Nations Unies

CERD/C/CMR/CO/19-21

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

26 septembre 2014

Original: français

Comité pour l’éliminati on de la discrimination raciale

Observations finales concernant les dix-neuvième à vingt et unième rapports périodiques du Cameroun, présentés en un seul document *

1.Le Comité a examiné les dix-neuvième, vingtième et vingt et unième rapports périodiques du Cameroun, présentés en un seul document (CERD/C/CMR/19-21), à ses 2305e et 2306e séances (CERD/C/SR.2305 et 2306), tenues les 18 et 19 août 2014. À sa 2316e séance, tenue le 26 août 2014, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation, en un seul document, des dix-neuvième, vingtième et vingt et unième rapports périodiques de l’État partie ainsi que de la soumission d’un document de base actualisé.

3.Le Comité remercie la délégation pour les informations orales fournies durant l’examen du rapport et souligne l’importance d’entretenir un dialogue constructif dans la mise en œuvre de la Convention.

B.Aspects positifs

4.Le Comité prend note des progrès institutionnels et juridiques accomplis par l’État partie depuis son dernier rapport et qui pourraient contribuer à la lutte contre la discrimination raciale, notamment:

a)La mise en place du Sénat suite aux élections du 14 avril 2013;

b)La signature, le 28 novembre 2011, du décret no 2011/389 d’application de la loi no 2005/006 du 27 juillet 2005 portant statut des réfugiés au Cameroun.

5.Le Comité se félicite par ailleurs de l’acceptation par le Cameroun de l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention. À cet égard, le Comité serait reconnaissant à l’État partie de bien vouloir confirmer que la procédure de ratification a été menée à terme en conformité avec les résolutions 47/111 et 61/148 de l’Assemblée générale.

C.Sujets de préoccupation et recommandations

Composition démographique de la population

6.Le Comité note que le rapport de l’État partie ne contient toujours pas de données statistiques récentes, fiables et détaillées sur la composition ethnique de la population vivant sur son territoire et notamment d’indicateurs économiques et sociaux ventilés par origine ethnique, et prenant plus particulièrement en considération les peuples autochtones, les groupes minoritaires et les immigrés, de façon à lui permettre de mieux évaluer leur jouissance des droits civils et politiques, ainsi que des droits économiques, sociaux et culturels dans l’État partie, tel que recommandé dans ses observations finales précédentes (CERD/C/CMR/CO/15-18, par. 11).

Conformément aux paragraphes  10 à 12 de ses directives révisées pour l’établissement du r apport périodique se rapportant spécifiquement à la Convention (CERD/C/2007/1), le Comité réitère sa recommandation à l’État partie de collecter et de publier des données statistiques fiables et complètes sur la composition de la population vivant sur son territoire, en particulier des indicateurs socioéconomiques ventilés par origine ethnique et par sexe, notamment sur les groupes minoritaires et les peuples autochtones ainsi que les immigrés, à partir d’enquêtes ou de recensements nationaux fondés sur l’auto-identification. Cela permettrait à l’État d’adopter des mesures adéquates, y compris des mesures spéciales ciblées, et au Comité de mieux évaluer l’exercice des droits consacrés par la Convention au Cameroun. Le Comité réitère sa demande à l’État partie de lui fournir ces données ventilées dans son prochain rapport.

Interdiction de la discrimination raciale

7.Tout en prenant note des dispositions constitutionnelles et législatives relatives à l’égalité des droits et à la non-discrimination, et de la révision en cours du Code pénal, le Comité regrette que l’interdiction de la discrimination raciale telle que définie à l’article 1er de la Convention ne soit toujours pas pleinement intégrée dans les lois de l’État partie, y compris le Code pénal et le Code de procédure pénale (art. 1, 2, 3 et 4).

