Nations Unies

CERD/C/SR.1938

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

9 mars 2010Français

Original: anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Soixante-quinzième session

Compte rendu analytique de la 1938 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mercredi 5 août 1009, à 15 heures

Président: Mme Dah

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de la Pologne

La séance est ouverte à 15 h 15.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États Parties conformément à l’article 9 de la Convention (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de la Pologne (CERD/C/POL/19;CERD/C/POL/Q/19; HRI/CORE/1/Add.25/Rev.2)

1. Sur l’invitation de la Présidente, la délégation polonaise prend place à la table du Comité.

2.M me Radziszewska (Pologne), présentant les dix-septième à dix-neuvième rapports périodiques de son pays (CERD/C/POL/19), dit que, depuis 2003, les observations finales du Comité concernant le précédent rapport de la Pologne servent de fondement aux politiques publiques de lutte contre la discrimination raciale. Pendant la période couverte par le rapport et celle qui l’a suivie, un certain nombre de mesures a été pris afin de renforcer les dispositions garantissant l’égalité de traitement entre les individus indépendamment de la race, du sexe, de l’appartenance ethnique ou de l’origine nationale, des croyances religieuses, de l’appartenance à un parti politique, de l’âge ou de l’orientation sexuelle. En outre, le 1er mai 2004, la Pologne est devenue membre de l’Union européenne et, ce faisant, elle a accepté d’être liée par la législation européenne dans son ensemble et l’obligation qui en découle pour elle de lutter contre toute forme de discrimination.

3.Le 18 mai 2004, le Gouvernement polonais a adopté le Programme national de lutte contre la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance, dont le contenu est détaillé dans les réponses écrites à la question 3 de la liste des points à traiter (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement).

4.Au nombre des instruments législatifs importants adoptés au cours de la période considérée, on peut citer la loi sur les minorités ethniques et les langues régionales, qui a été promulguée le 6 janvier 2005. Des précisions sur sa teneur et sur la Commission mixte du Gouvernement et des minorités nationales et ethniques chargée de son application figurent aux paragraphes 83 à 87 du rapport et dans la réponse écrite à la question 1 de la liste des points à traiter. En outre, en avril 2008, le Conseil des ministres a approuvé une réglementation prévoyant la nomination du Plénipotentiaire public pour l’égalité de traitement, qui a pour tâche de renforcer l’efficacité des institutions publiques chargées de la protection contre la discrimination. On trouvera de plus amples informations à ce sujet dans la réponse écrite à la question 2 de la liste des points à traiter. En outre, depuis novembre 2004, le Groupe de surveillance du racisme et de la xénophobie du Ministère de l’intérieur et de l’administration est chargé de collaborer avec toutes les parties prenantes afin de collecter des renseignements sur les affaires de discrimination fondée sur l’appartenance ethnique ou raciale. De plus amples informations sur les travaux du Groupe de surveillance sont fournies au paragraphe 128 du rapport périodique et dans la réponse écrite à la question 2 de la liste des points à traiter.

5.Grâce à leurs efforts concertés, ces institutions sont parvenues à faire tomber à zéro le nombre d’affaires de discrimination raciale qui avaient été classées au motif que le préjudice causé à la société était négligeable. En outre, en collaboration avec des organisations non gouvernementales (ONG), elles ont mené des activités de sensibilisation à la discrimination raciale. Afin de poursuivre sur la lancée de ces efforts, à partir d’octobre 2009, les fonctionnaires de police suivront une formation à la lutte contre les crimes racistes, qui sera dispensée avec l’assistance du Bureau des institutions démocratiques et des droits de l’homme à Varsovie de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Des procureurs, des juges et des fonctionnaires continueront de recevoir une formation en matière de lutte contre le racisme et la xénophobie.

