Nations Unies

CAT/OP/PAN/1

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

31 juillet 2018

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Visite au Panama menée du 20 au 26 août 2017 : observations et recommandations adressées à l’État partie

Rapport établi par le Sous-Comité*,**, ***

Table des matières

Page

I.Introduction3

II.Mécanisme national de prévention4

III.Aspects relatifs au cadre juridique et institutionnel de la prévention de la torture et des mauvais traitements6

A.Incrimination de la torture6

B.Imprescriptibilité de la torture6

C.Détection de la torture et des mauvais traitements7

IV.Observations du Sous-Comité sur les lieux visités9

A.Surpopulation et état des infrastructures9

B.Alimentation et eau potable10

C.Autogestion et corruption11

D.Détention avant jugement de longue durée12

E.Fouilles12

V.Santé12

VI.Groupes privés de liberté en situation de vulnérabilité14

A.Femmes14

B.Adolescents en conflit avec la loi15

C.Migrants17

D.Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués18

VII.Répercussions de la visite18

VIII.Conclusion19

Annexes

I.Lista de las personas con quienes se reunió el Subcomité20

II.Lugares de privación de libertad visitados23

I.Introduction

1.Conformément aux dispositions du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le Sous‑Comité a effectué sa première visite au Panama du 20 au 26 août 2017.

2.Il était représenté par Mme Lorena González Pinto (cheffe de la délégation), M. Felipe Villavicencio Terreros, M. Roberto Fehér Pérez et Mme Nora Sveaass. Ladélégation était assistée de deux spécialistes des droits de l’homme et de deux agents de sécurité du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme.

3.La visite visait principalement à analyser la mise en œuvre de la loi no 6 du 22 février 2017, qui prévoit la création du mécanisme national de prévention, et à fournir des conseils techniques aux institutions concernées, conformément au paragraphe b) i) de l’article 11 du Protocole facultatif.

4.Au cours de la visite, le Sous-Comité a tenu des réunions avec les autorités des trois branches du pouvoir de l’État, le Bureau du Défenseur du peuple, des représentants de la société civile et des fonctionnaires d’organismes des Nations Unies. Il a également visité 13 lieux de détention situésdans les villes de Panamaet de Colón.

5.Le Sous-Comité a accueilli avec satisfaction une série de faits nouveaux législatifs et institutionnels concernant les droits de l’homme, comme l’adoption de la loi no 6 de 2017, qui prévoit la création du mécanisme national de prévention et de la loi no 42 de 2016, relative aux carrières des fonctionnaires pénitentiaires et qui est entrée en vigueur en septembre 2017. Il a également accueilli avec satisfaction l’action menée pour remplacer la procédure inquisitoire par un système accusatoire, qui a des répercussions positives sur l’administration de la justice pénale.

6.Il a aussi pris note avec satisfaction de ce qui a été fait ces dernières années par le Ministère de l’intérieur, avec l’appui de certains organismes des Nations Unies, pour améliorer la situation des détenus, notamment le renforcement de l’Académie de formation pénitentiaire, la construction de nouveaux établissements pénitentiaires ou la publication d’appels d’offres à cet effet, ainsi que l’adoption d’un protocole concernant l’accès des organisations de défense des droits de l’homme aux établissements pénitentiaires.

7.Le Sous-Comité tient à remercier les autorités panaméennes, qui ont facilité la visite de sa délégation et coopéré avec ses membres. La délégation a eu accès aux lieux de détention rapidement et librement, a pu rencontrer librement les personnes privées de liberté avec lesquelles elle souhaitait s’entretenir en privé, et pu consulter les rapports et les registres qu’elle avait demandés à voir.

8.À l’issue de la visite, le Sous-Comité a présenté ses observations préliminaires confidentielles aux autorités. Dans le présent rapport, il expose ses conclusions et recommandations concernant la mise en place dans l’État partie du mécanisme national de prévention de la torture et des mauvais traitements à l’encontre des personnes privées de liberté. L’expression « mauvais traitements » est utilisée au sens large pour faire référence à toutes les formes de peines ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants.

9. Le Sous-Comité demande aux autorités de l ’ État partie de lui rendre compte de manière détaillée, dans les six mois qui suivront la présentation du présent rapport, des mesures qu ’ elles auront prises pour donner suite aux recommandations formulées.

10.Le présent rapport restera confidentiel jusqu’à ce que l’État partie décide de le rendre public. Le Sous-Comité est convaincu que sa publication ne peut que contribuer à prévenir la torture et les mauvais traitements. Il estime en effet qu’une large diffusion des recommandations formulées favorisera un dialogue national transparent et fructueux sur les questions abordées dans le rapport.

11. Le Sous-Comité recommande à l ’ État partie de publier le présent rapport, conformément au paragraphe 2 de l ’ article 16 du Protocole facultatif, comme l ’ ont déjà fait d ’autres États parties.

12.Le Sous-Comité tient à appeler l’attention de l’État partie sur le Fonds spécial créé en vertu de l’article 26 du Protocole facultatif. Les recommandations formulées par le Sous‑Comité dans ses rapports de visite rendus publics peuvent servir de base à l’État partie s’il souhaite faire une demande de financement de projets particuliers auprès du Fonds spécial.

II.Mécanisme national de prévention

13.Après la ratification du Protocole facultatif le 2 juin 2011 et conformément à l’article 17 de cet instrument, l’État partie a pris l’engagement, envers la communauté internationale, de créer le mécanisme national de prévention dans un délai d’un an. Le Sous-Comité note avec préoccupation que l’État partie a plus de cinq ans de retard dans l’exécution de cette obligation.

14.Cette situation est d’autant plus notable que très peu d’États parties accusent un retard si important. À cet égard, pendant sa vingt‑huitième session (février 2016), le Sous‑Comité est convenu de rendre publique la liste des États parties accusant plus de trois ans de retard dans la création d’un mécanisme national de prévention. Le Panama est l’un de ces États.

15.De plus, il convient de rappeler qu’à l’occasion du deuxième Examen périodique universel concernant le Panama, en 2015, le Gouvernement panaméen avait accepté plusieurs recommandations tendant à ce qu’il établisse rapidement le mécanisme national de prévention.

16.Le Sous-Comité a accueilli avec satisfaction l’adoption de la loi no 6 du 22 février 2017 sur le mécanisme national de prévention, qui intègre les normes le concernant formulées dans le Protocole facultatif et dans les Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention du Sous-Comité. Cette même loi dit également comment les membres du comité, le directeur et le directeur adjoint du mécanisme national de prévention sont choisis et prévoit la création, par le Défenseur du peuple, d’un groupe de travail interinstitutionnel pour la rédaction du décret qui établira les modalités d’application de la loi. Le Sous-Comité tient toutefois à faire connaître ses inquiétudes concernant les points mentionnés ci-après.

Indépendance financière et de fonctionnement

17.Même si, en application de l’article premier de la loi no 6, le mécanisme national de prévention est créé en tant que direction nationale rattachée au Bureau du Défenseur du peuple, et exerce ses fonctions et se prononcede manière indépendante, le Sous-Comité rappelle que le Protocole facultatif établit clairement qu’il incombe aussi à l’État partie de dégager des ressources propres pour les travaux du mécanisme national de prévention (art. 18, par. 1), afin de garantir l’indépendance opérationnelle de celui-ci. Les Directives du Sous-Comité en la matière disposent clairement que « [l]es mécanismes nationaux de prévention devraient jouir d’une entière autonomie financière et opérationnelle pour pouvoir s’acquitter de leurs fonctions en vertu du Protocole facultatif ».

18. Afin de garantir l ’ autonomie de fonctionnement du mécanisme national de prévention, le Sous-Comité recommande que celui-ci ne soit soumis à aucune forme de lien hiérarchique avec le Bureau du Défenseur du peuple. L ’ organigramme du Bureau du Défenseur du peuple fait écho aux dispositions du Protocole facultatif, qui précisent que le mécanisme national de prévention d oit jouir d ’ une autonomie de fonctionnement en ce qui concerne ses ressources, son programme de travail, ses conclusions et ses recommandations , et avoir un contact direct et confidentiel avec le Sous-Comité.

