DOM) : situation de l’affaire B. Mójica c. la République dominicaine; ratification du deuxième Protocole facultatif; enquêtes sur les affaires d’au moins 200 personnes qui auraient été tuées par la police en 1999.

M me Abreu de Polanco (République dominicaine) fournit des informations sur la disparition de Barbara Mójica (communication nº 449/1991). Le père Rafale Mójica qui avait eu des problèmes mentaux et des conflits avec ses voisins, s’était plaint à plusieurs reprises de la disparition de sa fille. À la suite de cette plainte, les enquêteurs avaient retiré de la mer des corps mutilés qu’ils ne pouvaient identifier. Le père est décédé depuis. Toutes ces informations et bien d’autres sont contenues dans un dossier juridique complet que la délégation souhaite remettre au Comité, en espérant que l’affaire sera close.

Elle reconnaît que les gouvernements précédents ont été lents à ratifier le deuxième Protocole facultatif au Pacte. Toutefois, l’actuel gouvernement, qui n’est au pouvoir que depuis six mois, a fait preuve de diligence et le Protocole est actuellement devant le Congrès pour ratification.

Mr.  García Lara (République dominicaine) signale que du 1 er mars 1999 au 21 avril 2000, quelque 229 bandits ont été abattus par des patrouilles de police. Conformément à l’article 27 du Code de justice de la police, qui définit les mesures à prendre en cas d’infractions commises par les responsables de la police dans l’accomplissement de leurs fonctions, ces affaires ont fait l’objet d’enquêtes et ont été transmises aux tribunaux de police. Par ailleurs, la loi nº 285 adoptée par l’Assemblée nationale prévoit des enquêtes sur les cas d’abus intervenus lorsqu’un responsable n’était pas en poste. Dans ces cas, l’agent est suspendu et l’affaire portée devant les tribunaux ordinaires.

Au cours des trois dernières années, le ministère public a ouvert des bureaux dans les locaux de la police à travers le pays. Ces bureaux, en collaboration avec les autorités de police locales, sont chargés d’enquêter sur les cas d’abus présumés et d’en saisir, soit les tribunaux de police, soit les tribunaux ordinaires. Il ajoute qu’il y a des centaines de cas où des agents de police ont été suspendus et traînés devant les tribunaux ordinaires.

Droit à la liberté et à la sécurité de la personne, traitement des prisonniers, jugement équitable et garanties appropriées (articles 7, 9, 10 et 14)

Le Président prie la délégation de répondre aux questions des paragraphes 9 à 13 de la liste de questions (CCPR/C/71/L/DOM) : utilisation des armes à feu par la police; système institutionnel de contrôle de la police; nombre de personnes actuellement en détention provisoire et mesures prises pour réduire les cas d’exception au délai de 48 heures; problème des lenteurs judiciaires; système d’enregistrement des prisonniers et emprisonnement des délinquants mineurs.

M .  García Lara (République dominicaine) dit au sujet de l’utilisation des armes à feu par la police qu’une Direction des affaires intérieures a récemment été créée au sein de la police nationale. Elle est chargée des programmes de lutte contre la corruption, les abus et les actes délictueux (commis en service ou hors de celui-ci). Créée pour réformer la police nationale, la Direction a pour mission principale de restaurer la confiance des citoyens, de surveiller les agents de la police nationale (qu’ils soient en service ou non) et d’enquêter sur leurs actions. Par ailleurs, la haute hiérarchie de la police et le gouvernement ont convenu de la nécessité d’opérer des réformes. La police nationale est actuellement régie par une loi qui date de 1936, et un projet de loi définissant les différentes réformes arrêtées a été récemment déposé à l’Assemblée nationale.

L’un des aspects de la réforme concerne les tribunaux de police. Il a récemment pris part au premier séminaire sur les droits de l’homme organisé par l’Institut militaire des droits de l’homme. Ce séminaire intitulé « Raison d’être des tribunaux de police » traite de la nécessité de restructurer plutôt que d’abolir le système actuel des tribunaux. Il a été proposé que les représentants des services du Procureur général deviennent membres de ces tribunaux. Il a également été proposé que les tribunaux tiennent leurs audiences hors des locaux de la police, ce qui permettrait aux citoyens impliqués dans des affaires pénales de se sentir plus indépendants des services de la police lorsqu’ils exercent leurs droits. Des actions civiles peuvent être engagées contre les agents de la police, et en application de la loi 281, ces agents ne peuvent invoquer la procédure de l’habeas corpus au cas où ils seraient impliqués dans des activités criminelles.

