Nations Unies

CERD/C/SR.2187

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

27 août 2012

Original: français

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Quatre-ving t-un ième session

Compte rendu analytique de la 2187 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 21 août 2012, à 15 heures

Président: M. Avtonomov

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements soumis par les États parties en application de l’article 9 de la Convention (suite)

Quinzième et seizième rapports périodiques de la République de Corée

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports, observations et renseignements soumis par les États parties en application de l’article 9 de la Convention (suite)

Quinzième et seizième rapports périodiques de la République de Corée (CERD/C/KOR/15-16 et CERD/C/KOR/Q/15-16)

1.Sur l ’ invitation du Président, la délégation coréenne prend place à la table du Comité.

2.M. Park  Sang-ki (République de Corée) dit que la société coréenne devient de plus en plus rapidement multiculturelle et multiethnique. Les mariages interethniques représentaient 10,8 % du total des mariages célébrés en 2010 et 4,3 % des enfants nés dans le pays en 2012 sont issus d’unions mixtes. Le Gouvernement attache donc une importance accrue aux politiques de promotion du multiculturalisme et de l’insertion sociale. En mars 2012, la République de Corée a adopté le deuxième Plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme, qui comprend 209 programmes axés sur le renforcement des droits de l’homme dans les domaines politique, économique, social et culturel, et prévoit de nouvelles mesures en vue de la protection effective des droits des personnes en situation irrégulière. En outre, conformément à la loi-cadre relative au traitement des étrangers en République de Corée, le Gouvernement a décidé de lancer un deuxième plan de base (2013-2017) pour les politiques relatives aux étrangers. Le premier Plan, mené de 2008 à 2012, a permis de mieux faire connaître à la population les droits des étrangers, d’allouer davantage de ressources aux projets d’insertion sociale dans les secteurs public et privé, et de promulguer la loi sur l’asile. La loi de soutien aux familles multiculturelles a été adoptée en 2008 afin d’aider celles-ci à mieux s’intégrer à la société coréenne et de leur garantir des conditions de vie décentes.

3.En janvier 2012, les 500 000 travailleurs étrangers présents sur le territoire exerçaient leurs droits dans des conditions d’égalité avec les ressortissants coréens, conformément à la législation du travail. En juillet 2011, une centrale téléphonique a été créée afin de fournir des conseils aux travailleurs étrangers, et ce en plusieurs langues. Au total, on a créé 34 centres de soutien aux familles multiculturelles dans tout le pays, qui offrent des cours de langue, des conseils et des services médicaux aux immigrés. S’agissant de la situation des épouses étrangères, le Gouvernement a mis en place un centre de soutien d’urgence aux femmes étrangères victimes de violence familiale, qui propose des services en 11 langues, vingt-quatre heures sur vingt-quatre. La loi relative à la prévention de la violence à l’égard des femmes, modifiée en mai 2012, permet désormais aux agents des forces de l’ordre de pénétrer dans le logement où vit la victime, y compris en l’absence de mandat. Il existe une vingtaine de foyers d’accueil des immigrées victimes de violence familiale. La modification de la loi relative au contrôle de l’immigration permet désormais de délivrer un permis de séjour pour raisons humanitaires aux étrangers et aux requérants d’asile dont la demande est en instance depuis plus de douze mois. Un centre d’aide aux réfugiés sera inauguré en juin 2013. La loi relative aux réfugiés, promulguée en février 2012, prendra effet en juillet 2013.

