Nations Unies

CERD/C/SR.1876

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

29 avril 2010

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante-treizième session

Compte rendu analytique de la 1876 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 28 juillet 2008, à 15 heures

Présidente: Mme Dah

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

Dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de l’Équateur

La séance est ouverte à 15 h 15.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention

Dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de l’Équateur (CERD/C/ECU/19; CERD/C/ECU/Q/19 et Add.1)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation équatorienne prend place à la table du Comité.

2.M. Holguin (Équateur), présentant les dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de l’Équateur, dit que son gouvernement attache la plus grande importance à la coopération avec le système international des droits de l’homme et à la transparence et la franchise dans le processus d’établissement et de présentation des rapports. Comme suite à l’examen périodique universel le concernant, qui a eu lieu en avril 2008, l’Équateur a soumis au Conseil des droits de l’homme 48 engagements volontaires, dont beaucoup portaient sur des questions relevant du champ de la Convention. L’Équateur, fier de sa politique ouverte, est profondément attaché à la promotion et à la protection des droits de l’homme.

3.M me  Melo (Équateur) souligne que l’Équateur fait partie des auteurs de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et qu’il a participé activement à l’élaboration de la Charte andine pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Tous les instruments internationaux signés et ratifiés par l’Équateur sont directement applicables par les tribunaux équatoriens.

4.Les principaux instruments nationaux pertinents dans le contexte de la mise en œuvre de la Convention sont la Constitution, le Code pénal, les dispositions sur les droits collectifs des peuples afro-équatoriens et l’ordonnance municipale no 216, prise par le Conseil du district métropolitain de Quito. La Constitution garantit la protection contre la discrimination fondée sur la race et l’exercice libre et effectif des droits de l’homme consacrés par la législation nationale et les instruments internationaux en vigueur à tous les citoyens équatoriens, sans discrimination aucune. L’Assemblée nationale constituante a entrepris de rédiger une nouvelle constitution élargissant la protection des droits des peuples autochtones. Le projet de constitution consacre des droits inaliénables de la nature (pachamama) et le droit de sumak kawsay («bien vivre» en quechua) comme système de justice sociale et d’intégration. Les articles 212-A à 212-E du Code pénal définissent les peines applicables en cas de diffusion d’idées fondées sur la notion de supériorité raciale ou la haine raciale, d’incitation à la discrimination raciale, d’actes de violence à motivation raciale et de financement d’activités racistes ou de complicité dans ces activités, quelles qu’elles soient. Des peines plus lourdes sont prévues si les auteurs de ces infractions sont des agents de l’État. Les motifs racistes constituent une circonstance aggravante pour toute infraction.

5.La loi de 2006 sur les droits collectifs du peuple noir ou afro-équatorien reconnaît le droit des Afro-Équatoriens d’établir leurs propres institutions. L’ordonnance municipale no 216 contient des dispositions concernant l’intégration sociale des Afro-Équatoriens de Quito et porte création du Conseil social métropolitain pour l’élimination de la discrimination raciale (2007).

6.Les institutions chargées de la protection des droits de l’homme sont le Secrétariat aux peuples, aux mouvements sociaux et à la participation citoyenne, le Conseil pour le développement afro-équatorien (CODAE), le Conseil pour le développement des nationalités et peuples de l’Équateur (CODENPE), le bureau du Médiateur et le Département de l’enseignement interculturel bilingue (DINEIB), qui relève du Ministère de l’éducation. Le Département a réalisé des campagnes d’éducation et d’alphabétisation en quechua et en espagnol. La Direction nationale de la santé des autochtones du Ministère de la santé est chargée de répondre aux besoins spécifiques des peuples autochtones en matière de santé.

7.Outre les lois et les institutions mises en place, des politiques publiques ont été adoptées en vue de faciliter la réalisation des engagements internationaux de l’Équateur. Le Plan national pour les droits de l’homme, par exemple, contient une analyse de la situation des droits de l’homme dans le pays et des propositions visant à résoudre les problèmes principaux par l’adoption de mesures et d’activités spécifiques, notamment la mise en œuvre d’un plan opérationnel sur les droits des peuples noir et afro-équatorien. Il contient un chapitre distinct sur le droit des peuples autochtones de préserver et renforcer leur identité individuelle et collective et d’affirmer leurs valeurs, afin de promouvoir leur pleine intégration dans la société équatorienne, sans discrimination. Il prévoit l’autonomie des peuples autochtones dans les limites fixées par la loi; le consentement préalable, libre et éclairé à l’exploitation des ressources sur les terres ancestrales des peuples autochtones et afro-équatoriens; et la promulgation de lois favorisant les droits des peuples autochtones et afro-équatoriens.