6.Le Gouvernement polonais est résolu à intégrer pleinement la minorité rom dans la société polonaise. Étant donné les résultats encourageants du projet pilote exécuté pendant trois ans dans la province de Małopolska afin d’y améliorer la situation des Roms, en 2004, un nouveau programme a été lancé, dont la teneur est décrite en détail dans le rapport périodique et les réponses écrites à la liste des points à traiter. Ce programme prévoit notamment d’accorder des bourses aux étudiants et aux enfants roms particulièrement doués. Les enfants roms ne sont plus placés dans des classes séparées et sont pleinement intégrés dans le système scolaire général.

7.L’éducation dans le domaine des droits de l’homme fait désormais partie des programmes scolaires, tous niveaux confondus. Afin de faciliter l’enseignement de cette matière, un manuel du Conseil de l’Europe destiné aux enseignants a été traduit en polonais. Depuis le début de 2009, un groupe de travail interdépartemental élabore des recommandations sur les mesures que l’administration publique devrait prendre pour continuer d’améliorer la qualité de l’éducation pour tous les enfants, quel que soit le groupe racial ou culturel auquel ils appartiennent.

8.En mai 2008, le Gouvernement polonais a appliqué la Directive 2004/83/CE du Conseil de l’Europe concernant les normes minimales relatives aux conditions que doivent remplir les ressortissants des pays tiers ou les apatrides pour pouvoir prétendre au statut de réfugié ou les personnes qui, pour d’autres raisons, ont besoin d’une protection internationale, et relatives au contenu de ces statuts, adoptée le 29 avril 2004. En conséquence, les étrangers qui entrent sur le territoire polonais, qui ne remplissent pas les conditions voulues pour obtenir le statut de réfugié mais qui courraient un danger s’ils étaient renvoyés dans leur pays d’origine bénéficient d’une protection complémentaire . Les conditions d’hébergement dans les centres pour demandeurs d’asile se sont considérablement améliorées.

9.Bien que la traite des personnes ne soit pas définie comme une infraction dans la législation polonaise, le Gouvernement applique les dispositions de la Convention du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains et du Protocole de Palerme. En outre, il prend actuellement des mesures afin d’incorporer dans le Code pénal la définition de la traite des êtres humains figurant dans ces instruments. La question de la traite est étudiée dans le cadre des cours de formation dispensés aux juges et aux procureurs et des coordonnateurs chargés des affaires de traite apportent une contribution à l’enquête dans les cas complexes. De plus amples informations sur les mesures prises par les pouvoirs publics afin de combattre la traite des personnes figurent dans la réponse écrite à la question 4 de la liste des points à traiter.

10.Le Gouvernement polonais a publié le projet du rapport périodique à l’examen sur son site Web afin d’encourager les ONG à participer à son élaboration. Il a étudié de près toutes les réponses reçues de ces organisations. La version définitive du rapport périodique et les observations finales du Comité sont également publiées sur ce site.

11.M. Amir (Rapporteur pour la Pologne) félicite l’État partie de la régularité avec laquelle il présente ses rapports périodiques et note avec satisfaction que ceux-ci sont élaborés conformément aux Directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention(CERD/C/2007/1). Après une présentation générale de la situation géographique et historique de la Pologne et un rappel des partages successifs du pays et des événements tragiques qui s’y sont produits pendant la Seconde Guerre mondiale et de leurs répercussions, le Rapporteur entame l’examen de la section I du rapport périodique. Relevant que les juridictions nationales n’ont pas invoqué les dispositions de la Convention au cours de la période couverte par le rapport, M. Amir souhaiterait savoir si des infractions liées à la discrimination raciale ont toutefois été signalées pendant cette période.

12.Le Rapporteur prend acte avec satisfaction du séminaire sur la lutte contre le racisme organisé en 2000 à Varsovie dans le cadre des préparatifs de la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée de 2001, et des diverses mesures législatives qui ont été prises, lesquelles attestent la volonté de l’État partie d’éliminer toutes les formes de discrimination raciale.