Le Comité réitère sa recommandation à l’État partie de prendre les mesures législatives nécessaires pour interdire la discrimination raciale conformément aux articles  1, 2 et 4 de la Convention et à sa r ecommandation générale nº 35 (2013) concernant la lutte contre les discours de haine raciale . Il recommande également à l’État partie d’accélérer le processus d’harmonisation du Code pénal afin de s’assurer que les actes de discrimination raciale et d’incitation à la haine raciale y soient définis et incriminés à la lumière de la Convention. Le Comité recommande à nouveau à l’État partie de prendre les mesures nécessaires afin de prévenir, interdire et éliminer la ségrégation raciale dans sa législation conformément à l’article 3 de la Convention.

Commission nationale des droits de l’homme et des libertés

8.Le Comité prend note des efforts faits par l’État partie pour la mise en conformité de sa Commission nationale des droits de l’homme et des libertés (CNDHL) avec les Principes de Paris (résolution 48/134 de l’Assemblée générale). Le Comité accueille notamment avec satisfaction l’information selon laquelle la Commission a de nouveau été accréditée au «Statut A» auprès du Comité international de coordination des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme. Il regrette toutefois que la CNDHL n’ait pas participé à l’examen du présent rapport. Le Comité note également qu’il subsiste certaines lacunes au sein de sa loi fondatrice et souligne que des amendements supplémentaires pourraient être envisagés afin de la rendre davantage conforme aux Principes de Paris. Le Comité s’inquiète plus particulièrement du fait que la CNDHL ne semble pas avoir un mandat spécifique lui imposant de traiter explicitement de la discrimination raciale au sens de la Convention.

Le Comité demande à l’État partie d’améliorer la mise en conformité de la Commission nationale des droits de l’homme et des libertés ( CNDHL ) avec les Principes de Paris, de renforcer son indépendance et de garantir son autonomie financière. Le Comité réitère également sa recommandation à l’État partie de donner à la C NDHL un fondement constitutionnel. Le Comité encourage l’État partie à travailler en étroite coopération avec la CNDHL et , ce faisant , à porter une attention accrue aux questions relatives à la discrimination raciale.

Harmonie sociale et discrimination raciale

Actions en justice pour faits de discrimination raciale

9.Le Comité salue la politique de l’État partie visant la promotion de la compréhension et la culture d’harmonie sociale entre les différentes composantes de sa société mais regrette que celui-ci invoque l’absence de plaintes et de décisions de justice en la matière comme preuve de l’absence de discrimination raciale au Cameroun (art. 6).

Se référant à sa r ecommandation générale nº 31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité rappelle à l’État partie que l’absence ou la rareté de plaintes et d’actions en justice engagées par les victimes de discrimination raciale peut révéler, notamment, une information insuffisante des victimes sur leurs droits, la peur d’une réprobation sociale ou de représailles, la crainte du coût et de la complexité des procédures judiciaires de la part de victimes dont les ressources sont limitées, un manque de confiance à l’égard des autorités de police et de justice, une attention ou une sensibilisation insuffisantes de ces autorités à l’égard des infractions de racisme .

Le Comité demande par conséquent à l’État partie de veiller à ce que sa législation contienne des dispositions appropriées et de faire en sorte que le public connaisse ses droits, y compris tous les recours juridiques existants en matière de discrimination raciale . Le Comité demande en outre à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des données statistiques concernant:

a) Les poursuites engagées et les condamnations prononcées pour des infractions liées à la discrimination raciale;

b) Le cas échéant, les mesures d’indemnisation décidées par les cours et tribunaux suite à ces condamnations.

Mesures spéciales

10.Le Comité salue certaines campagnes menées par l’État partie en faveur des groupes vulnérables, des minorités et des peuples autochtones mais constate avec préoccupation qu’aucune mesure spéciale n’a été prise ou n’est prévue dans le cadre d’une stratégie cohérente visant à accélérer la réalisation de l’égalité en droit et en pratique pour tous les Camerounais (art. 1, par. 4, et art. 2, par. 2).