8.Le Plan de développement national pour 2007-2012 garantit les droits économiques, sociaux et culturels des citoyens équatoriens et place l’être humain au cœur des politiques publiques de développement. La politique du Gouvernement en matière de logement met l’accent sur les zones rurales et les zones urbaines marginales, où vivent la majorité des Afro-Équatoriens et des autochtones. Le Ministère du développement urbain et du logement verse aux familles rurales et urbaines pauvres des allocations‑logement dont le montant peut aller jusqu’à 3 500 dollars des États-Unis, ainsi que des subventions pour la rénovation ou l’achat de logements. Les familles démunies ont également droit à des prêts de solidarité et à des «bons de développement humain».

9.Des mesures ont été prises en vue de promouvoir l’accès universel et gratuit aux soins de santé. Pour garantir l’égalité d’accès aux services de santé, le Gouvernement a mis sur pied des systèmes de santé communautaires interculturels, organisé des formations pour le personnel sanitaire dans toutes les provinces et créé 5 000 nouveaux postes de médecin. Les personnes atteintes de maladies incurables, notamment du sida, reçoivent leurs médicaments gratuitement.

10.Les mesures prises pour faciliter l’accès à un enseignement de qualité sont notamment la révision des programmes scolaires, l’institution de programmes de formation des enseignants à grande échelle et l’élimination des obstacles à la scolarisation. Les frais d’inscription scolaire ont été abolis, de nouveaux processus de sélection ont été établis, des manuels en quechua ont été mis à la disposition des enseignants et les repas et les uniformes scolaires sont fournis gratuitement.

11.L’alimentation est également un problème. Le programme alimentaire Aliméntate Ecuador vise à renforcer la sécurité alimentaire des ménages à faible revenu et à sensibiliser le public aux habitudes alimentaires saines. Ce programme encourage la production locale autonome et un retour aux pratiques alimentaires ancestrales des peuples autochtones et afro-équatoriens. On ne dispose pas encore de données ventilées par sexe et par origine ethnique mais il est prévu de mettre au point différents variables et indicateurs qui permettront d’évaluer les incidences du programme sur les populations autochtones et afro-équatoriennes. Le Plan pour l’égalité des chances établi comme suite à la Conférence de 2004 sur les familles autochtones aborde un grand nombre de questions touchant aux droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels des femmes autochtones.

12.L’un des principaux obstacles à l’égalité et à la non-discrimination est la sensibilisation insuffisante des agents de l’État et de l’appareil judiciaire au racisme lui-même et une méconnaissance de la législation pertinente par les parties concernées. À cela s’ajoutent les difficultés d’accès des autochtones au logement et aux services de santé, les faibles taux de scolarisation des enfants autochtones et afro-équatoriens, les obstacles économiques et structurels à la lutte contre le racisme, l’insuffisance du financement des mécanismes de plainte, l’absence de véritable politique antidiscrimination et de plan global de lutte contre le racisme, la faible participation des autochtones et des Afro-Équatoriens à la gestion des affaires publiques et à la prise de décisions, l’insuffisance des ressources pour le développement et la persistance d’une discrimination structurelle dans le système éducatif.

13.Le Gouvernement est pleinement conscient de ces problèmes et a adopté une série de mesures en vue de promouvoir l’intégration sociale et des droits égaux pour tous, en accordant une attention particulière aux groupes marginalisés. Le quechua et le shuar ont officiellement été désignés comme langues de communication interculturelle. La nouvelle constitution reconnaît le caractère plurinational de la société équatorienne, qui se compose de nationalités, de peuples et de communautés détenant des droits collectifs et des titres ancestraux. Elle reconnaît pour la première fois les droits des peuples autochtones volontairement isolés.

14.Répondant à la question 1 de la liste de points à traiter, Mme Melo dit que le recensement de la population et du logement réalisé en 2001 par l’Institut national de la statistique et du recensement (INEC) a permis de collecter des données sur les caractéristiques ethniques, linguistiques et culturelles de la population. D’après ces données, 6,9 % des habitants se désignaient comme autochtones, tandis que les Afro-Équatoriens représentaient 4,98 % de la population. Toutefois, d’après les résultats de l’enquête de 2006 sur le niveau de vie des ménages, apparemment plus fiables, 5,7 % des habitants du pays s’auto-identifient comme Afro-Équatoriens. L’INEC, en collaboration avec la Commission nationale de statistique pour les peuples autochtones et afro-équatoriens, a déjà commencé à collecter des données relatives aux groupes ethniques en vue du prochain recensement, prévu pour 2011.

