NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.176416 août 2006

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1764e SÉANCE

tenue au Palais des Nations, à Genève,le jeudi 3 août 2006, à 15 heures

Présidence: M. de GOUTTES

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Quinzième et seizième rapports périodiques du Yémen

La séance est ouverte à 15 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Quinzième et seizième rapports périodiques du Yémen (CERD/C/YEM/16; HRI/CORE/1/Add.115; liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement))

1. Sur l’invitation du Président, la délégation yéménite prend place à la table du Comité.

2.Le PRÉSIDENT souhaite la bienvenue à la délégation yéménite et l’invite à présenter les quinzième et seizième rapports périodiques du Yémen.

3.M. ABDULLAH (Yémen) dit que le Yémen est fermement déterminé à appliquer les instruments relatifs aux droits de l’homme auxquels il est partie, en particulier la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, et qu’il a réalisé des progrès substantiels dans leur mise en œuvre. Après la réunification du pays en 1990, un système de gouvernement multipartite et démocratique a été choisi par le peuple moyennant des élections libres. Depuis, les activités politiques se sont intensifiées dans le pays grâce au droit de réunion et d’association garanti à chacun par la Constitution, et les organisations non gouvernementales et les syndicats se sont multipliés. Le Gouvernement a accordé une attention prioritaire aux droits de l’homme et aux libertés publiques, ce qui est déterminant pour le maintien d’un régime véritablement pluraliste et démocratique servant les intérêts de la société. Un large éventail d’activités de promotion des droits de l’homme ont été menées sur les plans national, régional et international. En particulier, le Ministère des droits de l’homme a collaboré avec le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme en vue d’inclure des questions relatives aux droits de l’homme dans les cours de formation des fonctionnaires de la police, des journalistes et du personnel judiciaire. Des activités de sensibilisation aux droits de l’homme ont également été menées à l’intention des travailleurs sociaux s’occupant de mineurs délinquants, d’enfants des rues, d’enfants victimes de la traite ramenés au Yémen après avoir été exploités dans d’autres pays et de personnes âgées ou handicapées. Chaque année, une journée des droits de l’homme est célébrée et, à cette occasion, plusieurs manifestations sont organisées et des brochures d’information publiées. Le Yémen compte actuellement 75 associations de promotion des droits de l’homme.

4.Par ailleurs, le Gouvernement s’emploie activement à renforcer l’indépendance du système judiciaire et à le moderniser et, dans certains gouvernorats, des tribunaux pour mineurs ont été mis en place. La législation yéménite a été entièrement passée en revue afin de la rendre conforme aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme que le Yémen a ratifiés, dont la Convention.

5.Au cours des années récentes, toute une série de manifestations et d’événements se rapportant aux droits de l’homme ont eu lieu au Yémen. Ainsi, en 2004, la ville de Sanaa a été proclamée capitale de la culture arabe et un séminaire y a été organisé sur le dialogue entre les cultures et les civilisations. La même année, des conférences ont été organisées sur les femmes ainsi que sur la démocratie et le rôle de la Cour pénale internationale, et le Cabinet des ministres a donné son aval à l’adhésion du Yémen au Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes. En 2005, un nouveau recensement général de la population a été lancé et le troisième plan quinquennal de réduction de la pauvreté pour 2006-2010 a été adopté. En outre, un comité a été chargé d’établir une nouvelle réglementation en matière d’asile et de mettre au point un programme national de réforme dans ce domaine. Enfin, des élections présidentielles ainsi que des élections des membres des conseils nationaux doivent se tenir tout prochainement au Yémen.

6.M. AL-HAWIRI (Yémen), répondant à la première question de la liste des points à traiter concernant la composition de la population yéménite, dit qu’il n’existe pas de groupes raciaux au Yémen. Il ne nie pas l’existence d’un groupe «marginalisé» ou «vulnérable» mais précise que ce dernier n’est pas reconnu dans le recensement général de 2004 comme une catégorie spécifique de population. Sont considérées comme appartenant à ce groupe les personnes de race noire, lesquelles sont généralement employées comme domestiques. Elles sont présentes dans toutes les régions du pays, en particulier dans les provinces de l’ouest. Bien que les conditions de vie de ces personnes se soient considérablement améliorées depuis une dizaine d’années, leur niveau d’éducation demeure très bas, le taux d’analphabétisme dans ce groupe dépassant de loin la moyenne nationale, soit 27 %. D’après une étude réalisée par le Centre yéménite des affaires sociales et de l’emploi, le taux d’analphabètes chez les personnes marginalisées atteint près de 50 % à Sanaa et Aden, le pourcentage de personnes achevant la scolarité primaire atteignant à peine plus de 10 % et le nombre de titulaires d’un diplôme universitaire s’établissant respectivement à 5 % et 2 % dans ces deux villes. Ces chiffres s’expliquent par le manque de ressources, le fort taux de reproduction et la conscience insuffisante chez les parents appartenant à ce groupe de la nécessité de scolariser leurs enfants.

