CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/SR.15759 avril 2003

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑deuxième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1575e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le mardi 18 mars 2003, à 10 heures

Président: M. DIACONU

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième à dix‑septième rapports périodiques de la Tunisie (suite)

Seizième et dix‑septième rapports périodiques du Ghana (suite)

_______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l’une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d’édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

La séance est ouverte à 10 h 15.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Projet de conclusions du Comité concernant les treizième à dix‑septième rapports périodiques de la Tunisie (suite) (CERD/C/62/draftCO/14, document distribué en séance, en anglais seulement)

1.Le PRÉSIDENT invite les membres du Comité à poursuivre l’examen paragraphe par paragraphe du texte du projet de conclusions concernant les treizième à dix‑septième rapports périodiques de la Tunisie.

Paragraphe 8 (suite)

2.M. YUTZIS propose de supprimer le terme «additional» à la première ligne, où il est dit que l’État partie n’a pas fourni d’informations additionnelles sur la population berbère.

3.M. AMIR rappelle qu’à la séance précédente il a évoqué les Berbères comme étant une composante de la population et qu’il conviendrait de les distinguer d’une manière ou d’une autre du reste de la population.

4.M. LINDGRENALVES, qui partage l’avis précédent, suggère que le Comité recommande dans ce paragraphe qu’une attention accrue soit accordée aux Berbères en tant que communauté spécifique.

5.M. ABOUL‑NASR préférerait que les membres du Comité cessent de distinguer les Berbères du reste de la population. Il serait certes souhaitable qu’une attention accrue leur soit accordée, mais comme à toutes les autres communautés.

6.M. THORNBERRY propose la formulation suivante, qui pourrait satisfaire à la fois M. Amir et M. Aboul‑Nasr: [The Committee] «recommends that an increased attention be given to the situation of Berbers as a specific component of Tunisian population» (Le Comité recommande qu’une attention accrue soit accordée à la situation des Berbères en tant que composante spécifique de la population tunisienne).

7. Le paragraphe 8, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 9

8.M. HERNDL propose, dans la dernière phrase, de supprimer le terme «its» avant «General Recommendation», et de remplacer «crimes», à la dernière ligne, par «offence», qui est le terme utilisé à l’article 4 de la Convention.

9.M. YUTZIS propose de remplacer, à la première ligne du paragraphe, la formulation «The Committee is not satisfied with any State party’s assertion», qui lui paraît un peu ambiguë, par «The Committee does not accept any State party’s assertion».

10. Le paragraphe 9, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 10

11.M. ABOUL‑NASR, appuyé par M. THORNBERRY et M. LINDGRENALVES, propose de supprimer la mention qui est faite de la discrimination indirecte, laquelle ne relève pas véritablement du droit pénal.

12.M. HERNDL propose, dans la deuxième phrase, d’insérer avant le mot «absence» le terme «mere», à l’effet d’indiquer que la simple absence de plaintes et de poursuites peut traduire une méconnaissance des recours juridiques disponibles.

13.M. de GOUTTES pense qu’il faudrait compléter cette deuxième phrase pour préciser que l’absence de plaintes et de poursuites peut résulter non seulement d’une méconnaissance par les victimes de leurs droits ou de l’absence d’une législation pertinente, mais aussi de l’insuffisante attention apportée par les autorités à l’exercice des poursuites.

14.Le PRÉSIDENT estime qu’il n’y a pas lieu d’expliquer la raison de l’absence de plaintes car le Comité ne peut que formuler des hypothèses à ce sujet, et il propose de supprimer purement et simplement la deuxième phrase du paragraphe.

15.M. SICILIANOS considère, comme M. de Gouttes, que des explications s’imposent, ne serait‑ce que pour des raisons pédagogiques. Il importe que les États sachent quelle est la position du Comité.

