Nations Unies

CERD/C/SR.2071

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

5 mars 2012

Français

Original: anglais

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Soixante-dix-huitième session

Compte rendu analytique (partiel)*de la 2071 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 28 février 2011, à 15 heures

Président:M. Kemal

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Cinquième et sixième rapports périodiques de l ’ A rm é ni e

La séance est ouverte à 15 h 5 .

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Cinquième et sixième rapports périodiques de l ’ Arménie (CERD/C/ARM/5-6; CERD/C/ARM/Q/5-6; HRI/CORE/1/Add.57)

Sur l ’ invitation du Président, la délégation arménienne prend place à la table du Comité.

M. Kirakossian (Arménie) rappelle que son pays a présenté au cours de deux années écoulées tous les rapports qu’il avait tardé à soumettre aux organes conventionnels des Nations Unies. Celui qui est à l’étude a été établi par un groupe de travail interadministrations représentatif des ministères et des services compétents, créé par le Premier Ministre. Les ONG et les représentants de la société civile actifs dans les domaines visés par la Convention ont fait part de leurs observations et recommandations au cours d’une table ronde.

L’Arménie est signataire de nombreux traités internationaux, dont des instruments fondamentaux relatifs aux droits de l’homme qui protègent les droits des minorités nationales et assurent la liberté de religion et de conscience, telles la Convention‑cadre pour la protection des minorités nationales du Conseil de l’Europe et la Charte européenne des langues régionales ou minoritaires.

Le Gouvernement arménien condamne toutes les formes et manifestations de discrimination à l’égard de personnes, de groupes ou d’institutions. La législation nationale garantit l’égalité des citoyens dans toutes les sphères de l’existence sans discrimination, exclusion, restriction ni préférence motivées par la race, la couleur, l’ascendance ou l’origine nationale ou ethnique. Le Gouvernement s’attache à appliquer pleinement la Convention et les autres instruments internationaux pertinents. Les autorités s’inspirent aussi des principes de la Déclaration et du Programme d’action de Durban dans la mise en œuvre des réformes législatives et l’adoption de mesures pratiques.

Le Conseil des droits de l’homme a mené l’examen périodique universel concernant l’Arménie le 6 mai 2010. Le Gouvernement a approuvé 95 % des recommandations formulées, qui sont déjà pour la plupart en cours d’application. Il se propose de mettre en place une commission interministérielle composée de représentants des autorités gouvernementales et des ONG compétentes pour en faciliter la mise en œuvre.

L’Arménie a ratifié la Convention relative aux droits des personnes handicapées le 22 septembre 2010. Un programme national étendu de protection des droits de l’homme est en cours d’élaboration; il sera approuvé avant la fin de l’année.

L’Arménie a pris des mesures législatives et institutionnelles pour améliorer la condition des femmes dans la société, dont des initiatives destinées à éliminer toutes les formes de discrimination. Le Code de la famille adopté en 2004 protège les intérêts des femmes aussi bien que des hommes. Le Code électoral fixe à 15 %, au lieu de 5 % antérieurement, le quota des femmes devant figurer sur les listes électorales en cas de représentation proportionnelle, et sur chaque liste, un candidat sur 10 au moins doit être une femme. Les sexospécificités ont également été prises en considération dans le Code du travail qui est entré en vigueur en juin 2005. De plus, il a été tenu compte à titre prioritaire du principe de l’égalité des sexes dans le Programme d’activités du Gouvernement pour 2008-2012. Celui-ci a approuvé, le 11 février 2010, un document de réflexion concernant «une politique d’égalité des sexes».

Le Plan national 2010-2012 de lutte contre la traite des êtres humains, assorti d’un calendrier d’application, a été adopté par le Gouvernement le 3 septembre 2010. Près de 78 millions de drams arméniens (217 000 dollars des États-Unis environ) ont été alloués à cette lutte dans le budget national pour 2010. Les stratégies et les initiatives envisagées se repartissent en six grandes catégories: législation et répression de la traite; prévention; protection et accompagnement des victimes; coopération; études, suivi et évaluation; coordination.

En ce qui concerne les recommandations du Comité relatives aux rapports antérieurs de l’Arménie, des réformes juridiques et institutionnelles ont été réalisées depuis quelques années afin de renforcer la protection des droits de l’homme, y compris ceux des personnes appartenant à des minorités nationales. Le Département des minorités ethniques et des affaires religieuses et le Conseil de coordination des organisations culturelles et nationales des minorités nationales ont continué de prendre une part active à la sensibilisation ainsi qu’à la résolution des questions en suspens.

Le temps que la radiodiffusion peut consacrer à des émissions des minorités ethniques n’est pas limité. De plus, à la suite d’une modification de l’article 28 de la loi relative à la radio et à la télédiffusion intervenue en décembre 2008, la compagnie publique de télévision est tenue d’offrir des programmes qui prennent en considération les intérêts des minorités nationales et de diffuser dans leurs langues pendant deux heures par semaine au moins.

La préservation, la diffusion et la mise en valeur de la culture et du patrimoine culturel des minorités nationales sont une des priorités de la politique culturelle. Le Ministère de la culture coopère étroitement avec les associations et les ONG des minorités, et aide à organiser des concerts, des expositions et d’autres manifestations culturelles. En dépit des difficultés économiques, les autorités affectent chaque année des fonds à la promotion des traditions et des cultures des minorités nationales. Les crédits alloués par le Ministère de la culture au projet de soutien à la culture des minorités nationales, dans le cadre duquel sont organisés des expositions d’œuvres d’art et des festivals de musique, ont augmenté ces dernières années. Un Centre culturel des nationalités a été ouvert en 2006 à Erevan à l’intention des minorités nationales. Il est meublé et doté d’équipements techniques avec l’appui du Gouvernement.

