Nations Unies

CERD/C/SR.2061

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

5 mars 2012FrançaisOriginal: anglais

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Soixante-dix-huitième session

Compte rendu analytique de la 2061 e séance*

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le lundi 21 février 2011, à 15 heures

Président:M. Kemal

puis:M. Calí Tzay (Vice-Président)

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Dix-neuvième et vingtième rapports périodiques de la Nor vège

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Dix-neuvième et vingtième rapports périodiques de la Norvège(CERD/C/NOR/19-20; CERD/C/NOR/Q/19-20; HRI/CORE/NOR/2009)

Sur l ’ invitation du Président, la délégation norvégienne prend place à la table du Com i té .

M me Aasland (Norvège), rappelant que janvier 2011 a marqué le dixième anniversaire du meurtre de Benjamin Hermansen, adolescent de 15 ans tué en Norvège pour des motifs raciaux, déclare que la lutte contre la criminalité inspirée par la haine d’un groupe et par la discrimination ainsi que la promotion de l’égalité de traitement sont, pour le Gouvernement de son pays, des objectifs prioritaires au même titre que l’avancement des droits de l’homme universels.

Comme les plaintes pour discrimination ont généralement plusieurs motifs, le Gouvernement estime qu’il convient de s’attaquer à la discrimination multiple dans son ensemble et dans toutes les sphères de la société. L’égalité entre les genres est particulièrement importante, car les femmes ont tendance à être davantage frappées par la discrimination raciale que les hommes. Mme Aasland relève que 2 seulement des 18 membres du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale sont des femmes, et exprime l’espoir que ce déséquilibre sera redressé lors des élections à venir.

Le Gouvernement norvégien, le Sámediggi (Parlement sami), le Centre norvégien des droits de l’homme, le Médiateur (la Commission) pour l’égalité et la lutte contre la discrimination et les ONG travaillent de concert pour combattre la discrimination. Le Gouvernement a subventionné l’élaboration, par plusieurs ONG, d’un rapport parallèle lié à son rapport périodique et a financé la participation de cinq représentants d’ONG à la réunion en cours. Le Sámediggi a également été associé à l’établissement des rapports périodiques.

L’État norvégien a été créé sur le territoire de deux peuples, les Norvégiens et les Samis autochtones. Parmi les minorités nationales figurent les Kvènes, les Juifs, les Finlandais de la forêt, les Roms et les Romani; les immigrés constituent 11 % de la population. La société norvégienne n’est pas exempte de préjugés et de xénophobie, mais les autorités s’emploient à les combattre. Les politiques d’intégration reposent sur les valeurs fondamentales de la société norvégienne, qui comprennent la liberté d’opinion et d’expression, l’égalité des genres, l’égalité de traitement, et le droit d’épouser la personne de son choix.

La création du Sámediggi, en 1989, a constitué un jalon dans l’histoire du peuple sami. Financé par l’État, il encourage les initiatives politiques en faveur des Samis et exerce des fonctions administratives. En 2005, le Gouvernement et le Sámediggi sont convenus de rendre obligatoires les consultations entre eux sur les questions relatives aux Samis. Le Gouvernement entretient le dialogue avec les organisations représentatives des minorités nationales; en 2003, il a créé une instance de dialogue entre les autorités centrales et elles.

Le Comité de contact entre les immigrés et les autorités est un organisme consultatif dont les membres sont nommés par le gouvernement tous les quatre ans; un autre comité formé de représentants des immigrés de tous les comtés norvégiens conseille le gouvernement sur les questions qui intéressent ces immigrés.

Les mesures prises par l’État partie pour prévenir la discrimination ethnique reposent principalement sur trois piliers. Tout d’abord, la loi antidiscrimination de 2005 interdit la discrimination pour des raisons tenant à l’appartenance ethnique, à l’origine nationale, à l’ascendance, à la couleur de la peau, à la langue, à la religion ou aux convictions. Ensuite, le Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination surveille la mise en œuvre de la législation destinée à combattre la discrimination et en assure l’application. Chacun peut déposer plainte auprès du Médiateur, qui peut à son tour saisir le Tribunal chargé des questions d’inégalité et de discrimination. Les particuliers peuvent également porter plainte devant les tribunaux civils. Enfin, le Gouvernement a lancé un plan d’action national pour la promotion de l’égalité et la prévention de la discrimination ethnique.

La coopération tripartite entre l’État, les fédérations d’employeurs et les syndicats est importante pour la réalisation de l’égalité de traitement de tous; elle a joué un rôle clef dans l’instauration de l’égalité des genres sur le lieu de travail.

Le Gouvernement et les autorités locales sont chargés d’assurer l’égalité d’accès aux services publics. Les collectivités locales contribuent à la réduction des préjugés et de la xénophobie par l’éducation et le développement des contacts entre personnes appartenant à des groupes différents.

Un des objectifs du plan d’action national pour la promotion de l’égalité et la prévention la discrimination ethnique consiste à améliorer la collecte des données relatives à cette discrimination. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance ayant recommandé que l’État partie surveille de près l’antisémitisme sur son territoire, le Gouvernement finance une étude sur les attitudes à l’égard des personnes juives, du judaïsme et de l’État d’Israël. Menée par le Centre norvégien d’étude de l’Holocauste cette étude, qui doit être achevée en 2012, comprendra également des données relatives aux attitudes envers les Roms et les Musulmans.

M me Hole (Norvège) reconnaît qu’on ne saurait exclure l’existence d’une discrimination structurelle dans le secteur public, sur le marché du travail et dans le domaine du logement; c’est la raison pour laquelle le Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination et le tribunal du même nom ont été créés. Les statistiques relatives aux plaintes traitées par le Médiateur donnent d’utiles indications sur l’étendue de la discrimination. Le Bureau national de statistique a également été invité à collecter des données relatives à toutes les formes de discrimination et d’inégalité.

Il convient de faire la distinction entre préjugés et discrimination. Les autorités norvégiennes défendent le droit à la liberté d’expression au sens des articles 19 et 20 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, et les personnes sont habilitées à exprimer leurs vues, pour déplaisantes qu’elles soient à entendre. Il existe également une différence entre discrimination et absence d’intégration; de fait, l’intégration et la politique de lutte contre la discrimination sont l’avers et le revers d’une même médaille. L’approche multidimensionnelle de la discrimination est un aspect essentiel du mandat du Médiateur et doit être pleinement appliquée dans les initiatives prises pour la combattre.

