Observations finales concernant le neuvième rapport périodique du Guyana *

* Adoptées par le Comité à sa soixante treizième session (1 er - 19 juillet 2019).

Le Comité a examiné le neuvième rapport périodique du Guyana (CEDAW/C/GUY/9) à ses 1706e et 1707e séances (voir CEDAW/C/SR.1706 et CEDAW/C/SR.1707), tenues le 12 juillet 2019. La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/GUY/Q/9 et les réponses du Guyana dans le document CEDAW/C/GUY/Q/9/Add.1.

A. Introduction

Le Comité sait gré à l’État partie d’avoir présenté son neuvième rapport périodique. Il le remercie également de la suite donnée aux observations finales précédentes du Comité (CEDAW/C/GUY/CO/7-8/Add.1) et des réponses écrites qu’il a fournies à la liste de points et de questions, ainsi que de la présentation orale faite par la délégation et des éclaircissements apportés en réponse aux questions posées oralement par le Comité pendant le dialogue.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation de haut niveau dirigée par la Ministre de la protection sociale du Guyana, Amna Ally, et comprenant également des représentants du Ministère de la protection sociale, du Ministère de la santé publique, de la Commission nationale du Guyana pour l’UNESCO, ainsi que de la Mission permanente du Guyana auprès de l’Office des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B. Aspects positifs

Le Comité salue les progrès accomplis depuis son examen en 2012 du septième-huitième rapport périodique de l’État partie en termes de réformes législatives engagées, en particulier l’adoption, en juin 2014, de la loi (révisée) sur les (biens appartenant à des) personnes mariées qui reconnaît les unions de fait et prévoit la division des biens entre les membres de ces unions, de la même manière qu’entre les personnes mariées.

Le Comité salue les efforts de l’État partie visant à améliorer son cadre institutionnel et d’action afin d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité femmes-hommes, grâce à l’adoption ou à la création des plans et politiques suivants :

a)La politique d’égalité femmes-hommes et d’inclusion sociale, en octobre 2018 ;

b)Le plan stratégique en faveur des femmes et de l’égalité femmes-hommes, et les mesures de lutte contre l’insuffisance des résultats scolaires des garçons, en janvier 2018 ;

c)Le plan national pour l’application des lois sur les infractions sexuelles et la violence domestique, couvrant la période de 2014 à 2014, en octobre 2016 ;

d)L’équipe spéciale nationale pour la prévention de la violence sexuelle, en août 2014 ;

e)Le plan stratégique quinquennal de la Commission pour les femmes et l’égalité de genre, couvrant la période de 2013 à 2013, en avril 2013.

Le Comité note avec satisfaction que, pendant la période ayant suivi l’examen du rapport précédent, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants :

a)Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2014;

b)Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (no 189) de l’Organisation internationale du travail, en 2013 ;

c)Traité sur le commerce des armes, en 2013.

C. Objectifs de développement durable

Le Comité se félicite de l ’ appui international que reçoivent les objectifs de développement durable et invite l ’ État partie à instaurer une égalité femmes-hommes de droit et de fait, conformément aux dispositions de la Convention, dans le cadre de la mise en œuvre du programme de développement durable à l ’ horizon 2030. Le Comité rappelle l ’ importance de l ’ objectif 5 et de la prise en compte des principes de l ’ égalité et de la non-discrimination dans les 17 objectifs de développement durable. Il encourage vivement l ’ État partie à considérer les femmes comme le moteur de son développement durable et à adopter des politiques et des stratégies en conséquence.

D. Parlement

Le Comité souligne le rôle déterminant que joue le pouvoir législatif s ’ agissant d ’ assurer la mise en œuvre intégrale de la Convention (voir A/65/38 , Deuxième partie, annexe VI). Il invite le Parlement à prendre, conformément à son mandat, les mesures nécessaires concernant la mise en œuvre des présentes observations finales d ’ ici à la présentation de son prochain rapport périodique au titre de la Convention.

D. Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Visibilité de la Convention et recommandations générales du Comité

Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour diffuser ses observations finales précédentes auprès des parlementaires, des ministères, du système judiciaire et des organisations féminines. Toutefois, il reste préoccupé par la participation limitée des organisations de la société civile au dialogue entre le Comité et l’État partie, qui montre que les femmes elles-mêmes ne sont pas suffisamment informées des droits qui leur sont reconnus dans la Convention et ne reçoivent pas les informations nécessaires sur les procédures juridictionnelles permettant de revendiquer ces droits.

Conformément à sa recommandation générale n° 28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention, le Comité recommande à l ’ État partie de traduire la Convention en macushi et en wapishana, et de mieux informer les femmes, les organisations de la société civile et les chefs religieux et communautaires sur la Convention, les recommandations générales du Comité et les droits des femmes en vertu du droit international et de la législation interne, y compris par des enregistrements audio, des émissions radiophoniques et dans l ’ arrière-pays ( CEDAW/C/GUY/CO/7-8 , par. 9).

Statut juridique de la Convention et harmonisation des lois

Le Comité est préoccupé par le fait que les dispositions des articles 154 A 1) et 6) de la Constitution limitent le champ d’action des obligations acceptées par ce dernier lors de la ratification de la Convention, et que près de 40 ans après cette ratification, l’État partie n’a toujours pas entièrement incorporé les dispositions de la Convention dans sa législation nationale.

Le Comité rappelle sa précédente recommandation (ibid., par. 11) et recommande à l ’ État partie :

a) De faire l ’ inventaire de toutes les dispositions juridiques discriminatoires à l ’ égard des femmes ;

b) De placer au rang de ses priorités l ’ intégration pleine et entière de la Convention dans son système juridique, afin de conférer à celle-ci un rôle central en tant que cadre de référence pour l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et pour instaurer l ’ égalité de fait entre les femmes et les hommes.

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité note que les articles 149 et 149F de la Constitution de l’État partie interdisent la discrimination fondée sur le genre, et que des efforts ont été entrepris pour commencer à examiner la loi de 1997 sur la prévention de la discrimination afin d’interdire la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre dans l’emploi. Toutefois, il reste préoccupé par le fait que la définition de la discrimination dans la Constitution, dans la loi sur la prévention de la discrimination (1997) et dans la loi sur l’égalité des droits (1990) n’est pas conforme aux articles 1 et 2 de la Convention.