Les biens de l’église saisis du temps du régime communiste ont été restitués aux communautés religieuses assyriennes des villages d’Arzni et Verin Dwin et à la communauté orthodoxe russe d’Erevan. Les autorités ont apporté un soutien technique à la restauration du cimetière historique juif de Vayots Dzor et à la construction, à Erevan, d’un monument à la mémoire des victimes assyriennes de la première guerre mondiale.

Tous les édifices historiques, culturels et religieux de l’Arménie sont placés sous la protection de l’État, quelle qu’en soit l’origine ethnique ou religieuse. Plus de 50 monuments azéris, turciques et iraniens de diverses provinces en font partie. Les efforts déployés pour promouvoir le respect du patrimoine culturel islamique ont été reconnus par la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance dans un rapport sur l’Arménie rendu public en février 2011. On peut y lire au paragraphe 44 qu’il n’y a pour ainsi dire pas de sentiment antimusulman, et que, par exemple, les nombreux iraniens qui se rendent en Arménie pour y faire des études, des affaires ou du tourisme ne rencontrent pas de difficultés particulières.

L’adoption d’amendements à la Constitution, dans le cadre d’un référendum organisé en novembre 2005, a permis de renforcer l’impartialité du pouvoir judiciaire et d’améliorer l’équilibre des pouvoirs. Les autorités ont appliqué un programme de réformes législatives. Le nouvel article 14.1 de la Constitution dispose que chacun est égal devant la loi et interdit toute discrimination fondée sur le sexe, la race, la couleur, l’origine ethnique ou sociale, les caractéristiques génétiques, la langue, la religion, l’aspect, les opinions politiques ou autres, l’appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance, l’incapacité, l’âge ou toute autre particularité personnelle ou sociale. Les traités internationaux ratifiés par l’Arménie font partie intégrante du système juridique et l’emportent sur les lois nationales. De plus, les personnes physiques ou morales sont habilitées à saisir la Cour constitutionnelle lorsque toutes les voies de recours judiciaires sont épuisées et qu’une décision devenue définitive a été rendue dans une affaire. Le requérant peut contester la constitutionnalité de la disposition juridique invoquée dans cette décision. La Cour constitutionnelle a reçu 295 requêtes de particuliers en 2009.

La réforme de la justice pénale engagée en 1998 est bien avancée. L’adoption, en 2003, du nouveau Code pénal a inauguré une nouvelle phase visant à l’humanisation du système de sanctions pénales et à l’incorporation dans la législation pénale arménienne des bonnes pratiques et des meilleures normes du droit pénal international. L’article 226.1 du Code pénal punit d’une amende allant de 200 à 500 fois le salaire minimum, de deux années au maximum de travail correctif ou d’un emprisonnement de deux à quatre ans les actes qui visent à inciter à la haine ou à l’hostilité nationales, raciales ou religieuses.

Le Code de procédure pénale de 1998 est modifié en tant que de besoin pour être mis en conformité avec les obligations internationales de l’Arménie. L’article 8 interdit la discrimination en matière de droits, de libertés et de responsabilités, pour des motifs tenant à la race, à la couleur, à l’origine ethnique ou sociale, aux caractéristiques génétiques, à la langue, à la religion, à l’idéologie, à l’appartenance à une minorité nationale ou à la naissance.

Le Code des infractions administratives repose sur le principe de l’égalité des citoyens. Ainsi, l’article 248 dispose que l’examen des infractions administratives doit se faire conformément au principe de l’égalité de tous devant la loi, sans distinction fondée sur l’origine, la situation sociale et la fortune, l’appartenance raciale ou nationale, le sexe, l’éducation, la langue, les convictions en matière de religion, la profession, le lieu de résidence ou toute autre particularité.

La loi relative au Défenseur des droits de l’homme est entrée en vigueur le 1er janvier 2004. En vertu de l’article 83.1 de la nouvelle Constitution, l’Assemblée nationale doit élire le Défenseur des droits de l’homme (Médiateur) pour une durée de six ans. L’article souligne que le Défenseur des droits de l’homme est un fonctionnaire indépendant qui protège les libertés et les droits de l’homme violés par l’État et les administrations locales ou les membres de leur personnel. Le Défenseur examine également les plaintes émanant de divers groupes minoritaires. Pendant la période 2004-2009, 24 requêtes lui ont été adressées par les représentants de 11 minorités nationales résidant en Arménie. Le Défenseur a conclu que les violations des droits des intéressés avaient un caractère général et n’étaient pas liées à leur appartenance à une minorité nationale.

L’article 41 de la Constitution dispose que chacun a le droit de préserver son identité nationale et ethnique. Ainsi, les membres des minorités nationales décident librement s’ils souhaitent ou non être traités comme tels. Les autorités arméniennes continuent d’aborder la question yézidie/kurde sur la base du principe de l’auto-identification.

Aux termes de l’article 39 de la Constitution, chacun a droit à l’éducation. L’article 4 de la loi relative à l’enseignement public, adoptée en juillet 2009, spécifie que l’enseignement dispensé aux minorités nationales peut être assuré dans leurs langues maternelles ou nationales s’il s’accompagne d’un enseignement obligatoire de l’arménien. La même loi rend obligatoire l’enseignement général élémentaire. Dans les écoles publiques, l’enseignement secondaire est gratuit. La loi définit les principes de l’autonomie des établissements d’études supérieures. Tout citoyen ayant réussi les épreuves prescrites par la loi a le droit de suivre un enseignement supérieur ou professionnel dispensé gratuitement par les établissements publics. La décision de donner la priorité aux candidats appartenant à des minorités nationales qui ont réussi les examens d’entrée à l’université a sensiblement amélioré leur accès à ces institutions.