Les secteurs privé et public sont tenus de s’attacher à assurer l’égalité de traitement et de combattre la discrimination. La loi sur l’égalité des genres, en particulier, s’est révélée être un instrument utile à cet égard, et des principes directeurs sur la marche à suivre pour accroître l’égalité et rendre compte des progrès accomplis ont été élaborés en 2009 par le Gouvernement et ses partenaires sociaux pour être diffusés dans tous les secteurs d’activité et tous les services. L’État partie a pris effectivement plusieurs initiatives pour combattre les préjugés et les inégalités de traitement. Les principes directeurs de la planification nationale destinés à éviter toute retombée inopportune des politiques adoptées ont été mis à jour pour tenir compte des questions relatives à l’appartenance ethnique, au handicap, à l’orientation sexuelle, à l’âge et au genre. Un manuel sur l’obligation de rendre compte des mesures prises pour combattre la discrimination a été élaboré en 2010 à l’usage du secteur public.

Le Ministère de l’administration, de la réforme et des affaires religieuses a conçu des instructions et des systèmes de suivi à l’intention des fonctionnaires, et le portail de la diversité donne des exemples de bonnes pratiques en matière de recrutement, d’environnement professionnel favorable à l’insertion et de lieux de travail multiculturels. La Direction de la gestion publique et de l’administration électronique ainsi que la Direction de l’intégration et de la diversité travaillent ensemble à des programmes de formation et de perfectionnement à l’adresse des cadres et des représentants des salariés, et le Gouvernement procède à l’essai de systèmes raisonnables de quotas pour favoriser l’emploi d’immigrés non occidentaux dans les organismes publics.

L’obligation faite aux 430 municipalités du pays de promouvoir l’égalité et de rendre compte une fois par an des progrès accomplis dans ce domaine est un facteur clef de la propagation de la tolérance et du renforcement de la diversité dans la société norvégienne. Un baromètre de l’égalité des genres à l’échelon municipal a été publié en 2010; il pourrait être élargi pour lutter contre d’autres formes de discrimination. Le forum des usagers du Conseil central des municipalités élaborera des indicateurs de l’égalité et de la discrimination ethnique. Les gouverneurs des 18 comtés norvégiens ont également reçu pour instruction de surveiller les résultats obtenus par les municipalités de leur comté. Un rapport annuel sur les progrès accomplis dans la mise en œuvre du plan d’action pour la promotion de l’égalité et la prévention de la discrimination ethnique sera présenté au Conseil des ministres et au Parlement, et le plan fera l’objet d’une évaluation à mi-parcours. Plusieurs ministères gèrent d’autres plans concernant différents groupes, tel le plan d’action en faveur des Roms.

Mme Hole souligne l’importance des contributions apportées par la société civile, les ONG et le Sámediggi à l’élaboration des rapports périodiques de l’État partie.

En 2013, les femmes des minorités se verront accorder une place de choix dans les célébrations qui seront organisées à l’occasion du centième anniversaire de l’adoption par la Norvège du suffrage universel. L’année suivante marquera le deux centième anniversaire de l’adoption de la Constitution, et les célébrations mettront en exergue la diversité culturelle afin de renforcer l’idée d’une identité norvégienne en évolution.

M . Austad (Norvège) indique que la violence raciste n’est pas un phénomène majeur dans son pays; les autorités s’emploient néanmoins à améliorer la collecte de données relatives à toutes les violences sectaires, qui comprennent les menaces et la détérioration de biens. D’une manière générale, ces infractions sont motivées par la haine de l’appartenance ethnique, de la religion ou de l’orientation sexuelle de la victime. Le Gouvernement suit de près les débats que l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe consacre aux crimes haineux et aux systèmes d’enregistrement de ces infractions.

La police a commencé à enregistrer les actes de violence inspirés par la haine en 2006; un rapport récent indique que le taux moyen annuel de ces infractions, dues pour la plupart à des préjugés raciaux, est demeuré stable entre 2008 et 2010. De toute évidence, ces violences ne sont pas toutes signalées, et lorsqu’elles le sont, il est souvent difficile d’en établir les mobiles précis. Ainsi, des actes de violence entre demandeurs d’asile peuvent être l’aboutissement d’une simple discussion. La police est consciente de la nécessité de s’attacher davantage à lutter contre les violences sectaires et s’intéresse aux méthodes adoptées en Suède et ailleurs.

M me Folkvord (Norvège) précise que le Gouvernement de son pays contribue à fournir aux immigrés les outils dont ils ont besoin pour se familiariser avec la société et la langue norvégiennes, de manière qu’ils puissent participer au fonctionnement et à la vie de la société. Leur participation repose sur le principe de l’égalité de droits, d’obligations et de chances de toute la population. Les immigrés, c’est-à-dire les personnes dont le père et la mère sont nés à l’étranger, forment plus de 11 % de l’ensemble de la population et 27 % de celle d’Oslo.

La politique norvégienne d’intégration repose sur trois stratégies, consistant à placer les immigrés dans une situation qui leur permet d’exercer leurs droits et de tirer le meilleur parti possible des moyens dont ils disposent, à faciliter leur accès à l’emploi, et à créer et soutenir des structures de dialogue avec eux.

Dans la plupart des cas, une bonne connaissance de la langue norvégienne est une condition indispensable pour une participation active à la vie de la société, l’exercice des droits et la mise à profit des possibilités existantes. Le Gouvernement a décidé que les nouveaux arrivants ont le droit et l’obligation de suivre des cours de norvégien et d’études sociales. Les immigrés ont droit, pour la plupart, à trois cents heures d’enseignement gratuit et les municipalités sont tenues de leur garantir, si nécessaire, la gratuité d’heures de cours supplémentaires dont le nombre peut aller jusqu’à trois milles.

Assurer l’emploi pour tous est un pas important sur la voie de la réduction des différences sociales. Comme les réfugiés forment un important pourcentage de la population immigrée, l’accès au marché du travail peut parfois être long. Le Gouvernement a mis en place un dispositif spécial pour permettre aux réfugiés de s’établir rapidement. Un programme à plein temps pour eux et leur famille, d’une durée pouvant aller jusqu’à deux ans, leur permet d’acquérir une connaissance de la société norvégienne et des compétences linguistiques élémentaires, et les prépare à la vie professionnelle et/ou à la poursuite d’études. Le Gouvernement finance ce programme par des subventions accordées aux municipalités. Le lieu de travail offre d’importantes occasions de contacts interpersonnels et constitue par conséquent un espace privilégié de rencontre entre les immigrés et le reste de la population.

