Nations Unies

CERD/C/CHL/CO/19-21

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

23 septembre 2013

Français

Original: espagnol

Comité pour l’éliminati on de la discrimination raciale

Observations finales concernant les dix-neuvièmeà vingt et unième rapports périodiques du Chili,adoptées par le Comité à sa quatre-vingt-troisième session(12-30 août 2013)

Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a examiné les dix‑neuvième à vingt et unième rapports périodiques du Chili (CERD/C/CHL/19-21), présentés en un seul document, à ses 2237e et 2238e séances (CERD/C/SR.2237 et 2238), les 13 et 14 août 2013. À ses 2256e et 2257e séances (CERD/C/SR.2256 et 2257), le 27 août 2013, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction la soumission des rapports périodiques présentés par l’État partie et note avec appréciation la régularité avec laquelle ils sont soumis. Il se félicite du dialogue franc qui s’est établi avec l’importante délégation de haut niveau, des réponses apportées aux questions posées par les membres du Comité et des renseignements complémentaires présentés par écrit.

B.Aspects positifs

Le Comité prend note avec appréciation de l’engagement exprimé par la délégation au nom de l’État partie pour tenter de relever les défis auxquels le pays est confronté. Il se félicite des mesures prises sur le plan législatif et institutionnel pour lutter contre la discrimination raciale depuis la soumission du rapport précédent, à savoir:

a)L’adoption de la loi no 20405 portant création de l’Institut national des droits de l’homme (INDH);

b)L’adoption de la loi no 20609 instituant des mesures de lutte contre la discrimination (loi sur la non-discrimination);

c)L’adoption de la loi no 20430 relative à la protection des réfugiés, qui incorpore au droit interne les normes du droit international en la matière;

d)La loi no 20507 qui érige en délit punissable le trafic illicite de migrants et la traite des personnes et institue des normes de protection des victimes et garantit le droit au non‑refoulement.

Le Comité se félicite de l’invitation permanente adressée à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales thématiques et souligne à cet égard la visite effectuée en juillet 2013 par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte contre le terrorisme.

Le Comité prend note avec intérêt de ce qui a été fait pour réhabiliter et encourager l’usage des langues autochtones.

Le Comité accueille avec satisfaction les documents fournis par l’INDH et l’exposé de son représentant, ainsi que la participation active et les contributions de la société civile à l’examen des rapports.

C.Motifs de préoccupation et recommandations

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité se félicite de constater que l’Institut national des droits de l’homme est doté du statut «A» par le Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (CIC), mais s’inquiète face aux préoccupations exprimées par le Sous‑Comité d’accréditation du Comité international de coordination au sujet de l’immunité des membres de l’INDH et des ressources allouées à cet organe (art. 2).

Le Comité engage l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour doter l’Institut national des droits de l’homme du mandat le plus large possible et des moyens nécessaires pour lui permettre d’œuvrer à la promotion et la protection des droits de l’homme, et pour garantir l’immunité aux membres de cet organisme. Il l’engage également à envisager de créer un service de défense de la personne doté d’une unité spécialisée dans les questions de discrimination raciale, secondée dans sa tâche par des gestionnaires interculturels au niveau local.

Statistiques

Le Comité prend note avec appréciation des données statistiques fournies par l’État partie, mais souhaiterait disposer de données fiables et plus complètes sur la population, y compris des indicateurs économiques et sociaux ventilés en fonction de l’origine ethnique ou nationale, en particulier en ce qui concerne les autochtones, les personnes d’ascendance africaine et les autres minorités vulnérables, parmi lesquelles les gitans, pour pouvoir mieux apprécier dans quelle mesure ces personnes jouissent de leurs droits dans l’État partie (art. 2, par. 1, alinéasa à d).

Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer la collecte et la publication de données statistiques sur la composition de la population, ventilées conformément au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention, et reprenant les données officielles du recensement national de 2012, ainsi que de tous recensements ou études ultérieurs prenant en compte l’aspect ethnique fondé sur l’auto ‑identification. Le Comité demande à l’État partie de faire figurer des données ventilées selon ces critères dans son prochain rapport périodique.

