NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.169010 mars 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑sixième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1690e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le vendredi 4 mars 2005, à 10 heures

Président: M. YUTZIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Sixième et septième rapports périodiques du Royaume de Bahreïn (suite)

La séance est ouverte à 10 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (Point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Sixième et septième rapports périodiques du Royaume de Bahreïn (CERD/C/443/Add.1) (suite)

1.Sur l’invitation du Président, la délégation de Bahreïn reprend place à la table du Comité.

2.M. AL-BOAINAIN (Bahreïn) dit qu’un seul cas de discrimination raciale, l’affaire dite «des 1 203», a été portée devant les tribunaux du pays, en l’occurrence la Cour constitutionnelle, qui a rendu son jugement le 1er avril 2004. Toutefois, le faible nombre de cas de discrimination raciale portés devant la justice ne signifie pas que la loi soit mal connue dans le pays ou que les citoyens méconnaissent leurs droits. De nombreux efforts ont été déployés depuis longtemps pour sensibiliser l’opinion publique et informer les citoyens de leurs libertés et droits fondamentaux.

3.L’Association des droits de l’homme de Bahreïn a récemment organisé un atelier intitulé «Procès juste» auquel un nombre important d’organisations de la société civile et de magistrats ont participé. Des cours de formation ont par ailleurs été dispensés en anglais aux magistrats sur les questions relatives aux droits de l’homme et des ateliers sont organisés régulièrement en Italie et en France à l’intention des magistrats. Des relations étroites sont également maintenues avec les associations du Barreau des États‑Unis, de la France et de l’Égypte. Un atelier a été organisé les 14 et 15 avril 2004 sur l’élaboration du plan national d’action des droits de l’homme de Bahreïn et un séminaire de formation des forces de l’ordre a eu lieu du 17 au 21 avril 2004.

4.M. Al-Boainain précise qu’aux termes de l’article 26 de la Constitution, la liberté des communications postales, télégraphiques et téléphoniques est garantie mais que les communications peuvent cependant être censurées et leur secret divulgué dans les cas de nécessité définis par la loi. C’est en vertu de cette disposition constitutionnelle que les autorités de police sont habilitées, avec l’accord préalable d’un juge de première instance, à effectuer des contrôles dans les bureaux de poste et à saisir toutes lettres ou correspondances pouvant être utiles à l’établissement de la vérité dans les affaires criminelles.

5.M. Al-Boainain explique que la loi sur le pouvoir judiciaire promulguée par le décret législatif n° 42 de 2002 prévoit trois degrés de juridiction: les tribunaux de premier degré (de première instance, de grande instance et d’exécution); les cours d’appel civiles et la Cour de cassation. Il existe deux catégories de juridictions à Bahreïn: les tribunaux civils, qui connaissent des affaires civiles et pénales, et les tribunaux de la charia, qui connaissent des questions concernant le statut personnel, notamment les questions de divorce, de mariage, de garde d’enfants et d’héritage.

6.Un projet de loi sur la réforme du marché du travail visant à simplifier les procédures de contentieux administratifs entre employeurs et employés est en cours d’examen au Parlement. Un autre projet de loi relatif à la conciliation et à l’arbitrage est à l’étude.

7.Mme ABDUL RASOOL (Bahreïn) affirme qu’il n’existe aucune exception au principe consacré par l’article 18 de la Constitution qui dispose que «tous les êtres humains sont égaux en dignité et tous les citoyens sont égaux devant la loi en ce qui concerne leurs droits et obligations publics, sans discrimination fondée sur la race, l’origine, la langue, la religion ou les convictions».

8.La déléguée de Bahreïn affirme en outre que son pays n’a pas connu de différends liés à la définition de la discrimination raciale. S’il en connaissait, les instances judiciaires seraient tenues d’appliquer l’article premier de la Convention, lequel a force de loi puisque la Convention a été ratifiée par le pays. Les autorités n’ont pas non plus connaissance d’affaires dans lesquelles les juridictions bahreïnites auraient eu à invoquer expressément les dispositions de la Convention.

9.La déléguée précise que le décret législatif n° 44 de 2002 porte modification de certaines dispositions de la loi sur les associations de 1989 mais ne restreint pas le droit de celles-ci. L’article 172 du Code pénal déclare délit punissable le fait d’inciter quiconque publiquement, à la haine ou au mépris envers un groupe de personnes dès lors qu’une telle incitation est susceptible de troubler l’ordre public. Cet article du Code pénal n’a aucune incidence sur la loi régissant les activités des associations car il vise uniquement à sanctionner l’incitation, individuelle ou collective, à la haine.