4.M. Bang Kitae (République de Corée) dit que la Convention a été incorporée en droit interne et a donc les mêmes effets que les lois coréennes, au même titre que les autres instruments internationaux ratifiés par le pays. Très peu d’affaires ou de jugements font référence aux dispositions de la Convention, ce qui s’explique sans doute par la rareté des plaintes liées à des actes de discrimination raciale ou ethnique. Pour prévenir la discrimination raciale, les autorités coréennes mettent l’accent sur l’éducation et la formation des agents de la fonction publique aux droits de l’homme. La législation ne comprend pas de définition de la discrimination raciale, mais plusieurs lois interdisent la discrimination fondée sur l’ascendance, la couleur ou l’origine ethnique. La loi portant Commission nationale des droits de l’homme contient toutefois une définition qui est, dans une large mesure, conforme à la définition de la discrimination raciale figurant à l’article premier de la Convention. La motivation raciale peut également être considérée comme une circonstance aggravante de l’infraction commise. Un projet de loi sur l’interdiction de la discrimination, qui interdisait la discrimination fondée sur la race, la couleur de la peau et l’origine ethnique mais ne prévoyait pas de sanction pénale en cas de discrimination, a été présenté à l’Assemblée nationale en novembre 2007 mais écarté en mai 2008. En mars 2012, le Conseil national de la politique des droits de l’homme a décidé d’examiner un projet de loi fondamentale sur l’interdiction de la discrimination qui contient une liste des motifs prohibés de discrimination. Six cours de formation aux droits de l’homme ont été dispensés par l’Institut de recherche en sciences sociales aux agents chargés de l’application des lois et aux fonctionnaires des services d’immigration. Un projet de loi est également à l’étude pour rendre obligatoire la formation aux droits de l’homme à l’université dans le cadre des études de droit.

5.M. Choi Seong-Yu (République de Corée) dit qu’en août 2011, des modules d’enseignement axés sur la compréhension pluriethnique et pluriculturelle ont été ajoutés aux programmes scolaires du premier et du deuxième cycle. En outre, en février 2012, on a élaboré des manuels pédagogiques qui abordent de manière plus globale l’entente interethnique et multiculturelle. Des manuels scolaires ont aussi été conçus pour sensibiliser les élèves à ces questions dès l’école élémentaire. Depuis juillet 2012, des cours de soutien supplémentaires, axés sur la maîtrise du coréen, sont proposés aux élèves étrangers. La République de Corée a créé des institutions qui se consacrent à l’enseignement et à l’éducation des étrangers, y compris des travailleurs migrants. Les enfants de parents en situation irrégulière suivent une scolarité comme les enfants coréens, le but étant de leur offrir les mêmes chances de s’adapter à la société coréenne. Les enfants immigrés bénéficient de cours de coréen spécialement conçus pour eux, en particulier dans les établissements scolaires où ils sont les plus nombreux.

6.M. Yong  Ho Seong (République de Corée) dit que le nombre d’immigrés en République de Corée ne cesse de croître et devrait représenter, d’ici à 2020, 3,2 % de la population coréenne. En août 2012, un comité de coordination nationale a annoncé un plan global de sensibilisation au multiculturalisme qui a pour objet de mieux prendre en compte les spécificités culturelles des étrangers établis dans le pays. Dans le cadre de ce plan, le Gouvernement souhaite lancer toute une série d’émissions radiotélévisées pour permettre aux Coréens de mieux connaître les différentes cultures présentes dans le pays. Des cours sont proposés aux leaders d’opinion et aux journalistes pour les inciter à promouvoir la diversité culturelle. Dans le cadre de la lutte contre les préjugés et les stéréotypes à l’égard des étrangers, des brochures ont été distribuées aux radios, aux chaînes de télévision et aux organes de presse afin qu’ils ne relaient pas de préjugés et stéréotypes concernant les étrangers.

7.M me Crickley (Rapporteuse pour la République de Corée) dit que le Gouvernement devrait recueillir davantage de statistiques sur le caractère multiethnique de la société coréenne. Elle note avec préoccupation que les frais de fonctionnement de la Commission nationale des droits de l’homme ont été réduits d’environ 20 % et que plusieurs de ses membres ont démissionné, et demande des précisions sur le statut actuel de la Commission, les ressources qui lui sont allouées et la nomination de ses membres. La Rapporteuse constate que la législation coréenne ne définit pas la discrimination raciale. Le paragraphe 1 de l’article 11 de la Constitution interdit la discrimination fondée sur le sexe, la religion ou la condition sociale, mais ne mentionne pas la race, la couleur, la famille, l’origine nationale ou l’origine ethnique. La délégation est invitée à préciser si l’État partie prévoit d’incorporer une définition de la discrimination raciale dans sa législation.