13.Constatant que la législation de l’Union européenne est abondamment citée dans le rapport périodique, le Rapporteur rappelle que les instruments internationaux priment la législation et les directives régionales, sans préjudice des obligations incombant à la Pologne en tant qu’État membre de l’Union européenne. Les articles 118, 119 et 256 du Code pénal ne semblent pas être suffisamment dissuasifs pour prévenir les actes de discrimination raciale. Les procédures régissant la présentation de plaintes pour discrimination raciale devant la police et d’autres autorités et le droit des victimes d’être informées devraient être définis plus clairement. En revanche, le Rapporteur se félicite des dispositions interdisant la discrimination raciale au travail. Des réformes sociales et administratives et la création de gouvernements régionaux ont facilité l’application de mesures visant à éliminer la discrimination raciale dans tous les domaines ainsi que la mise en œuvre de la Convention.

14.Des rapports parallèles reçus d’ONG font état d’un certain nombre de problèmes, notamment la pratique du profilage racial et l’existence de comportements hostiles à l’égard des Arabes, des musulmans et des Roms. La Pologne est l’un des rares pays d’Europe à ne pas avoir encore créé d’organe public chargé de la lutte contre la discrimination raciale et de la promotion de l’égalité. La situation des demandeurs d’asile tchétchènes, en particulier s’agissant de leur accès aux permis de séjour temporaires et aux soins de santé, est un motif de préoccupation, de même que l’attitude de la population à l’égard des groupes minoritaires qui se distinguent de la majorité par leurs caractéristiques physiques.

15.En ce qui concerne la justice et la sécurité, le Rapporteur estime que les infractions accompagnées de circonstances aggravantes telles que des motivations racistes devraient être punies plus sévèrement. Tout en reconnaissant la légitimité des préoccupations des États face à la menace du terrorisme, il juge important que ceux-ci veillent à ce que les mesures de lutte contre le terrorisme n’aient pas un caractère discriminatoire à l’égard de certains groupes raciaux. En conclusion, il loue les progrès considérables accomplis par l’État partie, compte tenu en particulier de son passé.

16.M. Avtonomov souhaiterait de plus amples informations sur les progrès accomplis dans le domaine de l’éducation des enfants roms, en particulier dans le domaine de la législation. Il demande si ces enfants peuvent être scolarisés dans leur langue et si les cours de rom portent sur l’expression tant orale qu’écrite. Il voudrait en outre avoir des renseignements sur les relations entre les communautés roms et les forces de l’ordre. Dans le passé, le Comité a formulé plusieurs recommandations générales tendant à promouvoir la coopération entre les premières et les secondes. Il demande si les Roms sont ou peuvent être recrutés dans la police et, le cas échéant, s’ils sont envoyés dans les zones où la concentration de membres de cette minorité est forte. En ce qui concerne la législation, il voudrait savoir si la Directive 2000/43/CE du Conseil de l’Europe relative à la mise en œuvre du principe de l’égalité de traitement entre les personnes sans distinction de race ou d’origine ethnique a été pleinement incorporée dans tous les domaines du droit polonais.

17.M. Diaconu, se référant au paragraphe 82 du rapport périodique, aimerait savoir en quoi une minorité nationale se distingue d’une minorité ethnique, quelle est la raison d’être de cette distinction et si celle-ci a des répercussions sur les droits fondamentaux ou le statut juridique des membres de ces minorités. Il souhaiterait également savoir ce qui distingue la minorité linguistique cachoube d’une minorité nationale du point de vue de son statut et de sa composition. Pour ce qui est des procédures électorales, il demande pourquoi la minorité allemande est la seule à tirer parti de la clause dérogatoire préférentielle citée au paragraphe 142 du rapport périodique et dans quelle mesure les minorités nationales sont représentées dans l’administration publique, tous échelons confondus. Se référant au paragraphe 143 du rapport, il prie la délégation polonaise de fournir des éclaircissements sur les modalités selon lesquelles les organisations qui représentent une minorité nationale au plan du pays sont autorisées à participer à un référendum. Un référendum devrait être ouvert à tous, par définition. Faut-il comprendre que certains groupes ne sont pas autorisés à y participer?