Même si pour certains observateurs, les tribunaux de police doivent être démantelés du fait de leur manque d’impartialité, la réforme a été conçue pour améliorer le fonctionnement de ces tribunaux. La lourde peine prononcée récemment dans une affaire célèbre, où un marchand avait été abattu à Avenida 27 de febrero, est une illustration de cette amélioration. L’agent responsable avait été condamné à 10 ans de prison, et l’on pourrait citer des dizaines d’autres cas similaires.

S’agissant du système institutionnel de contrôle de la police, le Président de la République est, en vertu de l’article 33 de la loi sur la police nationale (nº 6141 de 1972), responsable de la police. D’après l’article 34, le chef direct est un fonctionnaire ayant le titre de Chef de la police nationale. La réforme envisage de changer ce titre en faveur de celui de Directeur général. Il/elle sera le plus haut responsable chargé de commander, gérer, organiser et former le corps de la police. Par le passé, le Chef de la police nationale était assisté par une structure collégiale appelée Plana Mayor. Toutefois, le projet de loi actuellement en étude au Congrès propose de remplacer le Plana Mayor par un nouvel organe appelé Conseil suprême de la police, présidé par le Ministre de la sécurité et des affaires de la Police, et au sein duquel siégeront le Directeur général de la police et le Procureur général, entre autres.

Il cite quelques affaires récentes aux tribunaux de police de première instance et d’appel, où des peines d’emprisonnement allant de 2 à 15 ans, avec révocation, avaient été prononcées ou confirmées contre des agents de police jugés coupables de violations du Code pénal dans leurs fonctions. Il s’agit de la condamnation pour homicide non justifié par la légitime défense prévue aux articles 3.28 et 3.29 du Code pénal.

M .  Castaños Guzman (République dominicaine), répondant aux questions du paragraphe 11 de la liste de questions, dit que le nombre de prisonniers en République dominicaine est passé de nos jours à 13 000, dont 80 % sont en détention provisoire. Il s’agit d’une situation difficile. Il y a plusieurs moyens par lesquels les personnes en détention provisoire peuvent retrouver la liberté. Elles peuvent par exemple être libérées à la suite d’une amnistie. La loi d’amnistie la plus récente date de 1978. Il y a aussi la grâce périodique accordée par décret du pouvoir exécutif en décembre, février et août de chaque année. Une conduite exemplaire en prison pourrait également faire bénéficier de la grâce et de la libération. Par la procédure de l’habeas corpus, un juge peut ordonner la libération immédiate d’une personne injustement emprisonnée. Pour les prisonniers condamnés, il y a aussi la liberté provisoire pour bonne conduite, dans le cadre du système de mise en liberté provisoire sous caution en matière pénale, et la mise en liberté avec probation lorsque la moitié de la peine a déjà été purgée, mesures qui sont prises par une Commission des libérations conditionnelles sur la base de la conduite du prisonnier. En outre, la Cour suprême a le pouvoir de revenir sur les décisions de justice s’il y a de nouveaux faits ou de nouvelles preuves qui montrent qu’un prisonnier devrait être libéré.

Le délai de 48 heures pour la garde à vue est un problème pour la police et les autorités judiciaires, qui estiment souvent qu’il ne suffit pas pour mener à bout les enquêtes. Mais il s’agit d’un droit constitutionnel, destiné à protéger l’accusé. Des progrès sont faits dans le système d’enquêtes, en particulier, avec l’utilisation accrue des méthodes scientifiques et le recours de moins en moins aux témoignages et aveux. Par conséquent, l’arrestation se fait de nos jours à la suite des enquêtes et non l’inverse. Le Procureur général est particulièrement rigoureux pour ce qui est du respect du délai de 48 heures.