Le Comité encourage l’État partie à appliquer des mesures spéciales, conformément aux articles 1 , paragraphe  4 , et 2 , paragraphe 2 , de la Convention et à sa recommandation générale nº 32 (2009) concernant la signification et la portée des mesures spéciales dans tous les domaines visés par la Convention. À cette fin, le Comité recommande à l’État partie d’adopter une stratégie globale relative à la situation des groupes minoritaires et des peuples autochtones et de coordonner ses différents programmes et politiques les concernant de manière à donner une image cohérente de ses actions et à renforcer leur efficacité.

Participation à la vie politique et à la vie publique

11.Rappelant la politique de l’État partie visant la promotion de la compréhension et la culture d’harmonie sociale entre les différentes composantes de sa société, y compris les groupes minoritaires et les peuples autochtones, le Comité souligne l’importance d’assurer la participation effective de ceux-ci à la vie politique et à la vie publique et, dans la mesure du possible, de prendre en compte cette diversité dans les institutions et organismes publics de l’État partie, dont le Parlement, l’administration publique, la police et l’appareil judiciaire (art. 5, al. c) et d)).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour garantir à toutes les composantes socioculturelles, y compris les groupes minoritaires et les peuples autochtones, cette participation effective à la vie politique et à la vie publique.

L’État partie devra veiller en particulier à l’accès à l’information, à la sensibilisation aux droits civiques ainsi qu’à la participation directe aux élections. Il devra également assurer la diversité et le multiculturalisme dans la fonction publique.

  Il devra enfin veiller à adopter des mesures concrètes propres à renforcer la participation des minorités et des peuples autochtones , y compris par l’établissement de quotas conformément à la Convention et à sa r ecommandation g énérale nº 32 (2009).

Les partis politiques devraient être encouragés à mettre au point des programmes de mentorats visant les minorités et les peuples autochtones ainsi que leur prise en compte dans les listes de candidats.

Droit au travail

12.Le Comité prend note des différentes mesures prises par l’État partie relatives au droit au travail et du processus de révision du Code du travail et souhaite que celui-ci contienne des dispositions définissant et interdisant explicitement la discrimination directe ou indirecte fondée sur tous les motifs énumérés dans la Convention. Le Comité est néanmoins préoccupé par des informations selon lesquelles certaines entreprises appliquent des écarts de salaires sur la base de l’origine ethnique (art. 5, al. e) i)).

Le Comité demande au Gouvernement de rendre compte de l’ adoption d u texte révisé du Code du travail dans son prochain rapport périodique. Le Comité demande également à l’État partie de lui indiquer les mesures prises ou envisagées pour garantir l ’ application effective du principe de l ’ égalité des chances et de traitement en matière d ’ emploi, sans aucune distinction fondée sur la race, la couleur, l’ascendance ou l ’ origine nationale ou ethnique, y compris les mesures prises en droit et en pratique pour aider les travailleurs à prouver l ’ existence d ’ une discrimination.

Bilinguisme

13.Tout en saluant les dispositions de la Constitution relatives à la promotion égale de l’anglais et du français, le Comité est préoccupé par la centralisation massive qui conduit à l’usage dominant du français et s’inquiète de l’inégalité qui en résulte pour la population anglophone. Le Comité est préoccupé en outre par les informations selon lesquelles il existe un écart entre la population anglophone et la population francophone dans l’exercice de leurs droits (art. 5 et 7).

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts visant la mise en œuvre intégrale et efficace de la politique officielle de bilinguisme et de s’assurer que la population anglophone ne soit pas victime d’inégalités notamment en matière d’emploi, d’éducation et de procédures judiciaires. Le Comité demande à l’État partie de lui communiquer des informations détaillées sur cette question dans son prochain rapport périodique. Le Comité apprécierait tout particulièrement des données ventilées par rapport au partage effectif des postes dans la fonction publique ainsi que sur les projets en place visant à promouvoir l’éducation bilingue. Le Comité recommande en outre à l’État partie de s’assurer qu’il n’existe pas de discrimination ou d’exclusion économique, sociale ou culturelle, en particulier à l’égard de la minorité anglophone.