Le Comité renouvelle ses précédentes recommandations (ibid., par. 13) invitant l ’ État partie à accélérer l ’ adoption d ’ une définition explicite de la discrimination à l ’ égard des femmes, qui englobe la discrimination directe et indirecte, ainsi que les formes de discrimination croisées, dans la sphère publique comme dans la sphère privée, conformément aux articles 1 et 2 de la Convention, et la recommandation générale n o 28 (2010) concernant les obligations fondamentales des États parties découlant de l ’ article 2 de la Convention et de la cible 5.1 des objectifs de développement durable visant à mettre fin, partout dans le monde, à toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes et des filles.

Accès à la justice

Le Comité se félicite de l’augmentation récente de la représentation des femmes au sein de la magistrature, de la création de tribunaux dans les 10 régions de l’État partie et de l’appui apporté au fonctionnement de centres d’aide juridictionnelle dans 4 régions. Cependant, il constate avec préoccupation que les femmes continuent de rencontrer des difficultés pour revendiquer leurs droits, pour les raisons suivantes :

a)L’absence de centres d’aide juridictionnelle dans les régions 1, 3, 7 et 9, et les longues distances qu’il faut parcourir pour se rendre dans les tribunaux dans l’arrière-pays ;

b)L’engorgement des tribunaux ;

c)Le manque de connaissance des lois et des procédures, et les moyens insuffisants dont disposent notamment les femmes à faibles revenus, les femmes rurales et les femmes autochtones pour introduire des actions en justice, et le manque de confiance dans le système judiciaire ;

d)Le manque d’informations concernant les affaires pour lesquelles la Convention a été invoquée devant les tribunaux nationaux.

Conformément à sa recommandation générale n° 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer des ressources adéquates à la création de centres d ’ aide juridictionnelle dans les régions 1, 3, 7 et 9, de veiller à ce que tous les centres fonctionnent efficacement et de créer des audiences foraines dans l ’ arrière-pays ;

b) D ’ encourager les femmes à saisir les autorités compétentes en cas de violation de leurs droits, en les informant mieux, y compris dans les langues locales, sur les droits que la Convention et la législation nationale leur reconnaissent, ainsi que sur les recours en justice disponibles et l ’ aide dont elles peuvent bénéficier pour lancer des procédures juridiques;

c) De veiller à ce que la Convention et les recommandations générales du Comité soient bien intégrées dans la formation obligatoire des juristes, des avocats, des procureurs et des policiers, afin d ’ instaurer dans le pays, sur des bases solides, une culture juridique propice à l ’ égalité femmes-hommes et à la non-discrimination , conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel de l ’ État partie en janvier 2015 ( A/HRC/29/16 , par. 130.16).

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité note avec préoccupation :

a)Les ressources humaines, techniques et financières limitées qui sont allouées au Bureau chargé des questions de genre et les compétences limitées de son personnel concernant la problématique femmes-hommes, ce qui nuit à sa capacité de coordonner efficacement l’action en faveur de l’égalité entre les femmes et les hommes, d’intégrer la problématique femmes-hommes dans toutes les politiques publiques et de faire en sorte que la budgétisation tienne compte de cette problématique ;

b)Le manque d’indicateurs et de données ventilées par sexe, qui sont nécessaires pour évaluer efficacement les effets des politiques et des programmes visant à assurer aux femmes la jouissance de leurs droits humains sur un pied d’égalité avec les hommes

Rappelant les orientations générales données dans le Programme d ’ action de Beijing au sujet des conditions nécessaires pour assurer le bon fonctionnement des mécanismes nationaux, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ augmenter les ressources humaines, techniques et financières affectées au Bureau chargé des questions de genre et de renforcer les compétences de son personnel concernant la problématique femmes-hommes pour lui permettre de coordonner l ’ action en faveur de l ’ égalité entre les femmes et les hommes, de prendre en compte l ’ égalité des genres dans toutes les politiques publiques et de mettre en place une budgétisation tenant compte de la problématique femmes-hommes, conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel (ibid., par. 130.9) ;

b) De définir des indicateurs pour tous les objectifs en matière d ’ égalité des genres, y compris ceux de la politique d ’ égalité femmes-hommes et d ’ inclusion sociale et de son plan d ’ action, de renforcer les capacités du Bureau de statistique pour qu ’ il puisse collecter de manière systématique des données ventilées par sexe, âge, handicap, appartenance ethnique, région et situation socioéconomique afin d ’ évaluer les progrès réalisés dans la réalisation de ces objectifs, et de fournir une évaluation des progrès réalisés dans son prochain rapport périodique.

Institution nationale de défense des droits de la personne

Le Comité se dit préoccupé par le fait que le poste de Président de la Commission des droits de la personne est toujours vacant et que cette institution ne fonctionne pas conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), malgré les engagements pris lors de l’examen périodique universel (ibid., par. 130.6).

Le Comité recommande à l ’ État partie de nommer, dans un délai bien spécifié, un président de la Commission des droits de la personne, de prendre toutes les mesures nécessaires pour que cette institution fonctionne conformément aux Principes de Paris et de la doter de ressources humaines, financières et techniques suffisantes pour qu ’ elle puisse s ’ acquitter efficacement de son mandat, en particulier pour la promotion des droits des femmes et de l ’ égalité des genres. Il recommande également à l ’ État partie d ’ encourager la Commission, une fois qu ’ elle sera opérationnelle, à demander son accréditation auprès de l ’ Alliance globale des institutions nationales des droits de l ’ homme.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité reste préoccupé par l’utilisation limitée et la méconnaissance par l’État partie des mesures temporaires spéciales pour amorcer les changements structurels, sociaux et culturels nécessaires afin de corriger les formes et les effets passés et présents de la discrimination verticale, horizontale, directe et indirecte à l’égard des femmes et des filles. Il rappelle à l’État partie que ces mesures doivent être assorties de délais et distinctes d’initiatives plus permanentes adoptées pour améliorer la situation des femmes et des filles.

