Nations Unies

CRC/C/SSD/CO/1

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

27 octobre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l ’ enfant

Observations finales concernant le rapport initial du Soudan du Sud *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Soudan du Sud à ses 2638e et 2639e séances, les 1er et 2 septembre 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2668e séance, le 23 septembre 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’État partie, ainsi que les réponses écrites à la liste de points, qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité prend note avec satisfaction des diverses mesures législatives et institutionnelles et mesures de politique générale que l’État partie a prises pour appliquer la Convention, notamment de l’adoption de la loi relative à l’enfance (2008), de la Constitution de transition (2011) et de la loi relative à l’enseignement général (2012). Il salue également les progrès accomplis par l’État partie dans divers domaines, notamment l’élaboration d’un plan d’action national pour l’enfance (2020-2024), du Plan national de développement (2011) et du Plan stratégique national aligné sur les objectifs de développement durable (2018‑2020). En outre, il constate avec satisfaction que l’État partie a ratifié en 2018 les Protocoles facultatifs à la Convention relative aux droits de l’enfant, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, et concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés et, en 2015, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, ainsi que les protocoles facultatifs se rapportant à ces conventions.

III.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

4.Le Comité relève avec une profonde préoccupation que, malgré la signature, en 2018, de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit en République du Soudan du Sud, la violence intercommunautaire continue et les milices armées opèrent toujours en toute impunité. Les chocs climatiques, notamment les inondations et les sécheresses, la récession économique, les déplacements massifs et la perte des moyens de subsistance ont entraîné une grave insécurité alimentaire et restreint l’accès aux services essentiels, créant une situation humanitaire désastreuse. Le Comité rappelle à l’État partie que les obligations internationales en matière de droits de l’homme ont un caractère continu et que les droits énoncés dans la Convention s’appliquent à tous les enfants à tout moment. Il rappelle également à l’État partie que c’est lui qui est responsable au premier chef de la protection de sa population et qu’il devrait donc prendre sans délai des mesures pour garantir le droit des enfants à l’éducation, à la santé, à l’alimentation et à l’assainissement et pour empêcher que les enfants soient victimes de nouvelles violences et maltraitances, en libérant d’urgence les enfants associés à ses forces de sécurité et en mettant en place, pour tous les enfants touchés par le conflit armé, des programmes de réinsertion et d’assistance qui tiennent compte des questions de genre et soient axés sur les rescapés.

IV.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la réalisation des droits de l ’ enfant conformément à la Convention, au Protocole facultatif concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés et au Protocole facultatif concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Il le prie instamment de faire en sorte que les enfants participent activement à la conception et à l ’ application des politiques et des programmes les concernant qui visent à atteindre les 17 objectifs de développement durable.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

6.Le Comité note que, dans son rapport initial, l’État partie a abondamment fait référence à son cadre constitutionnel et législatif, notamment à la loi relative à l’enfance et à la Charte des droits figurant dans la Constitution de transition, par lesquelles les principes et les normes énoncés dans la Convention sont incorporés dans le droit national, en particulier la définition de l’enfant, les principes de non-discrimination et d’intérêt supérieur de l’enfant, ainsi que la nécessité de proscrire les pratiques préjudiciables et d’interdire l’enrôlement et l’utilisation d’enfants par les forces armées et les groupes armés. Il constate toutefois avec préoccupation :

a)Que le grand public, les enfants, les parents, les enseignants et les professionnels qui travaillent au contact et au service des enfants connaissent mal le cadre des droits de l’enfant ;

b)Que les lois coutumières et les traditions qui contredisent les normes fixées par le cadre des droits de l’enfant continuent d’être suivies.

7. Le Comité recommande à l ’ État partie de mener, au niveau local, des activités visant à mieux faire connaître les droits de l ’ enfant tels qu ’ ils sont énoncés dans le cadre constitutionnel et législatif, aux enfants, aux parents, au grand public, aux professionnels concernés, aux responsables locaux, aux chefs traditionnels et aux chefs religieux et de préciser que le droit coutumier ne peut être appliqué aux enfants que s ’ il est compatible avec la Convention.

Politique et stratégie globales

8.Le Comité constate que, bien que l’État partie ait élaboré un plan d’action national pour l’enfance (2020-2024), celui-ci n’a pas encore été mis en œuvre. Il regrette le manque d’informations sur les objectifs, les cibles et les échéances et sur les ressources allouées à l’exécution effective du plan.

9. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le Plan d ’ action national pour l ’ enfance (2020-2024) soit applicable au niveau national, au niveau des États et au niveau local, à ce qu ’ il englobe tous les domaines visés par la Convention et à ce qu ’ il soit doté des mécanismes et des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son exécution effective et à sa coordination avec d ’ autres plans sectoriels, en particulier dans les domaines de la santé, de l ’ alimentation, de l ’ éducation, de la justice et de la protection sociale.

Coordination

10.Le Comité constate que le Ministère des questions de genre, de l’enfance et de la protection sociale est chargé de faire appliquer les droits de l’enfant au niveau national et est responsable de la coordination de l’application de la Convention dans l’État partie. Il relève néanmoins avec préoccupation que le Ministère ne dispose pas des ressources financières et humaines et des capacités nécessaires pour s’acquitter de son mandat, notamment pour assurer une coordination efficace et systématisée avec les principaux ministères compétents, tant au niveau national qu’au niveau des États.

11. Le Comité prie instamment l ’ État partie de doter le Ministère des questions de genre, de l ’ enfance et de la protection sociale des ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour qu ’ il puisse s ’ acquitter de son mandat et coordonner toutes les activités liées à l ’ application de la Convention au niveau national, au niveau des États et au niveau local, dans tous les secteurs.

Allocation de ressources

12.Le Comité constate avec une profonde préoccupation :

a)Qu’un pourcentage bien trop faible du budget national est alloué aux secteurs et institutions qui concernent les enfants par rapport au budget alloué à d’autres secteurs, en particulier le secteur de la sécurité et de la défense nationales ;

b)Que, selon certaines informations, la corruption détourne les recettes pétrolières des programmes publics concernant les enfants, privant ainsi les enfants d’accès aux services de santé, à l’éducation, à une alimentation équilibrée et à des installations sanitaires adéquates ;

c)Que l’État partie dépend quasi-exclusivement de donateurs internationaux et d’organisations non gouvernementales pour le maintien des services de base destinés aux enfants, tels que la santé, l’éducation et la protection sociale dans le pays.

13. Rappelant son observation générale n o 19 (2016) sur l ’ élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l ’ enfant et compte tenu de la cible 16.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De procéder à une évaluation globale du budget nécessaire à la réalisation des droits de l ’ enfant et, en particulier, conformément à l ’ article 4 de la Convention, de consacrer des ressources budgétaires suffisantes à la réalisation des droits de l ’ enfant, notamment des droits à la santé, à l ’ éducation et à un niveau de vie minimum, et d ’ accroître progressivement la part des ressources nationales allouées à ce budget plutôt que de compter sur les contributions des donateurs ;

b) De définir des lignes budgétaires au profit de tous les enfants, en prêtant une attention particulière aux enfants défavorisés et aux enfants vulnérables pour lesquels des mesures sociales volontaristes pourraient se révéler nécessaires, en particulier les filles, les enfants des communautés nomades et pastorales et les enfants privés de protection parentale, et de faire en sorte que ces lignes budgétaires soient protégées, même en cas de crise économique, de catastrophe naturelle ou d ’ autre situation d ’ urgence ;

c) De respecter les dispositions de la Constitution de transition, qui définissent des principes directeurs pour la gestion du gaz et du pétrole dans l ’ intérêt des générations futures, en luttant contre la corruption qui détourne les recettes pétrolières des programmes relatifs aux droits de l ’ enfant, ce qui va également dans le sens des engagements que l ’ État partie a pris au cours du troisième cycle de l ’ Examen périodique universel .

