NATIONS

UNIES

CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/SR.16889 mars 2005

Original: FRANÇAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑sixième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1688e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 3 mars 2005, à 10 heures

Président: M. YUTZIS

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial et deuxième rapport périodique de l’Irlande (CERD/C/460/Add.1) (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

EXAMEN DES RAPPORTS, OBSERVATIONS ET RENSEIGNEMENTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial et deuxième rapport périodique de l’Irlande (CERD/C/460/Add.1) (suite)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation irlandaise reprend place à la table du Comité.

2.M. FABEY (Irlande) dit que l’Accord du vendredi saint, également appelé Accord de Belfast, signé le 10 avril 1998 entre les Gouvernements britannique et irlandais et tous les partis politiques de l’Irlande du Nord, définit de nouvelles relations entre les communautés nationalistes et unionistes d’Irlande du Nord, entre le Nord et le Sud, et entre la Grande‑Bretagne et l’Irlande. Il consacre également le statut de l’Irlande du Nord en tant que territoire faisant partie du Royaume‑Uni et définit les moyens d’instaurer une Irlande unie. L’Accord, qui a été approuvé par référendum par plus de 70 % de la population, porte création de deux commissions des droits de l’homme au Nord et au Sud, qui mettent en œuvre un vaste programme d’activités et ont créé un groupe de travail conjoint sur le racisme.

3.Le Gouvernement irlandais reconnaît que les gens du voyage ont une identité culturelle distincte et sont parfois victimes de discrimination et d’exclusion, mais il ne considère pas, du point de vue juridique, qu’ils forment un groupe distinct du reste de la population en termes de race, de couleur, d’ascendance ou d’origine nationale ou ethnique. Ils jouissent des mêmes droits civils et politiques que les autres citoyens et sont libres de pratiquer la religion ou d’utiliser la langue de leur choix. Leur protection est assurée par les principales lois antidiscriminatoires, notamment la loi sur l’incitation à la haine de 1989 et la loi sur l’égalité de 2004 qui reprend scrupuleusement les dispositions de la Directive de l’Union européenne sur l’égalité raciale. Le Gouvernement est résolu à élaborer des politiques pour que les gens du voyage soient traités sur un pied d’égalité. Enfin, s’il existe effectivement des similitudes entre les Roms et les gens du voyage de nationalité irlandaise, ces derniers ne sont pas des Roms et ne partagent pas la langue, l’histoire ou la culture de ce groupe.

4.Le Gouvernement irlandais vient de créer un service de l’immigration et de la naturalisation qui a été chargé de mettre en œuvre une politique cohérente en matière d’immigration, notamment pour la délivrance des permis de travail et des visas, d’améliorer la qualité des services fournis aux migrants et de renforcer l’efficacité et l’intégrité du système d’immigration. Le Conseil économique et social a fait réaliser une étude sur la politique nationale en matière d’immigration afin de mieux comprendre les origines des flux migratoires vers l’Irlande et d’en saisir toutes les incidences économiques et sociales. Les conclusions de l’étude seront publiées avant la fin de l’année.

5.Le Plan national d’action contre le racisme définit les moyens de favoriser l’intégration des immigrés et de promouvoir une société plus ouverte et tolérante et réaffirme les droits et les obligations des minorités culturelles et ethniques. Le Comité directeur du Plan national d’action sera composé de représentants des gens du voyage et des minorités ethniques. Une charte contre le racisme dans le sport a été signée en octobre 2003 afin d’inciter les grandes associations sportives à prêter davantage attention à la discrimination et au harcèlement fondés sur la race, la couleur ou l’origine nationale ou ethnique. En 2000, le Comité consultatif national sur le racisme et l’interculturalisme a fait adopter un protocole antiraciste par les partis politiques, grâce auquel la campagne pour les élections locales de 2004 n’a donné lieu à aucun propos haineux ou raciste. D’après les statistiques établies par la Garda Síochána (police nationale), le nombre d’incidents à caractère raciste est en diminution. L’Irlande se félicite de l’amélioration de la situation mais poursuit néanmoins ses efforts pour combattre toutes les pratiques racistes dans la société irlandaise.

6.Tous les ministères compétents s’emploient à faire connaître la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, mais des efforts encore plus soutenus devront être entrepris s’agissant en particulier du mécanisme prévu à l’article 14 de la Convention. La Commission irlandaise des droits de l’homme a publié un guide sur la Convention, a diffusé des informations sur son site Web et a organisé, en novembre 2004, un séminaire d’information en collaboration avec le Comité consultatif national sur le racisme et l’interculturalisme.

7.L’Ombudsman est essentiellement chargé d’enquêter sur les plaintes qu’il reçoit concernant des mesures, lenteurs ou négligences administratives émanant de particuliers qui estiment avoir été injustement traités. Il peut également appeler l’attention des législateurs sur telle ou telle anomalie dans le rapport qu’il soumet chaque année au Parlement.

8.Enfin, M. Fabey donne au Comité l’assurance que l’Irlande l’informera de la modification de la loi sur l’incitation à la haine, de 1989, et des propositions visant à créer un conseil de la presse.