Conformément à l ’ article 4, paragraphe 1 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 (2004) du Comité relative aux mesures temporaires spéciales, le Comité rappelle ses précédentes observations finales ( CEDAW/C/GUY/CO/7-8 , par. 19) et recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures temporaires spéciales, par exemple en augmentant les quotas et en fixant des critères fondés sur des objectifs assortis de délais, afin d ’ accélérer l ’ instauration d ’ une véritable égalité entre hommes et femmes, et plus particulièrement les femmes autochtones, les femmes handicapées et les femmes touchées par les changements climatiques, dans tous les domaines visés par la Convention dans lesquels les femmes sont sous-représentées et désavantagées.

Stéréotypes et pratiques préjudiciables

Le Comité se félicite des initiatives de sensibilisation aux questions d’égalité des genres lancées par le Bureau chargé des questions de genre, y compris dans l’arrière-pays. Il note cependant avec préoccupation :

a)La persistance des stéréotypes sexistes et fondés sur le genre, et des inégalités sociales entre femmes et hommes, ainsi que des structures de pouvoir patriarcales dans l’État partie, qui sont perpétuées par les médias et la publicité ;

b)Le fait que la répartition inégale des responsabilités familiales et domestiques entre les femmes et les hommes fait peser sur les femmes une charge disproportionnée, en particulier sur les mères célibataires ;

c)Le fait que 27 pour cent des femmes de l’État partie se marient avant l’âge de 18 ans, que ces mariages sont légaux avec une autorisation judiciaire et que les mariages d’enfants et/ou forcés restent très répandus.

Le Comité rappelle ses précédentes observations finales (ibid., par. 39), ainsi que la cible 5.3 des objectifs de développement durable, demandant l ’ élimination de toutes les pratiques préjudiciables, telles que les mariages d ’ enfants, précoces ou forcés, ainsi que les mutilations génitales féminines et, conformément à la Recommandation générale/observation générale conjointe n° 31 du Comité pour l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et n° 18 du Comité des droits de l ’ enfant (2014) sur les pratiques préjudiciables, il recommande à l ’ État partie :

a) D ’ adopter, dès que possible, la politique de communication qu ’ il propose et de renforcer la sensibilisation afin d ’ éliminer les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et la société, en ciblant de manière spécifique les communautés urbaines et les communautés rurales ;

b) De promouvoir le partage équitable des responsabilités familiales et domestiques entre hommes et femmes, notamment en instaurant un congé de paternité ou un congé parental partagé après l ’ accouchement et en offrant un plus grand nombre de structures de garde d ’ enfants accessibles et abordables, conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel ( A/HRC/29/16 , par. 130.18), et de garantir aux mères célibataires l ’ accès aux services d ’ assistance, notamment en supprimant de la définition légale de « mère célibataire » l ’ obligation d ’ avoir un nombre minimum d ’ enfants ;

c) De fixer l ’ âge de mariage minimum légal à 18 ans pour les filles et les garçons [ CEDAW/C/GUY/CO/7-8 , par. 39 a) ] , de mener des campagnes de sensibilisation de grande ampleur afin de dénoncer les attitudes culturelles qui légitiment le mariage d ’ enfants, en collaboration avec l ’ Agence de garde d ’ enfants et de protection, la police et les communautés, et de veiller à ce que tous les mariages soient enregistrés, notamment en facilitant l ’ accès aux services d ’ enregistrement dans toutes les régions.

Violence fondée sur le genre à l’égard des femmes

Le Comité se félicite de la création de tribunaux pour les infractions sexuelles à Demerara et à Berbice, et d’une unité chargée de la politique concernant les infractions sexuelles et la violence domestique au sein du Ministère de la protection sociale, ainsi que de l’adoption de directives concernant les infractions sexuelles, fondées sur les meilleures pratiques internationales. Cependant, il est préoccupé par l’augmentation du nombre de cas de violence fondée sur le genre, plus particulièrement dans la région 4, où une guyanienne sur trois est victime de cette violence. En outre, il est préoccupé par :

a)La coordination limitée entre le Comité national de surveillance de la violence domestique, l’Équipe spéciale nationale de prévention de la violence fondée sur le genre, l’Unité chargée de la politique concernant les infractions sexuelles et la violence domestiques et le Bureau chargé des questions de genre ;

b)La sous-déclaration de la violence fondée sur le genre à l’égard des femmes, plus particulièrement dans l’arrière-pays, à cause des longues distances qu’il faut parcourir pour se rendre dans les tribunaux, de la stigmatisation et de la méconnaissance de cette violence, des lois et des procédures applicables, par les femmes, les autorités communales, les agents de la force publique, le personnel médical et les travailleurs sociaux ;

c)Le nombre important de poursuites intentées en vertu de la loi sur les infractions sexuelles (2010), qui sont en suspens en raison du retard pris dans l’approbation des modifications apportées à cette loi, et le faible taux de violences fondées sur le genre qui font l’objet de poursuites ;

d)Le peu de soutien dont bénéficient les victimes d’actes de violence fondée sur le genre, et plus particulièrement dans l’arrière-pays, notamment l’insuffisance des hébergements longue durée et des mesures de réadaptation et de réinsertion.

Conformément à sa recommandation générale n° 35 (2017) sur la violence fondée sur le genre à l ’ égard des femmes, portant actualisation de la recommandation générale n° 19, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ augmenter les ressources humaines, techniques et financières allouées au Comité national de surveillance de la violence domestique et à l ’ Équipe spéciale nationale de prévention de la violence fondée sur le genre afin qu ’ ils coordonnent efficacement l ’ application de la loi sur la violence domestique (1996) et de la loi sur les infractions sexuelles (2010), en collaboration avec l ’ Unité chargée de la politique concernant les infractions sexuelles et la violence domestiques et le Bureau chargé des questions de genre ;

b) De faire mieux connaître les dispositions de la loi sur la violence domestique (1996) et de la loi sur les infractions sexuelles (2010), d ’ accélérer l ’ adoption de projets de protocoles sur la violence fondée sur le genre avec les autorités communales, les procureurs, le personnel médical, les travailleurs sociaux et la police, et de mettre en place une formation obligatoire sur leur application[ibid., par. 23 b)] ;

c) D ’ accélérer l ’ approbation des modifications de la loi sur les infractions sexuelles et de créer des sections et/ou des créneaux horaires consacrés au traitement des infractions sexuelles dans les tribunaux de l ’ arrière-pays, y compris les audiences foraines, et d ’ accélérer la création prévue d ’ un tribunal chargé des infractions sexuelles à Essequibo ;

d) D ’ accélérer la mise en œuvre d ’ un ensemble de services essentiels pour les victimes de violence fondée sur le genre, d ’ ouvrir des refuges et des centres d ’ accueil d ’ urgence pour ces victimes dans toutes les régions de l ’ État partie, d ’ affecter des ressources suffisantes à leur bon fonctionnement et de renforcer la fourniture de logements et de services de réadaptation et de réinsertion aux victimes, plus particulièrement dans l ’ arrière-pays.