7.Pour ce qui est du niveau de vie des personnes marginalisées, une étude réalisée en 2001 sur l’accès au logement et à la propriété foncière montre qu’en moyenne environ 80 % d’entre elles sont propriétaires de leur logement − qu’elles ont obtenu de leur famille par succession ou rachat. La principale source de revenus de ces personnes est un travail rémunéré. Toutefois, seule la moitié des personnes en âge de travailler ont un emploi (généralement dans la sylviculture ou les services de nettoyage), ce qui signifie que le taux de chômage est passablement élevé dans ce groupe. Néanmoins, sa participation électorale est forte: lors des élections de 1999, le taux de participation de cette catégorie de personnes s’est établi entre 80 % et 90 %.

8.Répondant dans l’ordre aux questions posées à son pays, dans la liste des points à traiter, M. Al‑Hawiri dit qu’il n’est pas possible de donner d’exemples d’affaires judiciaires dans lesquelles la Convention aurait été invoquée car le Yémen n’établit pas de statistiques judiciaires. Il indique par contre que le Yémen a pris une part active à toutes les activités organisées dans le cadre de la Conférence de Durban. Soucieux de donner une suite concrète à cette initiative, il a inclu une stratégie nationale de protection des droits de l’homme dans le troisième plan quinquennal adopté récemment. Le Ministère des droits de l’homme, qui est l’autorité compétente en la matière, discute de cette question avec le Haut‑Commissariat aux droits de l’homme.

9.Le représentant du Yémen dit que la volonté d’aider les plus démunis qui anime le pays s’exprime dans de nombreuses mesures ou activités, par exemple, le régime universel de protection sociale, les services de planification familiale, le fonds de soutien pour le secteur de la pêche et de l’agriculture ainsi que le fonds social pour le développement, les programmes d’alphabétisation, l’appui aux organisations de la société civile, les centres de formation à l’intention des plus pauvres ouverts à Sanaa et à Aden ou la hausse des crédits budgétaires alloués à la réinsertion sociale. L’amélioration des conditions de vie globales et l’insertion des groupes marginalisés sont des missions majeures du Ministère des affaires sociales et du travail et du Haut Conseil de la maternité et de l’enfance, qui travaillent dans ces domaines en coopération avec l’UNICEF. La société civile se mobilise elle aussi dans ce sens. À titre d’exemple, un projet entrepris à l’initiative de la société civile avec le soutien de l’État a permis de créer 46 logements destinés à accueillir des personnes marginalisées dans un quartier appelé depuis «Quartier de l’espoir».

10.Des commissions interministérielles ont été créées avec pour mandat de réviser l’ensemble de la législation afin de la mettre en conformité avec les instruments internationaux ratifiés par l’État, notamment la Convention. L’une de ces commissions, créée en 2002, a publié plusieurs décrets à l’effet d’éliminer de l’ordre juridique interne toute discrimination à l’égard des femmes, et les recherches se poursuivent dans le cadre de cette entreprise. De la même manière, les travaux en faveur de l’enfance menés sous l’égide du Haut Conseil de la maternité et de l’enfance ont débouché sur la publication de 14 décrets portant modification de textes de lois relatifs à l’enfance. Il est à noter à ce sujet que le Yémen figurait parmi les premiers États qui ont signé la Convention relative aux droits de l’enfant.

11.Pour l’heure, le Ministère des droits de l’homme est la principale institution chargée de veiller au respect des droits de l’homme en général et du décret de 1993 sur l’amélioration de la protection des droits de l’homme en particulier. Des travaux préparatoires, notamment des cycles de formation d’experts, sont en cours en vue de la création d’une institution de défense des droits de l’homme véritablement indépendante, conformément aux Principes de Paris.