Le Gouvernement entretient un dialogue ouvert avec la population immigrée afin de résoudre les problèmes et de mieux comprendre les différents points de vue. Les politiques qui en résultent sont plus efficaces et contribuent à prévenir la discrimination. C’est ainsi qu’un Comité de contact entre les immigrés et les autorités a été mis en place. Le Gouvernement subventionne également les activités d’ONG qui jouent un rôle important dans le dialogue et l’insertion sociale.

Ainsi, par la législation, le financement et l’information du public, le Gouvernement fait en sorte que les immigrés puissent participer et contribuer à la vie de la société sur un pied d’égalité avec le reste de la population. Les efforts d’intégration sont à maints égards le corollaire de la non-discrimination.

M . Megard (Norvège) rappelle que son pays est la patrie de plusieurs minorités nationales au passé immémorial, dont les Samis, qui sont également reconnus comme étant un peuple autochtone. Les processus représentatifs et démocratiques normaux ne répondent pas toujours convenablement aux préoccupations des peuples autochtones et des minorités nationales. Si les différends politiques sont résolus exclusivement par un système de scrutins majoritaires, les minorités sont presque par définition perdantes. Pour qu’un système de gouvernance soit véritablement démocratique, il faut des procédures spéciales de consultation différentiée. Le droit à la participation et à la consultation est un élément central tant de la Convention no 169 de l’OIT relative aux peuples indigènes et tribaux (1989) que de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones.

Le Gouvernement norvégien et le Sámediggi (Parlement sami) se sont accordés en 2005 sur les méthodes de concertation entre les autorités nationales et le Sámediggi. Cet accord, qui a été qualifié dernièrement d’exemple de bonne pratique par le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones, se fonde sur les grands principes suivants: une communication mutuelle précoce des intérêts et des positions préliminaires par le Gouvernement et par le Sámediggi; un espace de dialogue où les représentants du Sámediggi peuvent exposer leurs vues; des efforts de bonne foi pour parvenir à un accord; la consignation par écrit des positions du Sámediggi, en particulier lorsque aucun accord n’a pu être réalisé. Une proposition du Comité sur les droits des Samis tendant à faire fixer par la loi les règles précises du processus de consultation est actuellement à l’étude. Ces échanges de vues ont permis de mieux faire comprendre aux personnels des ministères et des administrations leur obligation de consulter; chaque année, des consultations officielles, qui débouchent pour la plupart sur un consensus, sont organisées à propos de 20 à 30 questions. Le Sámediggi a ainsi pu renforcer sa position en tant que représentant et porte-parole compétent du peuple sami.

En janvier 2011, le Gouvernement a constitué un comité d’experts indépendant chargé d’analyser et d’évaluer les politiques relatives aux Romani, également connus sous le nom de Taters. L’un des objectifs du comité est d’aboutir à une vision partagée des injustices et des abus passés afin de faciliter la réconciliation avec les autorités norvégiennes. Le peuple et les organisations romani ont été étroitement associés à la rédaction du mandat du comité, et trois observateurs assistent à ses réunions.

En juin 2009, le Gouvernement a présenté un plan d’action visant à améliorer la situation des Roms à Oslo. Ce plan a été élaboré en coopération avec plusieurs ministères, la municipalité d’Oslo et les Roms norvégiens vivant dans la capitale. Parmi les mesures concrètes destinées à combattre la discrimination à l’égard des Roms et à améliorer leurs conditions d’existence figurent: un programme spécial d’éducation des adultes placé sous les auspices de la municipalité d’Oslo; un centre d’orientation chargé d’offrir aux personnes et aux familles roms des renseignements et des conseils ainsi que de faciliter l’accès dans des conditions d’égalité au système général de protection sociale; une instance de dialogue entre les autorités et les représentants des Roms; des cours destinés à familiariser les fonctionnaires avec les Roms et leur culture. Les Roms et les Romani sont deux groupes ethniques distincts en Norvège.

En ce qui concerne les droits fonciers au Finnmark et la situation des Samis de l’est, les minorités samie et kvène sont depuis longtemps victimes de pratiques discriminatoires systémiques en matière de propriété des terres. De plus, les Samis de l’est vivent dans une zone limitrophe de la Norvège et de la Fédération de Russie, où des menaces perçues contre la sécurité nationale ont débouché sur des politiques de norvégisation particulièrement rigoureuses. La loi sur le Finnmark de 2005 a offert des mesures compensatoires, reconnaissant officiellement les droits fonciers des populations samie et autres du Finnmark, et transféré aux autorités locales la compétence concernant les terres naguère détenues par l’État. La loi a également créé une commission spéciale chargée d’enquêter sur toutes les revendications foncières au Finnmark.

Certains des principaux incidents ayant débouché sur la perte des droits exclusifs de pêche des Samis de l’est puis des terres d’élevage du renne se sont produits il y a de nombreuses décennies. Un retour à la situation qui régnait au moment de ces événements pourrait avoir pour effet de priver d’autres Samis des droits dont ils jouissent actuellement, si bien que le Gouvernement a des réserves sur une telle manière de procéder. Toutefois, la Commission du Finnmark examinera les revendications foncières des Samis de l’est sur les mêmes bases que celles des autres habitants de la région.

Le Gouvernement apporte une contribution financière au renforcement de la langue et de la culture des Samis de l’est à la faveur d’une coopération transfrontières entre les groupes de Samis de l’est et les autorités de la Norvège, de la Fédération de Russie et de la Finlande. Le musée des Samis de l’est à Neiden sera également un centre important d’échanges culturels ainsi que de revitalisation de la langue et de la culture de ces populations.

M . de Gouttes (Rapporteur pour la Norvège) souligne que – comme la délégation l’a rappelé – l’État partie a connu, ces dernières années, une modification radicale de sa composition démographique, devenant un pays divers et multiculturel, avec les avantages et les risques que cela comporte.

Il salue le respect par l’État partie des dispositions de la Convention relatives aux rapports périodiques et des principes directeurs formulés par le Comité en la matière.