Traite et exploitation de la prostitution

Le Comité se félicite du lancement d’un plan national d’action pour la prévention et la lutte contre la traite des personnes pour la période de 2019 à 2020, ainsi que de l’ouverture d’un centre d’accueil à Georgetown et de deux installations de transit pour les victimes de traite à l’extérieur de Georgetown. Toutefois, il est préoccupé par le fait que les filles et les femmes guyaniennes, en particulier celles de l’arrière-pays et des communautés vulnérables, continuent de faire l’objet de traite sur le territoire de l’État partie et à l’étranger, et que l’État partie continue d’être un pays de départ et d’arrivée pour la traite des femmes et des filles, en particulier celles en provenance du Brésil, d’Haïti, de la République dominicaine, du Surinam et de la République bolivarienne du Venezuela, aux fins d’exploitation sexuelle et par le travail. Il note cependant avec préoccupation :

a)Le manque de données ventilées sur la traite des femmes et des filles en provenance et à destination de l’État partie aux fins d’exploitation sexuelle et par le travail ;

b)Le manque de renforcement systématique et obligatoire des compétences des forces de l’ordre, de la police des frontières et des travailleurs sociaux relatives aux directives applicables aux entretiens avec les victimes et tenant compte des questions de genre, ainsi qu’au recensement rapide et à l’orientation des victimes de la traite vers les services appropriés;

c)Le fait que les victimes et les rescapées de la traite des personnes sont accueillies dans les mêmes refuges que les victimes de violence domestique, et que la fourniture de services de soutien, de réadaptation et de réinsertion est fortement tributaire des organisations de la société civile ;

d)Le fait que les victimes et les rescapées de la traite des personnes ne connaissent pas suffisamment les services de soutien disponibles, en particulier dans l’arrière-pays ;

e)Les informations faisant état de cas de corruption et de complicités de fonctionnaires dans des affaires de traite qui continuent d’entraver les efforts de prévention et de lutte contre cette pratique.

Attirant l ’ attention sur la cible 5.2 des objectifs de développement durable, qui consiste à éliminer de la vie publique et de la vie privée toutes les formes de violence fondée sur le genre à l ’ égard des femmes et des filles, y compris la traite et l ’ exploitation sexuelle et d ’ autres types d ’ exploitation, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De collecter de manière systématique des données ventilées par sexe, âge, handicap, appartenance ethnique, région et situation socioéconomique, à la fois sur la traite des personnes et sur l ’ exploitation de la prostitution, sur le nombre de cas répertoriés grâce à des inspections du travail, sur le nombre de poursuites, de condamnations et les peines infligées aux auteurs, ainsi que sur les indemnisations accordées aux victimes, et de fournir ces données dans son prochain rapport périodique ;

b) De renforcer les capacités de l ’ appareil judiciaire, des forces de l ’ ordre, de la police des frontières et des travailleurs sociaux sur les protocoles expliquant comment traiter les victimes de traite en tenant compte des questions de genre, ainsi que sur les procédures permettant d ’ identifier rapidement ces victimes et de les orienter vers les services appropriés ;

c) D ’ améliorer les services de soutien, de réadaptation et de réinsertion destinés aux rescapées de la traite, notamment l ’ aide financière, la fourniture d ’ un logement convenable et des offres de formation, d ’ ouvrir des centres d ’ accueil spécialisés pour ces rescapées et de créer des unités spéciales consacrées au soutien des victimes dans les centres d ’ accueil existants ;

d) De mener des campagnes nationales d ’ éducation et de sensibilisation sur les risques et le caractère criminel de la traite, ainsi que sur les services de soutien disponibles, y compris dans les langues autochtones et sur la radio locale ;

e) D ’ enquêter sur les cas signalés de corruption et de complicités de fonctionnaires, et de veiller à ce que les peines infligées aux auteurs d ’ infractions liées à la traite soient à la mesure de la gravité des faits.

Le Comité se dit préoccupé par le nombre élevé de cas d’exploitation de la prostitution dans l’État partie, en particulier sur les sites miniers et dans les régions frontalières. Il est également préoccupé par le fait que les femmes qui se livrent à la prostitution sont gravement exposées au risque d’être victimes de mauvais traitements et de violence fondée sur le genre, notamment d’extorsions et de violences commises par les forces de police, ainsi que de discrimination, y compris de la part des professionnels de la santé et sur le lieu de travail.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les femmes et les filles victimes d ’ exploitation de la prostitution échappent aux poursuites pénales, d ’ examiner les causes profondes et la prévalence de l ’ exploitation de la prostitution des femmes et des filles à proximité des sites miniers et dans les régions frontalières, d ’ envoyer des forces de l ’ ordre, des professionnels de la santé et des travailleurs sociaux dans ces régions et de renforcer leurs capacités, notamment sur les droits de ces femmes aux soins de santé et aux services sociaux et juridiques ;

b) De renforcer les services de soutien aux femmes et aux filles qui souhaitent arrêter la prostitution, y compris en proposant des programmes de sortie et d ’ autres activités génératrices de revenus, et d ’ intensifier leurs efforts pour réduire la demande de prostitution.

Participation à la vie politique et publique et à la prise de décisions

Le Comité constate que l’égalité des genres est garantie par la Constitution et se félicite de voir que le gouvernement compte 40 pour cent de femmes. Il regrette cependant que l’État partie n’ait pas pris de mesures pour parvenir à une représentation égale des femmes et des hommes dans la vie politique et publique depuis ses dernières observations finales. En outre, il est préoccupé par :

a)Les quotas existants sur les listes électorales, qui ne garantissent pas une représentation de fait de 30 pour cent de femmes parmi les élus ;

b)La représentation limitée des femmes dans les postes ministériels (23,5 pour cent, la majorité des jeunes ministres étant des femmes) et au sein des administrations locales (30 pour cent), des conseils démocratiques régionaux (30 pour cent), des forces armées, de la police et à la tête des ambassades ;

c)Le manque d’informations sur les activités de sensibilisation menées pour répondre à la nécessité d’appliquer des mesures temporaires spéciales en faveur de l’exercice effectif de leurs droits par les femmes [ibid., par. 19 b)].

