NATIONS

UNIES

CCPR

Pacte international

relatif aux droits civils

et politiques

Distr.

GÉNÉRALE

CCPR/C/SR.2151

7 novembre 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME

Soixante-dix-neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 2151e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mercredi 29 octobre 2003, à 11 heures

Président : M. AMOR

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE (suite)

− Deuxième rapport périodique de la Lettonie (suite)

La séance est ouverte à 11 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 40 DU PACTE (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Lettonie (suite) [CCPR/C/LVA/2002/2; CCPR/C/79/L/LVA; Réponses écrites à la liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance en anglais seulement)]

1. Sur l’invitation du Président, la délégation lettone reprend place à la table du Comité.

2.M. YALDEN dit qu’à la lecture des paragraphes 20 et 37 du rapport on a l’impression que le candidat à la naturalisation doit effectuer un véritable parcours du combattant. Cette situation est d’autant plus préoccupante que les droits des non‑ressortissants font, dans de nombreux domaines, notamment en matière d’emploi, l’objet de restrictions, dont certaines sont énumérées au paragraphe 15 du rapport. Il est par ailleurs indiqué au paragraphe 331 du rapport qu’une personne qui souhaite devenir fonctionnaire doit notamment maîtriser la langue lettone. On peut se demander si une telle exigence se justifie, par exemple, pour un fonctionnaire qui s’acquitte de tâches manuelles.

3.Il est normal que le Gouvernement letton cherche à généraliser progressivement l’enseignement en letton dans les établissements scolaires. Le Comité doit toutefois s’assurer que le rythme de cette réforme est compatible avec les articles 26 et 27 du Pacte.

4.Il semble que les nouveaux parlementaires doivent, lorsqu’ils prêtent serment, s’engager à renforcer le letton en tant que langue officielle unique. Un tel engagement est-il compatible avec le respect des langues minoritaires ?

5.M. SHEARER demande dans combien de temps le nouveau code de procédure pénale, qui devrait notamment permettre de raccourcir les procédures et de désengorger l’appareil judiciaire, entrera en vigueur, compte tenu du fait qu’il faudra former les juges et les magistrats à la nouvelle procédure.

6.S’agissant du placement involontaire en institution psychiatrique, la délégation lettone voudra peut-être donner des informations au sujet du projet de loi sur la santé mentale et expliquer en particulier si ce projet ne fait qu’un avec le projet de loi sur l’assistance psychiatrique dont elle a parlé à la séance précédente. Il serait utile de savoir avec précision ce que dispose cette loi en ce qui concerne le réexamen périodique des décisions de détention pour des raisons de santé mentale.

7.M. WIERUSZEWSKI souhaiterait avoir des précisions sur la politique de la Lettonie en ce qui concerne la participation des non‑ressortissants aux élections locales et savoir si les minorités religieuses ont droit à des jours fériés pour célébrer leurs fêtes religieuses.

8.D’après le Centre letton pour les droits de l’homme, la situation de la communauté rom serait dramatique, notamment dans les domaines de l’éducation et de l’emploi. Quelles mesures le Gouvernement letton envisage-t-il de prendre pour remédier à cette situation?

9.Il serait intéressant de savoir aussi quelles mesures, autres que la publication du projet de rapport sur divers sites Web, comme indiqué au paragraphe 132 des réponses écrites, a prises le Gouvernement pour faire connaître le deuxième rapport périodique et les recommandations des organes conventionnels et si les observations finales du Comité sont diffusées dans les langues autres que le letton parlées dans le pays. Il ne ressort pas clairement du paragraphe 105 des réponses écrites si, dans les écoles secondaires, les matières doivent être enseignées en letton à partir de la dixième année ou jusqu’à la dixième année.

10.Mme WEDGWOOD trouve que les nombreuses conditions à remplir pour demander la naturalisation témoignent d’un nationalisme déplaisant pour diverses populations auxquelles on fait comprendre subtilement qu’elles ne sont pas les bienvenues. On peut se demander à cet égard pourquoi le critère linguistique revêt une telle importance. On peut très bien contribuer à l’indépendance et à la prospérité d’un pays sans en maîtriser parfaitement la langue. Il est bon à cet égard que le Bureau des naturalisations ait proposé d’exempter certaines catégories de personnes de l’examen linguistique. Il s’agit notamment des personnes qui sont retraitées et qui ont des problèmes de santé qui les empêchent de le passer. La délégation lettone pourrait préciser si cette mesure bénéficiera à tous les retraités ou seulement à ceux qui ont des problèmes de santé.