Définition de la discrimination et mesures spéciales

Le Comité prend note des mesures prises dans le domaine de la législation pour lutter contre la discrimination raciale, mais craint que l’expression «discrimination arbitraire» contenue dans la loi sur la non‑discrimination ne soit interprétée par les juges comme justifiant certaines mesures discriminatoires et permettant d’exonérer de leur responsabilité les auteurs de tels actes. Le Comité regrette par ailleurs que ladite loi ne prévoie pas clairement de mesures spéciales destinées à garantir la jouissance pleine et entière des droits de l’homme et des libertés fondamentales de tous les groupes présents dans l’État partie (art. 1, par. 1 et 4, art. 2. par. 1 et 2).

Le Comité engage l’État partie à revoir les diverses formes de discrimination considérées comme «non arbitraires» pour aligner la loi sur la non ‑discrimination sur la Convention. Il lui recommande en outre de préciser si la loi prévoit des mesures spéciales de lutte contre la discrimination raciale dans l’esprit de sa Recommandation générale n o  32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination.

Délits de discrimination raciale et discours de haine racistes

Le Comité redit sa préoccupation devant l’absence de loi pleinement conforme à l’article 4 de la Convention, déclarant délit punissable toute diffusion d’idées ou de théories fondées sur la supériorité d’une race ou sur la haine raciale, toute incitation à la discrimination raciale, ainsi que tous actes de violence à motivation raciale, ainsi que la participation à des organisations ou activités incitant à la discrimination raciale (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 18) (art. 1 et art. 4 a) et b)).

Compte tenu de sa Recommandation générale n o 15 (1993) sur le caractère impératif des dispositions de l’article 4 de la Convention, le Comi té recommande à l’État partie :

a) De r emédier à l’absence de législation pleinement conforme à l’article 4 de la Convention;

b) D ’i ntensifier ses efforts pour prévenir et combattre la xénophobie et les préjugés raciaux chez les différents groupes de la société, ainsi que pour promouvoir la tolérance;

c) De p résenter, dans son prochain rapport périodique, des renseignements et des statistiques sur les enquêtes menées, les poursuites engagées et les condamnations prononcées pour actes d’incitation à la discrimination raciale et à la haine ou d’incitation à la haine raciale.

Égalité devant les tribunaux et accès à la justice

Le Comité redit sa préoccupation devant l’absence de renseignements sur les plaintes de discrimination raciale et sur le suivi qui a pu être donné à ces plaintes (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 26). Le fait qu’aucune plainte de cet ordre n’a été enregistrée ne signifie pas qu’il n’y a pas discrimination raciale, mais il pourrait être le signe de lacunes dans l’administration de la justice. Par ailleurs, le Comité se dit préoccupé par les obstacles qui entravent l’accès à la justice des peuples autochtones, parmi lesquels l’absence de services de juristes et d’interprètes (art. 2, art. 5 a) et art. 6).

Le Comité exhorte l’État partie à poursuivre les efforts entrepris pour informer les citoyens de leurs droits et des recours judiciaires qui s’offrent à eux en cas de discrimination raciale et de violation de leurs droits. Compte tenu de sa Recommandation générale n o  31 (2005) sur la prévention de la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement de la justice pénale, le Comité invite l’État partie à prendre les mesures effectives nécessaires pour garantir l’accès à la justice des peuples autochtones, y compris leur offrir des services de juristes et d’interprètes.