Le Comité rappelle ses précédentes observations finales (ibid., par. 27) et recommande à l ’ État partie d ’ accélérer la pleine participation des femmes à la vie publique et politique, conformément à l ’ article 7 de la Convention et à la recommandation générale n o 23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique :

a) En modifiant sa législation électorale, sur la représentation du peuple et sur les administrations locales en vue d ’ appliquer le principe de l ’ alternance hommes-femmes sur les listes électorales (système dit de « fermeture éclair ») et en introduisant des quotas obligatoires de femmes dans les assemblées législatives nationale et locales afin que la parité y soit respectée ;

b) En élargissant les programmes de formation sur les compétences en matière d ’ encadrement et d ’ organisation de campagnes politiques proposés par l ’ Institut pour le leadership des femmes du Guyana et le Bureau chargé des questions de genre aux candidates susceptibles d ’ être élues ou nommées à des postes de prise de décision, notamment dans l ’ arrière-pays ;

c) En renforçant la sensibilisation des hommes politiques, des médias, des chefs religieux et communautaires, ainsi que du grand public, sur la nécessité d ’ adopter des mesures temporaires spéciales en faveur d ’ une participation pleine et indépendante des femmes à la vie politique et publique, sur un pied d ’ égalité avec les hommes, afin de garantir l ’ application de la Convention, mais également la stabilité politique et le développement économique du pays.

Nationalité

Le Comité se félicite de la création de 200 bureaux d’enregistrement décentralisés dans tout le pays et des efforts déployés par l’État partie pour faciliter l’établissement de papiers d’identité pour les femmes et les filles vénézuéliennes d’origine guyanienne. Toutefois, il est préoccupé par le fait que les femmes de l’arrière-pays rencontrent encore des difficultés pour accéder aux services d’enregistrement des naissances et d’établissement de papiers d’identité pour elles-mêmes et pour leurs enfants. Il est également préoccupé par le fait que la forte demande en matière d’enregistrement et de certificats de nationalité, due à l’arrivée de femmes et de filles d’origine guyanienne en provenance du Venezuela, dépasse les capacités de l’Office de l’état civil, sachant que l’absence de pièces d’identité restreint l’exercice de leurs droits en tant que ressortissantes guyaniennes, les empêchent d’accéder aux services de base et risque d’entraîner leur apatridie.

Le Comité attire l ’ attention sur la cible 16.9 des objectifs de développement durable, qui vise à garantir à tous une identité juridique, notamment grâce à l ’ enregistrement des naissances, et lui recommande :

a) D ’ augmenter les ressources humaines, techniques et financières allouées aux services d ’ état-civil et d ’ établissement de papiers d ’ identité, notamment en augmentant le nombre et les capacités des brigades mobiles d ’ enregistrement des naissances dans l ’ arrière-pays et les zones frontalières ;

b) De prendre des mesures spécifiques pour faciliter l ’ accès aux services d ’ enregistrement des naissances et l ’ obtention de pièces d ’ identité pour les femmes d ’ origine guyanienne qui arrivent du. Venezuela ;

c) De ratifier la Convention de 1954 relative au statut des apatrides et la Convention de 1961 sur la réduction des cas d ’ apatridie.

Éducation

Le Comité se félicite des mesures qui ont été prises pour que tous les enfants soient scolarisés, ce qui a permis à l’État partie d’atteindre la parité des genres dans l’enseignement primaire et secondaire, et pour la mise en œuvre de la politique nationale de réintégration des mères adolescentes dans le système scolaire formel. Toutefois, le Comité est préoccupé par :

a)Le nombre élevé d’actes de harcèlement sexuel commis par des enseignants et des élèves dont sont victimes les filles dans les écoles ;

b)Le manque de structures de gardes d’enfants destinées à faciliter la réintégration des mères adolescentes dans le système éducatif formel ;

c) Les disparités de genre et ethniques dans l’enseignement technique et professionnel, dues à l’absence de centres de formation dans les régions 1, 7 et 9 ;

d)La persistance des disparités de genre dans le choix des filières dans l’enseignement supérieur, à cause du faible taux d’inscription des femmes et des filles dans des disciplines non traditionnelles comme les sciences, la technologie, l’ingénierie et les mathématiques ;

e)L’incapacité de l’État partie à interdire expressément les châtiments corporels quel que soit le contexte.

Rappelant sa recommandation générale n o 36 (2017) sur le droit des filles et des femmes à l ’ éducation, le Comité recommande à l ’ État partie de sensibiliser le public à l ’ importance de l ’ éducation des filles à tous les niveaux pour favoriser leur autonomisation, plus particulièrement dans l ’ arrière-pays. Le Comité recommande également à l ’ État partie :

a) D ’ appliquer une politique de tolérance zéro à l ’ égard des agressions et du harcèlement sexuels à l ’ école, de créer des mécanismes efficaces d ’ information et de responsabilisation afin d ’ enquêter sur les cas d ’ agression sexuelle et de harcèlement de filles pour faire en sorte que les auteurs de violence sexuelle ou de harcèlement des filles dans le milieu scolaire fassent l ’ objet de poursuites et de sanctions appropriées ;

b) D ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à la mise en œuvre de la politique nationale de réintégration des mères adolescentes dans le système scolaire formel et de mettre en place des services de soutien aux mères adolescentes et à leurs parents, notamment en augmentant le nombre de structures de garde d ’ enfants abordables situées à proximité des établissements scolaires, y compris dans les communautés rurales et de l ’ arrière-pays ;

c) De créer, financer de manière adéquate et promouvoir l ’ inscription des femmes dans des centres de formation professionnelle dans les régions 1, 7, 8 et 9, conformément à la cible 4.3 des objectifs de développement durable sur la nécessité de faire en sorte que toutes les femmes et tous les hommes aient accès dans des conditions d ’ égalité à un enseignement technique, professionnel ou supérieur, y compris universitaire, de qualité et d ’ un coût abordable ;

d) D ’ éliminer les obstacles structurels qui peuvent dissuader les femmes et les filles de s ’ inscrire dans des disciplines non traditionnelles comme les sciences, la technologie, l ’ ingénierie et les mathématiques, et de fournir des bourses d ’ étude afin d ’ encourager les femmes à étudier dans ces disciplines ;

e) D ’ interdire expressément les châtiments corporels quel que soit le contexte [ibid., par. 29 d)].