11.S’agissant des réponses fournies par écrit à la question no 19, aux paragraphes 83 et suivants du document distribué par la délégation, il serait utile de savoir si les enfants nés après le 21 août 1991 doivent passer un examen linguistique pour acquérir la citoyenneté lettone et si les mineurs nés avant 1991 doivent avoir des revenus légaux pour obtenir la nationalité lettone. La délégation lettone pourrait indiquer si la Lettonie accepte la double nationalité et s’il y a des fonctions politiques qu’une personne récemment naturalisée ne peut pas exercer.

12.Mme Wedgwood relève qu’il est dit au paragraphe 20 d) du rapport de l’État partie qu’une personne qui a élu domicile en République de Lettonie après le 17 juin 1940 en conséquence directe de son renvoi des forces armées de l’URSS ne peut pas présenter une demande de naturalisation. Une telle condition lui paraît aberrante lorsqu’on sait que ces événements se sont déroulés il y a plus de 60 ans et qu’il était fréquent que des militaires épousent des jeunes filles dans la région où ils étaient en garnison. Citant ensuite le paragraphe 23 b) du rapport consacré à l’acquisition de la citoyenneté par inscription à l’état civil, elle demande si les Liivs et les Lettons doivent passer un examen linguistique et, dans la négative, pour quelle raison. Elle aimerait aussi savoir comment l’appartenance ethnique est déterminée. Compte tenu de ce qui est dit au paragraphe 111 des réponses écrites de l’État partie aux questions du Comité, elle exprime l’espoir, par exemple, qu’une plainte adressée à une autorité par une personne dont la langue maternelle n’est pas le letton concernant la manière dont la police a agi envers elle pourra être prise en compte même si cette personne n’a pas les moyens de la faire traduire par un traducteur assermenté.

13.Enfin, à propos de l’article 5 du Code pénal, évoqué aux paragraphes 234 et 235 du rapport, Mme Wedgwood souhaiterait savoir si des personnes ont été poursuivies en vertu de cette disposition, notamment pour des infractions pénales commises contre des Lettons ou des Juifs au cours de la Seconde Guerre mondiale.

14.M. SOLARI-YRIGOYEN se dit satisfait des efforts réalisés par l’État partie pour faire respecter les droits de l’homme, ainsi qu’il ressort de son deuxième rapport périodique. La question qui l’intéresse et qu’a déjà soulevée la veille M. Kälin est celle de l’objection de conscience, qui touche à la liberté de religion, la liberté de conscience et la non‑discrimination et se rapporte à l’article 18 du Pacte. Il souhaiterait avoir davantage de précisions sur la loi que le Parlement letton a adoptée, le 30 mai 2002, et qui devait entrer en vigueur le 1er juillet 2003, et savoir, par exemple, quelle procédure doivent suivre les objecteurs de conscience pour être reconnus comme tels ou si les autorités habilitées à leur accorder ce statut sont uniquement civiles ou peuvent être également militaires.

15.Concernant la réponse écrite fournie par la délégation, il ne voit pas en quoi le fait que le service de remplacement permette aux objecteurs de conscience d’accomplir leur devoir envers l’État constitue l’élément fondamental de l’objection de conscience. Celle-ci, en effet, est un droit fondamental de la personne humaine qui va de pair avec la reconnaissance du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion et, en particulier, du droit à la liberté de conviction. M. Solari-Yrigoyen souhaiterait également savoir si le service de remplacement est accompli exclusivement en dehors des lieux destinés à l’instruction militaire, ce qui lui semble préférable. M. Solari-Yrigoyen admet que l’objection de conscience n’est pas un droit énoncé expressément dans le Pacte, mais il y est toutefois implicitement reconnu. Il est d’ailleurs dit au paragraphe 11 de l’Observation générale 22 du Comité sur l’article 18 du Pacte qu’il ne s’exercera pas de discrimination contre les objecteurs de conscience parce qu’ils n’ont pas accompli leur service militaire. Or il apparaît qu’en Lettonie le service civil dure deux fois plus longtemps que le service militaire; il faudrait donc que l’État puisse faire valoir des motifs suffisants, objectifs et valables pour que cela ne soit pas perçu comme une punition destinée à décourager les objecteurs de conscience de faire usage de leur droit.