Collecte de données

14.Le Comité est conscient que l’instabilité politique et l’insécurité actuelles font obstacle à la collecte systématique de données complètes et actualisées sur l’exercice des droits de l’enfant dans l’État partie. Il regrette toutefois que la dernière collecte complète de données sur les indicateurs relatifs aux enfants ait eu lieu en 2010, dans le cadre de l’enquête en grappes à indicateurs multiples.

15. Rappelant son observation générale n o 5 (2003) sur les mesures d ’ application générales de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De créer une plateforme nationale dirigée par le Bureau national de la statistique et chargée de recueillir des données relatives aux droits de l ’ enfant qui soient complètes et englobent tous les domaines de la Convention, notamment des données ventilées par âge, sexe, handicap, zone géographique, origine ethnique et milieu socioéconomique, l ’ objectif étant de faciliter le suivi des indicateurs relatifs aux enfants définis dans la Stratégie nationale de développement (2018-2021), en sollicitant, si nécessaire, l ’ assistance technique de partenaires de développement tels que le Fonds des Nations U nies pour l ’ enfance (UNICEF), et de doter cette plateforme de ressources suffisantes ;

b) De veiller à ce que les données relatives aux droits de l ’ enfant soient régulièrement actualisées et communiquées aux ministères compétents et utilisées pour élaborer, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets visant à assurer l ’ application effective de la Convention et des Protocoles facultatifs s ’ y rapportant ;

c) De tenir compte du cadre conceptuel et méthodologique établi dans les lignes directrices du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme intitulées « Indicateurs des droits de l ’ homme : Guide pour mesurer et mettre en œuvre » au moment de définir, de recueillir et de diffuser des données statistiques.

Mécanisme de suivi indépendant

16.Le Comité regrette :

a)Que le Bureau de l’enfance créé au sein de la Commission nationale des droits de l’homme ne fonctionne qu’à Djouba ;

b)Que la Commission indépendante pour l’enfance prévue à l’article 193 de la loi relative à l’enfance n’ait pas encore été créée.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De dégager des ressources suffisantes pour mettre en service les bureaux de l ’ enfance créés au sein de la Commission nationale des droits de l ’ homme dans tout le pays, en veillant à ce que des ressources humaines et techniques suffisantes soient consacrées au suivi des droits de l ’ enfant ;

b) De mettre rapidement en place la commission indépendante pour l ’ enfance, en veillant à ce qu ’ elle soit pleinement conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris) et à ce qu ’ elle puisse recevoir, instruire et traiter les plaintes émanant d ’ enfants d ’ une manière adaptée à ces derniers, de sensibiliser les enfants à leur droit de déposer une plainte et de veiller à ce que les procédures soient accessibles, confidentielles et adaptées à leurs besoins.

Diffusion, sensibilisation et formation

18.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour faire mieux connaître la Convention. Il relève toutefois que les droits de l’enfant sont mal connus, en particulier par les habitants des zones reculées, par les parents, par les responsables locaux et par tous les professionnels qui travaillent au contact et au service des enfants, ainsi que par les enfants eux-mêmes.

19. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De renforcer ses campagnes et autres programmes de sensibilisation, en coopération avec les organisations de la société civile, afin de faire largement connaître la Convention et la loi relative à l ’ enfance au grand public, en ciblant les parents et les responsables locaux et en priorisant les populations des zones reculées ;

b) De faire en sorte que tous les professionnels qui travaillent au contact et au service des enfants, en particulier les travailleurs sociaux, les membres des forces de l ’ ordre, le personnel de santé, les professionnels qui travaillent avec des enfants privés de milieu familial et les professionnels des médias reçoivent une formation obligatoire sur les droits de l ’ enfant tels qu ’ ils sont définis dans la Convention ;

c) De veiller à ce que l ’ éducation aux droits de l ’ homme et les principes de la Convention soient intégrés aux programmes scolaires obligatoires.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

20.Le Comité note que le cadre législatif, selon lequel on entend par enfant toute personne âgée de moins de 18 ans, est contredit par le droit coutumier, qui définit l’enfant selon une perception subjective de sa maturité physique. Il relève avec préoccupation qu’à cause de cette interprétation subjective, il continue d’y avoir de nombreux mariages d’enfants dans le pays.

21. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De sensibiliser la population aux âges minimaux relatifs aux droits de l ’ enfant, en particulier dans les zones reculées du pays, en ciblant les chefs traditionnels et les chefs religieux, les anciens dans les communautés, les parents et les enfants ;

b) De supprimer toutes les exceptions à l ’ âge minimum de 18 ans pour le mariage, y compris en droit coutumier.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

22.Le Comité se félicite des dispositions législatives relatives aux principes d’égalité et de non-discrimination applicables à tous les enfants. Il prend toutefois note avec préoccupation :

a)De la discrimination structurelle dont les filles sont victimes en raison de normes et de pratiques sociales et culturelles restrictives fondées sur les attitudes patriarcales, qui fait que les indicateurs d’éducation et de santé relatifs aux filles sont les plus bas du monde ;

b)De la persistance de la discrimination à l’égard des enfants marginalisés et défavorisés, notamment les enfants handicapés, les enfants des communautés nomades et pastorales, les enfants privés de milieu familial, les anciens enfants soldats et les enfants déplacés.

23. Compte tenu des cibles 5.1 et 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De mettre fin à la discrimination à l ’ égard des filles dans tous les domaines de la vie, en veillant à ce qu ’ elles bénéficient des mêmes droits et des mêmes possibilités que les garçons, tout en accordant une attention particulière à leur scolarisation et à leur maintien à l ’ école pendant toute la durée de l ’ enseignement obligatoire ;

b) De doter de ressources suffisantes et d ’ appliquer la Politique nationale en matière de genre (2012), qui contient des lignes directrices pour l ’ intégration des questions de genre à toutes les politiques et à tous les programmes des secteurs public et privé ;

c) De remédier aux disparités en matière d ’ accès à tous les services publics qui touchent les filles, les enfants handicapés, les enfants des communautés nomades et pastorales, les enfants privés de milieu familial, les anciens enfants soldats et les enfants déplacés, et d ’ assurer le suivi régulier de l ’ exercice de leurs droits par ces enfants.

Intérêt supérieur de l’enfant

24.Le Comité prend note des dispositions de la Constitution de transition et de la loi relative à l’enfance qui consacrent le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, mais il constate avec préoccupation que les professionnels chargés de déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans les procédures législatives, administratives et judiciaires, ainsi que ceux qui administrent le droit coutumier, n’ont pas la capacité d’appliquer ce principe dans la pratique.