15.Répondant à la question 2, Mme Melo dit que les instruments internationaux sont directement applicables en droit interne. Les normes énoncées dans ces instruments, dès lors qu’elles ont été promulguées dans le Journal officiel, font partie de l’ordre juridique interne et prévalent sur les lois et autres normes de rang inférieur. La plupart des dispositions de la Convention ont été incorporées dans la Constitution de 1998.

16.Aucun mécanisme n’a été mis sur pied pour évaluer l’impact du projet de développement pour les peuples autochtones et noir (PRODEPINE) après sa conclusion (question 3). Toutefois, d’après le Conseil pour le développement afro-équatorien (CODAE), le projet a eu peu d’effet sur la situation des Afro-Équatoriens; il a largement plus profité aux peuples autochtones. Pour remédier aux lacunes existantes, le Ministère de l’intégration économique et sociale finance un certain nombre de projets de développement dans les zones rurales et les zones urbaines marginales à l’intention des organisations autochtones et afro-équatoriennes.

17.Répondant à la question 4, relative à l’application concrète du paragraphe 3 de l’article 23 de la Constitution, Mme Melo cite les articles 212 A) à 212 E) du Code pénal, qui concernent les crimes raciaux, et l’ordonnance municipale no 216, qui porte sur les questions de discrimination.

18.Le Plan pour l’égalité des chances (question 5) a été élaboré avec la participation active des organisations de femmes autochtones. La Conférence des femmes autochtones tenue en mars 2004 a fait partie de ce processus. Le Plan tient compte des principales préoccupations des femmes autochtones, notamment en ce qui concerne la violence fondée sur le sexe, la participation politique, les droits sociaux comme l’accès à l’éducation et à la santé et les droits économiques, en particulier l’accès à la terre et au microcrédit.

19.Les infractions liées à la discrimination raciale sont définies aux articles 212 A) à 212 E) du Code pénal, qui sont conformes à l’article 4 de la Convention (question 6).

20.Le projet de loi sur l’harmonisation des fonctions du système de justice autochtone avec celles du système judiciaire ordinaire (question 7) a été soumis au Congrès en 2002 mais il n’a pas encore été débattu. Un nouveau projet de loi sera présenté lorsque l’Assemblée constituante nationale chargée de rédiger la nouvelle constitution aura achevé ses travaux. Le Ministère de la justice et des droits de l’homme a fait de la relance de ce projet de loi une des priorités de son plan d’action pour 2009. Les peuples autochtones se sont montrés très intéressés par l’adoption de règles visant à faciliter l’administration de la justice autochtone, dans la mesure où celle-ci était compatible avec le système de justice ordinaire.

21.En réponse à la question 8, Mme Melo indique que les paragraphes 5 et 6 de l’article 84 de la Constitution énoncent le droit des peuples autochtones et afro-équatoriens d’être consultés au sujet des projets de prospection et d’exploitation des ressources situés sur leurs terres. La mise en œuvre de ces dispositions incombe au Ministère de l’environnement. En vertu des règles régissant les consultations publiques, tout projet présentant un risque pour l’environnement doit faire l’objet d’un permis spécifique. La procédure de consultation publique prévoit notamment l’ouverture d’un bureau de renseignements chargé d’informer tous les résidents sur le contenu du projet, ses apports et ses risques.

22.Afin d’éliminer la «violence culturelle» contre les femmes, en particulier les femmes autochtones (question 9), le Conseil national de la femme (CONAMU) met en œuvre, en collaboration avec les autorités locales, des programmes d’alphabétisation dans les zones habitées principalement par les peuples autochtones. Le Gouvernement a mis sur pied des programmes de crédit et une Banque de la femme dans le but de faciliter l’accès des femmes autochtones à l’éducation, à l’emploi et à l’entreprenariat, et d’améliorer ainsi leur situation socioéconomique. Le Conseil pour le développement des nationalités et des peuples de l’Équateur (CODENPE) a organisé des ateliers de sensibilisation sur les droits collectifs, les droits des femmes et la violence dans la famille à l’intention des communautés autochtones.