En vertu d’un arrêté pris par le Ministère de l’éducation le 21 décembre 2007, les enfants issus de minorités nationales sont admis dans un établissement d’enseignement général où les cours sont donnés dans leur langue nationale ou maternelle, ou dans une école où cette langue est enseignée. Lorsque c’est impossible, le choix de la langue d’enseignement revient aux parents de l’enfant ou à ses représentants légaux. Si les élèves en font la demande, des dispositions peuvent être prises pour organiser un enseignement extrascolaire de la langue minoritaire. Le seuil quantitatif requis pour la création de cours de ce genre est très faible: il suffit de quatre ou cinq élèves.

Quelques minorités nationales vivant en Arménie – Assyriens, Kurdes et Yézidis, par exemple – appellent une attention et une protection particulières parce qu’elles n’ont pas d’État de naissance. Leur intégration enrichit la culture de l’Arménie et, dans le même temps, impose à l’État l’obligation d’assurer la préservation et le développement d’un groupe ethnique qui considère clairement l’Arménie comme sa patrie. Des manuels de langue et de littérature yézidies pour différentes classes ont été publiés ces dernières années et distribués gratuitement aux élèves yézidis. Un abécédaire d’assyrien a été édité en 2007; il est distribué gratuitement aux écoles concernées. Des représentants des minorités nationales sont associés à l’élaboration des manuels de manière à assurer une réponse équilibrée aux besoins spécifiques de ces minorités et leur accès équitable aux ressources disponibles. Conformément au principe d’auto-identification, il a été décidé de rédiger les manuels en langue yézidie dans l’alphabet cyrillique, et les ouvrages en kurde, dans l’alphabet latin. Le Gouvernement encourage également la mise en œuvre de programmes de formation pédagogique à l’intention de membres des minorités nationales.

La politique de l’État dans le domaine du travail est conçue de manière à créer les conditions du plein emploi et de l’efficacité professionnelle. Des mesures sont prises pour améliorer les compétences et accroître la compétitivité des personnes au chômage. Les employeurs sont encouragés à préserver les emplois existants, à en créer de nouveaux et à recruter aux postes vacants des spécialistes familiarisés avec la science et la technologie modernes. Les objectifs et les principes de la législation du travail sont énoncés aux articles 2 et 3 du Code du travail.

Conformément à l’article 5.1 de la loi relative aux ressortissants étrangers adoptée le 25 décembre 2006, les étrangers jouissent en Arménie des mêmes droits, des mêmes libertés et des mêmes devoirs que les nationaux arméniens, sauf disposition contraire de la Constitution, des lois et des traités internationaux ratifiés par l’Arménie.

L’Assemblée nationale a adopté le 24 octobre 2005 la loi relative à l’emploi et à la protection sociale en cas de chômage. Ce texte fixe les principes régissant l’emploi; il garantit une protection sociale aux chômeurs et la liberté de choix du travail et de l’activité professionnelle. Chaque citoyen arménien a le droit de choisir son métier et son travail. Il est interdit de refuser de recruter une personne sans raison. Les nationaux, les étrangers et les apatrides qui résident en Arménie ont le droit de choisir librement leurs activités professionnelles et récréatives. Ils peuvent également choisir librement d’occuper un emploi ou de ne pas travailler, sauf dans les cas définis par l’article 3 de la loi susmentionnée.

Les autorités arméniennes veillent à ce que toutes les couches et tous les groupes sociaux jouissent de chances égales de participer effectivement et sans discrimination à la gestion des affaires publiques.

Depuis toujours, l’Arménie fait tout ce qui est en son pouvoir pour assurer une protection étendue et égale des droits et libertés des demandeurs d’asile et des réfugiés statutaires. La loi relative aux réfugiés et à l’asile adoptée en 2008 est pleinement conforme à la Convention de 1951 et au Protocole relatifs au statut des réfugiés ainsi qu’aux autres instruments internationaux. L’Arménie a toujours eu pour principe d’assurer la pleine intégration des réfugiés. Ceux auxquels elle accorde l’asile bénéficient des services sociaux offerts aux citoyens arméniens, des allocations de l’État et autres soutiens financiers, de l’aide et des soins médicaux gratuitement dispensés par l’État, d’un régime de retraite et du droit à une protection sociale en cas de chômage, à condition de remplir les conditions fixées par la législation arménienne dans le domaine considéré.

Le droit que le Code civil reconnaît à chacun de recourir aux tribunaux pour assurer la protection de ses droits vaut également pour les réfugiés et les demandeurs d’asile. La loi relative aux réfugiés et à l’asile garantit aux demandeurs d’asile dont la requête a été rejetée le droit à une protection judiciaire. En vertu de la loi relative aux taxes dues à l’État, un recours judiciaire contre la décision de rejet peut être formé sans qu’il soit nécessaire de payer de droits. Malgré les efforts immenses qu’elle a déployés au fil des ans pour régler les problèmes de plus de 400 000 réfugiés venus de l’Azerbaïdjan, l’Arménie n’a pas encore pleinement résolu leurs difficultés en matière de logement. Le Gouvernement se préoccupe également des déplacements de population dus au conflit du Haut-Karabakh et à l’activité militaire azerbaïdjanaise à la frontière de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan.

Le Gouvernement a décidé d’organiser une conférence internationale de bailleurs de fonds à Erevan le 17 mai 2011 afin de collecter les ressources financières nécessaires pour offrir des logements définitifs au dernier groupe de familles de réfugiés (1 500 environ) qui vivent encore dans des hébergements provisoires. Le HCR sera représenté à la conférence.