10.S’agissant des sanctions prévues par le Code pénal en cas d’infraction caractérisée par la diffusion de propos créant des tensions intercommunautaires, Mme Abdul Rasool explique que la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale a été incorporée à la législation du pays et a donc force obligatoire pour toutes les autorités. Par conséquent, le fait de ne pas s’y conformer est une infraction qui engage la responsabilité pénale de l’auteur. Cependant, la Convention n’ayant pas établi de sanctions applicables aux violations des droits qu’elle énonce, Bahreïn applique les sanctions prévues en l’espèce par son code pénal.

11.Les citoyens peuvent aussi porter plainte auprès du bureau du Médiateur du Tribunal royal desplaintes et former des recours devant la Commission des plaintes de la Chambre des députés. Le Ministère de l’intérieur étudie par ailleurs la possibilité de créer un directoire qui serait chargé d’examiner les plaintes déposées pour discrimination raciale et violation des droits et libertés fondamentales.

12.Par ailleurs, le décret législatif n° 47 de 2002 relatif à la presse, à l’impression et à la publication a tenu compte des recommandations formulées par le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale selon lesquelles l’interdiction de la discrimination raciale devrait non seulement viser les actes qui troublent l’ordre public ou qui contreviennent aux bonnes mœurs, mais aussi ceux qui créent des tensions sociales ou intercommunautaires. Le décret interdit aux journalistes de propager des messages à caractère raciste exprimant du mépris ou de la haine envers d’autres religions ou prônant la discrimination à l’encontre d’un groupe confessionnel ou critiquant ses convictions.

13.Bahreïn, qui a engagé un processus de transition démocratique, envisage par ailleurs de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention et de reconnaître ainsi la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de personnes qui se plaignent d’être victimes d’une violation des droits énoncés dans la Convention.

14.Répondant à une question de Mme Dah, Mme Abdul Rasool déclare qu’en vertu de la loi bahreïnite sur la nationalité, de 1963, les enfants d’une femme bahreïnite mariée à un étranger n’acquièrent pas automatiquement la nationalité du pays. Cependant, un projet de loi a été récemment transmis aux parlementaires afin de modifier la législation en vigueur dans ce domaine.

15.M. ABDUL KARIM (Bahreïn) dit qu’il n’est pas en mesure de fournir plus d’informations sur la composition ethnique de la population à Bahreïn que ce qui est indiqué dans le rapport (par. 29 et tableau 1, p. 9). En effet, il n’est pas possible de connaître l’origine ethnique exacte des Bahreïnites de souche, qui sont le fruit de métissages entre des peuples d’origine arabe et d’autres peuples qui ont transité par Bahreïn ou s’y sont installés car aucun texte de loi n’autorise les distinctions fondées sur l’ascendance ethnique. Ainsi, l’organe central chargé du recensement de la population bahreïnite ne dispose d’aucune information sur la composition ethnique car ce critère n’est pas pris en considération dans les recensements. Bahreïn n’est donc pas en mesure de communiquer au Comité des données désagrégées sur les conditions de vie socioéconomiques des divers groupes ethniques. M. Abdul Karim souligne toutefois que les politiques du Gouvernement sont fondées sur l’intégration dans le tissu social de toutes les personnes vivant à Bahreïn sans discrimination aucune et que cela vaut également pour les politiques économiques. Il rappelle d’ailleurs que, dans le Rapport mondial sur le développement humain pour 2003 du Programme des Nations Unies pour le développement, Bahreïn occupait la trente‑septième place du classement du développement humain et était en tête des pays arabes.

16.Pour ce qui est de l’adoption d’un plan national relatif aux droits de l’homme, M. Abdul Karim indique qu’au printemps 2004, le Ministère des affaires étrangères a organisé un atelier, en collaboration avec l’Association bahreïnite des droits de l’homme et des institutions arabes de défense des droits de l’homme, dans le but d’élaborer un plan national de promotion des droits de l’homme pour Bahreïn, auquel des personnes d’horizons très divers ont participé. Cet atelier a débouché sur la Déclaration de principe de Manama, qui encourage le Gouvernement et le secteur privé à créer un réel partenariat en vue d’élaborer un plan national de promotion des droits de l’homme conjointement avec tous les acteurs de la société qui œuvrent pour la promotion des droits de l’homme. Un projet est en cours d’élaboration et sera présenté prochainement au Cabinet des ministres.

