Nations Unies

CERD/C/SR.1950

Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

26 mai 2010

Français

Original: anglais

Comité pour l ’ élimination de la discrimination raciale

Soixante- quin z ième session

Compte rendu analytique de la 1950 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 13 août 2009, à 15 heures

Président e: Mme Dah

Sommaire

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties conformément à l’article 9 de la Convention (suite)

Quinzième à dix-huitième rapports périodiques du Chili

La séance est ouverte à 15 heures.

Examen des rapports, observations et renseignements présentés par les États parties en application de l’article 9 de la Convention (point 5 de l’ordre du jour) (suite)

Quinzième à dix-huitième rapports périodiques du Chili (CERD/C/CHL/15-18; CERD/C/CHL/Q/15-18; HRI/CORE/1/Add.103)

1. Sur l’invitation de la Présidente, la délégation chilienne prend place à la table du Comité.

2. M me Quintana (Chili) dit que le rapport périodique du Chili (CERD/C/CHL/15-18) est le fruit de consultations élargies menées avec les secteurs et les institutions qui veillent au respect des obligations contractées par le pays en tant qu’État partie à la Convention.

3. En 1990, le Chili s’est engagé sur la voie de la restauration de la démocratie et du respect des droits de l’homme, en privilégiant les principes de dignité inhérente à tous les êtres humains, d’égalité de tous devant la loi et de non-discrimination. L’émergence d’une société respectueuse et fière de ses multiples cultures et identités est une tâche qui incombe non seulement à l’État mais aussi à l’ensemble de la société et qui requiert un processus de changement culturel à long terme.

4. Plus spécifiquement, le Chili a entamé un processus qui vise à reconnaître l’identité des peuples autochtones et à réparer les torts du passé. Il reste au pays un long chemin à parcourir pour y parvenir mais l’équilibre atteint est positif. L’Office national de développement autochtone (CONADI), un organisme public participatif, est chargé de promouvoir, coordonner et mettre en œuvre la politique autochtone. Une commission de haut niveau du CONADI a approuvé le principe de réparation. Des progrès ont été effectués en matière de restitution des terres aux communautés autochtones et plusieurs activités interculturelles ont été réalisées dans les domaines des soins de santé, de l’éducation, du logement et de l’agriculture. Surtout, les Chiliens ont pour la première fois reconnu que les droits des différents groupes et cultures ethniques du pays doivent être défendus et respectés par tous.

5. Grâce à la ratification de la Convention n° 169 de l’Organisation internationale du travail (OIT) de 1989 concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants, approuvée à l’issue de longues négociations parlementaires, le Chili est passé d’une politique d’assistance aux autochtones à une politique de reconnaissance des droits des peuples autochtones. En avril 2009, le Président de la République a fixé les principes de base devant régir la politique autochtone dans le plan d’action «Re-Conocer («reconnaître»): Un pacte social pour le multiculturalisme». L’engagement du Gouvernement s’étend à toutes les personnes qui s’identifient comme autochtones, ce qui représente plus d’un million de personnes, soit environ 6,6 % de la population, dont 70 % vivent en zone urbaine et 30 % en zone rurale. Les objectifs premiers de ce plan sont notamment de faire davantage participer les peuples autochtones à la prise de décisions et de veiller à ce que les acteurs de la société civile autochtones soient entendus.

6. Les résultats atteints à ce jour sont notamment les suivants: tenue de consultations avec les peuples autochtones; ratification de la Convention n° 169 de l’OIT; approbation par le Sénat de la loi relative à la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones; promulgation d’une loi portant création et réglementation d’un espace maritime côtier des peuples autochtones; incorporation de normes multiculturelles dans la loi générale sur l’éducation; adoption d’un amendement constitutionnel qui établit les territoires spéciaux de l’île de Pâques et de l’archipel de Juan Fernández et examen subséquent par le Congrès de la création du statut administratif spécial de l’île de Pâques; restitution de plus de 650 000 hectares de terres aux communautés autochtones; renforcement du programme de bourses d’études et de résidence des étudiants autochtones; amélioration du programme interculturel en matière de santé pour les peuples autochtones et construction de jardins d’enfants interculturels dans les principales villes du pays; élaboration d’un programme d’infrastructure rurale; et subventions à l’acquisition de logements par les peuples autochtones.