En réponse à la question 12 sur les lenteurs judiciaires, il rappelle que la réforme du système judiciaire a été amorcée depuis 1997. Les juges de la nouvelle Cour suprême ont été nommés à la suite d’un processus impliquant toutes les forces politiques du pays et la société civile. Le Conseil judiciaire national est une entité hautement professionnelle. Les juges doivent maintenant trancher les affaires dans un délai de 60 jours, même s’ils peuvent solliciter un délai supplémentaire si le dossier est particulièrement volumineux. Au début de la réforme, il y avait des milliers d’affaires pendantes, mais au cours des trois dernières années, les tribunaux ont pu les traiter. L’enregistrement des prisonniers relève de la responsabilité de la Direction générale des prisons, qui détient toutes les données sur chaque prisonnier; le lieu où il se trouve dans le système carcéral et toutes les décisions prises à son sujet. Le processus d’enregistrement a connu beaucoup d’amélioration à travers l’informatisation. Il y a eu des progrès significatifs en matière de droits de l’homme concernant les personnes en détention provisoire, d’après les observateurs internationaux qui estiment qu’aujourd’hui en République dominicaine, il y a la primauté du droit.

Le phénomène des jeunes délinquants, qui fait l’objet du paragraphe 13 de la liste de questions, est mondial. Les jeunes commettent des délits à cause de l’éclatement de la famille, de l’aggravation de la pauvreté et de l’irresponsabilité des parents. La République dominicaine gère le problème au moyen de centres spéciaux pour jeunes régis par le Code des mineurs qui les traite non pas comme les délinquants adultes régis par le code pénal, mais comme des adolescents ayant besoin d’éducation et de réinsertion qu’assurent les centres. Les organisations non gouvernementales sont actives dans ce domaine, et le programme Don Bosco, pour la réinsertion des enfants de la rue, est reconnu au plan international.

S’agissant de la question 4 de la liste de questions qui attend encore sa réponse, M me Abreu de Polanco (République dominicaine) dit que, lorsque la République dominicaine a ratifié le Protocole facultatif, elle s’était engagée à examiner toute plainte ou opinion émise par le Comité. À sa connaissance, seulement un cas a été porté à l’attention du Comité en application du Protocole facultatif, et aucun n’est en attente. Elle ajoute que lorsque la République dominicaine ratifie un texte international, les dispositions de celui-ci sont intégrées dans le droit interne et ont force de loi pour l’État et les citoyens.

M .  Solari Yrigoyen loue les efforts déployés par la République dominicaine pour développer les mécanismes constitutionnels et institutionnels visant à améliorer son système démocratique et la situation des droits de l’homme dans le pays. Il salue aussi la réforme constitutionnelle de 1994 et l’accent mis, à l’article 3 de la Constitution, sur la liberté et l’indépendance de la République dominicaine, qui a été souvent envahie, vis-à-vis de toute puissance étrangère. Il s’agit là de la reprise du droit à l’autodétermination prévu à l’article premier du Pacte.

Le pays a encore beaucoup à faire pour exécuter pleinement ses obligations en vertu du Pacte. Le quatrième rapport périodique (CCPR/C/DOM/99/4) a été préparé par le précédent gouvernement, et ne fournit pas suffisamment d’informations sur certains points, en particulier, la mise en œuvre de la législation. Il est aussi préoccupé par le fait qu’il y a aujourd’hui un demi-million de Haïtiens dans le pays, qui travaillent dans le secteur des industries et de la construction au lieu des plantations de canne à sucre, comme par le passé. Lors de la préparation du troisième rapport périodique, le décret nº 233 de 1991 était encore en vigueur et suspendait certains articles du Pacte. Quelle est la situation actuelle pour ce qui est des effets de ce décret? L’on ne sait pas exactement combien de fois il y a eu des inspections dans les entreprises employant les Haïtiens. D’après les rapports antérieurs, il y a eu seulement 17 inspections. S’agissant de la culture de l’impunité et du progrès réalisé dans la lutte contre ce fléau, il souhaite connaître la suite réservée au recours exercé contre la condamnation de quatre citoyens dominicains pour le meurtre du journaliste Orlando Martínez en 1975, et le résultat de l’enquête judiciaire sur la disparition en 1994 du journaliste Narciso González.

En 1999, 200 homicides auraient été commis par les agents de police et des forces armées. Le chiffre est apparemment le même en 2000. Il se demande quelles mesures d’enquête avaient été prises après ces incidents (question 8). Les infractions pénales commises par la police sont jugées devant les tribunaux spéciaux de police qui, d’après le gouvernement, appliquent les dispositions de l’article 14 du Pacte. Il aimerait cependant avoir plus d’informations sur ces tribunaux. En particulier, il ne comprend pas pourquoi les infractions commises par la police ne peuvent pas être jugées devant les tribunaux répressifs ordinaires. Il y a également eu une exécution extrajudiciaire par la police le 13 juillet 1999 dans la province d’Espayan. Lors d’une fusillade, elle a tué trois personnes : Victor Matos Espinosa, Antonio Ramón Hernandes et Julio Holguin. L’on a vu à la télévision les corps des victimes en train d’être enlevés du véhicule de la police, ce qui dément la version des faits donnée par celle-ci. Les agents de police responsables sont-ils restés impunis?