Minorités et peuples autochtones

Définition et reconnaissance des droits des minorités et des peuples autochtones

14.Tout en se félicitant de la reconnaissance, par la Constitution du Cameroun, des minorités et des populations autochtones, ainsi que des diverses mesures prises par l’État partie pour promouvoir et protéger leurs droits, le Comité est préoccupé par la discrimination et la marginalisation dont ces différents groupes continuent de faire l’objet dans la jouissance de leurs droits civils, politiques, économiques, sociaux et culturels. Le Comité déplore en outre la lenteur du processus devant aboutir à la définition des peuples autochtones et à l’adoption de mesures adéquates destinées à garantir leurs droits (art. 5, al. d) et e)).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) D ’accélérer le processus visant à achever l’étude visant l’identification des populations au Cameroun pouvant être considérées comme autochtones, et de s’assurer que les conclusions qui en découlent et les recommandations s’y référant soient traduites en activités et programmes concrets ayant un impact positif sur l’exercice , par ses populations autochtones , de leurs droits;

b) D e faire aboutir ses efforts visant à adopter le projet de loi sur les droits des populations autochtones. Tenant compte de sa recommandation générale nº  23 (1997) concernant les droits des populations autochtones, d’intégrer dans ledit projet de loi la définition des peuples autochtones telle qu’adoptée par la Déclaration des Nations Unies sur les droits des peuples autochtones ;

c) De multiplier ses efforts afin de continuer à garantir la participation des peuples autochtones, en particulier les Pygmées et les Mbororos , au processus d’élaboration de ladite loi et des mesures qui en découleront.

Enfin, le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des informations détaillées sur la situation des femmes et des filles appartenant aux groupes minoritaires et aux populations autochtones identifiées et sur les mesures prises et envisagées afin d’assurer qu’elles puissent exercer tous leurs droits, y compris le droit à l’égalité et à la non-discrimination.

Accès à l’éducation

15.Le Comité reconnaît les efforts de l’État partie en vue d’améliorer l’accès des enfants autochtones à l’éducation, notamment en élaborant des mesures spécifiques liées à l’adaptation du système scolaire à la culture des populations autochtones, et ceux en vue de favoriser l’accès à l’éducation pour les filles appartenant à ces groupes et ce au même titre que les garçons. Cependant, le Comité demeure préoccupé par les nombreux obstacles qui subsistent à la réalisation pleine et effective du droit à l’éducation pour les minorités et les peuples autochtones.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts visant à prévenir et à éliminer la discrimination que subissent les enfants autochtones et membres de groupes minoritaires dans l’exercice de leur droit à l’éducation. Le Comité recommande en outre à l’État partie de:

a) G arantir à ces enfants l’accès à tous les niveaux et à toutes les formes d’enseignement public, sans discrimination, notamment en leur garantissant un accès totalement gratuit à l’école primaire et l’obtention d’actes de naissance indispensables à leur inscription;

b) C ontinuer de prendre les mesures nécessaires pour adapter le système d’enseignement à leur mode de vie et de culture, y compris en se basant sur les conclusions tirées de l’évaluation des projets pilotes mis en œuvre dans ce sens;

c) C ontinuer de développer et de mettre en œuvre, en concertation avec les groupes minoritaires et les peuples autochtones, des programmes d ’ éducation répondant à leurs besoins particuliers et couvrant leur histoire, leurs connaissances et techniques, et leurs systèmes de valeurs;

d) P orter une attention particulière à la situation des filles appartenant aux groupes minoritaires et aux peuples autochtones ainsi qu’aux mesures spécifiques nécessaires afin d’assurer leur accès égal à l’éducation , et ce , à tous les niveaux.

Droits fonciers

16.Tout en prenant note des mesures prises par l’État partie en faveur des peuples autochtones, le Comité est préoccupé par les atteintes aux droits fonciers de ceux-ci. Il déplore en outre que la législation relative à la propriété foncière en vigueur ne prenne pas en compte les traditions, coutumes et régimes fonciers des peuples autochtones ainsi que leur mode de vie, en particulier parce qu’elle subordonne la reconnaissance de la propriété foncière ainsi que l’indemnisation à la mise en valeur des terres. Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles le droit à la consultation tel qu’il est prévu dans la législation et le droit au consentement préalable, libre et éclairé au sujet des projets et initiatives concernant les peuples autochtones ne soient pas pleinement respectés par l’État partie. Il est également préoccupé par le fait que les peuples autochtones ne soient pas toujours consultés au sujet des projets réalisés sur leurs terres ou ayant une incidence sur leurs droits (art. 5).

