Quatre-vingt quinzième session

Compte rendu analytique (partiel)* de la 2603e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 18 mars 2009, à 15 heures

Président :M. Iwasawa

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Sixième rapport périodique d u Rwanda (suite)

* Il n’a pas été établi de compte rendu analytique pour le reste de la séance.

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte (suite)

Troisième rapport périodique du Rwanda (suite) (CCPR/C/RWA/3; CCPR/C/RWA/Q/3/Rev.1 et  Add.1)

Sur invitation du Président, les membres de la délégation du Rwanda prennent place à la table du Comité.

Le Président invite le Comité à poursuivre son examen des points 1 à 14 de la liste des questions (CCPR/C/RWA/Q/3/Rev.1).

Mme Motoc déclare que le Comité a reçu des informactions concernant l’existence de centres de détention arbitraire au Rwanda. Elle demande si le Gouvernement a connaissance de l’existence de tels centres et, dans l’affirmative, ce qu’il fait à cet égard.

Elle félicite le Rwanda des progrès réalisés dans la protection des droits de la femme. Le pays accorde une plus grande attention à la question du viol et a pris des mesures pour y répondre. Cela dit, il serait bon de disposer de plus de statistiques. Elle aimerait en particulier savoir ce qui est fait pour punir les personnes coupables de viol et pour réinsérer les victimes de viol dans la société. Enfin, elle aimerait savoir ce que fait le Gouvernement pour combattre la violence domestique.

Sir Nigel Rodley estime que vu les événements tragiques qu’a connus le Rwanda dans les années 1990, sa décision d’abolir la peine de mort est remarquable. Bien que le Pacte n’exige pas l’abolition de la peine de mort, le Comité a toujours considéré ce document comme essentiellement abolitionniste. La décision du Rwanda est un bon exemple pour la sous-région, pour la région et pour l’ensemble du monde.

S’il comprend la décision du Rwanda de remplacer la peine de mort pour la prison à perpétuité, il a quelques réserves quant à la condamnation à la réclusion perpétuelle et, en particulier, quant à la pratique consistant à interdire aux condamnés de recevoir des visites. À cet égard, il prend note avec satisfaction du fait que le texte de loi sur l’exécution de la condamnation à la prison à vie autorise de telles visites. Il aimerait savoir quand ce texte de loi sera approuvé et dans quelles conditions auront lieu ces visites.

D’après la réponse à la question 4, les membres de la gendarmerie qui ont tué des détenus du centre de détention militaire de Mulindi en décembre 2005 auraient agi en état de légitime défense. Or, toujours d’après cette réponse, des sanctions ont été prises à l’encontre des membres de la gendarmerie concernés et le directeur de la prison a été limogé. L’orateur a du mal à concilier ces deux déclarations. Si la sanction a été prise parce que les gendarmes en question ont fait un usage abusif de la force, l’argument de la légitime défense ne peut en aucun cas être invoqué.

Enfin, d’après la réponse à la question 6, les agents des forces de sécurité ne peuvent faire usage de la force que dans un but légitime. L’État partie devrait expliquer comment il a décidé des objectifs qui étaient légitimes et de ceux qui ne l’étaient pas. Traditionnellement, le Comité interprète l’article 6 en ce qui concerne l’utilisation d’armes à feu par les agents de la force publique en fonction du principe selon lequel la force employée ne doit pas excéder la force combattue. Autrement dit, la force mortelle ne doit être employée que contre une autre force mortelle.

M. Pérez Sánchez-Cerro, notant que la Commission nationale des droits de l’homme est censée, notamment, examiner les violations des droits de l’homme commises au Rwanda par des organes de l.'État, des personnes agissant sous couvert de l'.État, des organisations et des individus (par. 93 du troisième rapport périodique présenté par le Rwanda (CCPR/C/RWA/3)), aimerait avoir plus de renseignements sur la procédure d’enquête de la Commission. Il aimerait savoir en particulier à quel organe cette commission fait rapport et si elle est ou non efficace et indépendante.

Le Comité a appris qu’un certain Général recrutait des enfants des camps de réfugiés du Rwanda. L’enlèvement serait peut-être un terme plus approprié, car ces enfants disparaissent généralement la nuit à l’insu de leurs parents. Il demande si le Gouvernement envisage d’enquêter sur cette question et de punir les coupables.