Reconnaissance constitutionnelle et consultation des peuples autochtones

Le Comité constate avec regret que les réformes de la Constitution piétinent et que la reconnaissance constitutionnelle des droits des peuples autochtones et la création d’un mécanisme effectif de consultation et de participation des autochtones conforme aux normes internationales, et en particulier, à la Convention no 169 de l’OIT concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants et à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones, tardent à se réaliser. Il est également préoccupé de voir que la réforme de la Constitution a été ajournée en attendant l’adoption d’un mécanisme de consultation des peuples autochtones. Le Comité note aussi avec regret que le décret suprême no 124 du Ministère de la planification exclut expressément toute consultation sur des projets d’investissement et qu’il a abouti à la concession de contrats d’exploitation qui portent atteinte aux droits des peuples autochtones et ne font qu’accentuer les tensions sociales (art. 1, 2, 5 et 6).

Rappelant sa Recommandation générale n o  23 (1997) sur les droits des peuples autochtones, le Comité rappelle ses observations finales précédentes (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 16) et invite instamment l’État partie à:

a) Accorder la priorité à la reconnaissance constitutionnelle des droits des peuples autochtones en tant que préalable à un règlement concerté de leurs revendications;

b) Honorer son obligation de garantir le droit à la consultation en tant que mesure de participation effective eu égard à toutes catégories de dispositions législatives ou administratives susceptibles d’avoir des incidences directes sur leur droit à la terre et aux ressources qu’ils possèdent ou qu’ils utilisaient traditionnellement, conformément aux normes du droit international;

c) Tenir compte des recommandations du Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones au sujet de ce qu’on appelle la «consultation des autochtones» ;

d) Accélérer le processus d’adoption d’un mécanisme institutionnel de consultation conformément aux normes internationales.

Terres ancestrales

Évoquant les traités signés entre l’État partie et les peuples autochtones, en particulier le peuple mapuche, le Comité se dit préoccupé de ce que le mécanisme d’appels d’offres pour la restitution de terres mis en place par la Commission nationale autochtone (CONADI) empêche à de nombreux membres des peuples autochtones d’avoir accès à leurs terres ancestrales. Le Comité constate en outre avec préoccupation que les représentants des peuples autochtones se plaignent de ce que les terres qui leur ont été attribuées en échange de leurs terres ancestrales, y compris dans des zones situées à proximité, se sont souvent avérées improductives et difficiles à exploiter, et considèrent que cette politique ne s’inscrit pas dans le cadre d’une stratégie globale de rétablissement des peuples autochtones dans leurs droits. Tout en prenant note du règlement du système d’évaluation de l’impact sur l’environnement qui doit entrer en vigueur prochainement, le Comité redit sa préoccupation face aux plaintes des peuples autochtones qui continuent de subir les conséquences de l’exploitation des ressources naturelles, de la présence de sites d’élimination des déchets et de la pollution des eaux et d’autres ressources du sous-sol, sur leurs territoires. Le Comité regrette que les plans de cessation des activités d’exploitation éventuelles ne s’accompagnent pas de mesures de réparation (art. 2, 5 et 6).

Le Comité réitère ses recommandations précédentes et invite l’État partie à:

a) Accélérer le processus de restitution des terres ancestrales et à allouer des ressources utiles et suffisantes pour protéger les droits des peuples autochtones sur leurs terres et leurs ressources ancestrales, conformément à la Convention et aux autres normes internationales pertinentes, ainsi qu’aux traités signés entre l’État partie et les peuples autochtones (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 21);

b) Faire de plus amples efforts pour ancrer la restitution des terres dans une stratégie globale de rétablissement des peuples autochtones dans leurs droits;

c) Effectuer une évaluation systématique de l’impact sur l’environnement, de procéder à des consultations libres, préalables et éclairées et d’obtenir le consentement libre et en toute connaissance de cause des peuples autochtones concernés avant d’autoriser des projets d’investissement qui risqueraient d’affecter la santé des peuples autochtones et de compromettre leurs moyens de subsistance dans les lieux qu’ils habitent (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 22 et 23);

d) Adopter des mesures de réparation en compensation des dommages subis et accorder la priorité à la solution des problèmes de pollution dus aux activités qui, selon diverses sources, mettent actuellement en danger la vie des peuples autochtones et compromettent leurs moyens de subsistance (ibid., par. 24).