16.Après un nouvel échange de vues auquel participent M. de GOUTTES, le PRÉSIDENT, M. LINDGRENALVES, M. PILLAI, M. ABOUL‑NASR et M. YUTZIS, il est proposé de remplacer la deuxième phrase par le texte suivant: «The Committee reminds the State party that the mere absence of complaints and legal action by victims of racial discrimination may be mainly an indication of the absence of relevant specific legislation, a lack of awareness of available legal remedies or the insufficient will by the authorities to prosecute.» (Le Comité rappelle à l’État partie que la simple absence de plaintes et d’actions en justice peut signaler principalement l’absence de lois spécifiques pertinentes, une méconnaissance des voies de recours légales disponibles ou une volonté insuffisante des autorités de poursuivre.).

18. Le paragraphe 10, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 11

19.M. HERNDL propose de remplacer, au début du paragraphe, le membre de phrase «The Committee notes the lack of concrete information» par «The Committee notes that no concrete information was provided.» (Le Comité note qu’aucune information concrète n’a été fournie.).

20.Le PRÉSIDENT propose de remplacer les mots «aucune information concrète» par «des informations insuffisantes».

21. Le paragraphe 11, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 12

22.Le PRÉSIDENT estime que le début de la deuxième phrase, où le Comité indique qu’il adresse la même recommandation à tous les États parties, n’a pas lieu d’être, et il propose de le supprimer. La deuxième phrase commencerait donc par les termes: «The Committee encourages Tunisia.» (Le Comité encourage la Tunisie.).

23. Le paragraphe 12, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 13

24.M. KJAERUM suggère que le Comité prenne comme modèle la Déclaration et le Programme d’action de Durban pour formuler ce paragraphe, et remplace le membre de phrase «invites the State party to consider the possibility of making such a declaration» par «urges the State party to consider making such a declaration» (invite instamment l’État partie à envisager de faire cette déclaration).

25.M. ABOUL‑NASR, appuyé par M. TANG, est opposé à ce que l’on modifie le texte, car le Comité l’a déjà adopté et utilisé par le passé. Par ailleurs, le caractère facultatif de la déclaration doit selon lui transparaître dans le texte de la recommandation.

26.M. de GOUTTES suggère, afin de tenir compte de l’observation de M. Aboul‑Nasr, d’évoquer dans le premier membre de phrase le caractère facultatif de la déclaration et de retenir pour le second le libellé proposé par M. Kjaerum.

27.M. YUTZIS estime que le libellé du paragraphe 75 du Programme d’action de Durban, dans lequel les États sont vivement engagés («urged») à envisager de faire la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention, répond aux vœux de tous et est adapté à la situation.

28.M. RESHETOV juge pour sa part que le terme «urged» est trop fort pour désigner un acte facultatif, et il craint que certains pays l’acceptent mal.

29.M. KJAERUM rappelle que ce sont les États qui ont adopté par consensus la Déclaration et le Plan d’action de Durban et qu’il serait donc logique que le Comité fasse sienne la formulation qui y figure à propos de la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention.

30.M. ABOUL‑NASR reste opposé au texte proposé par M. Kjaerum; il accepterait néanmoins un libellé qui reprendrait les termes du paragraphe 75 du Programme d’action de Durban, moyennant l’insertion du mot «optional» (facultatif).

31.Le PRÉSIDENT dit que, compte tenu des modifications proposées au cours du débat, le texte qui sera utilisé à l’avenir chaque fois qu’il y aura lieu est le suivant: «The Committee notes that the State party has not made the optional declaration provided for in article 14 of the Convention, and urges the State party to consider the possibility of making such a declaration.» (Le Comité, notant que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention, lui demande instamment d’étudier la possibilité de faire ladite déclaration.).

32. Le paragraphe 13, ainsi modifié, est adopté.

Paragraphe 14

31.Le PRÉSIDENT fait observer que le paragraphe 14 est le nouveau paragraphe type, qui a été rédigé conformément à la proposition de M. Herndl, dans lequel le Comité recommande vivement aux États parties de ratifier les amendements à l’article 8 de la Convention, adoptés le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvés par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. Il ajoute que si ce paragraphe était adopté, il serait inséré dans les conclusions du Comité concernant la mise en œuvre de la Convention dans les États parties qui n’ont pas encore adopté lesdits amendements. En l’absence d’objection, il considère que le paragraphe 14 est adopté.