18.En ce qui concerne l’éducation des enfants roms, M. Diaconu prend acte avec satisfaction des explications fournies au paragraphe 35 du rapport périodique concernant les classes séparées pour enfants roms. Il souhaiterait néanmoins savoir si l’enseignement est dispensé en rom, par écrit ou oralement, comme dans d’autres pays de l’Europe de l’Est.

19.D’après des informations émanant d’ONG, lorsqu’un conflit éclate entre Polonais et étrangers, ces derniers seraient systématiquement tenus pour responsables. En outre, tous les réfugiés sont tenus de passer des examens médicaux. Cette pratique est discriminatoire: cette obligation devrait soit s’appliquer à tous, soit être supprimée. Des mesures devraient être prises pour éliminer la discrimination, les attitudes hostiles et les violences visant les minorités visibles, en particulier les actes commis par des organisations de jeunes affiliées à des partis politiques. Pour ce faire, il est essentiel de mettre en application la Convention et la législation complète de l’État partie. Il incombe aux entités chargées des droits de l’homme de les défendre indépendamment de considérations d’ordre politique.

20.M. Diaconu signale que la Commission européenne a considéré que la législation polonaise n’était pas complètement compatible avec la Directive 2000/43/CE du Conseil de l’Europe. Il fait observer en outre que l’État partie devrait créer un organe national chargé des droits de l’homme qui soit si possible indépendant du Gouvernement et du Parlement.

21.M. Thornberry, se référant aux distinctions établies en Pologne entre les droits des minorités nationales et ceux des minorités ethniques, dit que, bien que les États soient parfaitement autorisés à définir certains groupes de population comme des minorités nationales, les différences qui en découlent entre les droits des groupes qui ont des caractéristiques très similaires sont susceptibles de créer des problèmes de discrimination. M. Thornberry voudrait donc savoir en quoi consistent les différences entre groupes nationaux et groupes ethniques, soulignant que le principe de non-discrimination s’applique non seulement aux droits des individus mais aussi aux droits des groupes.

22.M. Thornberry relève avec satisfaction que le rapport périodique fait état d’une décision du Tribunal constitutionnel dans laquelle les dispositions du paragraphe d) vi) de l’article 5 de la Convention, qui portent sur le droit d’hériter, ont été invoquées. Cela rappelle au Comité l’existence d’un droit qui, à ce jour, a rarement été évoqué dans le cadre de ses débats.

23.D’après le rapport périodique, les élèves qui fréquentent les écoles des minorités nationales apprennent l’histoire de leur pays d’origine dans leur langue, ce qui n’est en revanche pas le cas lorsqu’on leur enseigne l’histoire polonaise. M. Thornberry se demande si l’État partie a envisagé d’adopter une approche interculturelle de l’éducation, conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe et aux dispositions de la Déclaration des droits des personnes appartenant à des minorités nationales ou ethniques, religieuses et linguistiques adoptée en 1992 par l’Assemblée générale de l’ONU. Il voudrait savoir dans quelle mesure des aspects interculturels sont pris en considération dans la pratique pédagogique.