Dans son étude du rapport norvégien, il a pris en considération les nombreux documents diffusés à l’occasion de l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme concernant la Norvège (décembre 2008), le rapport du Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones consacré à la situation des Samis et daté du 7 juillet 2010 (A/HRC/15/37/Add.6), le rapport de la Commission européenne contre le racisme et l’intolérance diffusé le 24 février 2009, les rapports du Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination ainsi que du Médiateur pour les enfants (Norvège), et de nombreux rapports d’ONG.

En ce qui concerne la première partie du rapport, consacrée aux questions soulevées par le Comité dans ses observations finales relatives au précédent rapport de l’État partie (CERD/C/NOR/CO/18), M. de Gouttes constate avec satisfaction que d’importants progrès ont été accomplis sur de nombreux fronts. Toutefois, il souhaiterait un complément d’information sur un certain nombre de points. Ainsi, les donnés démographiques contenues dans le rapport ne renseignent guère sur le nombre des immigrés en Norvège et sur leurs régions d’origine. D’après le rapport de base (HRI/CORE/NOR/2009) et le rapport destiné à l’examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme (A/HRC/WG.6/6/NOR/1), c’est de la Suède, de l’Allemagne, de la Pologne, de l’Iraq, du Pakistan et de la Somalie que proviennent les groupes d’immigrés les plus importants quantitativement. Le nombre des Samis a été estimé à 37 760 en 2007. Le Comité accueillerait avec satisfaction une estimation plus récente, ainsi que des données chiffrées concernant les autres minorités nationales citées dans le rapport destiné à l’examen périodique universel, à savoir, les Juifs, les Kvènes, les Roms, les Romani/Taters et les Finlandais des forêts. D’une manière générale, il espère trouver, dans le prochain rapport de l’État partie, des renseignements plus détaillés sur la composition démographique de la population.

D’après le paragraphe 9 du rapport, la Convention a été incorporée à la loi antidiscrimination mais non à la loi relative aux droits de l’homme, alors qu’ont été incorporés à celle-ci plusieurs autres traités, comme le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels. Le Gouvernement ayant également fait savoir au Conseil des droits de l’homme, en 2010, qu’il ne prévoyait pas d’incorporer la Convention à la loi relative aux droits de l’homme, le Comité craint qu’une primauté formelle à l’échelon national soit déniée à la Convention. M. de Gouttes demande si l’État partie envisagerait d’incorporer la Convention dans sa législation au niveau le plus élevé, comme le demande le Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination.

Selon le rapport, la loi norvégienne ne mentionne pas expressément la race car l’emploi de ce terme pourrait être source de divisions sociales, et la discrimination raciale est englobée dans la discrimination ethnique, qui est interdite. Le Comité estime, cependant, qu’un État partie qui a ratifié un instrument mentionnant spécifiquement la discrimination raciale doit envisager d’employer cette expression afin d’assurer la cohérence voulue.

À propos de l’absence de toute disposition législative expresse réprimant les organisations racistes, l’État partie affirme que ces organisations seraient visées par la disposition qui interdit les actes de discrimination commis en réunion. Il est essentiel, cependant, de faire en sorte que la législation tienne pleinement compte de tous les aspects de l’article 4, alinéa b, de la Convention.

Il semble à M. de Gouttes, à la lecture des paragraphes 23 à 41 du rapport, que peu de progrès ont été faits dans le domaine de la protection des droits des immigrés à la faveur de la nouvelle loi sur l’immigration, entrée en vigueur le 1er janvier 2010. Il paraîtrait au contraire qu’une politique d’immigration plus rigoureuse soit appliquée. Ainsi, les conditions et la durée de la détention préventive des nationaux étrangers qui ne révèlent pas leur véritable identité restent rigoureuses. Ils peuvent être détenus pendant quatre à douze semaines, voire plus longtemps, dans des circonstances exceptionnelles. Les conditions exigées, en particulier des candidats à l’acquisition de la nationalité norvégienne, quant à la connaissance de la langue du pays sont très strictes et ne tiennent pas suffisamment compte de la diversité des groupes minoritaires ni de la qualité des cours de langue dispensés, qui peuvent varier d’une ville à l’autre. De l’avis de M. de Gouttes, les compétences linguistiques requises pourraient être mieux adaptées à chaque situation particulière et évaluées au cas par cas.

C’est aux municipalités qu’il appartient d’assurer l’accès des immigrés, des membres des minorités ethniques et des demandeurs d’asile aux soins de santé; or, elles n’attachent apparemment pas toutes la même importance à cette mission. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance a mentionné un incident survenu en août 2007, au cours duquel les services d’urgence n’ont pas prêté assistance à un immigré de 37 ans. Elle a recommandé que le Gouvernement prenne des mesures pour prévenir la discrimination dans le secteur de la santé et faire en sorte que des services d’interprétation soient disponibles chaque fois qu’il est nécessaire.

Seuls les enfants immigrés titulaires d’un permis de séjour ont accès à l’enseignement secondaire. Ceux qui sont dans l’attente d’une décision concernant l’octroi de ce permis et les demandeurs d’asile dont la demande a été rejetée n’ont donc pas accès aux services éducatifs. M. de Gouttes demande si des mesures quelconques ont été prises en faveur des enfants immigrés, et en particulier des mineurs non accompagnés demandeurs d’asile, y compris ceux qui, âgés de 15 à 18 ans, ne bénéficient plus des services de protection de l’enfance.

Relevant que la Norvège ne s’est pas montrée disposée jusqu’à présent à ratifier la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, M. de Gouttes demande s’il est possible d’espérer que les autorités assouplissent leur position.

Passant à la partie du rapport consacrée à la mise en œuvre des articles 1 à 7 de la Convention, il salue en particulier les mesures prises pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, le plan d’action pour la promotion de l’égalité et la prévention de la discrimination ethnique (2009-2012), la loi antidiscrimination, le renforcement des dispositions du Code pénal visant les propos haineux, le Tribunal pour la lutte contre la discrimination, le Centre norvégien des droits de l’homme, la défense des droits des Samis par le Sámediggi, les méthodes de consultation entre les pouvoirs publics et le Sámediggi, et le Livre blanc sur la politique relative aux Samis.

Le Comité souhaiterait que la délégation expose comment les autorités norvégiennes évaluent la mise en œuvre des mesures suivantes: le plan d’action pour la promotion de l’égalité et la prévention de la discrimination ethnique, le plan d’action de 2009 pour le renforcement des langues samies, le plan d’action visant à améliorer les conditions d’existence des Roms et à intégrer les enfants roms, le plan d’action contre les mariages forcés, le plan d’action destiné à lutter contre les mutilations génitales féminines, et le plan d’action pour l’intégration et l’insertion sociale de la population immigrée.