32. Il en est ainsi décidé.

Paragraphes 15 et 16

33. Les paragraphes 15 et 16 sont adoptés.

Paragraphe 17

34.M. PILLAI soulève la question de la périodicité de la présentation des rapports et de la tendance qui se fait jour au sein du Comité à demander aux États parties, dans ses conclusions, de présenter plusieurs rapports en un seul et même document, à une date ultérieure.

35.Le PRÉSIDENT fait observer que le Comité ne serait matériellement pas en mesure d’examiner un à un les rapports en retard des États parties et qu’il faut donc tenir compte de cette contingence de temps. Il estime que lorsque le Comité achève l’examen du rapport d’un pays présenté en retard et que, selon les règles en vigueur, le rapport périodique suivant doit être présenté dans un délai de moins de deux ans, il conviendrait d’en repousser l’examen, qui ne permettrait pas de toute façon de juger de l’évolution de la situation. Examiner un à un les rapports de la Tunisie obligerait le Comité à examiner le dix-huitième rapport de ce pays avant janvier 2004, ce qui ne semble pas présenter un grand intérêt, d’où la nouvelle échéance fixée à janvier 2006.

36.Le Président propose donc de généraliser cette nouvelle pratique et de demander systématiquement aux pays qui se trouvent dans cette situation de présenter leurs deux rapports suivants en un seul et même document, dans un délai de deux ans suivant la date prévue pour la présentation de leur prochain rapport.

37. Il en est ainsi décidé.

38. L’ensemble du projet de conclusions du Comité concernant les treizième à dix ‑septième rapports périodiques de la Tunisie est adopté, tel qu’il a été modifié.

Seizième et dix-septième rapports périodiques du Ghana (CERD/C/431/Add.3) (suite)

39. Sur l’invitation du Président, la délégation ghanéenne reprend place à la table du Comité.

40.M. SHAHI rend hommage au Gouvernement ghanéen pour la qualité de ses seizième et dix-septième rapports périodiques, dans lesquels il a su reconnaître les difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de la Convention. Il se félicite en outre de ce que le Gouvernement s’est doté d’une Commission des droits de l’homme et de la justice administrative, implantée dans toutes les régions par le biais de ses 89 bureaux, dont le but principal est de permettre à tous les Ghanéens d’avoir accès aux mécanismes chargés de les protéger contre la discrimination raciale. Il ajoute que les efforts du Gouvernement ont été récompensés puisque, sur les 9 265 plaintes reçues par la Commission en 2000, une quarantaine seulement concernaient des faits de discrimination, et moins de cinq portaient directement sur des actes de discrimination raciale. Il prend note également du fait que, dans la quasi‑totalité des cas, les plaignants étaient satisfaits de la justice rendue. Il lit au paragraphe 110 du rapport que la législation nationale ne remplit pas les conditions énoncées aux paragraphes a), b), c) et d) de l’article 4 de la Convention, et juge de ce fait très encourageant que le Ministère de la justice procède actuellement à une révision du Code pénal. Il encourage l’État partie, dans le cadre de sa nouvelle législation, à se doter de moyens qui lui permettent de s’acquitter pleinement des obligations énoncées aux alinéas a, b, c et d de l’article 4, et à veiller à ce que la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative ait toute latitude pour faire appliquer cet article.

41.Mme JANUARY‑BARDILL se félicite elle aussi de la qualité du rapport présenté par le Gouvernement ghanéen. Notant que, d’après une enquête menée en 1997, 25 % des personnes interrogées estimaient faire l’objet de discriminations en raison de leur origine tribale, elle aimerait disposer d’un complément d’information, en particulier sur la façon dont ces discriminations se manifesteraient. Les personnes concernées peuvent‑elles citer des actes précis de discrimination ou ressentent‑elles d’une manière générale le poids des préjugés?