7. En outre, un Conseil ministériel pour les affaires autochtones a été créé ainsi que des unités chargées des affaires autochtones au sein des ministères et des bureaux des gouverneurs de province. Les organismes publics ont pris des dispositions en vue de la mise en œuvre de la Convention n° 169, qui entrera en vigueur le 15 septembre 2009. Depuis juin 2008, les entités publiques sont tenues de mener des consultations auprès des peuples autochtones sur les questions qui concernent directement leurs communautés. La première consultation a mis l’accent sur la participation politique des communautés autochtones, notamment leur représentation au Parlement et dans les conseils régionaux, et la création d’un Conseil des peuples autochtones. Une deuxième consultation a été récemment organisée au sujet de la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones et une troisième, qui portera sur la procédure à suivre en matière de consultations, conformément à l’article 6 de la Convention n° 169 de l’OIT, sera prochainement organisée. Les universités du pays ont également été invitées à identifier les dispositions législatives en vigueur qui devraient être mises en conformité avec la Convention de l’OIT.

8. Le Chili qui, par le passé, a connu un fort mouvement d’émigration, connaît une nouvelle vague d’immigration en provenance des pays de la région andine dans laquelle les femmes sont majoritaires. Une haute priorité est accordée à la promotion des droits des migrants et des membres de leur famille. Sur les 317 057 immigrés résidant actuellement au Chili, seuls environ 7 300 d’entre eux, soit 2,3 %, sont en situation irrégulière. Les mesures de régularisation adoptées récemment ont permis d’octroyer un titre de séjour d’un an à plus de 47 600 immigrés. Le Chili a ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée. Deux projets de loi ont été élaborés en vue d’harmoniser les dispositions de la législation nationale avec la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer.

9. Des mesures ont été prises pour régulariser la situation des femmes migrantes enceintes et de garantir l’accès des enfants et adolescents de migrants au système de santé, quel que soit le statut de leurs parents, ainsi que l’accès de tous les migrants, quel que soit leur statut, aux soins de santé d’urgence dans les hôpitaux publics. Des dispositions ont également été prises pour régulariser la situation de tous les enfants de migrants inscrits dans des établissements scolaires et faciliter l’accès de tous les enfants de migrants et de réfugiés à l’enseignement préscolaire.

10. Il reste cependant beaucoup à faire et les migrants continuent d’être en butte à la discrimination. Le Gouvernement a donc élaboré une politique migratoire nationale qui vise à coordonner l’action de l’État et de la société civile en faveur des migrants.

11. Le Chili a accueilli la Conférence régionale des Amériques avant la tenue de la Conférence mondiale de 2001 contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée. De 2002 à 2007, le pays a présidé le Groupe de travail intergouvernemental pour l’application effective de la Déclaration et du Programme d’action de Durban et joué un rôle actif au sein de la Conférence d’examen de Durban d’avril 2009.

12. Un projet de loi prévoyant l’introduction de mesures pour lutter contre la discrimination et réprimer les actes discriminatoires est actuellement débattu par le Parlement et devrait être promulgué avant la fin du mandat présidentiel.

13. Bien que la politique autochtone ait donné lieu à un dialogue intercommunautaire, des sources de conflit subsistent, quoique à très petite échelle, parmi quelque 3 000 communautés autochtones. Un incident douloureux a d’ailleurs eu lieu la veille au cours duquel un membre de la communauté mapuche a trouvé la mort. Le Gouvernement réaffirme son attachement à la primauté du droit, au dialogue et à la participation des autochtones. Le Chili rejette toutes les formes de violence, qui ne peuvent que nuire à la cause autochtone.

14. M. Zanzi (Chili) dit que les traités internationaux relatifs aux droits de l’homme, y compris la Convention, ont été incorporés en droit interne en vertu de l’article 5 de la Constitution, ce qui leur confère un rang intermédiaire entre la Constitution et la loi ordinaire. En outre, l’article 54 de la Constitution stipule qu’il ne peut être dérogé aux dispositions d’un traité et qu’elles ne peuvent être ni modifiées ni suspendues, excepté selon les modalités prévues par les traités eux-mêmes ou en vertu des normes générales du droit international. La Constitution garantit également l’égalité de tous devant la loi.

15. En vertu d’une loi promulguée le 18 juillet 2009, les crimes contre l’humanité, le génocide et les crimes de guerre sont définis conformément au Statut de Rome, qui retient la discrimination raciale ou ethnique comme circonstance aggravante et incrimine l’intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe ethnique ou racial. La législation régissant les Églises et les organisations religieuses interdit la discrimination fondée sur les croyances religieuses. La loi sur l’éducation, d’adoption récente, fait obligation à l’État de promouvoir des politiques d’éducation qui reconnaissent et promeuvent les cultures autochtones, y compris l’enseignement bilingue, et d’interdire toutes les formes de discrimination à l’égard des étudiants et des membres de la communauté universitaire. En vertu de la loi relative aux autochtones, tout acte discriminatoire manifeste et intentionnel visant les populations autochtones fondé sur leur origine et leur culture est puni par une amende comprise entre une et cinq fois le salaire mensuel minimum. Le Code du travail interdit également la discrimination fondée sur une longue liste de motifs qui enfreignent le principe d’égalité des chances ou de traitement dans l’emploi.