9.M. DOYLE (Irlande) dit que son pays a un système juridique «dualiste», ce qui signifie que les accords internationaux auxquels il est partie ne sont pas automatiquement incorporés dans la législation interne. Les pouvoirs publics ont jugé qu’il n’était pas nécessaire d’incorporer la Convention dans le droit interne dans la mesure où ses dispositions sont déjà couvertes par la liste des droits fondamentaux expressément protégés par la Constitution irlandaise. Il serait selon eux inopportun de proclamer des droits fondamentaux par la voie de lois ordinaires qui seraient inférieures et soumises aux dispositions de la Constitution. L’Irlande a effectivement beaucoup tardé à ratifier la Convention, parce qu’elle a procédé à un examen minutieux de sa législation de manière à la réviser ou à la compléter afin de s’acquitter pleinement des obligations qui lui incombent en vertu de la Convention. Sa position sur l’article 4 de la Convention, à savoir qu’elle condamne la propagande et les organisations racistes, est circonscrite par les dispositions constitutionnelles relatives à la liberté d’expression. En conséquence, l’Irlande s’en tient à sa réserve concernant cet article indiquant clairement que le principe de liberté d’expression énoncé dans la Constitution doit continuer de primer.

10.S’agissant de savoir si la motivation raciste d’une infraction peut être considérée comme une circonstance aggravante, M. Doyle souligne que le principe de l’indépendance des juges est consacré par la Constitution et que ces magistrats ont donc toute latitude pour décider des peines et des circonstances aggravantes applicables.

11.M. MURPHY (Irlande) dit qu’afin de tenir compte de la diversité culturelle et ethnique croissante de la population, la police nationale a créé un service des droits de l’homme qui est chargé de promouvoir le respect des droits de l’homme, de fournir des avis et des conseils sur le comportement de la police, de communiquer avec les institutions nationales des droits de l’homme et de nouer des contacts avec les communautés qui ont tendance à rester en marge de la société. Des ateliers de sensibilisation aux droits de l’homme sont également organisés afin de rappeler le principe du respect de la dignité humaine et la nécessité pour les forces de police d’avoir un comportement responsable et transparent. L’accent est également mis sur la Convention européenne des droits de l’homme, en particulier sur le Protocole no12 qui a trait à la discrimination raciale. Les responsables de la police appliquent une politique de tolérance zéro à l’égard des comportements discriminatoires et s’attachent à améliorer la formation des policiers, en veillant notamment à favoriser le recrutement de personnes issues des minorités.

12.Mme FAUGHNAN (Irlande) dit que le deuxième Plan national d’action contre la pauvreté et l’exclusion sociale pour la période 2003‑2005 vise surtout à réduire la pauvreté des gens du voyage, des migrants et des groupes minoritaires et, en particulier, à améliorer les conditions de vie et à accroître la participation des gens du voyage à la vie de la société, et à fournir des services aux minorités ethniques afin de répondre à leurs besoins fondamentaux. Les progrès réalisés en 2003‑2004 ont fait l’objet d’un rapport du Bureau de l’intégration sociale, qui est chargé de mettre en œuvre le Plan d’action. Par ailleurs, l’Irlande perçoit également des fonds de l’Union européenne destinés à aider les demandeurs d’asile et les réfugiés à mieux s’intégrer au niveau local et le Département des affaires sociales et familiales s’efforce de faire connaître leurs droits fondamentaux aux nouveaux arrivants.

13.Mme NAUGHTON (Irlande) dit que la majorité des établissements scolaires irlandais sont catholiques et publics. Au cours de la période 2002-2003, sur les 3 150 écoles primaires que comptaient le pays, 2 912 étaient des établissements d’enseignement catholique.

14.La société irlandaise a connu une évolution démographique telle que les enfants issus de l’immigration sont présents en nombre croissant dans les établissements d’enseignement. Tous les enfants, quelles que soient leur confession et leur nationalité, ont le droit de fréquenter les écoles irlandaises. En 2003, l’Irlande comptait 13 000 enfants étrangers scolarisés, dont 2 000 originaires du Nigéria, 700 des États-Unis, 6 000 d’Allemagne et d’Espagne et 420 de Chine. Plus de 150 nationalités différentes sont représentées dans les écoles primaires et postprimaires. Les langues étrangères enseignées en Irlande sont le français, l’allemand, l’espagnol, l’italien, le russe, le japonais et l’arabe. Des mesures ont été mises en œuvre pour aider les enfants immigrés à s’intégrer dans le système scolaire et des fonds additionnels ont été débloqués pour permettre à des enseignants supplémentaires de leur donner des cours de soutien linguistique. Des écoles primaires spéciales ont également été créées pour les enfants du voyage.

15.Un programme de formation linguistique pour l’intégration a été mis en place afin d’orienter les réfugiés adultes vers des cours appropriés; il comprend une formation linguistique.

16.M. McELHINEY (Irlande) souligne que de nombreuses initiatives ont été prises pour améliorer les conditions de logement des gens du voyage en Irlande. Il rappelle qu’une Stratégie nationale pour le logement des gens du voyage a été adoptée en mars 1996, qui a été suivie par la création d’un service spécial du logement des gens du voyage relevant du Ministère de l’environnement, du patrimoine et de l’administration locale. Un groupe consultatif national chargé du logement des gens du voyage a également été constitué afin de veiller à la mise en œuvre de cette stratégie. Une loi sur le logement des gens du voyage a été adoptée en 1998 et des comités consultatifs locaux pour le logement des gens du voyage ont par la suite été mis en place dans chaque collectivité locale. Au début de 2000, les collectivités locales ont adopté leurs plans quinquennaux pour le logement des gens du voyage.

17.Dans les collectivités locales, plusieurs sites de stationnement ont été créés à l’intention des gens du voyage dans les zones tant rurales qu’urbaines. Actuellement, 120 familles du voyage sont établies sur les sites de stationnement spécifiquement créés à leur intention. Un programme de construction de sites supplémentaires a été engagé, qui bénéficie d’un crédit public de 130 millions d’euros.