25. Rappelant son observation générale n o 14 (2013) sur le droit de l ’ enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer des lignes directrices sur l ’ application du principe selon lequel l ’ enfant a droit à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale dans toutes les procédures et décisions administratives et judiciaires ainsi que dans l ’ ensemble des textes de loi, politiques, programmes et projets intéressant les enfants et ayant une incidence sur eux ;

b) De renforcer la capacité de toutes les personnes en position d ’ autorité, en particulier les juges, les éducateurs, les travailleurs sociaux, les chefs traditionnels et les responsables locaux, à déterminer l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant dans tous les domaines et à le prendre en compte en tant que considération primordiale.

Droit à la vie, à la survie et au développement

26.Le Comité constate avec une profonde préoccupation :

a)Que les enfants peuvent être condamnés à la peine de mort, bien que celle-ci soit interdite par la loi ;

b)Que les enfants risquent d’être tués ou blessés par des mines ou des restes explosifs de guerre ;

c)Que les taux de malnutrition sont élevés chez les enfants en raison de l’insécurité alimentaire aiguë résultant des phénomènes météorologiques extrêmes induits par les changements climatiques et aggravée par le conflit armé ; il a été signalé que la privation de nourriture, notamment au moyen du blocage de l’acheminement de l’aide humanitaire, était utilisée comme une méthode de guerre ;

d)Que les taux de mortalité infanto-juvénile sont élevés, des enfants mourant notamment du paludisme, de pneumonies et de maladies évitables par la vaccination.

27. Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) D ’ informer la population que la loi prévoit l ’ interdiction absolue de la peine de mort et de sanctionner toute personne ayant ordonné ou exécuté ce châtiment ;

b) De prolonger le Plan stratégique national de lutte contre les mines (2018 ‑ 2021), en veillant à ce qu ’ il prévoie l ’ allocation de ressources permettant : i) l ’ exécution d ’ activités visant à sensibiliser tous les groupes militaires au fait qu ’ ils doivent cesser de poser des mines ; ii) l ’ enlèvement des mines et des restes explosifs de guerre ; et iii) la prise en charge des enfants victimes ;

c) De négocier avec toutes les parties au conflit des couloirs sécurisés afin de permettre l ’ acheminement rapide et sans entrave de l ’ aide humanitaire, notamment de nourriture et de médicaments, destinée en priorité à tous les enfants ;

d) D ’ appliquer le Guide technique du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l ’ homme concernant l ’ application d ’ une approche fondée sur les droits de l ’ homme à la mise en œuvre des politiques et des programmes visant à réduire et à éliminer la mortalité et la morbidité évitables des enfants de moins de 5 ans .

Respect de l’opinion de l’enfant

28.Le Comité constate avec préoccupation que peu de progrès ont été réalisés dans l’application des dispositions de la loi relative à l’enfance ayant trait au droit qu’ont les enfants d’être entendus, de participer véritablement à l’examen des questions qui les concernent et d’exprimer leur point de vue et de participer à la vie politique et aux processus de développement. Il constate avec une préoccupation particulière qu’il existe des barrières culturelles bien ancrées qui empêchent les enfants de faire entendre leur voix dans les familles, les communautés et la société en général, devant les tribunaux et dans le cadre des procédures administratives.

29. Conformément à l ’ article 12 de la Convention, le Comité, rappelant son observation générale n o 12 (2009) sur le droit de l ’ enfant d ’ être entendu, recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer des procédures et des lignes directrices à l ’ intention des services sociaux et des professionnels de la justice afin de garantir en pratique le droit des enfants d ’ être entendus dans toutes les procédures administratives et judiciaires les concernant ;

b) De renforcer les mesures visant à promouvoir la participation active et autonome de tous les enfants, en particulier des enfants défavorisés, à la vie de leur famille, de leur communauté et de leur école, notamment en allouant des ressources suffisantes à la mise en application des lignes directrices nationales relatives à la participation des enfants et en élaborant des outils permettant de consulter les enfants sur les questions de politique nationale.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances et nationalité

30.Le Comité accueille avec satisfaction les dispositions de la loi relative à l’enfance et de la loi relative à l’enregistrement des faits d’état civil (2018) concernant l’enregistrement gratuit et obligatoire des naissances. Il note toutefois avec une profonde préoccupation que les taux d’enregistrement des naissances et de délivrance d’actes de naissance restent extrêmement faibles dans l’État partie, ce qui entrave les mesures de vérification de l’âge visant à protéger les enfants des risques tels que les mariages d’enfants et l’enrôlement par des forces armées et des groupes armés et fait que des enfants qui n’ont pas atteint l’âge minimum de la responsabilité pénale sont soumis au système de justice pénale. Le Comité constate également avec préoccupation que les enfants qui ne sont pas en mesure de prouver leur identité avec un acte de naissance sont exposés à un risque accru d’apatridie.

31. Co m pte tenu de la cible 16.9 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De donner rapidement effet à la loi relative à l ’ enregistrement des faits d ’ état civil (2018), notamment en élaborant un cadre prévoyant la responsabilité de l ’ enregistrement des faits d ’ état civil au niveau ministériel et précisant les modalités d ’ enregistrement, en accordant une attention particulière aux naissances qui ont lieu en dehors des établissements de santé ;

b) D ’ instaurer immédiatement l ’ enregistrement des naissances pour les nouveau-nés et de cesser progressivement de délivrer des certificats d ’ âge apparent au lieu et place d ’ actes de naissance ;

c) D ’ envisager d ’ adopter des mesures temporaires, telles que la mise en place d ’ équipes mobiles d ’ enregistrement des naissances, en vue de délivrer des actes de naissance dans les communautés des zones reculées ;

d) De sensibiliser les parents à l ’ importance de l ’ enregistrement des naissances et de les encourager à faire enregistrer la naissance de leurs enfants ;

e) D ’ envisager de ratifier la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Accès à l’information

32.Le Comité constate avec préoccupation que les enfants ne sont pas informés des questions qui touchent à leurs droits, notamment de l’existence des services d’assistance et de protection dont ils peuvent bénéficier.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les enfants aient accès à l ’ information et aux médias, en augmentant le nombre de stations de radio, de sites Internet et d ’ autres médias dans tout le pays, y compris dans les zones reculées.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 (al. a)) et 39)

Châtiments corporels

34.Le Comité félicite l’État partie d’avoir interdit les châtiments corporels dans la loi relative à l’enfance. Il note toutefois avec une profonde préoccupation que, bien qu’elle soit expressément interdite par la loi, cette pratique reste socialement acceptable et répandue dans l’État partie.

35. Rappelant son observation générale n o 8 (2006) sur le droit de l ’ enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, le Comité prie instamment l ’ État partie de faire respecter l ’ interdiction des châtiments corporels prévue par la loi et de mener des campagnes de sensibilisation à l ’ intention des parents, des enseignants et des autres professionnels travaillant au contact et au service des enfants, afin de promouvoir un changement d ’ attitude au sein de la famille et de la société concernant les châtiments corporels dans tous les contextes, et de promouvoir des formes positives, non violentes et participatives d ’ éducation des enfants et de discipline.