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures urgentes et adéquates pour protéger et renforcer les droits des populations autochtones à la terre. Il demande notamment au Cameroun de continuer d’assurer la participation effective des populations autochtones aux travaux en cours relatifs à la relecture de sa loi foncièr e (ordonnance de 1974) et de sa loi forestière de 1994 afin qu’elles puissent formuler des recommandations à l’attention du comité responsable de la révision de la législation foncière.

À la lumière de sa r ecommandation générale nº  23 (1997) concernant les droits des peuples autochtones, le Comité recommande à l’État partie, en consultation avec les peuples autochtones, de :

a) C onsacrer dans la législation le droit des peuples autochtones de posséder, utiliser, mettre en valeur et contrôler leurs terres, territoires et ressources;

b) C onsulter les populations autochtones concernées et coopérer avec celles ‑ ci en vue d’obtenir leur consentement, donné librement et en connaissance de cause, avant l’approbation de tout projet ayant des incidences sur leurs terres ou territoires et autres ressources, notamment en ce qui concerne la mise en valeur, l’utilisation ou l’exploitation des ressources minérales, hydriques ou autres;

c) G arantir aux populations autochtones une indemnisation juste et équitable pour les terres, territoires et ressources naturelles qu’elles possédaient traditionnellement ou occupaient, utilisaient et qui ont été confisqués, pris, occupés, exploités ou dégradés sans leur consentement préalable, donné librement et en connaissance de cause;

d) S ’assurer que la procédure légale d’immatriculation des terres respecte dûment les coutumes, traditions et régimes fonciers des peuples autochtones concernés sans discrimination aucune.

Accès à la justice

17.Le Comité demeure inquiet en ce qui concerne les obstacles qui subsistent dans l’exercice, par certaines minorités et populations autochtones, de leur droit à l’accès à la justice, notamment l’égalité d’accès à la justice et en particulier la disponibilité des services d’interprétation appropriés à tous les stades de la procédure (art. 5 et 6).

Le Comité recommande à l’État partie d’assurer aux minorités et aux peuples autochtones un accès égal à la justice, et notamment de:

a) R éduire les distances séparant les juridictions nationales des zones où vivent certains groupes minoritaires et populations autochtones;

b) I nstaurer des services officiels d’interprétation dans la langue des groupes minoritaires et des peuples autochtones au sein des juridictions nationales, y  compris les juridictions traditionnelles .

Réfugiés et demandeurs d’asile

18.Le Comité se félicite de l’accueil des réfugiés au Cameroun et reconnaît les efforts déployés par l’État partie afin de répondre de manière adéquate au présent afflux dû aux conflits sous-régionaux. Le Comité est néanmoins préoccupé par des informations faisant état de plusieurs cas de détention de demandeurs d’asile sur des périodes de temps plus longues que celle prévue dans la législation nationale et souvent dans des conditions irrespectueuses de leur statut et de leur dignité. Le Comité s’inquiète également de la situation à laquelle sont confrontés certains réfugiés dans le domaine de l’accès à l’emploi et du respect de leurs droits en tant que travailleurs, notamment au risque de licenciements abusifs par certains employeurs qui profitent du statut socioéconomique vulnérable de ces personnes (art. 1 et 5).

Le Comité prie l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour permettre aux réfugiés et aux demandeurs d’asile de jouir pleinement de leurs droits économiques et sociaux, en particulier leur droit au travail.