M. de Gouttes s’enquiert des enseignements tirés des investigations menées par le Bureau national des enquêtes pénales concernant le racisme sur l’Internet, et des résultats des réunions tenues à ce jour par le Comité de contact entre les immigrés et les autorités, créé par le Gouvernement le 1er janvier 2010.

Selon un rapport de l’ONG «Indigenous Peoples Links» et du Centre irlandais pour les droits de l’homme du Département de droit de l’Université du Middlesex, des sociétés multinationales des secteurs du pétrole, du gaz, des minéraux, de la sylviculture et de la pêche installées en Norvège et financées par elle violent les droits des populations autochtones de plusieurs pays, portant atteinte à leur santé, à leur mode de vie et à leurs droits fonciers, ainsi qu’à la qualité de l’eau. Le Gouvernement a déjà pris quelques mesures pour leur faire rendre des comptes. M. de Gouttes demande s’il envisage d’adopter d’autres dispositions, conformément aux engagements contractés par l’État partie en vertu de la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et de la Convention no 169 de l’OIT.

Selon le rapport, aucune date n’est encore fixée pour l’entrée en vigueur du Code pénal civil général de 2005, qui offrira une meilleure protection contre la discrimination raciale. M. de Gouttes aimerait connaître les raisons de ce délai. Un alourdissement des peines est prescrit, y compris en vertu du Code en vigueur, lorsqu’une infraction a des motivations ethniques ou raciales. Le Comité souhaiterait que la délégation expose des affaires précises dans lesquelles des peines plus lourdes ont été prononcées.

Le rapport fait mention d’un arrêt de la Cour suprême, fondé sur le Code pénal civil général de 1902, et rendu le 21 décembre 2007 à l’encontre de l’organisation «Vigrid» reconnue coupable de propos haineux à l’égard des Juifs. M. de Gouttes demande à connaître la peine imposée aux dirigeants de cette organisation.

La Direction de la police nationale et le district de police d’Oslo ont recensé 257 cas de violences sectaires en 2007, dont 209 obéissaient à des mobiles raciaux ou ethniques. M. de Gouttes demande à connaître les actions en justice engagées contre les auteurs.

S’agissant de l’article 5 de la Convention, il salue le projet «sécurité et confiance» lancé par la Direction de la police en 2008, qui vise à instaurer des relations de confiance entre les immigrés et la police. Un espace de dialogue a également été créé au sein de la police, au niveau central comme à l’échelon local. Le Comité souhaiterait que la délégation lui expose les résultats de ces deux initiatives. M. de Gouttes se félicite aussi de la décision d’inciter des étudiants issus des minorités à s’inscrire à l’Institut universitaire de la police ainsi qu’à recevoir la formation professionnelle dispensée au personnel pénitentiaire norvégien.

Parmi les autres mesures dignes d’éloges figurent l’encouragement des personnes issues de l’immigration à participer aux conseils municipaux, aux conseils de comté et aux élections législatives, ainsi que l’adoption, en 2006, de la loi relative à la nationalité norvégienne, qui met fin au pouvoir discrétionnaire de l’administration publique en énonçant clairement les conditions d’acquisition de la nationalité.

M. de Gouttes demande de plus amples informations sur le programme de la deuxième chance, destiné aux immigrés qui n’ont pas réussi à trouver un emploi stable après plusieurs années passées en Norvège. Il relève avec intérêt que les administrations publiques sont invitées à encourager les personnes issues de l’immigration, y compris celles qui ne sont pas d’origine occidentale, à faire acte de candidature aux postes vacants.

La loi sur le Finnmark adoptée en 2005 a mis en place un dispositif destiné à affermir les droits des Samis, y compris celui d’être consultés lors des décisions relatives à la gestion des terres et des ressources naturelles, et d’y prendre part. M. de Gouttes sollicite des renseignements plus détaillés à propos des résultats du plan d’action de 2009 pour le renforcement des langues samies, du Livre blanc sur la politique relative aux Samis et de la coopération entre la Norvège et les États voisins, en particulier la Fédération de Russie et la Finlande, en vue de la protection de la langue et de la culture samies.

En raison de l’augmentation marquée du nombre des demandeurs d’asile, le Gouvernement a pris, en 2008, des mesures destinées à en limiter l’afflux. La Direction de l’immigration a rejeté 60 % des demandes d’asile. La Commission européenne contre le racisme et l’intolérance a exprimé l’inquiétude que lui inspirent certaines méthodes nouvelles, et en particulier le traitement en quarante-huit heures des demandes considérées comme manifestement injustifiées. M. de Gouttes invite la délégation à présenter ses observations au sujet des critiques formulées par la Commission.

D’après le rapport, le Gouvernement se propose d’imposer des conditions plus rigoureuses de connaissance de la langue norvégienne, qui comporteraient notamment l’obligation de passer certaines épreuves, et envisage aussi d’instaurer un nouveau permis de séjour.

Il ressort d’informations sur les conditions d’existence des immigrés publiées en 2008 que les niveaux de leurs emplois et de leur éducation sont inférieurs à ceux du reste de la population. Le Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination indique qu’il en va de même des niveaux de la pauvreté, du logement, de l’accès aux services de protection sociale et aux soins de santé, tout particulièrement dans le cas des réfugiés ainsi que des femmes et des enfants victimes de violences et d’exploitation. Le Médiateur a recommandé la création de centres de crise au bénéfice des femmes victimes d’actes de violence.

Selon le paragraphe 237 du rapport, ce sont surtout les immigrés somaliens et iraniens qui subissent des discriminations.

Le rapport indique également que, depuis la crise économique internationale de 2008, le chômage a augmenté plus vite parmi les immigrés qu’au sein de la population dans son ensemble. Les immigrés en provenance de la partie orientale de l’Union européenne ont été très durement touchés.

M. de Gouttes souhaiterait entendre les observations de la délégation concernant la fréquence élevée des interrogatoires discriminatoires de la police, qui questionne des personnes en fonction de leur origine ethnique apparente, et la mort, en 2006, d’un ressortissant norvégien d’origine nigériane qui avait été arrêté par des agents de police à Trondheim. Il se demande si le nombre des détenus d’origine étrangère sur le territoire de l’État partie pourrait dénoter une discrimination raciale.