Enfin, l’État partie devrait expliquer comment le Gouvernement prévoit de renforcer les tribunaux Gacaca et d’empêcher les violations de la légalité.

M. Fathalla demande pourquoi les conventions et traités internationaux qui ont été dûment ratifiés ou approuvés ont préséance sur toutes les lois organiques et les lois ordinaires sauf la Constitution et les lois référendaires (rapport, par. 4). Il aimerait savoir si le Gouvernement a pris des mesures détaillées de protection de l’environnement propres à aider à protéger le droit des citoyens à la vie.

M. Salvioli, se référant au commentaire de l’État partie selon lequel le Pacte n’est pas souvent invoqué par les demandeurs et n’est donc pas souvent appliqué par la justice, demande si le Rwanda a instauré des programmes de formation judiciaire traitant notamment de la mise en œuvre du Pacte.

Faisant suite aux commentaires de Sir Nigel Rodley, il demande si les tribunaux militaries ont competence pour connaître des crimes de droit commun.

Il a été indiqué que les femmes qui étaient violées en prison l’étaient par d’autres détenus. Or, au paragraphe 222 du rapport, il est dit que les femmes se trouvant dans des centres de détention étaient gardées dans des bâtiments spéciaux isolés de ceux des hommes et gardées par des femmes. Il demande si cela est vrai et sollicite des statistiques précises sur le nombre de personnes trouvées coupables de viol et condamnées.

Enfin, il exprime des réserves sur l’article 191 du nouveau projet de code pénal, qui semble criminaliser l’homosexualité et demande si l’État partie juge cet article compatible avec le Pacte.

M. Rivas Posada, se référant à la deuxième partie de la question 10, estime qu’il n’est toujours pas établi clairement si les individus peuvent ou non se prévaloir de recours efficaces pendant un état de siège ou d’urgence. Dans la plupart des pays, il existe des voies officielles par lesquelles revoir une décision portant déclaration d’un état de siège ou d’urgence si des individus, des groupes ou des institutions estiment cette décision illégale ou anticonstitutionnelle.

M. Bouzid, se référant aussi à la question 10, demande si les citoyens rwandais ont besoin d’un passeport ou d’un laissez-passer pour voyager à l’étranger (rapport, par. 212) et, dans l’affirmative, si tel est le cas en toutes circonstances ou seulement en période d’état d’urgence.

M. Nsengimana (Rwanda) présente les excuses de la délégation pour n’avoir pas fourni de traduction anglaise de ses réponses à la liste de questions. La délégation n’aurait pas hésité à le faire, mais elle avait cru comprendre que le Secrétariat se chargerait de la traduction, comme il l’avait fait pour le rapport.

En ce qui concerne la préoccupation exprimée par Mme Wedgwood à propos de la taille limitée de la délégation du Rwanda par comparaison avec celles d’autres pays, il dit que, malheureusement, certains membres prévus de la délégation, notamment un membre de la police, n’avaient pu obtenir à temps leur visa.

S’agissant de la question de savoir comment le Pacte était interprété en droit national et dans la pratique, il précise que selon l’approche moniste du Rwanda, le Pacte et les autres instruments internationaux sont automatiquement appliqués. Toutefois, avant que des changements puissent être apportés à la Constitution, il faut une consultation populaire. Par conséquent, s’il y a conflit entre un instrument international et la Constitution, il faut prendre le temps de saisir le Parlement de la question ou, éventuellement, organiser un référendum. Cela ne veut pas dire que la Constitution ne peut être amendée, mais simplement qu’il y a une procédure à suivre et que les choses ne se font pas automatiquement. Dans la pratique, comme dans tout autre pays, lorsqu’une loi est votée, il faut s’efforcer d’y sensibiliser à la fois le public et les juges. Quand il y a réticence, toute modification de la loi prend du temps à prendre pleinement effet.

Le manque de données statistiques est un problème est dû aux difficultés de reconstruction de l’infrastructure du pays. Le Rwanda a bien un institut de la statistique, mais celui-ci est encore nouveau. Le Rwanda sera en mesure de présenter davantage de données statistiques dans son prochain rapport au Comité.