19.Conformément à l’article 43 de la loi no 6, le mécanisme national de prévention élaborera lui-même son budget annuel, qui devra être présenté et financé parallèlement avec celui du Bureau du Défenseur du peuple. Ce dernier a transmis au Sous-Comité son avant‑projet de budget pour 2018. L’introduction de ce document fait mention de la dotation du bureau du mécanisme national de prévention, mais aucune ligne budgétaire propre n’est prévue pour le mécanisme.

20. L e Sous-Comité considère que , p our assurer l ’ autonomie financière du mécanisme national de prévention , le Bureau du Défenseur du peuple doit inclure dans son budget une ligne distincte pour le mécanisme national de prévention. Lorsqu’il adopte le budget du Bureau du Défenseur du peuple, l’État partie doit préciser la ligne budgétaire et le montant consacrés au mécanisme national de prévention pour que les ressources soient destinées exclusivement à l ’ exercice de ses attributions et de ses fonctions.

Règlement d’application de la loi

21.La loi no 6 dispose que, dans les quatre mois suivant sa publication au Journal officiel (à savoir avant le 22 juin 2017), un décret établissant les modalités d’application de la loi doit être adopté. Le Sous-Comité a pris note avec satisfaction des renseignements reçus concernant la mise en place d’un processus participatif pour l’élaboration du règlement d’application de la loi, grâce à la création par le Bureau du Défenseur public d’un groupe de travail interinstitutionnel composé de représentants de l’État et de la société civile.

22. Faisant siennes les constatations du Comité contre la torture, le Sous-Comité regrette que, à la date du présent rapport, le projet de décret n ’ ait pas encore été adopté . Il prie le Bureau du Défenseur du peuple, de transmettre le projet de règlement immédiatement à l ’ autorité compétente pour qu ’ il l’ adopt e sans délai , après que le groupe de travail interinstitutionnel l’aura approuvé .

Nomination du directeur et du directeur adjoint du mécanisme national de prévention

23.Le Sous-Comité a salué la nomination, en août 2017, des membres du comité chargé de sélectionner le directeur et le directeur adjoint du mécanisme national de prévention. Il trouve néanmoins regrettable que, à la date de la visite de sa délégation, le règlement du comité de sélection n’avait toujours pas été adopté, ce qui retardait l’annonce de vacances de postes aux fins du recrutement du directeur et du directeur adjoint du mécanisme national de prévention.

24. Le Sous-Comité demande instamment à l ’ État partie de s ’ acquitter rapidement de son obligation internationale d ’ établir un mécanisme national de prévention présentant les garanties particulières exigées des mécanismes nationaux, étant donné qu ’ il accuse cinq ans de retard dans l ’ exécution de ses obligations. Il lui demande de lui communiquer, dans un délai d ’ un mois, des renseignements sur le calendrier de nomination du directeur et du directeur adjoint du mécanisme national de prévention et sur le budget effectivement alloué au mécanisme .

Points fondamentaux pour le fonctionnement du mécanisme national de prévention

25.Une fois mis en place, le mécanisme national de prévention devra exécuter son mandat conformément au Protocole facultatif, en particulier les articles 4 et 19, et aux Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention publiées par le Sous‑Comité. Pour ce faire, il devra établir un programme de travail et un budget qui garantissent que les lieux de privation de liberté puissent être visités dûment et aussi souvent que nécessaire pour contribuer réellement à la prévention de la torture. Le programme de travail devra également comprendre un programme de partenariat avec les organisations de la société civile.

26.Le mécanisme national de prévention devra établir des rapports à l’issue de ses visites, ainsi qu’un rapport annuel et tout autre type de rapport qu’il considérera opportun. S’il y a lieu, il formulera dans ces rapports des recommandations à l’intention des autorités compétentes. Dans lesdites recommandations, il devra tenir compte des règles pertinentes du système des Nations Unies en matière de prévention de la torture, ainsi que des Directives du Sous-Comité.

27.Le mécanisme pourra également présenter aux autorités compétentes de l’État partie des propositions et des observations sur la politique et la législation en vigueur ou sur des projets qu’il considère pertinents pour l’exécution de son mandat.

28.Le mécanisme national de prévention devra engager un dialogue nourri avec l’État partie sur l’application de ses recommandations. De même il devra se préoccuper de l’application de ses recommandations et de celles que le Sous-Comité aurait pu formuler. Il devra veiller à protéger pleinement les informations confidentielles qu’il obtiendra dans l’exécution de ses travaux.

29. Le Sous-Comité réaffirme qu ’ il est pleinement disposé à coopérer avec l ’ État partie et à lui fournir l es conseils et l’ appui nécessaires à la mise en place et au fonctionnement du mécanisme national de prévention.

III.Aspects relatifs au cadre juridique et institutionnel de la prévention de la torture et des mauvais traitements

A.Incrimination de la torture

30.Le Sous-Comité a fait part à la Commission « Justice et affaires constitutionnelles » de l’Assemblée nationale de sa préoccupation concernantle fait que la qualification du crime de torture figurant à l’article 156-A du Code pénal n’est pas conforme aux normes internationales, car la définition établie est insuffisante en ce qu’elle ne comprend pas les actes commis par des tiers à l’instigation ou avec le consentement exprès ou tacite d’un agent de la force publique.

31. Le Sous-Comité recommande à la Commission « Justice et affaires constitutionnelles » de l ’ Assemblée nationale de proposer de modifier la législation pour que la qualification du crime de torture dans la législation nationale soit conforme aux normes internationales, en particulier à l ’ article premier de la Convention contre la torture. Le Sous-Comité fait remarquer que le fait que la législation panaméenne ne soit pas conforme aux normes internationales peut favoriser l ’ impunité.

B.Imprescriptibilité de la torture

32.Le Sous-Comité a également exprimé ses inquiétudes à la même Commission au sujet du maintien, dans la législation panaméenne, d’un délai de prescription pour le crime de torture, même si l’imprescriptibilité est acceptée pour les cas où ce crime est réalisé de manière systématique et généralisée contre la population civile.

33. Le Sous-Comité recommande à la Commission « Justice et affaires constitutionnelles » de l ’ Assemblée nationale de proposer de modifier la législation pour que le crime de torture soit systématiquement déclaré imprescriptible, conformément aux normes internationales en la matière.

34.Le Sous-Comité se félicite du dialogue ouvert qu’il a eu avec la Commission « Justice et affaires constitutionnelles » de l’Assemblée générale. Il est disposé à apporter, par l’intermédiaire de son Groupe régional pour les Amériques et de son coordonnateur pour le Panama, une aide technique à la Commission pour l’élaboration de la proposition législative qui permettrait de rendre conforme au droit international la législation panaméenne relative à l’incrimination de la torture figurant à l’article 156-A, et à l’imprescriptibilité du crime de torture.

C.Détection de la torture et des mauvais traitements

35.Le Sous-Comité a reçu des allégations concordantes de personnes privées de liberté qui ont déclaré avoir fait l’objet d’actes de torture et de mauvais traitements dans différentes circonstances. Ces allégations contrastent avec les renseignements officiels qui indiquent que, pour l’année en cours, seules trois plaintes pour des actes supposés de torture ont été déposées. Pendant sa visite, le Sous-Comité a tenté d’obtenir de la Cour suprême de justice des données officielles sur le nombre de jugements prononcés concernant ce crime, mais, à ce jour, il n’a pu obtenir ces renseignements. Il considère que la loi no 1 de 2011, portant notamment ajout de l’article 156-A au Code pénal, n’est pas dûment appliquée et tout semble indiquer que l’impunité de ce phénomène persiste.

36.Le Sous-Comité estime que des indices fondés sur un ensemble d’éléments liésà la détection d’actes de torture, la réalisation d’enquêtes sur ces actes et la répression de ceux‑ci confirment cette impression. Certains de ces éléments sont énoncés ci-après.

Absence de garanties

37.Le Sous-Comité a constaté à diverses reprises que les personnes placées dans des centres de détention étaient souvent gardées au secret, ce qui les empêchaient d’informer leurs proches de leur détention, de bénéficier des services d’un avocat (service de défense public insuffisant), ou même de se soumettre à un examen médical.