Les tribunaux militaires semblent sortir du cadre du Pacte, en particulier de l’article 14. Qu’a-t-on fait du cas des 16 Haïtiens et d’un Dominicain qui avaient été tués près de la frontière le 17 juin 1999 par les agents des forces armées? Ceux qui en étaient responsables avaient-ils été jugés devant les tribunaux militaires? Deux Haïtiens ont été tués par les agents des forces armées le 12 août et le 27 novembre 2000 respectivement. Quel avait été le résultat du procès dans ces affaires devant les tribunaux militaires?

L’article 8.1 de la Constitution prohibe la torture; toutefois, il y a plusieurs indices qui montrent que la torture est largement pratiquée par la police, les responsables de l’armée et des prisons. Quelles mesures ont été prises par le gouvernement pour lutter contre ce fléau et quelles sont les informations que le gouvernement dominicain peut fournir sur les jugements et condamnations pour torture au cours des trois dernières années?

La situation dans les prisons est inquiétante, et les conditions de vie en milieu carcéral semblent relever du traitement cruel et dégradant. Compte tenu du fait que le pourcentage des prisonniers en détention provisoire est maintenant passé à 80 %, il est important de savoir davantage sur leurs conditions de vie. Dans certaines prisons telles que celles de La Vitoria et San Cristóbal, il a appris que les prisonniers dorment au couloir, n’ont pas accès aux soins médicaux et à l’eau, et les conditions d’hygiène ne sont pas satisfaisantes. Il y a des cellules de châtiment sans aération, ni éclairage. Quelles mesures sont prises par le gouvernement pour améliorer la situation dans le court terme, et quel délai a-t-il fixé pour procéder à la réforme des prisons qu’il a promise en janvier 2001?

En 1993, le Comité a exprimé sa préoccupation au sujet de la détention des Haïtiens. Quelle est la politique du nouveau gouvernement concernant la déportation des étrangers (paragraphes 83 et 84 du rapport)? Le problème de l’impunité pour ce qui est de la violation des droits de l’homme a déjà été mentionné. Quelles mesures ont été prises par le gouvernement pour veiller à ce que les responsables de la police et de l’armée accusés de violations des droits de l’homme soient jugés devant les tribunaux ordinaires plutôt que devant les tribunaux spéciaux où des procédures régulières ne peuvent pas être garanties. Enfin, le service militaire est-il obligatoire pour tous, ou y a-t-il une autre forme de service? Et quelles dispositions ont été prises pour les objecteurs de conscience?

M me Medina Quiroga dit qu’elle est déçue par la pauvreté du rapport en informations. Il y a peu de données nouvelles par rapport au troisième rapport périodique de 1993, ce qui montre que la situation en République dominicaine ne cadre pas avec ses obligations en matière des droits de l’homme, prévues par le Pacte. Le Pacte avait-il tenu compte des lois en vigueur dans le pays? Et si tel est le cas, une loi subséquente peut-elle prévaloir sur celle qui lui est antérieure? Si tel n’est pas le cas, le Pacte peut-il ne pas être applicable même s’il est intervenu après les autres lois? S’applique-t-il directement? Les magistrats sont-ils formés aux exigences du droit international? Elle n’est pas satisfaite de la réponse à la question 4 de la liste de questions. Il est important de connaître les mécanismes qui ont été mis en place pour appliquer les décisions du Comité.

Sur la base du rapport et de l’exposé de la délégation, il est impossible au Comité d’évaluer le statut de la femme en République dominicaine. La délégation n’a fourni aucune information sur la violence à l’encontre des femmes, leur accès aux emplois publics (en dehors des quatre femmes générales d’armée mentionnées dans l’exposé oral) ou leur chance de vivre en société sur un pied d’égalité avec les hommes. Il serait en effet surprenant que la situation des femmes en République dominicaine soit très différente de celle des autres pays de l’Amérique latine.