Emploi

Le Comité prend acte de l’augmentation de la participation des femmes au marché du travail, qui est passée de 35 pour cent en 2012 à 43,6 pour cent en 2017, et des consultations qui sont menées actuellement pour officialiser l’accès aux prestations sociales pour les femmes travaillant dans le secteur informel. Toutefois, il reste préoccupé par :

a)La sous-représentation des femmes, en particulier des femmes autochtones et des femmes handicapées, dans la population active ;

b)La forte proportion de femmes qui travaillent dans le secteur informel ou dont le travail n’est pas rémunéré, ce qui les empêche de bénéficier d’une couverture sociale et d’avoir accès au congé maternité, aux indemnités de chômage, aux pensions de retraite et aux autres prestations sociales ;

c)La ségrégation verticale et horizontale des emplois qui persiste, malgré le niveau d’études supérieures plus élevé des femmes ;

d)La persistance du harcèlement sexuel sur le lieu de travail, bien qu’il soit interdit par la loi sur la prévention de la discrimination (1997) ;

e)L’écart de rémunération important entre les genres.

Le Comité attire l ’ attention de l ’ État partie sur la cible 5.5 des objectifs de développement durable, à savoir veiller à ce que les femmes participent pleinement et effectivement aux fonctions de direction à tous les niveaux de décision, dans la vie politique, économique et publique, et y accèdent sur un pied d ’ égalité, et lui recommande :

a) De prendre des mesures ciblées, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément à l ’ article 4, paragraphe 1 de la Convention et à la recommandation générale n o 25 (2004) du Comité, afin d ’ améliorer l ’ accès des femmes, et en particulier des femmes autochtones et des femmes handicapées, au secteur de l ’ emploi formel ;

b) D ’ accélérer la création d ’ un cadre réglementaire pour le secteur informel, afin de s ’ assurer que les femmes qui travaillent dans ce secteur puissent prendre un congé maternité et bénéficier des indemnités de chômage, des pensions de retraite et des autres prestations sociales [ ibid., par. 31 b) ] ;

c) D ’ appliquer le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale, qui est inscrit dans le paragraphe 1 de l ’ article 223 de la Constitution, la loi sur la prévention de la discrimination (1997) et la loi sur l ’ égalité des droits (1990), dans le secteur public comme dans le secteur privé, y compris en appliquant et en veillant au respect du nouveau salaire minimum ;

d) De faire appliquer la section 8 de la loi sur la prévention de la discrimination portant sur l ’ interdiction du harcèlement sexuel ;

e) D ’ analyser les facteurs qui contribuent à l ’ écart de rémunération important entre les genres, dans le but de l ’ éliminer, et d ’ effectuer régulièrement des enquêtes sur les salaires et des inspections du travail.

Santé

Le Comité se félicite de l’approbation de la politique en matière de santé sexuelle et procréative, de la création de foyers d’hébergement pour futures parturientes, ainsi que des efforts déployés par l’État partie pour lutter contre la prévalence du VIH. Il prend également note de l’enquête qui a été lancée pour déterminer les causes profondes du suicide dans l’État partie. Toutefois, il reste préoccupé par :

a)L’absence d’une intégration systématique de cours obligatoires et adaptés à l’âge des élèves sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation dans les programmes scolaires à tous les niveaux du système éducatif ;

b)L’accès insuffisant à des services de planification familiale abordables, plus particulièrement dans l’arrière-pays, comme le montrent les taux élevés des besoins non satisfaits en matière de planification familiale et le fait que 15 pour cent des filles entre 15 et 19 ans ont déjà conçu un enfant ;

c)La hausse du nombre de cas de mortalité maternelle (229 pour 100 000 naissances vivantes) et le taux élevé de mortalité infantile (26 pour 1 000 naissances vivantes) ;

d)Les taux élevés de maladies mentales et de suicide parmi les femmes et les filles, et le manque d’informations sur la formation tenant compte des questions de genre qui est dispensée aux personnels de santé pour leur apprendre à gérer les troubles mentaux les plus courants ;

e)La stigmatisation des femmes vivant avec le VIH et la discrimination dont elles sont victimes, y compris de la part des personnels de santé.

Le Comité, conformément à sa recommandation générale n o 24 (1999) sur les femmes et la santé, recommande à l ’ État partie :

a) De rendre obligatoire l ’ intégration de cours complets et adaptés à l ’ âge des élèves sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation dans les programmes scolaires à tous les niveaux du système éducatif, pour les filles comme pour les garçons, y compris sur les comportements sexuels responsables, les méthodes modernes de contraception et la prévention des maladies sexuellement transmissibles, conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel ( A/HRC/29/16 , par. 130.68) ;

b) De déployer son programme de santé maternelle et infantile dans toutes les régions de l ’ arrière-pays et d ’ intégrer des cours sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, y compris sur les méthodes et les services de contraception, dans la formation initiale et continue des travailleurs sanitaires et sociaux ;

c) De réduire l ’ incidence de la mortalité maternelle, notamment en accélérant la multiplication des services gynécologiques et obstétriques dans tout l ’ État partie afin de veiller à ce que tous les accouchements soient assistés par du personnel de santé qualifié, conformément à la cible 3.1 (faire passer le taux mondial de mortalité maternelle au-dessous de 70 pour 100 000 naissances vivantes) et à la cible 3.7 (d ’ ici à 2030, assurer l ’ accès de tous à des services de soins de santé sexuelle et procréative, y compris à des fins de planification familiale, d ’ information et d ’ éducation, et veiller à la prise en compte de la santé procréative dans les stratégies et programmes nationaux) des objectifs de développement durable ;

d) De s ’ appuyer sur les résultats de l ’ enquête sur les causes profondes du suicide pour renforcer les mesures de lutte contre les maladies mentales des jeunes femmes et des filles dans l ’ État partie, et d ’ affecter des ressources adéquates pour fournir un soutien adapté aux femmes ayant subi des traumatismes physiques et psychologiques ;

e) De concevoir et de mener des campagnes de sensibilisation et de renforcement des capacités à l ’ intention des personnels de santé afin d ’ éliminer la discrimination dont sont victimes les femmes handicapées et celles vivant avec le VIH lors de la fourniture de soins de santé.