Évoquant la question du système judiciaire Gacaca, il rappelle le principe selon lequel toute justice différée est une justice refusée. La justice rwandaise s’est trouvée dans l’impossibilité de faire face à l’énorme quantité de dossiers – plus d’un million – de sorte que nombres de personnes ont dû passer un temps considérable en prison dans l’attente d’un procès. Le système Gacaca a été créé pour répondre à cette situation : inspiré par les formes traditionnelles de justice et de réconciliation, mais utilisant en même temps les pratiques des tribunaux modernes, il constitue un nouveau système hybride. Ce système répond au caractère unique des crimes commis au Rwanda, qui nécessitent réconciliation en même temps que justice. Dans le système Gacaca, les personnes elles-mêmes déterminent la responsabilité des crimes commis et décide des sanctions, mais laissent également place à une réconciliation. Ce système bénéficiait aussi de l’aide de conseillers juridiques professionnels qui visitaient les tribunaux et dispensaient des conseils en cas de besoin, notamment pour les problèmes épineux. Cet appui juridique n’était pas nécessairement apporté aux particuliers, mais plutôt au tribunal lui-même, afin de l’aider dans ses décisions. Certes, ce système n’était pas parfait, mais même les tribunaux ordinaires ne sont pas parfaits, et la communauté internationale n’a pas trouvé d’autre moyen de résoudre le problème. Le système Gacaca a porté ses fruits – aujourd’hui, le Rwanda est probablement le pays le plus paisible et le plus sûr de la région.

S’agissant de la liberté d’expression, il déclare que les médias, en particulier Radio Mille Collines, ont joué un rôle répréhensible tant avant et pendant le génocide, accentuant les divisions et incitant à la violence, fournissant même des indications quant à l’endroit où se trouvaient certaines personnes, afin qu’elles puissent être tuées. Les journalistes accusés de ces méfaits ont eu droit à l’appui d’avocats, et leurs procès se sont généralement déroulés dans le calme. Ces journalistes ont rarement été emprisonnés, car les actes qui leur étaient reprochés étaient essentiellement des délits de droit civil. Aujourd’hui, la presse rwandaise est libre, et certains journaux ne se privent pas de critiquer le Gouvernement.

En ce qui concerne la détention, en fait, l’entrepôt évoqué n’était pas un centre de détention ou une prison mais plutôt un centre de transit où les affaires concernant des jeunes étaient rapidement instruites et ces jeunes retournés à leur famille ou envoyés dans des centres d’éducation. Les adultes classés comme vagabonds étaient le plus souvent des récidivistes et des trafiquants de drogue et étaient condamnés pour leurs délits.

Quant à la question des femmes se retrouvant enceintes en prison, il souligne que les prisons sont divisées en deux zones, chacune de ces zones étant exclusivement réservée à la détention d’hommes ou de femmes. Le viol n’est donc pas possible en prison. Toutefois, dans certains cas, les femmes bénéficient d’une libération provisoire – par suite du communiqué du Président – et reviennent enceintes à la prison. Leur grossesse n’a donc pas son origine dans la prison.

Quant aux conditions de vie dans les prisons, notamment dans les cas d’emprisonnement à vie, il précise que le projet de loi rwandais sur l’exécution de la condamnation à la prison à perpétuité a été approuvé par le Conseil des Ministres et sera transmis au Parlement. Au Rwanda, il existe deux types d’emprisonnement à perpétuité. Dans la première catégorie, les détenus peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle ou de la grâce présidentielle pour bonne conduite après 10 ans. Dans la seconde catégorie, les détenus ne sont admis à bénéficier d’une telle libération qu’après 20 ans. En outre, les détenus de la première catégorie peuvent recevoir des visites une fois par semaines, tandis que ceux de la deuxième catégorie n’ont droit à des visites qu’une fois toutes les deux semaines. Ces individus ne sons pas condamnés à la réclusion, mais simplement détenus solitaires dans leur cellule – comme dans l’Ouest – tandis que les autres détenus dorment à plusieurs dans une même cellule, comme dans beaucoup d’autres pays en développement. D’une façon générale, les conditions de vie dans les prisons s’améliorent constamment, au fur et à mesure des améliorations de la situation économique du Rwanda.