18.M. McElhiney reconnaît cependant que peu de progrès ont été enregistrés en ce qui concerne les zones d’hébergement transitoires. C’est pourquoi les représentants des familles du voyage sont régulièrement consultés afin de mieux cerner leurs besoins particuliers en la matière.

19.Mme HARKIN (Irlande) indique que les services de santé sont dispensés en Irlande dans le cadre de la Stratégie nationale de promotion de la santé 2000-2005 qui a pour objectif de réduire les inégalités en matière de santé entre les différents groupes de population et de répondre aux besoins des groupes vulnérables. Cette stratégie prévoit également la mise en place de mesures visant à éliminer les obstacles auxquels se heurtent les groupes défavorisés, y compris les réfugiés et les demandeurs d’asile.Des réformes importantes ont été effectuées récemment dans le domaine de la santé, notamment la nomination d’un responsable de la santé au niveau national.

20.La représentante de l’Irlande reconnaît que la situation sanitaire des membres de la communauté des gens du voyage est nettement inférieure à celle de l’ensemble de la population, mais elle souligne que la Stratégie sanitaire pour les gens du voyage pour 2002-2005 offre des solutions pratiques pour remédier à cette inégalité. Une Commission consultative sur la santé des gens du voyage a ainsi été créée au sein du Ministère de la santé et de l’enfance et des services de santé des gens du voyage ont été mis en place par la quasi-totalité des conseils de la santé. Ces services rendent compte à la Commission consultative des initiatives prises en faveur des gens du voyage. La Stratégie prévoit aussi la nomination d’un administrateur responsable de la santé des gens du voyage auprès de chaque conseil de la santé. L’Institut irlandais de santé publique a par ailleurs été chargé de concevoir une étude sur la santé des gens du voyage dans l’ensemble de l’Irlande, qui devrait être achevée avant la fin de la période couverte par la Stratégie nationale pour la santé des travailleurs (2002-2005).

21.Mme Harkin indique en outre que les demandeurs d’asile logés dans les centres d’hébergement ouverts ont accès à tous les soins de santé, tant en zone rurale qu’urbaine. Les femmes enceintes ont également accès aux soins de santé de base et peuvent voir un médecin spécialisé si leur état l’exige. Les immigrés en situation irrégulière peuvent se faire soigner en cas d’urgence, mais ces soins ne sont pas gratuits.

22.S’agissant des services d’interprétation offerts aux demandeurs d’asile, la représentante reconnaît que lesdits services doivent être améliorés, notamment dans le domaine des soins médicaux. Un crédit de 1 million d’euros a été accordé au Responsable des services de santé pour lui permettre d’améliorer la qualité des services d’interprétation en milieu médical et 2 millions d’euros ont été alloués à la formation et au recrutement d’interprètes spécialisés en matière de droit d’asile. Le Gouvernement reconnaît que, par le passé, trop de praticiens ont refusé de soigner des demandeurs d’asile et des gens du voyage. Le Conseil de la santé exerce désormais des pressions sur les praticiens et tout refus de soins est sévèrement sanctionné.

23.M. MURRAY (Irlande) indique que selon des statistiques récentes, 16,5 % des gens du voyage occupent un emploi et 37,6 % d’entre eux sont au chômage. Le Ministère de l’entreprise, du commerce et de l’emploi a alloué quelque 500 000 euros à des initiatives d’emploi des gens du voyage et élabore actuellement avec l’Agence nationale pour l’emploi et la formation d’autres mesures susceptibles d’améliorer les possibilités d’emploi des gens du voyage.

24.M. FABEY (Irlande) estime que l’Irlande n’est pas parvenue à obtenir de bons résultats dans le domaine de l’éducation des gens du voyage, ce malgré les 45 millions d’euros consacrés spécifiquement à cette question. Les gens du voyage ont toujours des taux très bas d’alphabétisation et une proportion trop importante d’entre eux ne sont pas scolarisés. Le Gouvernement a conscience de ces problèmes et compte redoubler d’efforts pour améliorer leur niveau d’instruction et favoriser ainsi leur accès à l’emploi.

25.M. COSTELLO (Irlande) dit que son pays prend très au sérieux ses engagements en vertu du droit national et du droit international concernant les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants. Des structures très complètes permettent notamment l’examen des demandes d’asile en première instance et en appel ainsi que l’accueil et l’hébergement des personnes concernées. Dans le domaine de l’immigration, le Gouvernement irlandais estime que les services devraient être améliorés et a tout récemment lancé la création d’un nouveau service des naturalisations et de l’immigration qui sera chargé d’améliorer les services offerts aux migrants, notamment dans le domaine de l’intégration, et d’assurer une meilleure coordination entre les organismes publics prestataires de services concernés. Néanmoins, les migrations − l’immigration en particulier − sont un phénomène très récent en Irlande et il reste beaucoup à faire dans ce domaine. Au milieu des années 90, cinq personnes seulement s’occupaient des questions d’immigration au Ministère de la justice contre 700 aujourd’hui et un budget annuel de 350 millions d’euros est disponible. L’Irlande a délivré 34 000 permis de travail et accueilli 133 000 visiteurs en 2004.