42.Mme January‑Bardill relève dans le rapport une contradiction entre l’article 97 qui mentionne les «rares fois où il y a eu des incidents de nature raciale» et l’article 98 qui signale qu’il y a eu «plusieurs milliers de morts dans le nord du pays». Elle se demande ce qu’il en est en réalité et si la délégation peut apporter des précisions à ce sujet. Elle voudrait en particulier savoir quelles sont les causes profondes des conflits tribaux et par quels moyens le Gouvernement entend mettre un terme à ces conflits ainsi qu’aux problèmes de chefferie qui éclatent occasionnellement, à part les mesures administratives décrites aux paragraphes 94 à 106.

43.MmeAKUAAKUFFO (Ghana) dit que la délégation ghanéenne a consulté les ministères concernés pour répondre le mieux possible aux questions qui lui ont été posées. Elle indique donc que les tribunaux et la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative sont habilités à octroyer des réparations, en matière civile, en cas de violation de l’article 17 de la Constitution. Celles‑ci peuvent prendre la forme d’une indemnisation, d’une réintégration, d’une rétractation ou d’excuses. Si un employeur étranger crache sur un employé ghanéen ou profère des propos racistes à son égard, le recours peut aboutir à une action en responsabilité dirigée contre l’employeur, qui peut être condamné pour violences.

44.Il n’existe pas de statistiques concernant le système de bourses d’études en faveur du nord, mais celui-ci fonctionne depuis de nombreuses années sur une base universelle, ce qui explique que de nombreuses personnes occupant des postes de responsabilité en ont bénéficié. Toutefois, en raison de la pauvreté, certaines personnes n’en ont pas profité comme elles auraient pu, d’où le taux élevé d’illettrisme dans le nord du Ghana. C’est pourquoi la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative a consacré une partie de son programme à l’éducation axée sur la valorisation des capacités humaines et le développement des communautés.

45.L’équipe permanente pour les négociations a été créée dans le cadre du conflit opposant les Konkombas et les Nanumbas et dissoute à la suite du changement de régime. En ce qui concerne la crise de Yendi (dans la région de Dagbon), le Gouvernement a lancé un certain nombre d’initiatives impliquant les chefs traditionnels de plusieurs régions du Ghana extérieures à la zone du conflit, ainsi que le PNUD et une ONG, dans l’espoir de résoudre ce problème. Sur le terrain, le Conseil de sécurité régional a pris le relais, assisté du Conseil de sécurité de district. Le Gouvernement a donc mis en œuvre des moyens interculturels et multiculturels pour gérer le problème.

46.Le Gouvernement s’est rendu compte des effets négatifs des programmes d’ajustement structurel sur les groupes pauvres de la population, qui ne parvenaient pas à éliminer les inégalités de revenu. En conséquence, il a introduit le Programme d’action visant à atténuer les coûts sociaux de l’ajustement − qui n’a pas donné de meilleurs résultats en matière d’éradication de la pauvreté − puis de nouvelles initiatives telles que le document de stratégie pour la réduction de la pauvreté au Ghana, auquel les parties prenantes ont été associées en créant des emplois, des richesses, et en réduisant la pauvreté. En outre, le Fonds commun des assemblées de district est chargé de traiter les dossiers relatifs aux projets de développement prioritaire identifiés par les districts eux-mêmes. Les fonds alloués à ces projets proviennent d’initiatives en faveur des pays pauvres très endettés, et leur versement est laissé à la discrétion des districts en fonction des priorités qu’ils accordent aux différents programmes.

47.M. SHORT (Ghana) dit que, depuis sa création en 1993, la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative a dû saisir les tribunaux dans 70 affaires pour obtenir l’application de ses décisions. Environ 90 % des décisions de la Commission ont été confirmées et sept ont été annulées. Il rappelle que les décisions de la Commission sont contraignantes et ont force exécutoire. La Commission ne traite pas les affaires qui sont pendantes devant les tribunaux ni celles qui ont fait l’objet d’une décision de justice. Elle peut demander réparation ou intenter une action en tant que tiers intervenant (amicus curiae).

