Nations Unies

CERD/C/SR.2153

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

8 mars 2012

Original: français

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Quatre-vingtième session

Compte rendu analytique de la 2153 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 1er mars 2012, à 15 heures

Président: M. Avtonomov

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Troisième à dix-septième rapports périodiques de la Jordanie

La séance est ouverte à 15 h 15.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Treizième à dix-septième rapports périodiques de la Jordanie(CERD/C/JOR/13-17; CERD/C/JOR/Q/13-17; HRI/CORE/1/Add.18/Rev.1)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation jordanienne prend place à la table du Comité.

2.M. Sukayri (Jordanie) dit que la Jordanie regrette de n’avoir pas soumis son rapport dans les délais mais que ce retard s’explique par le fait que ce document a été établi à un moment où elle devait soumettre simultanément des rapports à plusieurs organes conventionnels. Elle fera tout son possible pour que le rapport suivant parvienne au Comité en temps voulu. En 2012, la Jordanie a adopté plusieurs projets de modification de la Constitution, concernant notamment la création d’une cour constitutionnelle, le renforcement de l’indépendance du pouvoir judiciaire et l’interdiction de traduire des civils inculpés d’une infraction pénale devant d’autres juridictions que les tribunaux ordinaires. Elle a aussi modifié la législation régissant le droit de réunion, qui dispose désormais que chacun jouit du droit à la liberté de réunion et d’expression et peut l’exercer sans autorisation préalable. Après avoir rappelé la teneur des dispositions consacrant le principe d’égalité et interdisant la discrimination fondée sur la race, l’appartenance ethnique, la langue ou la religion telles qu’elles figurent dans le rapport (par. 9 à 11), M. Sukayri indique que les agents de la fonction publique reçoivent une formation sur divers principes relatifs aux droits de l’homme, dont l’égalité de traitement et le droit de chacun de saisir les tribunaux indépendamment de son origine, sa langue, sa race ou sa religion. De même, les magistrats sont informés de l’obligation qui leur incombe de traiter toutes les affaires avec impartialité, indépendamment de la nationalité, de la couleur de peau, de la religion et de l’appartenance ethnique des parties au procès. Les droits de l’homme, y compris la Convention, sont enseignés à l’institut de formation des juges.

3.Citant de larges extraits du rapport (par. 17, 18, 21 à 23), M. Sukayri rappelle le contenu des dispositions de la législation interne réprimant l’incitation à la haine raciale et la diffusion d’idées racistes, notamment l’article 150 du Code pénal, qui dispose que tout écrit, discours ou acte visant à susciter des troubles sectaires ou interraciaux ou à provoquer des conflits interconfessionnels et des tensions entre les différentes composantes de la nation est passible de six mois à trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 50 dinars. En outre, le Code pénal réprime sévèrement toute une série d’actes de nature à heurter les sentiments religieux d’une personne, notamment le fait de diffuser des documents imprimés ou manuscrits, des photos ou des dessins dans lesquels une religion est tournée en dérision et le fait de proférer en public des propos malveillants à l’encontre des prophètes (rapport, par. 60). L’orateur souligne à ce propos qu’à l’initiative de la Jordanie, l’Assemblée générale a adopté la résolution 65/5 instaurant la Semaine mondiale de l’harmonie interconfessionnelle (A/RES/65/5), qui est organisée chaque année afin de promouvoir la paix, la concorde et le rejet de la haine, du racisme et de la discrimination.

4.La Jordanie est le principal pays d’accueil pour les réfugiés palestiniens et iraquiens et, depuis quelques mois, elle accueille également nombre de réfugiés fuyant la République arabe syrienne. En 1998, elle a conclu un mémorandum d’accord avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) par lequel elle s’est notamment engagée à ne pratiquer aucune distinction fondée sur l’appartenance ethnique, la religion ou la nationalité entre ses ressortissants et les réfugiés. Enfin, M. Sukayri indique que la société jordanienne est composée de divers groupes ethniques qui coexistent harmonieusement et qu’aucune affaire de discrimination fondée sur la race ou l’appartenance ethnique n’a été enregistrée pendant la période considérée.