16.M. SCHEININ demande, en ce qui concerne le droit à un procès équitable, quelles sont les normes régissant la publicité des procès et si les règles relatives à l’accès des journalistes aux tribunaux sont conformes au paragraphe 1 de l’article 14 du Pacte.

17.Se référant ensuite à la question déjà posée à propos de la discrimination à l’égard des Roms par M. Wieruszewski, qui a mentionné à cet égard un rapport spécial établi par une ONG, M. Scheinin rappelle que dans ses observations finales sur le dernier rapport de la Slovaquie le Comité a déclaré sans ambiguïté que la ségrégation en tant que telle constitue une discrimination officielle qui n’est acceptable, dans le domaine de l’éducation, que si son seul but est de permettre aux enfants de réintégrer ensuite le système scolaire classique. Il aimerait donc savoir si une ségrégation est toujours opérée dans l’enseignement à l’égard des Roms et, dans l’affirmative, si le système d’enseignement séparé pour les enfants roms a bien ce même but.

18.Enfin, constatant avec préoccupation que, d’après des informations émanant d’une ONG, même à l’université la citoyenneté lettone est une des conditions de participation aux élections du Conseil des étudiants, M. Scheinin demande quelles mesures ont été prises pour faire disparaître la distinction entre citoyens et non-citoyens à ce niveau. Évoquant l’affaire Karakurt c. Autriche, dans laquelle le Comité avait déclaré que la distinction établie entre citoyens et étrangers pour ce qui est de la participation à la vie politique n’était pas justifiée en ce qui concernait la participation à un comité d’entreprise et que les étrangers devaient donc avoir le droit de participer pleinement à des structures autonomes sur leur lieu de travail, M. Scheinin estime que la même règle devrait être appliquée dans le cas des universités et du Conseil des étudiants en Lettonie.

19.M. KĀRKLIŅŠ (Lettonie) indique que les membres de la délégation répondront dans un premier temps aux questions qui ont été posées la veille.

20.M. MUIŽNIEKS (Lettonie) précise que dans les réponse aux questions de la veille sont abordés certains des points soulevés le jour même. Ces réponses ont été réparties en plusieurs groupes et seront présentées par différents membres de la délégation.

21.Mme NIKUĻCEVA (Lettonie), répondant tout d’abord à la question relative aux mesures prises ou envisagées pour réduire la surpopulation carcérale, explique qu’en règle générale la densité de la population carcérale est conforme aux normes internationales mises en œuvre par le Code pénal et le décret du Ministère de la justice qui fixe le nombre maximum de places dans les prisons. Au 1er septembre 2003, le taux d’occupation des prisons était de 86 % pour les prévenus et de 92,8 % pour les condamnés. Les problèmes apparus dans l’une des prisons de haute sécurité en raison du manque de place ont été résolus. Ce genre de difficulté est toujours temporaire et survient toujours dans les prisons de haute sécurité, mais la Lettonie espère qu’ils diminueront grâce, notamment, aux mesures prises pour réduire la population carcérale. Des peines de substitution, comme le service d’intérêt collectif, mis en place en 1999, ou le régime de la probation, appliqué tout récemment pour la première fois, ont été instaurées. Ce nouveau régime vise entre autres à faciliter la réinsertion sociale des anciens détenus et prévenir ainsi la récidive. Le Parlement devrait adopter une loi sur l’amnistie qui permettra de libérer un certain nombre de détenus en novembre 2003.