48.MmeAKUAAKUFFO (Ghana) indique que les instances compétentes ont conscience des lacunes de la législation interne relative à l’application de l’article 4 de la Convention et qu’elles en tiendront compte dans le cadre de la révision globale du Code pénal en cours.

49.Les dispositions de la Constitution relatives à la haine raciale n’ont jamais été invoquées devant les tribunaux aux fins d’interdire une organisation car aucune organisation ne s’est jamais comportée de la sorte au Ghana.

50.La Constitution exige que les régions et ethnies soient représentées équitablement au sein du Gouvernement. Ce dernier s’est non seulement acquitté de cette obligation constitutionnelle, mais a en outre nommé des partisans d’autres partis politiques à des postes ministériels et autres postes élevés dans la fonction publique. Tous les partis politiques doivent être représentés dans toutes les régions afin d’avoir un caractère national et non ethnique. Le respect de ces dispositions par le Gouvernement favorise l’harmonie raciale et prouve que le NPP est un gouvernement réellement national. En outre, tous les Ghanéens, où qu’ils résident dans le pays, jouissent des droits civils, politiques, économiques et culturels énoncés à l’article 5 de la Convention. Les données relatives au taux d’alphabétisation ventilé selon l’appartenance ethnique ne sont pas actuellement disponibles mais figureront dans le prochain rapport périodique du Ghana.

51.Les systèmes d’héritage patrilinéaire et matrilinéaire sont traditionnellement appliqués dans le nord et dans le sud du pays. Dans le premier cas, les biens sont transmis par le père; dans le deuxième, la transmission s’effectue des oncles aux neveux, ce qui exclut les veuves et les enfants du défunt. Une loi a cependant été votée en 1985, qui permet aux veuves et aux enfants de bénéficier d’une part substantielle de l’héritage.

52.La représentante reconnaît en outre que les veuves sont soumises à des rites coutumiers cruels, pourtant interdits par la loi. Les victimes s’y soumettent parce qu’elles sont convaincues qu’ils font partie intégrante de leur culture. Comme ces faits ne sont pratiquement jamais dénoncés, toute enquête est très difficile. Les autorités ont par conséquent décidé de mettre l’accent sur l’éducation et l’information afin de sensibiliser la population sur l’illégalité de ces rites coutumiers; des ateliers ont été organisés et des pièces de théâtre ont permis d’informer les femmes, de manière ludique, de leurs droits.

53.S’agissant de la pratique du «trokosi» (par. 47), Mme Akua Akuffo explique que ce système d’esclavage sexuel est une pratique profondément ancrée dans la culture de certaines régions reculées du pays et ne donne quasiment jamais lieu à des plaintes, ce qui oblige la Commission à intervenir de sa propre initiative (par. 47). De même, le faible nombre de poursuites engagées contre les personnes responsables d’avoir pratiqué des mutilations génitales féminines s’explique par le fait que ces actes ont lieu dans le plus grand secret depuis l’adoption d’une loi interdisant ce type de pratique, bien souvent avec le consentement des victimes, et qu’ils sont donc difficiles à détecter. Étant désormais informées de la gravité, de la dangerosité et de l’illégalité des mutilations, les jeunes filles ont tendance à émigrer vers les villes du sud du pays où elles ne se pratiquent pas. Des efforts sont déployés pour que des poursuites puissent être intentées contre les personnes qui pratiquent les mutilations génitales.

54.S’agissant du statut des réfugiés au Ghana, Mme Akua Akuffo indique que son pays accueille des réfugiés originaires du Libéria, de la Sierra Leone, du Togo et du Tchad depuis 10 ans. Depuis la crise en Côte d’Ivoire, en septembre 2002, le Ghana a reçu de nouvelles vagues de réfugiés ivoiriens. Selon les derniers chiffres disponibles, le Ghana compterait quelque 41 000 réfugiés répartis dans quatre camps établis en coopération avec le Haut‑Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR). Les réfugiés ne sont pas tenus de rester dans l’enceinte des camps. Au contraire, ils se déplacent librement à l’extérieur, et certains ont même acquis des terres, construit des maisons et ouvert de petits commerces, profitant de la loi qui autorise les étrangers à acheter des parcelles de terre à titre de concessions renouvelable tous les 50 ans.