Le chiffre d’au moins 200 décès aux mains de la police (CCPR/C/71/L/DOM, par. 8) est alarmant, tout comme l’inexistence d’un système de contrôle de tels incidents. L’État partie doit expliquer pourquoi les agents de police sont poursuivis devant les tribunaux spéciaux de police plutôt que devant les tribunaux ordinaires, ce qui s’écarte complètement de l’article 14 du Pacte. De même, elle se demande s’il y a un organe indépendant chargé d’enquêter sur les délits commis par les agents de police. Il conviendrait de savoir combien de cas parmi les 200 et plus ont été jugés, et combien ont donné lieu à des condamnations et/ou des réparations aux familles des victimes.

Le pourcentage de la population carcérale en détention provisoire est également alarmant; près de 80 % selon le rapport (CCPR/C/DOM/99/3, par. 77). Elle aimerait connaître la durée moyenne de la détention provisoire, et si les personnes en détention provisoire sont séparées des personnes condamnées. Le retard à statuer sur les demandes d’habeas corpus (paragraphe 78 du rapport) semble indiquer qu’il n’y a pas du tout de recours en cas de détention. Elle se demande si cette situation perdure ou si la loi de 1978 régissant l’habeas corpus a été mise à jour. Elle déplore l’absence totale de personnels spécialisés de prison chargés des conditions de vie en milieu carcéral, mais se réjouit de l’introduction d’un registre de détenus, et se demande s’il est tenu à travers le pays.

S’agissant du paragraphe 64 du rapport et du paragraphe 3 de la liste des questions, elle déclare que le Comité n’a pas reçu des explications sur le principe de réciprocité des droits des étrangers, mais a plutôt été informé de ce qu’en principe, les étrangers jouissent des mêmes droits que les nationaux de la République dominicaine. Elle souhaite avoir une définition plus complète de ce concept et des informations sur les cas où les étrangers ne jouissent pas des mêmes droits. L’État partie doit également expliquer le critère utilisé pour distinguer les « immigrants », qui sont autorisés à demander une résidence permanente, et les « non-immigrants ».

M .  Klein affirme que, si l’on peut féliciter l’État partie pour sa disponibilité permanente à échanger des idées avec le Comité, la présence de la délégation ne compense pas l’absence d’informations de base dans le rapport. Cinq phrases en tout pour l’article 14 ne suffisent tout simplement pas. Le rapport aurait dû aborder le taux élevé de criminalité dans le pays et les tueries perpétrées par les agents de la police; il n’a même pas prévu une rubrique spéciale pour les articles 6 et 7. De même, le paragraphe 109 sur l’égalité des sexes est loin d’être exhaustif. Le Comité n’est pas en mesure de déterminer sur la base d’un tel rapport si l’État partie exécute les obligations lui incombant en vertu du Pacte.

Il rappelle que Mme Medina Quiroga a déjà demandé à la délégation les mécanismes qui sont mis en place pour faciliter l’application des décisions du Comité (CCPR/C/71/L/DOM, par. 4). Même si, comme bon nombre de pays, la République dominicaine ne dispose pas de mécanismes juridiques à cet effet, il doit y avoir certainement en pratique une sorte de mécanisme dont se charge en particulier un ministère. La délégation aurait dû présenter un rapport plus élaboré.

S’agissant des questions du Comité concernant les étrangers (paragraphe 3 de la liste des questions), il souhaite avoir des clarifications sur la signification du terme « étrangers en transit », un concept qui continue de s’appliquer aux personnes ayant résidé en République dominicaine pendant 10 ou 20 ans. Il aimerait savoir pourquoi les personnes qui résident dans le pays depuis si longtemps ne bénéficient pas d’un statut juridique.

Pour ce qui est des tribunaux spéciaux de police, il apparaît très clairement qu’ils ont été créés pour réserver un traitement spécial à la police et la protéger.

S’agissant des paragraphes 72 et 73 du rapport, il se réjouit de la qualification de la torture et de la détention arbitraire comme délit punissable, mais souhaite connaître comment les lois applicables sont en pratique exécutées. Si la loi s’applique aux incidents particuliers, l’on ne peut dire clairement qui est responsable du fait que le système carcéral dans son ensemble – avec sa surpopulation, ses cellules de châtiment et les conditions sanitaires déplorables –viole l’article 10, et peut-être même l’article 7 du Pacte. S’agissant de la deuxième phrase du paragraphe 78 du rapport, elle se demande comment une personne peut-elle continuer à être détenue alors que la mesure est illégale. Saluant l’introduction d’un registre des prisons, elle voudrait savoir si celui-ci est accessible au public, en particulier, à ceux qui recherchent des informations sur les personnes disparues. Il aimerait avoir des informations sur le rôle des militaires dans les forces de sécurité – par exemple, il voudrait savoir s’ils peuvent remplir les fonctions normales des agents de police et si ce faisant, ils continuent à rendre compte à leur supérieur hiérarchique. Il s’étonne aussi de l’existence de tribunaux militaires spéciaux comparables aux tribunaux de police.