16. En 2005, un projet de loi a été élaboré afin d’uniformiser les normes existantes et d’identifier les différentes catégories d’actes passibles de poursuites. Ce texte, qui prévoit toute une série de mesures de lutte contre la discrimination fondées sur le droit international, dont la Convention, est actuellement débattu par le Parlement. Il interdit toute distinction, exclusion, restriction ou préférence par l’État ou des particuliers qui prive, perturbe ou menace l’exercice légitime des droits établis dans l’ordre juridique et les traités internationaux ratifiés par le Chili. Parmi les motifs proscrits figurent, entre autres, la race, l’ethnie, l’origine nationale, la situation socioéconomique, le lieu de résidence, la langue, l’idéologie ou l’opinion politique, la religion ou la croyance, l’appartenance à un syndicat, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge, l’apparence physique, et l’infirmité ou le handicap. Les parties lésées peuvent saisir les tribunaux de seconde instance en vue d’un prompt rétablissement de leurs droits. Si la plainte est jugée recevable, ils peuvent demander réparation des préjudices subis. Lorsqu’une infraction à la loi pénale est motivée par une discrimination arbitraire, ce fait peut être considéré comme une circonstance aggravante. L’incitation à la haine ou l’hostilité fondée sur la race, le sexe, la religion ou la nationalité constitue également une infraction pénale.

17. M. Marifil (Chili) explique que la Directive présidentielle n° 5 du 25 juin 2008 avait pour objet d’encourager la consultation des peuples autochtones au sujet de toutes les initiatives législatives et administratives susceptibles de les affecter. Conjointement avec le plan «Re-Conocer», cette directive créera progressivement une situation propice à la mise en œuvre des mesures spécifiques de participation requises pour assurer le plein respect de la Convention n° 169 de l’OIT. Par voie de fait, il s’agit là d’un processus graduel mais qui débouchera sur l’adoption de dispositions consensuelles conformes aux normes internationales.

18. La consultation engagée sur la procédure à suivre en matière de consultation conformément à l’article 6 de la Convention n° 169 de l’OIT tient compte des principes directeurs formulés par le Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones en avril 2009. Conformément à ses recommandations, des mesures ont été prises pour que des experts indépendants participent à cette consultation et donnent leur avis. Une attention particulière sera accordée aux enseignements du passé et aux meilleures pratiques enregistrées dans ce domaine afin de remédier aux lacunes des procédures antérieures.

19. Conformément au principe de souplesse recommandé par la Convention n° 169, de prestigieuses universités chiliennes ont été invitées à effectuer des travaux de recherche sur les lacunes de la législation en vigueur.

20. La deuxième consultation des peuples autochtones sur la reconnaissance constitutionnelle est quasiment terminée et ses résultats seront soumis au Congrès afin qu’il en débatte dans un proche avenir. Le principe a été approuvé par le Sénat le 7 avril 2009 et la Commission sénatoriale sur la Constitution, la législation, la justice et la réglementation est disposée à le soutenir. Il sera tenu compte des ateliers et des autres activités organisés par les conseillers autochtones du CONADI. Dès leur travail achevé, ils transmettront leurs conclusions au Sénat, qui a également reçu des observations, des suggestions et des critiques de la part des communautés et des organisations des peuples autochtones ayant participé à la procédure de consultation. Les suggestions du Rapporteur spécial concernant les principes internationaux applicables aux consultations seront également prises en compte.

21. M. Durán (Chili) dit que le CONADI et le Ministère des biens nationaux ont entamé le processus de régularisation des terres autochtones. Dans le cadre du plan «Re-Conocer», des mesures ont été prises pour rationaliser la procédure de restitution des terres aux fins de règlement des revendications relatives aux terres ancestrales. Les politiques foncières autochtones mises en œuvre par le CONADI ont été réexaminées et actualisées à la lumière d’événements récents, en vue, éventuellement, de modifier les procédures réglementaires pertinentes.