En ce qui concerne le Tribunal pénal international pour le Rwanda, le pays coopère avec ce tribunal et continuera de le faire. Cela ne veut toutefois pas dire qu’il acceptera aveuglément les demandes du Tribunal : une certaine forme de dialogue est nécessaire. Dans certains cas, des témoins rwandais comparaissant devant le Tribunal ont été maltraités pendant le contre-interrogatoire. Le Rwanda a protesté, et les problèmes ont depuis lors été résolus. Par ailleurs, il incombait au Tribunal d’achever ses travaux. La résolution 1503 (2003) du Conseil de sécurité fixait les conditions à cet égard, mais le Tribunal semblait peu enclin à s’exécuter; une fois encore, le Rwanda a dû intervenir. Il fallait un mécanisme qui permettre de suivre la mise en oeuvre de cette résolutions sans que l’affaire ait constamment à être portée devant le Conseil de sécurité.

S’agissant de la question des différentes méthodes d’exécution de la justice, on en peut comparer les situations au Rwanda à celles de l’ex-Yougoslavie. Au Rwanda, s’il y a eu des massacres des deux côtés, un camp a cherché à faire cesser le génocide perpétré par l’autre camp. Lorsque certaines personnes ont été tuées pour qu’elles ne commettent pas des actes de génocide, cela en soi ne constituait pas un massacre organisé, et toute accusation de crimes de guerre en pareils cas était injuste. En ce qui concerne les cas de crime de guerre dont le Tribunal pénal international a saisi les tribunaux rwandais, le Procureur a accepté qu’une affaire où deux jeunes soldats ont tué des prêtres et des évêques, qui avait été reconnue comme crime de guerre, soit jugée au Rwanda. Les deux coupables – dont l’un est aujourd’hui capitaine et l’autre commandant – ont avoué et ont été condamnés. Cela a montré que ceux qui cherchaient à mettre fin au génocide étaient capables de condamner certains de leurs hommes.

Dans le cas des exécutions extrajudiciaires et des disparitions, l’orateur ajoute que dans l’affaire de Mulindi, bien que les exécutions aient été considérées comme des cas de légitime défense et que l’affaire ait été classée, des sanctions disciplinaires ont été appliquées, car les autorités carcérales auraient pu régler le problème avant qu’il ne dégénère. Quant aux disparitions, tous les cas ont donné lieu à des enquêtes, et lorsque les auteurs ont été trouvés, ils ont fait l’objet de poursuites.

Pour répondre à la question posée par M. Amor au sujet de la composition de la Commission nationale pour l’unité et la réconciliation, il précise qu’en fait, cette commission bénéficiaire d’une large représentation, y compris de la société civile. Par exemple, le Vice-Président de la Commission est un prêtre – les églises font partie de la société civile au Rwanda. Un autre membre de la Commission, décédé récemment, était prêtre et directeur d’école.

Quant à la question concernant les limites à la réconciliation, il ajoute, que même avec les progrès réalisés par la Commission nationale pour l’unité et la réconciliation et les tribunaux Gacaca, la réconciliation est un processus de longue haleine, et rétablir l’harmonie nationale après ce qui s’est passé n’est pas chose aisée. Il y a eu des progrès, mais il y a encore beaucoup à faire avant que l’on puisse considérer le processus comme achevé. La pauvreté est aussi un facteur dans le redressement, de sorte qu’il est essentiel de poursuivre la lutte contre la pauvreté. Les personnes qui ont survécu au génocide et les jeunes qui y ont participé travaillent aujourd’hui côte à côte à des projets de microfinancement.

Mme Tumukunde (Rwanda) déclare que la Commission nationale des droits de l’homme a joué un rôle essentiel dans toutes les phases de la préparation du rapport de l’organe chargé de la vérification du traité. Dans les premiers temps, la Commission s’est occupée d’éducation et de plaidoyer à propos de la présentation de rapports et a organisé des stages de formation sur les pactes relatifs aux droits de l’homme. Elle a influé de façon déterminante sur la décision de proposer une équipe interministérielle comme mécanisme permanent et a offert des conseils techniques lors de la préparation du rapport. Elle a également servi de forum aux parties prenantes en leur permettant d’apporter leurs contributions à l’établissement du rapport et a rappelé aux divers ministères en cause leur obligation de veiller à ce que le rapport soit établi en temps voulu. La Commission a participé à la traduction des conclusions dans la langue locale et à leur mise en œuvre. Lorsque cela a été nécessaire, la Commission a rédigé un « contre-rapport », mais pour la présente session, elle n’a pas eu de raisons de le faire.