En conclusion, il relève que, bien que la République dominicaine ait ratifié le pacte il y a plus de 30 ans, elle doit prendre des mesures vigoureuses pour appliquer ses dispositions.

M .  Yalden dit qu’il est du même avis que M. Klein, Mme Medina Quiroga et M. Solari Yrigoyen concernant les défaillances du rapport. Les directives du Comité pour la rédaction des rapports précisent que les références vagues aux lois, règlements et décrets ou des affirmations générales comme « il n’y a aucune sorte de discrimination, etc. », sont insuffisantes. Il faudrait absolument développer davantage de telles affirmations.

Les informations sur l’égalité des sexes dans le rapport et l’exposé oral de la délégation ne permettent pas au Comité de bien évaluer la situation des femmes en République dominicaine. Si le paragraphe 109 montre que 60 % de postes des affaires étrangères sont occupés par les femmes, il ne dit pas quelle proportion occupe les postes de haut cadre, de cadre moyen et de personnel de bureau. Le Comité a aussi besoin de données statistiques sur l’éducation des femmes après le secondaire, leur statut social, leur rémunération comparée à celle des hommes et l’occupation par elles des postes de responsabilité dans les secteurs public et privé.

Pour ce qui est des organismes nationaux de protection des droits de l’homme, l’État partie a fait état en passant du Bureau de l’Ombudsman dans son exposé oral, mais a omis de parler de sa compétence (par exemple, sur les forces armées ou en matière de requêtes des prisonniers) ou de ses activités. Il n’a pas non plus précisé s’il avait des organismes indépendants, impartiaux et transparents de protection des droits de l’homme, tels que reconnus par les principes de Paris (annexe à la résolution de l’Assemblée générale nº 48/134), ou un organe chargé d’enquêter de manière impartiale et transparente sur les violations présumées des droits de l’homme par les agents de police (CCPR/C/71/L/DOM, par. 10). Il critique, à l’instar des autres membres du Comité, l’existence des tribunaux spéciaux de police. Bref, il se demande si l’État partie envisage de créer un organe chargé de surveiller la mise en œuvre dans les faits du Pacte et de statuer sur requêtes en matière des droits de l’homme. La création d’un organe indépendant, impartial chargé de surveiller le système serait une initiative positive.

M .  Tawfik Khalil reconnaît qu’il n’est pas toujours facile de surmonter les séquelles du passé dont les tribunaux de police constituent un exemple type. Comme Mme Medina Quiroga, il est troublé non seulement par les 229 personnes tuées que la délégation a signalées dans son rapport, mais aussi par l’obstination de l’État partie à maintenir les tribunaux spéciaux de police, qui prononceraient des peines plus légères. Il semble y avoir de l’irresponsabilité de la part des agents de police qui font un usage abusif des armes et restent impunis. La poursuite de ces délinquants devant des juridictions civiles donnerait un brin de crédibilité au procès.

Il relève que le pourcentage de personnes en détention provisoire a fortement augmenté passant de 70 % à près de 80 %, et se montre préoccupé par la tendance à la hausse plutôt qu’à la baisse qui est tant souhaitée.

Constatant que les conditions de vie dans les prisons dominicaines sont déplorables dans tous les aspects, il voudrait savoir si les personnes en détention provisoire et les jeunes délinquants sont mélangés aux condamnés.

M .  Kretzmer souscrit aux observations et questions des précédents orateurs; il se dit en particulier préoccupé par le nombre élevé de tueries perpétrées par les forces de sécurité, et par l’impunité dont ils bénéficient. Le fait que 200 affaires de cette nature impliquant la police soient pendantes devant les tribunaux indique la gravité de la situation.

Le guide du Comité précise que l’État partie ne doit pas seulement se contenter de décrire les lois, mais décrire et analyser la situation réelle, par des exemples. Le rapport ne contient aucune information sur la situation réelle. D’après les discussions sur l’article 10, par exemple, les personnes en détention provisoire et les prisonniers condamnés, les homes et les femmes sont détenus séparément. Les rapports provenant des sources indépendantes montrent cependant qu’en fait les prisonniers sont détenus ensemble, et que le nombre de personnes en détention provisoire est très élevé. Le rapport manque par conséquent de crédibilité.