Depuis que l’Arménie a accédé à l’indépendance, en 1991, la garantie de la liberté de pensée et de conscience, et en particulier la prévention de toute forme de discrimination fondée sur la religion et les convictions, y ont sensiblement progressé. La loi sur la liberté de conscience et les organisations religieuses, adoptée en 1991, autorise les minorités nationales et les communautés religieuses à pratiquer leur religion nationale ou autre, et à constituer des organisations religieuses. Le nombre des organisations religieuses inscrites comme personnes morales dans les registres arméniens est passé de 14 en 1997 à 66 en 2010.

Depuis qu’elle est devenue membre du Conseil de l’Europe, en 2001, l’Arménie s’est engagée à adopter une loi sur les substituts au service militaire, même s’il n’existe pas de norme internationale admise qui prescrive l’instauration obligatoire d’un service de substitution ou qui en fixe la durée.

Le Gouvernement arménien a souvent exprimé son inquiétude au sujet de la propagande et des propos haineux très largement diffusés à son encontre par les dirigeants azerbaïdjanais dans les sphères internationales, y compris lors de la Conférence d’examen de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. Malheureusement, il a trouvé sur le site Internet officiel du Comité des indices de la participation de la société civile à la propagande anti-arménienne, en exécution d’ordres politiques. Des organisations bien connues de promotion des droits de l’homme, dont le Comité lui-même, la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance, le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et le Comité consultatif de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales, ont exprimé la vive préoccupation que leur inspire la chasse aux sorcières menée par le Gouvernement azerbaïdjanais contre les personnes d’origine arménienne et tout ce qui est arménien.

M . Diaconu (Rapporteur pour l’Arménie) rappelle que l’État partie a surmonté dernièrement nombre de difficultés, dont un changement soudain de régime politique, un douloureux conflit qui a fait un nombre considérable de réfugiés et de personnes déplacées, et une période de transition vers un système démocratique et une économie décentralisée. Il lui reste cependant encore plusieurs obstacles à franchir.

Le rapport périodique de l’Arménie évoque des initiatives prises par d’autres États parties, ce qui viole la Convention et est donc inacceptable pour le Comité. L’article 11 de la Convention énonce la procédure à suivre en pareil cas, et les communications présentées au Comité en vertu de cet article doivent l’être dans les formes prescrites. Le Comité n’a pas accepté les allusions de l’Azerbaïdjan laissant entendre qu’un autre État partie ne donne pas effet aux dispositions de la Convention, et il n’admettra de telles allusions d’aucun État partie.

D’après le recensement de 2001, plus de 2 % des 3,2 millions habitants du pays appartiennent à des groupes minoritaires. Le rapport périodique mentionne 11 minorités nationales, mais il ne fournit de données que sur la moitié d’entre elles environ. M. Diaconu sollicite de plus amples renseignements sur les autres minorités. Compte tenu de la diminution spectaculaire, entre 1989 et 1993, du nombre des Azéris vivant sur le territoire de l’État partie, il demande si ces personnes se trouvent toujours en Arménie et, dans l’affirmative, combien d’entre elles sont aujourd’hui devenues ressortissants arméniens. Il serait utile d’en savoir davantage sur leur situation actuelle.

Relevant que le Bureau du Défenseur des droits de l’homme a été créé en 2003 et que la Commission nationale des droits de l’homme a cessé d’exister, M. Diaconu fait observer que de nombreux pays disposent des deux institutions, dont les activités sont complémentaires. Le Comité souhaiterait savoir si le Défenseur des droits de l’homme a hérité de toutes les compétences de la Commission, s’il exerce ces compétences dans la pratique et si l’institution reçoit des ressources suffisantes pour lui permettre de s’acquitter de ses fonctions. Comme la loi instituant le Défenseur des droits de l’homme précise que celui-ci peut aussi publier des rapports extraordinaires sur des questions qui préoccupent l’opinion ou dans l’hypothèse de violations flagrantes ou massives et persistantes des droits de l’homme, il serait intéressant de savoir si le cas s’est jamais produit. Le Comité voudrait avoir des précisions sur les communications faisant état de discrimination raciale reçues par le Défenseur des droits de l’homme et sur les suites qui leur ont été réservées.

M. Diaconu relève que l’État partie a une politique et une législation claires en matière de lutte contre la discrimination fondée sur la race ou sur l’origine nationale ou ethnique, et que la Constitution interdit la discrimination, y compris en raison des caractéristiques génétiques, de l’aspect et de toute particularité personnelle, ce qui répond à certaines des préoccupations du Comité concernant le profilage racial et la visibilité. Toutefois, de nombreux textes relatifs à la justice et à la procédure pénales ont été adoptés depuis 2003, et il est peut-être trop tôt pour évaluer les résultats de leur mise en œuvre. Aussi M. Diaconu encourage-t-il l’État partie à continuer de s’attacher davantage encore à en assurer l’application. S’il est clair que les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme priment sur la législation interne, il serait utile que la délégation expose les affaires dans lesquelles la Convention a été directement invoquée devant les tribunaux arméniens ou devant d’autres autorités de l’État.

M. Diaconu demande quel texte prohibe la ségrégation raciale. Celle-ci n’est pas toujours le résultat de la législation ou d’initiatives de l’État. Elle peut découler du comportement de personnes ou de groupes, parfois sous l’influence de conditions sociales ou économiques; cela est vrai, en particulier, dans les domaines de l’éducation et du logement. M. Diaconu engage l’État partie à prêter attention à toutes évolutions de ce genre, car il a la charge de les prévenir et de les corriger.