24.En ce qui concerne la langue rom, M. Thornberry note que la Pologne a opté pour un système d’enseignement intégré. Il souligne toutefois que l’immersion d’un enfant dans un système scolaire qui ne reconnaît pas sa langue maternelle ou la langue liée à son patrimoine culturel peut engendrer des difficultés pédagogiques considérables. À ce propos, il appelle l’attention de la délégation polonaise sur les recommandations formulées à l’issue de la première session du Forum sur les questions relatives aux minorités de l’ONU, qui a été consacrée à la question des minorités et du droit à l’éducation. Dans l’une de ces recommandations, les participants au Forum ont souligné que les politiques tendant à constituer, sur la base de discriminations, des classes séparées devaient être interdites, sauf dans des cas exceptionnels, mais que la création et le développement de classes et d’écoles dans lesquelles l’enseignement était dispensé dans la langue d’une minorité ne devaient pas être considérés comme une forme inadmissible de ségrégation si la fréquentation de ces classes ou écoles résultait d’un libre choix. Toutefois, si des établissements d’enseignement séparés devaient être créés pour des minorités, pour des raisons linguistiques, religieuses ou culturelles, aucune barrière ne devrait être érigée pour empêcher les membres des groupes minoritaires d’étudier dans des établissements d’enseignement général. Il y avait donc un équilibre subtil à trouver. Dans une autre recommandation, les participants au Forum ont encouragé les États à offrir aux personnes appartenant à des minorités des possibilités suffisantes d’apprendre leur langue maternelle ou de suivre un enseignement dans leur langue maternelle. Ils les ont également encouragés à consulter les personnes appartenant à une minorité afin de prendre en considération leurs souhaits librement exprimés.

25.Notant qu’un modèle pédagogique un peu différent est utilisé dans le cas des Roms, M. Thornberry voudrait savoir en quoi consistent concrètement ces différences.

26.Il prie en outre la délégation polonaise de commenter des informations selon lesquelles seul un petit nombre d’enfants réfugiés auraient accès à l’éducation.

27.M. Ewomsan note avec satisfaction que des cours de formation sont organisés à l’intention des fonctionnaires de police concernant la procédure à suivre en cas d’actes racistes et les mesures de prévention des infractions motivées par l’hostilité à l’égard d’un groupe ethnique. Il se félicite en outre de l’organisation de séminaires de formation visant à renforcer la sécurité des Roms et à sensibiliser la police à la victimisation des Roms et à certaines questions juridiques, et de la mise en œuvre du Programme pour la communauté rom, qui tend à promouvoir sa pleine participation à la vie sociale.

28.M. Ewomsan demeure toutefois préoccupé par la situation des communautés d’origine africaine, asiatique ou arabe. D’après des informations émanant d’ONG, le nombre d’infractions racistes serait en augmentation. La délégation polonaise voudra bien expliquer cette évolution et indiquer si les pouvoirs publics ont prévu de prendre des mesures spéciales pour y faire face. M. Ewomsan se demande si ce phénomène est dû à des problèmes socioéconomiques ou s’il s’agit en fait d’une réaction d’autodéfense et la résultante de l’histoire troublée du pays. En tout état de cause, il souhaiterait savoir comment le système judiciaire traite les affaires d’infractions racistes et si l’État partie a l’intention d’élaborer des programmes de sensibilisation afin d’encourager la réconciliation entre les Polonais et les victimes de haine raciale et de promouvoir une culture de tolérance et de paix.

29.M. de Gouttes se félicite des réponses fournies dans le rapport à plusieurs des recommandations formulées dans les observations finales du Comité concernant le précédent rapport périodique de la Pologne. Il se félicite également de l’adoption et de l’exécution du Programme national de lutte contre la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance et des programmes en faveur des minorités nationales, ethniques et linguistiques, de la nomination de plénipotentiaires des commandants de police chargés de la protection des droits de l’homme, de la mise en œuvre du Programme pour la communauté rom et de la création du Groupe de surveillance du racisme et de la xénophobie du Ministère de l’intérieur et de l’administration.

30.Les dispositions de la législation nationale relative à la lutte contre le racisme, en particulier celles figurant dans le Code pénal et le Code du travail, paraissent globalement compatibles avec l’article 4 de la Convention mais, d’après des informations, elles seraient encore loin d’être conformes aux exigences définies dans les directives pertinentes de l’Union européenne.