17.En ce qui concerne l’incorporation dans le droit interne d’une définition de la discrimination raciale et de peines réprimant les actes fondés sur cette dernière, M. Abdul Karim indique que certains députés du Conseil consultatif ont fait une proposition en ce sens qui, après avoir été examinée par le Parlement, a été rejetée au motif qu’elle était contraire à la Convention. Toutefois, une nouvelle proposition pourra être présentée et adoptée avant les prochaines élections.

18.S’agissant de la suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action issus de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, M. Abdul Karim souligne que le Gouvernement bahreïnite s’attache à prendre scrupuleusement en considération le contenu de cette déclaration dans tous les programmes nationaux qu’il adopte en matière de droits de l’homme.

19.Après un bref rappel des attributions du Comité des droits de l’homme (par. 74 du rapport), M. Abdul Karim explique que le Conseil consultatif ainsi que tous les organes qui en relevaient, dont le Comité, ont été dissous après l’adoption de la Constitution de 2001. Dans le cadre du processus de restructuration des institutions publiques, le Ministère de l’intérieur et le Ministère des affaires étrangères ont donc créé un département chargé des droits de l’homme afin de le remplacer et ont passé en revue toutes les activités qu’avait menées le Comité des droits de l’homme.

20.En ce qui concerne les efforts déployés par Bahreïn dans le domaine de la sensibilisation aux droits de l’homme, M. Abdul Karim indique que des séminaires ont été organisés en avril et octobre 2004 afin de préparer les rapports relatifs aux droits de l’homme. De plus, le Ministère de l’intérieur et le Comité des droits de l’homme ont organisé conjointement des ateliers de formation aux droits de l’homme à l’intention des forces de l’ordre et des enseignants. De même, des séminaires sur le thème des médias et des droits de l’homme ont été organisés par le Ministère de l’information, en collaboration avec le Comité des droits de l’homme et l’Institut arabe des droits de l’homme à l’intention des professionnels de la télévision et de la radio. En outre, un séminaire conjoint a été organisé par le Conseil supérieur de la femme et Amnesty International sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes, dont le champ d’étude était non seulement Bahreïn mais également toute la région du Golfe.

21.Par ailleurs, des efforts ont été entrepris afin de créer des liens de coopération entre la Commission des droits de l’homme de l’Organisation des Nations Unies et les organisations locales et internationales en vue de mieux faire connaître les droits de l’homme au public et de renforcer la collaboration entre les acteurs nationaux et internationaux œuvrant pour les droits de l’homme.

22.Pour ce qui est de la participation de la société civile à l’élaboration du rapport, M. Abdul Karim indique qu’un expert indépendant ainsi qu’un consultant étranger ont lu et commenté le rapport avant qu’il ne soit présenté au Comité et que leurs observations ont été prises en considération. Par ailleurs, il existe à Bahreïn de nombreuses associations de défense des droits de l’homme, dont l’Association bahreïnite des droits de l’homme, le Comité de suivi des droits de l’homme, lequel assiste en tant qu’observateur à la séance en cours, et le Comité des droits des travailleurs migrants. Enfin, concernant les perspectives d’adhésion de Bahreïn aux pactes internationaux relatifs aux droits civils et politiques et aux droits économiques, sociaux et culturels, M. Abdul Karim indique que le Gouvernement a étudié la question et a soumis un projet d’adhésion au Conseil législatif pour approbation.

23.Mme AL-KHALIFA (Bahreïn) dit, à propos de la protection des travailleurs migrants, qu’en vertu d’une décision adoptée en 2002, les travailleurs peuvent changer d’employeur même lorsqu’ils sont sous contrat. En outre, afin de lutter contre la traite des personnes, des brochures d’information sont distribuées dans les aéroports ainsi que dans les ambassades à Bahreïn et à l’étranger. Ces brochures contiennent des renseignements utiles pour les travailleurs migrants, en particulier le numéro de téléphone de permanences téléphoniques que les travailleurs exploités peuvent appeler afin de dénoncer leur employeur. En un tel cas, des inspections sont effectuées sur les lieux de travail concernés et la personne qui a dénoncé les abus doit révéler son identité. Enfin, il existe un comité mixte regroupant des fonctionnaires du Ministère du travail et du Ministère de l’intérieur, dont la tâche consiste à protéger les travailleurs migrants et à les aider à résoudre les difficultés auxquelles ils sont confrontés.