8.S’agissant de l’article 2 de la Convention, la Rapporteuse demande des renseignements sur la révision de la loi sur l’interdiction de la discrimination. Notant que le Plan national d’action pour la promotion et la protection des droits de l’homme 2012-2016 est désormais mis en œuvre, elle demande des précisions sur les acteurs qui y seront associés, sur son suivi et sur son évaluation. À cet égard, elle encourage l’État partie à faire participer les organisations de la société civile, notamment les organisations de migrants, à l’élaboration, à la mise en œuvre et au suivi des mesures qui les concernent. Elle souhaite obtenir des précisions sur l’aide apportée aux familles multiculturelles, qui semble avoir pour objectif l’intégration de ces familles dans la société coréenne, voire leur absorption ou leur assimilation. À cet égard, elle demande des informations sur le sens de l’expression «famille multiculturelle». Concernant l’article 4, la Rapporteuse s’inquiète du très faible nombre de plaintes enregistrées alors que, selon certaines informations, le nombre de crimes de haine et d’infractions à motivation raciale a augmenté. L’État partie assure, au paragraphe 50 de son rapport, que les délits à caractère raciste peuvent être sanctionnés par la législation, et la Rapporteuse demande des précisions sur les dispositions applicables. Bien que les mesures citées dans le rapport, telles que la création de foyers d’accueil pour les femmes immigrées victimes de violence familiale et de centres d’aide et d’information destinés aux migrants, soient positives, elles témoignent de problèmes qui doivent être traités.

9.S’agissant de l’article 5 de la Convention, l’experte demande si les migrants ont accès à des interprètes dans le cadre des procédures judiciaires dont ils peuvent faire l’objet. Mme Crickley prend note avec satisfaction de l’adoption de la loi relative aux réfugiés, qui entrera en vigueur en 2013, et de la simplification des procédures relatives aux réfugiés mais fait observer que par rapport à d’autres pays, la République de Corée accepte peu de réfugiés. Elle souhaite savoir où sont situés les centres d’aide aux réfugiés et s’ils sont utilisés à d’autres fins. Elle demande si l’État partie envisage d’enregistrer toutes les naissances sur son territoire afin de prévenir l’apatridie.

10.La Rapporteuse note avec intérêt que l’État partie envisage de supprimer l’obligation pour les travailleurs migrants de se soumettre à un test de dépistage du VIH/sida et demande des précisions sur cette mesure. Elle reconnaît que le système de permis de travail mis en place représente un grand pas en avant mais note que certains permis imposent des restrictions considérables à la liberté de circulation des travailleurs. En outre, l’obligation qu’ont les travailleurs migrants de quitter le territoire pendant trois mois lorsqu’ils changent d’employeur peut les empêcher d’être naturalisés, étant donné qu’ils ne peuvent obtenir la nationalité coréenne qu’après avoir résidé dans le pays pendant cinq années sans interruption. Ayant reçu des informations selon lesquelles des travailleurs migrants syndiqués seraient harcelés ou expulsés, la Rapporteuse spéciale demande des précisions sur le droit des travailleurs migrants de se syndiquer. Il semble que le taux d’accident des travailleuses migrantes soit élevé et que ces femmes soient fréquemment victimes de la violence sexuelle. La délégation voudra bien fournir des explications à cet égard. Le permis de travail E-6 semble être utilisé aux fins de la traite des femmes. La Rapporteuse rappelle que le faible nombre de plaintes relatives à des affaires de traite ne signifie en rien que le problème n’existe pas. La délégation est invitée à donner des renseignements sur la protection des droits des victimes de la traite. Le Gouvernement devrait se pencher davantage sur la question des mariages internationaux, étant donné que l’obtention de la nationalité coréenne par les femmes étrangères dépend de la volonté de leur époux. De surcroît, en cas de divorce, ces femmes ne sont autorisées à rester dans le pays que pour élever leurs enfants ou subvenir aux besoins de leurs beaux-parents. La délégation voudra bien revenir sur ces questions.