Le Comité s’inquiète des informations selon lesquelles des hommes politiques et des célébrités tiennent des propos racistes et xénophobes. Ces propos, qui prétendent répondre à des peurs sécuritaires, font souvent l’amalgame entre immigration, minorités et délinquance, en ciblant les Musulmans, les Juifs, les Roms, les Samis et d’autres minorités.

M. de Gouttes demande des précisions à propos du rapport de la Direction de l’éducation et de la formation relatif au plan stratégique 2007-2009 «Égalité d’accès à l’éducation dans la pratique!». Le Comité accueillerait également avec satisfaction un compte rendu des résultats du projet «Le peuple romani – De l’enfance à l’âge adulte» (CERD/C/NOR/19-20, par. 212), qui vise à offrir des conseils et des formations aux nouveaux enseignants et à améliorer la connaissance que les élèves romani ont de leur propre culture.

Passant à l’article 6, M. de Gouttes reconnaît les progrès accomplis par l’État partie et demande des statistiques précises concernant les plaintes, les poursuites et les procès relatifs à des affaires de discrimination raciale. Il serait intéressant de connaître l’utilisation qui a été faite de la permanence téléphonique créée par le Bureau national des enquêtes pénales en 2004 pour les actes de violence sectaire. Il souhaite également connaître le montant des crédits alloués par le Ministère de la justice aux organisations spécialisées qui ont fourni une aide juridique en 2009 et 2010.

À propos de l’article 7, il se félicite de constater que la presse a son propre code d’éthique et qu’un prix des droits de l’homme est décerné tous les ans à des journalistes. Le Comité accueillerait avec satisfaction de plus amples renseignements sur l’application du code d’éthique.

M. Calí Tzay salue le soutien apporté par l’État partie aux initiatives internationales visant à défendre les droits des peuples autochtones. De plus, la Norvège a exclu de son portefeuille de fonds de pension plusieurs sociétés qui opèrent sur des territoires autochtones d’outre-mer, en raison de l’impact défavorable de certains de leurs projets sur la jouissance des droits des peuples autochtones. Toutefois, il s’inquiète des informations selon lesquelles l’exploitation de ressources naturelles par des sociétés transnationales immatriculées en Norvège continue de nuire aux droits et au mode de vie de peuples autochtones extérieurs à l’État partie.

Ces sociétés ne se conforment pas aux prescriptions en matière de consultation et de consentement en connaissance de cause qui sont contenues dans la recommandation générale no 23 du Comité, dans la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones et dans la Convention no 169 de l’OIT. En particulier, le Comité a reçu des informations selon lesquelles Intex Resources mènerait de vastes activités d’exploitation minière sur les territoires des Mangyans, aux Philippines; Trayenko, filiale de SN Power, financée par des fonds publics norvégiens, projetterait de construire une importante centrale hydroélectrique en territoire mapuche, au Chili; des projets controversés d’extension de barrages sur le Mékong, au Laos, seraient financés par les sociétés norvégiennes Statkraft et Norplan; des activités ayant des répercussions négatives pour les peuples autochtones de l’Amazonie péruvienne seraient conduites par Occidental Petroleum et Repsol, deux compagnies dans lesquelles l’État partie investit par le biais d’un fond spécial.

Aussi M. Calí Tzay souhaiterait-il connaître les moyens législatifs et administratifs dont l’État partie dispose pour empêcher les sociétés transnationales immatriculées en Norvège de prendre des initiatives préjudiciables à la jouissance des droits de peuples autochtones vivant ailleurs qu’en Norvège. Il serait utile de savoir comment l’État partie obtient que ces sociétés rendent des comptes. M. Calí Tzay demande si le Gouvernement envisagerait de mettre en place un mécanisme indépendant de surveillance habilité à recevoir des plaintes de peuples autochtones et à mener des enquêtes pouvant déboucher sur des sanctions que l’État partie serait en mesure de faire appliquer.

M. Avtonomov estime qu’en dépit de l’explication fournie au paragraphe 11 du rapport périodique, il importe que l’État partie incorpore à sa législation la définition de la discrimination raciale contenue à l’article 1er de la Convention.

Si la construction d’un musée des Samis de l’est est un sujet de satisfaction, il convient aussi de prendre des dispositions pour maintenir vivante la culture de cette minorité. Le Comité comprend bien que la question de la propriété des terres sur lesquelles les Samis de l’est font paître les rennes et celle de leurs droits de pêche sont complexes. Il incombe néanmoins au Gouvernement de créer les conditions qui permettront aux Samis de l’est de poursuivre leur existence conformément à leur mode de vie traditionnel. M. Avtonomov souhaite savoir si l’État partie envisagerait de lier la coopération transfrontières relative aux droits des Samis à son activité au sein du Conseil nordique.

Le Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination ayant indiqué que l’accès à des lieux publics comme les restaurants et les campings est systématiquement refusé aux Roms, il demande quelles dispositions l’État partie envisage d’adopter pour empêcher les gérants et les propriétaires de prendre des mesures discriminatoires de ce genre.

M. Calí Tzay (Vice - Président ) prend la présidence.

M. Thornberry aimerait entendre les commentaires de la délégation concernant la proposition d’introduire dans la Constitution une disposition destinée à lutter contre la discrimination, telle qu’elle est exposée dans le rapport du Médiateur pour l’égalité et la lutte contre la discrimination. Il demande si l’État partie est en mesure de traiter les cas de discrimination multiple, puisque la discrimination sexiste et la discrimination raciale ne sont pas placées sur le même plan dans la législation interne.

En sus des arguments invoqués par l’État partie pour ne pas employer le mot «race», qui sont succinctement énoncés au paragraphe 11 du rapport périodique, le Comité a été informé que des suggestions ont été faites tendant à exclure «la couleur» et «la langue» comme motifs de discrimination dans un projet de loi générale contre la discrimination. Quelle que soit la validité des arguments avancés pour ne pas utiliser le terme «race» ces arguments ne valent pas pour la couleur, qui est immédiatement visible et ne comporte pas d’autres connotations. M. Thornberry souhaite que soient éclaircies les intentions précises dans lesquelles l’État partie évite le mot «race». La Convention ne cherche pas à faire des assertions scientifiques ou pseudo-scientifiques concernant la race. L’État partie devrait déterminer si sa politique comporte des lacunes qui pourraient être préjudiciables à diverses catégories de victimes en omettant certaines formes de discrimination du fait qu’il n’emploie pas la totalité du vocabulaire à sa disposition, tel qu’il figure à l’article premier de la Convention.