22.Constatant que les chiffres reproduits dans les tableaux fournis dans les réponses écrites aux questions nos 9 et 11 de la liste des points à traiter ont donné lieu à un malentendu, Mme Nikuļceva explique que le premier tableau indique le nombre de condamnés et de prévenus alors que le deuxième porte sur le nombre de personnes visées par les mesures de sécurité appliquées dans les cas exceptionnels où, du fait d’infractions pénales particulièrement graves, la durée de la détention provisoire peut être prolongée au-delà de 18 mois sur décision de la Cour Suprême. Le nombre de détenus est en diminution, comme il ressort du premier tableau, en raison des modifications apportées à l’article 77 du Code de procédure pénale en 2002. Désormais, la durée maximum de la détention avant jugement est fixée à un an et demi entre le moment où le tribunal est saisi du dossier et celui où le jugement est rendu. La proportion de personnes en attente de jugement dans les lieux de détention est de 39 %. Sont comprises les personnes dont l’affaire est encore au stade des enquêtes préliminaires, mais aussi celles dont le procès est encore en cours et celles qui ont fait appel de la décision rendue en première instance si elles ont été condamnées à une peine privative de liberté. Conscientes du fait que ce chiffre est trop élevé, les autorités ont pris des mesures pour l’abaisser dont la plus importante a été le dépôt au Parlement d’un projet de code de procédure pénale entièrement nouveau, dont l’objectif est d’abord d’accélérer les procédures des enquêtes préliminaires et dont le maître mot est la simplification.

23.Le Code actuel, qui remonte à 1961, prévoit en effet des procédures d’une grande lourdeur, qui demandent beaucoup de temps et de personnel pour une efficacité contestable. Une fois ce nouveau code de procédure pénale adopté et entré en vigueur, ce qui est prévu pour 2004, la durée maximale de la garde à vue passera de 72 à 48 heures. D’ores et déjà, toute personne placée en garde à vue est informée de ses droits, à savoir le droit de choisir librement son avocat et, si elle n’en choisit pas un elle‑même, de s’en voir désigner un d’office, le droit de bénéficier des services d’un interprète si nécessaire et le droit de prendre contact avec sa famille. Le Procureur est informé du placement en garde à vue dans un délai de 24 heures; il peut demander la remise en liberté immédiate s’il estime que toutes les dispositions légales n’ont pas été respectées.

24.Mme REINE (Lettonie) dit que toutes les plaintes à l’encontre de membres des forces de police pour des actes commis dans l’exercice de leurs fonctions sont recueillies par une unité interne aux services de police, appelée Bureau de la sécurité interne, qui examine ensuite ces plaintes sous l’étroite supervision des services du Procureur. Ces derniers ont toute latitude pour demander ou apporter des éléments de preuve complémentaires et pour exiger la réouverture d’un dossier. Lorsque des sanctions sont imposées, c’est dans la majorité des cas pour usage excessif de la force. Le fait d’avoir causé des blessures graves constitue une circonstance aggravante et entraîne un alourdissement des sanctions. Pour ce qui est des plaintes reçues par le Bureau national des droits de l’homme, les statistiques pour l’année 2002 n’ont pas pu être obtenues à temps pour le dialogue avec le Comité; elles lui seront communiquées dans les meilleurs délais.

25.Depuis sa création en 1996, la Cour constitutionnelle a rendu 53 arrêts, dont deux seulement concernaient une demande d’examen de la compatibilité d’un texte de loi avec le Pacte. Dans la première affaire, la demande concernait des dispositions des lois relatives aux élections parlementaires et locales empêchant certaines catégories de personnes (employés ou ex‑employés des services de sûreté de l’État, des services de renseignements ou des services de contre‑espionnage de l’URSS, de la RSS de Lettonie ou d’un pays étranger et personnes ayant fait partie après le 13 janvier 1991 du Parti communiste de Lettonie, du Front international des travailleurs de Lettonie, du Conseil uni des collectifs du travail, de l’Organisation des vétérans de guerre et du travail, du Comité de salut public panletton ou de ses comités régionaux) de se porter candidates. La Cour a estimé que ces dispositions étaient compatibles à la fois avec la Constitution et avec le Pacte dans la mesure où elles avaient pour but légitime de protéger la nouvelle démocratie, que la question était tranchée par les tribunaux au cas par cas et que la restriction était de nature temporaire. La deuxième affaire concernait une disposition de la loi sur la radiophonie et la télévision qui restreignait l’usage des langues étrangères dans ces médias. La Cour a conclu à l’inconstitutionnalité de cette loi mais n’a cependant pas explicitement fait mention d’une incompatibilité avec le Pacte et ce malgré un examen approfondi des normes du Pacte. Il est bon de préciser que dans tous les cas où la requête porte sur les droits de l’homme, la Cour interprète toujours les dispositions pertinentes de la Constitution concernées à la lumière des traités internationaux qui lient la Lettonie, tels que le Pacte ou la Convention européenne des droits de l’homme.