55.La représentante explique que les mesures prises récemment par le Gouvernement afin d’améliorer l’hygiène dans les camps de réfugiés, notamment celui de Buduburam, ont permis de s’apercevoir que les deux parties au conflit en Côte d’Ivoire recrutaient des réfugiés dans ces camps pour les enrôler dans leurs forces armées. Le Ghana est utilisé par le HCR comme un centre de sélection des réfugiés d’Afrique occidentale en vue de leur réinstallation aux États‑Unis et au Canada. Le Ghana n’établit pas de distinction entre les réfugiés sous mandat du HCR et les réfugiés enregistrés. Ceux qui ont choisi le Ghana comme deuxième ou troisième pays d’asile n’ont jamais été expulsés.

56.Mme Akua Akuffo indique par ailleurs que la partie du rapport de son pays (par. 104) qui évoque le ressentiment éprouvé par «de nombreux Ghanéens à l’encontre des Nigérians, en grande partie parce que le Nigéria a expulsé 1 million de Ghanéens en 1983» sera supprimée car elle est inexacte. Elle nie qu’il y ait eu des violences contre les Nigérians vivant au Ghana et que la situation reste tendue, et affirme au contraire que les Nigérians vivent en paix et en harmonie avec les Ghanéens.

57.S’agissant de savoir comment les médias traitent les questions de discrimination ethnique, le Gouvernement et l’Association des journalistes ont adopté conjointement des principes directeurs concernant la couverture du conflit du district de Yendi, qui interdisent notamment les propos haineux à l’égard de tout groupe, la publication d’informations dégradantes, ainsi que toute propagande. Les journalistes eux‑mêmes ont également adopté leurs propres directives générales concernant le reportage des incidents de ce type.

58.Les ONG ont effectivement participé à la rédaction du rapport à l’examen. Le 18 mars 2002, un atelier a été organisé pour en présenter le projet de rapport aux ONG, aux partis politiques et aux médias. Ce projet de rapport a été mis à la disposition de toutes les personnes et entités intéressées.

59.Mme Akua Akuffo indique en outre que, bien que les dispositions de la Convention n’aient pas été spécifiquement incorporées dans la législation ghanéenne, elles peuvent être invoquées par les tribunaux nationaux, comme cela s’est souvent produit pour d’autres instruments internationaux ratifiés par le Ghana.

60.La citoyenneté ghanéenne s’acquiert par naissance, par ascendance (si l’un des parents ou grands-parents est ou était citoyen ghanéen, ou s’il s’agit d’un enfant trouvé au Ghana, né de parents présumés Ghanéens), par adoption, à condition de ne pas être âgé de plus de 16 ans, par décret parlementaire, par mariage et par naturalisation.

61.Par ailleurs, le Gouvernement ghanéen compte examiner attentivement les dispositions de l’article 14 de la Convention et des amendements à l’article 8. Des informations sur ce point figureront dans le prochain rapport.

62.S’agissant des résultats concrets auxquels ont permis d’aboutir les mesures administratives prises pour éviter les conflits au Ghana, la représentante indique que, grâce à leur présence sur l’ensemble du territoire national, les conseils de sécurité de district et de région sont en mesure de prévenir les conflits raciaux et ethniques graves. En outre, des émissions sont également diffusées à la radio et à la télévision sur les conséquences graves des conflits ethniques, y compris dans les langues locales.

63.Des mesures ont par ailleurs été prises pour réduire les disparités enregistrées en matière d’éducation entre les zones urbaines et les zones rurales, notamment en incitant les enseignants à accepter des postes en zone rurale. Des établissements scolaires ont été créés dans les zones reculées du pays, et il a été créé dans chaque district des établissements d’enseignement secondaire modèles dans lesquels des quotas d’admission sont réservés à des élèves des communautés locales ou rurales.