23.En ce qui concerne les modalités concrètes du «bon de développement humain» et l’agenda social (question 10), Mme Melo indique que les femmes chefs de famille, les personnes âgées et les personnes handicapées peuvent obtenir des banques un bon d’un montant de 30 dollars des États-Unis. Au total, 1 289 158 personnes ont bénéficié de cette mesure à ce jour. Il n’existe aucune donnée ventilée concernant les bénéficiaires du programme alimentaire Alimentáte Ecuador, qui vise à garantir la sécurité alimentaire.

24.Répondant à la question 11, Mme Melo dit que le Département des relations frontalières avec la Colombie du Ministère des affaires étrangères a fait tout son possible pour parvenir à un accord avec la Colombie afin de limiter les pulvérisations aériennes et de réduire ainsi leurs effets nocifs sur la santé des populations autochtones vivant dans la zone frontalière. Trois commissions scientifiques séparées ont été créées dans chacun des deux pays afin de traiter le problème sur le plan technique. Malheureusement, ces mesures n’ont pas porté leurs fruits et le 31 mars 2008, le Gouvernement équatorien a saisi la Cour internationale de Justice pour demander la cessation des pulvérisations aériennes et le versement d’indemnités pour les dommages causés. Le conflit armé interne en Colombie a porté atteinte à la tranquillité et au bien-être des familles afro-équatoriennes, notamment par l’afflux de Colombiens déplacés, en particulier dans la province d’Esmeraldas.

25.Le Ministère de l’environnement, le Ministère de la défense et le Ministère de l’intérieur et de la police ont signé un accord de coopération interinstitutionnelle visant à mettre en œuvre les mesures de protection des peuples taromenane et tagaeri (question 12). Le Plan pour la protection des peuples autochtones volontairement isolés, adopté en vertu de cet accord, prévoit la création d’une équipe mixte composée de 18 membres de l’armée et de la police chargés de surveiller la zone et d’empêcher l’exploitation forestière illégale. Une autre initiative importante est le projet visant à protéger les personnes qui vivent dans les zones dites «intouchables» et à recueillir le soutien de la communauté internationale pour empêcher l’exploitation des ressources pétrolières situées dans la réserve Ishpingo-Tiputini-Tambococha, dans le Parc national Yasuni.

26.Répondant à la question 13, Mme Melo dit que le Conseil national de la femme (CONAMU) mène de multiples activités visant à renforcer l’accès des femmes à la santé en application de la loi sur les soins maternels et infantiles gratuits. Les services fournis par les sages-femmes traditionnelles ont été reconnus en vertu de cette loi. Une attention particulière est accordée aux victimes de la violence et le Ministère de la santé a entrepris de mettre à jour les directives sur la prise en charge intégrale des victimes d’actes de violence sexuelle et sexiste et de promouvoir leur application dans tout le pays, en concertation avec le secteur juridique.

27.Le Département de l’enseignement interculturel bilingue (DINEIB) a entrepris plusieurs projets d’alphabétisation visant les peuples autochtones et afro-équatoriens (question 14), parmi lesquels le programme national pour l’enseignement de base aux jeunes et aux adultes, destiné essentiellement aux Afro-Équatoriens, aux métis et aux autochtones. Au total, 9 068 personnes analphabètes autochtones ont bénéficié du volet de ce programme consacré aux langues autochtones entre septembre 2007 et mai 2008.

28.Afin de garantir l’accès des enfants et des adolescents autochtones et afro-équatoriens à l’éducation et leur maintien dans le système scolaire (question 15), le Gouvernement met en œuvre un plan décennal pour l’éducation, qui prévoit l’amélioration des infrastructures scolaires, le renforcement de la formation des enseignants, des augmentations de salaire, l’abolition des frais d’inscription de 25 dollars et la gratuité des manuels et des uniformes scolaires.

29.En réponse à la question 16, Mme Melo indique que la Direction nationale pour les peuples autochtones (DINAPIN), qui a été remplacée en février 2008 par la Commission nationale des droits de l’homme des peuples autochtones (CONADHPIN), a aidé à régler 259 affaires au total, dont 120 par la médiation et 139 sans médiation, de 2003 à 2006. Ces affaires portaient essentiellement sur des différends concernant les droits de propriété individuels et collectifs, le droit au travail, le droit à l’éducation, le droit à une identité, le droit à l’eau, le droit à réparation et les relations interfamiliales.

30.Répondant à la question 17, Mme Melo dit que le Centre métropolitain de médiation, créé en 2007, fournit des conseils juridiques et des services de médiation et de socialisation aux communautés afro-équatoriennes et autochtones du district métropolitain de Quito et des cantons adjacents. Ce mécanisme parallèle de règlement des différends constitue un moyen efficace de lutter contre le racisme et la discrimination raciale.