26.La loi sur le service de remplacement prévoit la possibilité de remplacer le service militaire, d’une durée de 12 mois, par un service civil, dont la durée normale est de 24 mois mais est ramenée à 18 mois pour les personnes titulaires d’un diplôme universitaire. Le service de remplacement peut être demandé au titre de la liberté de pensée, de conscience ou de religion; les demandes et les recours sont examinés par un organe interministériel. Le service de remplacement peut s’effectuer dans des institutions de l’État ou des collectivités locales ou dans des entreprises ou organisations publiques exerçant des activités d’intérêt général: opérations de secours, lutte contre l’incendie, aide sociale, assistance médicale, services publics, contrôles douaniers, services de transport, etc. Les personnes concernées doivent être affectées à proximité de leur lieu de résidence, sauf si l’organisation, l’entreprise ou l’institution qui les emploie leur fournit un logement de fonction. Elles peuvent être appelées sur des lieux de catastrophe naturelle ou d’accident. Les affectations doivent être décidées compte dûment tenu des aptitudes personnelles, de la formation, de la condition physique, de l’état de santé et du lieu de résidence des candidats. Trois personnes seulement ont demandé et obtenu l’autorisation d’effectuer un service civil en raison de leurs convictions religieuses. Il peut être mis fin au service de remplacement avant la date d’achèvement prévue si l’intéressé n’est, pour des raisons de santé, plus apte à l’accomplir, s’il a exprimé la volonté d’accomplir le service militaire obligatoire, s’il devient soutien de famille, s’il est condamné à une peine privative de liberté suite à une infraction pénale ou s’il est élu conseiller municipal, cantonal ou paroissial ou député. Pour chaque année de service civil de remplacement, 15 jours de congé annuel sont accordés en sus des jours fériés officiels.

27.M. KĀRKLIŅŠ (Lettonie) indique que la Convention pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui est en vigueur en Lettonie depuis le 13 juillet 1992. Le droit pénal letton prévoit que quiconque se livre à la traite d’êtres humains − hommes ou femmes −, est passible de sanctions, et contient une définition de la traite qui correspond à celle qui figure dans le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants. De nouvelles dispositions entrées en vigueur en juin 2000 érigent désormais en infractions pénales le fait d’envoyer un tiers à l’étranger à des fins d’exploitation sexuelle. Ces dispositions ont été invoquées dans 11 affaires pénales en 2001, et huit personnes ont été inculpées. Toutes ces affaires sont en attente de jugement. En 2002, 13 actions pénales ont été intentées, 6 personnes ont été inculpées: 3 d’entre elles ont été condamnées et les autres sont en attente de jugement. Au cours des huit premiers mois de l’année 2003, 11 enquêtes pénales ont été ouvertes, 4 personnes ont été inculpées et, 1 condamnée.

28.Dans ce domaine, cependant, l’essentiel est la prévention. C’est pourquoi le Ministère des affaires sociales a, avec le soutien financier du Conseil des ministres des États nordiques, mené une vaste campagne d’information contre la traite des femmes, et qu’un programme d’État pour la prévention de la traite des enfants est en cours d’élaboration. Celui‑ci devrait favoriser un renforcement de la coopération entre les responsables de l’application des lois, les établissements d’enseignement et les organisations non gouvernementales aux fins d’une meilleure prévention de la traite des êtres humains, en particulier des enfants. La police des mœurs, en coopération avec l’Organisation internationale pour les migrations et le Ministère des affaires sociales, a activement participé au début de l’année 2003 à des activités d’information à l’intention des diplômés de l’enseignement secondaire, qui constituent un groupe particulièrement à risque. Des actions analogues ont aussi été menées en coopération avec le Centre letton pour la jeunesse.