Les dispositions du nouveau Code pénal paraissent répondre à toutes les prescriptions de l’article 4 de la Convention, hormis celle ayant trait à l’interdiction des organisations qui incitent à la discrimination raciale ou qui l’encouragent. Dans son article 21, la loi relative aux organisations non gouvernementales fait mention de l’incitation à la violence raciale, mais elle n’interdit ni la propagande raciste, ni l’instigation à la discrimination raciale, ni les organisations qui incitent à la discrimination raciale ou qui l’encouragent. M. Diaconu exhorte l’État partie à réexaminer ces dispositions afin de les rendre pleinement conformes à l’article 4 b) de la Convention, eu égard en particulier aux informations selon lesquelles une organisation politique dénommée l’Union des ariens arméniens aurait appelé à l’expulsion d’Arménie des Yézidis, des Kurdes et des Juifs. Il demande si cette organisation existe toujours; dans l’affirmative, il souhaiterait savoir comment elle est inscrite dans le registre et si ses conditions de fonctionnement ont fait l’objet d’une enquête.

Le rapport périodique ne contient pas de données relatives à l’exercice des droits énumérés à l’article 5 de la Convention réparties par groupe minoritaire ou par région géographique. Il serait utile de savoir combien de représentants de minorités ont été élus au Parlement, combien occupent des postes de responsabilité dans l’administration, la justice, la police et d’autres rouages de l’État aux niveaux central et local, et combien sont membres de partis politiques. Il conviendrait aussi de fournir des données ventilées concernant la situation des minorités dans les domaines de l’emploi, de l’éducation et du logement, et toutes mesures spéciales prises en faveur de groupes désavantagés. M. Diaconu rappelle que la Convention impose l’adoption de mesures spéciales dans certaines circonstances, qui sont analysées dans la recommandation générale no 32 du Comité.

Si les États sont tenus de préserver et de promouvoir la diversité culturelle et les identités culturelles, ils doivent le faire dans le plein respect des libertés et des droits de l’homme fondamentaux. Lorsque des traditions violent ces droits, il doit y être mis fin progressivement. Dans un rapport présenté au Conseil des droits de l’homme (A/HRC/WG.6/8/ARM/1), l’État partie a indiqué que les traditions culturelles empêchaient les communautés yézidie, kurde et russe molokane d’accéder à l’éducation. M. Diaconu demande davantage de précisions quant aux limites exactes apportées par ces traditions à l’exercice des droits et à leur incidence à long terme sur la participation des groupes concernés à la vie publique. Il serait utile de connaître les mesures prises par l’État partie pour modifier cet état de choses.

Dans ses observations finales de 2009 (CEDAW/C/ARM/CO/4/Rev.1), le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes s’est déclaré à nouveau préoccupé par les attitudes patriarcales qui entraînent une subordination des femmes et par les stéréotypes profondément enracinés concernant leurs rôles et responsabilités au sein de la famille et de la société. Il a demandé à l’État partie de prendre des mesures d’urgence, notamment dans les zones rurales. Il a relevé le peu de données et de statistiques recueillies au sujet des groupes de femmes vulnérables, en particulier les réfugiées et les femmes appartenant à des minorités ethniques ou religieuses, qui font souvent l’objet de multiples formes de discrimination, notamment en matière d’accès à l’emploi, aux soins de santé, à l’éducation et aux prestations sociales. Cette double discrimination préoccupe également le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale, comme il l’a indiqué dans sa recommandation générale no 25. Il recevrait avec satisfaction des précisions sur les mesures prises à cet égard.

L’État partie a accueilli un nombre important de réfugiés pendant le conflit de 1993‑1994, et quantité de personnes ont été déplacées. Le Comité aimerait savoir si certaines de ces personnes ne sont pas encore installées et, dans l’affirmative, si elles ont le statut de ressortissants ou de réfugiés.

M. Diaconu demande combien l’État partie compte d’écoles de minorités nationales, quelles langues y sont parlées et combien d’élèves les fréquentent. Le nombre des membres de minorités qui faisaient des études supérieures pendant la période 2004-2009 étant plutôt restreint puisqu’il était de 74, il demande si des mesures positives sont prises pour remédier à cet état de choses. Dans son rapport au Conseil des droits de l’homme (A/HRC/15/9) le Groupe de travail sur l’examen périodique universel a recommandé que l’État partie veille à ce que les enfants appartenant à tous les groupes minoritaires aient un accès égal à l’éducation dans leur langue maternelle; or, il ressort de bon nombre d’informations que les enfants yézidis n’ont ni maîtres qui enseignent dans leur langue maternelle ni manuels rédigés dans cette langue. Certains d’entre eux ne parlant pas l’arménien, ils n’ont pas accès à l’enseignement primaire, et il en est qui passent la période allant d’avril à novembre à travailler auprès de leurs parents dans les pâturages des montagnes. De plus, la question de l’alphabet à utiliser dans les manuels destinés aux élèves yézidis est controversée, et tout cela nuit à la scolarisation de ces enfants et à leur fréquentation scolaire. L’État partie devrait prendre des mesures afin de donner effet à la législation qui prévoit des droits égaux à l’éducation pour tous.

Les membres de la minorité yézidie continueraient à se heurter à des difficultés concernant les terres, l’eau et les pâturages, et certains n’auraient apparemment pas encore acquis de titre de propriété sur leurs terres. M. Diaconu sollicite de plus amples renseignements sur la situation de cette communauté, la privatisation des terres et les mesures prises pour résoudre ces problèmes.

Il apparaît que toutes les minorités nationales reçoivent de l’État le même soutien, quels que soient leur importance numérique et leurs besoins. Il est fort possible que cette pratique repose sur une décision prise par les minorités elles-mêmes; cette décision devrait cependant être réexaminée car elle pourrait être discriminatoire.

M. Diaconu souhaite davantage de précisions au sujet de l’obligation de la radiotélédiffusion publique d’émettre dans les langues minoritaires pendants deux heures hebdomadaires au moins. Il serait utile aussi de connaître les possibilités dont disposent les groupes minoritaires d’exprimer leur identité culturelle, de communiquer dans leur langue et d’avoir accès à leur culture.