12.Le représentant du Yémen signale aux membres du Comité qu’ils pourront trouver dans les quinzième et seizième rapports périodiques une longue série de mesures visant à donner effet aux dispositions de la Convention, y compris à son article premier. Tel est l’objet du décret d’application de la loi sur la presse et les publications, qui appelle à lutter contre toute haine raciale, tribale, etc. Le Code pénal rend les actes d’incitation à la dérision ou à la provocation à l’encontre d’un groupe passibles d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans, assortie d’une amende. La Constitution consacre l’égalité de traitement de tous les citoyens en droits et en devoirs, et de très nombreuses associations œuvrent à sensibiliser la population à ces droits et devoirs. Le représentant signale en outre que la loi de 2001 régissant les relations avec les organisations de la société civile est considérée comme l’une des meilleures et des plus modernes du monde arabe et consacre le principe de la non‑intrusion de l’État dans les activités de la société civile.

13.Le Yémen est partie à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et à son Protocole de 1967. Des commissions rattachées aux autorités compétentes ont été créées pour accorder le statut de réfugié dans le strict respect des définitions figurant à l’article premier de ces deux instruments. Sept centres et camps de réfugiés, mis sur pied en coopération entre le Gouvernement et le Haut‑Commissariat pour les réfugiés, accueillent essentiellement des personnes originaires de la corne de l’Afrique (Éthiopie, Érythrée, Somalie). Le plus grand compte environ 60 000 réfugiés et le plus moderne comporte une école et bénéficie d’une assistance alimentaire du Programme alimentaire mondial. Les réfugiés jouissent d’une totale liberté de circuler dans les camps, entre eux et sur le reste du territoire. Des activités peuvent leur être proposées en fonction de leurs compétences professionnelles.

14.Les phénomènes de la traite des êtres humains et du trafic d’enfants sont apparus tout récemment au Yémen, sous l’effet de la pauvreté. Même si les cas étaient peu nombreux, les pouvoirs publics ont immédiatement réagi. Ainsi, le Ministère de l’intérieur a adressé à tous les gouvernorats frontaliers une circulaire énonçant des mesures pour éradiquer le phénomène et poursuivre les coupables en justice, et le Ministère de la justice a lui aussi pris une circulaire demandant aux tribunaux de punir plus sévèrement les coupables de tels faits. Par ailleurs, en coopération avec des ONG et des institutions internationales, l’État s’efforce de prendre en charge les victimes et de les réinsérer dans leur foyer familial. Des recherches élaborées sur ce sujet ont été réalisées par le Ministère des affaires sociales et de l’emploi. Les efforts actuels tendent à créer des centres d’accueil aux frontières, à moderniser les centres d’accueil existants et à améliorer le contrôle des déplacements transfrontaliers.

15.En ce qui concerne le droit des non‑ressortissants d’acquérir la nationalité sans discrimination, plusieurs textes de lois et décisions du Conseil des ministres ont d’ores et déjà été adoptés en vue de mettre la législation yéménite en conformité avec les normes internationales, y compris la Convention. Les observations du Comité à ce sujet seront dûment prises en considération.

16.En réponse à la question de la liste des points à traiter tendant à savoir si le groupe ethnique minoritaire Al‑Akhdam bénéficie des services sociaux de base, M. Al‑Hawiri réaffirme que tous les citoyens sont égaux en vertu de la Constitution et de la législation nationales.

17.M. Al‑Hawiri dit que l’analphabétisme, qui est essentiellement lié à des facteurs socioéconomiques, demeure un problème préoccupant au Yémen. Cela étant, le Gouvernement accorde toute son attention à la question et a adopté en 2005 un plan quinquennal visant à réduire de 20 % le nombre d’analphabètes dans le pays dès 2010 et à aider les plus pauvres, en particulier les femmes des zones rurales, à acquérir des compétences de base pour trouver un emploi sur le marché local. Dans ce domaine, les autorités yéménites travaillent en étroite collaboration avec les ONG.

18.Le Yémen envisage de lever prochainement sa réserve à l’égard de l’article 5 de la Convention. Il n’a pas ratifié mais simplement signé la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. En tout état de cause, il a ratifié un grand nombre de conventions extrêmement importantes relatives aux droits de l’homme, parmi lesquelles 29 conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT), dont 8 conventions fondamentales.

19.Toutefois, ajoute l’orateur, la délégation yéménite ne dispose d’aucune information sur le nombre et la nature des cas de discrimination raciale qui auraient été portés devant les tribunaux. Le Ministère des droits de l’homme a été saisi d’un certain nombre de plaintes qui sont essentiellement liées à des discriminations sur le lieu de travail n’ayant pas de rapport avec l’origine raciale ou ethnique. Il a procédé à des enquêtes et effectivement constaté qu’un petit nombre de travailleurs avaient été victimes de discrimination. Il a demandé aux autorités compétentes de prendre les mesures voulues pour accorder réparation aux travailleurs lésés.