38. Le Sous-Comité demande instamment à l ’ État partie de prendre des mesures pour que toutes les personnes détenues bénéficient, dans la pratique et dès leur arrestation, de toutes les garanties prévues par les normes et règles internationales.

Carencesde la défense publique

39.Le Sous-Comité est préoccupé par les carences de la défense publique accordée aux personnes privées de liberté. À la question systématiquement posée aux détenus de savoir s’ils bénéficiaient d’une aide juridictionnelle assurée par des avocats commis d’office, la réponse donnée a toujours été négative, ce qui atteste du fait que, d’une manière générale, ces avocats ne se rendent pas dans les centres de détention. Le Sous-Comité a reçu des témoignages indiquant qu’il était fréquent que la défense publique ne soit accordée qu’au moment des audiences, ce qui démontre le manque de communication avec les intéressés avant leur comparution devant le procureur ou le juge, que ce soit pendant la détention ou au cours des diverses étapes de l’enquête pénale concernant les faits imputés. Au cours de ses visites, le Sous-Comité n’a pas vu d’avocats commis d’office dans les centres de détention.

40.Cette constatation concernant les défaillances de la défense publique va dans le même sens que les renseignements reçus de la Cour suprême de justice, qui indiquent qu’il y aurait au total 38 défenseurs publics dans le pays et seulement 11 dans le premier circuit (Panama), qui compte l’essentiel de la population carcérale, ce qui est totalement insuffisant pour répondre aux besoins de la population carcérale actuelle.

41.Le Sous-Comité a également constaté l’existence de différents modèles de défense publique, et le nombre limité de défenseurs qui s’occupent d’affaires traitées selon le modèle inquisitoire ou accusatoire et dont certains sont également chargés de la défense mixte dans des domaines relatifs à la protectionde l’enfance, à la famille, à l’agricultureou autres, dans des procédures pénales inquisitoires concernant des adultes.

42.Le Sous-Comité considère que le nombre réduit de défenseurs publics est un problème grave pour le renforcement du nouveau modèle accusatoire mis en place au niveau national dans le cadre duquel la défense et le Bureau du Procureur doivent disposer de ressources humaines et financières équivalentes pour pouvoir s’acquitter efficacement de leurs fonctions dans le respect du principe de l’égalité des moyens. Ce problème est un obstacle majeur s’agissant de garantir que la défense publique joue le rôle fondamental qui est le sien dans la détection d’actes de torture, assure la représentation des victimes et leur fournisse une aide, protégeant ainsi la régularité des enquêtes réalisées sur les cas qui se présentent.

43. Le Sous-Comité prie instamment l ’ État partie de renforcer le rôle de la défense publique sur tout le territoire national par des mesures permettant d ’ augmenter le nombre d ’ a vocats de la défense publique , en particulier pour ce qui est de l’application des peines . L ’ État partie doit offrir une formation adaptée et les ressources nécessaires pour garantir les services de défense publique dès les premières heures de la détention, en s ’ assurant que les entretiens avec les personnes privées de liberté ont toujours lieu avant les audiences et qu ’ ils sont d’ une durée et d’ un contenu minimums propres à garantir l ’ exercice du droit à la défense et la détection systématique de fait s de torture et de mauvais traitements.

Absence de mécanismes de plaintes

44.Dans la majorité des établissements visités, le Sous-Comité a pu constater l’absence de mécanismes permettant de présenter d’éventuelles requêtes ou plaintes conformément à la règle 56 de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela). Il est préoccupé par le fait que l’accès à des mécanismes de plaintes ne soit pas garanti, que celles-ci visent les autorités pénitentiaires, les autorités judiciaires, le Bureau du Défenseur du peuple ou d’autres autorités. Dans tous les cas, on constate que les personnes privées de liberté craignent des représailles.

45. Le Sous-Comité exhorte l ’ État partie à faire en sorte que, dans la pratique, tout détenu ait la possibilité de présenter des requêtes ou des plaintes au directeur de l ’ établissement ou au fonctionnaire pénitentiaire autorisé à le représenter. De même , l ’ État partie devrait veiller à ce que les détenus puissent s ’ entretenir librement et en toute confidentialité et à ce qu ’ ils ne soient pas sanctionné s ou exposés à des conséquences nég atives pour avoir présenté une plainte ou communiqué des renseignements.

Nombre insuffisant de juges d’application des peines

46.Le Sous-Comité a été informé du nombre très faible de juges d’application des peines (28 au total et seulement 8 pour le premier circuit, qui accueille l’essentiel de la population carcérale). Il est indispensable qu’une politique nationale soit mise en place pour que les juges d’application des peines jouent un rôle de mécanisme de prévention de la torture supplémentaire.

47. Le Sous-Comité demande à l ’ État partie de mettre en place une politique visant à augmenter le nombre de juges d’application des peines et de veiller à ce qu ’ ils soient dûment formés pour s ’ acquitter efficacement de leurs fonctions. Il recommande que c es juges exercent leur activité professionnelle avec diligence , aient un contact direct avec les dé tenus et veillent au respect des droits de ces derniers .

48.Durant la visite, le Sous-Comité a été invité à participer à une formation organisée par l’autorité judiciaire à l’intention des juges, procureurs et avocats de la défense publique et a pris note avec satisfaction de l’inclusion de modules de formation sur la torture.

49. Le Sous-Comité recommande de renforcer les programmes de formation destinés aux juges, aux procureurs et aux avocats de la défense publique , notamment sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d ’ Istanbul).

Présence insuffisante du Bureau du Défenseur du peuple

50.Le Sous-Comité a constaté que le Bureau du Défenseur du peuple comprenait un service chargé de contrôler le respect des droits de l’homme des détenus, qui devrait réaliser régulièrement des visites dans les établissements pénitentiaires. Toutefois, ce service ne comptait que deux fonctionnaires, ce qui limitait fortement sa capacité de surveillance de la situation dans les centres de détention, les commissariats ainsi que les centres d’hébergement pour migrants, et contribuait à ce que les actes de torture et de mauvais traitements restent dans l’ombre.

51. Le Sous-Comité recommande au Bureau du Défenseur du peuple de renforcer sa présence dans les centres de détention sur tout le territoire national pour détecter les cas de torture et de mauvais traitements.

52.Le Sous-Comité a pris note de l’incident qui s’est produit le 9 août dans l’établissement pénitentiaire Nueva Joya, au cours duquel des personnes ont été blessées, tant parmi les fonctionnaires de l’administration pénitentiaire que parmi les détenus. Il est surprenant de constater qu’à ce jour, le Bureau du Défenseur du peuple ne s’est pas prononcé sur des faits aussi graves.

53.Le Sous-Comité tient à indiquer que la création du mécanisme national de prévention rattaché au Bureau du Défenseur du peuple ne va pas à l’encontre du travail réalisé par le service chargé de surveiller le respect des droits de l’homme des détenus. En application du Protocole facultatif et des Directives du Sous-Comité, deux structures distinctes et autonomes sont prévues pour remplir des fonctions différentes et garantir une certaine indépendance.

54.Le Sous-Comité rappelle que, pour renforcer l’efficacité du mécanisme national de prévention, il est important de veiller à ce que toutes les parties prenantes, en particulier les autorités et les détenus, sachent que le mécanisme national de prévention a pour fonction principale de prévenir la torture.

IV.Observations du Sous-Comité sur les lieux visités

A.Surpopulation et état des infrastructures

55.Selon les données transmises par la Direction générale du systèmepénitentiaire, pour juin 2017, les taux de surpopulation variaient d’un centre de privation de liberté à l’autre. Si quelques centres n’étaient pas surpeuplés, la plupart l’étaient, à différents degrés, le taux de surpopulation allant jusqu’à 266 % à la prison de David.