En ce qui concerne l’égalité entre les sexes, un examen juridique du Code pénal et du Code de la famille est en cours, et cette question sera traitée dans le prochain rapport. Toutes les institutions gouvernementales ont des coordonnateurs des questions d’égalité entre les sexes qui veillent à l’intégration de la parité hommes-femmes et à ses implications budgétaires. Ces questions ne relèvent pas de la responsabilité exclusive du Ministère de l’égalité des sexes et de la promotion familiale. Des représentants du Ministère des finances ont rencontré récemment des représentants des parties prenantes, du Fonds de développement des Nations Unies pour la femme et d’autres organisations pour traiter des questions d’intégration de la parité hommes-femmes et de leurs incidences sur le budget national. Par ailleurs, un observatoire des questions d’égalité entre les sexes est chargé de suivre le respect de ces questions dans les institutions et le budget.

M. Nsengimana (Rwanda) souligne qu’au Rwanda, les traités internationaux passent après la Constitution nationale dans la hiérarchie juridique, suivis du droit interne. Lorsqu’un traité international est en contradiction avec la Constitution, la question est portée devant le Parlement et, s’il y a lieu, la Constitution peut être amendée.

Les tribunaux militaires ont seuls compétence sur les militaires. Si un militaire et un civil s’unissent pour commettre un délit, le civil est jugé par un tribunal militaire, afin de ne pas scinder l’affaire en deux.

Le Rwanda a une législation sur l’environnement et une institution chargée de la protection de l’environnement. Il a ratifié plusieurs instruments internationaux sur l’environnement et participe à une coopération régionale à travers la Communauté est-africaine et l’Initiative du Bassin du Nil. Le Rwanda a aboli l’utilisation de sacs de plastique, et les personnes qui entrent dans le pays sont tenues de laisser ces sacs à l’aéroport.

Le Ministère des affaires étrangères envisage un projet pour promouvoir le respect des obligations conférées par les traités; ce projet comprendra une formation en droit international qui ira de pair avec la mise en œuvre des traités. Cette formation encouragera les juristes à assurer l’application des traités internationaux.

Le Rwanda délivre des passeports et des laissez-passer. Ces derniers sont à utiliser en cas d’urgence et pour se rendre dans les pays voisins. Ils coûtent moins que les passeports et sont plus faciles à obtenir. Tous les citoyens ont le droit de se faire établir un passeport.

Des séances de formation ont lieu régulièrement pour les juges, la police, les procureurs, les fonctionnaires des tribunaux et autres professionnels de la justice et de l’ordre public. Les militaires reçoivent une formation en matière de droits de l’homme, comme en recevaient les membres des forces de maintien de l’ordre avant de partir en mission. Après traduction du Pacte en Kinyarwandan, une formation pertinente a été organisée.

Mme Tumukunde (Rwanda) précise que conformément à la Constitution de 2003, la Commission nationale des droits de l’homme est chargée de protéger et de promouvoir les droits de l’homme et de connaître des violations de ces droits; elle a également pour tâche de sensibiliser la population aux questions de droits de l’homme. Elle relève du Parlement, gère son propre budget et assure sa planification et le recrutement de son personnel de façon indépendante.

Les représentants de la Commission ont le droit de visiter les prisons sans préavis s’ils les soupçonnent de violations, de demander tout document ou de convoquer tout individu qui pourrait l’aider dans sa tâche et pour parler devant les institutions compétentes afin, si possible, de résoudre les litiges à l’amiable.

M. Nsengimana (Rwanda) souligne que, sur la question du recrutement d’enfants soldats, le rapport d’experts est incomplet et manque d’impartialité. Il omet de citer les cas dont le Comité a été saisi où des enfants sur le point de s’enrôler dans l’Armée rwandaise avaient été empêchés de le faire, et il ne fait pas mention des cas où des recruteurs ont été arrêtés et remis à la justice. D’autres informations importantes ont été enfouies dans les annexes du rapport où elles risquent d’échapper au lecteur.

Avant de décréter l’état d’urgence, le Président a consulté le Parlement. Celui-ci avait des moyens d’agir s’il n’était pas d’accord avec l’imposition de l’état d’urgence.

M. Rusanganwa (Rwanda) précise qu’en vertu de l’actuel Code pénal, l’homosexualité est un délit. Selon un consensus national, l’homosexualité devrait rester un délit dans le nouveau projet de code pénal actuellement devant le Parlement, mais il est possible que le Parlement décide de changer cela à l’avenir.