11.La Rapporteuse souhaite savoir comment l’école aborde la question du multiculturalisme de la société et si les enfants de migrants ont la possibilité d’apprendre leur langue d’origine. Elle croit savoir que la deuxième tentative d’adoption d’un projet de loi sur l’interdiction de la discrimination a échoué en 2012 et que l’État partie s’est ensuite engagé à réexaminer la question. La délégation est invitée à préciser ce que sous-entend cet engagement et à indiquer si un nouveau calendrier a été établi et s’il est prévu d’incorporer dans le projet une définition de la discrimination raciale conforme à celle figurant dans la Convention. En outre, il serait intéressant de savoir si l’État partie compte faire participer le Ministère de la justice, le Ministère de l’éducation et les organisations de la société civile qui défendent les droits des migrants à l’exécution du nouveau programme de sensibilisation à la diversité culturelle lancé par le Ministère de la culture, des sports et du tourisme.

12.La Rapporteuse souhaiterait de plus amples renseignements sur le déroulement de la procédure de renvoi et d’expulsion d’étrangers, sur la détention des personnes en attente d’expulsion et sur les mesures prises pour garantir qu’une personne ne peut être expulsée tant que son recours est en instance. Enfin, ayant appris par plusieurs sources que nombre de travailleurs migrants perdent leur titre de séjour pour des raisons administratives, elle voudrait recevoir un complément d’information sur les mesures adoptées par les autorités pour garantir que les travailleurs migrants ne sont pas indûment privés de la possibilité de séjourner et de travailler légalement dans le pays ainsi que pour protéger les droits de ceux qui ont perdu leur titre de séjour de manière injustifiée. Enfin, la délégation voudra bien fournir de plus amples renseignements sur les opérations de lutte contre l’immigration clandestine.

13.M. Kemal note que bien qu’un Coréen ait été condamné par un tribunal pour avoir fait des remarques racistes à l’égard d’un étranger et que la Cour constitutionnelle ait décidé que le paragraphe 2 de l’article 2 du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels devait être considéré comme partie intégrante du droit national, l’État partie n’a toujours pas adopté de définition de la discrimination raciale. L’adoption d’une définition de la discrimination raciale et l’incrimination de l’acte discriminatoire permettraient à l’État partie de mieux combattre ce problème.

14.M. Murillo Martínez demande si, pour lutter contre la discrimination raciale, l’État partie applique les mesures spéciales qui sont prévues par la Convention et qui ont été précisées dans la Recommandation générale no 32 du Comité sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention. Notant que, dans son rapport, la République de Corée cite, parmi les dispositions prises par le Gouvernement pour éviter toute discrimination à l’égard des étrangers, la proclamation du 20 mai comme «Journée du vivre ensemble», il demande quelles activités sont menées à cette occasion et quelle est la participation de la population migrante à ces célébrations. Il aimerait également savoir si l’organisation de cette Journée a entraîné une baisse des actes et des propos racistes. Le rapport indique également que le ministère public tient depuis 2009 des statistiques afin de pouvoir suivre avec efficacité les cas de traite des femmes étrangères. M. Murillo Martínez aimerait en savoir plus sur ces statistiques. Il aimerait obtenir des informations plus précises sur le statut des étrangers à la recherche d’un emploi en République de Corée, et sur le fonctionnement des centres d’aide aux travailleurs migrants. Il demande combien de travailleurs migrants ont été expulsés faute d’avoir été recrutés par une entreprise sélectionnée par le Ministère du travail. Enfin, il voudrait savoir si la République de Corée envisage de ratifier la Convention no 189 de l’OIT sur les travailleuses et travailleurs domestiques.