31.En réponse à la question 18, Mme Melo indique que 63 ateliers de formation aux droits de l’homme se sont tenus depuis 2003 dans le cadre du Plan national pour les droits de l’homme, avec la participation de 2 200 personnes. Les questions abordées au cours de ces ateliers ont été les suivantes: droits des détenus, des jeunes, des consommateurs, des personnes âgées, des enfants et des adolescents, des migrants et des réfugiés; traite des personnes; torture; santé mentale; diversité sexuelle; Charte andine pour la promotion et la protection des droits de l’homme; politiques publiques; droits de l’homme et administration locale. Compte tenu de l’importance des questions ayant trait aux droits des Afro-Équatoriens et à la discrimination raciale, une série d’ateliers se tiendra à partir de la fin 2009 dans le but d’identifier les besoins de ce groupe de population et de mieux faire connaître ses droits. Les résultats de ces ateliers seront pris en compte dans l’élaboration des politiques. Des plans opérationnels spécifiques visant à protéger les droits des Afro-Équatoriens sont également mis en œuvre.

32.L’action menée pour éliminer les préjugés et les stéréotypes négatifs à l’égard des peuples autochtones et des personnes d’ascendance africaine (question 19) repose principalement sur des mesures éducatives. Le programme d’éducation à la démocratie a été mis sur pied dans le but de développer le sentiment de citoyenneté, de valoriser la diversité de la société et de contribuer ainsi à la construction d’une démocratie qui garantisse une vie digne à tous les Équatoriens. Le Département de l’enseignement municipal du Conseil métropolitain de Quito a mis sur pied un programme d’éducation civique; l’ordonnance municipale no 216 constitue un autre instrument important dans ce domaine.

33.En ce qui concerne la formation des agents de l’État à la promotion des droits de l’homme et à la prévention de la discrimination (question 20), le Ministère de la justice et des droits de l’homme prévoit de tenir une série d’ateliers sur diverses questions relatives aux droits de l’homme à l’intention des membres de la police et des forces armées. En collaboration avec le Ministère de l’intérieur et de la police, il a établi un programme de formation aux droits de l’homme et à la lutte contre la discrimination à l’intention de la police nationale. Plusieurs ministères et organisations de la société civile préparent actuellement une campagne conjointe de lutte contre le racisme, qui doit être lancée au deuxième semestre de 2008. Dans le cadre d’un accord de coopération, plusieurs membres de la police nationale ont suivi des cours de formation aux droits de l’homme organisés par le Bureau du médiateur.

34.Répondant à la question 21, Mme Melo dit que la Commission de coordination des droits de l’homme prendra toutes les mesures voulues pour transmettre les recommandations du Comité à toutes les institutions de l’État et aux organisations de la société civile concernées. Ces recommandations et les autres documents pertinents sont également mis en ligne sur le site Web du Ministère des affaires étrangères.

35.M. Cali Tzay (Rapporteur pour l’Équateur) demande un complément d’information sur l’application de la législation pénale concernant les actes de racisme, de discrimination raciale ou d’intolérance à caractère raciste. Il fait observer que le rapport indique que ni les tribunaux ni la fiscalia n’ont signalé de plaintes pour de tels actes mais aussi que la Direction nationale des populations autochtones (DINAPIN) a examiné 289 affaires de discrimination raciale entre 2001 et 2005 et qu’elle est parvenue à des règlements à l’amiable faisant valoir les droits collectifs des demandeurs. Il demande si cet écart entre les nombres d’affaires examinées par le système judiciaire et par la Direction pourrait s’expliquer par un manque de confiance des minorités ethniques dans les juridictions ordinaires et, si tel est le cas, quelles mesures ont été prises pour corriger cette situation. Il invite par ailleurs la délégation à commenter les informations faisant état de l’arrestation d’un groupe de vendeurs ambulants afro-équatoriens qui avaient installé leurs étals dans le parc La Carolina à Quito.

36.Il est possible que les Afro-Équatoriens perçoivent le terme «peuple noir», utilisé plusieurs fois dans le rapport, comme discriminatoire et que l’emploi de ce terme dans les politiques publiques ne soit pas bien accueilli. Il serait donc utile que la délégation apporte des éclaircissements concernant les différents termes utilisés dans le rapport pour désigner les peuples autochtones.