22. La loi relative aux autochtones de 1993 reconnaît le droit des communautés autochtones de réclamer la restitution des titres de propriété sur les terres et l’eau et institue un mécanisme de règlement des revendications foncières. Entre 1994 et 2009, 657 520 hectares ont été acquis et restitués aux peuples autochtones, au profit de 69 200 familles et de 613 communautés. Bien que le mécanisme d’acquisition de terres par les peuples autochtones soit très complexe, des objectifs clairs et des échéanciers ont été établis dans le cadre du plan «Re-Conocer» pour la période 2008-2010 et une enveloppe financière a été consacrée à la mise en œuvre des mesures pertinentes. La priorité ira à l’acquisition de terres par les 115 communautés qui n’ont pas reçu de titre foncier au cours de la période 2001-2007. Entre avril 2008 et mars 2009, des terres ont été acquises au bénéfice de 46 communautés; l’objectif pour 2009 étant d’en acquérir pour 45 autres. En mars 2008, 308 demandes avaient été reçues; 98 communautés pouvant prétendre à la restitution ont été identifiées à ce jour pour la période 2008-2010. Les décisions quant à la recevabilité de 200 autres demandes seront rendues avant fin 2009.

23. La loi relative aux autochtones prévoit, notamment, l’acquisition de terres ayant une importance culturelle pour les communautés concernées et des terres traditionnellement occupées et détenues par des personnes et des communautés autochtones, à condition que leur titre ait été inscrit au registre public des terres autochtones. La loi prévoit une protection spéciale des droits ancestraux à l’eau des communautés aymaras et atacameñas et garantit la protection, la constitution et la restauration de ces droits. Les ressources hydriques des terres aymaras et atacameñas sont considérées comme des biens détenus et utilisés par la communauté, sans préjudice des droits enregistrés par des tiers au titre du Code des eaux. Des recours constitutionnels peuvent être formés pour protéger les droits des détenteurs de titres. La loi relative aux autochtones prévoit également qu’aucun droit supplémentaire ne sera accordé sur les ressources hydriques détenues par diverses communautés, à moins qu’un approvisionnement normal en eau ait été au préalable assuré.

24. Un accord signé en 1997 par la Direction générale des eaux et le CONADI prévoit la constitution et la protection des droits ancestraux sur les ressources en eau des communautés aymaras et atacameñas; la restitution de ces droits incombe au Fonds des terres et eaux autochtones. L’accord stipule également que le CONADI doit être consulté pour toute demande relative à l’exploitation ou à l’exploration des eaux dans les régions d’Arica, de Parinacota et de Tarapacá qui serait susceptible d’affecter les communautés aymaras et atacameñas. Toutes les demandes qui enfreignent les droits ancestraux sur les eaux sont rejetées.

25. M. Marifil (Chili) dit que le plan «Re-Conocer» contient un ensemble de mesures en vue d’améliorer la participation politique des peuples autochtones, y compris leur participation au débat public par le biais de l’élection de représentants autochtones au Congrès national et leur participation aux conseils régionaux, et de créer un Conseil des peuples autochtones. Il n’existe pas, pour l’heure, de mécanisme institutionnel permettant d’encourager la participation des peuples autochtones à la vie publique ou politique du pays.

26. Les mesures susmentionnées s’inspirent des recommandations pertinentes formulées tant par la Commission de la vérité historique et la nouvelle que par les peuples autochtones et tiennent compte du fait que des réformes institutionnelles sont nécessaires pour permettre aux peuples autochtones d’élire leurs propres représentants à la Chambre des députés et aux conseils régionaux. Le Conseil des peuples autochtones que l’on se propose de créer pourrait servir de forum aux fins de parvenir à un consensus entre les divers groupes autochtones et permettre à ces derniers d’exprimer leurs vues et de participer davantage à la formulation des politiques publiques qui les concernent directement.

27. Au cours du premier trimestre 2009, les peuples autochtones ont été consultés au sujet des initiatives susmentionnées. Les résultats de cette consultation, qui ont été publiés sur le site Internet du CONADI, serviront de référence pour élaborer la législation appropriée.

28. M. Flores (Chili) indique que tout un éventail d’initiatives a été élaboré, en coopération avec la société civile, afin de promouvoir l’intégration des migrants, dont un plan national d’action des droits de l’homme qui mettra notamment l’accent sur les migrations et l’asile. La nouvelle législation adoptée en 2008 en matière de migration instaure davantage de souplesse dans les réglementations relatives à la délivrance de permis de résidence et prévoit notamment des dates limites de présentation des demandes plus longues dans le but de prévenir les conditions de travail précaires auxquelles les migrants sont souvent soumis. Le Congrès débat actuellement d’un projet de réforme de la législation en matière de migration en vertu duquel la durée du contrat de travail sera dissociée de la période de validité du permis de séjour.