24.Pour ce qui est des statistiques sur la traite des personnes, Mme Al-Khalifa indique que 45 affaires de ce type ont donné lieu à une enquête. Les litiges concernant les salaires tombent sous le coup de l’article 165 du Code pénal et, lorsque l’employeur est reconnu coupable, il peut être condamné à verser rétroactivement les salaires dus ainsi que des dommages et intérêts. En revanche, on ne dispose actuellement d’aucune statistique concernant les plaintes déposées par les employées de maison victimes de violences physiques, en particulier sexuelles. Le Code pénal contient des dispositions réprimant les violences physiques, le harcèlement sexuel et les sévices sexuels dont toute personne, y compris les employées de maison étrangères, peut se prévaloir devant la justice.

25.Des voies de recours sont ouvertes aux travailleurs qui s’estiment victimes d’une violation, l’article 155 du Code du travail prévoyant la possibilité de déposer une plainte auprès du Ministère du travail. Au cas où le litige n’a pas été réglé à l’amiable dans les deux semaines, l’affaire est déférée aux tribunaux compétents. Quant aux travailleurs domestiques et ceux qui sont employés dans l’agriculture, ils peuvent également invoquer cette disposition mais, si l’affaire ne peut pas se régler à l’amiable, elle est déférée aux tribunaux civils. En effet, dans les cas où le Code du travail n’assure pas une protection à ces catégories de travailleurs, c’est le Code civil qui s’applique. D’après les statistiques, en 2004, 1 012 plaintes ont été présentées par des non‑ressortissants au Ministère du travail. Concernant l’absence de mention explicite de la discrimination dans le Code du travail, Mme Al-Khalifa précise que ce vide juridique peut être comblé en cas de besoin car les dispositions de la Convention peuvent être invoquées directement. Par ailleurs, le Code du travail a été entièrement révisé par le Ministère du travail, les syndicats et les associations d’employeurs et le texte du projet qui a résulté de ce travail a été envoyé à l’Organisation internationale du Travail pour examen. Les observations de cette dernière ont été prises en compte dans la version finale du texte que les autorités compétentes examinent en vue de l’adopter. Enfin, s’agissant des possibilités pour les travailleurs étrangers de s’affilier à un syndicat, Mme Al-Khalifa souligne qu’il n’existe aucune restriction à l’égard des non‑ressortissants. De même, ils peuvent former librement des associations culturelles. On recense ainsi 42 associations culturelles d’étrangers vivant à Bahreïn, ainsi que 32 clubs et 15 Églises.

26.M. MUSHEN AL ALAWI (Bahreïn), répondant aux allégations selon lesquelles les chiites d’origine persane feraient l’objet d’une discrimination, fait observer que cette question ne relève pas véritablement du mandat du Comité, qui porte sur la discrimination raciale, et que, de surcroît, les allégations ne sont pas fondées. Il en veut pour preuve notamment le fait qu’à Bahreïn, deux ministres sont des chiites d’origine persane et que cette minorité n’est pas surreprésentée dans les statistiques sur les chômeurs. De plus, il conteste l’affirmation selon laquelle ces personnes ne pourraient pas librement choisir leur lieu de résidence, car une telle interdiction n’est énoncée dans aucun texte de loi. Les chiites et les sunnites ont toujours cohabité pacifiquement et on ne saurait dire qu’il existe des tensions interconfessionnelles.

27.De même, s’agissant des bédouins, il explique que, comme ces personnes vivaient à l’origine dans le désert et n’avaient pas de nationalité, on a tendance à confondre le terme «bédouin» avec le mot «apatride». Or, depuis le début des réformes engagées à Bahreïn, 98 % des bédouins, qui ont des origines iraniennes mais vivent depuis des générations à Bahreïn, ont été naturalisés. Le cas des 2 % restants est en cours d’examen et sera résolu dans les meilleurs délais.

28.M. Mushen Al Alawi dit que le Ministère du travail étudie actuellement la possibilité pour Bahreïn d’accéder à la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et qu’il organise dans ce cadre des consultations avec les autres pays du Golfe ainsi qu’avec des experts de l’OIT. Il souligne que Bahreïn diffère du reste du monde en ce sens que 90 % de sa main‑d’œuvre est d’origine étrangère. Ainsi, octroyer la nationalité à tous les travailleurs étrangers présents sur son territoire aurait pour conséquence de «dénaturer» la société bahreïnite. Cela dit, Bahreïn réfléchira aux moyens de coopération possibles avec les pays exportateurs de main‑d’œuvre pour garantir une protection aux travailleurs migrants.