31.M. de Gouttes se dit particulièrement satisfait des statistiques détaillées fournies dans le rapport périodique, dont celles concernant le nombre de poursuites entamées à la suite de plaintes pour infractions racistes.

32.Dans ses observations finales concernant le précédent rapport périodique de l’État partie, le Comité a exprimé des préoccupations au sujet d’actes d’incitation à la haine raciale, de publications antisémites, de cas de profanation de cimetières et d’infractions commises par de jeunes extrémistes qui n’avaient pas fait l’objet d’une enquête en bonne et due forme et n’avaient pas donné lieu à l’ouverture de poursuites. Étant donné que ces problèmes semblent persister, M. de Gouttes demande à la délégation polonaise de passer en revue toutes les mesures prises par les autorités pour faire face aux manifestations de haine raciale, dont les graffiti et stéréotypes racistes et les documents antisémites publiés sur l’Internet.

33.M. de Gouttes souhaiterait savoir si les dispositions du Code pénal citées au paragraphe 118 du rapport périodique prévoient que la motivation raciste d’une infraction constitue une circonstance aggravante.

34.Concernant la situation des enfants roms, il voudrait savoir ce que le Médiateur pour les enfants fait pour ces derniers et si des progrès ont été accomplis pour les intégrer dans les écoles ordinaires. D’après le rapport, le nombre de classes d’enfants roms a diminué et est actuellement inférieur à 10. Il aimerait savoir ce qu’il est advenu des classes spéciales et si leur fermeture était planifiée.

35.De plus amples informations seraient bienvenues au sujet du «permis de séjour toléré» accordé à certains étrangers, en particulier les Tchétchènes provenant de la Fédération de Russie. Le Comité a été informé que ces personnes n’avaient pas droit à l’aide sociale accordée aux demandeurs d’asile et qu’elles ne bénéficiaient pas des programmes d’intégration conçus pour les réfugiés reconnus.

36.D’après l’État partie, un certain nombre d’ONG ont été consultées au cours du processus d’élaboration du rapport périodique. M. de Gouttes voudrait savoir quelles étaient ces ONG et dans quelle mesure leurs observations ont été prises en considération.

37.M. Lindgren Alves croit comprendre que la ratification en 2000 par l’État partie de la Convention-cadre du Conseil de l’Europe pour la protection des minorités nationales est ce qui l’a amené à inclure une question sur la nationalité et la langue parlée à la maison dans le recensement national de la population et du logement de 2002. Le Parlement reconnaît désormais neuf minorités nationales et quatre minorités ethniques, ce qui est surprenant étant donné que, dans le document de base (HRI/CORE/1/Add.25/Rev.2), la Pologne est décrite comme un pays «homogène du point de vue ethnique». M. Lindgren Alves s’étonne que le cachoube, langue maternelle du grand écrivain allemand Günther Grass, y soit qualifié de «langue régionale».

38.D’après le rapport périodique, les minorités nationales et ethniques sont autorisées à former des associations. Il serait intéressant de savoir si elles peuvent également former des partis politiques et, le cas échéant, si ces partis peuvent être fondés exclusivement sur l’appartenance à un groupe national ou à une minorité ethnique en particulier. Compte tenu de l’importance accordée par l’Union et la législation européennes à la protection des droits des minorités, la délégation voudra bien expliquer pourquoi la Pologne interdit le traitement de données relatives à l’origine ethnique. Certains observateurs pourraient considérer que cette attitude est la preuve du refus latent de la part de l’Europe d’accepter l’autre et de tolérer les différences en général. M. Lindgren Alves se demande si cette approche permet de prévenir les dérives ultranationalistes ou si cela stimule au contraire l’émergence de partis d’extrême droite sur la scène politique.

39.M. Prosper regrette que le rapport périodique contienne peu d’informations sur la situation des Africains, des Asiatiques et des Arabes, lesquels sont exposés au racisme. Des renseignements et des statistiques complémentaires sur leur présence en Pologne seraient bienvenus.