Maltraitance et négligence

36.Le Comité constate avec préoccupation que des actes de maltraitance et de négligence d’enfants continuent d’être commis délibérément et en toute impunité, ce qui s’explique par le faible degré de connaissance des droits de l’enfant par la population en général, notamment les parents, les membres des communautés, les fonctionnaires du secteur judiciaire et les autres autorités, ainsi que par la stigmatisation et les représailles dont sont victimes les enfants qui sollicitent l’aide des autorités. Il regrette qu’il y ait peu de mécanismes de signalement, de services d’orientation et de voies de recours à la disposition des enfants victimes de maltraitance et de négligence, ainsi que l’absence de système national de gestion de l’information permettant de collecter systématiquement des données sur les faits de violence à l’égard d’enfants, de maltraitance, d’exploitation et de négligence d’enfants et sur les tendances dans ce domaine.

37. À la lumière de son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence et des cibles 5.2, 16.1 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De mener des actions de sensibilisation aux conséquences de la maltraitance et de la négligence d ’ enfants et de renforcer les services intégrés et les mécanismes d ’ orientation pour les enfants ayant subi de tels actes ;

b) D ’ intégrer la gestion des cas de maltraitance et de négligence d ’ enfants aux activités des travailleurs sociaux et de renforcer le système de gestion de l ’ information afin de collecter systématiquement des données sur les faits de violence à l ’ égard des enfants, de maltraitance, d ’ exploitation d ’ enfants et de négligence commis dans le pays et sur les tendances dans ce domaine ;

c) De mettre en place des mécanismes accessibles, confidentiels et adaptés aux enfants pour faciliter et promouvoir le signalement des cas de maltraitance et de négligence d ’ enfants, notamment en imposant aux professionnels qui travaillent au contact et au service des enfants et à la population générale l ’ obligation de signaler ces cas et en assurant aux victimes une protection contre les représailles.

Abus sexuels sur enfants et violence fondée sur le genre

38.Le Comité constate avec une profonde préoccupation :

a)Que des enfants continuent d’être victimes d’abus sexuels à la maison et au sein de leur communauté et de violences sexuelles commises par des acteurs militaires et humanitaires et des fonctionnaires fournissant des services publics ;

b)Que la violence à l’égard des femmes et des filles est banalisée et que les parties au conflit prennent les femmes et les enfants pour cible à titre de vengeance ;

c)Que les enfants en situation de rue sont exposés à un risque élevé de maltraitance ;

d)Que le manque d’agents de protection de l’enfance, de mécanismes de plainte et de services d’assistance, ainsi que la stigmatisation et la discrimination dont les enfants victimes de violence sexuelle sont l’objet font qu’il est rare que les cas de violence sexuelle à l’égard d’enfants soient signalés et pris en charge et que des informations soient recueillies à leur sujet, et qu’il est donc rare que les victimes obtiennent réparation ;

e)Que les affaires réglées selon le droit coutumier aboutissent souvent à l’indemnisation de la famille de la victime ou au mariage forcé de la victime avec l’auteur de l’infraction ;

f)Que la crainte de faire l’objet de poursuites au titre de l’article 248 du Code pénal (2008), qui interdit les relations entre personnes de même sexe, dissuade les garçons de signaler les violences sexuelles dont ils sont victimes ;

g)Que l’État partie n’a pas encore mis en place de service national d’assistance téléphonique pour les enfants accessible gratuitement 24 heures sur 24.

39. Rappelant son observation générale n o 13 (2011) sur le droit de l ’ enfant d ’ être protégé contre toutes les formes de violence et compte tenu des cibles 5.2, 16.1 et 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De faire en sorte : i) qu ’ il soit procédé à une enquête et à une intervention multisectorielles dans toutes les affaires de violences et d ’ abus sexuels sur des garçons et des filles, commis dans la famille comme à l ’ extérieur ; ii) que les auteurs de tels actes, y compris lorsqu ’ il s ’ agit d ’ agents de l ’ État et de groupes armés, soient poursuivis et punis par des juridictions officielles, et non par des tribunaux coutumiers, dans le respect des normes internationales relatives aux droits de l ’ homme ; et iii) qu ’ une réparation intégrale soit accordée aux enfants victimes d ’ abus sexuels ou de violences fondées sur le genre ;

b) De renforcer le sous-groupe de la violence fondée sur le genre, chargé de coordonner les efforts visant à prévenir et combattre la violence fondée sur le genre, et de mettre à la disposition des enfants victimes de tous les types de violence des services intégrés et des mécanismes d ’ orientation, en leur fournissant également une aide juridique et un soutien médical et psychologique ;

c) De protéger les enfants victimes de tous les types de violences et leur famille contre les représailles ;

d) De sensibiliser la population à l ’ exploitation sexuelle et aux abus sexuels et de lutter contre la stigmatisation des enfants victimes ;

e) De solliciter la coopération technique de partenaires du développement pour mettre en place un service national d ’ assistance téléphonique pour les enfants et de faire en sorte que tous les enfants de l ’ État partie puissent y accéder.

Pratiques préjudiciables

40.Malgré l’existence de dispositions législatives interdisant les coutumes et traditions préjudiciables, le Comité note que les pratiques suivantes persistent :

a)Les mariages d’enfants, pratique communément acceptée, aggravée par le conflit et la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19) car utilisée comme un mécanisme d’adaptation néfaste permettant de faire face aux situations d’instabilité et de pauvreté ;

b)Les mutilations génitales féminines, qui sont très répandues dans les régions frontalières du nord ;

c)Le marquage physique signalant l’appartenance à une tribu, y compris la scarification et l’ablation de dents ;

d)Le fait d’offrir des filles en guise d’indemnisation dans le cadre du règlement des litiges.

41. Rappelant la recommandation générale n o 31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et l ’ observation générale n o 18 du Comité des droits de l ’ enfant, adoptées conjointement (2019), et compte tenu de la cible 5.3 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l ’ État partie de prendre sans délai des mesures énergiques pour :

a) Adopter une disposition législative interdisant expressément le mariage de toutes les filles et de tous les garçons de moins de 18 ans, en veillant à ce que tous les adultes complices de l ’ organisation ou de la célébration de mariages d ’ enfants soient poursuivis ;

b) Dégager des ressources suffisantes pour exécuter le Plan d ’ action national stratégique visant à mettre fin aux mariages d ’ enfants (2017-2030) ;

c) Aider financièrement les familles en situation de pauvreté, afin qu ’ elles renoncent à vendre leurs enfants à des fins de mariage pour obtenir des revenus pour la famille ;

d) Mettre fin à la pratique consistant à donner ses filles en guise d ’ indemnisation et veiller à ce que de tels actes fassent l ’ objet d ’ une enquête et à ce que leurs auteurs soient poursuivis et sanctionnés ;

e) Mettre en place des campagnes et des programmes de sensibilisation sur les effets néfastes des mutilations génitales féminines et du marquage physique sur la santé physique et mentale et le bien-être des filles et des garçons, en ciblant les ménages, les autorités locales, les chefs religieux et les chefs traditionnels, les juges et les procureurs, et faire en sorte que ceux qui se livrent à ces pratiques préjudiciables soient traduits en justice et soient condamnés à des peines à la mesure de la gravité de leurs actes ;

f) Mettre en œuvre des programmes de protection pour les victimes de mutilations génitales féminines et d ’ autres pratiques préjudiciables, encourager le signalement de ces pratiques aux autorités compétentes et garantir l ’ accès des victimes à des services sociaux, médicaux et psychologiques et à des services de réadaptation gratuits, ainsi qu ’ à des voies de recours, y compris en faisant appel à la coopération et à l ’ assistance internationales.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Enfants privés de milieu familial

42.Le Comité note avec une profonde préoccupation :

a)Que de nombreux enfants ont quitté leur famille en raison de la maltraitance dont ils étaient victimes ou de la pauvreté, et que le conflit armé, la sécheresse et les inondations ont fait un nombre considérable d’orphelins ;

b)Que la Politique nationale sur la protection et la prise en charge des enfants privés de soins parentaux appropriés n’est pas appliquée et que la plupart des enfants privés de soins parentaux ne bénéficient d’aucune aide ;

c)Que les travailleurs sociaux rémunérés par l’État sont encore très peu nombreux dans le pays et que la plupart d’entre eux n’ont qu’un faible niveau d’instruction et de formation, sont très mal payés et ne disposent pas des ressources nécessaires pour accomplir leurs tâches de manière efficace.