56.Le Sous-Comité a constaté des conditions de vie déplorables dans la grande majorité des centres qu’il a visités. Dans le complexe pénitentiaire La Joya-La Joyita (ville de Panamá) et au centre Nueva Esperanza (ville de Colón), il a noté que les conditions de détention étaient inhumaines dans plusieurs pavillons, non seulement du fait de la surpopulation, mais aussi en raison, entre autres choses, du degré élevé d’humidité, de l’absence de ventilation, d’un manque total d’hygiène, de l’accumulation des déchets pendant des semaines, ou encore de câblages électriques très dangereux risquant même de causer des incendies. Le Sous-Comité a constaté que de nombreux détenus dormaient sans matelas, à même le sol ou dans des hamacs improvisés. À La Joyita, la surpopulation était telle dans le pavillon 17 qu’il a rencontré des détenus qui dormaient sous une table dans les espaces communs. Prises dans leur ensemble, ces conditions de détention constituent un traitement cruel, inhumain et dégradant.

57.Les conditions de vie au centre pénitentiaireNueva Esperanza de Colón sont particulièrement préoccupantes. Le Sous-Comité a constaté que l’établissement ne remplissait pas les conditions minimum d’habitabilité, qu’il s’agisse de l’hygiène, des soins médicaux, de l’alimentation, ou encore de l’infrastructure.

58. Le Sous-Comité recommande que des mesures soient prises de toute urgence pour améliorer les conditions de détention inacceptables au complexe La  Joya ‑La  Joyita . Il engage vivement l’État partie à accélérer la construction d ’un n o u veau centr e de détention à Colón, de manière à pouvoir fermer le centre pénitentiaire Nueva Esperanza dans les plus brefs délais .

59.Lors de la visite qu’il a effectuée de nuit au poste de police d’El Chorrillo, le Sous‑Comité a constaté qu’il n’y avait ni lumière naturelle ni éclairage électrique dans les cellules, que les toits étaient en tôle et qu’il y faisait très chaud, ce qui laisse supposer une température insupportable en journée. Au poste de police de Caledonia, dans la huitième circonscription de police municipale Est, le Sous-Comité a noté que la cellule de détention, où se trouvaient sept personnes, ne réunissait pas les conditions minimum d’hébergement. Les seules toilettes étaient éloignées, inondées et inutilisables, ce qui contraignait les personnes privées de liberté à faire leurs besoins naturels dans la cellule même − le Sous-Comité a pu y voir de grands seaux remplis d’urine et des sacs contenant des excréments. En consultant les registres du poste de police, le Sous-Comité a pu constater qu’au cours des jours précédents, cette même cellule avait accueilli jusqu’à 21 personnes à la fois. Il a également été témoin du très mauvais état de fonctionnement et d’hygiène des toilettes du personnel de police.

60. Le Sous-Comité recom ma nd e aussi que les conditions de détention soie n t améliorées au poste de police d ’ El Chorrillo .

61. Le Sous-Comité recom ma nd e la fermeture immédiate d u poste de police de Caledonia , car tant les détenus que le personnel de la police souffrent de la gravité de la situation qui y prévaut et doivent être traités avec le respect dû à tout être humain.

62.Pour ce qui est du centre de détention provisoire relevant de la Direction des enquêtes judiciaires, dans le pavillon des hommes, le Sous-Comité a recensé 50 détenus au total, dont certains étaient là depuis plusieurs mois, dans des locaux de dimensions très réduites. Les conditions de vie carcérales laissaient totalement à désirer, les cellules étant dépourvues de fenêtres, de ventilation, de lumière (alors que le couloir était alimenté en électricité 24 heures sur 24) et le câblage électrique étant très dangereux. Les détenus ne disposaient que d’un sanitaire, à l’écoulement défectueux et dans un état de grand délabrement, n’avaient pas de couchette et, pour certains d’entre eux, dormaient dans le couloir à cause de la surpopulation. Le Sous-Comité a en outre constaté avec surprise que certains étaient détenus pendant de longues périodes dans cet établissement pourtant prévu pour la détention provisoire. Les détenus ont déclaré ne pas avoir la possibilité de sortir à l’air libre dans la cour.Les femmes étaient certes bien moins nombreuses (au nombre de six au moment de la visite), mais, proportionnellement,elles vivaient dans des conditions similaires. Cette situationcontrastait avec celle d’un petit nombre de détenus qui jouissaient de meilleures conditions de détention dans la cellule no7.

63. Le Sous-Comité demande à l’État partie de réserver l e centr e de détention provisoire de la Direction des enquêtes judiciaires à la détention provis o i re de courte durée et de mettre l e s locaux aux normes minimum de respect de la digni té des person ne s priv ées de libert é .

64. Au vu de la surpopulation que connaissent la majorité des lieux de détention , l e  Sous-Comité recom ma nd e à l’État partie de mettre d’urgence en place des me sures correctives , notamment d’appliquer les différentes peines de substitution à la privation de liberté (trav a ux d’intérêt général , emprisonnement de fin de semaine , assignation à résidence ), entre autres mesures prévues dans la législation pénale panaméenne , conform ément aux r ègles minima des Nations Unies pour l ’ élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo).

B.Alimentation et eau potable

65.Dans les établissements pénitentiaires visités, les personnes privées de liberté se sont plaintes de la quantité insuffisante et de la mauvaise qualité de la nourriture. Le Sous‑Comité a pu constater que les horaires de distribution des repas étaient très irréguliers. Il a également pu voir que l’accès des détenus à l’eau potable était très limité.

66. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les établissements pénitentiaires procèdent aux distributions de nourriture aux heures habituelles et tiennent un registre de ces distributions, afin de prévenir les actes de corruption, l’alimentation devant être de bonne qualité, bien préparée et servie, et avoir une valeur nutritive suffisante. De même, l’État partie devra faire en sorte que chaque détenu puisse disposer d’ea u potable lorsqu’il en a besoin (Règle 22 des Règles Nelson Mandela).

67.Le Sous-Comité a appris que les personnes placées en garde à vue ne recevaient ni nourriture ni eau au motif qu’elles se trouvaient au poste de police, censé être un lieu de détention temporaire. Pourtant, il a pu constater qu’au poste de Caledonia, certaines personnes étaient là depuis cinq jours. Il a appris que les intéressés recevaient de la nourriture de leurs proches et la partageaient avec ceux qui ne recevaient pas de visites.

68. Le Sous-Comité est pr é o ccupé par l’absence de distribution de nourriture et d’eau potable pendant la garde à vue . Il recommande à l ’ État partie de garantir l’ acc ès à l’eau potable et la distribution de nourriture à toutes les personnes soumises à une quelconque form e de détention, conform ém e nt aux normes internationales . Aucune personne privée de sa liberté ne doit dépendre d’un tiers pour obtenir de quoi se nourrir .

C.Autogestion et corruption

69.Dans plusieurs des établissements pénitentiaires qu’il a visités, le Sous-Comité a relevé différentes formes d’autogestion résultant d’un partage du pouvoir entre les gangs et les autorités pénitentiaires. Dans certains cas, cette situation s’explique par un manque de personnel pénitentiaire qualifié. Dans d’autres, les policiers ou les gardiens n’ont d’autorité qu’à l’extérieur des pavillons. Une telle situation peut aussi dissimuler un véritable système de corruption.

70.Toute une série de tâches, telles que le nettoyage des locaux, la distribution de nourriture, l’accès aux soins médicaux et l’ouverture et la fermeture des cellules, sont déléguées aux « responsables » des différents pavillons et même, à La Joya, à un « responsable général ». La discipline elle-même est parfois déléguée, ce qui est contraire à l’article 40 des Règles Nelson Mandela. C’est ainsi que, dans certains pavillons, le détenu qui a commis une infraction est isolé par ses pairs à l’intérieur de sa propre cellule, ce qui ne peut se produire sans que les autorités pénitentiaires ne ferment les yeux.

71.Cette perversion de l’autorité pénitentiaire donne lieu à diverses formes et degrés d’autogestion. Lorsque les gangs sont très forts, leur contrôle sur les pavillons est total, au point que le Sous-Comité a parfois dû se faire guider par le « responsable » pour mener à bien son évaluation des conditions carcérales. Dans d’autres cas, le pouvoir des différents gangs est plus diffus et se confond avec celui des groupes religieux. L’autogestion par les gangs et la corruption augmentent le risque, pour les détenus, d’être victimes d’exploitation sous une forme ou une autre, de mauvais traitements, de torture et d’autres abus, avec une forte probabilité d’impunité pour les auteurs. Le Sous-Comité a ressenti un climat de peur parmi les détenus des prisons autogérées. On lui a en outre fait état de l’entrée d’armes à feu (et de drogue) dans les centres de détention.