Concernant l’article 9, il aimerait savoir quelle loi régit l’arrestation et la garde à vue, sur quelle base la police procède à l’arrestation sans mandat d’arrêt, et les mécanismes existants qui obligent la police à appliquer la loi. La procédure de l’habeas corpus ne fonctionne pas efficacement si la personne détenue doit attendre des semaines ou des mois pour que son cas soit jugé. L’article 9, paragraphe 3, stipule qu’une personne arrêtée ou détenue doit être amenée immédiatement devant un juge pour y être jugée ou relaxée dans un délai raisonnable. Pourtant, il est ahurissant de constater que 80 % des prisonniers en République dominicaine sont en détention provisoire. Il aimerait savoir sur quelle base une personne est placée en détention provisoire, et quand une personne arrêtée doit être amenée devant un juge. S’il a bien suivi ce qu’a dit la délégation, la liberté provisoire sous caution est obligatoire, mais discrétionnaire. Que veut dire cette assertion? Il conviendrait de connaître la procédure de fixation de la caution, car le système ne marcherait pas si son montant n’est pas proportionnel aux moyens de la personne concernée.

L’article 10 est catégorique : une personne privée de sa liberté doit être traitée avec humanité et respect. L’État partie n’est pas autorisé à maintenir les gens en détention, en violant les dispositions de cet article. Des rapports montrent que l’État partie n’applique pas en fait l’article 10. La principale raison est la grave surpopulation des prisons dominicaines, et la cause de cette surpopulation est le nombre très élevé de personnes en détention provisoire. Il voudrait savoir si le juge dominicain qui rend une décision plaçant une personne en détention provisoire sait qu’il viole l’article 10 du Pacte.

M .  Lallah dit qu’il éprouve aussi une totale insatisfaction à l’égard du rapport dominicain. Les conclusions arrêtées à la suite de l’examen des précédents rapports ne semblent pas avoir été prises en compte, ce qui ne facilite pas un dialogue constructif. Il se félicite de la présence dans la délégation des représentants des différents organes de l’État. La République dominicaine doit décrire les difficultés qu’elle a rencontrées en rédigeant son rapport conformément à l’article 40, pour que le Comité soit mieux outillé pour l’aider.

Il est en particulier préoccupé par la forte population carcérale, l’incapacité des tribunaux à faire face à la charge de travail, et par l’inégalité qui prévaut aussi bien entre les Dominicains qu’entre eux et les autres qui vivent dans le pays. Il souhaite savoir si des tribunaux autres que les tribunaux ordinaires, les tribunaux de police et les tribunaux militaires existent, et si tel est le cas, quels sont ces tribunaux. Par ailleurs, il conviendrait de savoir quelles sont les procédures en cours devant les différents tribunaux et quelles sont les différences entre elles. Quelle est la raison d’être des tribunaux de police? Pourquoi la République dominicaine a-t-elle jugé nécessaire de les créer?

S’agissant de l’article 14, il aimerait savoir si les tribunaux sont ouverts au public, quels tribunaux le sont, et pourquoi une procédure spéciale existe pour les agents de police qui tuent une personne dans l’exercice de leurs fonctions. Le nombre élevé de personnes en détention provisoire empêche de jouir des droits prévus aux articles 9 et 10. Il voudrait connaître les ressources disponibles pour aider les personnes en détention provisoire, y compris l’aide pour avoir un avocat et engager une procédure d’habeas corpus. L’article 14 prévoit qu’une personne doit être jugée sans retard anormal. Cette disposition est d’application stricte surtout lorsque la personne est en détention provisoire.

M .  Amor dit que même si la République dominicaine a cité plusieurs réformes, une approche entièrement nouvelle semble nécessaire. Il conviendrait de savoir les raisons de la pauvreté du rapport, en particulier, eu égard au fait que cet État partie s’est présenté devant le Comité à plusieurs reprises par le passé, et au fait que les directives du Comité sont claires en ce qui concerne les obligations en matière d’établissement des rapports. Le Comité a demandé des informations spécifiques sur l’application du Pacte. Peu de progrès ont été faits, tant pour ce qui est des informations que de l’analyse de celles-ci.