29. Une vaste campagne de régularisation a été organisée aux termes de laquelle 47 665 permis de séjour d’une durée d’un an ont été délivrés; passé le délai d’une année, les intéressés peuvent demander le statut de résident permanent au Chili. Conformément aux nouvelles dispositions régissant les infractions à la législation en matière de migration, les sanctions infligées aux employeurs sont beaucoup plus sévères que celles encourues par les travailleurs migrants.

30. De nombreux progrès ont été effectués en ce qui concerne l’accès des migrants à la santé et à l’éducation, comme le montrent les mesures prises pour permettre aux enfants et aux femmes enceintes migrants d’accéder aux soins de santé et à tous les migrants, quel que soit leur statut, de bénéficier de soins médicaux d’urgence. Des mesures ont également été prises pour faciliter la scolarisation des enfants de migrants aux niveaux préscolaire, primaire ou secondaire, qu’ils soient ou non en situation régulière.

31. En coopération avec les organisations internationales et la société civile, plusieurs activités ont été menées pour sensibiliser les fonctionnaires des services d’immigration et les forces de police aux questions relatives à la migration et à l’asile, y compris au problème de la traite des êtres humains. Le personnel des institutions publiques travaillant avec les migrants a également reçu une formation adéquate.

32. Des dispositions ont été prises dans le cadre des accords d’intégration tels que le Marché commun du Sud (Mercosur) et la Communauté andine en vue de la reconnaissance des diplômes et des études. Les pays signataires de l’Accord Andrés Bello reconnaissent mutuellement les diplômes d’études primaires et secondaires non professionnelles et les certificats de fin d’études. De même, en vertu de l’Accord Andrés Bello, des dispositions ont été prises en vue de la reconnaissance des diplômes professionnels, requis pour exercer un emploi au Chili. Les ressortissants des pays non signataires de l’Accord peuvent demander la reconnaissance de leurs diplômes auprès de l’Université du Chili.

33. Les manuels scolaires font l’objet d’un réexamen en coopération avec les pays voisins, notamment le Pérou et la Bolivie. L’analyse porte, notamment, sur la manière dont l’histoire est décrite dans les manuels scolaires et a pour objectif de promouvoir l’intégration et une culture de paix. Un projet est actuellement mis en œuvre en coopération avec l’Argentine intitulé «Un nouveau modèle de citoyenneté, de culture de paix et d’intégration» en vue de l’élaboration d’un manuel d’enseignement privilégiant une culture de paix et d’intégration qui sera utilisé au Chili et en Argentine.

34. M. Avtonomov (Rapporteur pour le Chili) félicite l’État partie de son rapport complet et plutôt autocritique, qui reconnaît la persistance d’éléments constitutifs d’une discrimination structurelle. Il est satisfait d’apprendre que le Chili a mené une enquête sur la situation socioéconomique nationale (enquête CASEN) qui a permis de recueillir des informations sur les peuples autochtones et les migrants et estime que ces données constituent une bonne base pour l’élaboration de politiques visant à répondre aux problèmes rencontrés par ces groupes.

35. Il y a également lieu de se féliciter de la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones et de la ratification par le Chili de la Convention n° 169 de l’OIT. La création de toute une série d’institutions spécialisées dans les questions relatives aux peuples autochtones, dont le CONADI, le Fonds des terres et eaux autochtones, le Fonds de développement autochtone, la Commission de la vérité historique et la nouvelle donne et le Bureau du défenseur public aux affaires pénales concernant les Mapuches, mérite également d’être saluée.

36. M. Avtonomov se félicite en outre de la reconnaissance juridique des droits ancestraux du peuple mapuche à l’utilisation et l’exploitation du littoral mais regrette que le projet de loi portant création de l’espace maritime côtier des peuples autochtones initialement soumis en 2005 ne soit toujours pas entré en vigueur deux ans après son adoption. Il est regrettable que les amendements apportés dans l’intervalle à la loi sur la pêche menacent d’annuler un bon nombre des droits codifiés par ledit projet de loi. Il demande à la délégation chilienne d’indiquer si la législation relative aux droits des autochtones prime sur les autres lois dont les dispositions lui sont contraires et, dans la négative, quelles mesures ont été prises pour remédier à ce problème.

37. M. Avtonomov se félicite de l’adoption du plan de protection intégrale pour les peuples kawésqar et yagán et souhaite savoir pourquoi le nombre de membres du peuple aymara n’a cessé de décliner entre 1996 et 2006. Notant que le territoire occupé par ce dernier s’étend sur des zones situées au Chili, au Pérou et en Bolivie, il souhaite savoir quelles dispositions ont été prises pour garantir la protection de ce peuple en cas de litiges transfrontaliers et pour veiller à ce que ses membres puissent maintenir des liens culturels et familiaux avec les Aymaras qui vivent de l’autre côté de la frontière.