40.M. Kemal, notant que la Pologne accueillera le Championnat d’Europe de football en 2012, dit que des préoccupations ont été formulées selon lesquelles un nationalisme de type xénophobe serait profondément ancré chez les supporters polonais. Leur chauvinisme serait généralement dirigé contre les personnes visiblement différentes de la majorité de la population. Un journaliste sportif de la BBC qui avait couvert un match organisé en Pologne en 2008 a indiqué qu’il s’était senti très mal à l’aise pendant toute la durée du match, comparant le comportement des supporters polonais avec celui des hooligans anglais vingt ans auparavant. Tout en reconnaissant les progrès considérables accomplis par la Pologne dans la lutte contre le racisme, le néofascisme et la diffusion de propos racistes et la protection des minorités, M. Kemal prie la délégation d’indiquer quelles mesures le Gouvernement polonais entend prendre pour faire face au comportement d’une minorité de supporters.

41.M me Radziszewska (Pologne) dit que l’héritage laissé par les régimes précédents, sous lesquels les droits individuels n’avaient qu’une importance négligeable, se retrouve dans les préjugés discriminatoires à l’égard des minorités qui sont profondément ancrés dans les mentalités, et que cela ne changera qu’avec le temps. Des efforts considérables ont été déployés au cours des dernières années écoulées pour promouvoir une plus grande ouverture. La lutte contre la discrimination et en faveur de l’égalité figure parmi les priorités du Gouvernement polonais.

42.Le Plénipotentiaire public pour l’égalité de traitement, qui a été nommé le 30 avril 2008, a notamment pour tâche d’analyser les effets des lois sur les problèmes d’égalité de traitement et de surveiller l’application de la législation relative à la lutte contre la discrimination et les politiques mises en œuvre dans les institutions publiques et les médias. Le Groupe de surveillance du racisme et de la xénophobie collecte des données et des informations sur les incidents liés à la discrimination raciale. En outre, il surveille la façon dont les autorités publiques donnent suite à ces affaires et collabore étroitement avec des ONG. Les fonctionnaires reconnus coupables de discrimination raciale sont sanctionnés.

43.De nouvelles dispositions ont été introduites dans le Code pénal afin d’ériger en infraction les propos racistes, l’incitation à la haine raciale et la publication de textes à caractère raciste.

44.La mise en œuvre du Programme national de lutte contre la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance est au point mort depuis que le poste de plénipotentiaire du Gouvernement pour l’égalité hommes‑femmes a été laissé vacant, en 2005. Comme le gouvernement en place à cette époque n’a pas chargé une autre institution de prendre le relais, l’exécution du Programme n’a repris que récemment avec la création du poste de plénipotentiaire public pour l’égalité de traitement, qui coordonne toutes les activités menées dans le cadre du Programme.

45.Réagissant aux observations de M. Kemal, Mme Radziszewska dit qu’une nouvelle loi a été adoptée afin de venir à bout du problème du racisme dans les sports. Les supporters ont désormais l’interdiction de porter des écharpes ou des bonnets leur permettant de dissimuler leur identité, étant donné que l’anonymat leur permet souvent de se livrer à des débordements racistes pendant les manifestations sportives ou dans le contexte qui entoure ces dernières. Les personnes qui violent ces nouvelles dispositions se voient interdire l’accès aux terrains de sport. Des fonctionnaires de police ont été formés spécialement pour être en mesure de contenir les débordements racistes pendant les manifestations sportives et une équipe interinstitutions chargée de conseiller les pouvoirs publics sur les moyens de renforcer la sécurité pendant ces manifestations a été constituée. En collaboration avec le Comité olympique polonais, des programmes et des stratégies éducatives sont élaborées en vue de sensibiliser les jeunes qui pratiquent un sport amateur. Les visites scolaires organisées au Comité olympique polonais sont une occasion de sensibiliser les enfants à la question du racisme et de l’égalité.