26.M. Costello dit que le problème de l’absence d’une instance de recours pour les affaires d’immigration sera réglé par la future législation sur l’immigration et la résidence qui comportera une section sur une procédure d’appel en matière d’immigration. Le Ministère de la justice publiera dans les prochaines semaines un document à propos duquel le public, les ONG et les parties intéressées pourront soumettre leurs vues. Il convient toutefois de garder à l’esprit qu’une des fonctions inhérentes de l’état reconnue par les tribunaux est de contrôler l’entrée des non-ressortissants dans l’intérêt des citoyens et du bien commun. Cette fonction est assurée par le Ministère de la justice, de l’égalité et de la réforme législative.

27.Concernant la dispersion des demandeurs d’asile, M. Costello affirme que le Gouvernement irlandais n’accepterait pas que cette méthode entraîne une situation de ségrégation car la concentration d’un grand nombre de demandeurs d’asile dans un seul endroit pourrait aboutir à la ghettoïsation de ces personnes. L’afflux de réfugiés étant passé de plus de 7 000 en 1999 à 11 000 en 2002, l’État a dû intervenir directement pour éviter une crise majeure de l’hébergement et assurer des services d’aide et d’hébergement dans l’ensemble du pays. L’état fait tout son possible pour améliorer encore le niveau de ces services qui permettent de répondre d’une manière humaine, équitable et efficace aux besoins de la population réfugiée. Une qualité élevée de service est assurée dans ces lieux d’accueil dispersés et des contacts étroits sont maintenus avec les collectivités locales et les ONG afin d’encourager et de coordonner les services et les initiatives.

28.à propos du problème des parents étrangers d’enfants nés en Irlande, M. Costello précise qu’à la suite d’un amendement constitutionnel approuvé par référendum en juin 2004 la loi sur la nationalité et la citoyenneté irlandaises, entrée en vigueur en janvier 2005, ne permet plus à des parents non ressortissants d’acquérir la nationalité irlandaise lorsqu’ils donnent naissance à un enfant sur le sol irlandais. Le Gouvernement a immédiatement adopté de nouveaux arrangements permettant aux parents étrangers d’enfants nés avant le 1er janvier 2005 de rester en Irlande. Chaque cas est examiné individuellement par un service du Ministère de la justice, de l’égalité et de la réforme législative. Il appartient au demandeur de fournir tous les éléments requis. Il existe une condition de moralité et, si l’autorisation de rester en Irlande est accordée, l’intéressé doit faire tous les efforts pour devenir viable économiquement. Au bout de deux ans, s’il peut montrer qu’il respecte les lois et est économiquement viable, le permis est prolongé de trois ans. Au bout de cinq ans, il peut demander la nationalité irlandaise. Quelque 10 500 demandes ont déjà été reçues au titre de cette procédure. Le nouvel arrangement permettant la réunification familiale ne concerne que les parents et les frères et sœurs. Tout autre membre de la famille demandant à rester en Irlande doit évoquer un autre motif.

29.Répondant à une question concernant la détention des demandeurs d’asile, M. Costello souligne que l’Irlande n’a pas de politique de détention aux fins d’expulsion, bien que l’expulsion des personnes sans statut légal ni moyens d’existence en Irlande soit un élément essentiel de l’intégrité du processus d’asile, ce principe étant reconnu par le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Le système d’expulsion de l’Irlande repose sur une législation complète et l’expulsion n’intervient qu’au terme d’une procédure détaillée offrant plusieurs niveaux de recours. Ensuite, la personne concernée a la possibilité de donner les raisons pour lesquelles elle devrait être autorisée à rester dans le pays, à le quitter ou à consentir à son expulsion. Si elle choisit de quitter le pays mais n’en a pas les moyens, elle reçoit une assistance directement de l’état ou de l’OMI, qui gère des programmes de rapatriement volontaire pour le Ministère de la justice.

30.Les personnes qui font l’objet d’une décision d’expulsion ne sont pas arrêtées en attendant l’application de la décision si elles se conforment aux conditions des services d’immigration, par exemple résider à une adresse précise ou se présenter régulièrement à la police. La détention n’a donc rien de systématique et n’est pas imposée pour autant que les conditions soient respectées. De nombreuses personnes se soustraient aux décisions d’expulsion puisque sur quelque 2 796 décisions qui ont été signées en 2004, seules 598 ont été exécutées. Les mesures de détention sont généralement adoptées en dernier ressort afin d’organiser le voyage ou d’obtenir des documents de voyage. Contrairement à d’autres états de l’Union européenne, l’Irlande n’a pas de centres de détention spéciaux où seraient conduites les personnes qui doivent être expulsées. Ces personnes, dont le nombre est très faible en Irlande, sont détenues dans le centre de détention provisoire de Clover Hil, établissement répondant aux normes de confort et d’hygiène les plus exigeantes, ouvert à Dublin en 1999.

31.M. McCutcheon (Irlande), répondant à la question de savoir si le principe de l’égalité de traitement peut être appliqué aux fonctions de contrôle de l’état, dit que la loi de 2004 sur l’égalité de statut interdit toute discrimination directe ou indirecte dans la prestation des biens et services pour neuf motifs, notamment la race, qui recouvre l’origine ethnique, la couleur, la nationalité ou l’origine nationale. Cette loi complète la loi sur l’emploi qui interdit toute discrimination fondée sur les mêmes motifs dans le domaine de l’emploi. D’après la définition générale énoncée dans la loi sur l’égalité de statut, un service s’entend comme toute prestation mise à la disposition du public ou d’une partie du public contre paiement ou non, qui peut inclure l’accès aux lieux publics, des services de banque, d’assurance, de voyage ou de transport ou encore d’éducation, ou la fourniture de services par des clubs privés. La définition irlandaise de service est notablement plus large que celle de l’article 50 du traité établissant l’Union européenne.