Problématique femmes-hommes, réduction des risques de catastropheet changements climatiques

Le Comité note l’intégration de l’égalité des genres qui est l’un des principes transversaux de la stratégie de développement d’un État vert de l’État partie : Vision 2040. Toutefois, il est préoccupé par le fait que la poursuite et le développement de l’extraction pétrolière et gazière dans l’État partie, et les émissions de gaz à effet de serre qu’elle produit, nuisent à ses obligations en matière d’autonomisation des femmes et d’égalité des genres, étant donné que la dégradation de l’environnement et les catastrophes naturelles potentielles qui en résultent affectent les femmes de manière disproportionnée, particulièrement celles qui vivent dans la pauvreté.

Conformément à sa recommandation générale n° 37 (2018) relative aux aspects liés au genre de la réduction des risques de catastrophe dans le contexte des changements climatiques, le Comité recommande à l ’ État partie d ’ examiner ses politiques relatives aux changements climatiques et énergétiques, et plus particulièrement ses politiques en matière d ’ extraction pétrolière et gazière, et d ’ élaborer une stratégie de réduction des risques de catastrophe qui prend en compte les incidences négatives des changements climatiques sur l ’ égalité des genres et sur la vie des femmes et de leurs familles, en particulier celles qui vivent dans les zones situées en dessous du niveau de la mer.

Femmes des zones rurales et défavorisées

Le Comité se félicite des programmes de coopération internationale menés par l’État partie. Cependant, il note avec préoccupation que les femmes rurales et autochtones sont victimes de formes multiples et croisées de discrimination fondée sur leur situation géographique, leur appartenance ethnique et leur genre. Toutefois, il est préoccupé par :

a)Le manque de consultation des femmes et des filles rurales et amérindiennes dans le cadre de l’élaboration et de l’adoption des politiques et de la législation qui influent sur leur vie ;

b)L’absence de reconnaissance des droits fonciers collectifs des communautés amérindiennes, ce qui touche les femmes et les filles de façon disproportionnée car elles dépendent de leurs terres ancestrales pour leurs moyens de subsistance ;

c)Le fait que les femmes et les filles rurales et amérindiennes sont touchées de façon disproportionnée par les changements climatiques, la production pétrolière et gazière, ainsi que la pollution de l’eau et la déforestation provoquées par les activités minières ;

d)Les filles rurales et autochtones ont un accès limité aux services de santé, en particulier en matière de santé sexuelle et procréative et de santé mentale, à l’éducation, à l’aide financière pour la prise en charge des frais d’examen, aux programmes d’émancipation économique, aux opportunités d’emploi, aux programmes de leadership des femmes et aux comptes et prêts bancaires dans l’arrière-pays.

Conformément à sa recommandation générale n o 34 (2016) sur les droits des femmes rurales, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les femmes rurales et amérindiennes soient consultées pour l ’ élaboration et la mise en œuvre des orientations et des mesures législatives, notamment par l ’ intermédiaire d ’ organisations qui les représentent, des conseils de district et municipaux, de la Commission pour les femmes et l ’ égalité de genre et de la Commission des peuples autochtones, conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel ( A/HRC/29/16 , par. 130.75) ;

b) De modifier la loi amérindienne (2006) et d ’ autres lois concernées, en utilisant une approche tenant compte des questions de genre, afin de faire en sorte que les droits des communautés amérindiennes sur leurs terres, leurs territoires et leurs ressources soient pleinement reconnus et protégés, conformément à la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ;

c) De modifier la partie IV de la loi sur la protection de l ’ environnement (1998) afin d ’ inclure une évaluation de la place réservée aux femmes dans toutes les études d ’ impact environnemental et de créer un mécanisme pour suivre la mise en œuvre de ces évaluations et veiller à ce que les femmes rurales et amérindiennes puissent pleinement contribuer au développement du pays dans le cadre de sa stratégie de développement d ’ un État vert : Vision 2040, donner leur consentement préalable, libre et éclairé avant le lancement de tout projet de développement, commercial, agroindustriel ou d ’ extraction minière ayant un impact sur leurs terres et ressources ancestrales, qu ’ il soit lancé par une entreprise nationale ou étrangère, puissent bénéficier d ’ accords adéquats de partage des avantages et avoir accès à d ’ autres moyens de subsistance, conformément à la Convention concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants de 1989 (n o 169) de l ’ Organisation mondiale du travail ;

d) De renforcer les mesures ciblées, en consultation avec les femmes et les filles rurales et amérindiennes, afin de veiller à ce qu ’ elles aient accès aux services et aux infrastructures de base, notamment les services de santé sexuelle et procréative, de santé mentale et autres services de santé, à l ’ éducation, y compris dans leurs propres langues, à un soutien financier pour la prise en charge des frais d ’ examen, aux programmes d ’ émancipation économique, aux opportunités d ’ emploi, aux programmes de leadership des femmes, notamment le programme d ’ entreprenariat et d ’ apprentissage des jeunes, aux comptes et prêts bancaires, et pour créer des opportunités d ’ emploi et génératrices de revenus dans l ’ arrière-pays.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour appliquer la Convention relative aux droits des personnes handicapées. Toutefois, il note avec préoccupation que les femmes et les femmes handicapées sont exposées à de multiples formes de discrimination, notamment dans les domaines de l’éducation, de l’emploi, de la santé, de l’accès à la justice et de la protection contre la violence fondée sur le genre.

Rappelant sa recommandation générale n o 18 (1991) sur les femmes handicapées, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De veiller à ce que les femmes et les filles handicapées soient prises en compte dans toutes les politiques et les programmes de protection des droits des femmes, et de prendre les mesures nécessaires pour promouvoir et protéger les droits des femmes et des filles handicapées, en consultation avec les organisations qui les représentent ;

b) De fournir des informations sur les femmes et les filles handicapées, et plus particulièrement dans les domaines de l ’ éducation, de l ’ emploi, de la santé, de l ’ accès à la justice et de la violence fondée sur le genre, dans son prochain rapport périodique.

Femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et personnes intersexuées

Le Comité note la création en cours d’outils de formation pour les travailleurs sanitaires sur la stigmatisation des femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et des personnes intersexuées, et sur la discrimination dont elles sont victimes. Toutefois, il se dit préoccupé par le fait que les femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et les personnes intersexuées sont victimes de discrimination dans la loi et dans la pratique dans l’État partie, ainsi que d’actes de violence physique et sexuelle, y compris du fait des forces de l’ordre. En outre, il est préoccupé par le retard qu’a pris l’adoption de la législation protégeant les femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et les personnes intersexuées contre la discrimination au travail et dans les centres de soins, les crimes de haine, la violence fondée sur le genre et les arrestations arbitraires par des agents de la force publique.

Le Comité rappelle ses précédentes observations finales [ CEDAW/C/GUY/CO/7-8 , par. 23 f)] et recommande à l ’ État partie d ’ adopter des mesures législatives et des orientations visant à protéger les femmes lesbiennes, bisexuelles, transgenres et les personnes intersexuées contre la discrimination, notamment celle exercée au travail, dans les centres de santé et par les agents de la force publique, et contre les crimes de haine, la violence fondée sur le genre et les arrestations arbitraires, à faire en sorte que les auteurs de ces actes fassent l ’ objet d ’ enquêtes, de poursuites et de sanctions appropriées, conformément aux engagements pris lors de l ’ examen périodique universel ( A/HRC/29/16 , par. 130.25 à 130.27), et à fournir aux victimes des lieux sûrs, des mesures de soutien et de réparation, notamment des indemnisations.

Femmes demandeuses d’asile

Le Comité se félicite de la fourniture de permis de résidence temporaires, de services de soins de santé et de formations aux femmes et aux filles vénézuéliennes qui demandent l’asile dans l’État partie, ainsi que de la création d’un comité regroupant plusieurs institutions chargé de coordonner la gestion par l’État partie de l’arrivée de ressortissants vénézuéliens sur son territoire. Il note cependant avec préoccupation :

a)L’absence de législation nationale sur les réfugiés, ce qui empêche les femmes et les filles ayant besoin d’une protection internationale d’obtenir le statut de réfugiée ;

b)Le retard pris dans la ratification de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967 ;

c)L’absence de statut juridique pour les femmes et les filles demandeuses d’asile, ce qui les empêche d’accéder au marché de l’emploi et aggrave leur vulnérabilité face à l’exploitation sexuelle et par le travail, et à la traite ;

d)Le fait qu’une part importante de la responsabilité de fournir des services de soutien aux femmes et aux filles demandeuses d’asile est laissée aux organisations des Nations Unies et aux organisations non gouvernementales ;

e)Les formes de discrimination croisées dont sont victimes les femmes vénézuéliennes qui demandent l’asile au Guyana.

Conformément à sa recommandation générale n o 32 relative aux aspects liés au genre des questions touchant les réfugiées, les demandeuses d ’ asile et la nationalité et l ’ apatridie des femmes, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De solliciter l ’ assistance technique des organismes des Nations Unies compétents pour l ’ élaboration d ’ une législation nationale tenant compte des questions de genre et de politiques sur les réfugiés et d ’ une procédure tenant compte des questions de genre pour déterminer le statut des réfugiés ;

b) De ratifier la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et son Protocole de 1967 ;

c) De garantir aux demandeuses d ’ asile un niveau de vie suffisant, y compris un accès adéquat à l ’ éducation, à l ’ emploi, aux soins de santé, aux services d ’ assainissement, à l ’ alimentation, à des vêtements et au logement, de créer des mécanismes de tri tenant compte des questions de genre pour une identification rapide des femmes et des filles victimes de traite parmi les demandeuses d ’ asile et leur orientation vers les services appropriés, et de mettre en place des mécanismes appropriés de suivi et de recours dans les centres d ’ accueil et d ’ hébergement ;

d) D ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières pour renforcer les services de soutien aux femmes et aux filles demandeuses d ’ asile ;

e) De combattre les formes croisées de discrimination dont sont victimes les femmes et les filles demandeuses d ’ asile grâce à des campagnes de sensibilisation, à l ’ ouverture d ’ enquêtes sur les plaintes pour discrimination et au traitement de ces plaintes.

Protocole facultatif à la Convention et modification du paragraphe 1 de l’Article 20 de la Convention

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif de la Convention et à accepter, dès que possible, la modification du paragraphe 1 de l ’ Article 20 de la Convention relatif à la durée des réunions du Comité.

Déclaration et programme d’action de Beijing

Le Comité invite l ’ État partie à s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing, et à évaluer de manière plus approfondie la réalisation des droits inscrits dans la Convention dans le contexte de l ’ Examen après 25 ans de la Déclaration et du Programme d ’ action afin de parvenir à une égalité réelle entre les femmes et les hommes.

Diffusion

Le Comité invite l ’ État partie à veiller à ce que les présentes observations finales soient diffusées rapidement, dans la langue officielle de l ’ État partie, auprès des institutions publiques compétentes à tous les niveaux (national, régional et local) et à ce qu ’ elles soient communiquées en particulier au Gouvernement, aux ministères, au Parlement et à la magistrature, afin qu ’ ils puissent y donner pleinement suite.

Assistance technique

Le Comité recommande à l ’ État partie de conjuguer la mise en œuvre de la Convention avec ses efforts de développement, et de mettre à profit l ’ assistance technique régionale ou internationale à cet effet.

Ratification des autres traités

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de la personne permettrait aux femmes de jouir de leurs droits fondamentaux dans tous les aspects de la vie. Par conséquent, le Comité encourage l ’ État partie à ratifier la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, à laquelle il n ’ est pas partie.

Suite à donner aux observations finales

Le Comité invite l ’ État partie à fournir dans un délai de deux ans des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour appliquer les recommandations contenues dans les paragraphes 10, 18 a), 24 c) et 42 ci-dessus.

Préparation du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son dixième rapport périodique, prévu pour juillet 2023, en veillant à ce qu ’ il soit remis dans les délais et porte sur l ’ ensemble de la période se terminant au moment de la présentation.

Le Comité demande à l ’ État partie de suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de la personne, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument ( HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).