37.En ce qui concerne les bénéfices tirés par les communautés autochtones de l’exploitation des ressources du sous-sol sur leurs territoires (par. 59 du rapport), le Comité s’intéresse avant tout aux bénéfices tirés directement de ces activités, plutôt qu’aux bénéfices indirects comme l’amélioration des infrastructures. Il souhaiterait aussi en savoir davantage sur l’impact social et environnemental de ces activités.

38.Bien que les dispositions pertinentes de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones aient été incorporées au nouveau projet de constitution, le statut juridique des peuples autochtones pour ce qui est de la reconnaissance de leurs terres ancestrales n’est toujours pas clair. Le Comité accueillera avec intérêt tout renseignement complémentaire sur l’arrêt de 2004 de la Cour interaméricaine des droits de l’homme concernant les projets d’exploitation pétrolière menés sans consultation préalable, mentionné au paragraphe 60 du rapport. Par ailleurs, quelles mesures ont été prises pour mettre fin aux allusions racistes, à la discrimination et aux stéréotypes négatifs à l’encontre des autochtones et des personnes d’ascendance africaine au quotidien? Quelles réponses le Gouvernement apporte-t-il au fait que ces personnes ne reconnaissent pas «appartenir à leur propre race», comme il est dit dans le rapport?

39.Des précisions sont nécessaires concernant les interactions entre le système de justice autochtone et le système judiciaire ordinaire. La référence à la Convention no 169 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) relative aux peuples indigènes et tribaux comme instrument applicable au peuple rom, au paragraphe 125 du rapport, est quelque peu surprenante. D’autres instruments internationaux semblent plus pertinents.

40.Il est dit dans la réponse écrite à la question 7 de la liste de points à traiter que les peuples et nationalités autochtones attendent que l’Assemblée constituante ait achevé ses travaux pour pouvoir entamer le processus d’adoption de nouvelles lois subsidiaires rendant la justice autochtone compatible avec le système judiciaire national. Cette affirmation émane-t-elle des groupes autochtones eux-mêmes?

41.M. Cali Tzay demande des informations sur les meurtres de femmes autochtones et sur les mesures prises pour mettre fin à ces actes de violence. En ce qui concerne les difficultés rencontrées par les femmes autochtones pour accéder au microcrédit, il demande quelles sont les dispositions des programmes actuels permettant aux femmes d’obtenir ce type de crédit même lorsqu’elles ne peuvent pas présenter de garanties de remboursement.

42.Réitérant la question 17 de la liste de points à traiter, M. Cali Tzay invite la délégation à donner des exemples d’affaires réglées par le système de médiation autochtone et souligne que les réponses écrites font référence à un mécanisme parallèle de règlement des différends, ce qui n’est pas la même chose.

43.M. de Gouttes, félicitant l’État partie d’avoir suivi la recommandation du Comité tendant à faire participer la société civile à l’élaboration du rapport, demande quelles sont les ONG qui ont pris part à ce processus.

44.Il conviendrait d’expliquer le décalage qui vient d’être relevé entre l’absence de plaintes pour discrimination raciale auprès des institutions judiciaires et le grand nombre de plaintes examinées par la DINAPIN. Le Comité aurait également besoin de précision sur les mesures prises par le Gouvernement pour appliquer les mesures conservatoires ordonnées par la Cour interaméricaine des droits de l’homme dans son arrêt de 2004.

45.Quelles sont les voies de recours permettant aux peuples autochtones et afro-équatoriens de demander réparation pour les dommages causés à l’environnement sur leurs territoires? Quelles mesures ont été prises pour lutter contre les formes objectives et subjectives de discrimination raciale en raison desquelles les Afro-Équatoriens ne s’auto-identifient pas comme tels, ce qui fausse les résultats des enquêtes sur la composition ethnique de la population? La différence entre les nationalités, les peuples et les communautés autochtones devrait être clarifiée.

46.M. de Gouttes invite la délégation à expliquer pourquoi la participation d’autochtones au Gouvernement a été de courte durée, comme indiqué au paragraphe 135 du rapport. Il souhaite savoir où en est le projet de loi visant à rendre la justice autochtone compatible avec le système de justice ordinaire et quelles sont les peines prévues par le droit traditionnel autochtone susceptibles de porter atteinte à l’intégrité physique des personnes.

47.M. de Gouttes demande plus de détails sur la réalisation du droit des peuples autochtones à l’autodétermination, la protection constitutionnelle des droits inaliénables de la nature, la reconnaissance de la vision autochtone des liens entre l’humanité et la nature et le concept de Sumak Kawsay.