32.Cependant, tous les actes de l’état touchant les particuliers ne peuvent pas être considérés comme des services, par exemple les fonctions de contrôle. Ainsi, la loi sur l’égalité de statut ne s’applique pas à la décision en matière de visas mais à l’interaction entre les agents de l’état et la personne demandant le visa. Le fait que les fonctions de contrôle ne relèvent pas de la loi sur l’égalité de statut ne donne pas carte blanche aux agents de l’état pour exercer des discriminations et leurs actes et décisions peuvent être contestés en justice de différentes manières.

33.En ce qui concerne le Plan d’action national contre le racisme, M. McCutcheon dit que le Gouvernement prend des mesures positives pour empêcher le racisme institutionnel en appliquant une approche interculturelle et des programmes de formation antiraciste dans la fonction publique.

34.L’article 19 de la loi sur l’ordre public sanctionne l’occupation d’une terre si cet acte est susceptible d’endommager le terrain occupé ou d’en détériorer sensiblement la jouissance et permet à la Police nationale d’ordonner à toute personne de quitter un terrain ou d’en évacuer tout objet lui appartenant. Sur la recommandation du Comité consultatif de l’hébergement des gens du voyage, le Ministère de l’environnement a accepté de recommander aux municipalités de s’abstenir autant que possible de demander à la police d’expulser, en application de la loi sur l’ordre public, des familles occupant illégalement un terrain, en attendant qu’elles puissent recevoir une solution d’hébergement des autorités locales. En cas de circonstances exceptionnelles, lorsqu’une famille doit être expulsée, ce sont les pouvoirs de police prévus par la loi sur le logement, dont la portée est plus limitée, qui doivent être appliqués. Le fait qu’une famille a dû évacuer un terrain n’est pas un motif d’exclusion de la liste d’attente de logement prioritaire.

35.Le risque de discriminations multiples à l’égard des membres de minorités ethniques et de la communauté des gens du voyage est un problème dont le Gouvernement est conscient. Au cours de l’élaboration de la loi contre le racisme, une évaluation a été menée avec le concours actif des ONG pour déterminer les catégories de population les plus vulnérables. L’autorité chargée de l’égalité a mené des travaux sur les obstacles multiples auxquels se heurtent les membres des communautés ethniques. Le service du Ministère de la justice chargé de l’égalité entre les sexes a lancé une étude de l’impact des politiques relatives à la communauté des gens du voyage sur les femmes de cette communauté. Pour assurer la protection des femmes des minorités ethniques contre la violence conjugale, le Ministère finance deux associations travaillant auprès de ces femmes pour accroître la sensibilisation au problème et diffuser des informations sur les services d’assistance et les recours juridiques disponibles en Irlande. En outre, il élabore actuellement une campagne d’information visant à lutter contre les stéréotypes et la désinformation en ce qui concerne la violence contre les femmes au sein des minorités, qui comprendra la distribution à grande échelle d’une brochure d’information.

36.M. BRADY (Irlande), répondant aux questions posées à propos des statistiques démographiques, dit que la population irlandaise vient de dépasser 4 millions d’habitants et devrait atteindre 5 millions dans les 15 à 20 années. L’Office de statistiques coopère étroitement avec l’administration pour faire en sorte que le système de statistiques décrive pleinement les changements socioéconomiques qui résulteront de cet accroissement démographique. Chaque département de l’administration élabore actuellement une stratégie en matière de statistiques par laquelle il examine ses besoins en matière de données et les sources de données dont il dispose et coopère avec l’Office de statistiques pour recenser les lacunes et y remédier. L’Office de statistiques travaille également à une série de rapports thématiques sur les jeunes, les personnes âgées, les migrants ou les handicapés qui devraient être publiés dans les deux années à venir.

37.Concernant le problème de la prise en compte de l’origine ethnique dans le recensement de la population, M. Brady dit que le recensement de 2006 comprendra, outre une question sur l’origine ethnique, deux questions sur la nationalité et le pays d’origine qui seront la description statistique faite à partir de la réponse à ces deux questions et pas seulement de l’origine ethnique.

38.M. Byrne (Irlande) explique que le récent Plan d’action national contre le racisme a son origine dans les engagements pris par l’Irlande à la Conférence internationale contre le racisme, en 2001. Un système d’accords de partenariat avec tous les acteurs de la société (syndicats, patronat, secteur bénévole, etc.) permet de diffuser ce document à tous les secteurs de la société. Ce plan met l’accent de façon systématique sur la constitution de réseaux et des mesures de bon sens permettant d’accueillir la diversité culturelle et ethnique en Irlande. Il vise à enraciner ces notions dans tous les divers aspects des services sociaux et de la prestation des services publics. Des plans antiracisme-et-diversité seront élaborés au niveau des municipalités et comtés de tout le pays, le premier devant être lancé tout prochainement à Galway. Des initiatives sont en cours d’élaboration en coopération avec les confédérations de syndicats et d’employeurs pour organiser une semaine de lutte contre le racisme sur le lieu de travail dans toute l’Irlande.