43. Appelant l ’ attention de l ’ État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faire en sorte que 1 % du budget national soit alloué aux programmes de protection sociale, conformément à la Politique nationale de protection sociale et à la Stratégie nationale de développement, afin d ’ appuyer la mise en œuvre d ’ initiatives de protection sociale essentielles, y compris un programme national d ’ allocations familiales visant à permettre aux familles qui vivent dans la pauvreté de subvenir aux besoins de leurs enfants ;

b) De renforcer la recherche et la réunification des familles, ainsi que les mécanismes de protection de remplacement de type familial et communautaire, et de finaliser les lignes directrices sur le placement en famille d ’ accueil ;

c) D ’ allouer suffisamment de ressources humaines, techniques et financières pour garantir la pérennité des mesures visant à aider les enfants privés de milieu familial, y compris la Politique sur la protection et la prise en charge des enfants privés de soins parentaux appropriés ;

d) D ’ accroître le nombre de travailleurs sociaux et d ’ augmenter le salaire de ces travailleurs ;

e) De mettre en place, à l ’ intention des travailleurs sociaux, des mécanismes de formation professionnelle appropriés et d ’ assurer un renforcement continu des capacités afin de garantir la qualité du travail social dans les affaires relevant de la protection de l ’ enfance.

G.Enfants handicapés (art. 23)

44.Le Comité constate avec une profonde préoccupation :

a)Que les violences infligées aux enfants pendant le conflit prolongé ont entraîné chez nombre d’entre eux des handicaps physiques, un stress psychologique et des traumatismes et que ces enfants n’ont pas accès aux soins nécessaires et aux services essentiels ;

b)Que les enfants handicapés sont victimes de discrimination, de stigmatisation, de violence et de torture, et que les enfants ayant un handicap intellectuel seraient retenus chez eux ;

c)Que le manque de ressources et de personnel continue de faire obstacle à la mise en place de l’éducation inclusive prévue par la loi relative à l’enseignement général.

45. Rappelant son observation générale n o 9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De mettre en œuvre la Politique nationale en matière de handicap et d ’ inclusion (2013) et de dégager des ressources suffisantes pour faire en sorte que les enfants handicapés bénéficient de services spécialisés, d ’ un soutien adéquat et d ’ équipements d ’ assistance et que les transports, les bâtiments et les installations soient accessibles dans l ’ ensemble de l ’ État partie ;

b) De mener des campagnes de sensibilisation ciblant les agents de l ’ État, le grand public et les familles, pour combattre la stigmatisation et les préjugés dont sont victimes les enfants handicapés et promouvoir une image positive de ces enfants en tant que titulaires de droits ;

c) De finaliser la stratégie de mise en œuvre de la Politique nationale d ’ éducation inclusive, en veillant à ce que des ressources suffisantes lui soient allouées et à ce qu ’ elle prévoie le renforcement des capacités des enseignants et des représentants des communautés concernant les méthodes d ’ enseignement et les compétences en matière d ’ éducation inclusive ;

d) De renforcer les programmes de détection et d ’ intervention précoces et d ’ améliorer les services de santé spécialisés et de réadaptation adaptée à l ’ âge ;

e) D ’ envisager de ratifier la Convention relative aux droits des personnes handicapées.

H.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Santé et services de santé

46.Le Comité note avec une profonde préoccupation que la fragilité du système national de santé, qui résulte du nombre insuffisant d’agents de santé qualifiés et du manque de fournitures médicales, constitue un obstacle majeur à l’accès des enfants aux services de santé essentiels. Il constate que les attaques perpétrées par les groupes armés contre les établissements de santé comptent parmi les facteurs qui aggravent la situation. Il constate également avec préoccupation que l’État alloue peu de ressources financières au secteur de la santé, notant que les agents de santé ne reçoivent pas leurs salaires et que le pays dépend excessivement des organisations non gouvernementales, qui fourniraient 70 % des services de santé.

47. Rappelant son observation générale n o 15 (2013) sur le droit de l ’ enfant de jouir du meilleur état de santé possible et prenant note des cibles 2.2, 3.1, 3.2 et 3.8 des objectifs de développement durable, le Comité prie instamment l ’ État partie de porter à 15 % du budget national les dépenses publiques consacrées à la santé, conformément à l ’ objectif fixé dans la Déclaration d ’ Abuja sur le VIH/sida, la tuberculose et autres maladies infectieuses connexes et de veiller à ce que les agents de santé soient payés à temps et à ce que des fonds soient alloués à la mise en œuvre des stratégies de santé, y compris la Politique nationale de santé (2016-2026), le Plan stratégique national pour la santé (2017- 20 22) et l ’ initiative pour la santé dans les bomas, l ’ objectif étant d ’ élargir l ’ accès aux services de santé de base dans le pays.

Santé des adolescents

48.Compte tenu du grand nombre de mariages d’enfants, près d’une adolescente sur trois (31 %) a déjà mis un enfant au monde, ce que le Comité juge très préoccupant. Le Comité s’inquiète également des effets de plus en plus néfastes qu’ont la toxicomanie et l’alcoolisme sur la santé des adolescents.

49. Rappelant son observation générale n o 4 (2003) sur la santé et le développement de l ’ adolescent dans le contexte de la Convention et son observation générale n o 20 (2016) sur la mise en œuvre des droits de l ’ enfant pendant l ’ adolescence, ainsi que les cibles 3.7 et 5.6 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer des ressources suffisantes à la mise en œuvre de la campagne visant à mettre fin aux grossesses non désirées, de la stratégie pour la santé procréative, maternelle, néonatale et infantile et l ’ alimentation (2018-2022) et du Plan d ’ action pour les nouveau-nés (2019-2023) ;

b) D ’ adopter une politique globale de santé sexuelle et procréative destinée aux adolescents et de veiller à ce que l ’ éducation à la santé sexuelle et procréative fasse partie du programme scolaire obligatoire ;

c) De veiller à ce que tous les garçons et toutes les filles, y compris ceux et celles qui ne sont pas scolarisés et ceux et celles qui vivent dans des zones reculées, aient accès à des informations et à des services confidentiels en matière de santé sexuelle et procréative qui soient adaptés à leurs besoins, y compris l ’ accès à des moyens contraceptifs ;

d) De dépénaliser l ’ avortement et d ’ adopter des lignes directrices sur l ’ avortement sécurisé et les soins après l ’ avortement pour les adolescentes, en veillant à ce que l ’ opinion des adolescentes soit toujours entendue et dûment prise en compte dans le cadre du processus décisionnel ;

e) D ’ assurer des soins obstétricaux aux adolescentes enceintes afin de prévenir la mortalité maternelle et la fistule obstétricale ;

f) De prendre des mesures préventives et d ’ autres mesures, y compris des mesures de traitement, en faveur des enfants exposés à la toxicomanie et à l ’ alcoolisme.