38. M. Avtonomov demande des précisions sur les critères d’application de la loi antiterroriste et sur la définition du terrorisme qui y est donnée. Rappelant les préoccupations exprimées par le Comité des droits de l’homme sur ce point en 2007 dans ses observations finales concernant le Chili (CCPR/C/CHL/CO/5, par. 7), il considère qu’il est important que cette loi ne soit pas invoquée pour tenter d’alléger le travail de police. Le Rapporteur se dit particulièrement préoccupé que cette loi repose sur la mise en œuvre d’une procédure pénale spéciale.

39. M. Avtonomov souhaite savoir si les fonctionnaires de police accusés d’infractions sont toujours jugés en vertu d’une procédure pénale spéciale. Les informations communiquées au Comité sur ce point critiquent cette procédure jugée à la fois systématique et injuste du fait que les victimes d’infractions disposent de beaucoup moins de garanties dans le cadre de celle-ci que d’une procédure ordinaire.

40. M. Avtonomov invite la délégation chilienne à expliquer quels sont les problèmes implicites que le pays rencontre en matière de restitution des terres ancestrales aux peuples autochtones et à indiquer les différends actuels en la matière. Il souhaiterait également obtenir des informations complémentaires sur la législation relative à la reconnaissance constitutionnelle des peuples autochtones et note que, selon plusieurs informations, les groupes autochtones n’ont pas été consultés lors de l’élaboration de cette loi.

41. M. Avtonomov s’interroge sur le point de savoir si une action en justice a été intentée contre les dirigeants du «Commando Hernán Trizano», un groupe paramilitaire anti-mapuche qui sévit dans la région de l’Araucanía. Selon un article paru dans la presse le 19 juillet 2009, des dirigeants mapuches auraient été menacés par l’explosion de charges de dynamite.

42. Enfin, le Rapporteur se félicite que la Convention ait été invoquée en 2002 par un tribunal chilien de première instance.

43. M. Lahiri demande des informations complémentaires sur la restitution de terres aux peuples autochtones et en particulier sur les raisons pour lesquelles des différends liés à cette question persistent.

44. M. Lahiri salue les efforts déployés par le Gouvernement chilien pour modifier l’opinion raciste et socialement régressive d’un fort pourcentage de la population identifiée par diverses enquêtes et études d’opinion. Il exhorte l’État partie à poursuivre ses efforts en ce sens et à continuer d’appliquer les mesures adoptées pour améliorer la situation économique de l’ensemble de la population et éliminer les importantes disparités qui subsistent.

45. Bien que des progrès significatifs aient été enregistrés, l’État partie n’a pas encore adopté de législation pleinement conforme aux dispositions de la Convention. Il convient cependant de saluer la participation active du Chili à la Conférence mondiale de 2001 contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée et à la Conférence d’examen de Durban de 2009.

46. M. Cali Tzay souhaite obtenir des informations sur le statut juridique des consultations qui ont été menées préalablement à l’élaboration du projet de loi qui établit des mesures contre la discrimination et à la ratification de la Convention n° 169 de l’OIT. Il souhaite savoir s’il existe des dispositions permettant de veiller à ce qu’aucune décision directement liée aux droits et aux intérêts des membres des populations autochtones ne soit prise sans leur consentement informé, comme préconisé au paragraphe 4 d), de la Recommandation générale n° 23 du Comité concernant les droits des populations autochtones. Étant donné que la législation chilienne requiert que les groupes autochtones soient dotés du statut de personnes morales pour pouvoir être consultés, il serait intéressant de savoir combien de ces groupes jouissent de ce statut, combien en sont privés et pour quelles raisons les demandes y relatives ont été rejetées.