72.Le Sous-Comité s’est aussi rendu compte que pareille situation empêche la séparation des condamnés et des prévenus, ce qui est contraire à la Règle 11 des Règles Nelson Mandela, et le remplacement des centres de détention anciens par des centres modernes, dans la mesure où cela reviendrait à mettre un terme au modèle du partage du pouvoir.

73. Le Sous-Comité recommande à l ’ État partie d’ a c c é l é r e r la mise en œuvre de la loi sur l’organisation des carrières dans l ’ administrat ion pénitentiaire et d’allouer un nombre d ’agents pénitentiaire s qualifiés suffisant pour assurer la bonne gestion des établissements pénitentiaires .

74. Le Sous-Comité considère que la délégation de pouvoir et l ’ auto gestion accroissent le risque que les personnes privées de liberté soient soumises à différente s formes de torture et de mauvais traitements , et demande instamment à l ’ État partie de prendre les mesures qui s’imposent pour reprendre le contrôle des établissements pénitentiaires .

D.Détention avant jugement de longue durée

75.Le Sous-Comité salue la promulgation de la loi no 4 du 17 février 2017, portant modification du Code judiciaire, du Code pénal et du Code de procédure pénale, et visant entre autres choses à prévenir la surpopulation carcérale, qui permet, notamment, une commutation de peine pour les condamnés qui auraient pris part à des programmes d’études, d’emploi ou d’enseignement pendant qu’ils étaient en détention avant jugement.

76.Cependant, le Sous-Comité a pris note du sérieux retard qu’accusait le règlement des affaires pénales, du recours excessif à la détention provisoire et des durées trop longues de celle-ci. Il ressort des données officielles que certaines personnes sont placées en détention provisoire en application des règles du système inquisitoire et que les détentions avant jugement prolongées sont très fréquentes (on compte 2 759 personnes en détention provisoire depuis plus de trois ans, 6 760 depuis plus d’un an et 393 depuis moins d’un an). À l’inverse, dans le système pénitentiaire accusatoire déjà en vigueur dans le pays, la période de détention provisoire est le plus souvent inférieure à un an (8 personnes en détention provisoire depuis plus de trois ans, 328 depuis plus d’un an et 1 200 depuis moins d’un an). Globalement, sur un nombre total de 16 104 personnes privées de liberté dans le pays, le nombre de prévenus s’élève à 8 681, soit 54 % de la population carcérale. En outre, le Sous-Comité a vu au centre de réadaptation Nueva Esperanza une personne qui se trouvait, au moment de la visite, en détention provisoire depuis pas moins de huit ans.

77. Comme i l l’ a indiqué au sujet de la surpopulation carcérale, le Sous-Comi té recommande à l’État partie d e favoriser le recours à des mesures de substitution à la privation de liberté, conformément aux Règles de Tokyo, et de redoubler d ’ efforts pour limiter le recours à la détention avant jugement .

E.Fouilles

78.Le Sous-Comité a reçu, de détenus et de membres de leur famille, de multiples allégations selon lesquelles, contrairement à ce qu’ont dit les directeurs des établissements, l’entrée dans un lieu de détention s’accompagne de fouilles vexatoires, au cours desquelles les intéressés sont contraints à se déshabiller et à prendre des positions humiliantes, ce qui décourage les familles de venir visiter un proche détenu.

79. Le Sous-Comité demande instamment à l ’ État partie de respecter les normes internationales et d ’ abandonner immédiatement cette pratique, qui porte atteinte à la dignité humaine. I l lui recom ma nd e de veiller à ce que les procédures d ’enregistrement et d ’ entrée ne soient pas dégradantes pour les visiteurs et soient régies par des principes au moi ns aussi protecteurs que ceux des Règle s Nelson Mandela (règles 50 à 52 et 60) .

V.Santé

80.Le Sous-Comité a relevé que les personnes détenues dans le complexe pénitentiaire de La Joya‑La Joyita, dont le nombre avoisine les 8 000, sont soignées au centre médical Virgen de la Merced, situé non loin du complexe. Il a été informé du fait que ce centre médical était ouvert de 7 à 19 heures et qu’en dehors de ces horaires, il fallait le cas échéant composer le 911.

81.Le Sous-Comité a constaté que le centre médical disposait d’une salle d’urgence dont l’état était acceptable et d’équipement pour la réanimation avancée. Il a toutefois relevé que le personnel médical et infirmier n’avait pas toutes les compétences voulues pour utiliser ces équipements, ce qui laisse à penser qu’il n’aurait pas reçu une formation adéquate dans ce domaine.

82. Le Sous-Comité recommande que le centre médical, qui est susceptible de recevoir des individus de cet établissement, dispose d’un service d’urgence ouvert 24 h eures sur 24 et que son person ne l médic al soit formé aux situation s d ’urgence .

83.Des personnes privées de liberté se sont plaintes au Sous-Comité de ne pas recevoir de soins médicaux spécialisés en raison de la difficulté de coordination de l’envoi des patients à l’hôpital de Santo Tomás. Le Sous-Comité a pu observer de nombreuses pathologies liées à cette absence de soins spécialisés dans les deux prisons, dont beaucoup évoluaient depuis plusieurs années, dues notamment à des fractures mal consolidées, des colostomies, des sondes urinaires permanentes, des éventrations, des hernies et des tumeurs.

84. Le Sous-Comité recommande que l es problèmes de coordination médicale empêchant de traiter ces pathologies soi en t rapidement résolu s car, s’ils n’engagent pas le pronostic vital à court terme , ils peuvent néanmoins entraîner d ’ autres dommages et nuis e nt à la qualité de vie . Si ces problèmes n’étaient pas résolus , il y aurait négligence médicale, ce qui pourrait constituer une forme de mauvais traitement.

85.Le Sous-Comité salue les mesures prises pour rouvrir la salle pénitentiaire de l’Hôpital de Santo Tomás, qui pourrait accueillir 25 détenus. De même, il prend note avec satisfaction de la préparation d’une chambre destinée à accueillir les patients vivant avec le VIH/sida dans le centre médical de la Virgen de la Merced, afin qu’ils puissent y recevoir des traitements par voie intraveineuse, ainsi que de la décision de remettre en service une salle pour les courts séjours, qui éviterait les transferts inutiles.

86.Le Sous-Comité a appris par le personnel du centre médical que la capacité maximale était de 56 consultations mais que le nombre réel des consultations était toujours bien inférieur, ce qui corrobore les renseignements obtenus auprès des détenus, des gardiens et des « responsables ». Il a pu constater que le centre médical inscrivait tout l’historique médical des patients dans des dossiers et remettait aux personnes atteintes de maladies chroniques les médicaments nécessaires à soixante jours de traitement. Il a reçu des détenus, des gardiens et du personnel des explications divergentes quant à la raison pour laquelle les détenus ne revenaient pas retirer leurs médicaments.

87. Le Sous-Comité recommande de relever sensiblement le nombre de consulta tions et de créer un système permettant de garder une trace effective de l’ensemble du suivi (de pui s la demande d u pati e nt dans son quartier , en précisant la participa tion des « responsables » et des détenus contribuant à la prise en charge médicale, l ’orientation par le gardien et l’accueil par le corps médical), afin de garantir la transparence et d’établir les responsabili tés .

88.Au centre pénitentiaire de Colón, dans les étages visités et dans le quartier des femmes, les détenues se plaignaient toutes des graves difficultés d’accès aux soins médicaux que posait le nombre insuffisant de consultations médicales quotidiennes. Le Sous-Comité a relevé avec préoccupation que la capacité de soins médicaux n’était absolument pas en adéquation avec la taille de la prison.

89. Le Sous-Comité recommande que, lorsque le nouvel établissement pénitentiaire de Colón sera ouvert, le grave manque d’accès aux soins soit pris en compte et le service médical restructuré.