46.Le 16 octobre 2009, une conférence sera organisée conjointement par le Comité olympique polonais, le Plénipotentiaire public pour l’égalité de traitement et le Ministre de l’éducation nationale et des sports à l’intention des présidents de tous les clubs de sport polonais. L’orateur principal de la première partie de la conférence, qui sera consacrée au thème de l’élimination du racisme, sera un représentant de l’ONG Nigdy Wiecej («Plus jamais») et les participants seront encouragés à signer une pétition symbolique sur l’élimination du racisme dans les sports. En octobre 2009, l’Association polonaise de football incorporera dans ses statuts la réglementation antiraciste publiée par la Fédération internationale de football association (FIFA), laquelle prévoit de sanctionner sévèrement les clubs de sport qui ne prennent pas des mesures pour lutter contre le racisme pendant les manifestations sportives ou dans le contexte qui les entoure. Cette réglementation dispose notamment que le match doit être suspendu lorsque les supporters ou les joueurs ont un comportement raciste; les clubs de football qui n’appliquent pas ces règles peuvent être disqualifiés de la ligue correspondante.

47.Un match de football opposant des joueurs professionnels et une équipe composée de célébrités du cinéma et des médias doit être organisé en automne 2009 dans le cadre d’une grande campagne de lutte contre le racisme. Ce match, qui sera le premier du genre, a pour but de faire participer des personnages publics à la lutte contre le racisme dans les sports. Dans le cadre des initiatives tendant à encourager la participation des enfants roms aux activités sportives à l’école, les fonds qui auront été ainsi réunis seront alloués aux équipes de football roms dans les écoles primaires.

48.En collaboration avec le Ministère de l’éducation, le personnel des établissements privés et publics de l’enseignement supérieur a été formé afin de savoir réagir lorsqu’il est confronté à des comportements racistes ou discriminatoires à l’université. Tous les manuels et autres documents utilisés pendant les cours sont actuellement passés au crible afin de s’assurer qu’ils ne contiennent pas d’éléments racistes ou xénophobes. Certains des experts qui ont participé à ces travaux ont déjà soumis des observations et, sur cette base, ces manuels seront soit révisés, soit retirés de la circulation. De nouveaux programmes scolaires ont été établis compte tenu de la nécessité d’encourager la tolérance et de promouvoir le respect des droits des minorités nationales et ethniques. Ces efforts se justifient tout particulièrement dans les zones rurales, où les habitants ne sont pas habitués aux étrangers. Des exemples tels que celui d’un village polonais où le maire est d’ascendance africaine sont cités pour montrer au public que les migrants apportent de plus en plus une contribution à la société polonaise.

49.Le Plénipotentiaire public pour l’égalité de traitement collabore avec les autorités chargées de la santé dans la promotion de la lutte contre la discrimination dans le système de santé. Toutes les personnes ont accès aux soins de santé, quelles que soient leurs origines.

50.M. Avtonomov souhaiterait de plus amples informations sur les plaintes présentées au Médiateur pour les enfants. Il souhaiterait également en savoir plus sur la situation des Caraites dans l’État partie. Alors que les Caraites comptaient quelque 100 membres dans les années 80, ce chiffre est tombé à 43, ce qui appelle des explications de la délégation polonaise.

51.M. de Gouttes constate à la lecture du paragraphe 239 du rapport périodique qu’une des dispositions de la loi sur les émissions de radio et de télévision prévoit que les programmes ou autres émissions doivent respecter les croyances religieuses du public et en particulier les valeurs chrétiennes. Étant donné que la diversité religieuse est de plus en plus grande dans la société polonaise, l’État partie voudra peut-être envisager de modifier ces dispositions de façon à tenir compte des communautés religieuses autres que chrétiennes qui vivent sur son territoire.

La séance est levée à 17 h 50.