5.M. Thornberry (Rapporteur pour la Jordanie) regrette que quatorze ans se soient écoulés depuis l’examen du rapport précédent de l’État partie et invite ce dernier à soumettre plus régulièrement ses rapports périodiques ainsi qu’à réviser son document de base, qui date de 1994. Selon le Rapporteur, l’absence regrettable de statistiques démographiques ventilées par origine ethnique, sexe ou autre empêche l’État partie de prendre des mesures ciblées pour combattre la discrimination, et le Comité apprécierait des statistiques ventilées à jour sur les nouveaux arrivants, dont le nombre varie selon les sources: le nombre de Palestiniens oscillerait entre 1 et 3 millions (dont la plupart seraient des réfugiés) et celui des Iraquiens entre 450 000 et 1 million (dont seuls 30 000 à 35 000 ont été enregistrés en tant que réfugiés par le HCR). S’y ajoutent également les Circassiens et les Tchétchènes ainsi que des groupes nomades et semi-nomades.

6.L’État partie n’a certes enregistré aucun cas de discrimination fondée sur la race, mais cela ne signifie pas pour autant que le pays en est exempt. L’on peut en déduire que la Convention, qui fait pourtant partie intégrante de l’ordre juridique interne, n’a pas dû être invoquée devant les tribunaux. Il rappelle que pour prendre effet, certaines dispositions de la Convention qui ne sont pas auto-exécutoires, comme celles relatives à la discrimination intentionnelle et à la discrimination de fait, doivent faire l’objet d’une législation spécifique. Il serait intéressant de savoir si la Charte nationale de 1990, qui dresse un tableau très clair de l’État jordanien et de l’histoire des relations jordano-palestiniennes, a une quelconque valeur juridique. À la lecture de la Constitution, l’on comprend que certains droits ne sont reconnus qu’aux Jordaniens, tandis que d’autres sont de portée plus générale et accessibles à tous. La délégation voudra bien indiquer selon quels critères les droits sont octroyés aux ressortissants jordaniens uniquement ou à l’ensemble des personnes résidant dans l’État partie, y compris les non-ressortissants.

7.M. Thornberry demande si la nouvelle Cour constitutionnelle pourra être saisie de plaintes émanant de non-ressortissants. La délégation jordanienne pourra en dire plus sur les activités du Centre national des droits de l’homme et indiquer notamment s’il a déjà été saisi de plaintes pour discrimination raciale et y a donné suite, quel est son mode de financement et s’il est en mesure de suivre efficacement les progrès accomplis dans la mise en œuvre de la Convention. De la même manière, il serait intéressant de savoir si le Bureau du Médiateur est habilité à connaître de plaintes de racisme, si l’enregistrement des ONG est soumis à l’approbation du Gouvernement jordanien, si une association dont l’objectif serait raciste pourrait ou non être enregistrée, et enfin, comment sont diffusées, dans l’État partie, la Convention et les observations finales du Comité. Un complément d’information sur la mise en œuvre de l’article 3 serait le bienvenu, sachant que cet article ne concerne pas uniquement l’apartheid mais aussi la ségrégation, notamment dans le domaine de l’emploi ou de l’éducation, qu’elle résulte d’une politique de l’État ou d’actions de particuliers.

8.Pour ce qui est de l’interdiction des propos incitant à la haine, notamment raciale, la délégation voudra bien indiquer qui sont les «autres membres de la nation» visés au paragraphe 150 du Code pénal traitant de cette question et préciser comment il faut comprendre l’article 130 du même Code qui punit quiconque tenterait, en tant de guerre, d’«affaiblir le sentiment national». Des données sur les poursuites menées en application de ces deux articles seraient utiles. Le Rapporteur voudrait savoir s’il existe une disposition générale dans le Code pénal relative à la motivation raciste des infractions pénales, qui prévoirait l’aggravation des peines pour ce motif. Il aimerait savoir si la diffusion de «tout ce qui est de nature à inciter à la violence et à encourager la division entre les citoyens de quelque manière que ce soit» est punie par le droit civil ou constitue une infraction pénale. Il apprécierait un complément d’information sur l’arrêt de la Haute Cour de justice jordanienne no 206/1993 en date du 26 octobre 1993 mentionné au paragraphe 24 du rapport.