Incidences des changements climatiques sur les droits de l’enfant

50.Le Comité note avec préoccupation que les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire de la population du Soudan du Sud sont particulièrement vulnérables aux effets des changements climatiques, étant donné que le pays est lourdement dépendant de l’agriculture pluviale et qu’il est incapable de faire face aux phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les inondations et les sécheresses. Il constate que la baisse des rendements agricoles a des répercussions particulièrement négatives sur la nutrition des enfants, des femmes enceintes et des mères allaitantes. Il est en outre préoccupé par les effets néfastes que peuvent avoir sur les droits de l’enfant les activités de prospection et de production de pétrole et de gaz, dont l’État partie est très dépendant.

51. Prenant note de la cible 1.5 des objectifs de développement durable et de l ’ objectif de développement durable n o 13, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ entamer avec les communautés et les administrations locales un dialogue sur les effets des changements climatiques et de renforcer leur résilience à ces effets, en veillant à ce que les vulnérabilités, les besoins et les points de vue particuliers des enfants soient pris en compte pour l ’ élaboration des politiques et des programmes de lutte contre les changements climatiques et de gestion des risques de catastrophe, y compris pour l ’ application de la Politique nationale relative à l ’ environnement (2015 ‑ 2025) ;

b) D ’ encourager l ’ utilisation de systèmes d ’ irrigation plus efficaces et la plantation de cultures résistantes à la sécheresse, ce qui permettrait aussi de résoudre les conflits relatifs aux ressources naturelles qui opposent les communautés, notamment en réduisant la concurrence pour les ressources en eau limitées ;

c) De sensibiliser davantage les enfants aux changements climatiques et à la dégradation de l ’ environnement en intégrant l ’ éducation en matière d ’ environnement aux programmes scolaires ;

d) De réaliser des études d ’ impact sur l ’ environnement et les changements climatiques des projets de prospection et de production de pétrole et de gaz , afin d ’ évaluer les répercussions de ces projets sur les droits de l ’ enfant.

Alimentation et niveau de vie

52.Le Comité prend note avec une profonde préoccupation :

a)Des taux élevés de malnutrition aiguë et de l’insécurité alimentaire accrue, aggravée par la situation d’urgence humanitaire prolongée, les catastrophes environnementales, l’insécurité causée par le conflit armé, la médiocrité des infrastructures et des réseaux routiers, qui entravent l’accès aux services de santé et la fourniture de ces services, y compris l’accès à la nourriture ;

b)De l’accès limité à des sources d’eau potable et à des installations sanitaires adéquates, relevant qu’en 2019, selon les estimations, 63 % de la population pratiquait la défécation en plein air.

53. Compte tenu des cibles 1.1, 1.2 et 1.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre d ’ urgence des mesures pour donner la priorité aux enfants qui souffrent de malnutrition aiguë sévère et pour fournir à ces enfants les services nécessaires en matière de soins de santé et d ’ alimentation ;

b) De collecter systématiquement des données sur la sécurité alimentaire et l ’ alimentation des enfants, d ’ élaborer un plan stratégique national multisectoriel sur l ’ alimentation et de contrôler et d ’ évaluer régulièrement l ’ efficacité des politiques et des programmes relatifs à la sécurité et à l ’ alimentation des enfants ;

c) D ’ assurer en priorité l ’ accès à l ’ eau potable, à l ’ assainissement et à un abri, ainsi que l ’ accès aux denrées alimentaires et la disponibilité de ces denrées à un prix abordable, en particulier pour les habitants des zones reculées.

I.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

54.Le Comité se félicite des dispositions figurant dans la loi relative à l’enseignement général concernant l’enseignement primaire et secondaire gratuit et obligatoire dans l’État partie. Il prend néanmoins note avec une profonde préoccupation :

a)Du très grand nombre d’enfants non scolarisés, estimé en 2022 à 2,8 millions, dont 53 % de filles et un nombre disproportionné d’enfants des communautés nomades et pastorales ;

b)Des taux de scolarisation extrêmement faibles et des taux élevés d’abandon scolaire, en particulier chez les filles, dus aux risques d’abus sexuels, aux grossesses précoces, aux mariages d’enfants, aux pratiques traditionnelles et culturelles discriminatoires et à la pauvreté ;

c)Des faibles taux de passage du primaire au secondaire ;

d)Du faible nombre de services d’éducation de la petite enfance ;

e)De l’insuffisance des infrastructures et de la qualité médiocre de l’enseignement, du faible niveau des compétences de base en lecture, écriture et calcul, ainsi que des répercussions négatives de l’utilisation de l’anglais comme langue d’enseignement ;

f)De la fermeture d’écoles due à la pandémie de COVID-19 et au conflit, des écoles ayant été prises pour cible, endommagées ou occupées à des fins militaires.

55. Compte tenu des cibles 4.1, 4.4, 4.5, 4.6, 4.a et 4.c des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ assurer l ’ égalité d ’ accès à l ’ éducation, en particulier pour les enfants en situation de vulnérabilité, indépendamment de la capacité à payer les frais directs et indirects, notamment en augmentant les subventions scolaires et en renforçant les programmes d ’ alimentation ;

b) Conformément aux recommandations formulées par le Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes , de promouvoir l ’ importance de l ’ éducation des filles à tous les niveaux comme fondement de leur autonomisation, notamment en allouant une part suffisante du budget national à la mise en œuvre effective de la Stratégie nationale relative à l ’ éducation des filles (2018-2022) et de la Politique relative aux systèmes d ’ éducation non conventionnelle ;

c) De prendre des mesures ciblées pour améliorer les taux de passage du primaire au secondaire ;

d) De renforcer les mesures visant à réduire les répercussions de l ’ utilisation de l ’ anglais comme langue d ’ enseignement, entre autres facteurs, en mettant à disposition des manuels et des matériels scolaires dans les langues locales ;

e) D ’ enquêter sur tous les cas d ’ a bus sexuels en milieu scolaire, de mettre fin à l ’ impunité et de sanctionner les auteurs et de veiller à ce que les enfants aient accès à des mécanismes de signalement confidentiels, adaptés et efficaces et à ce qu ’ ils ne subissent pas de représailles pour avoir dénoncé ces violations ;

f) De renforcer la qualité de l ’ enseignement, notamment en garantissant la disponibilité d ’ enseignants qualifiés et en veillant à ce que les écoles soient pleinement accessibles à tous en toute sécurité et à ce qu ’ elles soient équipées de matériels pédagogiques, d ’ infrastructures et d ’ installations sanitaires adéquats, en particulier dans les zones reculées ;

g) D ’ élaborer et de promouvoir des programmes de formation professionnelle de qualité pour améliorer les compétences des enfants et des adolescents, en particulier de ceux qui abandonnent l ’ école ;

h) De prendre des mesures pour améliorer les résultats de l ’ apprentissage des enfants dont la scolarité a été perturbée par les fermetures d ’ écoles dues à la pandémie de COVID-19 et au conflit, notamment en mettant en œuvre des programmes de rattrapage.