39.M. FARRELL (Commission irlandaise des droits de l’homme), se félicite du niveau et de la qualité du dialogue très opportun et constructif engagé avec le Comité et du sérieux avec lequel le Gouvernement irlandais considère cet échange, comme en témoigne la présence d’une délégation nombreuse. Il explique que la raison pour laquelle le rapport de l’Irlande parle relativement peu des activités de la Commission des droits de l’homme est que cet organisme est très indépendant du Gouvernement. La Commission traite d’une gamme très vaste de questions liées aux droits de l’homme, notamment l’égalité hommes-femmes, les inégalités, le handicap et l’administration de la justice. Le racisme est l’une de ses priorités depuis sa création. Depuis la Conférence mondiale contre le racisme de 2001, elle coopère étroitement avec le Comité consultatif national sur le racisme et l’interculturalisme et le Bureau de l’égalité, ainsi qu’avec des ONG représentant les minorités ethniques, les gens du voyage, les réfugiés et les demandeurs d’asile.

40.Afin d’aborder les problèmes dans le contexte panirlandais, la Commission coopère aussi étroitement avec la Commission des droits de l’homme nord-irlandaise avec laquelle elle a créé un comité mixte sur le racisme qui s’occupe plus particulièrement des problèmes concernant les minorités ethniques dans toute la région irlandaise, notamment les problèmes transfrontaliers. La Commission a publié des documents d’orientation défendant la reconnaissance des gens du voyage en tant que minorité ethnique et a critiqué la législation récente qui pénalise les gens du voyage qui viennent s’installer sur des terrains non autorisés du fait que les autorités locales ne leur assurent pas un hébergement correct et suffisant.

41.La Commission accorde un intérêt particulier à la Convention sur l’élimination de la discrimination raciale et a publié, avec la Commission nord-irlandaise, un guide de l’utilisateur de la Convention à l’usage des ONG qui souhaitent adresser des communications au Comité. En novembre 2004, elle a organisé conjointement avec la Commission nord-irlandaise un séminaire sur l’utilisation de la Convention pour les ONG, auquel a participé la secrétaire du Comité.

42.Concernant la question de l’asile, M. Farrell dit que la Commission a critiqué la proposition du Gouvernement visant à abroger la disposition de la Constitution conférant automatiquement la nationalité irlandaise aux enfants nés en Irlande. Elle a proposé que le droit de résidence soit octroyé au nombre limité de demandeurs d’asile ou de membres de communautés ethniques apparentés à des citoyens irlandais et à des enfants nés avant que la loi ne soit modifiée. à cet égard, il se félicite de l’adoption des mesures permettant aux parents d’enfants nés en Irlande de demander le droit de résidence. La Commission souhaite que ce droit soit accordé de façon générale à tous les parents d’enfants nés en Irlande, à moins qu’il n’y ait de très fortes raisons de ne pas le faire.

43.La Commission a préconisé que les demandeurs d’asile qui attendent depuis longtemps une suite à leur demande soient autorisés à travailler car, étant isolées et hébergées dans des logements dispersés, ces personnes sont dépendantes de l’aide sociale, facteurs qui ont pour effet de les couper du reste de la population et d’attiser les préjugés et l’hostilité à leur égard.

44.La Commission a aussi préconisé de renforcer la loi sur l’incitation à la haine, texte relativement inefficace que le Gouvernement examine depuis 2000, et souhaiterait que cet examen soit achevé rapidement.

45.à mesure que l’économie irlandaise s’est développée et que l’Irlande s’est transformée, passant d’un pays d’émigration à un pays d’immigration, un grand nombre de travailleurs migrants ont afflué en Irlande. Comme la délégation irlandaise l’a reconnu, la législation irlandaise relative à l’immigration est dépassée et ne protège pas suffisamment les droits de ces travailleurs. La Commission a récemment publié conjointement avec la Commission nord‑irlandaise un document sur les normes internationales relatives aux droits de l’homme applicables aux travailleurs migrants et espère que ces normes seront prises en compte dans toute nouvelle législation concernant ces travailleurs. Elle a aussi invité le Gouvernement à ratifier la Convention internationale relative à la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Elle s’inquiète de ce que, dans le système actuel, les permis de travail sont délivrés aux employeurs plutôt qu’aux travailleurs, ce qui les rend vulnérables en cas de conflit avec l’employeur car ils peuvent perdre non seulement leur emploi mais aussi le droit de rester en Irlande. Elle s’inquiète aussi de la situation des travailleuses migrantes dont bon nombre occupent des emplois domestiques où elles sont particulièrement exposées à l’exploitation, et regrette que la protection prévue par la loi sur l’égalité de 2000 ne couvre pas ces travailleuses. Elle est préoccupée également par la situation des femmes amenées en Irlande pour travailler dans l’industrie du sexe.

46.La Commission irlandaise des droits de l’homme a joué un rôle actif dans le processus consultatif qui a abouti à l’adoption du plan gouvernemental de lutte contre le racisme. Elle a appris avec satisfaction que les minorités seront représentées dans le comité directeur de ce plan d’action. Elle souligne également qu’il devra recevoir un financement suffisant pour être efficace.

47.Enfin, la Commission souscrit sans réserve à l’observation faite à la séance précédente par un membre du Comité selon laquelle l’Irlande aura la possibilité, dans le cadre de la prochaine législation sur les permis de travail et de l’application du Plan d’action national contre le racisme, non seulement de satisfaire au minimum requis pour éviter les critiques du Comité, mais aussi pour montrer l’exemple en Europe en se dotant d’une législation globale et progressiste et en agissant vigoureusement pour éradiquer le racisme dans le pays. La Commission note que le Gouvernement irlandais compte saisir cette occasion, et entend coopérer avec lui en ce sens de façon constructive et critique.