15.M. de Gouttes rappelle qu’il n’existe toujours pas de loi relative à la discrimination raciale dans l’État partie et qu’il faut avoir recours à la qualification juridique de diffamation, d’insulte ou de violence pour incriminer les actes ou les propos discriminatoires. Les juges ont théoriquement la possibilité d’invoquer la motivation raciale comme facteur aggravant dans les affaires de discrimination raciale, mais ne l’ont jamais utilisée dans la pratique. M. de Gouttes demande quel est l’état d’avancement du projet de loi sur l’interdiction de la discrimination raciale qui a été élaboré par le Ministère de la justice. Notant que très peu de plaintes pour discrimination raciale ont été déposées en République de Corée, M. de Gouttes estime qu’il s’agit d’une conséquence directe de l’insuffisance de la législation. Il n’existe pas non plus de statistiques judiciaires générales sur les infractions à caractère raciste. Or, l’article 6 de la Convention implique que l’on dispose d’informations sur les plaintes, les poursuites et les jugements pour les actes de discrimination raciale. Le faible nombre de plaintes n’est pas un signe positif et peut témoigner d’une sensibilisation insuffisante des autorités de police et de justice à ce type d’infraction. Il faut mettre l’accent sur l’importance et la gravité des infractions en matière de discrimination raciale, comme le prescrit le Comité dans sa Recommandation générale no 31 sur la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale. M. de Gouttes demande au Gouvernement coréen de fournir dans son prochain rapport des informations plus complètes sur ces questions.

16.M. de Gouttes demande quel bilan a été établi par le Ministère de la justice du Plan d’action national pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Il aimerait obtenir des exemples de plaintes pour discrimination raciale déposées auprès de la Commission nationale des droits de l’homme. Il demande également des précisions sur le statut, la composition et les moyens dont dispose cette Commission, ainsi que sur les modalités de désignation de ses membres. L’expert demande à la délégation à quoi elle attribue le problème de l’augmentation des discours de xénophobie et de haine raciale dans le pays. Il voudrait savoir si les discours de haine raciale sont prononcés par des organisations extrémistes ou des responsables politiques, ou s’ils proviennent d’Internet.

17.M. Diaconu relève dans le rapport que des restrictions peuvent être apportées aux droits dont jouissent les étrangers en fonction du principe de réciprocité, et souligne que ce principe ne peut être invoqué lorsqu’il s’agit des droits de l’homme que sont le droit à une assurance vieillesse ou l’assistance aux victimes. De même, la condition de réciprocité n’est pas acceptable s’agissant des indemnités pouvant être réclamées par des victimes d’infractions. S’agissant de la charge de la preuve dans les affaires de discrimination raciale, le rapport indique qu’il incombe à la partie qui formule l’allégation d’apporter la preuve des faits présumés. Les victimes de discrimination raciale n’ayant en général pas les moyens de se défendre ni de fournir des preuves, M. Diaconu estime qu’elles devraient être protégées par le renversement de la charge de la preuve, qui est appliqué dans de nombreux pays. D’une manière générale, il invite l’État partie à mieux protéger les travailleurs migrants sans papiers. Enfin il l’encourage à ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

18.M. Calí Tzay dit que la loi coréenne reconnaît uniquement les mariages entre Coréens et étrangers titulaires d’un permis de résidence comme étant des mariages mixtes et constate que, si la société coréenne se présente comme étant multiethnique et multiculturelle, elle ne fait en réalité pas d’effort pour accepter le conjoint étranger comme tel. Il aimerait savoir pourquoi les enfants des couples mixtes ont un taux de scolarisation plus faible que les autres enfants et ce qui est fait pour lutter contre ce phénomène. De même, les réfugiés ont théoriquement le droit de travailler, mais le permis de séjour qui leur est octroyé est trop court pour qu’ils puissent réellement être employables. Ils sont donc vulnérables et exposés à des abus et à des discriminations multiples. M. Calí Tzay demande quelles sont les mesures prises par la République de Corée pour éviter que les réfugiés ne fassent l’objet de mauvais traitements. Il voudrait par ailleurs savoir quelles sont les mesures prises par l’État partie pour remédier à la situation des travailleurs migrants sans papiers, qui sont dans un vide juridique au regard de la loi relative à la nationalité et ne peuvent faire reconnaître leur mariage ni enregistrer la naissance de leurs enfants.