J.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 (al. b) à d)) et 38 à 40)

Enfants réfugiés ou déplacés

56.Notant que le Soudan du Sud est le pays qui connaît la plus grave crise de déplacement de la population en Afrique, avec 2,2 millions de réfugiés sud-soudanais et 1,6 million de personnes déplacées dans le pays, le Comité est profondément préoccupé par le grand nombre d’enfants réfugiés ou déplacés rentrant chez eux qui peuvent être privés de soins parentaux. Il note également avec préoccupation qu’on a recensé dans le pays environ 8 000 enfants non accompagnés, séparés ou portés disparus, dont il faut rechercher les proches en vue d’une réunification familiale.

57. Le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De faire en sorte que les travailleurs sociaux soient plus nombreux au niveau des États, afin d ’ offrir aux enfants réfugiés et déplacés qui rentrent chez eux une assistance adéquate et adaptée , y compris de la nourriture et un soutien médical et psychologique, et l ’ accès à l ’ éducation ;

b) De prioriser le placement immédiat des enfants non accompagnés en famille d ’ accueil et d ’ investir les ressources nécessaires pour que toutes les structures d ’ accueil soient adaptées aux enfants, en veillant à ce qu ’ elles soient conformes aux normes minimales en matière de conditions d ’ accueil, de soutien psychosocial et d ’ aide à l ’ intégration, de santé, de bien-être et d ’ éducation des enfants ;

c) D ’ améliorer l ’ enregistrement des enfants non accompagnés, séparés ou portés disparus dans la base de données « Système national de gestion des informations sur la protection de l ’ enfance plus », afin de faciliter la recherche de leur famille.

Enfants en situation de rue

58.Le Comité demeure profondément préoccupé par le nombre élevé d’enfants en situation de rue et par le fait :

a)Que ces enfants n’ont pas un accès suffisant à l’alimentation, à l’éducation, à la santé, au logement et à une aide juridique ;

b)Que ces enfants sont souvent détenus pour avoir commis des infractions mineures, qui sont pour eux un moyen de survie ;

c)Que les forces armées et les groupes armés cherchent à enrôler ces enfants.

59. À la lumière de son observation générale n o 21 (2017) sur les enfants en situation de rue, le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) D ’ évaluer régulièrement le nombre d ’ enfants en situation de rue, d ’ actualiser les études sur les causes profondes de leur situation et de créer un mécanisme de suivi chargé de garantir leur accès à l ’ alimentation, à l ’ éducation, à la santé, au logement, à des solutions de protection de remplacement et à une aide juridique ;

b) De redoubler d ’ efforts pour protéger les droits des enfants en situation de rue, notamment en augmentant le nombre de travailleurs sociaux qualifiés qui s ’ occupent de ces enfants, comme le prévoit la Politique sur la protection et la prise en charge des enfants privés de soins parentaux appropriés ;

c) De veiller à ce que les droits des enfants en situation de rue soient pleinement respectés par les forces de l ’ ordre et à ce qu ’ ils ne soient pas détenus arbitrairement ou victimes de mauvais traitements ;

d) D ’ élaborer des programmes qui facilitent la réunification des enfants en situation de rue avec leur famille lorsque cela est possible, en tenant compte de l ’ intérêt supérieur de l ’ enfant, et de répondre aux besoins de ces enfants en matière d ’ éducation et de développement à long terme, notamment en leur apportant un soutien psychologique.

Exploitation économique, notamment le travail des enfants

60.Le Comité est gravement préoccupé par l’ampleur du phénomène du travail des enfants dans l’ensemble du pays, notamment dans les communautés nomades et pastorales, et constate que les enfants travaillent dans l’agriculture, la construction, les restaurants, les abattoirs et les stands de nourriture, et qu’ils sont également soumis aux pires formes de travail des enfants, notamment dans le conflit armé et dans les secteurs de l’extraction de l’or, de la fabrication de briques et de l’élevage de bétail.

61. Compte tenu de la cible 8.7 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer une stratégie visant à éliminer les pires formes de travail des enfants et à faire respecter les lois relatives au travail des enfants, de consacrer des ressources suffisantes à l ’ application de ces lois et de former les inspecteurs du travail à l ’ application des lois relatives au travail des enfants ;

b) De renforcer la capacité des premiers intervenants à repérer les enfants qui sont victimes de la traite, notamment à des fins d ’ exploitation par le travail, et à orienter ces enfants vers des services d ’ assistance et de protection ;

c) D ’ envisager de ratifier la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et le Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

Administration de la justice pour enfants

62.Le Comité prend note avec satisfaction des dispositions de la loi relative à l’enfance concernant les enfants en conflit avec la loi et de la création à Djouba d’un tribunal chargé des affaires de violence fondée sur le genre et des mineurs. Il constate néanmoins avec préoccupation :

a)Que des enfants continuent d’être arrêtés arbitrairement ;

b)Que l’âge minimum de la responsabilité pénale, fixé à 12 ans, n’est pas respecté et que les enfants sont traités comme des adultes dans les procédures pénales ;

c)Que des enfants sont placés en détention provisoire pendant de longues périodes avant d’être emprisonnés avec des adultes dans de mauvaises conditions ;

d)Que les professionnels de la justice sont peu formés aux droits de l’enfant et à la justice pour mineurs ;

e)Que les enfants inculpés, témoins ou victimes d’une infraction ne bénéficient pas de garanties procédurales effectives qui protègent leur intégrité.

63.Rappelant son observation générale n o 24 (2019) sur les droits de l ’ enfant dans le système de justice pour enfants et l ’ étude mondiale des Nations Unies sur les enfants privés de liberté, le Comité prie instamment l ’ État partie de rendre son système de justice pour enfants pleinement conforme à la Convention et aux autres normes applicables. En particulier, il le prie instamment :

a) De réformer le système de justice pour enfants, en veillant à ce qu ’ il repose sur des pratiques réparatrices, notamment en revoyant et en finalisant le Cadre stratégique sur la justice pour enfants et en adaptant le système aux enfants, y compris en renforçant les capacités des professionnels de la justice et des autres membres du personnel judiciaire qui travaillent avec les enfants ;

b) De faire respecter l ’ âge minimum de la responsabilité pénale sur le plan national et au niveau des États, sans exception ;

c) De prendre des mesures pour que les enfants ne soient pas traités comme des adultes dans les procédures judiciaires, en particulier dans les cas où ils ne peuvent pas présenter de documents d ’ identité ;

d) De mettre fin au recours abusif à la détention avant et après jugement et de remplacer la détention par des mesures telles que la déjudiciarisation, la mise à l ’ épreuve, les consultations psychosociales et les travaux d ’ intérêt général, en particulier pour les infractions mineures  ;

e) Dans les rares situations où la privation de liberté est utilisée comme mesure de dernier ressort, de veiller à ce que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes ou placés à l ’ isolement et à ce que les conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l ’ accès à l ’ éducation, à la formation professionnelle et aux services de santé, et de mettre en place des mécanismes indépendants de surveillance des lieux où des enfants sont privés de liberté ;

f) De garantir à tous les enfants inculpés, témoins ou victimes d ’ une infraction, quel que soit leur âge, des conditions spéciales de protection pour leur audition, avec notamment la présence obligatoire d ’ un psychologue, une audition unique et une audition dans une salle spécialement aménagée ;

g) De mettre en place une commission indépendante pour l ’ enfance ainsi que des tribunaux pour mineurs chargés de statuer sur les affaires concernant les enfants, conformément aux articles 192 et 193 de la loi relative à l ’ enfance.