64.M. SHORT (Ghana) explique que la Commission nationale de l’éducation civique est chargée d’informer l’opinion publique de tous les aspects de la Constitution et ds droits de l’homme, tandis que la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative doit instruire la population dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales. Il est vrai que leurs tâches se chevauchent quelque peu et qu’il faudra à l’avenir mieux coordonner leurs activités.

65.Selon les derniers chiffres disponibles, la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative a traité, en 2001, 279 cas relatifs à la garde d’enfants, 69 cas de privation du droit à l’éducation, 512 cas de violence conjugale, 74 cas de détention arbitraire, 30 cas de harcèlement sexuel, 54 cas de viols, et 77 cas de discriminations et de persécutions.

66.Répondant aux questions sur le traitement des plaintes présentées par des personnes analphabètes, M. Short explique que tous les bureaux régionaux de la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative disposent de fonctionnaires formés qui prennent note des plaintes exposées oralement. Ils relisent ensuite aux intéressés le procès-verbal ainsi dressé et le leur font signer. Si les plaignants ne savent pas signer de leur nom, l’empreinte de leur pouce est apposée au bas du procès-verbal. La Commission dispose également de services d’interprétation pour les non-anglophones, et les services juridiques sont gratuits. Toutefois, la Commission n’est pas habilitée à mener des enquêtes criminelles, lesquelles sont du ressort des institutions chargées de la sécurité et, plus particulièrement du Procureur général. M. Short regrette de ne pas être en mesure d’apporter d’informations précises sur les cinq cas de discrimination raciale examinés par la Commission. Il précise toutefois qu’un de ces cas concernait un employeur malaisien qui avait craché sur un travailleur ghanéen. L’affaire a été résolue par la voie diplomatique et cet employeur a quitté le pays.

67.M. Short reconnaît qu’il peut exister des objections au mariage de personnes qui n’appartiennent pas à la même ethnie mais souligne que ces cas sont rares. La discrimination indirecte existe en effet au Ghana, même si celle-ci n’est pas spécifiquement énoncée dans la législation. Des mesures ont été prises pour prévenir ce type de discrimination.

68.La Commission des droits de l’homme et de la justice administrative participe à l’élaboration des textes de lois en soumettant des rapports au Parlement. Elle est également habilitée à présenter des points de vue critiques sur les projets de loi. En coopération avec les organisations non gouvernementales, elle a commencé à élaborer le plan national d’action requis en vertu des engagements pris par les États à la Conférence mondiale contre le racisme. Elle a aussi participé à des manifestations telles que le séminaire régional africain organisé à Nairobi en septembre 2002 pour assurer le suivi de la Conférence. Par ailleurs, la Commission a enquêté en toute liberté sur des affaires de discrimination impliquant des fonctionnaires. 50 à 60 % des dossiers traités concernaient des licenciements abusifs et trois ministres ont démissionné en 1995 à la suite d’accusations de corruption corroborées par l’enquête de la Commission. Celle‑ci n’a pas de cellule spéciale de lutte contre la discrimination, faute notamment de ressources humaines et financières. Au demeurant, les chiffres disponibles en matière de discrimination raciale ne justifieraient pas pareille dépense. La Commission publie un rapport annuel qui est diffusé au niveau local et international, ainsi que des rapports relatifs aux inspections qu’elle fait dans les prisons ou à des pratiques telles que le trokosi. Ces publications seront bientôt diffusées sur Internet. Enfin, la Commission a invité les chefs religieux et d’autres chefs traditionnels à des ateliers consacrés aux droits de l’homme, dans le but notamment de lutter contre certaines coutumes et pratiques oppressives encore vivaces dans différentes régions du pays.

69.MmeAKUAAKUFFO (Ghana) explique qu’outre l’anglais, qui est la langue nationale, les principales langues vernaculaires sont enseignées dans les écoles primaires et secondaires. À Accra et à Ajumako, l’Institut des langues encourage leur étude.

70.En matière législative, la Constitution établit que les sources du droit ghanéen sont le droit législatif, la common law et le droit coutumier, très important en matière de droit foncier, de succession et de mariage. S’agissant des règles coutumières, les tribunaux ne les appliquent que pour autant qu’elles soient conformes à la Constitution.