L’État partie doit donner les raisons de l’existence des tribunaux d’exception, et décrire les différences dans leurs procédures et modes de fonctionnement, ainsi que les garanties qu’ils offrent. Il est peu probable que de telles juridictions d’exception, à savoir les tribunaux de police et les tribunaux militaires, soient conformes aux dispositions du Pacte. Il ne connaît aucun autre pays où un nombre si élevé de prisonniers est constitué de personnes en détention provisoire. Il a écouté attentivement les explications de la délégation sur la grâce et l’amnistie. Ces mesures ne s’appliquent cependant qu’aux personnes dont la culpabilité a déjà été établie. Le fait que les condamnés soient mélangés aux personnes en détention provisoire et que les adultes ne soient pas séparés des mineurs est très préoccupant, les conditions de vie dans ces prisons surpeuplées étant, d’après différentes sources, particulièrement difficiles. La procédure d’arrestation et de garde à vue demeure vague, tout comme les mécanismes de suivi des activités policières. Il semble clair qu’en République dominicaine le droit à la liberté n’est pas garanti.

Le rapport ne contient presque pas d’informations sur l’égalité entre les hommes et les femmes. Même s’il mentionne le nombre de femmes occupant certains emplois publics, il ne précise pas le type d’emplois occupés par les femmes, et si elles bénéficient des mesures spéciales de protection.

Le paragraphe 43 affirme que le projet de loi anticorruption a été présenté au Congrès en vue d’introduire la notion de présomption de culpabilité dans les cas où les fonctionnaires sont impliqués. Pourtant ceux-ci doivent bénéficier des mêmes mesures de protection que toute autre personne. Il est indéniable que ce projet de loi viole le principe de la présomption d’innocence.

M .  Ando dit qu’il se félicite du rapport de la République dominicaine qui, en lui-même, prouve que l’État partie veut remplir ses obligations aux termes du Pacte. Il y a d’autres États parties qui n’ont pas présenté de rapport. Il se félicite aussi de la taille de la délégation. Par ailleurs, l’État partie a élaboré une nouvelle Constitution pour améliorer la situation des droits de l’homme. Il partage cependant la même déception que les autres membres du Comité.

Aucune réponse n’a été apportée à la question du paragraphe 4 de la liste de questions, concernant les mécanismes mis en place pour faciliter l’exécution des décisions du Comité, prises en application du Protocole facultatif. La réponse à la question du paragraphe 6, à savoir que des enquêtes sont en train d’être menées au sujet de l’affaire B. Mójica c. la République dominicaine , vaut en la matière. Cette réponse n’est cependant pas suffisante. En outre, l’on ne sait pas clairement si les textes internationaux ont force de loi aux termes de la nouvelle Constitution. En cas de conflit entre un traité et une loi interne, lequel des deux textes prévaut?

Comme indiqué aux paragraphes 8 à 10 du rapport, plusieurs Haïtiens vivent en République dominicaine. L’État partie doit décrire les dispositions applicables de la loi sur la naturalisation, et la procédure pour acquérir la résidence permanente. D’après le paragraphe 10, les Haïtiens et les Dominicains contractent des unions libres, mais sont réticents à déclarer la naissance de leurs enfants : il conviendrait de savoir le statut juridique de ces enfants, et si un enfant dominicain non enregistré et un enfant non enregistré issu d’une union entre une personne de nationalité haïtienne et une de nationalité dominicaine sont traités différemment sur le plan légal. Il voudrait savoir s’il y a une disposition qui accorde la nationalité dominicaine à un enfant né à l’étranger et qui aurait été apatride.

Par ailleurs, il aimerait savoir, pour ce qui est des articles 21 et 22, la procédure et les conditions de création d’un syndicat, et le sens des dispositions du paragraphe 100 du rapport qui stipule que ces organisations doivent être créées pour des objectifs pacifiques et liés au travail. Comment est-ce que la loi régit les droits des travailleurs?

M .  Rivas Posada rappelle que, compte tenu du fait que les tribunaux de police sont présumés mis en place pour enquêter sur les infractions commises par les agents de police et procéder à des poursuites, il serait utile de connaître si en République dominicaine, les forces de police sont considérées comme un corps civil ou comme une branche ou un instrument des forces armées. Il s’agit là de deux approches bien différentes, liées aux principes démocratiques de base et à la question de savoir si la police dispose d’un pouvoir autonome par rapport aux tribunaux civils ordinaires.

La séance est levée à 13 heures.