90.Le Sous-Comité est inquiet de constater que toutes les équipes médicales assurant la prise en charge initiale des personnes privées de liberté, dans tous les établissements, ne connaissent pas le Protocole d’Istanbul.

91. Le Sous-Comité recommande à l ’ État partie de promouvoir la connaissance effe c tive du Protocole d’Istanbul par l es médecins et autres professionnels de la santé qui travaillent avec des personnes privées de liberté , afin qu e ceux-ci soient à même de documenter et de traiter les cas de lésions corporelles. Il lui recommande aussi de garantir l ’ indépendance clinique des services médicaux afin que les professionnels de santé puissent assumer cette obligation ( règle 25 des Règles Nelson Mandela ).

92.Le Sous-Comité s’est rendu à l’hôpital psychiatrique de Panamá et a jugé que la situation y était satisfaisante, tant pour les installations que pour les soins médicaux et la dynamique de travail.Ila noté l’absence de mesures de contention ainsi que l’existence d’un protocole relatif aux lésions corporelles faisant intervenir un assistant social, chargé de saisir le parquet de tout cas delésion corporelle.

93.Le Sous-Comité s’est rendu dans une résidence pour personnes âgées remplissant une importante fonction sociale. Il a pu constater que les installations y étaient adaptées, tout comme les conditions d’hygiène. Les patients atteints de troubles cognitifs sérieux, comme la maladie d’Alzheimer ou ladémence sénile, n’y étaient pas soumis à des mesures de contention.

VI.Groupes privés de liberté en situation de vulnérabilité

A.Femmes

94.Afin d’examiner la situation des femmes privées de liberté, le Sous-Comité a visité la prison pour femmes de Colón, le centre d’hébergement de migrantes et les locaux de la Direction des enquêtes judiciaires.

Établissements pénitentiaires

95.Le Sous-Comité a constaté que les 72 détenues de la nouvelle prison pour femmes de Colón (qui fait partie du complexe pénitentiaire Nueva Esperanza) bénéficiaient de conditions matérielles nettement meilleures que dans l’établissement du même complexe où elles se trouvaient auparavant, en particulier pour ce qui était de l’hygiène, de la lumière et de l’aération.

96.Cependant, le Sous-Comité a reçu de nombreuses allégations concordantes concernant la mauvaise qualité de l’alimentation et l’irrégularité des horaires de repas, le nombre restreint d’activités ludiques et sportives, d’ateliers de formation professionnelle et de possibilités éducatives, le manque de produits d’hygiène essentiels, notamment de serviettes hygiéniques, la difficulté d’accès aux soins médicaux, y compris les soins gynécologiques et spécialisés, et, enfin, l’absence d’un droit de visite conjugale, ce qui constituait un traitement discriminatoire par rapport aux hommes, étant donné que les détenus du même complexe bénéficiaient de ce droit.

97. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les détenues aient accès aux fournitures nécessaires pour répondre aux besoins propres à leur sexe en matière d’hygiène et reçoivent des services de santé spécifiques aux femmes, conformément aux Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l’imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de  Bangkok) n os 5 et 10 .

98.Grâce aux entretiens qu’il a tenus, le Sous-Comité a pu constater que des mesures de substitution à la détention n’étaient pas systématiquement accordées aux femmes ayant des enfants. Il a remarqué qu’il n’existait pas d’unité maternelle permettant aux mères de garder leurs enfants auprès d’elles. D’après les informations reçues, aucun des établissements pénitentiaires du pays n’était doté d’une telle unité. Les femmes ne pouvaient pas non plus allaiter leurs nouveau-nés. Le fait de ne pas pouvoir s’occuper de leurs enfants était une source de stress majeure pour la plupart des femmes interrogées. Le manque d’assistance sociale et psychologique et les difficultés que les femmes éprouvaient à être tenues à jour de la situation de leurs enfants par les institutions compétentes aggravaient considérablement la situation.

99. Le Sous-Comité rappelle à l’État partie le principe de l’intérêt supérieur de l’ enfant et la Règle de Bangkok n o 58 sur les mesures de substitution à la détention provisoire et la condamnation des femmes.

100. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de mettre en place les infrastructures nécessaires pour que les femmes puissent garder leurs enfants auprès d’elles et les allaiter. Il lui recommande également de veiller à ce qu’il existe un système de protection efficace pour les mineurs dont les mères sont privées de liberté.

Direction des enquêtes judiciaires

101.Le Sous-Comité a visité la cellule pour femmes de la Direction des enquêtes judiciaires. Il a constaté que six détenues occupaient une cellule d’une superficie de 7 m² dépourvue de lumière naturelle et mal aérée (d’après les informations qu’il a reçues, neuf femmes s’y trouvaient quelques jours auparavant). Les femmes ne pouvaient pas sortir de la cellule. Elles pouvaient recevoir des visites une fois par semaine mais ne pouvaient pas voir leurs enfants. Une des femmes avec lesquelles le Sous-Comité s’est entretenu était enfermée dans la cellule depuis un mois.

102. Le Sous-Comité réitère sa recommandation visant à ce que le centre de la Direction des enquêtes judiciaires ne soit utilisé que pour des périodes de détention provisoire de courte durée et à ce que ses infrastructures répondent aux conditions minimales de respect de la dignité des détenus. En outre, le Sous-Comité recommande que les femmes puissent recevoir la visite de leurs enfants.

Centres de détention de migrantes

103.Le Sous-Comité a aussi visité le centre d’hébergement de migrantes. Il a constaté que les femmes privées de liberté ne pouvaient pas y garder leurs enfants avec elles. Certaines ont indiqué avoir subi des mauvais traitements dans une unité pour migrants, avoir fait l’objet de moqueries pendant leur transfert et avoir passé plus de vingt‑quatre heures dans un poste de police sans pouvoir obtenir de serviettes hygiéniques. En outre, les femmes qui ne parlaient pas espagnol n’avaient pas pu recevoir les services d’un interprète ni bénéficier de l’assistance de leur consulat.

104. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les femmes puissent rester avec leurs enfants lorsque les conditions le permettent, compte tenu du principe de l’intérêt supérieur de l’enfant.

105. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de tenir compte des problèmes particuliers que rencontrent les femmes privées de liberté et de reconnaître la nécessité de prendre des mesures appropriées pour résoudre ces problèmes, conformément aux Règles de Bangkok, en particulier la règle n o 26, et au document établi par le Sous-Comité concernant la prévention de la torture et des mauvais traitements à l’égard des femmes privées de liberté.

B.Adolescents en conflit avec la loi

106.Le régime spécial de responsabilité pénale des adolescents est établi par la loi no 40 du 26 août 1999. D’après les informations que l’État partie a communiquées au Comité contre la torture, plus de 500 mineurs se trouvent en détention, dont 300 dans des établissements pour peine et près de 200 dans des établissements pour adultes, en dépit du fait que l’État a lui-même indiqué que des mesures privatives de liberté ne devaient être prises qu’à titre exceptionnel. Des mesures de substitution ont été prises concernant 406 mineurs.

107.À la lumière de l’objectif de l’État partie, qui consiste à protéger les adolescents en conflit avec le droit pénal de façon à garantir leur réadaptation et leur réinsertion et à éviter toute récidive, les modifications de la loi no 40, en particulier celles de 2007 et de 2010, sont inquiétantes. Comme le Comité des droits de l’enfant, le Sous-Comité est préoccupé en particulier par les modifications suivantes : l’augmentation de la durée maximale de la période de privation de liberté, qui passe de cinq à douze ans (2007), l’augmentation de la durée maximale de la période de détention préventive, qui passe de deux à neuf mois (2007) et peut être prolongée indéfiniment en cas d’homicide (2010), l’allongement de la liste d’infractions passibles d’une peine de privation de liberté (2002, 2004, 2007), la diminution de l’âge de la responsabilité pénale, qui est ramené de 14 à 12 ans (2010), l’abaissement de l’âge minimal d’intégration dans le système pénitentiaire, qui est ramené de 21 à 18 ans, modification applicable à quiconque purge une peine dans un centre de détention pour mineurs (2007).

108. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de réviser sa législation relative à la justice pénale pour mineurs conformément aux normes internationales, en tenant compte de l’Ensemble de règles minima des Nations Unies concernant l’administration de la justice pour mineurs (Règles de Beijing), des Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad), des Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de La Havane) et de l’observation générale du C omité des droits de l’enfant n o 10 (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs.

109.Le Sous-Comité a visité deux centres de détention pour mineurs : l’établissement pour peines pour garçons de Pacora et la maison d’arrêt pour garçons de Tocumen (Arco Iris).

110.Le Sous-Comité a constaté que l’établissement de Pacora était relativement neuf et que certains quartiers pénitentiaires présentaient des conditions matérielles satisfaisantes tandis que d’autres reproduisaient le modèle des prisons pour adultes (en particulier le quartier 1A et les cellules de haute sécurité).

111.Le centre fonctionne selon un système progressif : les mineurs sont d’abord placés dans le quartier 1, où les conditions sont assez rudimentaires, et, s’ils se comportent de manière satisfaisante, ils peuvent obtenir des avantages et être transférés vers des quartiers de niveau supérieur. En cas de mauvaise conduite ou d’écart disciplinaire, ils réintègrent un quartier de niveau inférieur ou se voient imposer une période de « réflexion » (ils sont placés dans une cellule de haute sécurité pour une durée allant jusqu’à vingt‑neuf jours).

112.Les nouveaux arrivants, qui sont souvent les plus jeunes et, par conséquent, les plus vulnérables, sont systématiquement enfermés dans des cellules du quartier 1 de 15 heures à 8 heures du matin. Le Sous-Comité a observé que les conditions matérielles étaient moins bonnes dans les quartiers de niveau inférieur que dans les quartiers de niveau supérieur (4 et 5). Les premiers étaient équipés de cellules typiques d’une prison qui ne ressemblaient en rien à ce qu’on pouvait attendre d’un centre de rééducation et de réadaptation pour enfants, ce que les centres de détention pour mineurs étaient pourtant censés être d’après la directrice de l’établissement de Pacora.

113.D’après les informations reçues, les jeunes ne vont à l’école qu’une ou deux fois par semaine. Ceux qui ne suivent pas les cours et ne participent pas aux ateliers de formation sont enfermés dans leur cellule toute la journée, excepté durant le week-end où ils font un peu de sport. Le système de formation professionnelle semble bien développé, mais il faut plusieurs mois pour que les nouveaux arrivants y soient intégrés.

114.Le Sous-Comité a constaté avec préoccupation que les mineurs avaient les chevilles entravées lorsqu’ils se rendaient à l’école et recevaient des visites, et qu’ils en gardaient des marques visibles. Le centre fournissait une alimentation adaptée et de l’eau en suffisance, et les jeunes pouvaient bénéficier des services de psychologues, de travailleurs sociaux et de médecins, ce qu’ils considéraient comme un appui utile.

115.Le Sous-Comité a été informé que l’établissement de Tocumen allait être fermé et que les mineurs allaient être transférés dans un nouvel établissement situé à Pacora, dont la construction n’avait pas encore commencé.

116.Le Sous-Comité a constaté que les conditions matérielles qui régnaient dans l’établissement de Tocumen étaient insatisfaisantes, surtout dans les cellules destinées aux nouveaux arrivants et les cellules de haute sécurité, qui ressemblaient à celles d’une prison. Les premières étaient mal aérées, envahies par les insectes et les mineurs y dormaient sur des matelas à même le sol, avec un accès limité à l’eau. Les six cellules de haute sécurité, quant à elles, étaient sombres, sales, nauséabondes et mal aérées. Il était difficile d’y avoir accès à des gardiens adultes.

117.D’après les informations reçues, les jeunes vont à l’école tous les jours et certains participent à des ateliers de formation. Les nouveaux arrivants et les mineurs placés dans des cellules de haute sécurité ont accès à l’enseignement.

118. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de mettre en place un système de justice pénale pour mineurs qui mette l’accent sur la réadaptation intégrale des jeunes et de diminuer le nombre d’heures passées en cellule. Il lui recommande en particulier de renforcer les possibilités de poursuivre sa scolarité ou de participer à des programmes éducatifs dans les établissements pour mineurs, de mettre fin au placement en isolement dans des cellules de haute sécurité, y compris à des fins de « réflexion », de mettre en place un centre de transition pour les jeunes qui atteignent l’âge de la majorité et d’améliorer les conditions de vie dans le centre de Tocumen , en particulier dans les cellules destinées aux nouveaux arrivants et dans les cellules de haute sécurité.

119. Le Sous-Comité recommande également à l’État partie de mettre en place un système permettant aux plus jeunes et aux nouveaux arrivants de recevoir une éducation et de bénéficier de conditions propices à l’établissement de bonnes relations humaines. Dans les programmes de réinsertion, il convient de tenir tout particulièrement compte du fait que de nombreux jeunes ont grandi sans relations sûres, sans modèles auxquels s’identifier et sans compétences ou comportements d’adaptation à la vie en société.

C.Migrants

120.La détention administrative ne doit en aucun cas avoir un caractère punitif. Des mesures de substitution doivent être envisagées avant de décider de placer quiconque en détention. L’État doit prévoir dans sa législation un ensemble de mesures autres que la privation de liberté, en tenant dûment compte des normes internationales relatives aux droits de l’homme.

121. Le Sous-Comité rappelle que la rétention de migrants dans des centres d’accueil doit être une mesure exceptionnelle, nécessaire, raisonnable et proportionnée au cas de l’espèce, que sa durée doit être aussi courte que possible et qu’elle doit tendre vers un objectif légitime. En outre, les migrants doivent bénéficier de toutes les garanties d’une procédure régulière pour pouvoir défendre leurs droits.

122.Le Sous-Comité constate avec préoccupation que certains des migrants détenus dans des centres d’hébergement relevant du Service national des migrations, n’ont pas le droit d’informer la personne de leur choix de leur placement en détention, de passer un appel téléphonique ou de recevoir des visites et qu’il leur est interdit de garder leur téléphone portable ou, à défaut, d’y avoir accès pendant leur période de privation de liberté. Ceux qui ne parlaient pas espagnol n’étaient pas informés de leur situation juridique dans une langue qu’ils comprenaient, et ont indiqué qu’ils avaient dû signer des documents rédigés en espagnol sans en comprendre la teneur.

123.Dans le centre d’hébergement pour hommes de la ville de Panamá (centre de Curundú), les installations sont dans un état pitoyable et les sanitaires sont défectueux. À cause de ces conditions, aggravées par une invasion de parasites, de nombreux migrants ont des éruptions cutanées et des mycoses sur diverses parties du corps. Ils doivent manger dans des conditions d’hygiène déplorables, sur leur lit ou à même le sol, où prolifèrent les cafards. Certains ont aussi indiqué qu’ils ne recevaient pas suffisamment de soins médicaux et qu’ils ne pouvaient sortir dans la cour que deux heures par semaine.

124.Dans le même centre, le Sous-Comité a relevé l’existence d’une cellule disciplinaire et l’absence de protocoles de traitement et d’enregistrement des incidents.

125. Le Sous-Comité rappelle que les États ont, au regard du droit international, l’obligation et le devoir de respecter, de protéger et de réaliser les droits de l’homme. Ces obligations et devoirs des États s’appliquent à toutes les personnes, sans considération de nationalité et de situation administrative.

126.Le Sous-Comité a été informé, tant par les migrants que par le personnel du centre d’hébergement pour hommes, que, lorsque des représentants de l’Office national de protection des réfugiés se rendaient au centre, ils n’allaient pas jusque dans la cellule où étaient détenus les migrants, les renseignements sur les personnes qui avaient manifesté leur intention de demander l’asile leur étant donné par le personnel du centre.

127. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le personnel de l’Office national de protection des réfugiés se rende dans la cellule où sont détenus les migrants afin de recevoir directement les demandes d’asile éventuelles et d’éliminer tout risque de subjectivité de la part du personnel du centre lors de la communication des renseignements nécessaires.