9.La délégation pourrait fournir des informations supplémentaires sur les cas dans lesquels la nationalité jordanienne a été retirée à des personnes d’origine palestinienne, et notamment indiquer les raisons d’une telle mesure, le nombre de personnes concernées et les possibilités d’appel qui s’offrent à elles ainsi que les conséquences d’une telle procédure sur leur accès à la santé et à l’éducation. M. Thornberry demande s’il est vrai que les enfants nés d’une mère jordanienne et d’un père étranger sont privés de droits politiques, ne peuvent avoir accès aux services gratuits de santé et d’éducation et ne peuvent être fonctionnaires. Compte tenu de l’existence dans le droit jordanien de dispositions punissant la diffamation des religions et les propos blasphématoires, il demande où, en la matière, se situe le seuil au-delà duquel des poursuites sont engagées pour l’un ou l’autre de ces motifs, et quelles dispositions régissent la liberté d’expression. Il voudrait savoir quelles «communautés religieuses non musulmanes» visées par la Constitution ont déjà été reconnues dans le Royaume. Il demande s’il est vrai que la législation relative au salaire minimum ne s’applique pas aux travailleurs non jordaniens et que les non-ressortissants, qui ont certes le droit de se syndiquer, n’ont plus celui de faire grève depuis les modifications apportées à la législation du travail en 2008. Est-il vrai en outre que depuis août 2009 la liberté de mouvement des travailleurs migrants employés comme domestiques est considérablement restreinte?

10.Notant que l’État partie a toujours été une terre d’asile pour de nombreux réfugiés fuyant leur pays en guerre, comme les Palestiniens et les Iraquiens, M. Thornberry voudrait en savoir plus sur le respect du principe de non-refoulement, sur la détermination du statut de réfugié ainsi que sur le comportement du personnel accueillant les réfugiés aux postes frontière. La délégation pourrait fournir des renseignements sur les campagnes d’éducation à l’intention des fonctionnaires ainsi que sur la sensibilisation de la population à la tolérance. Un complément d’information sur les programmes éducatifs mentionnés au paragraphe 84 du rapport ainsi que sur les programmes d’éducation dont bénéficient les non-ressortissants et les groupes minoritaires jordaniens serait le bienvenu, s’agissant notamment de la langue d’enseignement, du contenu des programmes et de la direction des établissements scolaires. Enfin, comment l’État partie veille-t-il à garantir l’accès à l’éducation des groupes de nomades en Jordanie.

11.M.  Amir regrette que des ONG jordaniennes n’assistent pas à l’examen des treizième à dix-septième rapports périodiques de l’État partie et que ledit rapport ne fournisse aucune information sur la mise en œuvre de l’article premier de la Convention ni sur la situation des Palestiniens dans l’État partie. Il souhaiterait donc en savoir plus sur les droits et les devoirs de ces personnes, en particulier des Palestiniennes qui, en tant que femmes, n’ont pas le droit d’obtenir la nationalité jordanienne, ce qui a des conséquences pour leurs enfants. La délégation pourrait indiquer quel est le statut des réfugiés iraquiens et notamment s’ils ont le droit de travailler et de scolariser leurs enfants, et fournir des données statistiques qui permettraient au Comité de suivre l’évolution de la situation des différents groupes de population, dont les Bédouins, pour ce qui est de l’accès à l’éducation et à la santé notamment. Enfin, elle pourrait expliquer comment les tribunaux traitent les affaires relatives à des crimes d’honneur dans l’État partie.

12.M.  Diaconu dit que de nombreux textes législatifs jordaniens interdisent la discrimination fondée sur l’appartenance raciale ou ethnique mais qu’aucun ne contient de définition de la discrimination raciale. Il recommande à l’État partie de combler cette lacune en s’inspirant des dispositions de l’article premier de la Convention. Il estime que l’article 150 du Code pénal qui érige en infractions les écrits, discours ou actes qui ont pour but ou résultat de susciter des troubles sectaires ou raciaux ne tient pas suffisamment compte de toutes les exigences établies à l’article 4 de la Convention. En outre, l’article 130 du même Code qui condamne le fait d’entreprendre «en temps de guerre ou lorsqu’une guerre est envisagée, une propagande visant à affaiblir le sentiment national ou à susciter des clivages raciaux ou confessionnels» n’est pas non plus compatible avec les dispositions de l’article 4, qui sont contraignantes en tous temps.

13.M. Diaconu souhaite obtenir des précisions sur la nature des affaires ayant donné lieu aux mesures de réparation évoquées au paragraphe 80 du rapport. Il demande également à la délégation jordanienne de commenter les informations communiquées par des ONG selon lesquelles les droits des travailleurs migrants ne sont pas respectés et ces travailleurs sont astreints à des journées de travail excessivement longues et sont exclus du système de sécurité sociale. Il souhaite savoir quelles mesures ont été prises ou sont envisagées pour lutter contre la discrimination dont sont victimes les femmes appartenant à des minorités ou à des groupes vulnérables. L’expert se félicite que la Jordanie ait l’intention de continuer à assumer ses responsabilités à l’égard des Palestiniens qu’elle a accueillis sur son territoire mais demande à la délégation de commenter les informations selon lesquelles certains réfugiés ont été privés de leur nationalité et sont devenus apatrides. Il encourage l’État partie à doter les institutions de défense des droits de l’homme des ressources nécessaires à l’exercice de leur mandat et à leur permettre de recevoir des plaintes, y compris d’enfants.