20.L’appareil judiciaire a été entièrement restructuré ces dernières années afin d’accroître son indépendance et de renforcer la coopération entre les institutions judiciaires pour leur permettre de mieux s’acquitter de leurs fonctions. Des efforts ont été également déployés pour améliorer la formation des avocats et rendre les magistrats plus redevables de leurs actions.

21.M. Al‑Hawiri indique enfin que le rapport dont le Comité est saisi est fondé sur un document élaboré par le Ministère des droits de l’homme en étroite coopération avec les ONG nationales qui œuvrent pour les droits de l’homme. D’une manière générale, le Yémen a désormais pour pratique de consulter autant que possible la société civile dans le cadre de l’élaboration de ses politiques et de la rédaction de ses rapports destinés aux organes conventionnels.

22.M. BOYD (Rapporteur pour le Yémen) note avec satisfaction que l’État partie s’acquitte avec diligence de ses obligations, s’agissant de la présentation de rapports aux organes conventionnels. Il se félicite que le Yémen ait réalisé des progrès notables dans le domaine des droits de l’homme et ait ratifié plusieurs instruments fondamentaux relatifs aux droits de l’homme. En outre, il ressort clairement du rapport que les autorités yéménites accordent beaucoup d’attention aux observations et suggestions des organes conventionnels de l’ONU.

23.M. Boyd constate que le Yémen fournit des informations très générales mais reste muet sur des questions essentielles pour le Comité, en particulier sur la composition ethnique de la population, la situation socioéconomique des communautés ethniques et la participation des groupes marginalisés à la vie politique. Le Comité est conscient des maigres ressources dont dispose l’État partie pour collecter des données ventilées sur la composition démographique du pays mais souligne qu’en l’absence de telles données, il lui est difficile d’évaluer comment le Yémen s’acquitte de ses obligations au titre de la Convention. D’une manière générale, le Rapporteur exhorte la délégation à fournir au Comité des renseignements plus précis et concrets sachant, par exemple, que l’État partie affirme que sa législation est pleinement conforme à l’article premier de la Convention mais ne fournit aucun élément à l’appui de son affirmation. Il sera ainsi utile au Comité de savoir si le Yémen a intégré dans sa législation interne des dispositions expresses interdisant la discrimination fondée sur la race et l’origine nationale, conformément aux articles 1er et 2 de la Convention.

24.M. Boyd accueille avec scepticisme les affirmations du Yémen selon lesquelles il n’y a pas de discrimination raciale dans le pays. Il souhaite par exemple savoir si le Ministère des droits de l’homme a étudié de près la situation des groupes d’origine africaine, tels que les Éthiopiens, les Somalis et le groupe ethnique Al-Akhdam.

25.Concernant l’application de l’article 4 de la Convention, M. Boyd dit que l’arsenal législatif du Yémen ne semble pas couvrir l’éventail des types de discrimination visés à l’article 4 de la Convention. Il demande donc à la délégation d’indiquer si le Gouvernement entend compléter sa législation interne pour y inclure toutes les dispositions antidiscriminatoires prévues par la Convention.

26.S’agissant de l’application de l’article 5 de la Convention, et plus particulièrement de l’article 5 e), M. Boyd relève avec intérêt que l’État partie a pris diverses mesures pour assurer le respect des droits économiques, sociaux et culturels de la population dans son ensemble et qu’il s’est doté d’une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté (par. 154) qui comprend un ensemble ambitieux de politiques, programmes et activités. Il souhaiterait savoir comment cette stratégie a été mise en œuvre et si elle a permis d’améliorer le niveau et la qualité de vie des groupes de population marginalisés.

27.M. Boyd rappelle que, dans ses précédentes conclusions concernant le Yémen (A/57/18, par. 451 à 470), le Comité avait indiqué qu’il ne se satisfaisait pas de l’affirmation de l’État partie selon laquelle il n’existe pas de discrimination raciale au Yémen et lui avait recommandé de prendre des mesures efficaces tendant à prévenir la discrimination raciale et à donner pleinement effet aux dispositions de la Convention. Il demande par conséquent à la délégation yéménite d’indiquer quelles mesures ont été prises par les autorités yéménites pour protéger les minorités ethniques contre la discrimination, et en particulier les Al-Akhdam et les Somalis.