47. M. Cali Tzay souhaite savoir pourquoi la loi antiterroriste semble s’appliquer presque exclusivement au peuple mapuche. Apparemment, les affaires tombant sous le coup de cette loi ne sont pas jugées selon une procédure équitable puisque les témoins sont autorisés à dissimuler leur identité et ne sont pas soumis à des contre-interrogatoires. À cet égard, l’expert s’interroge sur les raisons pour lesquelles le chef mapuche, M. Aucan Wilcaman, a été jugé par un tribunal militaire et non par un tribunal civil. Il souhaiterait obtenir des informations supplémentaires concernant la loi relative aux autochtones et aimerait en particulier que la délégation commente les informations selon lesquelles de nombreuses victimes de discrimination, dont des membres de la communauté mapuche, ne portent pas officiellement plainte car elles jugent la loi en grande partie inefficace. Il demande également des précisions supplémentaires sur l’accroissement des activités forestières et le déplacement forcé subséquent des communautés mapuches. Il demande également à la délégation chilienne de confirmer que le droit de manifester a été érigé en infraction pénale, en conséquence de quoi de nombreux dirigeants mapuches sont incarcérés. Il souhaite également savoir s’il est vrai que les institutions qui souhaitent acquérir des concessions en matière d’éducation exigent plus de quatre années d’expérience, privant ainsi les communautés mapuches du droit d’éduquer leur peuple.

48. Enfin, l’expert demande des informations plus détaillées sur les mesures interculturelles adoptées dans les domaines de la santé, de l’éducation, du logement, de l’agriculture et d’autres programmes sociaux. Ces mesures prévoient-elles que les traditions mapuches s’appliquent aux personnes qui ne sont pas d’ethnie mapuche?

49. M. Lindgren Alves se demande si l’image que brosse le rapport périodique à l’examen de la société chilienne n’est pas quelque peu exagérée. Il est difficile de croire que le racisme soit aussi répandu que certaines des enquêtes citées l’indiquent. Il félicite néanmoins l’État partie d’avoir adopté une attitude autocritique, une approche certainement de nature à favoriser l’amélioration des politiques de lutte contre la discrimination raciale. La difficulté rencontrée par le Gouvernement chilien pour modifier la législation en vigueur témoigne de la nature démocratique du système politique chilien.

50. À l’instar des orateurs qui l’ont précédé, M. Lindgren Alves souhaite savoir pour quelles raisons la loi antiterroriste a été invoquée à l’encontre de plusieurs manifestants mapuches. Il demande à la délégation d’indiquer si les individus cagoulés qui ont tenté d’empêcher des Mapuches d’exprimer leurs revendications ont également été jugés en vertu de cette loi.

51. M. Thornberry, se félicitant de la ratification par le Chili de la Convention n° 169 de l’OIT, qui entraînera inévitablement des changements dans la législation et la pratique chiliennes, s’interroge sur la signification du terme «minorité morale» utilisé au paragraphe 23 du rapport périodique à l’examen. Il salue les efforts déployés par l’État partie pour que la notion d’identité soit prise en compte dans ses stratégies de développement.

52. M. Thornberry souhaite savoir si le Chili a enregistré des mouvements migratoires internes ou des déplacements de populations sur son territoire et si le pays dispose de données statistiques sur le nombre de Chiliens d’ascendance africaine, migrants récents exclus. Soulignant la différence conceptuelle qui existe entre les droits inhérents des autochtones, qui sont liés à l’autodétermination et peuvent être modifiés, et les droits concédés, qui sont établis mais révocables, il souhaite savoir dans quelle catégorie l’État partie place les droits des peuples autochtones. En vertu de la Convention n° 169, l’occupation traditionnelle de terres et de territoires crée des droits fonciers inhérents pour les peuples qui y vivent.

53. Se référant au rapport du Mécanisme d’experts sur les droits des peuples autochtones relatif à l’étude sur les enseignements tirés et les défis à relever pour faire du droit des peuples autochtones à l’éducation une réalité et l’avis no 1 (2009) du Mécanisme d’experts sur le droit des peuples autochtones à l’éducation (A/HRC/EMRIP/2009/2), M. Thornberry souhaite recevoir des informations sur l’approche suivie par le Chili en matière d’enseignement traditionnel. Il demande également des informations complémentaires sur l’enseignement interculturel et appuie les observations de M. Cali Tzay au sujet de la privatisation de l’enseignement.

54. Se référant au paragraphe 55 du rapport périodique du Chili, M. Thornberry souhaite savoir quelles formalités sont requises par le système d’enregistrement foncier pour la dévolution de terres aux Mapuches et plus particulièrement quelles preuves sont considérées admissibles pour justifier une revendication foncière. Un témoignage oral pourrait-il être considéré comme suffisant à cet égard? En outre, le caractère sacré de certains sites est-il pris en compte et, dans l’affirmative, comment ces sites sont-ils protégés en vertu de la législation chilienne? Il souhaite également savoir quand et comment les Mapuches ont perdu leurs terres et si les titres fonciers autochtones sont considérés comme ayant survécu à l’acquisition de la souveraineté par la puissance coloniale.