48.M. Diaconu prend note avec satisfaction de la pratique nouvelle consistant à classer les habitants par «nationalités» et «peuples» plutôt que par groupes majoritaires ou minoritaires. Notant que l’application du principe du consentement préalable donné en connaissance de cause pour ce qui concerne l’impact environnemental des projets est limitée dans la pratique, il rappelle à l’État partie que ce consentement est obligatoire en vertu du droit international. La création d’un bureau de renseignements auprès duquel les résidents peuvent obtenir des informations sur le contenu des projets, leurs apports et les risques qu’ils comportent n’est peut-être pas suffisante pour satisfaire à cette obligation. L’État partie devrait faire le point de la situation sous cet angle.

49.M. Diaconu demande si le quechua, le shuar et les autres langues ancestrales sont utilisés comme langues officielles par les organismes publics et les organes judiciaires. La délégation devrait décrire plus en détail les liens entre les systèmes de justice autochtone et ordinaire et indiquer si les décisions des tribunaux autochtones peuvent faire l’objet d’un appel devant une juridiction ordinaire au motif de leur incompatibilité avec les normes internationales. Des mesures devraient être prises pour faire en sorte que les Roms soient dûment couverts par la législation nationale et internationale en matière de droits de l’homme.

50.M. Avtonomov demande s’il existe des manuels pour l’enseignement dans les langues autochtones et si l’Équateur coopère avec les pays voisins dans le domaine de l’enseignement en langue autochtone, par exemple en quechua. Il serait utile de savoir quels sont les critères utilisés par l’État partie pour distinguer les différents groupes ethniques et si tous les groupes autochtones sont officiellement reconnus comme tels. Le décalage entre le nombre de plaintes pour discrimination raciale examinées par la DINAPIN et l’absence de plaintes devant les tribunaux appelle à s’interroger sur les raisons pour lesquelles les victimes de discrimination ne demandent pas réparation par la voie judiciaire.

51.M. Avtonomov demande un complément d’information sur la formation des agents de l’État aux droits de l’homme, la représentation des peuples afro-équatoriens et autochtones dans la police et les mesures prises pour réduire la population carcérale afro-équatorienne et autochtone.

52.Faisant observer que l’appartenance ethnique n’a rien à voir avec la nationalité, il s’interroge sur les raisons pour lesquelles les Roms devraient être qualifiés de «Gitans» plutôt que d’Équatoriens, qui reposent sur des préjugés. Il lui est également difficile de comprendre pourquoi les coutumes nomades et le transnationalisme qui en résulte devraient exclure les Roms de la protection découlant des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme.

53.M. Murillo Martínez demande des données ventilées sur les progrès accomplis depuis le recensement de 2001 sur le plan de l’intégration des Afro-Équatoriens. Quelles mesures ont été prises pour accroître la participation des populations autochtones et afro-équatoriennes aux prochains recensements dans le but d’obtenir des données plus fiables?

54.Il serait utile de savoir si le projet de constitution prévoit des mesures positives visant à renforcer l’accès des peuples autochtones et afro-équatoriens à l’emploi, à l’éducation, à la santé et à la vie politique, par exemple au moyen de quotas, et si elles protègent les droits fonciers ancestraux et les droits collectifs de ces peuples. Dans quelle mesure ceux-ci ont-ils participé au processus constitutionnel?

55.La question 11 de la liste de points à traiter pourrait être interprétée comme suggérant que le Comité disposait de renseignements confirmant les effets nocifs des pulvérisations aériennes le long de la frontière avec la Colombie, ce qui n’est pas le cas. Étant donné le caractère controversé de cette question et les efforts considérables et soutenus des deux pays concernés pour normaliser leurs relations, ainsi que l’imminence d’une décision de la Cour internationale de Justice, le Comité devrait se garder d’adopter une position pouvant être interprétée comme préjugeant de l’issue de cette affaire.

56.M. Thornberry demande si les Afro-Équatoriens sont réticents à «reconnaître leur propre race» parce qu’ils craignent d’être victimes de discrimination ou parce qu’ils rejettent la catégorisation établie par le récent recensement de la population. La désignation de nationalités, peuples et communautés autochtones répond-elle à des fins statistiques ou renvoie-t-elle aux droits des groupes visés? L’emploi du terme «nationalité», généralement utilisé pour désigner les minorités nationales, est plutôt inhabituel. Des éclaircissements devraient être apportés pour préciser si les «peuples autochtones» qui ont soumis au Congrès un projet de loi visant à harmoniser la justice autochtone et la justice ordinaire sont des groupes ou des individus autochtones ou d’autres protagonistes. M. Thornberry souscrit aux remarques faites par M. Diaconu concernant les Roms.