Le Comité ayant pour mission de se préoccuper des libertés religieuses lorsque la discrimination dans ce domaine est motivée par l’origine raciale ou ethnique, M. Diaconu accueillerait avec satisfaction des renseignements concernant: a) les restrictions imposées à certaines confessions religieuses; b) les informations selon lesquelles les autorités n’auraient fait aucun cas d’actes de violence contre des minorités religieuses. Il demande si l’étude de l’histoire de l’Église apostolique arménienne est obligatoire dans les écoles et comment l’éducation religieuse est enseignée, en particulier aux enfants issus des minorités et aux enfants étrangers.

Selon plusieurs sources, la suspicion à l’égard des étrangers, le rejet de ces derniers et les idées stéréotypées au sujet des personnes d’origine ethnique différente sont largement répandus dans l’État partie. Dans un monde globalisé, où l’échange de biens et la circulation des personnes sont la norme, ce n’est pas un bon modèle pour l’édification d’une nation, surtout dans le cas d’un petit pays situé dans une région dont l’histoire est marquée par l’animosité et le ressentiment. Il serait intéressant de connaître les mesures prises par le Gouvernement pour encourager la tolérance, la compréhension et le respect d’autrui parmi la population en général et les jeunes en particulier. M. Diaconu voudrait savoir pourquoi la Stratégie nationale de sécurité comprend une section culture consacrée à la préservation de l’histoire, de la culture, des valeurs spirituelles et de l’identité ethnique des minorités nationales: c’est à se demander si les minorités nationales menacent la sécurité de l’État partie.

Compte tenu du manque de données relatives aux cas de discrimination raciale portés devant les tribunaux ou d’autres organes compétents, l’absence de recours ne signifie pas que la discrimination raciale n’existe pas. M. Diaconu demande quelles sont les dispositions prises par l’État partie pour faire connaître au grand public la Convention et les recours internes à la disposition de celui-ci, et pour accroître sa confiance dans la justice. Il voudrait savoir en particulier si les membres de la magistrature, les forces de l’ordre, les avocats et les gardes frontière reçoivent une formation spécifique relative à la législation interne et aux instruments internationaux ayant trait au racisme et à la discrimination raciale.

Les questions frontalières ou territoriales n’entrent pas dans le cadre des compétences du Comite, qui ne s’exprime pas à leur sujet; cependant, le Comité a pour mission d’examiner tout acte illégal comportant une discrimination raciale commis par un Gouvernement ou ses agents sur tout territoire placé, de manière temporaire ou permanente, sous l’autorité de ce gouvernement. Une ONG géorgienne a présenté au Comité des informations concernant des actes de violence, la confiscation de biens et la privation de ressources en eau dans des villages de deux districts géorgiens, qui auraient été commis par les forces armées arméniennes à l’encontre de personnes appartenant à un groupe ethnique de la Géorgie. Les États étant responsables de tous actes de discrimination raciale et de toute violation des droits de l’homme commis par leurs représentants, y compris au-delà de leurs frontières, le Comité souhaiterait entendre les observations de la délégation à ce propos.

L’État partie a une législation hautement complexe concernant l’égalité et la non-discrimination dans tous les domaines. Nombre d’institutions se préoccupent des questions touchant les droits de l’homme et les groupes minoritaires; c’est le cas, par exemple, du Conseil de coordination des minorités nationales, du Défenseur des droits de l’homme, du Département gouvernemental des minorités ethniques et des affaires religieuses, du Centre culturel des nationalités et d’une ONG, l’Union des nationalités. Ces lois et institutions sont pour la plupart relativement récentes et il leur reste à faire leurs preuves. Le fait que l’État partie soit membre de nombre d’organisations et d’organismes de surveillance des droits de l’homme aux niveaux européen et international et qu’il réagisse à leurs préoccupations laisse bien augurer de l’avenir.

M. Avtonomov rappelle qu’il existe des liens étroits entre la Fédération de Russie et l’Arménie en raison du grand nombre d’Arméniens qui résident actuellement dans la Fédération de Russie. Ces liens ont contribué à faire mieux connaître les défis auxquels l’Arménie est encore confrontée et les meilleures manières de les relever. Le Comité se félicite de l’occasion qui lui est offerte de s’informer de l’évolution intervenue en Arménie depuis la présentation de son dernier rapport périodique et de formuler des recommandations pratiques afin de faciliter la mise en œuvre intégrale de la Convention.

Il serait utile de savoir si l’Arménie se propose de ratifier l’amendement à l’article 8 de la Convention ou de faire une déclaration reconnaissant la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications individuelles au titre de l’article 14. Si la déclaration n’est pas contraignante par nature, elle est, au regard de la Convention, une expression de l’attachement des États parties aux droits de l’homme.

Le Comité considère la ratification des instruments internationaux comme une indication du souci qu’a un pays du respect des droits de l’homme et de son désir de renforcer ces droits. Le rapport n’ayant pas fourni de précisions suffisantes à ce sujet, le Comité aimerait connaître exactement les conventions auxquelles l’Arménie est partie dans le cadre de la Communauté des États indépendants, concernant, par exemple, les droits de l’homme, les minorités ethniques, les élections et les droits politiques. Des renseignements supplémentaires au sujet de l’aspect régional de la participation de l’Arménie aux relations internationales seraient également les bienvenus.

La minorité yézidie diffère de la population majoritaire par sa religion et ses origines ethniques. Le Comité a reçu des informations concernant un différend en cours au sujet de l’emploi de l’alphabet latin ou de l’alphabet cyrillique dans l’enseignement et les publications en langue kurde, et souhaite recevoir davantage de renseignements à ce propos. Le Gouvernement devrait apprécier à sa juste valeur la diversité culturelle de toutes les minorités nationales et s’efforcer de protéger leur patrimoine culturel.