Loi antiterroriste et abus de la force à l’encontre des peuples autochtonesde la part d’agents de la fonction publique

Le Comité prend note avec satisfaction des révisions de la loi no 18314 (loi antiterroriste), mais redit sa préoccupation face aux informations selon lesquelles ce texte continue d’être appliqué de manière disproportionnée à des membres du peuple mapuche pour des faits survenus dans le contexte de revendications concernant leurs droits, notamment leurs droits sur leurs terres ancestrales (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 15). Il s’inquiète de voir que l’application de cette loi à propos des faits mettant en cause les Mapuche, lesquels ont été accusés d’avoir commis un acte terroriste, et la qualification des faits délictueux par la police et les membres de l’appareil judiciaire, ne reposaient pas sur des critères objectifs, ce qui pourrait constituer une violation du principe de légalité, d’égalité et de non-discrimination. Le Comité réaffirme en outre sa préoccupation face au recours indu et excessif à la force à l’encontre de membres de communautés mapuches, y compris des enfants, des femmes et des vieillards, par des membres du corps des carabiniers et de la police judiciaire à l’occasion de fouilles et d’autres opérations policières (ibid., par. 19), et s’inquiète de voir que les auteurs de ces actes sont restés impunis. Le Comité fait observer que l’application de la loi antiterroriste et le recours indu et excessif à la force à l’encontre de membres du peuple mapuche pourraient avoir des incidences négatives et discriminatoires, pas seulement pour les individus soupçonnés d’avoir commis l’infraction mais pour les peuples autochtones dans leur ensemble (art. 2 et 5).

Le Comité recommande, avec un sentime nt d’urgence, à l’État partie :

a)  De r éviser la loi antiterroriste afin de définir de façon précise les délits de terrorisme visés;

b)  De v eiller à ce que la loi antiterroriste ne soit pas appliquée aux membres de la communauté mapuche pour des actes de revendication sociale;

c)  De m ettre en pratique les recommandations formulées en ce sens par le Comité des droits de l’homme (2007) et par le Rapporteur spécial sur les droits des peuples autochtones (2003 et 2007), et prendre en compte les recommandations préliminaires du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme dans la lutte contre le terrorisme (2013);

d) D’e nquêter sur les accusations d’actes de violence envers les peuples autochtones, en particulier le peuple Mapuche et Rapa Nui, commis par des agents de la fonction publique;

e) De s urveiller les effets discriminatoires que l’application de la loi antiterroriste et des pratiques connexes pourraient avoir sur les peuples autochtones;

f) D’i ntensifier ses efforts de formation et d’éducation aux droits de l’homme à l’intention des membres des forces de sécurité et de l’appareil judiciaire afin de leur permettre d’exercer dûment leurs fonctions.

Langues et éducation autochtones

Le Comité regrette que le mapudungún ne soit enseigné qu’au cours des quatre premières années de l’enseignement de base dans les écoles qui regroupent un nombre maximum d’élèves autochtones et que le nombre et le montant des bourses autochtones ne soient pas suffisants pour permettre aux jeunes de poursuivre des études loin de leur communauté ou de leur famille. Soulignant le rôle des médias, et en particulier des radios communautaires pour la préservation de la langue chez les communautés autochtones éparses, le Comité regrette les restrictions qui frappent les membres des peuples autochtones à cet égard (art. 2 et art. 5, al. e) v)).

Le Comité recommande à l’État partie d’affecter des fonds suffisants pour redynamiser les langues autochtones et garantir l’accès des peuples autochtones à l’éducation. Il lui recommande également d’envisager de promouvoir l’emploi des langues autochtones dans l’enseignement primaire et secondaire et d’encourager la participation d’enseignants autochtones. Il l’engage en outre à prendre les mesures nécessaires, y compris d’ordre législatif, pour réduire les restrictions auxquelles se heurtent les peuples autochtones pour créer des médias communautaires, afin d’encourager l’emploi des langues des peuples autochtones.