S’agissant des Samis de l’est, M. Thornberry se demande si la construction d’un musée n’est pas le signe d’un déclin de leur culture, comme le portent à penser diverses communications présentées au Comité. Cette idée se trouve corroborée par des informations qui font état d’un recul général, dans l’État partie, du souhait d’apprendre le sami.

Les membres du Comité des droits de l’homme s’étant accordés sur une première lecture du projet d’observation générale du Comité à propos de l’article 19 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui a trait à la liberté d’expression, M. Thornberry suggère tant à l’État partie qu’au Comité pour l’élimination de la discrimination raciale que le moment est peut-être venu de réexaminer, à la lumière de l’évolution des formes du discours racial, la recommandation générale du Comité concernant l’article 4, qui se rapporte à la violence organisée fondée sur l’origine ethnique. Il importe que les divers fondements normatifs de la liberté d’expression et de l’interdiction des propos haineux soient harmonisés. Il est regrettable que les propos haineux dirigés contre certains groupes de l’État partie soient de plus en plus considérés comme acceptables, mais ce n’est malheureusement pas une évolution limitée à la Norvège. D’une manière générale, les États sont parvenus à un stade dangereux où les propos haineux sont normalisés et deviennent tout simplement banals, et il est à prévoir que les choses ne feront qu’empirer.

M. Diaconu fait siennes les observations formulées par des membres du Comité au sujet du terme «race», ajoutant qu’il est difficile de comprendre les arguments invoqués pour ne pas employer ce mot alors que l’État partie convient que des mesures sont nécessaires pour éliminer la discrimination raciale. La notion de différence raciale reste ancrée dans les esprits sans considération de l’existence effective de races différentes, et c’est la raison pour laquelle le racisme et la discrimination raciale continuent d’exister. De plus, le fait d’exclure de la future loi toute mention de la «couleur» et de la «langue» en tant que motifs de discrimination rendra la loi incomplète au regard de la Convention, car appartenance ethnique et couleur ne sont certainement pas synonymes. Il convient vraiment de veiller à ne pas exclure des groupes de personnes de la protection qu’offrira la future loi.

Le refus de l’État partie d’interdire les organisations qui diffusent une propagande raciste a abouti à la création de plusieurs mouvements de ce genre, et en particulier de groupes qui répandent des messages islamophobes. M. Diaconu demande instamment au Gouvernement de prendre des mesures pour prohiber ces organisations, conformément à l’article 4 de la Convention.

Autres sujets de préoccupation: la situation des réfugiés et des demandeurs d’asile, le fait que les statistiques attestent que le profilage racial n’a pas disparu, et les nombreux cas où l’accès à des lieux publics est refusé à des membres de minorités sans que cela donne lieu à une enquête. Le Gouvernement doit trouver une solution qui permette aux Samis de l’est d’avoir accès à la terre, car c’est un élément fondamental de leur identité culturelle. Il devrait également prendre des mesures pour protéger les cultures des petits groupes ethniques; s’il ne le fait pas, ils disparaîtront, ce qui sera préjudiciable à la diversité culturelle du pays.

M me Crickley a pris note de la préoccupation de la délégation concernant le déséquilibre entre les sexes au sein du Comité, et souligne l’importance de prendre en compte la question de la parité des sexes dans toutes les activités, à l’intérieur des États Membres comme dans le système des Nations Unies.

Même si la Norvège a pris des mesures fructueuses pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, le Comité souhaiterait recevoir de plus amples renseignements sur leurs résultats et leur impact.

Compte tenu de la discrimination institutionnelle que subissent les gens du voyage après avoir été déplacés en vue de l’élimination de la pauvreté, il serait intéressant de savoir comment le Gouvernement projette d’obtenir que les mesures prises pour s’attaquer aux questions de la mutilation génitale des femmes, des mariages forcés, du regroupement familial de partenaires à charge et du hijab ne créent pas une discrimination raciale ou sexiste

Le Comité a pris note des préoccupations relatives à la participation et à la consultation d’organisations des minorités et souhaite savoir comment le Gouvernement soutient les groupes des minorités ethniques nationales et, en particulier, les organisations de ces minorités qui participent à la lutte contre le racisme.

S’agissant de la prise en compte systématique de la problématique du racisme, il serait utile de connaître les dispositions adoptées par le Gouvernement pour s’assurer que le racisme continuera d’être identifié comme tel et sera traité de manière adéquate.

Le Comité relève avec inquiétude le lien établi entre la loi antidiscrimination et l’intégration au sein d’une organisation financée par l’État, étant donné que l’organisation considérée ne semble promouvoir ni la lutte contre la discrimination ni l’intégration.

En ce qui concerne l’importance de l’égalité des chances en matière d’emploi, le Comité aimerait savoir si l’obligation légale qu’ont les employeurs publics et privés de promouvoir l’égalité s’applique non seulement au genre mais aussi à l’appartenance ethnique.

Les conflits qui surgissent entre demandeurs d’asile dans les centres de détention soulèvent la question des conditions d’existence dans ces centres. Ces conflits tiennent souvent au fait que les origines divergentes des demandeurs d’asile ne sont pas prises en compte, et le Comité souhaiterait savoir comment l’État partie s’attache à modifier les conditions d’existence dans ces centres en vue de mettre fin aux conflits.

Le Comité accueille avec satisfaction les plans et les stratégies du Gouvernement destinés à améliorer la situation des Roms en Norvège; il voudrait cependant savoir plus clairement si ces initiatives intéressent seulement certains groupes ethniques et, dans l’affirmative, connaître les mesures prises pour cibler toutes les minorités ethniques nationales.

D’après des informations reçues par le Comité, il suffirait qu’un Rom soit appréhendé parce qu’il mendie dans la rue pour qu’il soit expulsé; le Comité souhaiterait savoir si ces renseignements sont exacts.

S’agissant du différentiel d’impact, sur les vies des populations autochtones, des décisions des autorités norvégiennes en matière d’investissement, il serait intéressant de savoir si le Gouvernement a adopté quelque mesure que ce soit pour s’attaquer à cette question et, dans la négative, s’il envisage de le faire.

Le Comité craint que l’absence du mot «race» dans la loi antidiscrimination signifie que le texte ne tient pas compte du fait que les membres de populations d’origines ethniques diverses n’en sont pas moins des ressortissants norvégiens; il estime que la formulation de la loi doit bien traduire le multiculturalisme de la société norvégienne.