48.Mme CONNELLY (Commission irlandaise des droits de l’homme), dit qu’il est important de comprendre que la fonction d’enquête de la Commission n’est pas une fonction isolée mais qu’elle est liée à d’autres fonctions comme l’examen permanent des lois et des pratiques de l’état et la sensibilisation à l’importance des droits de l’homme en Irlande, ainsi que la formulation de recommandations visant à renforcer la protection des droits de l’homme. Par exemple, lorsque des plaintes individuelles laissent penser qu’il existe une lacune dans la législation ou soulèvent la question de la compatibilité d’une pratique avec les normes relatives aux droits de l’homme, la Commission peut décider d’enquêter afin de déterminer s’il existe vraiment une telle lacune dans la loi ou des pratiques contraires aux normes internationales. Depuis 2003, la Commission traite un nombre important de plaintes et de communications individuelles en attente. Elle a décidé d’enquêter sur deux affaires, l’une concernant les aides aux travailleurs sociaux, l’autre le traitement d’un ressortissant étranger à l’aéroport de Dublin, en vue de mettre au clair la loi et la pratique dans les domaines considérés et d’appeler l’attention sur la législation et la pratique pour ce qui est de l’entrée des étrangers sur le territoire irlandais et des normes internationales applicables.

49.La Commission n’a donc pas pour vocation première d’offrir un recours aux individus en cas d’atteinte aux droits de l’homme et ne remplit pas la fonction d’un tribunal. Dans certains cas, la Commission peut toutefois aider une personne à engager une action en justice concernant des questions de droits de l’homme, et engager elle-même des poursuites pour défendre les droits d’un individu ou d’un groupe d’individus.

50.M. de GOUTTES dit que l’idée suggérée par le Comité était de modifier le Code pénal de façon à instaurer une circonstance générale aggravante qui tienne compte du mobile raciste de certaines infractions pénales mais pas, comme semble l’avoir compris la délégation, de tenter d’influencer les magistrats avant qu’ils ne rendent leur jugement, ce qui menacerait leur indépendance.

51.M. de Gouttes estime que la réserve formulée par l’Irlande à l’égard de l’article 4 de la Convention est davantage théorique que pratique, l’État partie étant parvenu à garantir la liberté d’expression tout en pénalisant l’incitation à la haine raciale dans sa loi de 1989.

52.M. THORNBERRY est conscient de ce que le fait que les gens du voyage bénéficient d’une moins bonne protection que les minorités ethniques en général ne résulte pas d’une politique délibérée de l’État partie, et estime qu’il serait souhaitable que ce groupe de population soit reconnu en tant que minorité ethnique. À ce sujet, il prend note avec satisfaction de l’ouverture d’esprit de la délégation.

53.M. Thornberry se demande dans quelle mesure le pouvoir judiciaire se réfère aux normes impératives du droit international général, et notamment aux normes établies par les organes de l’ONU ainsi qu’aux principes consacrés dans la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale. Il souhaite par ailleurs savoir quelle conduite devrait tenir un chef d’établissement scolaire si une élève de confession musulmane portait le foulard islamique en classe, et, en particulier, si le port du voile pourrait être jugé incompatible avec l’uniforme scolaire. Il souhaite savoir en outre si les Sikhs peuvent porter le turban en toutes circonstances dans l’État partie.

54.M. AMIR demande si, lorsqu’il crée une commission d’enquête, l’État partie veille à ce que les membres qui la composent proviennent d’horizons et de groupes ethniques divers et représentent différents modes de pensée, afin de permettre le débat contradictoire indispensable pour prendre une décision qui soit «la moins injuste possible». Il fait observer que le fait que l’État partie a donné la parole aux ONG nationales dans le cadre de l’examen de son rapport périodique confirme l’attachement de l’Irlande à la liberté.

55.M. KJAERUM se demande si les membres de la communauté des gens du voyage, des réfugiés ou des migrants sont associés à la stratégie nationale de lutte contre la pauvreté et, dans la négative, si l’État partie entend veiller à ce que ces groupes de population soient représentés au sein des organismes qui œuvrent dans ce domaine. Il voudrait savoir si le Gouvernement fournit aux ONG de défense des droits des migrants et des réfugiés l’appui nécessaire pour qu’elles puissent fonctionner.

56.M. Kjaerum voudrait également savoir pour quelle raison, en matière d’embauche, la loi prévoit d’autoriser l’employeur à embaucher un travailleur migrant plutôt que de délivrer un permis de travail à l’employé concerné, ce qui revient à lier le permis de travail à un lieu de travail donné. Il demande à la délégation de bien vouloir indiquer si l’État partie entend modifier cette législation.

57.M. Kjaerum voudrait savoir en outre si les demandeurs d’asile et les personnes en instance d’expulsion sont détenus avec les criminels de droit commun − auquel cas il serait impératif de modifier la législation − ou s’ils sont placés dans des quartiers séparés, et ce que fait l’État partie pour éviter que les personnes dont le dossier est bloqué pour quelque raison que ce soit ne soient privées de liberté tant que la procédure, qui peut durer plusieurs années, n’a pas abouti.

58.M. DOYLE (Irlande) remercie M. de Gouttes de la précision qu’il a apportée concernant la suggestion du Comité d’inscrire dans la loi une disposition générale en vertu de laquelle l’existence d’une motivation raciste constituerait une circonstance aggravante. Il ajoute que la position de l’Irlande quant à sa réserve concernant l’article 4 de la Constitution n’a pas évolué car elle continue de considérer que les dispositions de cet article constituent une entrave à la liberté d’expression. Cependant, M. Doyle s’engage à faire part aux autorités irlandaises compétentes de l’opinion du Comité à ce sujet.