Enfants dans le conflit armé

64.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour prévenir toutes les violations graves contre les enfants, notamment de l’application de la loi relative à l’enfance, de la publication, en 2014, d’un communiqué conjoint du Président du Soudan du Sud et de l’Organisation des Nations Unies sur la lutte contre les violences sexuelles liées aux conflits, de la conclusion de l’Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud (2018) et de l’adoption du Plan d’action global visant à faire cesser et à prévenir les six violations graves commises à l’égard d’enfants dans les situations de conflit armé au Soudan du Sud (2020). Il relève néanmoins avec une profonde préoccupation :

a)Que des enfants continuent d’être enrôlés et utilisés dans le conflit armé ; en 2021, l’ONU a enquêté sur l’enrôlement et l’utilisation de 129 enfants, dont 30 % avaient été enrôlés avant l’âge de 15 ans par les forces de sécurité gouvernementales et d’autres signataires de l’Accord revitalisé ;

b)Que de nombreuses violations graves, notamment des meurtres, des mutilations, des enlèvements, des viols et d’autres violences sexuelles, des actes de torture et des mauvais traitements, continuent d’être commises contre des enfants par toutes les parties au conflit ;

c)Que des écoles et des hôpitaux ont été pris pour cible, endommagés et occupés à des fins militaires ;

d)Que le refus d’accès humanitaire empêche des enfants de recevoir de la nourriture ou des médicaments ou de satisfaire d’autres besoins essentiels ;

e)Que l’actuel conflit armé et la présence de groupes armés ont des répercussions négatives sur le bien-être psychologique immédiat et futur des enfants.

65. Rappelant les recommandations du Secrétaire général de l ’ Organisation des Nations Unies et du Groupe de travail du Conseil de sécurité sur les enfants et les conflits armés et conformément aux engagements pris par le Soudan du Sud dans le cadre du troisième cycle de l ’ Examen périodique universel , le Comité prie instamment l ’ État partie :

a) De mettre immédiatement fin à l ’ enrôlement d ’ enfants et de libérer tous les enfants enrôlés, conformément aux obligations et responsabilités que lui imposent le droit international humanitaire et le droit des droits de l ’ homme et le Plan d ’ action global visant à faire cesser et à prévenir toutes les violations graves contre les enfants (2020), et de dégager des ressources financières suffisantes pour mettre rapidement et pleinement en œuvre le Plan ;

b) De mener des activités de désarmement, de démobilisation et de réintégration tenant compte des besoins des enfants et, à cette fin, d ’ allouer suffisamment de fonds à la Commission nationale pour le désarmement, la démobilisation et la réintégration, organisme national chargé de la démobilisation, de la réadaptation et de la réintégration des enfants associés aux forces armées et aux groupes armés, et de procéder à des opérations de déminage coordonnées ;

c) De faire en sorte que tous les enfants touchés par le conflit armé bénéficient de programmes de réintégration et d ’ assistance axés sur les rescapés et tenant compte des questions de genre, y compris des soins de santé mentale et d ’ autres soins de santé visant à traiter les traumatismes dus au conflit armé et à la violence et leurs conséquences néfastes qui se poursuivent jusqu ’ à l ’ âge adulte ;

d) D ’ approuver et de mettre en œuvre la Déclaration sur la sécurité dans les écoles et de prévenir et de condamner l ’ utilisation d ’ écoles et d ’ hôpitaux comme bases militaires, qui prive effectivement les enfants de leur droit à l ’ éducation et à la santé ;

e) De continuer à plaider auprès de ses forces de sécurité et des autres signataires de l ’ Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud pour qu ’ ils autorisent et facilitent un accès humanitaire sûr, rapide et sans entrave, y compris l ’ acheminement de l ’ aide humanitaire ;

f) D ’ enquêter sur tous les cas d ’ enrôlement d ’ enfants par des forces armées et des groupes armés et de faire en sorte que les responsables rendent compte de leurs actes, en veillant à ce que les victimes bénéficient de voies de recours, notamment en désignant un coordonnateur pour les enfants et le conflit armé au sein du Ministère de la justice et en mettant en place les mécanismes prévus dans l ’ Accord revitalisé sur le règlement du conflit au Soudan du Sud , à savoir la Commission vérité, réconciliation et apaisement, le Tribunal mixte pour le Soudan du Sud et l ’ Autorité d ’ indemnisation et de réparation.

K.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

66. Le Comité recommande à l ’ État partie de ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant établissant une procédure de présentation de communications, afin de renforcer encore le respect des droits des enfants.

L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme

67. Le Comité recommande à l ’ État partie de d ’ envisager de ratifier les instruments relatifs aux droits de l ’ homme fondamentaux ci-après auxquels il n ’ est pas encore partie, afin de renforcer encore le respect des droits de l ’ enfant :

a) Le Pacte international relatif aux droits civils et politiques ;

b) Le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels ;

c) La Convention internationale sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination raciale ;

d) La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille ;

e) La Convention relative aux droits des personnes handicapées ;

f) La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées .

68. Le Comité prie instamment l ’ État partie de s ’ acquitter des obligations en matière de soumission de rapports qui lui incombent au titre du Protocole facultatif à la Convention, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, sachant qu ’ il aurait dû soumettre son rapport au plus tard le 27 octobre 2020.

M.Coopération avec les organismes régionaux

69. Le Comité recommande à l ’ État partie de ratifier la Charte africaine des droits et du bien-être de l ’ enfant et de coopérer avec le Comité africain d ’ experts sur les droits et le bien-être de l ’ enfant de l ’ Union africaine en vue de l ’ application de la Convention et d ’ autres instruments relatifs aux droits de l ’ homme dans l ’ État partie et dans les autres États membres de l ’ Union africaine.

V.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

70. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement appliquées et pour qu ’ une version adaptée soit diffusée auprès des enfants, y compris les plus défavorisés d ’ entre eux, et leur soit largement accessible. Il recommande également que le rapport initial, les réponses écrites de l ’ État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi

71. Le Comité recommande à l ’ État partie de mettre en place une structure permanente qui soit chargée de coordonner et d ’ élaborer les rapports devant être soumis aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l ’ homme et de nouer un dialogue avec ces mécanismes, et de coordonner et suivre l ’ exécution des obligations conventionnelles et l ’ application des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Il souligne que cette structure devrait être appuyée de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement la Commission nationale des droits de l ’ homme et la société civile.

C.Prochain rapport

72.Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son rapport valant deuxième et troisième rapports périodiques le 22 février 2027 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives spécifiques à l ’ instrument concernant l ’ établissement de rapports et ne pas dépasser 21 200 mots . Si l ’ État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur. S ’ il n ’ est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d ’ examen par le Comité ne pourra pas être garantie.

73. Le Comité invite en outre l ’ État partie à soumettre un document de base actualisé qui ne dépasse pas 42 400 mots et soit conforme aux prescriptions applicables aux documents de base figurant dans les directives harmonisées concernant l ’ établissement des rapports destinés aux organes créés en vertu d ’ instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument , et au paragraphe 16 de la résolution 68/268 de l ’ Assemblée générale.