Le Comité demande à l’État partie de s’assurer que, lors d’une ouverture d ’ enquête en vertu de l’article 8, alinéa 1, de la loi portant statut des réfugiés au Cameroun, la détention des demandeurs d ’ asile ne soit utilisée qu’en dernier recours et, le cas échéant, pour une période aussi courte que possible, que les demandeurs d ’ asile ne soient pas placés dans la même cellule de détention que des suspects et que des alternatives possibles à la détention soient envisagées.

Le Comité demande à l’État partie de veiller plus particulièrement à la situation des femmes et des filles réfugiées qui pourraient souffrir d’un e double discrimination.

Citoyenneté et risque d’apatridie

19.Saluant les efforts de l’État partie afin de doter la population de pièces d’identité, en particulier à travers les campagnes récentes, le Comité s’inquiète néanmoins du nombre important de personnes vivant sur le territoire national et dépourvues de documents d’identification, ce qui est de nature à limiter l’exercice de leurs droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels (art. 1, 2 et 5).

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses efforts visant à délivrer à tous ses citoyens des documents officiels requis par la citoyenneté et de veiller plus particulièrement à la situation des populations vulnérables, y compris les peuples autochtones et groupes minoritaires et les populations de la péninsule de Bakassi .

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

20.Ayant à l’esprit le caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions se rapportent directement à la discrimination raciale, notamment:

•La Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (1948);

•La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (1990);

•La Convention de l’UNESCO concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement (1960);

•La Convention nº 169 (1989) de l’OIT concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants;

•La Convention relative au statut des apatrides (1954) et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie (1961).

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

21.À la lumière de sa recommandation générale nº 33 (2009) concernant le suivi de la Conférence d’examen de Durban, et reconnaissant les efforts déployés par l’État partie dans ce domaine à ce jour, le Comité recommande à celui-ci de donner pleinement effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du Document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, lorsqu’il applique la Convention dans son ordre juridique interne. Le Comité prie l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour appliquer la Déclaration et le Programme d’action de Durban au plan national.

Dialogue avec la société civile

22.Le Comité recommande à l’État partie de consulter les organisations de la société civile œuvrant dans le domaine de la protection des droits de l’homme et d’intensifier son dialogue avec elles, et en particulier avec celles qui luttent contre la discrimination raciale, y compris lors de l’élaboration de son prochain rapport périodique mais également en dehors de cet exercice. Le Comité recommande également à l’État partie de mettre en place des mesures visant à encourager le développement et à renforcer les capacités d’une société civile reflétant réellement les différents groupes présents sur son territoire, et à encourager la participation de représentants des groupes de minorités et des populations autochtones au sein de ces organisations.

Article 14 de la Convention

23.Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention.

Diffusion

24.Le Comité recommande à l’État partie de continuer de faire en sorte que ses rapports périodiques soient facilement accessibles au public au moment de leur présentation et que les observations du Comité s’y rapportant soient diffusées en temps opportun, dans les langues officielles de l’État et les autres langues couramment utilisées, y compris dans les régions. De plus, le Comité demande à l’État partie de continuer de diffuser la Convention ainsi que les recommandations générales du Comité auprès de tous les intéressés.

Suite donnée aux observations finales

25.Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur révisé, le Comité demande à l’État partie de l’informer, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, de la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 10, 11, 14 et 18 ci-dessus.

Paragraphes revêtant une importance particulière

26.Le Comité souhaite aussi attirer l’attention de l’État partie sur l’importance particulière que revêtent les recommandations figurant aux paragraphes 12, 13, 16 et 21 et demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes et appropriées qu’il aura prises pour mettre en œuvre, d’une manière effective, ces recommandations.

Élaboration du prochain rapport

27.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses vingt-deuxième et vingt-troisième rapports périodiques en un seul document, d’ici au 24 juillet 2017, en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention, adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1), et de répondre à tous les points soulevés dans les présentes observations finales. Le Comité engage aussi l’État partie à respecter la limite de 40 pages fixée pour les rapports spécifiques à un instrument particulier et la limite de 60 à 80 pages fixée pour le document de base commun (voir les directives harmonisées figurant dans le document HRI/GEN.2/Rev.6, chap. I, par. 19).