59.M. Doyle dit que les juges irlandais invoquent parfois les normes internationales mais que d’une manière générale ils se réfèrent d’abord à la Constitution, puis aux conventions européennes relatives aux droits de l’homme et enfin aux normes de l’ONU.

60.M. McCUTCHEON (Irlande) dit que la jurisprudence irlandaise ne fait à sa connaissance état d’aucune affaire relative au port du foulard islamique à l’école, et que toute sanction prise par un chef d’établissement scolaire pour ce motif serait contraire aux dispositions de la loi sur l’égalité de traitement (Equal Status Act) et constituerait une discrimination fondée sur la religion et le sexe. Par contre, il serait préférable que le foulard soit de la même couleur que l’uniforme scolaire.

61.Mme FAUGHNAN (Irlande) dit qu’en réunissant des membres d’ONG, des partenaires sociaux, des personnes issues de la société civile et d’autres secteurs ainsi que des personnes pour qui la pauvreté est une réalité, le forum pour l’intégration sociale organisé dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté facilite la consultation au niveau national et permet d’associer les parties prenantes au processus. Il signale que de nombreux groupes d’ONG représentant des minorités ethniques comme les Hongrois ou les Philippins ont participé au dernier forum, qui s’est tenu le 26 janvier 2005.

62.M. MURRAY (Irlande) rappelle que l’Irlande s’est dotée d’une politique d’immigration qui fait partie des plus libérales en Europe. Il reconnaît que la législation prévoit effectivement d’autoriser l’employeur à embaucher un travailleur migrant plutôt que de délivrer un permis de travail à l’employé concerné, mais c’est avant tout à des fins de «traçabilité» et d’efficacité, car les démarches sont plus rapides lorsque l’employeur adresse directement la demande de permis aux autorités compétentes. Si l’employé concerné est victime de discrimination sur son lieu de travail ou souhaite changer d’employeur, rien ne l’empêche de chercher un nouvel emploi car il n’est pas lié à l’employeur.

63.M. COSTELLO (Irlande) dit que, pour appuyer les activités des groupes œuvrant en faveur des demandeurs d’asile et des réfugiés, le Ministère de la justice, de l’égalité et de la réforme législative verse chaque année au Conseil irlandais des réfugiés une subvention de 100 000 euros.

64.M. Costello dit ensuite que, dans le cadre des procédures d’expulsion, les autorités compétentes n’ordonnent le placement en détention de réfugiés ou de demandeurs d’asile qu’en dernier recours. Tout est fait pour que la détention ne se prolonge pas indûment, la loi de 1999 sur l’immigration fixant à huit semaines la durée maximale de la détention, à moins que la personne concernée n’entame une procédure en révision judiciaire. Par ailleurs, les personnes concernées sont détenues séparément dans les centres de détention préventive.

65.M. FABEY (Irlande) dit que le Gouvernement irlandais réfléchira à la possibilité suggérée par le Comité d’octroyer aux gens du voyage le statut de groupe ethnique, mais fait observer que cette communauté n’en a jamais exprimé le vœu.

66.Mme CONNELLY (Irlande) précise que la loi portant création d’une commission d’enquête dispose expressément que les membres de cette dernière doivent refléter la société irlandaise. De la même manière, la Commission irlandaise des droits de l’homme compte parmi ses membres un représentant de la communauté des gens du voyage et une personne de confession juive. Pour l’heure, ce sont les membres de la Commission qui sont chargés, en coopération avec les autorités compétentes, d’instruire les plaintes dont la Commission est saisie. Il reste encore à définir les modalités selon lesquelles la Commission procédera à l’audition de témoins lorsque cela se révélera nécessaire. Mme Connelly prend bonne note des remarques de M. Amir sur la composition de la commission d’enquête.

67.M. HERNDL félicite la délégation pour l’exhaustivité de son rapport qui aborde toutes les questions visées par la Convention. Il accueille avec satisfaction les changements que l’Irlande a apportés à sa législation pour la mettre en conformité avec les dispositions de la Convention ainsi que la création de la Commission irlandaise des droits de l’homme, qui devra être dotée de fonds suffisants.

68.M.Herndl dit que, dans ses observations finales, le Comité devrait appeler l’attention sur la situation des gens du voyage, qui mériteraient d’obtenir le statut de minorité ethnique à part entière et qui devraient être associés à l’adoption des décisions les concernant, voire faire partie des organes législatifs. Le Comité pourra recommander d’éliminer tout traitement discriminatoire à leur égard et de modifier un certain nombre de lois telles que la loi sur le logement des gens du voyage.

69.M. Herndl note que le Comité et l’Irlande semblent avoir une divergence d’opinions au sujet de l’intégration de la Convention dans l’ordre juridique interne et de la réserve du pays à l’article 4 de la Convention. Enfin, il rappelle que le Comité n’a pas pour vocation de critiquer ni de sanctionner les États parties mais de leur donner des conseils propres à les aider à mettre en œuvre au mieux les dispositions de la Convention.

70.M. FABEY (Irlande) remercie les membres du Comité de l’intérêt qu’ils ont manifesté à la mise en œuvre en Irlande des droits consacrés dans la Convention, ainsi que la Commission irlandaise des droits de l’homme et toutes les personnes qui ont pris part au débat.

71.Le PRÉSIDENT déclare que le Comité a ainsi achevé l’examen du rapport initial et du deuxième rapport périodique de l’Irlande.

72. La délégation irlandaise se retire.

La séance est levée à 13 h 5.

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