M. Murillo Martínez reconnaît le rôle important joué par la Norvège dans la lutte contre le racisme et sa contribution à la réalisation d’un consensus lors de la Conférence d’examen de la mise en œuvre de la Déclaration et du Programme d’action de Durban. Compte tenu de l’attachement réaffirmé de la Norvège à la lutte contre le racisme, le Comité souhaiterait connaître les activités qu’elle a prévu d’organiser pour célébrer l’Année internationale des personnes d’ascendance africaine, eu égard en particulier à son rôle dans la traite transatlantique des esclaves.

Ayant reçu des informations selon lesquelles la mutilation génitale féminine serait exploitée pour stigmatiser la communauté somalie, le Comité voudrait recevoir des statistiques fiables concernant cette pratique ainsi que des précisions sur la manière dont elles ont été obtenues.

Concernant l’enquête menée à propos du racisme et de la discrimination vécus par la communauté samie, le Comité a été intéressé d’apprendre qu’un Sami sur quatre avait subi, sous une forme ou sous une autre, une discrimination raciale. Le Comité considère cette enquête comme un moyen efficace de mesurer les problèmes posés par le racisme; aussi souhaite-il connaître la fréquence de ces études et savoir si elles portent aussi sur d’autres groupes sociaux victimes du racisme.

La composition ethnique de la population carcérale reflète souvent le racisme et la discrimination raciale. Le Comité accueillerait avec satisfaction des données désagrégées concernant les origines ethniques des prisonniers ainsi qu’un exemplaire des résultats de toutes études nationales consacrées à cette question.

M. Kut demande quelle stratégie spécifique la Norvège a mise au point pour contrecarrer le discours raciste et xénophobe en politique, et en particulier le discours organisé. Le Comité craint que, si l’État partie ne reconnaît pas le caractère indissociable du préjugé et de la discrimination considérés dans leurs rapports avec la liberté d’expression, il se créera des vides juridiques qui feront obstacle à l’élaboration d’une telle stratégie ainsi qu’à d’éventuelles actions judiciaires. De même, le Comité voudrait recevoir des renseignements sur la stratégie appliquée par l’État partie pour combattre le racisme et la xénophobie en ligne.

M. Peter s’inquiète à l’idée que les ONG chargées d’élaborer le rapport parallèle puissent être financées par le Gouvernement. Si les organisations de la société civile ont légitimement le droit de recevoir des fonds, le fait que ceux-ci proviennent du Gouvernement conduit à s’interroger sur leur impartialité. De plus, toutes les minorités ethniques nationales devraient avoir des institutions de la société civile qui les représentent.

Le Gouvernement devrait étudier avec attention les propositions des ONG tendant à mettre un terme aux mutilations génitales féminines, d’autant que le plan d’action pour lutter contre ces mutilations ne deviendra opérationnel qu’à la fin de 2011. Quant à la méthode qui consiste à informer systématiquement les demandeurs d’asile, lors de leur enregistrement, des règles norvégiennes relatives aux mutilations génitales féminines et aux mariages forcés, le Comité craint vivement qu’une fois signée la déclaration indiquant que ces règles ont bien été comprises, les mutilations puissent continuer d’être pratiquées librement. Il s’inquiète aussi du manque de données pertinentes.

Le fait que le consentement d’un parent ou du représentant légal soit requis pour l’orientation et l’examen génital proposés à des groupes ciblés de filles signifie qu’il ne peut y avoir aucune intervention des pouvoirs publics avant que cette orientation ou cet examen aient eu lieu. Il conviendrait de placer davantage l’accent sur la prévention, car la Norvège pourrait facilement devenir un sanctuaire pour les parents ou les représentants légaux désireux de perpétuer une pratique traditionnelle qui a été interdite dans leur pays d’origine.

M . Lindgren Alves fait observer que l’absence du mot «race» dans la loi antidiscrimination pourrait découler de la volonté d’utiliser une terminologie politiquement correcte. Toutefois, le fait que le nom du Comité et l’intitulé de la Convention contiennent le terme «racial» a déjà rendu celui de «race» politiquement correct, ce qui conduit à s’interroger sur la réticence de la Norvège à le faire figurer dans sa loi antidiscrimination, d’autant que le Comité a déjà fait une recommandation dans ce sens.

Que l’expression «couleur de la peau» soit absente d’une définition de la discrimination raciale est encore moins souhaitable, eu égard en particulier au consensus auquel le Comité est parvenu au sujet de son inclusion. Il a été établi que l’expression «appartenance ethnique» n’englobe pas tous les aspects et qu’elle devrait être complétée par les termes «couleur de la peau» et, idéalement, les mots «race» et «langue».

M me Aasland (Norvège), répondant aux observations relatives à l’absence du mot «race» dans la loi antidiscrimination, indique que le Gouvernement a, à ce sujet, la même position que la société civile. La volonté d’effacer l’idée que les populations peuvent être divisées en fonction de critères biologiques sous-tend la lutte menée contre le racisme en Norvège. Le législateur a souhaité éviter le terme «race» étant donné que, dans le cadre de la loi antidiscrimination, la discrimination raciale est assimilable à la discrimination ethnique. C’est là une question complexe, dans laquelle interviennent la sémantique, la science et la politique.

À la connaissance de la délégation norvégienne, les questions relatives à la citoyenneté, à la naturalisation et à la politique d’immigration n’entrent pas dans le cadre des compétences du Comité et devraient donc être exclues du débat.

Les statistiques relatives aux minorités nationales sont sensibles par nature et ne sont pas largement diffusées. On estime que le nombre des Samis vivant en Norvège est compris entre 40 000 et 80 000, tandis qu’il ne reste plus que 50 Samis de l’est. Le musée des Samis de l’est contribuera à préserver le patrimoine culturel de ce peuple.

Si la Constitution de 1814 contenait des dispositions discriminatoires à l’égard des Juifs et des Jésuites, cela fait longtemps qu’elles ont été éliminées. Le Gouvernement norvégien attache une grande importance au niveau auquel les nouvelles dispositions sont incorporées à la législation nationale, et prend au sérieux la persistance d’éléments discriminatoires dans les lois. La bataille contre le racisme ne peut pas être gagnée par le seul moyen de la législation. Tout doit être fait pour encourager à la fois le grand public et la société civile à combattre toutes les formes de discrimination.

La séance est levée à 18 h 5.