Marginalisation des peuples autochtones

Le Comité se dit à nouveau préoccupé de voir que les peuples autochtones continuent de vivre dans la pauvreté et d’être marginalisés (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 24). Il reste également préoccupé par l’accès limité des peuples autochtones, en particulier des femmes, à certains secteurs, en particulier le secteur de l’emploi, du logement, de la santé et de l’éducation (ibid., par. 20). Le Comité constate avec préoccupation la faible participation des peuples autochtones à la vie publique et regrette qu’il n’existe pas de mécanismes institutionnels de représentation reconnus par eux (art. 2 et art. 5, al. d) i) et e)).

Le Comité renouvelle sa recommandation précédente et invite instamment l’État partie à prendre les mesures nécessaires pour protéger efficacement les peuples autochtones contre la discrimination raciale. Il l’engage par ailleurs à concevoir, en concertation avec les peuples autochtones, des politiques visant à relever le niveau d’éducation, à favoriser la pleine participation des peuples autochtones à la vie publique, en particulier les femmes, et à tenir compte de ses Recommandations générales n o 25 (2000) sur la dimension sexiste de la discrimination raciale et n o 32 (2009) sur la signification et la portée des mesures spéciales dans la Convention internationale sur l’élimination de la discrimination raciale.

Personnes d’ascendance africaine

Le Comité regrette que le projet de loi portant reconnaissance de la communauté d’ascendance africaine au Chili n’ait pas encore été adopté (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 13). Il prend note de l’enquête sur la situation socioéconomique nationale envisagée, mais s’inquiète de l’absence de données officielles sur la situation des droits de l’homme des personnes d’ascendance africaine qui empêche l’État partie de se faire une meilleure idée de la situation de ces personnes et de concevoir des politiques publiques appropriées en leur faveur (art. 1, 2 et 5).

Faisant référence à sa Recommandation générale n o  34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine, le Comité demande à nouveau à l’État partie de lui fournir des informations sur les personnes d’ascendance africaine. Il lui recommande d’accélérer l’adoption du projet de loi portant reconnaissance de l’ethnie d’ascendance africaine, d’incorporer une variable concernant les personnes d’ascendance africaine dans les recensements de la population et du logement, et d’adopter des programmes et mesures, y compris des mesures spéciales, visant à garantir aux personnes d’ascendance africaine la jouissance de leurs droits.

Migrants

Le Comité se dit à nouveau préoccupé de voir que les migrants, en particulier les migrants d’origine latino-américaine, continuent d’être victimes de discrimination et ne peuvent pas exercer librement leurs droits. Il note en outre avec préoccupation que certains médias entretiennent les préjugés et les stéréotypes à l’égard des migrants. S’agissant des travailleurs migrants en situation irrégulière, le Comité s’inquiète de ce que le principe du jus soli ne s’applique pas à leurs enfants, ce qui risque dans certains cas d’en faire des apatrides (art. 2 et 5).

Le Comité recommande à nouveau à l’État partie de prendre les mesures efficaces nécessaires, y compris d’ordre législatif, pour garantir aux migrants les droits égaux reconnus dans la Convention (CERD/C/CHL/CO/15-18, par. 17). Il lui recommande en outre de prendre les mesures d’éducation et de sensibilisation efficaces nécessaires pour combattre tout ce qui pourrait conduire à stéréotyper ou à stigmatiser les migrants. Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que l’avant-projet de réforme de la loi sur les migrations qui est en préparation garantisse aux travailleurs migrants en situation irrégulière la possibilité d’opter pour la nationalité chilienne pour leurs enfants au cas où ceux-ci risqueraient d’être privés de nationalité et il l’engage à veiller à ce que ce texte soit adopté sans tarder. Le Comité appelle en outre l’attention de l’État partie sur la nécessité d’appliquer pleinement la loi n o  20507 qui érige en infraction le trafic illicite de migrants et la traite des personnes.