29.M. de GOUTTES salue l’esprit d’ouverture dans lequel s’est instauré le dialogue entre la délégation bahreïnite et le Comité et le sérieux avec lequel la délégation a répondu aux questions des membres du Comité. Il dit par ailleurs que le Comité ne peut que se féliciter de ce que l’État partie envisage de ratifier le Pacte relatif aux droits civils et politiques ainsi que le Pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Enfin, il demande quelles mesures l’État partie entend prendre pour porter à la connaissance de sa population le rapport à l’examen et les observations finales que le Comité aura formulées à ce sujet.

30.M. SHAHI, notant que les conditions de travail des employées de maison ne sont pas régies par le Code du travail mais par le Code civil, voudrait savoir quelle protection ce dernier offre aux femmes, notamment s’il prévoit des sanctions en cas de violence à leur égard. Il note également que, bien que la Convention puisse être invoquée devant les tribunaux bahreïnites, les magistrats ne peuvent poursuivre et sanctionner les auteurs d’actes de discrimination raciale que dans la mesure où ces actes sont interdits par la législation nationale. Il insiste donc sur la nécessité, pour Bahreïn, d’aligner la législation nationale sur la Convention à cet égard.

31.M. KJAERUM se félicite du processus de démocratisation dans lequel s’est engagé l’État partie, de l’adoption de la Charte nationale d’action et du plan d’action national en faveur des droits de l’homme, qui sont autant de signes prometteurs. Dans ce contexte, il lui semble particulièrement surprenant que le Gouvernement ait ordonné la dissolution du Centre bahreïnite des droits de l’homme au seul motif qu’il aurait organisé un séminaire sur les droits de l’homme. M. Kjaerum estime qu’il s’agit là d’une mesure particulièrement radicale et déplore que la seule ONG qui ait présenté un rapport parallèle sur les droits qui intéressent le Comité ait été dissoute. Il aimerait entendre les observations de la délégation à ce sujet.

32.M. PILLAI salue quant à lui les efforts entrepris par l’État partie pour améliorer la procédure d’établissement des rapports et organiser des ateliers et des séminaires sur les droits de l’homme.

33.M. Pillai est préoccupé par la différence de traitement qui est apparemment appliquée en matière salariale entre ressortissants et non‑ressortissants des pays de l’Union européenne, et demande un complément d’information à ce sujet.

34.Compte tenu du nombre particulièrement élevé de plaintes (plus de 2 000 en 2003) concernant le droit du travail portées devant les tribunaux compétents, M. Pillai voudrait savoir si les ONG qui aident les victimes de discrimination dans leurs démarches en vue d’obtenir réparation ont eu à connaître de plaintes pour harcèlement sexuel émanant de femmes, et s’il est vrai que la principale ONG chargée de venir en aide aux femmes se trouvant dans cette situation s’est vu confisquer les fonds dont elle disposait.

35.Enfin, M. Pillai voudrait savoir si le Gouvernement bahreïnite a réfléchi aux implications à long terme du décret de 2002 relatif à l’octroi de la double nationalité.

36.M. THORNBERRY, citant le paragraphe 13 du rapport selon lequel «la charia islamique est la principale source de droit», demande à la délégation s’il faut en déduire que la charia est une «source d’inspiration» pour la législation nationale, ou si elle est considérée comme une législation à part entière. Par ailleurs, il serait intéressant de connaître la place de la Constitution dans l’ordre juridique interne et de savoir si la charia s’applique indifféremment aux musulmans et aux non-musulmans.

37.M. AMIR fait observer que, dans la plupart des pays du monde, le pouvoir est confié aux personnes qui semblent le mieux à même de répondre aux besoins de la population sur la base d’un programme politique, économique, social ou culturel. En aucun cas, la question de l’origine ethnique des candidats ne devrait être prise en considération.

38.M. ABDUL KARIM (Bahreïn) dit que son pays fera en sorte de diffuser le plus largement possible les dispositions de la Convention ainsi que le rapport à l’examen et les observations finales que le Comité formulera, par le biais notamment du site Web du Département des affaires juridiques du Ministère des affaires étrangères. Ce département est par ailleurs saisi de la question de l’adhésion au Pacte relatif aux droits civils et politiques et au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, dont la ratification, si elle intervient, viendra compléter la longue liste d’instruments internationaux auxquels Bahreïn est partie.

39.Mme ABDUL RASOOL (Bahreïn) dit que, dans les domaines civil et administratif, la charia est la seule source de droit, applicable à tous les citoyens, tandis que pour toutes les questions relatives à la famille, au mariage ou au droit d’hériter, elle ne s’applique qu’aux musulmans.