D.Lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués

128.Le Sous-Comité a été informé que des actes de discrimination étaient commis contre des homosexuels dans le centre de détention La Joyita, tant par les autorités que par les représentants religieux. Il lui a également été signalé que, dans le centre de détention La Joya, les homosexuels étaient séparés des autres détenus et placés dans un couloir distinct dont la porte restait fermée de façon à garantir leur sécurité et à éviter la propagation de maladies.

129. Le Sous-Comité rappelle que l’isolement, la mise au secret et la ségrégation administrative ne sont pas des moyens acceptables d’assurer la sécurité des personnes, et que ces mesures ne peuvent être justifiées que si elles s’appliquent en dernier recours, à titre exceptionnel, pour une durée aussi brève que possible et dans le respect des garanties juridiques fondamentales.

130.En ce qui concerne les soins médicaux fournis aux lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués privés de liberté, les nombreuses personnes séropositives reçoivent un traitement antirétroviral, mais il leur est extrêmement difficile de consulter le médecin du centre. Alors que ces personnes ont besoin d’un suivi médical rigoureux lorsqu’elles sont en contact avec des maladies courantes, compte tenu du risque d’évolution fulgurante de ces maladies, elles n’ont visiblement pas accès à un infectiologue.

131. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués privés de liberté reçoivent les même s soins de santé que ceux qui sont en liberté.

132. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que le personnel pénitentiaire, les agents des forces de l’ordre, les magistrats et les autres représentants de l’État suivent une formation aux droits de l’homme pour qu’ils prennent davantage conscience des normes internationales relatives aux droits de l’homme et des principes de l’égalité et de la non-discrimination, y compris au motif de l’orientation sexuelle et de l’identité de genre.

VII.Répercussions de la visite

133.Conformément à l’article 15 du Protocole facultatif et à sa propre politique concernant les représailles en lien avec son mandat d’inspection, le Sous-Comité prie instamment les autorités compétentes de l’État partie de veiller à ce qu’il n’y ait pas de représailles après sa visite. Il demande à l’État partie de faire figurer dans sa réponse des informations détaillées sur les mesures qu’il aura prises pour empêcher que les personnes qu’il a rencontrées, avec lesquelles il s’est entretenu ou qui lui ont donné des renseignements durant sa visite soient victimes de représailles.

VIII.Conclusion

134. Le Sous-Comité espère que sa visite et le présent rapport marqueront le début d’un dialogue constructif avec l’État partie, qui permettra à celui-ci d’honorer ses obligations découlant du Protocole facultatif, le but étant d’atteindre l’objectif commun de prévention de la torture et des mauvais traitements.

135. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de rendre public le présent rapport, considérant que cette action constitue en soi une mesure de prévention. Il lui recommande en outre de le faire distribuer à tous les départements et établissements publics concernés.

Annexes

Annexe I

[Espagnol seulement]

Lista de las personas con quienes se reunió el Subcomité

A.Autoridades

Ministerio de Relaciones Exteriores

•Sra. Isabel de Saint Malo de Alvarado, Vicepresidenta de la República y Ministra de Relaciones Exteriores

•Sra. María Luisa Navarro, Viceministra de Asunto Multilaterales y Cooperación

•Sr. Luis Miguel Hincapié, Viceministro de Relaciones Exteriores

•Licenciado Max José López, Director de Organismos y Conferencias Internacionales

Ministerio de Gobierno

•Sra. María Luisa Romero, Ministra de Gobierno

•Sr. Etéreo Armando Medina, Director General del Sistema Penitenciario

•Sra. Yaribeth de Calvo, Oficina Nacional para la Atención de Refugiados

Sra. Emma Alba de Tejada, Directora del Instituto Estudios Interdisciplinario

Ministerio de Seguridad

•Sr. Alexis Bethancourt Yau, Ministro de Seguridad

•Sr. Omar A. Pinzón, Director de la Policía Nacional

•Sr. Raúl Mora, Director Encargado del Servicio Nacional de Migración

•Sr. Feliciano Benítez, Inspector General, designado por el Director General del Servicio Nacional de Fronteras

Ministerio de Economía y Finanzas

•Sr. Dulcidio de la Guardia, Ministro de Economía y Finanzas

Ministerio de Desarrollo Social

•Sr. Alcibíades Vásquez Velásquez, Ministro de Desarrollo Social

Ministerio de Salud

•Dr. Eric Ulloa, Ministro Encargado de Salud

•Dra. Felicia Ulloa Tulloch, Subdirectora General de Salud de la Población Penitenciaria

Instituto Nacional de la Mujer

•Licda. Jaqueline Candanedo, Secretaria General

Defensoría del Pueblo

•Sr. Alfredo Castillero Hoyos, Defensor del Pueblo

•Licda. Ellis Denia Ríos, Coordinadora de la Oficina de personas privadas de libertad

•Sr. Félix Chamorro, Secretario Administrativo

•Integrantes del Comité de Selección del mecanismo nacional de prevención

•Integrantes del Comité para la Reglamentación de la Ley núm. 6

Corte Suprema de Justicia

•Sr. José Ayú Prado, Presidente

Asamblea Nacional

•Sr. Carlos Santana, Presidente de la Comisión de Gobierno, Justicia y Asuntos Constitucionales de la Asamblea Nacional

•Sra. Ana Matilde Gómez Ruiloba, Diputada de la Comisión de Gobierno, Justicia y Asuntos Constitucionales de la Asamblea Nacional

•Representantes del Ministerio de Relaciones Exteriores

•Representante del Ministerio de Gobierno

•Representantes del Ministerio de Seguridad

•Representantes del Ministerio de la Presidencia

•Representantes del Ministerio de Economía y Finanza

•Representantes de la Defensoría del Pueblo

•Representantes del Órgano Judicial

•Representantes de Colegio Médico

•Representantes del Órgano Legislativo

B.Organismos internacionales

•Coordinador Residente de las Naciones Unidas en Panamá

•Oficina del Alto Comisionado para los Derechos Humanos (ACNUDH), Oficina Regional para América Central

•Programa de las Naciones Unidas para el Desarrollo (PNUD)

•Fondo de las Naciones Unidas para la Infancia (UNICEF)

•Oficina del Alto Comisionado de las Naciones Unidas para los Refugiados (ACNUR), Oficina Regional para América Central, Cuba y México

•Organización Internacional para las Migraciones (OIM)

•Organización de las Naciones Unidas para la Alimentación y la Agricultura (FAO), Oficina Subregional para Mesoamérica

•Oficina de las Naciones Unidas contra la Droga y el Delito (UNODC), Oficina Regional para Centroamérica y el Caribe

C.Organizaciones de la sociedad civil

•Alianza Ciudadana Pro Justicia

•Asociación para la Prevención de la Tortura

•Comisión de Justicia y Paz

•Espacio de Encuentro y Reflexión de Activistas LGBTI (EDERA Panamá)

•Mesa de Análisis de Leyes y Políticas Públicas de Discapacidad

•Instituto de Criminología – Universidad de Panamá

•Pastoral Penitenciaria Católica

•Tara Pinirpa Panamá

•Voces de Mujeres Afrodescendientes Panamá

Annexe II

Lugares de privación de libertad visitados

A.Establecimientos bajo la responsabilidad del Ministerio de Gobierno

Centros penitenciarios

Centro Penitenciario La Joya

Centro Penitenciario La Joyita

Centro Penitenciario Nueva Esperanza de Colón

Centro Penitenciario Femenino de Colón (parte del Complejo Penitenciario Nueva Esperanza de Colón)

Centro para menores en conflicto con la ley

Centro de Custodia de Menores de Tocumen (Arco Iris)

Centro de Cumplimiento de Menores de Pacora

B.Establecimientos bajo la responsabilidad del Ministerio de Seguridad

Lugares de detención bajo la responsabilidad de la Policía

Subestación de policía de Chorrillo

Subestación de policía de Caledonia

Dirección de Investigación Judicial

Centros de retención de migrantes

Albergue masculino de migración Altos de Curundú

Albergue femenino de migración

C.Establecimientos bajo la responsabilidad del Ministerio de Salud

Instituto de Salud Mental de Panamá

D.Otros

Hogar Bolívar para adultos mayores