71.Mme Akua Akuffo fournit des éléments d’information postérieurs à l’établissement du dix‑septième rapport périodique. Les violations des droits de l’homme commises alors que le pays n’avait pas de régime constitutionnel n’étant pas passibles de poursuites, le Gouvernement ghanéen a mis en place une commission de réconciliation nationale sur le modèle de la Commission sud-africaine de vérité et de réconciliation, qui a pour mission non de punir les coupables mais d’aider les victimes à se faire connaître et à obtenir réparation.

72.Le Gouvernement a aussi institué un ministère chargé des femmes et des enfants, que les pratiques et attitudes traditionnelles et la pauvreté touchent tout particulièrement. Un fonds de développement doté de 21 millions de cedis a été créé pour octroyer des microcrédits aux femmes, et une campagne a été lancée pour combattre le travail forcé des enfants.

73.Mme Akua Akuffo précise que les affrontements qui ont eu lieu dans le nord du pays en 1994‑1995 ont fait des centaines et non des milliers de morts, comme il est indiqué par erreur au paragraphe 98 du rapport périodique.

74.M. de GOUTTES aimerait avoir des exemples des pratiques traditionnelles combattues par les autorités ghanéennes.

75.M. YUTZIS relève l’importance reconnue par les autorités ghanéennes au rôle que jouent les lacunes de l’éducation dans les difficultés auxquelles se heurte l’édification d’une société exempte de discrimination raciale au Ghana et demande ce qu’elles comptent faire à cet égard.

76.M. AMIR aimerait savoir si le VIH/sida frappe le Ghana autant que d’autres pays africains et si les autorités organisent des cours d’éducation sexuelle à l’intention des enfants.

77.MmeAKUAAKUFFO (Ghana) donne comme exemple des coutumes combattues par les autorités le rite qui veut que la veuve mange, assise à même le sol, dans une calebasse. Une autre coutume veut que les filles soient excisées avant le mariage. En matière d’éducation, les autorités œuvrent avec un certain succès à doter les zones rurales d’écoles meilleures, notamment au niveau secondaire. Les violations des droits de l’homme, le fléau de la guerre et la discrimination sont constamment dénoncés à la télévision et à la radio, y compris en langue vernaculaire. Pour traiter les conflits interethniques latents, les autorités cherchent à impliquer dans la recherche de solutions les chefs traditionnels, mieux placés pour comprendre l’incidence des coutumes. S’agissant du VIH/sida, le Ghana, qui n’est pas épargné par ce problème, a mis en place un programme national axé sur la prévention. Une tâche importante consiste à démentir les idées fausses largement répandues concernant la transmission de la maladie. Ce travail se fait en coopération étroite avec les organisations non gouvernementales. Dans les écoles, des ateliers sont organisés pour sensibiliser les enfants au sida et aux autres maladies sexuellement transmissibles. Ainsi, l’éducation sexuelle, qu’elle se fasse dans les écoles, par la voie des médias ou sous forme de théâtre de rue, est chose courante au Ghana.

78.M. PILLAI (Rapporteur pour le Ghana) remercie la délégation de l’excellent rapport périodique qu’elle a présenté au Comité et des explications supplémentaires qu’elle lui a fournies au cours de son examen. Il souhaiterait que certains points soient développés à l’occasion de la présentation du prochain rapport périodique du Ghana: la jouissance effective des droits énoncés dans la Constitution et la législation ghanéennes, le rôle que les institutions et les pratiques traditionnelles peuvent jouer dans la sensibilisation des populations aux droits de l’homme, les pratiques oppressives qu’il convient de combattre, les programmes d’éducation et de sensibilisation, les activités de la Commission des droits de l’homme et de la justice administrative, les activités des institutions mises en place après la rédaction du dix-septième rapport périodique (Commission nationale de réconciliation et Ministère de la femme et de l’enfance), le travail des enfants et la diffusion des rapports concernant l’application des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (y compris dans les langues vernaculaires).

79. La délégation ghanéenne se retire.

La séance est levée à 12 h 45.

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