Les formes de violence non sexuelle, telles que la violence domestique, le meurtre, etc. sont sanctionnées par la loi.

Mme Wedgwood souligne qu’elle n’a pas demandé pourquoi des personnes étaient détenues dans l’entrepôt servant de centre de détention. Elle a simplement noté que pour que des enfants soient détenus dans ce bâtiment, il fallait que les conditions y soient décentes et que les procédures soient correctement suivies.

Étant donné les milliers de personnes emprisonnées en 1994 dans l’attente d’un procès et les dangers de surpeuplement des centres de détention, le recours aux tribunaux Gacaca était compréhensible. Toutefois, pour que ces tribunaux puissent être utilisés dans des cas où de graves sanctions seraient imposées, il fallait que soit suivi un processus cohérent. Par exemple, il était injuste que dans un procès, une partie ait un avocat et l’autre non. D’après un rapport d’un procès dans un tribunal Gacaca, un juge accusé de viol présidait le procès de son accusateur. Cela n’est pas juste. Les problèmes réels qui se posaient en 1994 n’expliquent pas l’irrégularité des procédures 15 ans après.

Bien qu’il semble qu’un nouveau statut soit appelé à résoudre le problème de la réclusion criminelle, cette question reste encore quelque peu confuse. Une réponse écrite à ce sujet faciliterait les choses.

S’il est généralement convenu que Radio Mille Collines a favorisé le génocide pendant les massacres et aurait dû être fermée à l’époque, l’incitation au massacre ne saurait être confondue avec la simple dissidence politique, et ces événements passés ne doivent pas servir d’argument pour faire taire toute dissidence.

Elle demande une réponse écrite concernant les cas particuliers de crimes de guerre contre les quatre individus qu’elle a mentionnés précédemment : le Lieutenant-Colonel Augustin Cyiza, ex-vice-président de la Cour de cassation, l’ancien parlementaire Léonard Hitimana, Damien Musayidizy et Jean-Marie Vianney. Il serait bon pour le Gouvernement rwandais lui-même que ces cas soient résolus minutieusement et avec transparence.

Il faut prendre au sérieux des allégations de violations par l’armée. Le Rwanda devrait procéder à une enquête transparente des allégations soulevées par le magistrat espagnol concernant le meurtre de civils espagnols par des membres du Front patriotique rwandais et celles du Département d’État des États-Unis concernant les décès de civils dans la partie nord-ouest du pays, quatre ans après le génocide. On ne saurait justifier n’importe quelle tuerie perpétrée en temps de guerre en invoquant la légitime défense. Il conviendrait d’enquêter sur l’affaire du général Karenzi concernant des allégations de décès de civils entre 1994 et 1998.

Sir Nigel Rodley demande que soit précisé pourquoi des sanctions disciplinaires ont été imposées au personnel carcéral dans l’affaire de la grève de la Prison de Mulindi, où il a été déterminé que les fonctionnaires avaient agi en état de légitime défense pendant le soulèvement.

Mme Majodina estime qu’il est particulièrement important que la Commission nationale des droits de l’homme conserve son indépendance politique et financière et ne cède pas à la pression du Gouvernement si celui-ci la pousse à exercer des fonctions relevant purement de l’exécutif ou du législatif. Par ailleurs, elle aimerait savoir si la loi sur la réclusion criminelle actuellement à l’étude maintiendra deux poids deux mesures en interdisant la condamnation à la réclusion des individus accusés de génocide, déférés par le Tribunal pénal international et condamnés par les tribunaux rwandais, tout en autorisant l’application de cette peine à d’autres détenus.

M. Amor note que le Gouvernement a pris des mesures contre certains journalistes dont il estime qu’ils ont outrepassé les droits que leur confère la liberté de la presse en se faisant les porte-parole de la dissension et de la haine, ce que les gouvernement sont en fait autorisés à faire aux termes de l’article 20, paragraphe 2 du Pacte. Néanmoins, il estime que le Gouvernement doit se montrer scrupuleux et veiller à ne pas dépasser certaines limites en qualifiant d’incitation le simple usage de la liberté de parole. Par ailleurs, il ne voit pas pourquoi certaines personnes devraient être arrêtées, ne serait-ce que temporairement, pour mendicité, et il aimerait connaître la définition légale du « vagabondage ».