29.En ce qui concerne la violence familiale, il convient de signaler que trois actions pénales ont été intentées en 2000, contre 13 en 2001. Toutefois, bien que la loi réprime les actes de violence physique, le Bureau national pour les droits de l’homme a relevé que les organismes responsables de l’application des lois n’accordent pas une attention suffisante aux violences commises au sein de la famille si les lésions corporelles subies par les femmes ou les enfants ne sont pas considérées comme graves. Afin de lutter contre le phénomène de la violence familiale, la police nationale coopère avec plusieurs ONG. En 2002, deux groupes de femmes policiers ont reçu une formation particulière sur le comportement à adopter face aux victimes de violence sexuelle. Plusieurs ONG apportent un soutien médical et psychologique aux femmes victimes d’agressions sexuelles et de violence. Les programmes en faveur des femmes victimes de violence sont financés par les collectivités locales.

30.Si, pour un travail égal, hommes et femmes travaillant dans la fonction publique perçoivent un même salaire, il n’en va pas de même dans le secteur privé, où le salaire mensuel moyen des femmes est inférieur à celui des hommes pour toutes les professions. Il y a lieu de signaler à ce propos qu’une femme qui avait porté plainte pour discrimination salariale devant la justice a obtenu gain de cause.

31.En ce qui concerne la discussion qui a eu lieu au Parlement sur la définition du crime de terrorisme, M. Kārkliņš indique que, s’appuyant sur la définition du terrorisme établie par l’Union européenne et l’Organisation des Nations Unies, les experts lettons ont élaboré un amendement à l’article 88 de la loi pénale qui est en cours d’examen devant le Parlement.

32.M. MUIŽNIEKS (Lettonie), répondant aux questions relatives à l’acquisition de la nationalité lettone, note tout d’abord que, d’une manière générale, il est très difficile de distinguer, selon l’aspect physique ou le nom de famille, les Lettons des autres groupes qui composent la population. En outre, de nombreuses personnes ont des origines familiales diverses. Le principal élément qui les différencie est la connaissance de la langue lettonne. Aucune mention relative à l’origine nationale ou ethnique ne figure dans le passeport letton. Lorsque la Lettonie est redevenue indépendante, les autorités ont rétabli la Constitution de 1922 et reconnu la citoyenneté à toutes les personnes qui avaient la citoyenneté lettone avant l’occupation soviétique et à leurs descendants directs indépendamment de leur origine ethnique. Les autres personnes ont pu acquérir la nationalité lettonne par voie de naturalisation. La loi de 1994 sur la citoyenneté, trop restrictive, a été assouplie par un référendum populaire en 1998. Depuis lors, peuvent acquérir la citoyenneté lettone toutes les personnes ayant résidé cinq ans au moins en Lettonie et passé avec succès un examen de connaissances générales. Ce dernier comporte des épreuves de langue (expression écrite et orale), de niveau moyen selon les critères du Conseil de l’Europe, et une épreuve d’histoire, sous la forme d’une interrogation à choix multiples. Toute personne qui échoue à l’examen peut le repasser, sans frais, un mois après, puis par la suite tous les deux mois. La procédure de naturalisation est régie par le Conseil des naturalisations, organisme respecté à la fois par les Lettons et les membres des minorités, et qui travaille notamment en étroite collaboration avec l’OSCE et le Conseil de l’Europe. Les personnes de plus de 65 ans sont dispensées des épreuves écrites de l’examen et doivent seulement passer un entretien. Sur 66 000 personnes qui ont demandé la citoyenneté lettonne, 124 seulement ne l’ont pas obtenue; il s’agissait notamment de 7 membres du KGB, de 102 délinquants condamnés et de 5 militaires à la retraite. À l’époque soviétique, Riga, la capitale de la Lettonie, était un important centre militaire. Après d’âpres discussions, en 1994 le Gouvernement a autorisé 22 000 militaires russes à la retraite à rester dans le pays après l’indépendance; pour la plupart, ces personnes ont encore aujourd’hui un passeport russe et reçoivent leur pension de retraite de l’État russe. La double nationalité n’est pas reconnue, sauf pour les personnes ayant recouvré la citoyenneté lettonne avant le mois de juillet 1995. Cela signifie que, depuis cette date, les personnes qui veulent acquérir la nationalité lettonne doivent renoncer à leur nationalité d’origine.