14.M. de Gouttes se félicite de la reprise du dialogue avec l’État partie après quasiment quatorze années d’interruption. Il constate que la Jordanie dispose d’un important arsenal législatif de lutte contre les discriminations à caractère racial et religieux même si les lois en vigueur ne tiennent pas suffisamment compte des dispositions de l’article 4 de la Convention, qui ont un caractère impératif. Il lit au paragraphe 2 du rapport que la Jordanie «n’a pas enregistré de cas de discrimination fondée sur la race à l’encontre d’un des groupes composant la société» mais estime que cette affirmation est contredite par le paragraphe 24 selon lequel «la justice jordanienne a insisté sur l’obligation de non-discrimination raciale dans nombre de ses décisions, notamment dans l’arrêt de la Haute Cour de justice jordanienne no 206/1993 en date du 26 octobre 1993». Il demande à la délégation de fournir des explications sur ce point et rappelle que le Comité considère qu’aucun pays n’est exempt de manifestations de racisme ou de discrimination.

15.M. de Gouttes souhaite par ailleurs recevoir un complément d’information sur la mise en œuvre des recommandations formulées dans le cadre de l’Examen périodique universel (EPU), en février 2009, et acceptées par le pays, et notamment sur les mesures prises pour lutter contre la violence familiale, en particulier à l’égard des femmes, la persistance de pratiques coutumières telles que les crimes d’honneur, et les mauvais traitements infligés aux travailleurs étrangers, y compris ceux placés dans des centres de rétention, et pour éliminer les discriminations dont sont victimes les minorités ethniques dans l’exercice de leur droit à la liberté de religion.

16.M. Murillo Martí nez souhaite connaître la situation juridique des groupes ethniques minoritaires vivant sur le territoire de l’État partie et la représentation des différentes ethnies dans les instances nationales, en particulier dans les pouvoirs exécutif et judiciaire.

17.M. Vá zquez estime que les dispositions du Code pénal jordanien qui érigent en infractions les actes de nature à offenser les croyances ou les sentiments d’une personne ne sont pas conformes aux dispositions de l’article 4 de la Convention et que leur champ d’application est tellement vaste qu’elles pourraient même être contraires au principe de la liberté d’expression. Il estime, notamment, que l’article 150 du Code pénal qui réprime les écrits, discours ou actes ayant pour but ou résultat de susciter des troubles sectaires ou raciaux pourrait être utilisé contre des membres des minorités voulant défendre leurs droits. La délégation est invitée à revenir sur ces questions.

18.M me Crickley souhaite savoir si des mesures ont été prises ou sont envisagées par l’État partie pour réprimer et prévenir la violence contre les femmes appartenant à des minorités et les femmes réfugiées. Elle demande comment l’État partie protège les domestiques étrangers et veille à ce qu’ils jouissent des mêmes droits que les autres catégories de travailleurs. Il souhaite savoir si des mesures spécifiques ont été prises ou sont envisagées pour mieux protéger les travailleurs migrants en Jordanie, en particulier leurs droits syndicaux. Notant que la loi sur l’éducation prévoit que l’enseignement de base est obligatoire et gratuit dans les écoles publiques jordaniennes, l’experte souhaite savoir si cette disposition s’applique aussi aux enfants étrangers, notamment ceux de parents réfugiés ou demandeurs d’asile.

19.Le Président, s’exprimant en sa qualité de membre du Comité, demande s’il y a des personnes d’ascendance africaine en Jordanie. Il souhaite savoir si les Circassiens constituent un groupe ethnique spécifique dans l’État partie, et si la culture et la langue circassiennes sont enseignées dans certaines écoles. Enfin, il demande s’il existe des établissements permettant aux étrangers installés en Jordanie de rester en contact avec leur langue et leur culture d’origine.