En l’absence de données relatives à la population rom en Arménie, le Comité souhaiterait savoir si les Roms font partie des 11 groupes minoritaires cités dans le rapport, s’ils ont quitté le pays entièrement ou si, tout simplement, il n’y a pas de données disponibles. Le Comité s’intéresse tout particulièrement à la situation des Roms parce qu’ils sont victimes de discriminations dans de nombreux pays. Aussi serait-il utile, s’il existe une communauté rom en Arménie, d’avoir une indication de son importance numérique et des mesures adoptées pour sauvegarder ses droits.

Le rapport indique que le Défenseur des droits de l’homme a déjà pris des décisions consécutives à des plaintes de membres des minorités nationales pour violation de leur droit de choisir la langue dans laquelle est dispensé l’enseignement reçu par leurs enfants. Le Comité voudrait connaître la nature de ces décisions; il aimerait savoir si elles sont juridiquement contraignantes et, dans l’affirmative, connaître les mesures prises par l’État partie pour que les autres organismes publics s’y conforment.

Le Comité relève avec inquiétude que le document de base de l’État partie n’est plus à jour et ne rend pas compte des changements intervenus depuis 1995. À propos de la question de la citoyenneté, le Comité accueillerait avec satisfaction des données concernant le nombre des personnes qui demandent à recevoir la nationalité arménienne, leur répartition ethnique et le nombre des arméniens ou des membres d’autres groupes qui reviennent de l’étranger en Arménie. Si les conditions nécessaires à l’obtention de la nationalité n’entrent pas dans le domaine de compétence du Comité, celui-ci souhaiterait être informé des cas où la race ou l’origine ethnique fait obstacle à l’obtention de la nationalité arménienne.

M. Murillo Martínez rappelle la contribution apportée par l’État partie à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, et la part qu’il a prise aux activités préparatoires à la Conférence d’examen de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. À cet égard, le Comité relève avec satisfaction l’élaboration du plan d’action du Gouvernement arménien dans le cadre des suites apportées par lui à la Déclaration et au Programme d’action de Durban. Toutefois, le Comité souhaiterait de plus amples précisions concernant l’incidence du plan d’action sur la lutte contre la discrimination raciale et les progrès d’ensemble réalisés dans ce domaine.

De même, le Comité voudrait connaître le rôle joué par le Département des minorités ethniques et des affaires religieuses créé dernièrement, et sa contribution au plan d’action. Le Comité souhaiterait en outre en savoir davantage sur la procédure suivie par le Département pour présenter des recommandations relatives à l’application du plan d’action et en infléchir la mise en œuvre; il accueillerait avec satisfaction quelques exemples pratiques des progrès réalisés sur le terrain.

M. de Gouttes indique que la France a également des liens étroits avec l’Arménie, de nombreux arméniens étant venus à occuper des postes de haut niveau dans l’administration française.

Le Comité voudrait avoir des renseignements plus détaillés sur l’activité et le rôle effectif du Défenseur des droits de l’homme, ainsi que des exemples des mesures spécifiques prises par son Bureau. À la lumière de la recommandation formulée par le Groupe de travail sur l’examen périodique universel, qui a demandé instamment à l’Arménie de renforcer les ressources à la disposition du Médiateur des droits de l’homme afin que ses services puissent être conformes aux Principes de Paris, le Comité souhaiterait savoir si le Défenseur dispose maintenant de moyens suffisants. De même, il saurait gré à l’État partie de lui fournir des renseignements plus détaillés sur le rôle effectif du Conseil de coordination des minorités nationales ainsi que de l’organisation de la société civile connue sous le nom d’Union des nationalités de la République arménienne.

Si le Code pénal classe tout acte de discrimination raciale dans la catégorie des infractions pénales et en fait une circonstance aggravante, la législation présente encore des incohérences pour ce qui est de l’interdiction des organisations qui incitent à la discrimination raciale ou qui l’encouragent. De plus, l’absence de plaintes et de poursuites relatives à des infractions raciales n’est pas nécessairement de bon augure. Cette situation dénote souvent l’existence de recours inefficaces, le manque d’information des victimes et le caractère excessivement complexe du système juridique. En outre, des difficultés à obtenir des preuves suffisantes pour pouvoir exercer des poursuites, un manque de confiance dans la police ou dans le système judiciaire et des déficiences dans les connaissances des policiers peuvent également expliquer l’absence patente d’infractions racistes dans l’État partie. Le Comité demande que le prochain rapport comprenne des informations substantielles sur le nombre effectif des plaintes adressées au Défenseur des droits de l’homme et sur les suites qui y ont été apportées.

Le Groupe de travail a également recommandé que la protection accordée aux travailleurs migrants et aux réfugiés soit renforcée. À la lumière de cette recommandation, le Comité souhaiterait connaître les raisons précises pour lesquelles l’Arménie n’a pas ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

La séance est suspendue à 16 h 35 ; elle repr end à 17 heures .

M. Kirakossian (Arménie) précise qu’il y avait une communauté azerbaïdjanaise en Arménie avant 1989, mais qu’elle est partie pour l’Azerbaïdjan après les événements de 1988–1989 et l’arrivée en Arménie de quelque 400 000 réfugiés. Les Azerbaïdjanais issus de mariages mixtes continuent de vivre dans le pays, mais aucune statistique ne permet d’en connaître le nombre. M. Kirakossian demande où le Rapporteur pour l’Arménie a obtenu le chiffre de 3 700 Azerbaïdjanais supposés vivre encore dans le pays en 1993.