57.Il invite la délégation à commenter les allégations de violences commises par les membres des forces de sécurité travaillant pour les sociétés pétrolières et à fournir un complément d’information sur la consultation des peuples autochtones concernant l’exploitation des ressources situées sur leurs terres. La délégation devrait préciser quelle est la définition des droits collectifs auxquels il est fait plusieurs fois référence dans le rapport.

58.Le fait qu’aucune ONG ne soit intervenue concernant l’Équateur est quelque peu décevant, dans la mesure où la participation des ONG représente une contribution utile et constructive aux travaux du Comité et constitue le signe d’une mobilisation active de la société civile sur les questions qui l’intéressent.

59.M. Lindgren Alves félicite l’État partie pour son rapport complet et salue en particulier la portée exemplaire des formations aux droits de l’homme dispensées aux agents de la force publique et le caractère unique des dispositions antidiscrimination inscrites dans le projet de constitution.

60.En ce qui concerne la composition de la population, M. Lindgren Alves demande si les personnes désignées comme «métisses» se sont auto-identifiées comme telles. Si tel est le cas, il ne voit pas d’inconvénient à employer ce terme. Il souhaiterait également savoir comment le principe du droit des peuples autochtones à l’autodétermination est appliqué dans la pratique et demande des éclaircissements sur la nature des représentations dont dispose la population afro-équatorienne au niveau international, mentionnées au paragraphe 136 du rapport.

61.M. Amir dit que l’absence de données statistiques permettant d’évaluer les activités de formation antidiscrimination est regrettable. Il note également qu’il n’est pas fait mention des personnes handicapées appartenant à des minorités ethniques. Faute d’information sur la situation des groupes majoritaires, il est impossible d’évaluer la situation relative des minorités ou la manière dont celles-ci sont traitées en Équateur.

62.M. Amir demande pourquoi les chiffres qui figurent dans le rapport établissent un lien entre la taille d’une minorité donnée et le taux de scolarisation, pourquoi l’accès à l’éducation est limité dans les zones rurales et pourquoi si peu d’enfants ont accès à l’enseignement supérieur.

63.Il demande également des éclaircissements sur le fait que les Roms sont considérés comme des Gitans et non comme des Équatoriens, et sur les incidences de cette situation sur les droits des Roms. Ces derniers ont-ils des passeports équatoriens?

64.M. Lahiri, soulignant les incohérences dans les données concernant la composition ethnique de la population, demande comment s’explique la nette augmentation du nombre de personnes d’ascendance africaine et d’autochtones en 2001 et 2005. Cette évolution traduit-elle le fait que les personnes concernées acceptent mieux leur origine ethnique? Des données statistiques supplémentaires seraient nécessaires concernant l’analphabétisme et le logement, entre autres, pour pouvoir évaluer les progrès accomplis. Il serait également utile d’avoir des précisions sur les indicateurs permettant de procéder à une analyse comparative de la situation des différents groupes ethniques ces dix dernières années.

65.La délégation a expliqué que le quechua est une langue de communication interculturelle, mais l’Équateur compte 13 minorités nationales et 27 peuples. Pour quelle raison le quechua a-t-il été choisi, plutôt qu’une autre langue autochtone?

66.Bien que la nouvelle constitution ne soit pas encore en vigueur, il serait utile d’avoir un complément d’information sur les nouvelles dispositions et celles qui seront supprimées de la Constitution actuellement en vigueur, notamment en ce qui concerne l’accès des autochtones et des Afro-Équatoriens à la santé et à l’éducation.

67.M. Peter se félicite du dialogue ouvert que le Comité a eu avec la délégation et salue la franchise de l’État partie, qui a su reconnaître les lacunes auxquelles il devait encore remédier.

68.M. Peter demande pourquoi les Roms, qui vivent en Équateur depuis l’époque coloniale, n’ont été officiellement reconnus qu’en 2001. Quelles mesures ont été prises pour lutter contre la discrimination à l’égard des Roms dans le domaine de l’emploi? Étant donné les difficultés signalées pour ce qui est de garantir aux Roms transnationaux la protection qui leur est due en vertu des instruments internationaux, pourquoi l’État partie n’a-t-il pas ratifié la Convention sur la réduction des cas d’apatridie? Enfin, il serait utile d’avoir des précisions sur les droits, le statut et le traitement des travailleurs migrants d’ascendance africaine originaires des pays voisins.

La séance est levée à 18 heures.