20.M. Lindgren Alves demande si l’expression «agrégat ethnique d’une rare homogénéité», utilisée dans le rapport pour définir la société jordanienne, signifie qu’il s’agit d’une société métissée ou d’une société mosaïque composée de différents groupes ethniques. Il demande quelle est la nationalité des Palestiniens vivant en Jordanie, principal pays d’accueil pour les réfugiés palestiniens, et si ceux-ci peuvent avoir la double nationalité. Il souhaite en outre savoir pourquoi la nationalité jordanienne ne peut être transmise que par le père, et non par la mère. Notant que le rapport de l’État partie s’étend longuement sur les actes qui sont de nature à offenser les croyances ou les sentiments religieux, il rappelle que le Comité traite avant tout de la discrimination fondée sur la race, et accessoirement de celle fondée sur la religion si elle a des incidences raciales ou ethniques.

21.M. Kemal voudrait des données ventilées sur la composition de la population en Jordanie, notamment sur le nombre de réfugiés et de travailleurs migrants. Il souhaite des renseignements sur la politique mise en œuvre par le Gouvernement pour accueillir les nombreux migrants arrivés ces dernières années en Jordanie. Il demande s’il est exact que la nationalité jordanienne a été retirée à des Palestiniens au motif qu’ils sont originaires de Cisjordanie et que le Gouvernement ne souhaite pas qu’ils perdent leurs droits en Cisjordanie.

22.M. Sukayri (Jordanie) répond qu’il y a très peu de personnes d’ascendance africaine en Jordanie. Les Circassiens et les Tchétchènes originaires du Caucase figurent effectivement parmi les minorités vivant en Jordanie. Ils ont préservé leurs propres langues, centres culturels et activités sociales et ils bénéficient d’un soutien du Gouvernement à cette fin. L’État et la population jordaniens sont très tolérants et conscients de l’intérêt de la diversité culturelle et ethnique. Jusqu’en 1991, de nombreux Jordaniens ont étudié dans des pays de l’ex-Union soviétique et beaucoup ont épousé des personnes originaires de ces pays. La Jordanie entretient toujours de bonnes relations avec la Fédération de Russie, les pays de l’ex-Union soviétique, ainsi qu’avec la Roumanie, l’un des principaux pays accueillant encore des étudiants jordaniens. Il existe toujours à Amman des centres et des événements culturels destinés aux personnes de ces différentes nationalités.

23.M. Al- Dehayyat (Jordanie) dit que la société jordanienne constitue une mosaïque de groupes et de clans, notamment circassiens, turcs, kurdes ou bosniaques. Les Tchétchènes et les Circassiens sont arrivés en Jordanie vers 1860. Il existe des écoles où les cours sont dispensés en circassien, ainsi qu’en turc. Les Circassiens, les Turcs ou les Kurdes ne sont pas considérés comme des étrangers en Jordanie. D’après le Centre national des droits de l’homme, aucune plainte relative à des cas de discrimination raciale n’a été enregistrée, ce qui fait dire à la délégation que la discrimination raciale n’existe pas en Jordanie. Le Gouvernement reconnaît les droits des minorités religieuses et ethniques, notamment leur droit de travailler dans la fonction publique. Des mesures visant à garantir l’égalité des chances ont été prises afin de faciliter l’accès des minorités à la magistrature, la police et l’armée.

24.Lors du Printemps arabe de 2011, 4 200 manifestations ont été organisées en Jordanie mais aucune violence n’a été exercée contre des manifestants. L’État a scrupuleusement respecté la liberté d’expression. Les agents de la fonction publique sont formés et sensibilisés aux droits et principes énoncés dans la Convention. Des activités de sensibilisation visent aussi à prévenir la création d’organisations fanatiques appelant au conflit religieux ou incitant à la haine ou à la discrimination raciale, et les auteurs de ce type d’infraction sont responsables pénalement. La délégation a pris bonne note de la recommandation du Comité visant à ce que la Jordanie élabore une définition de la discrimination raciale conforme à celle de la Convention. S’agissant des conditions de détention, il indique que des fonds ont été alloués à la rénovation des établissements pénitentiaires et que tous ceux qui n’étaient pas conformes aux normes en matière de droits de l’homme ont été fermés. Le Code de conduite destiné aux agents de la fonction publique, notamment les forces de l’ordre, prévoit que tout citoyen doit être traité sur un pied d’égalité sans aucune discrimination fondée sur la race ou l’origine. Ce code, contraignant et obligatoire pour tous, garantit également la protection de la dignité humaine et le respect des droits universels et inaliénables énoncés dans les instruments internationaux, notamment la Convention. Le Centre national des droits de l’homme, qui s’occupe notamment de la coopération avec la société civile, a consulté un certain nombre d’ONG en vue de la présentation du rapport devant le Comité, mais elles n’avaient aucune doléance à exprimer.

La séance est levée à 18 heures.