M me Saratikyan (Arménie) indique que 11 minorités nationales sont présentes en Arménie; elles sont formées d’Allemands, d’Assyriens, de Bélarussiens, de Géorgiens, de Grecs, de Juifs, de Kurdes, de Polonais, de Russes, d’Ukrainiens et de Yézidis.

M. Diaconu déclare qu’il souhaite avoir des données statistiques concernant la totalité des 11 minorités, et non pas seulement les 6 pour lesquelles des informations ont été fournies dans les rapports périodiques de l’État partie.

M me Saratikyan (Arménie) répond qu’il y a dans le pays quelque 3 500 Assyriens, 15 000 Russes, 40 500 Yézidis, 1 500 Kurdes et 1 500 Grecs. Pour les autres minorités, il n’y a pas de données détaillées disponibles mais le recensement national qui doit avoir lieu en 2012 devrait permettre d’en recueillir.

M. Demirtshyan (Arménie) précise que le Bureau du Défenseur des droits de l’homme n’a reçu aucune plainte pour violation des droits des membres des minorités en 2010, mais qu’il suit constamment la situation. Il coopère étroitement avec quelque 30 ONG représentatives des minorités et leur offre également des conseils juridiques. Deux membres d’un conseil d’experts rattaché au Bureau sont des représentants de minorités.

Pour ce qui est de la responsabilité pénale liée à des actes de discrimination raciale, les auteurs d’infractions organisées à motivation raciale ou religieuse peuvent, en vertu de l’article 226 du Code pénal, être condamnés à une peine de prison allant jusqu’à six ans. Ainsi par exemple, le chef de l’Union arienne arménienne, organisation entrée depuis dans la clandestinité, a été condamné à trois années d’emprisonnement et, après avoir purgé une partie de sa peine, il n’exerce plus d’activité. S’agissant des remarques racistes formulées par une personne à Gyumri, il a été constaté que celle-ci n’était pas en bonne santé et qu’elle n’était pas pénalement responsable.

M. Kaprielyan (Arménie) signale que depuis 2002, année où l’État partie a présenté son précédent rapport périodique, aucune infraction à motivation raciale dirigée contre des membres de minorités n’a été enregistrée. Curieusement, le pourcentage des infractions générales commises au cours des quatre années écoulées qui ont été résolues est plus élevé dans les cas où les victimes étaient yézidies que dans les affaires concernant le reste de la population. En 2010, 92 % des affaires intéressant des Yézidis ont été résolues, alors que la moyenne nationale s’établissait aux environs de 85 %. En tout état de cause, les autorités prêtent toujours une attention particulière à toute infraction concernant des minorités.

Passant à la question de la défiance du public à l’égard de la police, M. Kaprielyan fait savoir que celle-ci fait l’objet d’une réforme dont une des priorités est d’accroître la confiance de l’opinion. De plus, une police de proximité, appliquant de nouvelles méthodes, est mise en place progressivement.

M. Kaprielyan admet que quelques cas de discrimination raciale ne sont peut-être pas signalés, mais la police, du haut de la hiérarchie jusqu’aux commissariats locaux, est vigilante. Les chefs de commissariat et leurs adjoints tiennent périodiquement des réunions de district avec les citoyens pour examiner toutes les plaintes qu’ils peuvent avoir, y compris en matière de discrimination.

Les fonctionnaires de la police reçoivent une formation aux droits de l’homme et apprennent à assurer le respect des droits des personnes dans le cadre de leurs fonctions. Depuis 2010, le nombre des heures consacrées aux questions relatives aux droits de l’homme dans les programmes des académies de police a augmenté, et les policiers sont formés à la lutte contre l’intolérance raciale, ethnique et religieuse. Il est à noter que des représentants des minorités, dont des Yézidis, des Russes, des Ukrainiens, des Allemands, des Grecs et des Géorgiens, font partie des forces de police et travaillent d’entente avec leurs collègues arméniens pour lutter contre la criminalité et assurer le maintien de l’ordre.

M. Demirtshyan (Arménie) fait savoir qu’au sein du Ministère de la justice, un institut d’études juridiques offre une formation à la lutte contre la discrimination au personnel pénitentiaire, à celui des tribunaux et à d’autres fonctionnaires employés par le Ministère. De plus, une école extérieure au Ministère forme aux droits de l’homme. Plusieurs juges et procureurs appartenant à la minorité yézidie sont hautement respectés dans leurs domaines respectifs.

M me Saratikyan (Arménie) concède que quelques enfants yézidis d’âge préscolaire vivant dans certaines zones du pays ne parlent pas bien l’arménien, mais cela ne les empêche pas de recevoir une instruction. Tous les enfants ont, au contraire, les mêmes chances de fréquenter l’école et la plupart d’entre eux apprennent bien l’arménien à la fin de leur première année d’études primaires.

M. Demirtshyan (Arménie) indique que la justice n’ayant été saisie d’aucun cas flagrant de discrimination raciale, la Convention n’a jamais encore été invoquée directement par des juges. Toutefois, il est largement admis que si, dans une affaire, les magistrats souhaitent se référer à un instrument international ratifié par l’État partie, ils sont habilités à le faire.

M. Diaconu, clarifiant les questions soulevées précédemment au sujet de la population azerbaïdjanaise en Arménie, renvoie au document de base de l’État partie, daté de 1995 (HRI/CORE/1/Add.57, par. 5 et 6), où l’on peut lire qu’à cette époque, 7 900 Azerbaïdjanais vivaient dans le pays. De plus, dans le rapport périodique qu’il a présenté au Comité en 2000 (CERD/C/372/Add.3), l’État partie affirmait que les Azerbaïdjanais formaient 1 % de la population totale, ce qui correspond à peu près au chiffre que M. Diaconu a cité antérieurement.

La partie publique de la séance est levée à 17 h 30.