55. Se référant aux travaux menés par la Commission de la vérité historique et la nouvelle donne, l’expert espère que ses conclusions permettront de revoir l’histoire du pays telle qu’elle est décrite dans les manuels scolaires et qu’elles seront intégrées aux programmes afin que la notion d’identité nationale soit davantage tolérante. Enfin, il souhaite obtenir des informations supplémentaires sur la mise en œuvre de l’article 4 de la Convention, évoquée très brièvement dans le rapport périodique.

56. M. Murillo Martínez salue les mesures prises par l’État partie pour éliminer la discrimination raciale, en particulier la ratification de la Convention n° 169 de l’OIT qui, même si elle pose de nouveaux défis au Chili, améliorera sans aucun doute la situation des peuples autochtones. En ce qui concerne les réformes constitutionnelles engagées, il souhaite savoir quelles procédures sont appliquées. Il demande également à la délégation d’indiquer comment les autorités envisagent de donner effet à la loi portant création de l’espace maritime côtier des peuples autochtones adoptée en 2007.

57. Il serait intéressant de savoir quel impact ont eu, selon le Gouvernement chilien, les efforts déployés pour poursuivre le dialogue avec les communautés autochtones, par exemple par l’intermédiaire de la Commission de la vérité historique et la nouvelle donne, sur les peuples autochtones concernés et l’ensemble de la société chilienne. Les mesures spéciales sont-elles considérées comme un moyen de remédier aux déséquilibres socioéconomiques entre les groupes autochtones et le reste de la population? À l’instar des orateurs qui l’ont précédé, M. Murillo Martínez est préoccupé que la loi antiterroriste soit invoquée contre le peuple mapuche et demande des précisions à ce sujet. Il souhaite obtenir des statistiques comparées sur les poursuites pénales engagées contre des membres des populations autochtones et, si possible, des informations complémentaires sur le décès, la veille, d’un autochtone dans le pays.

58. Se référant aux résultats des enquêtes menées par la Fondation Ideas et la Faculté de sociologie de l’Université du Chili décrites dans le rapport à l’examen, l’expert souligne que le Chili n’est pas le seul pays qui manifeste une tendance à l’intolérance raciale et que de nombreux autres pays d’Amérique latine sont dans la même situation, essentiellement en raison de facteurs historiques.

59. M. de Gouttes relève certaines divergences entre les informations fournies par l’État partie et d’autres organisations, notamment en ce qui concerne l’occupation des terres, la violation des coutumes ancestrales mapuches, l’exploitation des ressources forestières, et la violence et les tensions entre les groupes mapuches et les forces de l’ordre. Il fait écho aux préoccupations exprimées par les orateurs précédents au sujet de l’application de la loi antiterroriste au peuple mapuche et invite la délégation à expliquer pourquoi, si, comme cela est indiqué au paragraphe 51 du rapport périodique, l’État partie n’a pas l’intention de persécuter les Mapuches et si, comme le prétend le paragraphe 56, l’État chilien a estimé que les demandes des peuples autochtones étaient légitimes, des incidents et des actes de discrimination et de violence continuent d’être commis à l’encontre des peuples autochtones. Il demande au Gouvernement de poursuivre ses efforts de coopération avec les peuples autochtones.

60. S’agissant de l’absence de disposition spécifique d’interdiction de la discrimination raciale dans la législation chilienne, M. de Gouttes demande des informations complémentaires sur le projet de loi antidiscrimination visé au paragraphe 103 du rapport périodique. Il souhaite en outre obtenir des données statistiques sur les jugements rendus dans les affaires de violation des droits des individus et des communautés autochtones et rappelle à cet effet que le Comité considère que le nombre restreint de plaintes enregistré par un État partie n’est pas nécessairement un signe positif. Il demande des précisions sur les allégations de mauvais traitements infligés aux Mapuches par les organes de répression et souhaite savoir si le Gouvernement chilien envisage de créer une institution nationale des droits de l’homme conforme aux Principes de Paris. Il invite la délégation chilienne à commenter les résultats des enquêtes sur la discrimination et l’intolérance mentionnés dans le rapport périodique du Chili.

61. M. Amir fait siennes les vues des autres membres du Comité concernant la loi antiterroriste chilienne et souligne qu’une bonne législation peut aussi, si elle n’est pas appliquée avec discernement, avoir des conséquences indésirables. Des éclaircissements sont nécessaires sur les dispositions de cette loi et sur son application à toutes les parties concernées, en particulier compte tenu du fait qu’elle est préjudiciable aux peuples autochtones et à leurs revendications foncières. L’expert est d’avis que la protection des droits fonciers des populations autochtones renforcera plutôt qu’elle n’affaiblira l’État partie.

La séance est levée à 18 heures.