Mr. Nsengimana (Rwanda) précise que l’entrepôt où de jeunes suspects sont détenus, comme ils l’ont été lors des événements de 1994, n’est pas une prison mais un centre de triage proche de Kigali, d’où les mineurs sont soient remis à leurs familles, soit envoyés en rééducation ou accusés de vagabondage. Le Gouvernement a entrepris de construire un nouveau centre de détention, et quand ce centre sera ouvert, les jeunes suspects y seront détenus jusqu’à la fin du triage, ce qui aggravera encore leurs conditions de détention.

Le délit de « vagabondage » recouvre le vol à la tire et le trafic de drogue. Parmi les personnes accusées de ce délit figurent les sans logis et les prostituées qui volent ou vendent de la drogue. Après une première condamnation, ces individus sont relâchés, mais les récidivistes sont inculpés et jugés.

M . Rusanganwa (Rwanda) souligne que depuis que le Code pénal a défini le vagabondage comme délit de droit commun, la récidive est nécessaire à toute condamnation.

M. Nsengimana (Rwanda) déclare que le Gouvernement avait le choix entre garder les suspects en prison pendant de longues périodes en attendant qu’ils puissent être passés en jugement ou recourir au système Gacaca, avec ce qu’il comporte d’insuffisances. Il convient toutefois de noter qu’il existe un bureau national de conseillers juridiques qui étudient les cas problématiques sur lesquels la justice Gacaca ne peut se prononcer et se rendent régulièrement sur le terrain pour observer le fonctionnement de ce système.

Les personnes qui ont été arrêtée comme opposants politiques n’étaient que cela, et non pas des journalistes : en aucun cas le Gouvernement n’a utilisé le comportement passé de Radio Mille Collines comme excuse pour harceler les journalistes qui, pour autant qu’il le sachent, ne sont pas dans l’opposition au Gouvernement. Tous les cas de disparitions cités par Mme Wedgwood feront l’objet d’une enquête et donneront lieu à une réponse écrite.

Son Gouvernement a coopéré avec le Tribunal d’Arusha, et plusieurs officiers de l’armée ont été jugés à la fois par ce tribunal et par les tribunaux rwandais. L’affaire Karenzi était compliquée parce que les accusations de crimes avaient été portées par un juge espagnol et un juge français agissant – de façon inappropriée, de l’avais du Rwanda – selon le principe de la juridiction universelle. Ces juges n’ont inculpé Karenzi que lorsqu’il a été nommé Commandant adjoint de la Force chargée de l’Opération hybride Union africaine-Nations Unies au Darfour (UNAMID). Le Rwanda a soulevé officiellement une objection et, à son onzième sommet, en 2008, l’Union africaine, ayant décidé que le principe de la juridiction universelle ne devait pas être invoqué dans le cas de l’Afrique, a entamé des pourparlers avec l’Union européenne et les Nations Unies afin de trouver une solution satisfaisante pour l’application de ce principe.

Dans l’exemple évoqué par Sir Nigel, les agents de la prison ont bien agi en état de légitime défense lors du soulèvement des détenus, mais le Gouvernement a imposé des sanctions disciplinaires au directeur de la prison, estimant que la violence aurait pu être évitée si le directeur avait assumé ses responsabilités plus sérieusement lors des événements qui ont précédé le soulèvement.

Il reconnaît qu’il y a toujours le risque qu’une commission des droits de l’homme perde son indépendance dès lors qu’elle est financée par le gouvernement ou utilisée par celui-ci. La Commission nationale des droits de l’homme du Rwanda préserve soigneusement son indépendance et soumet délibérément par précaution ses rapports au Parlement plutôt qu’à l’exécutif.

La question de la réclusion s’est posée à propos des détenus transférés dans des prisons rwandaises par le Tribunal d’Arusha, qui avait interdit cette mesure. Par la suite, le Gouvernement a décidé, dans le nouveau texte de loi à l’étude, d’étendre cette interdiction de la réclusion à tous les détenus.

Enfin, les mendiants ne sont jamais arrêtés pour mendicité mais seulement lorsqu’ils commettent des actes de vol à la tire ou d’agression.

Les membres de la délégation du Rwanda se retirent.

Le débat traité dans le présent compte rendu prend fin à 17 h 35.