40.Mme Al-KHALIFA (Bahreïn) précise qu’en l’absence d’un contrat de travail, les relations entre employeurs et employés sont régies par le Code civil.

41.M. AL ALAWI (Bahreïn) dit que le Centre des droits de l’homme a été fermé conformément à la législation bahreïnite qui permet de dissoudre toute association dont les activités constituent une menace pour la sûreté de l’État, car il se livrait à des activités contraires à ses statuts et aux intérêts de l’État. Le Gouvernement a adressé plusieurs avertissements aux responsables du Centre qui ont toutefois continué à lancer des appels à la violence, y compris un appel au meurtre contre le Premier Ministre. D’une manière générale, les organisations non gouvernementales travaillent en toute indépendance et les pouvoirs publics leur demandent simplement de rester impartiales dans l’exercice de leurs responsabilités. À titre d’exemple, l’Association bahreïnite des droits de l’homme, qui comprend exclusivement des membres de l’opposition politique, mène une action extrêmement efficace en faveur des droits de l’homme et collabore étroitement avec les ministères compétents. Cela est également le cas de l’Association pour les travailleurs migrants, qui perçoit des fonds publics afin de fournir un large éventail de services aux travailleurs migrants.

42.M. ABOUL-NASR souhaite obtenir de la délégation des précisions au sujet des menaces de mort proférées contre le Premier Ministre.

43.M. AL ALAWI (Bahreïn) dit que c’est dans le cadre d’un rassemblement religieux que des responsables du Centre des droits de l’homme ont lancé un appel au meurtre du Premier Ministre. Toutefois, il ne s’agit là que d’un exemple des nombreux actes irresponsables auxquels le Centre s’est livré dans le but de troubler l’ordre public. Malgré tout l’intérêt que porte le Gouvernement bahreïnite aux quelque 190 associations de la société civile, il ne saurait tolérer de telles atteintes à la sûreté de l’État.

44.M. BOYD (Rapporteur pour Bahreïn) se félicite du sérieux avec lequel la délégation bahreïnite a répondu aux questions des membres du Comité et de la volonté manifeste de l’État partie de n’épargner aucun effort pour mieux appliquer la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Parmi les points positifs, il salue la ratification par Bahreïn de la Convention contre l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, de la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et de la Convention no 111 de l’Organisation internationale du Travail concernant la discrimination en matière d’emploi et de profession. D’une manière générale, Bahreïn semble résolu à accroître sa coopération avec les organes internationaux qui s’occupent des droits de l’homme et à adopter les mesures qui lui permettront de s’acquitter de ses obligations en vertu des instruments internationaux récemment ratifiés. M. Boyd note également avec satisfaction que Bahreïn envisage de créer une institution nationale des droits de l’homme et a adopté une charte d’action nationale qui consacre les principes de la démocratie.

45.Parmi les points négatifs, M. Boyd regrette que la délégation ait fourni très peu d’informations concrètes sur la situation des droits de l’homme sur le terrain et engage l’État partie à faire figurer dans son prochain rapport périodique des exemples précis de sentences prononcées par les tribunaux en application de la législation antidiscriminatoire. Il rappelle que le Comité a besoin de données statistiques ventilées par race, ethnie ou religion pour pouvoir mieux appréhender la situation dans le pays au regard de la Convention. Par ailleurs, M. Boyd exhorte l’État partie à renforcer sa coopération avec la société civile et à respecter la liberté d’expression, notamment celle des organisations non gouvernementales qui fournissent des renseignements au Comité même s’il estime qu’ils sont faux. Enfin, il engage Bahreïn à ratifier le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et à faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention.

46.M. AL ALAWI (Bahreïn) dit que son pays compte sincèrement sur le Comité pour l’aider à continuer sur la voie de la démocratisation et note avec satisfaction que ses membres ont compris que Bahreïn se trouve à un point tournant de son histoire et a engagé d’importantes réformes afin de mieux s’acquitter de ses obligations internationales. M. Al Alawi a pris note avec intérêt des informations écrites transmises au Comité par des organisations non gouvernementales bahreïnites et souligne que toutes les suggestions et recommandations formulées par les membres du Comité seront dûment communiquées aux autorités bahreïnites.

47.Le PRÉSIDENT déclare que le Comité a ainsi achevé l’examen des sixième et septième rapports périodiques de Bahreïn.

48. La délégation bahreïnite se retire.

La séance est levée à 13 h 5.

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