33.Les autorités ne ménagent pas leurs efforts pour favoriser l’accès à la naturalisation et encourager les non‑citoyens à acquérir la citoyenneté lettonne. Cette démarche est dans l’intérêt des non‑citoyens eux-mêmes, mais aussi du pays dans son ensemble. De nombreuses actions d’information sur la naturalisation et la vie civique sont menées, y compris dans les écoles, et des cours de letton sont organisés gratuitement à l’intention des candidats à la naturalisation. Les droits à verser aux fins de la naturalisation ont été réduits, voire supprimés, pour les personnes les plus démunies (étudiants, personnes âgées, etc.). Il est regrettable que davantage de parents ne demandent pas que leurs enfants nés en Lettonie après 1991 bénéficient de la procédure de naturalisation facilitée. Une nouvelle campagne d’information individualisée sera lancée dans ce sens. Les enfants dont les parents sont naturalisés acquièrent automatiquement la citoyenneté lettonne. Un grand nombre d’activités d’éducation et d’information sont mises en place pour mieux faire comprendre aux enfants et à l’ensemble de la population la portée de la citoyenneté. Rien ne distingue le statut des personnes ayant acquis la citoyenneté lettonne à la naissance de celui des personnes naturalisées.

34.Cependant, en dépit des efforts déployés, le taux de naturalisation reste faible. Cela vient, semble‑t‑il, non pas de la procédure de naturalisation, qui ne constitue pas un obstacle puisque le taux de réussite à l’examen est très élevé, mais plutôt du manque d’information et surtout de motivation. Par exemple, les jeunes gens non citoyens ont tendance à attendre d’avoir 27 ans pour demander la naturalisation afin d’éviter d’être soumis à l’obligation du service militaire. Ce motif n’aura bientôt plus lieu d’être car la Lettonie va se doter d’une armée de métier. En outre, les anciens citoyens soviétiques qui, en vertu de la loi de 1995 sont des non‑citoyens, et non des apatrides, bénéficient déjà d’un statut et de droits garantis par la Constitution, d’une garantie consulaire et de documents d’identité lettons, et ne trouvent donc pas grand avantage à demander leur naturalisation. Les autorités lettonnes vont continuer à encourager les non‑citoyens à devenir des citoyens à part entière. Comme dans de nombreux pays, la jouissance de certains droits politiques et l’accès à l’emploi dans la fonction publique nationale sont limités aux citoyens lettons. En outre, seuls les citoyens lettons peuvent exercer certaines professions liées à la sécurité et à la justice dans le secteur privé (pilote d’avion, détective privé, notaire ou avocat agréé, etc.). En revanche, les non‑citoyens jouissent des mêmes droits économiques, sociaux et culturels que les citoyens.

35.En ce qui concerne les pensions de retraite, il existe une différence entre les citoyens et les non‑citoyens, pour lesquels le temps de travail hors du territoire letton n’est pas pris en compte pour le calcul des retraites. La Cour constitutionnelle s’est prononcée sur ce sujet en 2001, se référant à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Compte tenu du fait que depuis la loi de 1995 sur les retraites la Lettonie dispose non plus d’un régime de retraite fondé sur la solidarité entre les générations, mais d’un système reposant sur les cotisations individuelles, la Cour a décidé que la situation des non‑citoyens ayant travaillé à l’étranger avant 1991 devait être réglée par des accords conclus avec les pays concernés. De tels accords ont été signés avec l’Estonie, la Lituanie, la Finlande et l’Ukraine. Par ailleurs, les non‑citoyens peuvent acquérir des terres avec l’assentiment des autorités locales, avec certaines restrictions pour les terres situées près d’une frontière par exemple. Enfin, M. Muižnieks fait observer que les personnes qui auront toujours le statut de non‑citoyen lorsque la Lettonie deviendra membre de l’Union européenne ne seront pas citoyens européens. Il rappelle à ce propos qu’une nouvelle directive européenne régira les droits de toutes les personnes qui n’ont pas la citoyenneté d’un État de l’Union européenne vivant sur le territoire de l’UE.

La séance est levée à 13 heures.

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