Réfugiés et demandeurs d’asile

Le Comité a pris connaissance avec préoccupation des allégations selon lesquelles des migrants et des demandeurs d’asile, et plus particulièrement des personnes d’ascendance africaine, auraient été la cible de propos injurieux et discriminatoires, en particulier à la frontière nord du pays. Il s’inquiète des pratiques restrictives de préadmissibilité sur le territoire auquel recourt l’État partie, qui ne sont pas conformes au principe du respect de la légalité inscrit dans les normes internationales en la matière. Il est également préoccupé par l’extrême vulnérabilité des enfants migrants non accompagnés (art. 2 et 5).

Le Comité rappelle sa Recommandation générale n o  30 (2004) sur la discrimination à l’égard des non-ressortissants et recommande à l’État partie de mettre un terme aux pratiques restrictives de préadmissibilité et à garantir aux personnes qui ont besoin d’une protection internationale l’établissement de pièces d’identité appropriées, hors de toute discrimination raciale. Il lui recommande également de faire en sorte que les mesures juridiques et politiques concernant les migrations et les étrangers ne soient pas teintées de discrimination fondée sur la race, la couleur ou l’origine ethnique ou nationale. Il demande instamment à l’État partie de veiller à ce que l’avant - projet de réforme de la loi sur les migrations soit conforme aux dispositions des instruments internationaux concernant le traitement des migrants qui ont besoin d’une protection internationale et l’invite à faire en sorte que ce texte soit adopté sans tarder. Le Comité recommande également à l’État partie de renforcer la formation aux droits de l’homme des agents de la fonction publique.

D.Recommandations diverses

Ratification d’autres instruments

Le Comité invite l’État partie à ratifier les instruments internationaux auxquels il n’a pas encore adhéré, en particulier le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et le Protocole facultatif à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

Modification de l’article 8 de la Convention

Le Comité recommande à l’État partie de ratifier la modification du paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale, adoptée le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvée par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111, en date du 16 décembre 1992. Il rappelle à cet égard la résolution 67/156 de l’Assemblée, en date du 20 décembre 2012, dans laquelle il était demandé instamment aux États parties d’accélérer leurs procédures internes de ratification de cette modification et d’aviser le Secrétaire général par écrit, dans les meilleurs délais, de leur acceptation.

Déclaration et Programme d’action de Durban

Compte tenu de sa Recommandation générale no 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de tenir compte, lorsqu’il intégrera la Convention dans le droit interne, en particulier eu égard aux articles 2 à 7 de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, ainsi que du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009. Il demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements concrets sur les plans d’action et autres mesures qu’il aura adoptés pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Diffusion des rapports

Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public en général dès leur soumission et lui recommande de faire de même pour les observations finales du Comité, en les diffusant dans les langues officielles et, s’il y a lieu, dans les autres langues couramment utilisées.

Consultations avec les organisations de la société civile

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les consultations et de renforcer le dialogue avec les organisations de la société civile qui œuvrent à la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de la préparation du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Suite donnée aux observations finales

Conformément au paragraphe 1 de l’article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations qui figurent aux paragraphes 10, 12 et 14.

Paragraphes particulièrement importants

Le Comité souhaite aussi appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations qui figurent aux paragraphes 13, 15, 17 et 18 et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour appliquer ces recommandations.

Document de base

Le Comité prend note avec intérêt des renseignements communiqués par la délégation de l’État partie au sujet de l’achèvement du document de base et invite l’État partie à présenter le document considéré en suivant les Directives harmonisées concernant l’établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles qui ont trait au document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes conventionnels qui s’est tenue en juin 2006 (voir HRI/GEN/2/Rev.4).

Élaboration du prochain rapport

Le Comité recommande à l’État partie de présenter ses vingt-deuxième et vingt‑troisième rapports périodiques en un seul document, au plus tard le 31 août 2016, et de les établir en suivant les Directives concernant l’élaboration des documents propres au Comité qu’il a adoptées à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1); le rapport devra traiter de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité invite également l’État partie à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports soumis au titre d’un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages fixée pour l’établissement du document de base commun (voir les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).