28.M. Boyd ajoute que, selon des informations émanant d’organisations non gouvernementales, certaines minorités ethniques, dont les Al-Akhdam et les Somalis, n’auraient pas accès à l’éducation, à la santé publique et au système de sécurité sociale du pays, non pas en vertu de la loi mais en raison de préjugés fortement ancrés dans la culture et les traditions yéménites. De plus amples informations seraient donc nécessaires sur les mesures prises par l’État partie pour remédier à cette situation. M. Boyd souhaiterait également savoir si les autorités yéménites envisagent d’accorder un statut juridique aux quelque 100 000 nouveaux réfugiés résidant dans le pays.

29.S’agissant du droit à une protection et à une voie de recours effectives devant les tribunaux nationaux (art. 6 de la Convention), le Rapporteur souhaiterait savoir comment, concrètement, une personne peut faire valoir ses droits devant les instances judiciaires yéménites lorsque ceux‑ci ont été violés par une autorité publique et si la Convention peut être invoquée par les tribunaux nationaux et autres organismes d’État compétents.

30.M. AVTONOMOV relève que, selon les paragraphes 8 et 12 du rapport périodique à l’examen, la population yéménite est majoritairement arabe mais qu’elle compte également des ethnies non arabes, telles que les Somalis et les Malais. Le rapport indique également (par. 12) que la langue officielle du pays est l’arabe mais que d’autres langues telles que le mahra et le suqutri sont également parlées dans le pays. Il serait intéressant de savoir si ces langues sont des dialectes ou des langues vivantes à part entière qui sont enseignées dans les établissements scolaires yéménites.

31.S’agissant des procédures d’acquisition de la nationalité yéménite, M. Avtonomov rappelle que, dans ses précédentes conclusions concernant le Yémen, le Comité avait recommandé à l’État partie de prendre des mesures efficaces afin de garantir le droit d’acquérir la nationalité aux non‑ressortissants, y compris les non-musulmans et les enfants de couples mixtes, sans discrimination (A/57/18, par. 460). Des précisions seraient les bienvenues sur les mesures que l’État partie a prises pour se conformer à cette recommandation, eu égard notamment aux femmes et aux enfants dont l’un des parents n’est pas de nationalité yéménite.

32.M. KJAERUM note avec satisfaction que les autorités yéménites ont engagé un processus interactif avec les ONG en vue de l’élaboration du rapport périodique à l’examen. Relevant que quelque 100 000 personnes sont actuellement réfugiées au Yémen, il voudrait savoir si le Gouvernement envisage de maintenir cette politique d’ouverture à l’égard des réfugiés. Si tel était le cas, M. Kjaerum est d’avis que le Gouvernement yéménite devrait envisager d’accorder un véritable statut juridique à ces personnes afin de leur garantir toute la protection voulue.

33.M. Kjaerum estime que de plus amples explications sont nécessaires sur le statut et les droits des membres de la minorité Al-Akhdam au Yémen, notamment en matière d’accession à la propriété foncière. Il souhaiterait en particulier savoir s’il existe des obstacles de nature économique, juridique, législative ou autre susceptibles d’empêcher les membres de cette minorité d’accéder à la propriété. Enfin, il aimerait savoir si l’État partie envisage de créer une commission nationale des droits de l’homme.

34.M. AMIR estime que l’établissement d’un Ministère d’État aux droits de l’homme et la présence de plusieurs femmes au Gouvernement yéménite sont des éléments qui méritent d’être largement soulignés. Il juge désolante la situation du Yémen, qui compte déjà plus de 100 000 réfugiés et continue à en accueillir davantage chaque jour alors qu’il est confronté à de graves problèmes économiques et financiers, sachant que des pays voisins, bien plus riches et vastes, n’ont pas fait preuve de la même générosité.

35.Notant avec intérêt que le Code pénal du Yémen prévoit des peines pouvant aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement à l’encontre de toute personne ayant commis des actes d’incitation à la haine raciale, M. Amir souligne que de nombreux autres États parties à la Convention n’ont pas jugé utile d’ériger en infractions pénales ce type d’agissements. Il estime que le Yémen est un pays qui force le respect car, outre les efforts colossaux qu’il déploie pour assurer la prospérité économique et sociale de ses habitants, toutes les confessions religieuses y vivent, depuis toujours, dans la paix et l’harmonie.

36.Le PRÉSIDENT dit que le Comité poursuivra l’examen des quinzième et seizième rapports périodiques du Yémen à une séance ultérieure.

La séance est levée à 18 heures.

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