19.M. Amir relève que, dans sa présentation orale, la délégation a indiqué que la Convention avait été incorporée dans le droit interne. Il voudrait donc savoir si le système juridique de la République de Corée est moniste et si les instruments internationaux ratifiés par l’État partie priment le droit interne.

20.M. Lindgren Alves voudrait savoir si la République de Corée envisage d’adhérer à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. D’après des informations dont dispose le Comité, les discours racistes se généraliseraient dans l’État partie et les enfants issus de familles multiculturelles seraient victimes de préjugés. La délégation voudra bien commenter ces informations et indiquer ce que font les autorités coréennes pour remédier à cette situation. En outre, il souhaiterait connaître la façon dont l’État partie conçoit le multiculturalisme et s’il est plutôt favorable à ce que les diverses communautés coexistent séparément ou s’il les encourage à s’intégrer tout en reconnaissant leur droit de préserver leur identité particulière.

21.M. Thornberry invite la délégation à expliquer pourquoi le projet de loi sur l’interdiction de la discrimination soumis à l’Assemblée nationale en 2007 n’a pas été adopté. Notant que le Gouvernement a pris des mesures pour garantir le droit des enfants immigrés à l’éducation primaire et secondaire, il aimerait savoir s’il est exact que la décision d’accepter ou non un enfant dans une école est généralement laissée à la discrétion des directeurs d’établissements. Si tel est le cas, la délégation voudra bien indiquer si les critères d’admission dans les écoles ont été définis de manière à prévenir les cas potentiels de discrimination raciale. Faisant observer qu’en règle générale, les demandeurs d’asile, les apatrides et les travailleurs migrants ne peuvent pas s’adresser à l’ambassade de leur pays pour faire enregistrer la naissance de leur enfant, M. Thornberry aimerait savoir si l’État partie s’est doté d’un système global d’enregistrement des naissances à l’intention de cette catégorie de non-ressortissants. Il demande comment le droit à une nationalité consacré à l’article 5 de la Convention est exercé dans la pratique et si l’État partie envisage d’adhérer à la Convention sur la réduction des cas d’apatridie. Il note que les programmes d’intégration destinés aux familles multiculturelles semblent être conçus pour les couples mixtes formés entre Coréens et étrangers, et aimerait savoir si les couples d’étrangers bénéficient également de ces programmes. Enfin, il demande comment s’est opérée la transition entre la reconnaissance de la nature multiculturelle de la société et la promotion du multiculturalisme.

22.M. Kut, lisant dans le rapport que le Gouvernement a mis en place un système de contrôle pour corriger les pratiques discriminatoires fondées notamment sur la race et la nationalité (par. 46), dit qu’il est inhabituel que des mesures de suivi des politiques publiques aient aussi une fonction corrective. Il invite la délégation à décrire ce système en détail et à indiquer si les pouvoirs plus étendus accordés à la police pour qu’elle puisse intervenir en cas de violences conjugales sur une étrangère se limitent aux affaires de violence familiale ou si cette latitude vaut pour toutes les situations dans lesquelles la police est en contact avec des étrangers.

23.Le Président, s’exprimant en sa qualité de membre du Comité, note à la lecture du paragraphe 105 du rapport que le système des stages professionnels institué en 1993 a été remplacé en 2004 par un système de délivrance de permis de travail car il portait gravement atteinte aux droits des travailleurs migrants. Or, les stages professionnels sont mentionnés ailleurs dans le rapport, ce qui donne à penser qu’ils n’ont pas encore disparu. Des explications seraient nécessaires sur ce point. D’après des informations, les Chinois établis dans l’État partie se sont dotés d’un système éducatif fondé sur le système taïwanais. Il serait intéressant de savoir si les diplômes obtenus par ce biais sont reconnus dans le système éducatif national et s’ils donnent accès à l’enseignement supérieur. Il serait également intéressant de savoir si tous les Chinois qui vivent dans l’État partie n’ont pas d’autre choix que de fréquenter soit une école appliquant le système taïwanais, soit une école coréenne.

La séance est levée à 17 h 50.